Language of document : ECLI:EU:T:2023:281

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

24 mai 2023 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative BimboBIKE – Marque nationale verbale antérieure BIMBO – Motif relatif de refus – Atteinte à la renommée – Article 8, paragraphe 5, du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑509/22,

Bimbo, SA, établie à Madrid (Espagne), représentée par Me J. Carbonell Callicó, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. D. Gája, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Bottari Europe Srl, établie à Pomponesco (Italie),

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mme A. Marcoulli, présidente, M. S. Frimodt Nielsen (rapporteur) et Mme V. Tomljenović, juges,

greffier : M. T. Henze, greffier faisant fonction,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Bimbo, SA, demande l’annulation de la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 16 juin 2022 (affaire R 2110/2021-1) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 17 juillet 2020, l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, Bottari Europe Srl, a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

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3        La marque demandée désignait initialement les produits et les services relevant des classes 3, 8, 9, 11, 12, 21, 28 et 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 3 : « Produits de nettoyage pour les cycles ; détergents ; savons ; produits dégraissants » ;

–        classe 8 : « Clés [outils] » ;

–        classe 9 : « Lunettes [optique] ; protections pour la tête ; porte-lunettes ; ordinateurs pour bicyclette ; gants de travail ; gants pour la protection contre les accidents » ;

–        classe 11 : « Feux arrière de véhicules ; feux arrière de bicyclettes » ;

–        classe 12 : « Bicyclettes ; bicyclettes électriques ; vélos de sport ; vélos de cyclotourisme ; vélos tout-terrain [VTT] ; bicyclettes à moteur ; chambres à air et enveloppes ; pneus ; sonnettes de bicyclettes ; jantes ; roues ; jantes de roues ; chaînes de bicyclette ; amortisseurs pour bicyclettes ; freins de bicyclette ; indicateurs de direction pour bicyclettes ; guidons de vélos ; pompes pour pneus de bicyclette ; rayons de bicyclettes ; pare-jupes pour bicyclettes ; selles de bicyclette ; cadres de bicyclette ; béquilles de bicyclette ; pédales ; garde-boues de bicyclette ; câbles porte-bagages pour véhicules ; antivols ; porte-paquets ; sièges de sécurité pour enfants pour véhicules ; rétroviseurs pour bicyclettes ; pneus sans chambre pour bicyclettes ; pneus de bicyclette ; engrenages pour bicyclettes ; roues de bicyclette ; rubans de poignées de guidons pour les vélos ; poignées de guidon pour vélos ; housses pour pédales de cycles ; porte-vélos [supports] ; braquets de changement de vitesses [pièces de bicyclettes] ; monte-charge à moteur ; scooters mobiles ; scooters électriques ; scooters ; chariots pour véhicules ; chariots élévateurs pour vélos ; chariots porte-bicyclettes ; sacoches de bicyclettes ; paniers porte-gourdes pour vélos ; sacoches spéciales pour bicyclettes ; portefeuilles porte-paquets ; support de téléphones/tablettes/navigateurs pour vélos ; porte-gourdes pour bicyclettes ; bidons pour bicyclettes ; nécessaire de réparation de chambre à air de bicyclettes » ;

–        classe 21 : « Gourdes ; gourdes de sport » ;

–        classe 28 : « Trottinettes [jouets] ; tricycles pour enfants en bas âge [jouets] ; scooters pour les enfants ; genouillères de protection pour la pratique du cyclisme ; coudières de protection pour la pratique du cyclisme ; gants [accessoires de jeux] ; gants pour le sport ; gants de protection pour vélos » ;

–        classe 35 : « Services de vente au détail ou en gros en ligne de bicyclettes et accessoires pour bicyclettes ; services et informations au consommateur ; présentation de produits dans des médias de communication ; présentation de vélos et accessoires de vélos sur l’internet ; publicité ».

4        Le 27 novembre 2020, la requérante a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et les services visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était fondée notamment sur la marque espagnole verbale antérieure BIMBO, déposée le 5 janvier 2006 et enregistrée le 16 juin 2006 sous le numéro M2689432, pour des produits compris dans les classes 5 et 29, ainsi que, notamment, pour les produits suivants compris dans la classe 30 : « Boissons à base de café et boissons au café à base de lait, lait en poudre, cacao, chocolat, céréales, fruits, sucre, herbes ou épices ou leurs combinaisons ; boissons à base de thé, infusions ; cacao, boissons à base de cacao, chocolat et extraits de chocolat en poudre, en granulés ou liquides ; sucre, riz, tapioca, sagou, farines et préparations à base de céréales, pain, biscuits, gâteaux, pâtisserie et confiserie, glaces ; miel, mélasse ; levure, poudre à lever ; sel, moutarde, poivre, vinaigre, condiments ; sauces aux fruits, épices ; herbes pour boissons ; mélanges principalement composés d’herbes avec adjonction de fruits séchés pour préparations pour boissons ; extraits d’herbes à usage non médical ; glaçons ». La renommée a été revendiquée pour des produits compris dans la classe 30 en Espagne.

6        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et à l’article 8, paragraphe 5, du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

7        Le 11 octobre 2021, la division d’opposition a partiellement fait droit à l’opposition sur le fondement de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 et a rejeté la demande d’enregistrement pour les produits suivants :

–        classe 3 : « Détergents ; savons ; produits dégraissants » ;

–        classe 21 : « Gourdes ; gourdes de sport » ;

–        classe 28 : « Trottinettes [jouets] ; tricycles pour enfants en bas âge [jouets] ; scooters pour les enfants ; gants [accessoires de jeux] ».

8        L’enregistrement de la marque demandée a, en revanche, été autorisé pour les autres produits et services visés par la demande d’enregistrement.

9        Le 13 décembre 2021, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition en tant que l’opposition avait été rejetée en ce qui concerne les autres produits et services visés par la demande d’enregistrement.

10      Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours sur le fondement de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 et condamné la requérante aux dépens exposés aux fins de la procédure de recours.

11      En substance, la chambre de recours a considéré, à l’instar de la division d’opposition, que la marque antérieure jouissait d’une très forte renommée en Espagne pour le pain. Elle a également confirmé les conclusions de la division d’opposition selon lesquelles les signes étaient très similaires sur le plan visuel et présentaient à tout le moins un degré élevé de similitude phonétique. Elle a aussi indiqué que la marque antérieure possédait un caractère distinctif normal.

12      La chambre de recours a ensuite procédé, en substance, à une appréciation globale des facteurs pertinents aux fins de caractériser l’existence d’un lien entre les marques en conflit. À cet égard, elle a conclu qu’il n’existait aucun lien entre les marques en ce qui concerne les produits et services liés au cyclisme. En particulier, la chambre de recours a rejeté l’argument de la requérante selon lequel un tel lien pourrait être établi parce que les consommateurs pertinents étaient susceptibles de manger du pain et qu’ils pouvaient acheter les produits visés par la demande d’enregistrement dans de grands supermarchés en même temps que du pain, en considérant que les produits visés par la demande d’enregistrement n’étaient pas des articles de consommation courante et étaient très éloignés du monde du pain. En outre, la chambre de recours a considéré qu’il n’avait pas été démontré que les producteurs de pain se diversifieraient dans le domaine du cyclisme. Elle a également relevé que la requérante ne critiquait pas l’appréciation de la division d’opposition en ce qui concerne les services visés par la demande d’enregistrement.

13      Dans ces circonstances, la chambre de recours a exclu que l’utilisation de la marque demandée puisse tirer indûment profit du caractère distinctif de la marque antérieure ou de la renommée que celle-ci a acquise pour le pain. Elle a également indiqué qu’il était improbable que la marque antérieure, qui jouissait d’une renommée pour certaines qualités de pain ou de denrées alimentaires en général, transfère l’image de ces qualités aux produits et services visés par la marque demandée. Compte tenu de la divergence entre les produits et services visés par la demande d’enregistrement et les produits couverts par la marque antérieure, le public pertinent, qui ne les associerait pas, ne serait pas non plus influencé par la renommée de la marque antérieure lorsqu’il est confronté aux produits et services visés par la demande d’enregistrement. Selon la chambre de recours, l’autre partie ne tirerait donc aucun avantage commercial de la renommée de la marque antérieure.

 Conclusions des parties

14      La requérante conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et la partie intervenante aux dépens, y compris ceux afférents à la procédure devant la chambre de recours.

15      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :  

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens exposés par lui en cas de convocation à une audience.

 En droit

16      La requérante soulève, en substance, deux moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 et, le second, de la violation de l’article 109 du règlement 2017/1001.

17      L’EUIPO conteste cette argumentation.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 

18      Aux termes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure enregistrée au sens du paragraphe 2, la marque demandée est refusée à l’enregistrement si elle est identique ou similaire à une marque antérieure, indépendamment du fait que les produits ou services pour lesquels elle est demandée sont identiques, similaires ou non similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque cette marque antérieure est une marque de l’Union européenne qui jouit d’une renommée dans l’Union ou une marque nationale qui jouit d’une renommée dans l’État membre concerné, et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de cette marque antérieure ou leur porterait préjudice.

19      S’agissant du risque visé par l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, il convient de relever que, si, certes, la fonction première d’une marque consiste en sa fonction d’origine, il n’en demeure pas moins qu’une marque agit également comme moyen de transmission d’autres messages concernant, notamment, les qualités ou caractéristiques particulières des produits ou des services qu’elle désigne, ou les images et sensations qu’elle projette. En ce sens, toute marque possède une valeur économique intrinsèque autonome et distincte par rapport à celle des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée. Les messages véhiculés notamment par une marque renommée ou qui lui sont associés confèrent à celle-ci une valeur importante et digne de protection, et ce d’autant plus que, dans la plupart des cas, la renommée d’une marque est le résultat d’efforts et d’investissements considérables de son titulaire. Ainsi, l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 assure la protection d’une marque renommée à l’égard de toute demande de marque identique ou similaire qui pourrait porter atteinte à son image, même si les produits visés par la marque demandée ne sont pas analogues à ceux pour lesquels la marque antérieure a été enregistrée [arrêt du 22 mars 2007, Sigla/OHMI – Elleni Holding (VIPS), T‑215/03, EU:T:2007:93, point 35].

20      Il ressort du libellé de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 que l’application de cette disposition est soumise aux conditions cumulatives tenant, premièrement, à l’identité ou à la similitude des signes, deuxièmement, à l’existence d’une renommée de la marque antérieure invoquée à l’appui de l’opposition et, troisièmement, à l’existence d’un risque de voir l’usage sans juste motif de la marque demandée tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou leur porter préjudice (voir arrêt du 28 juin 2018, EUIPO/Puma, C‑564/16 P, EU:C:2018:509, point 54 et jurisprudence citée).

21      C’est à la lumière de ces considérations liminaires qu’il convient d’examiner les arguments invoqués par la requérante au soutien du présent moyen. En premier lieu, la requérante se prévaut de la très grande similitude des signes et du risque d’association qui y est lié. En deuxième lieu, elle met en avant la renommée de la marque antérieure ainsi que le risque qu’il y soit porté préjudice. En troisième lieu, elle soutient qu’il existe plusieurs contradictions dans l’appréciation du lien entre les marques effectuée par l’EUIPO.

22      D’emblée, il convient d’indiquer que l’appréciation de la chambre de recours au titre de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 a été effectuée du point de vue du public espagnol pertinent, concerné par la marque nationale antérieure pour laquelle la renommée était invoquée.

 Sur la similitude des signes

23      Il y a lieu de relever que le degré de similitude défini par la chambre de recours sur les plans visuel ou phonétique n’est pas contesté. En effet, les parties reprennent, l’une et l’autre, les conclusions de la chambre de recours dans la décision attaquée selon lesquelles, d’une part, le signe demandé est très similaire au signe antérieur sur le plan visuel et, d’autre part, ces signes présentent à tout le moins un degré élevé de similitude sur le plan phonétique. Ainsi que les parties le soulignent, il n’y a pas lieu de remettre en cause ces conclusions, lesquelles reposent à juste titre sur les éléments mentionnés à cet égard dans la décision attaquée.

24      Il y a également lieu de relever que les parties n’évoquent pas, ni a fortiori ne contestent, l’absence de similitude entre les signes sur le plan conceptuel, la chambre de recours s’étant limitée à rappeler, dans la décision attaquée, le constat effectué par la division d’opposition, selon lequel les signes ne sont pas similaires du point de vue conceptuel. Dans la mesure où ce constat n’est pas expressément repris par la chambre de recours au stade de l’appréciation du lien entre les marques, il convient de considérer que l’absence de similitude entre les signes sur le plan conceptuel n’a pas joué un rôle essentiel dans cette appréciation en comparaison du degré de similitude sur le plan visuel  et sur le plan phonétique qui ont été définis dans la décision attaquée.

 Sur la renommée de la marque antérieure

25      La requérante se prévaut de la renommée élevée, voire extrêmement élevée, de la marque antérieure pour le pain en Espagne. En particulier, elle fait valoir qu’une renommée élevée constitue déjà, en soi, un indice de risque ou d’avantage indûment tiré par la marque demandée par rapport à chacun des produits et services qui ne sont pas semblables à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée. En effet, plus l’évocation de la marque antérieure est immédiate, plus grand est le risque que l’utilisation du signe demandé tire indûment profit de la renommée de la marque antérieure.

26      Par ailleurs, la requérante rappelle qu’elle doit prouver que l’usage de la marque demandée tire un avantage indu du caractère distinctif ou de la renommée de sa marque antérieure ou cause un préjudice à ce caractère distinctif ou à cette renommée. En l’espèce, il existe, selon la requérante, un risque de ternissement ou de dégradation de la marque antérieure, dans la mesure où celle-ci est tellement connue que, à la lecture du mot « bimbo », le public songe immédiatement à la marque de la requérante. Selon la requérante, la marque demandée, qui est très similaire à la marque antérieure, affaiblirait cette dernière et lui ferait perdre son association directe avec les produits alimentaires et, plus particulièrement, le pain. La requérante allègue également l’existence d’un risque de parasitisme, dès lors que la marque demandée s’inscrit dans le sillage d’une marque renommée.

27      À cet égard, il ressort de la décision attaquée que, comme la division d’opposition auparavant, la chambre de recours a considéré que la marque antérieure jouissait d’une « très forte renommée en Espagne en ce qui concerne le “pain”  compris dans la classe 30 ».

28      Les parties indiquent partager ce constat,  qu’il n’y a pas lieu de remettre en cause.

29      Les parties s’opposent toutefois sur les conséquences à tirer de l’intensité de la renommée définie par la chambre de recours, s’agissant de l’appréciation de l’existence des atteintes visées à l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001. La requérante allègue, à cet égard, que la « très forte renommée » de la marque antérieure, relevée par la chambre de recours, équivaut à une « renommée exceptionnellement élevée », laquelle suffirait pour caractériser une atteinte à l’intérêt protégé par la disposition précitée. Pour sa part, l’EUIPO fait valoir que d’autres facteurs que la seule intensité de la marque antérieure sont pertinents pour apprécier l’existence d’une telle atteinte en l’espèce.

30      Sur le plan des principes, en effet, il est possible, notamment dans le cas d’une opposition fondée sur une marque bénéficiant d’une renommée exceptionnellement élevée, que la probabilité d’un risque futur non hypothétique de préjudice porté à la marque antérieure ou de profit indûment tiré par la marque demandée soit tellement évidente que l’opposant n’a besoin d’invoquer et de prouver aucun autre élément factuel à cette fin [arrêt du 17 mars 2010, Mäurer + Wirtz/OHMI – Exportaciones Aceiteras Fedeoliva (tosca de FEDEOLIVA), T‑63/07, EU:T:2010:94, point 40].

31      Pour autant, il est également possible que la marque demandée n’apparaisse pas, à première vue, susceptible de créer l’un des risques visés par l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 pour la marque antérieure renommée, en dépit de son identité ou de sa similarité avec cette dernière, auquel cas ledit risque futur non hypothétique de préjudice ou de profit indûment tiré doit être démontré à l’aide d’autres éléments, qu’il appartient à l’opposant d’invoquer et de prouver (voir arrêt du 17 mars 2010, tosca de FEDEOLIVA, T‑63/07, EU:T:2010:94, point 40 et jurisprudence citée).

32      En effet, ainsi que le fait valoir à juste titre l’EUIPO, les éléments de preuve produits par la requérante au cours de la procédure d’opposition et repris dans la décision attaquée ne permettent pas d’établir que la très grande renommée de la marque antérieure en Espagne pour le pain était comparable à celle d’une marque bénéficiant d’une renommée exceptionnellement élevée au sens de la jurisprudence précitée.

33      À cet égard, à la différence de constats effectués dans d’autres affaires, ces éléments de preuve ne sont pas de nature à démontrer que la marque antérieure est intrinsèquement très distinctive et reconnue dans pratiquement tous les contextes [voir, en ce sens, arrêts du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 51, et du 8 mai 2018, Luxottica Group/EUIPO – Chen (BeyBeni), T‑721/16, non publié, EU:T:2018:264, point 86]. Il ressort effectivement des différents documents produits par la requérante au cours de la procédure d’opposition qu’ils concernent soit le pain ou le secteur alimentaire, et non d’autres secteurs, et qu’ils restent trop généraux ou trop limités dans le temps pour permettre d’établir la perception de la marque antérieure dans d’autres contextes que celui de l’alimentation.

34      En conséquence, compte tenu, notamment, des éléments de preuve produits quant à la renommée de la marque antérieure, il appartenait bien à la chambre de recours d’apprécier l’existence de l’atteinte alléguée à l’intérêt protégé par l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 au regard de l’ensemble des facteurs considérés pertinents et non seulement de l’intensité de la renommée de la marque antérieure. La requérante ne saurait donc alléguer qu’elle n’avait pas besoin d’invoquer et de prouver d’autres éléments factuels que l’intensité de la renommée de la marque antérieure pour établir la probabilité d’un risque futur non hypothétique de préjudice porté à la marque antérieure ou de profit indûment tiré par la marque demandée.

 Sur le lien entre les marques en conflit et les atteintes visées à l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001

35      La requérante fait valoir que l’appréciation du lien entre les marques en conflit par la chambre de recours présente plusieurs contradictions. Ainsi, il serait, selon elle, contradictoire de constater, au stade de la division d’opposition, l’existence d’un lien entre les marques en ce qui concerne seulement certains produits, tout en ne constatant pas, au même stade et à celui de la chambre de recours, l’existence de ce lien pour d’autres produits. Selon la requérante, ces produits sont pourtant tous destinés au même public et ont les mêmes canaux de distribution, même s’ils peuvent être placés dans des rayons différents dans les supermarchés.

36      Ainsi, tant les trottinettes, tricycles, gourdes et produits similaires que les bicyclettes et les autres produits visés dans la demande d’enregistrement pourraient, selon la requérante, être achetés dans un supermarché en même temps que les achats courants, dont le pain. Soutenir, comme le fait la chambre de recours au point 42 de la décision attaquée, que l’achat d’une bicyclette dans un supermarché ne constituerait pas un achat courant contredirait le raisonnement utilisé pour refuser la demande d’enregistrement en ce qui concerne « les trottinettes [jouets], les tricycles pour enfants en bas âge [jouets], les scooters pour les enfants ou gants [accessoires de jeux] » de la classe 28, lesquels seraient alors tout autant des produits ne faisant pas partie des achats courants.

37      De même, la requérante fait valoir qu’il est contradictoire d’indiquer, comme le fait la chambre de recours au point 43 de la décision attaquée, que « [l]a destination, les fabricants et les chaînes de distribution [des produits pour lesquels l’opposition est refusée] sont clairement différents, même lorsqu’ils sont proposés dans les mêmes supermarchés, comme l’affirme [la requérante], ils sont placés dans des rayons très différents », dès lors qu’un tel argument n’a pas empêché la division d’opposition d’accepter l’opposition en ce qui concerne les détergents, les savons et les produits dégraissants relevant de la classe 3, lesquels sont également placés dans des rayons bien différenciés de l’emplacement où le supermarché propose du pain.

38      En outre, la requérante soutient qu’il ne peut pas être allégué que les produits visés par la demande d’enregistrement ne peuvent se trouver que dans des magasins spécialisés et que, par conséquent, ils ne coïncident pas avec les produits de la marque antérieure. Pour réfuter cette allégation, la requérante produit trois captures d’écran. La première indique que la requérante commercialise une barre énergétique protéinée, les deux autres que des produits protéinés, dont des barres énergétiques, sont commercialisés par d’autres producteurs sur deux sites de vente en ligne spécialisés dans le cyclisme.

39      À titre liminaire, il convient de relever que, selon une jurisprudence constante, les atteintes visées par l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, lorsqu’elles se produisent, sont la conséquence d’un certain degré de similitude entre la marque demandée et la marque antérieure, en raison de laquelle le public concerné effectue un rapprochement entre les deux, c’est-à-dire établit un lien entre celles-ci, alors même qu’il ne les confond pas [voir, en ce sens, arrêt du 25 mai 2005, Spa Monopole/OHMI – Spa-Finders Travel Arrangements (SPA-FINDERS), T‑67/04, EU:T:2005:179, point 41 et jurisprudence citée ; voir également, par analogie, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 30 et jurisprudence citée]. L’existence d’un tel lien dans l’esprit du public pertinent entre la marque demandée et la marque antérieure est, par conséquent, une condition essentielle pour l’application de ladite disposition [voir arrêts du 10 mai 2007, Antartica/OHMI – Nasdaq Stock Market (nasdaq), T‑47/06, non publié, EU:T:2007:131, point 53 et jurisprudence citée, et du 11 décembre 2014, Coca-Cola/OHMI – Mitico (Master), T‑480/12, EU:T:2014:1062, point 26 et jurisprudence citée].

40      Il ressort aussi de la jurisprudence que l’existence d’un lien entre les marques en conflit dans l’esprit du public pertinent doit être appréciée globalement, en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce, parmi lesquels figurent le degré de similitude entre les marques en conflit, la nature des produits ou des services concernés par les marques en conflit, y compris le degré de proximité ou de dissemblance de ces produits ou services ainsi que le public concerné, l’intensité de la renommée de la marque antérieure, le degré de caractère distinctif, intrinsèque ou acquis par l’usage, de la marque antérieure et l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public [ordonnance du 30 avril 2009, Japan Tobacco/OHMI, C‑136/08 P, non publiée, EU:C:2009:282, point 26, et arrêt du 6 juillet 2012, Jackson International/OHMI – Royal Shakespeare (ROYAL SHAKESPEARE), T‑60/10, non publié, EU:T:2012:348, point 21 ; voir également, par analogie, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, points 41 et 42].

41      Selon la jurisprudence, il ne saurait être exclu que le public concerné par les produits ou les services pour lesquels la marque antérieure a été enregistrée soit tout à fait distinct de celui concerné par les produits ou les services pour lesquels la marque postérieure a été enregistrée et que la marque antérieure, quoique renommée, soit inconnue du public visé par la marque postérieure. En pareil cas, le public visé par chacune des deux marques peut ne jamais être confronté à l’autre marque, de sorte qu’il n’établira aucun lien entre ces marques. En outre, même si les publics concernés par les produits ou les services pour lesquels les marques en conflit sont respectivement enregistrées sont les mêmes ou se recoupent dans une certaine mesure, lesdits produits ou services peuvent être si dissemblables que la marque postérieure sera insusceptible d’évoquer la marque antérieure dans l’esprit du public pertinent. Dès lors, la nature des produits ou des services pour lesquels les marques en conflit ont été respectivement enregistrées doit être prise en considération aux fins d’apprécier l’existence d’un lien entre ces marques (voir, par analogie, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, points 48 à 50).

42      À défaut de l’existence d’un tel lien dans l’esprit du public, l’usage de la marque postérieure n’est pas susceptible de tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure, ou de lui porter préjudice (voir ordonnance du 30 avril 2009, Japan Tobacco/OHMI, C‑136/08 P, non publiée, EU:C:2009:282, point 27 et jurisprudence citée).

43      En l’espèce, force est de relever, comme le fait valoir l’EUIPO, que l’argumentation de la requérante n’est pas de nature à remettre en cause le bien-fondé du raisonnement exposé par la chambre de recours dans la décision attaquée, au terme d’une appréciation d’ensemble des facteurs pertinents, pour établir l’absence de lien entre les marques en conflit.

44      En effet, c’est à juste titre que, pour écarter les risques de préjudice allégués par la requérante, la chambre de recours a tenu compte, du point de vue du public espagnol concerné, non seulement du degré de similitude des signes, de l’intensité de la renommée de la marque antérieure, mais aussi du degré de proximité entre les produits et services au regard du public concerné et du degré de caractère distinctif de la marque antérieure.

45      Ainsi, dans le cadre de cette appréciation, la chambre de recours a dûment relevé qu’il existait un degré élevé de similitude entre les signes sur les plans visuel et phonétique (voir point 23 ci-dessus) et que la marque antérieure jouissait d’une très forte renommée en Espagne pour le pain. La requérante ne peut donc pas alléguer qu’il n’a pas été tenu compte de ces facteurs au titre de l’analyse effectuée par la chambre de recours.

46      C’est également à juste titre que la chambre de recours a considéré que la marque antérieure présentait un caractère distinctif normal et qu’il n’avait pas été démontré que le public concerné pouvait établir un lien entre les produits ou services en cause, dans la mesure, notamment, où les produits et services visés par la demande d’enregistrement étaient trop éloignés des produits pour lesquels la marque antérieure jouissait d’une renommée.

47      À cet égard, il convient d’emblée de rappeler que la requérante n’expose aucun argument concernant les services visés par la demande d’enregistrement et se borne à critiquer le degré de proximité ou de dissemblance entre les produits pour lesquels la demande d’enregistrement n’a pas été précédemment rejetée par la décision de la division d’opposition et les produits pour lesquels la marque antérieure est renommée.

48      En ce qui concerne l’appréciation du degré de proximité ou de dissemblance des produits en cause, il y a lieu de relever que la chambre de recours a tenu compte de l’argument de la requérante selon lequel il était possible pour le public concerné d’acheter dans des supermarchés à la fois du pain et des produits visés par la demande d’enregistrement, ces derniers se rapportant de manière générale au domaine du cyclisme. Cependant, la chambre de recours a également considéré que cet argument n’était pas déterminant étant donné que, dans ces supermarchés, les produits en cause étaient proposés dans des rayons très différents, à savoir le rayon boulangerie par opposition aux rayons de sport ou de bricolage (voir points 42 et 43 de la décision attaquée).

49      En outre, la chambre de recours a souligné que le pain, article d’achat courant, relevait d’une autre catégorie de produits que les produits visés par la demande d’enregistrement, à savoir les bicyclettes et les produits connexes, qui ne pouvaient pas être considérés comme des articles d’achat courant. La chambre de recours a mis ici en exergue l’absence de tout élément matériel produit par la requérante permettant d’établir l’existence d’un lien, pour le public concerné ou même pour les producteurs de pain, entre le pain et les produits relevant du domaine du cyclisme (voir points 42 à 49 de la décision attaquée). La requérante n’expose également aucun argument pertinent à l’encontre de ce raisonnement dans le cadre de la présente instance.

50      Les arguments présentés par la requérante à l’encontre de cette partie de la décision attaquée visent, en effet, soit à réitérer son argumentation en se prévalant uniquement de la renommée de la marque antérieure, soit à alléguer l’existence de contradictions entre le raisonnement de la chambre de recours en ce qui concerne les produits pour lesquels l’opposition n’a pas été acceptée et celui de la division d’opposition en ce qui concerne les produits pour lesquels l’opposition a été acceptée.

51      D’une part, s’agissant de la renommée de la marque antérieure, ainsi qu’il a été indiqué aux points 32 et 33 ci-dessus, bien qu’il soit constant que la marque antérieure BIMBO dispose d’une forte renommée pour le pain au sein de la classe 30, cette renommée ne s’étend pas au-delà de cette classe de produits. La renommée de la marque antérieure ne permettrait donc pas au public pertinent d’établir un lien entre les produits et les services en cause.

52      D’autre part, en ce qui concerne l’existence de contradictions entre le raisonnement de la chambre de recours et celui de la division d’opposition, force est de constater que la chambre de recours s’est prononcée sur des produits différents de ceux sur lesquels la division d’opposition s’est elle-même prononcée auparavant. À cet égard, il convient de relever que l’objet du recours introduit par la requérante à l’encontre de la décision de la division d’opposition ne portait pas sur l’appréciation de cette dernière à l’égard de ces produits. Dans le cadre du recours présenté par la requérante, la chambre de recours n’avait donc pas à prendre en considération lesdits produits au titre de son appréciation du degré de proximité ou de dissemblance des produits en cause.

53      C’est en considération de ces observations, que la chambre de recours a indiqué que, dans la mesure où le pain et les produits se rapportant au domaine du cyclisme relevaient de deux mondes distincts, le public pertinent ne risquait pas d’établir un lien entre les marques qui soit préjudiciable à la requérante.

54      Enfin, s’agissant de l’allégation de la requérante selon laquelle la chambre de recours aurait, de manière erronée, allégué que les produits visés par la demande d’enregistrement ne pouvaient se trouver que dans des magasins spécialisés, force est de constater que la chambre de recours n’a pas formulé une telle constatation dans le cadre de son appréciation. Au contraire, la chambre de recours a indiqué, dans la décision attaquée, que les supermarchés vendaient des bicyclettes, la commercialisation de ces produits n’étant donc pas limitée aux magasins spécialisés. En l’espèce, il ressort plutôt de la décision attaquée qu’il s’agit là d’un argument avancé par la division d’opposition.

55      Par conséquent, une telle allégation, qui manque en fait, doit être écartée.

56      En tout état de cause, d’une part, il doit être rappelé que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des preuves présentées pour la première fois devant lui. En effet, selon une jurisprudence constante, un recours porté devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours au sens de cette disposition, cette légalité devant être appréciée en fonction des éléments d’information dont ces chambres disposent au moment d’arrêter leurs décisions [voir, en ce sens, arrêt du 14 mai 2009, Fiorucci/OHMI – Edwin (ELIO FIORUCCI), T‑165/06, EU:T:2009:157, point 22 et jurisprudence citée]. Dès lors, ainsi que le fait valoir l’EUIPO, il y a lieu de rejeter comme irrecevables les trois captures d’écran produites par la requérante en ce qui concerne des barres énergétiques protéinées, qui sont présentées pour la première fois devant le Tribunal. D’autre part, il peut également être relevé que la pertinence de tels éléments semble contestable, dans le cadre de la présente instance, étant donné que ces éléments ne portent pas, en toute hypothèse, sur le pain ou sur les produits visés par la demande d’enregistrement.

57      Dans ces circonstances, la chambre de recours était en droit de rejeter le recours formé par la requérante.

58      Il résulte de ce qui précède que le premier moyen doit être écarté comme non fondé.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 109 du règlement 2017/1001 

59      La requérante fait valoir que la chambre de recours a violé l’article 109 du règlement 2017/1001 en ce qui concerne les frais exposés par l’autre partie aux fins de la procédure de recours. En effet, selon la requérante, dans la mesure où l’autre partie à la procédure de recours n’aurait pas participé à cette procédure (voir point 16 de la décision attaquée), il n’était pas logique de lui faire supporter la somme de 550 euros au titre de frais de représentation qui n’auraient pas été exposés.

60      En l’espèce, tout d’abord, il y a lieu de rappeler que la chambre de recours a condamné la requérante « à supporter les frais exposés par [l’autre partie] aux fins de la procédure de recours, d’un montant de 550 euros », premièrement, en relevant que, conformément à l’article 109, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 et à l’article 18, du règlement d’exécution (UE) 2018/626 de la Commission, du 5 mars 2018, établissant les modalités d’application de certaines dispositions du règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement d’exécution (UE) 2017/1431 (JO 2018, L 104, p. 37), il incombait à la requérante, « en tant que partie perdante », de supporter les frais exposés par l’autre partie dans la procédure de recours. Deuxièmement, la chambre de recours a considéré que les frais concernant la procédure de recours comprenaient « les frais de représentation professionnelle de [l’autre partie], d’un montant de 550 euros ». Troisièmement, elle a relevé que la division d’opposition avait condamné chaque partie à supporter ses propres frais en ce qui concerne la procédure d’opposition. La chambre de recours a alors décidé de ne pas modifier cette décision et a condamné la requérante à supporter les frais exposés par l’autre partie devant la chambre de recours aux fins de la procédure de recours à hauteur de 550 euros.

61      Ensuite, il convient de relever que l’article 109, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 dispose que « [l]a partie perdante dans une procédure d’opposition […] ou de recours supporte les taxes acquittées par l’autre partie [et] tous les frais indispensables aux fins des procédures exposés par l’autre partie, y compris […] la rémunération d’un représentant […], dans la limite des tarifs fixés pour chaque catégorie de frais dans les conditions prévues par l’acte d’exécution [adopté] en vertu du paragraphe 2 du présent article ». Il ressort de l’article 18, paragraphe 1, sous c), iii), du règlement d’exécution 2018/626 que le taux maximal applicable aux frais de représentation exposés par la partie gagnante et supportés par la partie perdante en ce qui concerne les procédures de recours est fixé à 550 euros.

62      De même, l’article 109, paragraphe 7, du règlement 2017/1001 précise, d’une part, que, lorsque les frais se limitent aux taxes payées à l’EUIPO et aux frais de représentation, la chambre de recours fixe les montants à rembourser en vertu, notamment, du paragraphe 1 du présent article, et, d’autre part, que, dans un tel cas, les frais de représentation sont accordés au niveau fixé dans l’acte d’exécution adopté conformément au paragraphe 2 du même article, « qu’ils aient réellement été exposés ou non ».

63      Ainsi que le Tribunal l’a relevé, dans l’arrêt du 1er février 2017, Gómez Echevarría/EUIPO – M and M Direct (wax by Yuli’s) (T‑19/15, non publié, EU:T:2017:46, point 113), à propos de dispositions alors en vigueur, dont le contenu se retrouve en substance dans la réglementation applicable en l’espèce, aucune de ces dispositions « ne conditionn[ait] la fixation des frais de représentation à une preuve ou à une justification préalable par les parties et notamment la partie gagnante ». Dans ces circonstances, le Tribunal a considéré que, dès lors que les frais de représentation étaient fixés dans une décision de la chambre de recours, conformément aux dispositions relatives à l’allocation des frais, nulle justification n’était requise quant à l’existence des frais de représentation ou leur montant.

64      Plus récemment, le Tribunal a relevé que, s’il est vrai que l’article 109, paragraphe 7, in fine, du règlement 2017/1001 prévoit que les frais de représentation sont accordés au niveau maximal prévu, « qu’ils aient réellement été exposés ou non », le renvoi contenu dans cette disposition à la première phrase dudit paragraphe et, dès lors, au « remboursement » des frais de représentation limite nécessairement le champ d’application automatique et forfaitaire d’une telle disposition au cas où le titulaire, gagnant, aurait pris part à la procédure administrative, ne serait-ce que d’une manière limitée [arrêt du 27 mars 2019, Biernacka-Hoba/EUIPO – Formata Bogusław Hoba (Formata), T‑265/18, non publié, EU:T:2019:197, point 60].

65      Or, dans cette affaire, le Tribunal a relevé que la partie gagnante n’avait pas déposé d’observations devant la division d’annulation ou devant la chambre de recours. Dans ces circonstances, condamner la requérante à supporter des frais que l’autre partie n’avait pas pu, ni voulu exposer, étant donné qu’elle était restée passive pendant toute la durée de la procédure administrative, équivaudrait, en substance, à dénaturer le sens de l’article 109, paragraphes 1 et 7, du règlement 2017/1001 (arrêt du 27 mars 2019, Formata, T‑265/18, non publié, EU:T:2019:197, points 61 et 62).

66      Force est toutefois de relever, comme le fait valoir à juste titre l’EUIPO, que, à la différence de ce qui a pu être observé dans l’affaire mentionnée au point précédent, l’autre partie a pris part à la procédure administrative, d’une manière certes limitée, mais d’une manière qui atteste du fait qu’elle avait été informée de son déroulement et s’était même posée la question d’y participer plus activement. Il ressort effectivement du dossier administratif de l’EUIPO que l’autre partie n’est pas restée passive pendant toute la durée de la procédure. En effet, son représentant est intervenu une fois, le 8 juin 2021, devant la division d’opposition, afin de demander une prorogation de délai. Ledit représentant est également resté le même tout au long de la procédure administrative et a pu recevoir, à ce titre, toutes les pièces transmises.

67      Dans de telles circonstances, le fait que l’autre partie n’a pas déposé d’observations devant la division d’opposition ou devant la chambre de recours ne suffit pas pour considérer que celle-ci n’a pas à assumer des frais de représentation au titre de la procédure devant la chambre de recours, lesquels n’ont pas à être justifiés et peuvent être fixés forfaitairement par la chambre de recours en application et dans la limite de la réglementation applicable.

68      Il résulte de ce qui précède que le second moyen doit être écarté. Aucun des moyens soulevés par la requérante n’étant fondé, il y a donc lieu de rejeter le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

69      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s’il est conclu en ce sens.

70      En l’espèce, même si la requérante a succombé, l’EUIPO n’a conclu à la condamnation de la requérante aux dépens qu’en cas de convocation des parties à une audience. Or, une telle audience n’ayant pas été tenue en l’espèce, il y a lieu de décider que chaque partie supporte ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Chaque partie supportera ses propres dépens.

Marcoulli

Frimodt Nielsen

Tomljenović

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 mai 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.