Language of document : ECLI:EU:T:1998:106

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

14 mai 1998 (1)

«Agents temporaires — Faux renseignements dans l'acte de candidature — Article 50, paragraphe 1, du régime applicable aux autres agents — Article 5, paragraphe 1, troisième alinéa, du statut — Conditions de forme de la réclamation»

Dans l'affaire T-21/97,

Sofia Goycoolea, ancien agent temporaire de la Commission, représentée par Mes Jean-Noël Louis, Thierry Demaseure et Ariane Tornel, avocats au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de la fiduciaire Myson SARL, 30, rue de Cessange,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. Julian Currall, conseilleur juridique, et Mme Florence Duvieusart-Clotuche, membre du service juridique, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation de la décision de l'autorité habilitée à conclure des contrats d'engagement de la Commission du 7 mai 1996 résiliant le contrat d'agent temporaire de la requérante,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (cinquième chambre),

composé de MM. J. Azizi, président, R. García-Valdecasas et M. Jaeger, juges,

greffier: M. A. Mair, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 20 janvier 1998,

rend le présent

Arrêt

Cadre réglementaire

1.
    L'article 50, paragraphe 1, du régime applicable aux autres agents des Communautés européennes (ci-après «RAA»), dispose:

«L'engagement d'un agent temporaire doit être résilié par l'institution sans préavis dès que l'autorité visée à l'article 6, premier alinéa, constate:

a)    que l'intéressé a intentionnellement fourni, lors de son engagement, de faux renseignements concernant ses aptitudes professionnelles ou les conditions prévues à l'article 12, paragraphe 2,

et

b)    que ces faux renseignements ont été déterminants pour l'engagement de l'intéressé.»

2.
    L'article 5, paragraphe 1, troisième alinéa, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après «statut») dispose:

«La catégorie B comporte cinq grades regroupés en carrières généralement étalées sur deux grades et correspondant à des fonctions d'application et d'encadrement nécessitant des connaissances du niveau de l'enseignement secondaire ou une expérience professionnelle d'un niveau équivalent.»

Faits à l'origine du recours

3.
    La requérante, Mme Sofia Goycoolea, est entrée au service de la Commission le 16 septembre 1991 en tant qu'agent auxiliaire de catégorie C, en qualité de dactylographe, pour une durée de trois mois. Son contrat a été prorogé à plusieurs reprises.

    

4.
    Le 7 février 1994, la requérante a participé à une procédure de sélection d'agents temporaires de catégorie B en posant sa candidature à quatre emplois vacants (114T/IX/93, 121T/XI/93, 112T/V/93 et 124T/XVI/93).

5.
    Parmi les qualifications générales requises par l'avis de sélection, pour tous les emplois à pourvoir, figurait celle d' avoir accompli des études secondaires supérieures complètes sanctionnées par un diplôme.

6.
    Au terme de la sélection, le comité de sélection a inscrit la requérante sur la liste des personnes jugées aptes à occuper l'emploi 114T/IX/93, de niveau B 3/B 2.

7.
    Parmi les qualifications particulières requises des candidats à l'emploi 114T/IX/93 — en plus des qualifications générales — figurait l'exigence d'une «expérience professionnelle post-scolaire d'au moins douze ans».

8.
    L'acte de candidature de la requérante à l'emploi en question mentionne — sous le point 7 A, «études secondaires, moyennes ou techniques» — que celle-ci a obtenu son baccalauréat à l'école Sagrado Corazón à Buenos Aires (Argentine) en décembre 1966. De même, sous le point 7 B, «études supérieures», l'acte précise qu'elle est en possession d'une licence en politiques et pratiques de formation délivrée par l'université catholique de Louvain (Belgique) en novembre 1992.

9.
    La requérante a signé la déclaration sur l'honneur figurant à la fin de l'acte de candidature dans les termes suivants:

«Les indications portées au présent acte de candidature sont véridiques et complètes.

Je suis conscient que les pièces justificatives suivantes (sous forme de photocopies) sont indispensables pour la recevabilité de mon acte de candidature:

—    [...]

—    le(s) diplôme(s) ou certificat(s) d'études du niveau exigé par l'admission à la sélection;

—    [...]»

10.
    A la suite de la procédure de sélection, la requérante a été formellement engagée avec effet au 1er décembre 1994 en qualité d'agent temporaire de grade B 3 pour exercer des fonctions d'assistance auprès du secrétariat général de la Commission, direction H «fonds de cohésion». Son contrat était prévu pour une durée de trois ans.

11.
    Lors de la préparation de la réunion du comité de classement du 31 janvier 1995, l'administration a constaté que le diplôme de baccalauréat de la requérante ne figurait pas dans son dossier personnel et s'est adressée à la requérante afin qu'elle lui fasse parvenir le document manquant.

12.
    Par lettre du 21 février 1995 adressée à l'administration, la requérante a déclaré:

«Suite à votre demande, je vous informe que, malgré mes efforts répétés, je suis dans l'impossibilité matérielle de vous fournir une attestation de fin d'études secondaires effectuées à Buenos Aires, Argentine, il y a presque trente ans.»

13.
    En mai 1995, la Commission a chargé le chef de l'unité 7 «recrutements» de la direction A «personnel» de la direction générale Personnel et administration (DG IX) d'une enquête administrative et, au cours d'un entretien avec celui-ci le 14 juin 1995, la requérante a confirmé qu'elle possédait son baccalauréat comme elle l'avait indiqué dans son acte de candidature.

14.
    Le 12 juillet 1995, dans un courrier adressé au directeur de la direction B «droits et obligations» de la DG IX, la requérante a maintenu cette position, tout en indiquant les raisons pour lesquelles elle ne pouvait pas joindre l'attestation d'études secondaires et se trouvait dans l'impossibilité d'«accréditer ces études». Elle a précisé en conclusion de sa lettre:

«L'ambassade d'Argentine s'est engagée à faire des recherches pour trouver la trace de mon école. Cependant, il m'est impossible de vous garantir la réponse que vous souhaitez dans les brefs délais requis. Je dépends à présent de la réponse de l'ambassade.»

15.
    Par note du 6 septembre 1995, adressée au directeur de la direction B de la DG IX, la requérante est revenue sur sa première déclaration et a reconnu ne pas avoir achevé ses études secondaires et donc n'avoir obtenu aucun diplôme d'études secondaires. Elle a souligné qu'elle n'avait pas vraiment évalué l'importance de l'inexactitude de sa déclaration pour la procédure de recrutement.

16.
    En conséquence, l'administration a ouvert une procédure disciplinaire à l'encontre de la requérante le 20 septembre 1995.

17.
    Le 26 février 1996, le conseil de discipline a rendu un avis motivé dans lequel il «recommande à l'unanimité à l'AIPN d'infliger à Mme Goycoolea la sanction prévue à l'article 50 du RAA, à savoir la résiliation de son engagement sans préavis, sans

que ses droits soient retirés ou limités au titre de l'article 49, paragraphe 2, du RAA».

18.
    Par décision du 7 mai 1996 (ci-après «décision attaquée»), le directeur général de la DG IX, en tant qu'autorité habilitée à conclure des contrats d'engagement (ci-après «AHCC»), a résilié le contrat d'agent temporaire de la requérante avec effet au 1er septembre 1996. Les motifs essentiels de cette décision précisent que:

— «parmi les qualifications générales requises dans le cadre de cette procédure les candidats devaient avoir accompli des études secondaires supérieures complètes sanctionnées par un diplôme» (cinquième considérant),

— «parmi les qualifications particulières requises pour le poste 114T/IX/93 pour lequel Mme Goycoolea a postulé et sur lequel elle a été retenue figurait une expérience professionnelle post-scolaire d'au moins douze ans» (sixième considérant),

— «sur l'acte de candidature qu'elle a introduit le 7 février 1994, en vue de postuler pour le poste 114T/IX/93, Mme Goycoolea a indiqué avoir obtenu le baccalauréat de l'école Sagrado Corazón à Buenos Aires après une période d'études comprise entre mars 1960 et décembre 1966» (septième considérant),

— «Mme Goycoolea ne pouvait pas ignorer que la possession d'un diplôme d'études secondaires supérieures d'après les termes de l'avis de sélection susvisé constituait une qualification générale et, partant, une condition déterminante pour que sa candidature soit admise» (douzième considérant),

— «l'absence d'un diplôme d'études secondaires supérieures rendait en outre impossible qu'elle remplisse la qualification particulière, pour le poste 114T/IX/93, relative aux douze ans d'expérience professionnelle post-scolaire, ce qui constituait une condition déterminante pour que sa candidature soit admise» (treizième considérant),

— «Mme Goycoolea a agi intentionnellement et de façon répétée en produisant des affirmations qu'elle savait fausses afin de convaincre l'institution qu'elle réunissait les conditions pour être engagée» (quatorzième considérant),

— «les faux renseignements ont été intentionnellement fournis par Mme Goycoolea concernant ses aptitudes professionnelles et [...] ceux-ci ont été déterminants pour son engagement par la Commission en tant qu'agent temporaire» (quinzième considérant).

19.
    Par note du 28 mai 1996, le conseil de la requérante a demandé au directeur général de la DG IX de retirer la décision portant résiliation du contrat d'agent

temporaire de celle-ci . Cette note a été enregistrée par la Commission le 17 juin 1996 comme réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut.

20.
    Le 18 juillet 1996 a eu lieu une réunion du groupe interservices au cours de laquelle le dossier de la requérante a été examiné.

21.
    Par décision du 21 octobre 1996, l'AHCC a rejeté la réclamation de la requérante.

Procédure et conclusions des parties

22.
    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 30 janvier 1997, la requérante a introduit le présent recours.

23.
    Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre) a décidé, d'une part, d'adopter des mesures d'organisation de la procédure au titre de l'article 64 du règlement de procédure, en demandant à la Commission de produire le compte rendu de la réunion du groupe interservice qui s'est tenue le 18 juillet 1996, et, d'autre part, d'ouvrir la procédure orale. Par lettre du 19 décembre 1997, la Commission a produit le compte rendu sollicité.

24.
    Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leur réponses aux questions orales du Tribunal à l'audience du 20 janvier 1998.

25.
La requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

—    annuler la décision du directeur général de la DG IX, du 7 mai 1996, résiliant le contrat d'agent temporaire de la requérante avec effet au 1er septembre 1996;

—    condamner la Commission aux dépens.

26.
La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

—    déclarer le recours irrecevable en ce qui concerne le second moyen et, en tout état de cause, rejeter le recours comme non fondé;

—    statuer sur les dépens comme de droit.

Sur le fond

27.
    La requérante invoque deux moyens à l'appui de son recours. Le premier moyen est tiré de la violation de l'article 50, paragraphe 1, du RAA ainsi que de l'article 5, paragraphe 1, troisième alinéa, du statut et d'une erreur manifeste d'appréciation. Le second moyen est tiré de l'incompétence de l'AHCC pour procéder à la vérification des conditions d'accès à la procédure de sélection d'agents temporaires.

Sur le premier moyen, tiré de la violation des articles 50, paragraphe 1, du RAA et 5, paragraphe 1, troisième alinéa, du statut ainsi que d'une erreur manifeste d'appréciation

Arguments des parties

28.
    En premier lieu, la requérante fait valoir que, en adoptant la décision attaquée, la Commission a fait une application erronée de l'article 50, paragraphe 1, du RAA. Elle soutient que la condition lui imposant d'être en possession d'un diplôme d'études secondaires supérieures complètes n'a pas pu constituer un critère déterminant de son engagement, car, si sa candidature au poste 114T/IX/93 a été retenue, c'est grâce à son expérience professionnelle et à sa formation universitaire . A cet égard, la requérante fait valoir que son diplôme d'études universitaires couvre les fonctions définies par l'avis de recrutement et pallie l'absence du diplôme d'études secondaires supérieures exigé.

29.
    Elle rappelle que dans son arrêt du 28 mars 1996, Noonan/Commission (T-60/92, Rec. p. II-215), le Tribunal a confirmé le principe général, consacré par l'article 27 du statut, selon lequel «le recrutement doit viser à assurer à l'institution le concours de fonctionnaires possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d'intégrité» , et a considéré que «l'article 5, paragraphe 1, du statut ne prescrit ni n'autorise l'application d'un critère qui vise à exclure la participation de certains candidats à un concours au seul motif que leur niveau de formation est supérieur à un maximum déterminé, fixé, par exemple, en fonction du niveau minimal qui s'applique à une catégorie supérieure à celle qui est visée par ce concours» . Or, la requérante précise que, même si la possession d'un diplôme d'études secondaires est une condition déterminante de sélection, la possession d'un diplôme supérieur à celui qui est requis ne peut, en l'absence de justification tenant exclusivement à l'intérêt du service, entraîner l'exclusion d'un candidat .

30.
    La requérante soutient également qu'elle réunit toutes les qualifications particulières requises dans l'avis de sélection et, en particulier, qu'elle remplit la condition relative à l'expérience post-scolaire d'un minimum de douze ans, eu égard à l'expérience professionnelle de plus de 20 ans qu'elle a acquise depuis la fin de ses études . La requérante rappelle, à cet égard, que le fait qu'elle a suivi un cycle d'enseignement secondaire à Buenos Aires, même si sa scolarité n'a pas été couronnée par la délivrance d'un diplôme de baccalauréat, n'est pas contesté . En outre, elle fait observer que, contrairement aux avis relatifs à d'autres postes vacants publiés lors de la même procédure de recrutement, l'avis de sélection du poste pour lequel elle a été engagée ne précisait pas que les candidats devaient posséder une «expérience professionnelle postérieure à l'obtention du diplôme» d'une durée spécifique.

31.
    La requérante affirme que, si elle a fourni des renseignements inexacts dans son acte de candidature, ils n'ont pas été de nature à induire l'AHCC en erreur quant

à ses aptitudes professionnelles et que, de ce fait, ils n'ont pas été déterminants pour son engagement.

32.
    Elle observe que l'application erronée de l'article 50 du RAA serait d'autant plus évidente que l'élément intentionnel ferait défaut en l'espèce, puisqu'elle n'aurait pas eu l'intention de tromper l'AHCC en vue d'obtenir irrégulièrement un avantage lors de son engagement . A l'appui de cette conclusion, la requérante établit une distinction entre le fait d'être conscient de fournir une information inexacte et le fait d'avoir l'intention de tromper afin de se soustraire aux exigences fixées par l'avis de recrutement. Ainsi, elle rappelle, tout d'abord, qu'elle a entrepris des démarches auprès de l'unité «recrutement» afin de savoir si elle pouvait postuler en l'absence de diplôme d'études secondaires, étant donné qu'elle possédait un diplôme universitaire. Elle allègue, ensuite, s'être légitimement fondée sur l'article 5, paragraphe 1, troisième alinéa, du statut, dont les termes semblent indiquer que les connaissances du niveau de l'enseignement secondaire peuvent être remplacées par une expérience professionnelle d'un niveau équivalent. Ces deux éléments seraient de nature à démontrer que la requérante voulait être certaine de remplir toutes les conditions visées par l'avis de recrutement avant de déposer sa candidature.

33.
    En second lieu, la requérante invoque une violation de l'article 5, paragraphe 1, troisième alinéa, du statut, en faisant valoir que, aux termes de cette disposition, le diplôme d'études secondaires exigé par l'avis de sélection pouvait être remplacé par une «expérience professionnelle d'un niveau équivalent».

34.
    Eu égard à ce qui précède, la Commission aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant que seule l'expérience professionnelle acquise par la requérante après l'obtention de son diplôme universitaire devait être prise en considération et en concluant qu'elle ne possédait pas les qualifications générales et particulières requises par l'avis de sélection.

35.
    Lors de l'audience, la requérante a produit une lettre du 19 mars 1993, par laquelle M. V., directeur de la direction H au secrétariat général de la Commission, faisait état de la formation universitaire ainsi que de l'expérience de la requérante et demandait à M. F., du secrétariat général, de faire le nécessaire pour lui offrir un contrat d'agent temporaire de niveau B pour travailler dans sa direction, à partir du 1er avril 1993. La requérante fait valoir que cette lettre prouve que, depuis cette date, l'institution avait l'intention de l'engager compte tenu de ses aptitudes professionnelles et, en particulier, du fait qu'elle possédait une licence universitaire. Cette intention aurait été confirmée, en premier lieu, par une deuxième lettre de M. V., du 17 octobre 1994 , cette fois adressée au secrétaire général de la Commission, par laquelle il exprimait à nouveau son désir d'engager Mme Goycoolea le plus rapidement possible, et, en deuxième lieu, par le fait que, finalement, Mme Goycoolea, a été engagée, par contrat du 6 décembre 1994 , à un poste au secrétariat général, direction H, lequel ne correspondait pas au poste 114T/IX/93, auquel elle avait postulé et pour lequel elle avait été retenue par le

comité de sélection. Il en découlerait, selon la requérante, que les faux renseignements n'ont pas été déterminants pour son engagement, puisqu'elle a été engagée pour un poste différent de celui pour lequel elle avait été sélectionnée, qui ne faisait pas partie des postes objet de la procédure de sélection, et que, par conséquent, les qualifications générales et particulières exigées pour ces postes ne pouvaient être applicables au poste pour lequel elle avait été engagée.

36.
    La Commission soutient qu'elle a appliqué l'article 50 du RAA parce qu'elle a considéré, au vu des faits, que ses conditions d'application étaient largement remplies.

37.
    En ce qui concerne l'élément intentionnel visé dans l'article 50 du RAA, la Commission observe que l'on ne pourrait sérieusement prétendre que la requérante l'aurait involontairement mal renseignée sur les diplômes qu'elle détenait puisqu'elle a répété ces informations inexactes à plusieurs reprises tout en sachant que le baccalauréat était une condition d'admission à la procédure de sélection. En outre, pour la Commission, le comportement de la requérante donne à penser qu'elle était convaincue que les informations inexactes qu'elle avait fournies étaient déterminantes pour son engagement.

38.
    Quant à la notion d'«aptitudes professionnelles» qui figure dans l'article 50 du RAA, la Commission conteste l'interprétation qu'en donne la requérante. Pour la Commission, cette notion vise nécessairement l'ensemble des qualifications et donc aussi les certificats et diplômes détenus par le candidat. Or, elle soutient que, comme l'indique la décision attaquée, la requérante ne possédait pas deux des qualifications requises pour l'emploi en question : elle n'avait pas accompli des études secondaires supérieures complètes sanctionnées par un diplôme et ne possédait pas d'expérience professionnelle post-scolaire d'au moins douze ans.

39.
    En ce qui concerne la prétendue violation de l'article 5, paragraphe 1, troisième alinéa, du statut, la Commission fait valoir que, en vertu d'une jurisprudence constante de la Cour et du Tribunal, rien ne s'oppose à ce que, pour certains emplois ou certaines catégories d'emplois, des conditions plus sévères que celles correspondant aux conditions minimales résultant du classement des emplois soient fixées par l'avis de concours.

40.
    S'agissant de l'expérience professionnelle, la Commission soutient que la requérante ne pouvait prétendre qu'elle remplissait la condition d'une «expérience professionnelle post-scolaire» de douze ans, requise par l'avis de concours. Le terme «post-scolaire» visait manifestement l'expérience acquise après une scolarité sanctionnée par un diplôme. En outre, la Commission signale que, à supposer que le diplôme universitaire puisse valablement se substituer au baccalauréat, c'est à partir de l'obtention de ce titre-là qu'il conviendrait de commencer à comptabiliser l'expérience professionnelle.

41.
    Pour ce qui est des arguments développés par la requérante au cours de l'audience, selon lesquels la preuve que les fausses informations n'auraient pas été déterminantes pour son engagement reposerait sur le fait qu'elle n'avait pas été engagée pour le poste 114T/IX/93, la Commission fait valoir que la sélection pour ledit poste était une condition indispensable pour son contrat d'engagement et que, en tout état de cause, la requérante aurait tout de même donné de faux renseignements concernant la condition d'avoir accompli des études supérieures complètes sanctionnées par un diplôme, puisqu'il s'agit d'une condition qui seraittoujours exigée comme qualification générale dans toutes les procédures de sélection d'agents temporaires de niveau B.

Appréciation du Tribunal

42.
    Deux conditions cumulatives doivent êtres remplies pour qu'une institution puisse valablement recourir à l'article 50, paragraphe 1, du RAA. L'AHCC doit avoir constaté que l'intéressé a intentionnellement fourni, lors de son engagement, de faux renseignements concernant ses aptitudes professionnelles ou les conditions prévues à l'article 12, paragraphe 2, et que ces faux renseignements ont été déterminants pour l'engagement de l'intéressé.

43.
    Il y a donc lieu d'examiner si, dans la présente espèce, les deux conditions sont remplies.

— Sur la condition tenant à la fourniture intentionnelle par l'intéressée, lors de son engagement, de faux renseignements concernant ses aptitudes professionnelles

44.
    A titre liminaire, il y a lieu de constater que la requérante ne conteste ni le fait de ne pas être en possession d'un diplôme d'études secondaires supérieures ni le fait d'avoir effectivement écrit dans l'acte de candidature que ce dernier était en sa possession et d'avoir signé cette déclaration.

45.
    L'argumentation de la requérante repose sur l'idée que, même en l'absence du diplôme d'études secondaires supérieures, son diplôme universitaire (licence en politiques et pratiques de formation), délivré par l'université catholique de Louvain, et sa longue expérience professionnelle, acquise après plus de 20 ans de travail, étaient de nature à assurer largement qu'elle réunissait toutes les «aptitudes professionnelles» pour exercer les fonctions visées dans l'avis de sélection ainsi que l'ensemble des qualifications requises pour poser sa candidature. Dès lors, elle n'aurait pas fourni de faux renseignements sur ses «aptitudes professionnelles» car les fausses informations n'étaient pas de nature à tromper l'institution sur ses «aptitudes professionnelles» réelles.

46.
    Cette interprétation de l'article 50, paragraphe 1, du RAA ne saurait être retenue. En effet, le fait de donner de faux renseignements sur deux des qualifications requises par l'avis de sélection équivaut à fournir de «faux renseignements concernant ses aptitudes professionnelles» au sens de cet article.

47.
    Il y a lieu d'observer, à cet égard, que, au stade de la procédure de sélection, l'institution n'est pas en mesure de connaître les «aptitudes professionnelles» des candidats par des moyens autres que les diplômes et titres sanctionnant le niveau d'études requis et les attestations justifiant l'expérience professionnelle exigée. En outre, l'article 50 du RAA n'a pas seulement pour finalité de permettre à l'institution de sanctionner les agents ayant donné de faux renseignements dans des conditions déterminées lors de la procédure d'engagement, mais constitue également un mécanisme garantissant la régularité générale des procédures de sélection. Par conséquent, pour sauvegarder l'effet utile de cet article, la notion de «fournir de faux renseignements sur les aptitudes professionnelles» doit nécessairement comprendre la fausse déclaration d'être en possession du diplôme et/ou de l'expérience professionnelle exigés dans l'avis de sélection.

48.
    Le Tribunal ne saurait retenir l'argument de la requérante selon lequel, contrairement à certains autres avis de sélection publiés le même jour, il n'était pas dit expressément dans l'avis en cause que l'expérience professionnelle requise serait à prendre en compte «dès l'obtention du diplôme», ce qui reviendrait à admettre une autre méthode pour comptabiliser l'expérience requise. Comme le soutient la Commission à juste titre, en utilisant le terme «post-scolaire», l'AHCC visait manifestement l'expérience acquise après une scolarité sanctionnée par un diplôme et ce diplôme ne pouvait être que celui exigé par l'avis de sélection.

49.
    La requérante ne saurait se prévaloir de l'arrêt Noonan/Commission, précité , dès lors que les faits qui étaient à son origine diffèrent essentiellement de ceux qui sont à l'origine de la présente affaire. En effet, contrairement à Mme Goycoolea, la requérante dans l'affaire Noonan, avait toutes les qualifications requises pour le poste — dont le diplôme d'études secondaires supérieures —, mais sa candidature avait été écartée car elle possédait, additionnellement, un diplôme universitaire.

50.
    Néanmoins, et à supposer même que, comme le prétend la requérante, le diplôme universitaire puisse valablement se substituer au diplôme d'études secondaires supérieures, la condition particulière exigeant une expérience professionnelle post-scolaire d'au moins douze ans continuerait à faire défaut car l'expérience de 20 ans alléguée par la requérante n'est pas comptabilisée à partir de l'obtention du diplôme d'études secondaires supérieures.

51.
    Dans ces circonstances, c'est à juste titre que la décision attaquée a conclu que, par le fait d'avoir donné de faux renseignements sur deux des qualifications requises dans l'avis de sélection, la requérante remplissait la première condition d'application de l'article 50, paragraphe 1, du RAA.

52.
    Le Tribunal estime que l'autre condition, expressément visée par l'article 50, paragraphe 1, sous a), du RAA, tenant au caractère intentionnel du comportement de l'intéressée, est également remplie en l'espèce. En effet, il suffit de rappeler que l'acte de candidature de la requérante à l'emploi en question mentionne — sous le

point 7 A, «études secondaires, moyennes ou techniques» — que celle-ci a obtenu son baccalauréat à l'école Sagrado Corazón à Buenos Aires (Argentine) en décembre 1966. Au surplus, la requérante a signé dans son acte de candidature une déclaration sur l'honneur par laquelle elle a attesté que les indications qu'il contenait étaient véridiques et complètes et qu'elle était consciente que les pièces justificatives (entre autres, les diplômes ou certificats d'études du niveau exigé pour l'admission à la sélection) étaient indispensables pour la recevabilité de son acte de candidature; elle a confirmé les informations inexactes à plusieurs reprises.

53.
    La distinction faite par la requérante entre «être conscient d'avoir fourni une information inexacte» et «l'avoir fait avec l'intention de tromper afin de se soustraire aux exigences fixées par l'avis de recrutement» est dépourvue de fondement. Le fait que la requérante puisse avoir considéré de bonne foi que, en vertu de l'article 5, paragraphe 1, troisième alinéa, du statut, les connaissances du niveau de l'enseignement secondaire requises pouvaient être remplacées par une expérience professionnelle d'un niveau équivalent n'est pas de nature à minorer le fait qu'elle avait fourni de faux renseignements. Enfin, l'argument tiré du fait que la requérante avait entrepris des démarches auprès du service «recrutement» afin de savoir si elle pouvait postuler en l'absence de diplôme d'études secondaires supérieures étant donné qu'elle possédait un diplôme universitaire ne saurait, pas plus, être retenu, puisque ces démarches n'ont pas empêché la requérante de fournir de faux renseignements dans l'acte de candidature.

54.
    Il y a lieu de conclure, par conséquent, que la première condition d'application de l'article 50, paragraphe 1, du RAA est remplie dans le cas d'espèce, la requérante ayant fourni intentionnellement, lors de sa procédure d'engagement, de faux renseignements concernant ses aptitudes professionnelles.

Sur la condition tenant aux effets déterminants des faux renseignements pour l'engagement de l'intéressé

55.
    Il importe de rappeler liminairement que, dans un autre contexte, la Cour a jugé que le jury est fondé à exclure les candidats à un concours ne remplissant pas la condition du diplôme exigé pour ce seul motif, sans prendre en compte leurs autres titres et diplômes et leur expérience professionnelle postérieure (arrêt de la Cour du 13 juillet 1989, Jaenicke Cendoya/Commission, 108/88, Rec. p. 2711, point 25).

56.
    En l'espèce, le Tribunal considère que l'importance des conditions visées par l'avis de sélection que ne remplissait pas la requérante est telle que les faux renseignements qu'elle a fournis ont été déterminants pour admettre sa candidature à la procédure de sélection et, par conséquent, pour son engagement. En effet, ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus (voir point 47 ci-dessus), au stade de la procédure de sélection, l'institution n'est pas en mesure de connaître les aptitudes professionnelles des candidats par des moyens autres que les diplômes et titres sanctionnant le niveau d'études requis et les attestations justifiant leur expérience

professionnelle. Il s'ensuit nécessairement que c'est sur la base des renseignements fournis par la requérante que celle-ci a été engagée.

57.
    Cette conclusion ne saurait être contredite par l'argument de la requérante selon lequel les lettres de M. V. du 19 mars 1993 (produite à l'audience) et du 17 octobre 1994 prouveraient qu'elle avait été engagée sur la base d'un contrat, différent de celui visé à l'avis de concours, n'exigeant pas les qualifications lui faisant défaut.

58.
    A cet égard, il convient d'observer, en premier lieu, que, si la lettre du 19 mars 1993 montre, certes, que M. V. avait un intérêt à engager la requérante, il n'en résulte pas moins que cet engagement n'est pas intervenu à ce moment-là.

59.
    En second lieu, il résulte de la lettre du 17 octobre 1994 que M. V. a introduit sa demande d'engagement de la requérante en faisant valoir expressément qu'il avait été informé qu'elle «[avait] réussi une sélection d'agent temporaire n° 114T/IX/93». Au surplus, dans le curriculum vitae de Mme Goycoolea, joint à ladite note, il est précisé qu'elle avait effectué à Buenos Aires des études primaires et secondaires. Par conséquent, force est de constater que l'engagement de la requérante par le secrétariat général est intervenu en considération de sa sélection pour le poste 114T/IX/93 et donc sur la base de la présomption qu'elle remplissait les qualifications générales et particulières exigées pour ledit poste.

60.
    En tout état de cause, il ressort des termes du document, émanant de la DG IX, daté de décembre 1993 et intitulé «Les agents temporaires à la Commission — Statut et modalités de recrutement», qui est invoqué par la requérante (paragraphes 2, deuxième alinéa, et 3, deuxième alinéa), qu'un diplôme du cycle secondaire supérieur et une expérience professionnelle postérieure au diplôme d'au moins douze ans sont des qualifications exigées, de façon générale, de tous les candidats à des postes d'agents temporaires de grade B 3 offerts par la Commission.

61.
    Partant, la seconde condition d'application de l'article 50, paragraphe 1, du RAA est également remplie dans le cas d'espèce, les faux renseignements fournis par la requérante ayant été déterminants pour son engagement.

62.
    Il découle de tout ce qui précède que, les deux conditions exigées par l'article 50, paragraphe 1, du RAA étant remplies, la décision attaquée n'a pas été adoptée en violation de cet article.

63.
    Une solution différente serait, de surcroît, contraire au principes d'égalité de traitement et de sécurité juridique. Si la requérante n'avait pas déclaré faussement qu'elle remplissait les conditions exigées, sa candidature n'aurait pas été retenue, ce qui aurait permis à d'autres candidats réunissant réellement toutes les conditionsexigées d'avoir plus de chances d'accéder au poste litigieux. En outre, la non-prise

en compte a posteriori des irrégularités constatées, sur la base de la compétence et du rendement non contestés de la requérante pour le travail en question, de son diplôme universitaire ou de son expérience professionnelle, méconnaîtrait la situation d'autres personnes, qui, ayant éventuellement fait preuve des mêmes qualités, étant en possession de titres équivalents ou ayant une expérience similaire, ne se sont pas portées candidates, contrairement à la requérante, à défaut pour elles de remplir la qualification générale consistant à avoir accompli des études secondaires supérieures complètes sanctionnées par un diplôme.

64.
    Quant à la prétendue violation de l'article 5, paragraphe 1, troisième alinéa, du statut, qui précise que les emplois de catégorie B sont réservés aux fonctions nécessitant des connaissances du niveau de l'enseignement secondaire ou une expérience professionnelle d'un niveau équivalent, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les dispositions dudit article du statut visent à définir, d'une manière générale, suivant la nature des fonctions auxquelles les emplois correspondent, le niveau minimal des fonctionnaires dans les différents grades et ne concernent pas les conditions de recrutement, régies par les dispositions de l'article 29 et de l'annexe III du statut. Rien ne s'oppose à ce que, pour certains emplois ou certaines catégories d'emplois, des conditions plus sévères que celles correspondant aux conditions minimales résultant du classement des emplois soient fixées par l'avis de concours, que ce soit pour pourvoir à un emploi vacant déterminé ou pour la constitution d'une liste de réserve en vue de pourvoir aux emplois d'une certaine catégorie (arrêt Jaenicke Cendoya/Commission, précité, point 24; arrêts du Tribunal du 7 février 1991, Ferreira de Freitas/Commission, T-2/90, Rec. p. II-103, point 54, du 3 mars 1994, Cortes Jimenez e.a./Commission, T-82/92, RecFP p. II-237, point 20).

65.
    En conséquence, le fait que l'avis de sélection exigeait des candidats qu'ils possèdent une expérience professionnelle post-scolaire de douze ans, n'est pas de nature à constituer une violation de l'article 5, paragraphe 1, troisième alinéa, du statut.

66.
    Il découle de tout ce qui précède que la Commission n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation.

67.
    Dès lors, ce moyen doit être rejeté.

Sur le second moyen tiré de l'incompétence de l'AHCC pour vérifier les conditions d'accès à la procédure de sélection d'agents temporaires

Arguments des parties

68.
    La requérante soutient que l'AHCC n'était pas compétente pour réviser les décisions du comité de sélection. Elle se fonde sur le paragraphe 3, quatrième et cinquième alinéas, du document intitulé «Les agents temporaires à la Commission — Statut et modalités de recrutement», précité, selon lequel :

    

«Les comités de sélection, après avoir vérifié, pour l'ensemble des candidats, le respect de ces conditions générales (âge, nationalité d'un des États membres, diplômes, langues requises, expérience professionnelle), effectuent un examen comparatif des qualifications professionnelles des candidats par rapport à celles exigées par la nature des fonctions prévues. [...]

Le choix de la personne à recruter parmi les lauréats est effectué par la Commission en tenant compte essentiellement de l'adéquation du profil professionnel de l'intéressé(e) (compétences particulières, langues connues, expérience professionnelle spécifique, etc,) aux exigences opérationnelles du service.»

69.
    La requérante fait observer que c'est le comité de sélection qui doit vérifier que les conditions générales exigées sont respectées par chacun des candidats. Dans le cas d'espèce, elle observe que le comité de sélection, après avoir procédé à l'examen du dossier de la requérante, a considéré, eu égard à ses qualifications professionnelles, qu'elle méritait d'être retenue en seconde position pour le poste. Or, aux yeux de la requérante, le comité n'a pu adopter cette décision qu'après s'être assuré qu'elle remplissait les conditions générales et particulières visées par l'avis de sélection.

70.
    Par conséquent, d'après la requérante, dès lors que la vérification des diplômes requis est confiée exclusivement au comité de sélection, une fois que celui-ci a procédé à ladite vérification et est parvenu à la conclusion qu'elle remplissait les conditions requises par l'avis de sélection, l'AHCC n'était pas compétente pour procéder à un réexamen de ces conditions .

71.
    La Commission conteste la recevabilité de ce moyen pour défaut de concordance avec la phase précontentieuse.

72.
    La requérante observe que son conseil a précisé, lors de la réunion du groupe interservices du 18 juillet 1996, au cours de laquelle son dossier a été examiné, qu'il entendait soulever également un moyen tiré de l'incompétence de l'AHCC pour examiner les conditions d'accès à la procédure de sélection d'agents temporaires.

73.
    Si la Commission reconnaît que la requérante a soulevé cet argument lors de cette réunion au cours de laquelle son dossier a été examiné, elle fait remarquer, néanmoins, que le conseil de la requérante avait annoncé qu'il confirmerait cet élément par une note écrite. Or, aucune note n'ayant été adressée par la suite au service compétent sur ce point, la Commission n'a pas jugé utile d'y répondre dans la réponse adressée à l'intéressée.

74.
    La requérante rétorque que, conformément à la jurisprudence de la Cour et du Tribunal, une réclamation n‘est soumise à aucune condition de forme.

75.
    En outre, elle fait valoir que, dans le procès-verbal de son audition par le directeur général de la DG IX, le 27 mars 1996 , il est établi ce qui suit:

«Me Louis rappelle que le diplôme de fin d'études secondaires n'a pas été produit. Le comité de sélection s'est contenté de déclarations. La procédure à ce stade était terminée, étant donné qu'elle était admise à la procédure de sélection, même abusivement. L'article 50 RAA ne vise pas les conditions d'admissibilité à la sélection, mais les aptitudes professionnelles.»

76.
    La requérante en tire la conclusion que la Commission était amplement informée de tous les moyens invoqués par la requérante à l'encontre de la décision attaquée.

77.
    La Commission souligne, à cet égard, que le passage du compte-rendu du 27 mars 1996 cité par la requérante ne montre pas que la requérante mettait en cause la compétence de l‘AHCC. Par conséquent, elle maintient l'irrecevabilité du moyen.

Appréciation du Tribunal

78.
    Il convient de rappeler qu'il ressort d'une jurisprudence bien établie que dans les recours de fonctionnaires, les conclusions exposées au stade du recours doivent avoir le même objet que celles exposées dans la réclamation et que les chefs de contestation doivent reposer sur la même cause que ceux invoqués dans la réclamation. Ces chefs de contestation peuvent, devant le juge communautaire, être développés par la présentation de moyens et arguments ne figurant pas nécessairement dans la réclamation, mais s'y rattachant étroitement (arrêt de la Cour du 14 mars 1989, Del Amo Martinez/Parlement, 133/88, Rec. p. 689, point 10, et arrêt du Tribunal du 8 juin 1995, Allo/Commission, T-496/93, RecFP p. II-405, point 26).

79.
    Au vu de cette jurisprudence, il convient d'examiner si ce moyen, qui ne figure pas explicitement en tant que tel dans la réclamation, doit être considéré comme étant étroitement rattaché à un des chefs de contestation visés dans la réclamation.

80.
    Il importe de souligner qu'il n'est pas contesté que la note du 28 mai 1996 déposée par le conseil de la requérante, et qui a été considérée par la Commission comme une réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut, ne soulève, ni explicitement ni implicitement, ce moyen. Cette note ne se réfère ni directement ni indirectement à un prétendu défaut de compétences de l'AHCC pour vérifier les conditions d'accès à la procédure de sélection.

81.
    Il y a lieu de préciser que, pour ce qui est de l'interprétation des réclamations au titre de l'article 90 du statut, la Cour et le Tribunal ont jugé que, puisque la procédure précontentieuse a un caractère informel et que les intéressés agissent, en général, à ce stade sans le concours d'un avocat, l'administration ne doit pas interpréter les réclamations de façon restrictive, mais doit, au contraire, les examiner dans un esprit d'ouverture (arrêt Del Amo Martinez/Parlement, précité,

point 11, et, entre autres, arrêt du Tribunal du 7 mai 1991, Jongen/Commission, T-18/90, Rec. p. II-187, point 22).

    

82.
    Néanmoins, selon une jurisprudence constante de la Cour et du Tribunal, la procédure précontentieuse a pour objet de permettre un règlement amiable des différends surgis entre les fonctionnaires ou agents et l'administration. Pour qu'une telle procédure puisse atteindre son objectif, il faut que l'autorité investie du pouvoir de nomination soit en mesure de connaître de façon suffisamment précise les critiques que les intéressés formulent à l'encontre de la décision contestée (arrêt de la Cour du 1er juillet 1976, Sergy/Commission, 58/75, Rec. p. 1139, point 32, et, entre autres, arrêt du Tribunal du 16 juillet 1992, Della Pietra/Commission, T-1/91, Rec. p. II-2145, point 24).

83.
    A cet égard, il convient d'observer que, si la requérante a soulevé l'argument en question au cours de la réunion interservices qui s'est tenue le 18 juillet 1996, elle n'a, cependant, pas précisé par écrit, comme elle l'avait annoncé, les termes et la portée de son argument, ce qui a empêché la Commission de connaître de façon suffisamment précise les critiques que la requérante entendait formuler à l'encontre de la décision attaquée.

84.
    Dans ces conditions, ce moyen doit être déclaré irrecevable.

85.
    Il découle de l'ensemble de ce qui précède que le recours doit être rejeté dans son intégralité.

Sur les dépens

86.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe doit être condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Toutefois, aux termes de l'article 88 du règlement de procédure, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. La requérante ayant succombé en ses conclusions, chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête:

1)    Le recours est rejeté.

2)    Chaque partie supportera ses propres dépens.

Azizi
García-Valdecasas
Jaeger

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 mai 1998.

Le greffier

Le président

H. Jung

J. Azizi


1: Langue de procédure: le français.