Language of document : ECLI:EU:T:2024:23

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

24 janvier 2024 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de déchéance – Marque de l’Union européenne figurative NOAH – Usage sérieux de la marque – Nature de l’usage – Article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), et article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001 – Preuve de l’usage sérieux – Article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 – Article 19, paragraphe 1, et article 10, paragraphe 7, du règlement délégué (UE) 2018/625 – Droit d’être entendu »

Dans l’affaire T‑562/22,

Noah Clothing LLC, établie à New York, New York (États-Unis), représentée par Mes W. Leppink, P. Trapman et C. Bey, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme C. Bovar et M. D. Hanf, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Yannick Noah, demeurant à Feucherolles (France), représenté par Me A. Berthet, avocat,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mmes A. Marcoulli, présidente, V. Tomljenović et M. W. Valasidis (rapporteur), juges,

greffier : Mme A. Juhász-Tóth, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 8 septembre 2023,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Noah Clothing LLC, demande l’annulation de la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 12 juillet 2022 (affaire R 504/2021-1) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 17 janvier 2007, l’intervenant, M. Yannick Noah, a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

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3        La marque contestée désignait les produits relevant des classes 18, 25 et 28 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ses classes, à la description suivante :

–        classe 18 : « Cuir et imitations du cuir, produits en ces matières non compris dans d’autres classes, à savoir étuis pour les clés (maroquinerie), porte-documents, portefeuilles, porte-monnaie non en métaux précieux ; sacs à main, cartables et serviettes d’écoliers, sacoches à outils (vides), sacs à dos, sacs à provisions, sacs d’alpinistes, sacs de campeurs, sacs de plage, sacs de voyage, sacs-housses pour vêtements (pour le voyage) ; boîtes en cuir ou en carton-cuir ; lanières de cuir, sangles de cuir ; garniture de cuir pour meubles, peaux, malles et valises, sacs pour l’emballage, parapluies, parasols » ;

–        classe 25 : « Vêtements, maillots, maillots de bain, costumes de plage, caleçons de bain, peignoirs, saris, bandanas, boas, étoles, foulards, écharpes, bandeaux pour la tête, bas, bavoirs non en papier, bretelles, cache-col, camisoles, capuchons, ceintures, châles, robes de chambre, chandails, chasubles, chaussettes, supports de chaussettes, chemises, chemisettes, collets, cols, combinaisons, pantalons, costumes, tabliers, couvre-oreilles, cravates, vêtements en cuir, vêtements en imitation du cuir, empeignes, empiècements de chemises, vêtements en fourrure, gabardines, gaines, gants, mitaines, gilets, pull-overs, tricots, habits, tee-shirts, imperméables, manteaux, parkas, pèlerines, pelisses, vareuses, vestes, jambières, jupes ; costumes de mascarade, sous-vêtements, lingerie de corps, slip, body, soutien-gorge, culottes, corselets, pyjamas, robes de chambre, chaussures, bottes, bottines, brodequins, chaussons, chaussures de football, chaussures de plage, chaussures de sport, crampons de chaussures de sport, espadrilles, galoches, pantoufles, sandales, chaussons, chaussures de ski, souliers ; chapellerie, bonnets, bonnets de bain, calottes, bérets, casquettes, coiffes, vêtements de nuit, combinaisons (vêtements de sport) » ;

–        classe 28 : « Jeux, jouets ; cartes à jouer ordinaires, articles de gymnastique et de sport non compris dans d’autres classes, gants (accessoires de jeux), raquettes, balles de jeux, ballons ; décorations pour arbres de Noël ».

4        Le 11 février 2008, la marque contestée a été enregistrée en tant que marque de l’Union européenne sous le numéro 5620968.

5        Le 7 juin 2019, la requérante a déposé une demande en déchéance de la marque contestée sur le fondement l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), auprès de l’EUIPO, au motif que ladite marque n’avait pas fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union européenne pendant une période ininterrompue de cinq ans pour l’ensemble des produits pour lesquels elle avait été enregistrée.

6        Le 16 octobre 2019, le 9 mars et le 3 décembre 2020, l’intervenant a produit devant la division d’annulation une série de preuves de l’usage de la marque contestée pour une partie des produits, à savoir, pour le « cuir et imitations du cuir » compris dans la classe 18 et pour les « vêtements, maillots, chandails, chemises, pantalons, vêtements en cuir, vêtements en imitation du cuir, habits, tee-shirts, vestes, chaussures, chaussures de sport, souliers, combinaisons (vêtements de sport) » compris dans la classe 25.

7        Le 26 janvier 2021, la division d’annulation a prononcé la déchéance de la marque contestée pour l’ensemble des produits pour lesquels celle-ci avait été enregistrée, à l’exception des « chemises de sport décontractées », relevant de la classe 25.

8        Le 19 mars 2021, l’intervenant a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’annulation dans la mesure où elle avait prononcé la déchéance de la marque contestée. Le 25 mai 2021, il a présenté ses observations.

9        Le 9 juin 2021, l’EUIPO a informé l’intervenant que les éléments de preuve présentés n’étaient pas conformes à l’article 55 du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1), étant donné que les annexes n’étaient pas numérotées dans l’ordre, et il lui a demandé de corriger cette irrégularité dans un délai d’un mois. Le 4 août 2021, après l’expiration du délai fixé, l’intervenant a présenté les preuves corrigées.

10      Le 7 octobre 2021, la requérante a formé un recours incident, au sens de l’article 68, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, demandant l’annulation de la décision de la division d’annulation dans la mesure où elle avait rejeté la demande de déchéance en ce qui concerne les « chemises de sport décontractées » comprises dans la classe 25.

11      Par la décision attaquée, la chambre de recours a partiellement accueilli le recours, rejeté la demande en déchéance en ce qui concerne les « polos » et les « chandails », compris dans la classe 25, et rejeté le recours pour le surplus ainsi que le recours incident. En particulier, la chambre de recours a considéré que la marque contestée n’avait pas été expressément enregistrée pour des « pulls sans manches ». Toutefois, ces produits relèveraient de la catégorie plus large des « chandails », compris dans la classe 25, pour laquelle la marque contestée serait enregistrée. Elle a également relevé que les éléments de preuve fournis par l’intervenant démontraient l’usage sérieux de la marque contestée, pour la période allant du 7 juin 2014 au 6 juin 2019 (ci-après la « période pertinente »), pour les « polos » et les « chandails », relevant de la classe 25, sur le territoire pertinent, à savoir, celui de l’Union. Elle a alors déclaré que l’enregistrement de la marque contestée était maintenu pour lesdits produits.

 Conclusions des parties 

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée en ce qu’elle rejette la demande en déchéance en ce qui concerne les « polos » et les « chandails » relevant de la classe 25 ;

–        annuler la décision attaquée en ce qu’elle rejette le recours incident ;

–        renvoyer l’affaire devant une autre chambre de recours pour réexamen ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

13      Lors de l’audience, la requérante a déclaré renoncer à son troisième chef de conclusions, ce dont il a été pris acte dans le procès-verbal de l’audience.

14      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens en cas de convocation des parties à une audience.

15      L’intervenant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

16      La requérante invoque trois moyens, tirés, en substance, le premier, de la violation du droit à un procès équitable et du droit d’être entendu, le deuxième, de l’absence d’usage sérieux de la marque contestée pour les « polos » et les « chandails », relevant de la classe 25, et le troisième, de l’absence d’usage sérieux de la marque contestée pour les « chemises de sport décontractées », relevant de la classe 25, en lien avec le recours incident.

 Sur le premier moyen

17      Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, lu en combinaison avec l’article 19, paragraphe 1, troisième phrase, et l’article 10, paragraphe 7, du règlement délégué 2018/625 et avec l’article 6 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950.

18      Ce moyen repose, en substance, sur trois griefs, tirés, le premier, de la prise en compte des éléments de preuve produits tardivement devant la division d’annulation, le deuxième, de la prise en compte des éléments de preuve régularisés tardivement devant la chambre de recours et, le troisième, de la violation du droit d’être entendu.

 Sur la prise en compte des éléments de preuve produits tardivement devant la division d’annulation

19      La chambre de recours a admis les éléments de preuve produits tardivement par l’intervenant après l’expiration du délai imparti par l’EUIPO en estimant qu’ils étaient pertinents en tant qu’éléments supplémentaires corroborant les éléments de preuve initiaux et que le stade de la procédure ne s’opposait pas à leur prise en compte.

20      La requérante reproche à la chambre de recours et à la division d’annulation d’avoir pris en compte, à tort, des éléments de preuves produits tardivement par l’intervenant devant la division d’annulation, sans qu’aucune circonstance ne puisse justifier le retard de l’intervenant dans la production de ces preuves.

21      L’EUIPO et l’intervenant contestent les affirmations de la requérante.

22      Il convient de rappeler que l’article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 dispose que l’EUIPO peut ne pas tenir compte des faits que les parties n’ont pas invoqués ou des preuves qu’elles n’ont pas produites en temps utile.

23      Selon une jurisprudence constante, il découle du libellé de cette disposition que, en règle générale et sauf disposition contraire, la présentation de faits et de preuves par les parties demeure possible après l’expiration des délais auxquels se trouve subordonnée une telle présentation en application des dispositions du règlement 2017/1001 et qu’il n’est nullement interdit à l’EUIPO de tenir compte de faits et de preuves ainsi tardivement invoqués ou produits (voir arrêt du 28 février 2018, mobile.de/EUIPO, C‑418/16 P, EU:C:2018:128, point 48 et jurisprudence citée).

24      En précisant que l’EUIPO « peut » décider de ne pas tenir compte de telles preuves, l’article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 investit celui-ci d’un large pouvoir d’appréciation à l’effet de décider, tout en motivant sa décision sur ce point, s’il y a lieu ou non de prendre celles-ci en compte (voir arrêt du 28 février 2018, mobile.de/EUIPO, C‑418/16 P, EU:C:2018:128, point 49 et jurisprudence citée).

25      L’exercice du pouvoir d’appréciation conféré à l’EUIPO par l’article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 est encadré par l’article 10, paragraphe 7, du règlement délégué 2018/625, applicable mutatis mutandis aux procédures de déchéance en vertu de l’article 19, paragraphe 1, du même règlement. Selon cette disposition, aux fins de décider s’il accepte ou non des indications ou des preuves présentées après l’expiration du délai imparti, qui complètent celles qui ont déjà été présentées dans ledit délai et qui portent sur la même condition établie au paragraphe 3 dudit article 10, à savoir, le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage de la marque en cause, l’EUIPO tient compte, en particulier, du stade de la procédure, de la question de savoir si les indications ou les preuves sont, à première vue, susceptibles d’être pertinentes pour l’issue de l’affaire et si l’existence de raisons valables justifie la présentation tardive des indications ou des preuves.

26      En revanche, selon l’article 19, paragraphe 1, du règlement délégué 2018/625, lorsqu’aucune preuve de l’usage sérieux de la marque concernée n’est produite dans le délai imparti par l’EUIPO, la déchéance doit en principe être prononcée par ce dernier.

27      En l’espèce, il est constant que l’intervenant a présenté les premiers éléments de preuve de l’usage de la marque contestée le 16 octobre 2019, dans le délai imparti par l’EUIPO, à savoir, une copie du contrat de licence, une copie d’une déclaration présentant les recettes des ventes au cours des années 2015 à 2019, des articles de presse et des communiqués de presse, ainsi que des fiches techniques des produits.

28      Il est, par ailleurs, constant que les éléments produits le 9 mars 2020 devant la division d’annulation, à savoir, la traduction d’une déclaration de recettes de vente pour des vêtements et des chaussures au cours des années 2015 à 2019, produite précédemment au cours de la procédure, un article de presse sur le polo commercialisé par l’intervenant, des fiches techniques d’information sur certains produits couverts par la marque contestée pour les années 2017 à 2019, ainsi que des factures, sont des preuves complémentaires aux éléments produits initialement et sont, à première vue, pertinents dans le cadre du litige, ce qui n’est pas, au demeurant, formellement contesté par la requérante, ainsi qu’il ressort du point 48 de la requête.

29      De même, les éléments produits le 3 décembre 2020, notamment, des images des polos, comme des modèles « 1822356 TENNIS PRO Polo France N 2 18 M new opti » et « 1822382 TENNIS PRO Polo France N2 18 M cobalt/n », commercialisés par l’intervenant datant de 2015 et 2016, des fiches techniques d’information sur des chaussures de sport, des pulls sans manches, des polos et des pantalons couverts par la marque contestée ainsi que des factures datées de 2015 à 2018, sont des preuves, à première vue pertinentes, complémentaires aux éléments produits dans le délai imparti, que la chambre de recours a donc également pu valablement prendre en considération.

30      En outre, la circonstance que la partie requérante conteste les éléments de preuve de l’usage, déposés dans le délai imparti, par le titulaire de la marque contestée peut justifier que ce dernier produise des éléments de preuve supplémentaires, conjointement au dépôt de ses observations (voir, en ce sens, arrêt du 18 juillet 2013, New Yorker SHK Jeans/OHMI, C‑621/11 P, EU:C:2013:484, point 36). Tel est le cas en l’espèce, les éléments de preuve complémentaires produits les 9 mars et 3 décembre 2020 ayant été produits en réponse aux observations de la requérante contestant les éléments de preuves initialement produits par l’intervenant dans le délai imparti. C’est donc sans commettre d’erreur manifeste que la chambre de recours a considéré que leur présentation tardive au cours de la procédure ne s’opposait pas à leur prise en considération. La chambre de recours a donc valablement pu les prendre en considération au soutien de son appréciation, en application de l’article 10, paragraphe 7, du règlement délégué 2018/625.

31      Il s’ensuit que le premier grief invoqué au soutien du premier moyen doit être écarté comme étant non fondé.

 Sur la prise en compte des éléments de preuve régularisés tardivement devant la chambre de recours

32      La chambre de recours a considéré qu’il n’était pas nécessaire de se prononcer sur la recevabilité des documents produits par l’intervenant dans son mémoire exposant les motifs de son recours, déposé le 25 mai 2021. En effet, après avoir constaté que l’intervenant n’avait remédié à l’irrégularité de la numérotation des documents annexés à son recours qu’après le délai imparti, à savoir le 4 août 2021, la chambre de recours a relevé que de tels documents étaient, en tout état de cause, identiques aux éléments de preuve que l’intervenant avait déjà présentés devant la division d’annulation, lesquels pouvaient être pris en compte dans leur intégralité, nonobstant la présentation tardive de certains d’entre eux.

33      La requérante soutient que la chambre de recours a violé, en substance, son droit à un procès équitable en accordant à l’intervenant, dans les faits, une prolongation de délai dans la présentation des preuves, en lui permettant, d’une part, de régulariser les preuves produites au stade de son recours, et en acceptant, d’autre part, et sans raison valable, de tenir compte des preuves ainsi corrigées alors même qu’elles auraient été produites après l’expiration du délai fixé pour remédier à leur irrégularité, à savoir le 4 août 2021.

34      L’EUIPO et l’intervenant contestent cette argumentation de la requérante.

35      Comme cela a été précédemment mentionné au point 9 ci-dessus, le 9 juin 2021, l’EUIPO a informé l’intervenant que les éléments de preuve présentés n’étaient pas conformes à l’article 55 du règlement délégué 2018/625. Il lui a alors demandé de corriger dans un délai d’un mois l’irrégularité qui concernait la numérotation des annexes jointes aux observations présentées le 25 mai 2021. Le 4 août 2021, après l’expiration du délai fixé, l’intervenant a présenté les preuves corrigées.

36      À cet égard, il suffit de constater, à l’instar de la chambre de recours, que les documents produits tardivement sont identiques à ceux déjà présentés devant la division d’annulation et acceptés par cette dernière.

37      Partant, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré qu’il n’était pas nécessaire de se prononcer sur la recevabilité desdits documents, sans violer le droit de la requérante à un procès équitable.

38      Le deuxième grief invoqué au soutien du premier moyen doit être écarté comme étant non fondé.

 Sur la violation du droit d’être entendu en ce que la requérante aurait été privée de la possibilité de prendre position sur les preuves présentées par l’intervenant le 3 décembre 2020

39      La chambre de recours a souligné qu’elle pouvait tenir compte des éléments de preuve présentés par l’intervenant le 3 décembre 2020, sans violer le droit de la requérante d’être entendue, étant donné que cette dernière avait commenté ces éléments de preuves dans ses observations en réponse au recours et dans son mémoire exposant les motifs du recours incident. Toute violation éventuelle du droit d’être entendue de la requérante par la division d’annulation aurait ainsi été traitée dans le cadre de la procédure de recours.

40      La requérante fait valoir que la division d’annulation et la chambre de recours ont violé son droit d’être entendue en ce qui concerne les éléments de preuve produits tardivement par l’intervenant devant la division d’annulation le 3 décembre 2020. Elle estime que la possibilité qu’elle a eu de formuler des observations sur ces éléments de preuve au stade de la procédure du recours ne permettrait pas de remédier à la violation commise par la division d’annulation de son droit à un procès équitable et à l’égalité de traitement, étant donné qu’elle aurait été privée, contrairement, en substance, à l’intervenant, d’une « véritable seconde chance » devant la chambre de recours.

41      L’EUIPO conclut à l’irrecevabilité de ce grief dans la mesure où il concerne la légalité de la décision de la division d’annulation. L’EUIPO et l’intervenant soutiennent également que ce grief n’est pas fondé.

42      Conformément à l’article 72, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, le recours devant le juge de l’Union n’est ouvert qu’à l’encontre des seules décisions des chambres de recours. Dès lors, le grief de la requérante tiré de la violation du droit d’être entendu en ce que la division d’annulation ne lui aurait pas donné la possibilité de prendre position sur les preuves déposées le 3 décembre 2020 doit, en tout état de cause, être écarté comme inopérant dans le cadre du présent recours devant le Tribunal [voir, en ce sens, arrêt du 25 janvier 2018, SilverTours/EUIPO (billiger-mietwagen.de), T‑866/16, non publié, EU:T:2018:32, point 19 et jurisprudence citée]. Il en va de même des griefs, à les supposer distincts, tirés de la violation, en conséquence de la méconnaissance de son droit d’être entendue, de son droit à un procès équitable ou à l’égalité de traitement.

43      S’agissant du grief en ce qu’il est dirigé contre la décision attaquée, force est de constater que la requérante a été mise en mesure de commenter les éléments de preuve déposés le 3 décembre 2020, puisqu’elle y a répondu dans ses observations au recours et dans le recours incident. Dès lors, aucune violation de son droit d’être entendue ne saurait être constatée à cet égard devant la chambre de recours.

44      Dans ces conditions, le troisième grief invoqué au soutien du premier moyen doit être écarté comme étant, pour partie inopérant et pour partie non fondé, et par voie de conséquence, les griefs tirés, à les supposer distincts, de son droit à un procès équitable et à l’égalité de traitement doivent également être écartés.

45      Il résulte des considérations qui précèdent que le troisième grief du premier moyen doit être écarté et, par voie de conséquence, le premier moyen dans son ensemble.

 Sur le deuxième moyen

46      Le deuxième moyen est tiré, en substance, de la violation de l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, lu en combinaison avec l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du même règlement, en raison de l’absence d’usage sérieux de la marque contestée pour les « polos » et les « chandails » de la classe 25.

47      Ce moyen s’articule en quatre branches.

 Observations liminaires

48      Il convient de relever, d’emblée, que l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001 prévoit, notamment, que le titulaire d’une marque de l’Union européenne est déclaré déchu de ses droits si, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque n’a pas fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée, et qu’il n’existe pas de justes motifs pour le non-usage.

49      Selon une jurisprudence constante, une marque fait l’objet d’un usage sérieux, au sens de l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle, qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et ces services, à l’exclusion d’usages à caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque (voir arrêt du 3 juillet 2019, Viridis Pharmaceutical/EUIPO, C‑668/17 P, EU:C:2019:557, point 38 et jurisprudence citée).

50      L’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci dans la vie des affaires, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’étendue et la fréquence de l’usage de la marque (voir ordonnance du 11 septembre 2019, Camomilla/EUIPO, C‑68/19 P, non publiée, EU:C:2019:711, point 12 et jurisprudence citée).

51      En vertu de l’article 10, paragraphes 3 et 4, du règlement délégué 2018/625, applicable aux procédures de déchéance conformément à l’article 19, paragraphe 1, du même règlement délégué, la preuve de l’usage d’une marque doit porter sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque et se limite à la production de pièces justificatives, comme, par exemple, des emballages, des étiquettes, des barèmes de prix, des catalogues, des factures, des photographies, des annonces dans les journaux, ainsi qu’aux déclarations écrites visées à l’article 97, paragraphe 1, sous f), du règlement 2017/1001.

52      À cet égard, dans la mesure où la durée et le lieu de l’usage ne sont pas contestés dans le cadre de la présente procédure, il y a lieu d’examiner les éléments fournis et les arguments avancés par les parties en ce que ceux-ci portent sur la nature et l’importance de l’usage de la marque contestée.

 Sur la première branche du deuxième moyen, tirée de l’usage de la marque contestée sous une forme modifiée

53      La chambre de recours a observé que la majorité des images figurant dans les preuves présentées par l’intervenant montraient le signe suivant :

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54      À cet égard, la chambre de recours a constaté que l’ajout de la lettre majuscule « Y » suivie d’un point devant l’élément verbal « noah » n’altérait pas le caractère distinctif de la marque contestée. D’une part, ladite lettre serait déjà présente dans l’élément figuratif de cette marque et ne constituerait donc pas un élément totalement nouveau. D’autre part, l’ajout de la première lettre du prénom au nom de famille Noah ne modifierait pas le caractère distinctif de la marque contestée, étant donné que cette marque telle qu’elle serait utilisée ferait toujours référence à la même personne. En effet, les noms de famille possèderaient généralement un caractère distinctif plus élevé que celui des prénoms et, partant, dans les deux formes de la marque contestée, les éléments codominants seraient l’élément figuratif et le mot « noah ». Ce dernier serait susceptible d’être perçu par les consommateurs comme un nom de famille, car, dans le secteur de l’habillement, l’utilisation des noms de famille serait courante.

55      La requérante soutient que l’utilisation de la lettre majuscule « Y » suivie d’un point altère le caractère distinctif de la marque contestée telle qu’elle a été enregistrée, au sens de l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement 2017/1001. En particulier, l’élément verbal « Y. Noah » dans la marque contestée telle qu’elle serait utilisée ferait clairement référence à M. Noah, à la différence de l’élément verbal « noah » dans la marque contestée telle qu’elle serait enregistrée, qui pourrait renvoyer à la fois à un nom de famille et à un prénom. À l’appui de son argument, la requérante invoque une décision de la division d’annulation de l’EUIPO du 26 janvier 2021 (demande en déchéance n° C 36 026), selon laquelle cette dernière a reconnu que l’omission de l’élément verbal « yannick » modifierait de manière significative le caractère distinctif de la marque verbale enregistrée YANNICK NOAH.

56      L’EUIPO et l’intervenant contestent les affirmations de la requérante.

57      Conformément à l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement 2017/1001, constitue un usage de la marque de l’Union européenne, un usage sous une forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de la marque dans la forme sous laquelle elle a été enregistrée, que la marque soit ou non également enregistrée sous la forme utilisée au nom du titulaire.

58      Selon la jurisprudence, l’objet de l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement 2017/1001, qui évite d’imposer une conformité stricte entre la forme utilisée de la marque et celle sous laquelle la marque a été enregistrée, est de permettre au titulaire de cette dernière d’apporter au signe, à l’occasion de son exploitation commerciale, les variations qui, sans en modifier le caractère distinctif, permettent de mieux l’adapter aux exigences de commercialisation et de promotion des produits ou des services concernés. Dans de pareilles situations, lorsque le signe utilisé dans le commerce diffère de la forme sous laquelle celui-ci a été enregistré uniquement par des éléments négligeables, de sorte que les deux signes peuvent être considérés comme globalement équivalents, la disposition susvisée prévoit que l’obligation d’usage de la marque enregistrée peut être remplie en rapportant la preuve de l’usage du signe qui en constitue la forme utilisée dans le commerce [voir arrêt du 27 février 2014, Lidl Stiftung/OHMI – Lídl Music (LIDL), T‑226/12, non publié, EU:T:2014:98, point 49 et jurisprudence citée].

59      Ainsi, le constat d’une altération du caractère distinctif de la marque telle qu’enregistrée requiert un examen du caractère distinctif et dominant des éléments ajoutés en se fondant sur les qualités intrinsèques de chacun de ces éléments ainsi que sur la position relative des différents éléments dans la configuration de la marque [voir arrêt du 29 avril 2020, Lidl Stiftung/EUIPO – Plásticos Hidrosolubles (green cycles), T‑78/19, non publié, EU:T:2020:166, point 67 et jurisprudence citée].

60      En l’espèce, il y a lieu d’apprécier si le caractère distinctif de la marque contestée telle qu’elle a été enregistrée a été modifié par l’ajout d’éléments additionnels, tels que la première lettre du prénom de l’intervenant, à savoir la lettre majuscule « Y », suivie d’un point.

61      À cet égard, d’une part, la lettre majuscule « Y » suivie d’un point devant le mot « noah » constitue une répétition d’un élément déjà présent dans l’élément figuratif de la marque contestée, laquelle est décrite par son titulaire comme composée, notamment, d’une lettre majuscule « Y » de couleur noire. D’autre part, cette lettre est placée en dessous de l’élément figuratif qui domine l’impression d’ensemble tant de la marque telle qu’enregistrée, conjointement avec le terme « noah », que de la marque modifiée, de sorte que, sans être négligeable, elle occupe une place secondaire dans la perception de cette marque.

62      En outre, l’usage de signes constitués de noms de famille est courant dans le secteur de l’habillement [arrêt du 20 février 2013, Caventa/OHMI – Anson’s Herrenhaus (B BERG), T‑631/11, non publié, EU:T:2013:85, point 64]. Dès lors, concernant la signification conceptuelle de la marque contestée, l’élément verbal « noah » pourra être perçu, tant dans la forme enregistrée que dans la forme modifiée, comme un nom de famille qui fait référence à une personne spécifique, à savoir l’intervenant.

63      En tout état de cause, la requérante reconnait, elle-même, au point 56 de la requête, que l’élément verbal « noah » tel qu’il figure dans la forme enregistrée ainsi que dans la forme modifiée de la marque contestée peut être perçu comme un nom de famille.

64      Enfin, il y a lieu de constater, à l’instar de EUIPO, que l’ajout de la première lettre du prénom ne fait que renforcer la référence à l’intervenant.

65      Partant, il y a lieu de constater que le signe contesté sous sa forme utilisée dans le commerce peut être considéré comme globalement équivalent à la marque contestée telle qu’elle a été enregistrée, l’élément ajouté composé de la lettre majuscule « Y » suivie d’un point n’étant ni distinctif ni dominant dans la configuration de la marque modifiée. Dans ces conditions, un tel élément ne saurait être perçu par le public pertinent comme susceptible d’altérer le caractère distinctif de la marque contestée.

66      S’agissant de la décision de la division d’annulation invoquée par requérante et mentionnée au point 55 ci-dessus, il convient de rappeler que les chambres de recours ne sauraient être liées par les décisions d’instances inférieures de l’EUIPO [voir arrêt du 19 septembre 2019, Showroom/EUIPO – E-Gab (SHOWROOM), T‑679/18, non publié, EU:T:2019:631, point 96 et jurisprudence citée]. En tout état de cause, cette décision est dénuée de pertinence en l’espèce. En effet, l’omission du mot « yannick » dans la marque verbale YANNICK NOAH est susceptible d’affaiblir le lien entre ladite marque et l’intervenant. Au contraire, dans le cas d’espèce, l’ajout de la lettre majuscule « Y » suivie d’un point, qui représente l’initiale dudit intervenant, renforce, ainsi qu’il a été relevé au point 64 ci-dessus, la référence au titulaire de la marque contestée.

67      Au vu de tout ce qui précède, la chambre de recours a conclu à juste titre que l’ajout de la lettre majuscule « Y » suivie d’un point ne modifie pas le caractère distinctif de la marque contestée.

68       La première branche du deuxième moyen doit être écartée.

 Sur la troisième branche du deuxième moyen, tirée d’une interprétation erronée du terme « chandail »

69      Compte tenu de l’argumentation de la requérante développée au soutien de la deuxième et de la troisième branches du présent moyen, le Tribunal estime opportun d’examiner d’abord la troisième branche.

70      La chambre de recours a conclu que la marque contestée n’avait pas été expressément enregistrée pour des « pulls sans manches ». Toutefois, ces produits relèveraient de la catégorie plus large des « chandails », compris dans la classe 25, pour laquelle la marque contestée serait enregistrée. La chambre de recours a ajouté que le fait que ces produits sont sans manches ne permettait pas de considérer qu’ils relèveraient d’une sous-catégorie indépendante de « chandails sans manches ». L’usage de ces derniers serait donc suffisant pour établir l’usage pour l’ensemble de la catégorie des « chandails », compris dans la classe 25.

71      La requérante soutient que la chambre de recours a fait une interprétation incorrecte du terme « chandail » par rapport aux produits pour lesquels la marque contestée a été enregistrée. La requérante soutient, en substance, que les « pulls sans manches » commercialisés par l’intervenant sont des articles de sport qui devraient être qualifiés de « spencer », produits très spécifiques qui ne couvriraient pas l’ensemble de la catégorie des « chandails », compris dans la classe 25. Dans ces conditions, la chambre de recours aurait commis une erreur d’appréciation en estimant que l’usage des « pulls sans manches » suffisait pour établir l’usage de la catégorie plus large des « chandails ».

72      En outre, la requérante affirme que l’usage sérieux de la marque contestée pour ces produits ne résulte pas des intentions de l’intervenant dans la mesure où les demandes de marques verbales françaises NOAH et Y. NOAH, déposées par ce dernier entre 2015 et 2020, ne désigneraient pas les « chandails ».

73      L’EUIPO et l’intervenant contestent ces arguments.

74      Il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, en ce qui concerne des produits ou des services rassemblés au sein d’une catégorie large, susceptible d’être subdivisée en plusieurs sous-catégories autonomes, il est nécessaire d’exiger du titulaire de la marque antérieure d’apporter la preuve de l’usage sérieux de cette marque pour chacune de ces sous-catégories autonomes (voir, en ce sens, arrêt du 16 juillet 2020, ACTC/EUIPO, C‑714/18 P, EU:C:2020:573, point 43). Toutefois, si une marque a été enregistrée pour des produits ou des services définis de façon tellement précise et circonscrite qu’il n’est pas possible d’opérer des divisions significatives à l’intérieur de la catégorie concernée, alors, la preuve de l’usage sérieux de la marque pour lesdits produits ou services couvre nécessairement toute cette catégorie [arrêt du 14 juillet 2005, Reckitt Benckiser (España)/OHMI – Aladin (ALADIN), T‑126/03, EU:T:2005:288, point 45].

75      En ce qui concerne le ou les critères pertinents à appliquer aux fins de l’identification d’une sous-catégorie cohérente de produits ou de services susceptible d’être envisagée de manière autonome le critère de la finalité et de la destination est un critère essentiel dans la définition d’une sous-catégorie de produits ou de services (voir, en ce sens, arrêt du 16 juillet 2020, ACTC/EUIPO, C‑714/18 P, EU:C:2020:573, point 44 et jurisprudence citée).

76      En l’espèce, il convient de relever que les « chandails » sont des vêtements destinés à couvrir le haut du corps, qu’ils soient ou non munis de manches. L’absence de manches ne modifie donc ni la finalité ni la destination des produits relevant de la catégorie « chandails ». Dès lors les « pulls sans manches » ne sauraient constituer une sous-catégorie autonome au sein de la catégorie plus large des « chandails » de la classe 25.

77      La requérante n’a, au demeurant, ni établi ni même allégué que la finalité d’un « pull sans manches » serait différente de celle d’un « chandail ». La circonstance qu’un pull sans manches puisse être « tricoté » ou qu’il soit « la plupart du temps fermé par des boutons », ce qui peut également être le cas d’un chandail, ne saurait suffire pour justifier l’existence d’une sous-catégorie cohérente susceptible d’être envisagée de manière autonome. De même, la requérante n’a fourni aucune explication relative à l’existence d’une finalité ou d’une destination spécifique d’un « spencer » qui serait différente de celle d’un « chandail ». Elle s’est bornée, à cet égard, à qualifier un tel produit d’« article de sport », « produit unique et très spécifique », sans en identifier les caractéristiques susceptibles de définir une sous-catégorie autonome au sein de la catégorie plus large des « chandails », étant précisé qu’un « chandail » peut également être utilisé pour couvrir le haut du corps lors d’une activité sportive.

78      En outre, l’argument de la requérante selon lequel l’usage sérieux de la marque contestée pour des « chandails » ne résulterait pas non plus des intentions de l’intervenant dans la mesure où ce dernier aurait déposé des demandes de marques françaises ne couvrant pas de tels produits n’est pas pertinent aux fins de l’appréciation de l’usage sérieux de la marque contestée pour ces mêmes produits. En effet, les marques dont se prévaut la requérante sont des marques verbales françaises et ne correspondent pas à la marque contestée qui est une marque figurative de l’Union européenne. L’usage de ces marques ne concerne ni le même signe ni le même territoire. Elles ne sauraient donc être prises en compte pour apprécier la portée de l’utilisation de la marque contestée ainsi que les intentions réelles de son titulaire d’en faire usage.

79      Dans ces conditions, la chambre de recours a pu considérer à bon droit que le fait que les « pulls sans manches » n’avaient pas de manches ne permettait pas d’identifier une sous-catégorie autonome au sein de la catégorie plus large des « chandails », compris dans la classe 25.

80      Partant, la troisième branche du deuxième moyen doit être rejetée.

 Sur la deuxième branche du deuxième moyen, tirée d’erreurs dans l’appréciation des preuves de l’usage pour les « polos » et les « chandails »

81      La chambre de recours a considéré que les seuls produits pour lesquels les factures et la déclaration relative aux recettes des ventes pouvaient être associées à des représentations de produits portant la marque contestée étaient les « polos » et les « pulls sans manches ». La chambre de recours s’est appuyée sur les représentations des produits énumérés dans ladite déclaration et comportant pour les produits concernés, le numéro ou la description de l’article correspondant.

82      La requérante soutient que la chambre de recours a interprété de manière erronée les preuves de l’usage produites par l’intervenant concernant la période pertinente pour les « polos » et les « chandails ».

83      Premièrement, elle souligne que l’intervenant n’a produit aucune facture pour le polo portant la référence 1822382 TENNIS PRO Polo France N2 18 M cobalt/n. En outre, la chambre de recours aurait accepté, à tort, la référence croisée entre des factures datées et des dessins non datés comme preuve de l’usage de la marque contestée.

84      Deuxièmement, la requérante fait valoir que les éléments de preuve sont insuffisants, dans la mesure où les représentations des produits sont des dessins et non des photographies, de sorte qu’il ne saurait être exclu que de telles représentations diffèrent des produits dont l’usage est revendiqué. À cet égard, elle reproche à l’intervenant de ne pas avoir été en mesure de présenter des catalogues avec une représentation des produits en cause.

85      L’EUIPO et l’intervenant contestent l’argumentation de la requérante.

86      Pour examiner, dans un cas d’espèce, le caractère sérieux de l’usage de la marque contestée, il convient de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce, ce qui implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte [arrêt du 8 juillet 2004, MFE Marienfelde/OHMI – Vétoquinol (HIPOVITON), T‑334/01, EU:T:2004:223, point 36]. Il ne s’agit donc pas d’analyser chacune des preuves de façon isolée, mais de les analyser conjointement, afin d’en identifier le sens le plus probable et le plus cohérent. Dans le cadre d’une telle analyse, il ne peut être exclu qu’un faisceau d’éléments de preuve permette d’établir les faits à démontrer, alors même que chacun de ces éléments, pris isolément, serait impuissant à rapporter la preuve de l’exactitude de ces faits [voir, en ce sens, arrêt du 6 mars 2014, Anapurna/OHMI – Annapurna (ANNAPURNA), T‑71/13, non publié, EU:T:2014:105, point 45; voir également, par analogie, arrêt du 17 avril 2008, Ferrero Deutschland/OHMI, C‑108/07 P, non publié, EU:C:2008:234, point 36].

87      En l’espèce, il y a lieu d’observer que, l’absence de factures alléguée par la requérante pour un produit spécifique, à savoir, le polo portant la référence 1822382 TENNIS PRO Polo France N2 18 M cobalt/n, ne s’oppose pas à ce que soit constatée l’existence d’un usage sérieux de la marque contestée pour ce produit. En effet, la preuve de l’usage requiert une analyse d’ensemble et ne saurait se limiter à l’analyse d’un seul élément pour remettre en cause l’appréciation globale. Βien qu’aucune facture ne soit produite pour ce modèle de polo, celui-ci figure dans la déclaration des recettes des ventes ainsi que dans les autres preuves fournies par l’intervenant, à savoir une représentation produite en annexe 6.

88      En outre, la requérante n’allègue pas que l’intervenant n’aurait pas fourni de factures pour les autres « polos » et « pulls sans manches » cités par la chambre de recours à l’appui de son raisonnement. Elle ne saurait ainsi valablement contester l’appréciation résultant des références croisées réalisées par la chambre de recours entre les factures produites et la représentation de la majorité des produits.

89      Dans ces conditions, l’argument tiré de l’absence de production de factures pour l’un des polos commercialisés par l’intervenant ne saurait suffire à invalider l’appréciation de la chambre de recours, selon laquelle les « polos » et les « pulls sans manches » étaient les seuls produits pour lesquels les factures et la déclaration présentant les recettes pouvaient être associées à des représentations des produits portant la marque contestée.

90      Par ailleurs, il n’est pas contesté que le modèle de polo ou de pull sans manche commercialisé par l’intervenant est référencé par un numéro d’article ou identifié par une description dans les documents produits par ce dernier. Si la requérante soutient que, « parfois, des produits portant la même référence de produit sont actualisés après un certain temps », et indépendamment de la portée exacte de son affirmation, elle ne l’établit pas. Dans ces conditions, la circonstance que la preuve représentant le produit en cause n’est pas datée ne fait pas obstacle à la possibilité de procéder à des références croisées entre les factures produites et les numéros d’articles ou à la description des produits en cause pour établir le chiffre de ventes de ces mêmes produits réalisés sur la période pertinente visée par lesdites factures. Partant, l’argument de la requérante tiré de l’impossibilité de procéder à des références croisées entre des factures datées et des dessins non datés est sans incidence sur l’appréciation de la chambre de recours.

91      Concernant, enfin, l’allégation de la requérante selon laquelle les éléments de preuve pour les « polos » et les « chandails » sont insuffisants, dans la mesure où les représentations des produits sont des dessins et non des photographies, il convient d’indiquer que la circonstance que le produit fasse l’objet d’une représentation graphique et non photographique ne suffit pas pour invalider la pertinence de l’appréciation de la chambre de recours qui s’appuie sur la description du produit ou sur son numéro d’article.

92      L’absence de catalogue reprochée par la requérante est également sans incidence dès lors que la chambre de recours s’est appuyée sur les éléments d’identification des produits en cause pour évaluer, en ciblant les factures relatives à ces produits, le chiffre de vente réalisé sur la période pertinente.

93      À cet égard, ainsi que l’observe à juste titre l’EUIPO, en ce qui concerne l’appréciation de l’usage sérieux pour les « polos » et les « chandails », l’analyse de la chambre de recours ne repose pas sur chaque élément de preuve, pris isolément, mais se fonde sur une appréciation globale de l’ensemble des éléments de preuve mis à sa disposition.

94      La deuxième branche du deuxième moyen doit donc être écartée.

 Sur la quatrième branche du deuxième moyen, tirée d’une appréciation erronée de l’importance de l’usage de la marque contestée

95      La chambre de recours a considéré que les documents présentés dans leur ensemble prouvaient une importance suffisante de l’usage de la marque contestée pour les « polos » et les « chandails » de la classe 25. Au point 73 de la décision attaquée, la chambre de recours s’est référée à la déclaration présentant les recettes des ventes au cours des années 2015 à 2019. Selon la chambre de recours, tout au long de la période pertinente, les ventes totales se sont élevées à 87 302,79 euros pour les « polos » et 3 446,08 euros pour les « pulls sans manches ». Les chiffres de ventes seraient étayés par des factures ainsi que par des campagnes publicitaires et des articles de presse. De plus, les chiffres de ventes relativement faibles seraient, toujours selon la chambre de recours, justifiés par le fait que la marque contestée aurait été utilisée pour une édition limitée de vêtements. L’usage de la marque contestée serait régulier et concernerait une longue période, de sorte qu’il répondrait à une réelle justification commerciale.

96      La requérante allègue que la chambre de recours n’aurait pas correctement évalué l’importance de l’usage de la marque contestée pour les « polos » et les « chandails ». En particulier, elle souligne que, dans le secteur économique de la mode et des vêtements de sports, les volumes de ventes, à savoir 1 768 polos et 127 gilets prétendument vendus en cinq ans, sont faibles pour prouver l’usage sérieux de la marque contestée. En outre, selon elle, l’intervenant n’aurait pas fourni d’informations sur les redevances reçues de son licencié exclusif, Le Coq Sportif, ce qui conforterait l’absence d’un tel usage.

97      L’EUIPO et l’intervenant contestent ces arguments.

98      Concernant l’importance de l’usage, en l’occurrence remise en cause par la requérante par son argument relatif aux volumes de ventes, il convient de rappeler que la question de savoir si un usage est quantitativement suffisant pour maintenir ou créer des parts de marché pour les produits ou les services protégés par la marque dépend de plusieurs facteurs et d’une appréciation au cas par cas. Les caractéristiques de ces produits ou de ces services, la fréquence ou la régularité de l’usage de la marque, le fait que la marque est utilisée pour commercialiser l’ensemble des produits ou des services identiques de l’entreprise titulaire ou simplement certains d’entre eux, ou encore les preuves relatives à l’usage de la marque que le titulaire est à même de fournir, sont au nombre des facteurs qui peuvent être pris en considération (voir arrêt du 11 mai 2006, Sunrider/OHMI, C‑416/04 P, EU:C:2006:310, point 71 et jurisprudence citée).

99      Il s’ensuit qu’il n’est pas possible de déterminer a priori, de façon abstraite, quel seuil quantitatif devrait être retenu pour déterminer si l’usage a ou non un caractère sérieux. Une règle de mininis, qui ne permettrait pas à l’EUIPO ou, sur recours, au Tribunal d’apprécier l’ensemble des circonstances du litige qui leur est soumis ne peut, dès lors, être fixée (voir, en ce sens, ordonnance du 27 janvier 2004, La Mer Technology, C‑259/02, EU:C:2004:50, point 25). Ainsi, lorsqu’il répond à une réelle justification commerciale, dans les conditions mentionnées aux points 50 et 51 ci-dessus, un usage même minime peut être suffisant pour établir l’existence d’un caractère sérieux (voir, en ce sens, ordonnance du 27 janvier 2004, La Mer Technology, C‑259/02, EU:C:2004:50, point 27).

100    En effet, dans l’interprétation de la notion de l’usage sérieux, il convient de prendre en compte le fait que la ratio legis de l’exigence selon laquelle la marque contestée doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux ne vise ni à évaluer la réussite commerciale ni à contrôler la stratégie économique d’une entreprise ou encore à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes [voir arrêts du 24 mai 2012, TMS Trademark-Schutzrechtsverwertungsgesellschaft/OHMI – Comercial Jacinto Parera (MAD), T‑152/11, non publié, EU:T:2012:263, point 18 et jurisprudence citée, et du 15 juillet 2015, TVR Automotive/OHMI – TVR Italia (TVR ITALIA), T‑398/13, EU:T:2015:503, point 45 et jurisprudence citée].

101    Il y a toutefois lieu d’ajouter que plus le volume commercial de l’exploitation de la marque est limité, plus il est nécessaire que le détenteur de la marque apporte des indications supplémentaires permettant d’écarter d’éventuels doutes quant au caractère sérieux de l’usage de la marque concernée [voir, en ce sens, arrêt du 18 janvier 2011, Advance Magazine Publishers/OHMI – Capela & Irmãos (VOGUE), T‑382/08, non publié, EU:T:2011:9, point 31]. Ainsi, un faible volume de produits ou de services commercialisés sous la marque contestée peut être compensé par une forte intensité ou une certaine constance dans le temps de l’usage de cette marque et inversement [voir arrêt du 15 septembre 2011, centrotherm Clean Solutions/OHMI – Centrotherm Systemtechnik (CENTROTHERM), T‑427/09, EU:T:2011:480, point 28 et jurisprudence citée].

102    En l’espèce, en premier lieu, s’agissant de l’importance de l’usage de la marque contestée pour les « polos », il peut être constaté que les recettes de ventes représentent un montant de 87 302,79 euros et correspondent à un volume de ventes de 1 940 articles, et non pas de 1 768 articles, contrairement à ce qu’a soutenu la requérante, sur une période de cinq années, à savoir, 172 en 2015, 878 en 2016, 360 en 2017, 187 en 2018 et 343 en 2019. De tels volumes semblent suffisants pour caractériser un usage sérieux compte tenu, en particulier, de la stratégie de commercialisation en édition limitée des polos. En outre, ces recettes de ventes montrent un usage régulier de la marque contestée tout au long de la période pertinente. De plus, la commercialisation de polos sous la marque contestée pendant la période pertinente est corroborée par des campagnes publicitaires et des articles de presse. L’ensemble de ces éléments est donc suffisant pour caractériser un usage sérieux de la marque contestée pour les « polos ».

103    En second lieu, s’agissant de l’importance de l’usage de la marque contestée pour les « chandails », il peut être constaté que les recettes de ventes représentent un montant total de 3 446,08 euros et correspondent à un volume de ventes de 127 articles sur une période de trois années, à savoir, 92 articles en 2017, 31 articles en 2018 et quatre articles en 2019.

104    Il ressort de la jurisprudence qu’il suffit qu’une marque ait fait l’objet d’un usage pendant une partie de la période pertinente pour constater un usage sérieux [voir, en ce sens, arrêt du 8 juillet 2004, Sunrider/OHMI – Espadafor Caba (VITAFRUIT), T‑203/02, EU:T:2004:225, point 45]. En l’espèce, la marque a été utilisée pour commercialiser des chandails pendant une période ininterrompue de trois années, ce qui représente plus de la moitié de la période pertinente et constitue une période suffisamment longue pour constater des actes d’usage objectivement propres à créer ou à conserver un débouché pour les produits en question.

105    Même s’il est vrai que le montant des ventes de « chandails », à savoir 3 446,08 euros, est relativement faible, il y a lieu de rappeler que, conformément à la jurisprudence rappelée au point 100 ci-dessus, l’exigence d’un usage sérieux ne vise ni à évaluer la réussite commerciale d’une entreprise, ni à contrôler sa stratégie économique, ni encore à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes. De même, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 99 ci-dessus, un usage même minime peut être suffisant pour être qualifié de sérieux, à condition qu’il soit considéré comme justifié, dans le secteur économique concerné, pour maintenir ou créer des parts de marché pour les produits ou les services protégés par la marque en cause.

106    Compte tenu de la commercialisation des chandails de façon relativement constante sur une période de trois années au cours de la période pertinente ainsi que de la stratégie marketing de l’intervenant consistant en une édition limitée de vêtements, le volume relativement faible des ventes de ces chandails vu dans ce contexte n’est pas susceptible d’établir qu’il s’agit d’un usage purement symbolique, minime ou fictif dans le seul but de maintenir la protection du droit à la marque (voir, en ce sens, arrêt du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 49).

107    En outre, s’agissant de l’allégation de la requérante, selon laquelle la non-production par l’intervenant d’informations sur les redevances reçues de son licencié exclusif, Le Coq Sportif, constituerait un indice d’absence d’un usage sérieux de la marque, il convient de rappeler que dans le droit des marques de l’Union, s’applique le principe de la liberté de la preuve, qui confère aux parties la possibilité de produire devant le juge de l’Union tout élément de preuve obtenu de façon régulière qu’elles estiment pertinent pour étayer leurs positions. Cette liberté de la preuve contribue à garantir aux parties un droit à un recours effectif, consacré à l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne [voir arrêt du 16 décembre 2020, H.R. Participations/EUIPO – Hottinger Investment Management (JCE HOTTINGUER), T‑535/19, non publié, EU:T:2020:614, point 65 et jurisprudence citée]. Il s’ensuit que le juge de l’Union doit juger le bien-fondé du recours sur la base des éléments de preuve librement et effectivement produits par les parties et non en tirant des conclusions de la non-production d’un élément de preuve spécifique.

108    Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu d’écarter la quatrième branche du deuxième moyen ainsi que, par voie de conséquence, le deuxième moyen dans son ensemble.

 Sur le troisième moyen

109    Ce moyen est tiré, en substance, de la violation de l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, en lien avec le recours incident formé par la requérante le 7 octobre 2021 au motif de l’absence d’usage sérieux de la marque contestée pour les « chemises de sport décontractées ».

110    La requérante soutient que la chambre de recours a rejeté à tort son recours incident en ce qui concerne les « chemises de sport décontractées », alors qu’elle avait établi les raisons pour lesquelles la marque contestée n’avait pas fait l’objet d’un usage sérieux pour cette catégorie spécifique.

111    L’EUIPO et l’intervenant contestent ces affirmations de la requérante.

112    Comme mentionné dans le point 10 ci-dessus, la requérante a formé un recours incident demandant l’annulation de la décision de la division d’annulation dans la mesure où elle avait rejeté la demande de déchéance en ce qui concerne les « chemises de sport décontractées ».

113    Il ressort du point 10 de la décision attaquée que l’emploi des termes « chemises de sport décontractées » par la division d’annulation correspond à l’emploi du terme « polos » par la chambre de recours.

114    La requérante se borne à renvoyer à l’appui de son troisième moyen à ses arguments développés au soutien de ses premier et deuxième moyens. Dès lors qu’il résulte de l’analyse des deux premiers moyens que la chambre de recours a pu considérer à bon droit que le titulaire de la marque contestée avait établi l’usage sérieux de cette marque pour les « polos » comme sous-catégorie de la catégorie plus large des « chemises » de la classe 25, il y a lieu de constater que la chambre de recours a rejeté à juste titre le recours incident en concluant dans la décision attaquée que l’usage sérieux avait été établi par l’intervenant pour les produits « polos ».

115    Par conséquent, il y a lieu d’écarter le troisième moyen comme étant non fondé, et, par voie de conséquence, de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

116    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

117    Une audience ayant eu lieu et la requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenant.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Noah Clothing LLC est condamnée aux dépens.

Marcoulli

Tomljenović

Valasidis

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 janvier 2024.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.