Language of document : ECLI:EU:T:2021:324

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

9 juin 2021 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Promotion – Exercice de promotion 2018 – Décision de non-promotion – Examen comparatif des mérites – Critères d’évaluation – Erreur manifeste d’appréciation – Égalité de traitement – Non-discrimination »

Dans l’affaire T‑575/19,

Élise Hill Mansilla, demeurant à Rodemack (France), représentée par Me R. Mbonyumutwa, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par Mme M. Brauhoff et M. L. Vernier, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 270 TFUE et tendant, d’une part, à l’annulation de la décision de la Commission du 13 novembre 2018 de ne pas inscrire le nom de la requérante sur la liste définitive des fonctionnaires promus dans le cadre de l’exercice de promotion 2018 et, d’autre part, à l’indemnisation des préjudices moraux et matériels que cette dernière aurait prétendument subis du fait de cette décision,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de MM. H. Kanninen, président, M. Jaeger (rapporteur) et Mme O. Porchia, juges,

greffier : Mme M. Marescaux, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 16 novembre 2020,

rend le présent

Arrêt

I.      Antécédents du litige, procédure et conclusions des parties

A.      Antécédents du litige

1        La requérante, Mme Élise Hill Mansilla, est entrée en fonctions à la Commission des Communautés européennes le 1er janvier 1998. Elle a été promue au grade AST 4 avec effet au 1er janvier 2009. En dernier lieu, elle occupait un poste de grade AST 4, échelon 5, à la direction générale (DG) « Réseaux de communication, contenu et technologies » de la Commission à Luxembourg (Luxembourg).

2        L’exercice de promotion 2018, qui concernait la période courant du 1er janvier au 31 décembre 2017, a été lancé par la publication de l’information administrative no 13-2018, du 3 avril 2018.

3        Le 18 juin 2018, la liste des fonctionnaires proposés à la promotion par la DG « Réseaux de communication, contenu et technologies » a été publiée dans le système informatique de gestion du personnel Sysper. Le nom de la requérante n’y figurait pas. Cette information a également été communiquée à la requérante par un courriel de son directeur général du même jour. Au préalable, après examen et comparaison des mérites des fonctionnaires promouvables, les propositions de promotion avaient été discutées avec une délégation de la représentation du personnel.

4        Le 21 juin 2018, la requérante a introduit, auprès du comité paritaire de promotion (ci‑après le « CPP »), un appel à l’encontre de la non‑inclusion de son nom sur la liste des fonctionnaires proposés à la promotion, conformément à l’article 5, paragraphe 7, de la décision de la Commission C(2013) 8968 final, du 16 décembre 2013, portant dispositions générales d’exécution de l’article 45 du statut (ci-après les « DGE 45 »).

5        Dans un premier temps, cet appel a été analysé par le groupe paritaire intermédiaire (ci‑après le « GPI »). Le 25 septembre 2018, le GPI a émis à l’unanimité, à l’attention du CPP, l’avis de ne pas recommander de promouvoir la requérante.

6        L’appel a ensuite été examiné par le CPP pour le groupe de fonctions AST. Il a suivi la recommandation du GPI et, le 24 octobre 2018, a émis un avis ne recommandant pas de promouvoir la requérante, par 19 voix pour et une abstention.

7        Le 13 novembre 2018, l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci‑après l’« AIPN ») de la Commission a clos l’exercice de promotion 2018 au moyen de l’information administrative no 34/2018 et a publié la liste des fonctionnaires promus. Le nom de la requérante n’y figurait pas.

8        Conformément à l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »), la requérante a introduit une réclamation, enregistrée le 23 janvier 2019 sous la référence R/64/19, à l’encontre de l’information administrative no 34/2018, du 13 novembre 2018.

9        Dans ladite réclamation, la requérante demandait, en substance, à l’AIPN, d’une part, de réviser la décision de promotion au titre de l’année 2018 afin de pouvoir bénéficier d’une promotion et, d’autre part, d’investiguer au sujet de la discrimination raciale exercée au sein de la DG « Réseaux de communication, contenu et technologies » à Luxembourg dont elle estimait être victime.

10      Cette réclamation a été rejetée par la décision de l’AIPN du 23 mai 2019 (ci‑après la « décision de rejet de la réclamation »), qui indiquait, en substance, que, d’une part, aucune erreur manifeste d’appréciation n’avait pu être décelée dans la comparaison des mérites de la requérante avec ceux des fonctionnaires de son grade promus au grade AST 5 lors de l’exercice de promotion 2018, compte tenu du large pouvoir d’appréciation dont disposait l’administration en matière de promotions et, d’autre part, aucun fait n’avait permis de présumer l’existence d’une discrimination fondée sur la couleur de peau de la requérante.

B.      Procédure et conclusions des parties

11      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 19 août 2019, la requérante a introduit le présent recours. La Commission a déposé le mémoire en défense le 14 novembre 2019.

12      Le 6 janvier 2020, la requérante a déposé la réplique. La Commission a déposé la duplique le 11 mars 2020.

13      Par acte du 30 mars 2020, la requérante a formulé une demande motivée, au titre de l’article 106, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, aux fins d’être entendue dans le cadre de la phase orale de la procédure.

14      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision de rejet de la réclamation ;

–        condamner la Commission à des dommages et intérêts en raison des préjudices subis ;

–        enjoindre à la Commission de réévaluer ses mérites de manière impartiale et objective et de la promouvoir, le cas échéant ;

–        condamner la Commission aux dépens ;

–        juger le présent recours par priorité.

15      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

16      Par décision du 12 septembre 2019, le président de la huitième chambre du Tribunal a décidé, conformément à l’article 67, paragraphe 2, du règlement de procédure, de ne pas faire juger la présente affaire en priorité.

II.    En droit

A.      Sur l’objet du litige

17      Le présent recours a pour objet une demande, fondée sur l’article 270 TFUE, tendant, d’une part, à l’annulation de la décision de rejet de la réclamation et, d’autre part, à l’indemnisation des préjudices moraux et matériels que la requérante aurait prétendument subis.

18      En ce qui concerne les conclusions en annulation, il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, le recours, même formellement dirigé contre la décision rejetant la réclamation, a pour effet de saisir le juge de l’acte faisant grief contre lequel la réclamation a été présentée, sauf dans l’hypothèse où le rejet de la réclamation aurait une portée différente de celle de l’acte contre lequel cette réclamation a été formée (arrêt du 21 mai 2014, Mocová/Commission, T‑347/12 P, EU:T:2014:268, point 34 ; voir, également, arrêt du 27 octobre 2016, CW/Parlement, T‑309/15 P, non publié, EU:T:2016:632, point 27 et jurisprudence citée).

19      En outre, compte tenu de ce que la procédure précontentieuse présente un caractère évolutif, une décision explicite de rejet de la réclamation qui ne contient que des précisions complémentaires et se borne ainsi à révéler, de manière détaillée, les motifs de la confirmation de la décision antérieure ne constitue pas un acte faisant grief (voir, en ce sens, arrêt du 7 juin 2005, Cavallaro/Commission, T‑375/02, EU:T:2005:199, points 65 et 66). Néanmoins, ce même caractère évolutif de la procédure précontentieuse implique que ces précisions complémentaires soient prises en considération pour apprécier la légalité de l’acte attaqué (arrêt du 12 décembre 2018, Colin/Commission, T‑614/16, non publié, EU:T:2018:914, point 29).

20      En l’espèce, il y a lieu de constater que la décision de rejet de la réclamation confirme la décision de la Commission de ne pas inscrire le nom de la requérante sur la liste définitive des fonctionnaires promus au titre de l’année 2018, publiée le 13 novembre 2018. Conformément à la jurisprudence rappelée au point 19 ci‑dessus, la circonstance que l’AIPN ait été amenée, en réponse aux arguments avancés par la requérante dans sa réclamation, à apporter des précisions concernant les motifs de la décision du 13 novembre 2018 ne saurait justifier que la décision de rejet de la réclamation soit considérée comme un acte autonome faisant grief à la requérante, la motivation de ladite décision coïncidant, en substance, avec la décision contre laquelle cette réclamation a été dirigée, ce qui n’est, en outre, pas discuté par les parties.

21      Les conclusions en annulation dirigées contre la décision de rejet de la réclamation sont donc dépourvues de contenu autonome et, ainsi, doivent être regardées comme formellement dirigées contre la décision contre laquelle la réclamation a été formée, telle que précisée par la décision de rejet de la réclamation (voir, en ce sens, arrêt du 10 juin 2004, Eveillard/Commission, T‑258/01, EU:T:2004:177, points 30 à 32).

22      Partant, en application de la jurisprudence citée au point 18 ci-dessus, il convient de considérer que l’acte faisant grief à la requérante est la décision de la Commission du 13 novembre 2018 de ne pas inscrire son nom sur la liste définitive des fonctionnaires promus dans le cadre de l’exercice de promotion 2018 (ci‑après la « décision attaquée »), dont la légalité doit être examinée en prenant également en considération la motivation figurant dans la décision de rejet de la réclamation.

23      Il convient d’examiner, dans un premier temps, la demande d’annulation de la décision attaquée et, dans un second temps, la demande d’indemnisation des préjudices prétendument subis.

B.      Sur la demande en annulation

24      Au soutien de sa demande en annulation, la requérante soulève deux moyens, tirés, le premier, d’erreurs manifestes d’appréciation de ses mérites dans le cadre de la procédure de promotion et, le second, d’une violation des principes d’égalité de traitement et de non‑discrimination.

1.      Sur le premier moyen, tiré d’erreurs manifestes d’appréciation dans la procédure de promotion

25      Par son premier moyen, divisé en quatre branches, la requérante allègue, en substance, des erreurs manifestes d’appréciation de ses mérites résultant de la subjectivité du régime d’examen comparatif des mérites, notamment en ce qui concerne les rapports d’évaluation (première branche), l’évaluation de la maîtrise des langues (deuxième branche), l’évaluation du niveau des responsabilités exercées (troisième branche) et le choix des éléments factuels pris en considération par l’AIPN dans le cadre de l’exercice de promotion 2018 (quatrième branche).

26      La Commission conteste tant la recevabilité du premier moyen que son bien‑fondé.

a)      Sur la recevabilité du premier moyen

27      À titre liminaire, il y a lieu de relever que, lors de l’audience, la Commission a précisé qu’elle retirait ses contestations relatives à la recevabilité de la quatrième branche du premier moyen.

28      La Commission considère que les trois premières branches du premier moyen, dans la mesure où elles portent sur des erreurs commises lors de la procédure d’évaluation, sont irrecevables. Elle soulève, ainsi, deux fins de non‑recevoir, tirées, la première, d’une méconnaissance des règles relatives à la contestation de la régularité de la procédure d’évaluation et, la seconde, d’une méconnaissance de la règle de concordance.

1)      Sur la fin de nonrecevoir tirée d’une méconnaissance des règles relatives à la contestation de la régularité de la procédure d’évaluation

29      La Commission considère que, à la lecture de certains arguments présentés dans la requête, une partie des allégations de la requérante (à savoir celles figurant aux points 40 à 46, 50, 56 à 61 et 68 de la requête) porte plutôt sur de prétendues erreurs dans la procédure d’évaluation visée à l’article 43 du statut que sur une erreur d’appréciation de ses mérites dans le cadre de la procédure de promotion visée à l’article 45 du statut.

30      Si la Commission reconnaît que ces deux procédures sont, dans une certaine mesure, inséparables, le rapport d’évaluation servant de base pour l’examen comparatif des mérites afin d’octroyer les promotions, conformément à l’article 45, paragraphe 1, du statut, elle souligne néanmoins que ces deux procédures sont distinctes, dans la mesure où non seulement les bases légales sur lesquelles elles sont fondées ne sont pas les mêmes, mais, en outre, deux AIPN différentes en sont responsables (voir, en ce sens, arrêt du 24 septembre 2019, VF/BCE, T‑39/18, non publié, EU:T:2019:683, point 84 et jurisprudence citée).

31      Or, la Commission relève que la requérante n’a ni fait appel pour contester son rapport d’évaluation dans le délai prévu à l’article 6, paragraphe 8, de la décision C(2013) 8985 final de la Commission, du 16 décembre 2013, relative aux dispositions générales d’exécution de l’article 43 du statut et aux modalités d’application de l’article 44, premier alinéa, du statut (ci-après les « DGE 43 »), lu conjointement avec son article 8, ni soulevé d’erreurs de procédure concernant l’élaboration de celui-ci dans ledit délai.

32      En premier lieu, il convient de relever qu’il ressort de l’article 45, paragraphe 1, du statut que, lors de la procédure de promotion, les rapports dont les fonctionnaires ont fait l’objet, l’utilisation dans l’exercice de leurs fonctions des langues autres que la langue dont ils ont justifié posséder une connaissance approfondie et le niveau des responsabilités exercées font partie des éléments pris en compte aux fins de l’examen comparatif des mérites, lequel constitue la base de la procédure de promotion, conformément à l’article 4 des DGE 45.

33      Par conséquent, des arguments portant contestation d’éléments pris en compte dans le cadre de l’examen comparatif des mérites réalisé en application de l’article 45 du statut doivent être considérés comme recevables dans la mesure où ils s’inscrivent dans une tentative de démonstration de l’existence d’une erreur affectant la procédure de promotion.

34      En l’espèce, il y a lieu de relever, dans un premier temps, que, parmi les arguments identifiés par la Commission (voir point 29 ci‑dessus), tel est le cas pour ceux qui visent à démontrer une prétendue impossibilité d’utiliser certaines indications dans le cadre de l’examen comparatif des mérites. Or, dans une telle situation, la requérante est fondée à formuler de tels arguments pour contester la procédure de promotion et ces arguments sont, dès lors, recevables dans le cadre du présent recours.

35      Ainsi en est‑il, premièrement, des points 40, 41 et 50 de la requête, auxquels la requérante développe une argumentation relative au caractère subjectif du rapport d’évaluation. En effet, la requérante souligne que ledit rapport a été rédigé par une seule personne, qui n’a pas eu souvent la possibilité de travailler avec elle, et qu’il exclut les évaluations positives d’autres supérieurs ayant été amenés à travailler avec elle.

36      Il en va de même, deuxièmement, pour les points 44 à 46 de la requête, auxquels la requérante développe une argumentation relative à l’imprécision du contenu de ses rapports d’évaluation, dans la mesure où ils ne contiennent ni fait précis, ni date, ni exemple factuel permettant de comprendre ce à quoi l’évaluation fait référence.

37      Troisièmement, aux points 56 à 60 de la requête, la requérante développe une argumentation relative à l’absence de test objectif d’évaluation de la maîtrise des langues. Or, dans ce cadre, elle tend uniquement à démontrer que cette évaluation est dépourvue de tout fondement objectif et étaye son propos en soulignant la subjectivité de celle‑ci, du fait qu’elle est effectuée par une seule personne et qu’elle est dépourvue de tout fait explicatif alors qu’il existe des tests objectifs sur le marché.

38      Quatrièmement, le point 68 de la requête porte sur l’évaluation du niveau des responsabilités exercées. Or, la requérante ne fait que renvoyer aux raisons qu’elle a exposées précédemment dans la requête pour démontrer le caractère subjectif de ladite évaluation.

39      Il y a lieu, dans un second temps, de relever, en revanche, que, lorsque la requérante indique, aux points 42 et 43 de la requête, que son rapport d’évaluation présente une discordance dans la mesure où il ne reflète pas les appréciations que l’évaluateur a pu émettre à d’autres occasions et mentionne, ainsi, le manque de véracité qui ressort dudit rapport, elle conteste, en fait, le contenu même de ce rapport. Or, un tel argument doit être soulevé dans le cadre des procédures prévues pour les contestations de l’évaluation en tant que telle. De la même manière, lorsque, au point 61 de la requête, la requérante estime que l’évaluation de son supérieur hiérarchique ne reflète pas la réalité, dans la mesure où elle parle anglais couramment avec son mari à la maison et utilise presque exclusivement l’anglais au travail, elle conteste le contenu de l’évaluation en tant que tel et, dès lors, ne peut soulever cet argument au soutien d’une contestation de la procédure de promotion.

40      Au regard de ce qui précède, il ressort de l’analyse détaillée des arguments de la requérante regardés par la Commission comme visant à contester la procédure d’évaluation (voir point 29 ci‑dessus) que, mis à part ceux identifiés aux points 42, 43 et 61 de la requête (voir point 39 ci‑dessus), ils convergent pour contester, en substance, l’objectivité de l’examen comparatif des mérites du fait des éléments pris en compte en l’espèce en application de l’article 45 du statut. Par conséquent, ils doivent, à ce titre, être considérés comme recevables.

41      Par ailleurs, il convient de préciser que l’argument de la requérante selon lequel elle n’avait pas intérêt à aller à l’encontre de sa hiérarchie en contestant la procédure d’évaluation, dans la mesure où son supérieur hiérarchique direct lui avait promis de soutenir sa promotion, comme cela ressort d’un courriel de ce dernier du 18 juin 2018, ne peut être accueilli pour inclure dans l’examen du Tribunal les arguments considérés comme irrecevables.

42      En effet, la promesse de soutien de la hiérarchie quant à la promotion d’un fonctionnaire ne peut légitimer la renonciation délibérée de ce dernier à ses droits tirés de l’article 6, paragraphe 8, des DGE 43, à savoir, notamment, la possibilité d’ajouter des commentaires.

43      En outre, les prétendues erreurs dont il est question concernent l’existence de discordances dans l’appréciation de l’évaluateur telle qu’elle ressort, d’une part, du contenu du rapport d’évaluation rédigé par ce dernier et, d’autre part, d’un courriel dont il est également l’auteur ainsi que la maîtrise de l’anglais au regard de la pratique alléguée par la requérante dans le cadre de son travail et de sa vie privée. Sachant qu’il ne peut être ignoré que, même avec le soutien de la hiérarchie, le résultat d’une procédure de promotion est, par nature, incertain du fait du pouvoir d’appréciation reconnu à l’AIPN et des limites imposées par le statut quant au nombre de fonctionnaires pouvant en bénéficier lors de chaque exercice (voir, en ce sens, arrêt du 4 juillet 2007, Lopparelli/Commission, T‑502/04, EU:T:2007:197, point 94 et jurisprudence citée), la révision de ces aspects en faveur de la requérante dans le cadre de la procédure d’évaluation, si elle était advenue, n’aurait, dès lors, conduit qu’à renforcer ses mérites.

44      Ainsi, le choix de la requérante de laisser ces prétendues erreurs figurer dans son rapport d’évaluation sans autre amendement ne permet pas de justifier la prise en considération des arguments considérés comme irrecevables dans le cadre du présent recours.

45      En second lieu, comme le rappelle la Commission, l’exercice de promotion n’est lancé qu’après finalisation de l’exercice d’évaluation organisé la même année, conformément à l’article 5, paragraphe 1, des DGE 45. En outre, il est constant que la requérante n’a effectué aucune démarche légale pour contester d’éventuelles irrégularités affectant la procédure d’évaluation au regard de son rapport d’évaluation pour l’année 2017.

46      Cependant, comme cela est conclu au point 40 ci‑dessus, mis à part les arguments présentés aux points 42, 43 et 61 de la requête, l’argumentation de la requérante vient au soutien de la remise en question de la légalité de la procédure de promotion la concernant. Il suffit, dès lors, de constater que, par son recours, la requérante ne conteste pas la légalité de son rapport d’évaluation, de sorte que les assertions de la Commission, selon lesquelles la requérante n’a pas respecté les règles relatives aux procédures de contestation du rapport d’évaluation prévues à l’article 6, paragraphe 8, des DGE 43, d’appel prévues à l’article 7 des DGE 43, de réclamation administrative préalable prévues à l’article 90, paragraphe 2, du statut ou encore de recours en annulation prévues à l’article 91 du statut pour contester la légalité dudit rapport, sont dépourvues de toute pertinence (voir, en ce sens, ordonnance du 7 décembre 2017, Durazzo/SEAE, T‑559/16, non publiée, EU:T:2017:882, point 55).

47      Au regard de ce qui précède, il y a lieu de rejeter la première fin de non‑recevoir soulevée par la Commission, sauf en ce qui concerne les arguments de la requérante figurant aux points 42, 43 et 61 de la requête.

2)      Sur la fin de nonrecevoir tirée d’une méconnaissance de la règle de concordance dans le cadre du premier moyen

48      Au soutien de sa seconde fin de non‑recevoir, la Commission affirme que les allégations de la requérante visées au point 29 ci‑dessus vont au‑delà des éléments de droit examinés dans la décision de rejet de la réclamation. La Commission rappelle qu’il ressort de la jurisprudence que la règle de concordance exige, sous peine d’irrecevabilité, qu’un grief soulevé devant le juge de l’Union européenne l’ait déjà été dans le cadre de la procédure précontentieuse, afin que l’AIPN ait été mise en mesure de connaître d’une manière suffisamment précise les critiques que l’intéressé formule à l’encontre de la décision contestée (voir arrêt du 25 octobre 2013, Commission/Moschonaki, T‑476/11 P, EU:T:2013:557, point 71 et jurisprudence citée).

49      Il convient de rappeler que l’article 91, paragraphe 2, du statut dispose qu’un recours devant la Cour de justice de l’Union européenne n’est recevable que si l’AIPN a été préalablement saisie d’une réclamation.

50      Il résulte d’une jurisprudence constante que la règle de concordance entre la réclamation et la requête subséquente exige, sous peine d’irrecevabilité, qu’un moyen soulevé devant le juge de l’Union l’ait déjà été dans le cadre de la procédure précontentieuse, afin que l’AIPN ait été mise en mesure de connaître d’une manière suffisamment précise les critiques que l’intéressé formule à l’encontre de la décision contestée (voir arrêts du 25 octobre 2013, Commission/Moschonaki, T‑476/11 P, EU:T:2013:557, point 71 et jurisprudence citée, et du 27 octobre 2016, BCE/Cerafogli, T‑787/14 P, EU:T:2016:633, point 34).

51      Il s’ensuit que, dans les recours de fonctionnaires, les conclusions présentées devant le juge de l’Union ne peuvent contenir que des chefs de contestation reposant sur la même cause que celle sur laquelle reposent les chefs de contestation invoqués dans la réclamation, étant précisé que ceux-ci peuvent être développés, devant le juge de l’Union, par la présentation de moyens et d’arguments ne figurant pas nécessairement dans ladite réclamation, mais s’y rattachant étroitement (voir arrêt du 27 octobre 2016, BCE/Cerafogli, T‑787/14 P, EU:T:2016:633, point 35 et jurisprudence citée).

52      Cependant, d’une part, puisque la procédure précontentieuse a un caractère informel et que les intéressés agissent en général à ce stade sans le concours d’un avocat, l’administration ne doit pas interpréter les réclamations de façon restrictive (arrêt du 25 octobre 2013, Commission/Moschonaki, T‑476/11 P, EU:T:2013:557, point 76). D’autre part, l’article 91 du statut ne doit pas avoir pour effet de lier, de façon rigoureuse et définitive, la phase contentieuse éventuelle, dès lors que le recours contentieux ne modifie ni la cause ni l’objet de la réclamation (arrêts du 1er juillet 1976, Sergy/Commission, 58/75, EU:C:1976:102, point 33 ; du 19 novembre 1998, Parlement/Gaspari, C‑316/97 P, EU:C:1998:558, point 17, et du 27 octobre 2016, BCE/Cerafogli, T‑787/14 P, EU:T:2016:633, point 36).

53      C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner l’objection de la Commission fondée sur la violation de la règle de concordance.

54      En l’espèce, dans sa réclamation, la requérante exprime son incompréhension quant à son absence de promotion au titre de l’exercice 2018, dans la mesure où elle estime qu’aucun élément objectif ne peut la justifier. D’une part, elle considère avoir satisfait aux critères sous‑tendant une décision de promotion et écarte l’argument tiré de sa prétendue mauvaise réputation comme élément justificatif de cette décision. À cet égard, elle souligne les appréciations positives que son travail a entraîné de la part de son supérieur hiérarchique direct ainsi que de la part d’un autre supérieur hiérarchique. D’autre part, elle fait état de ses soupçons concernant une possible discrimination en raison de sa couleur de peau, qui serait la raison sous-jacente à son absence de promotion.

55      Dès lors, il convient de relever, en premier lieu, que, en soulignant l’absence d’élément objectif pouvant justifier la décision attaquée, la réclamation de la requérante implique, en substance, que cette décision a pu être fondée sur des éléments subjectifs et que, à ce titre, une erreur aurait été commise par l’AIPN lors de l’exercice de promotion 2018. Or, dans le cadre de son premier moyen, tiré d’erreurs manifestes d’appréciation dans la procédure de promotion, la requérante développe cette ligne argumentative, la divisant en quatre branches, toutes fondées sur la subjectivité de chacun des éléments pris en compte dans le cadre de l’examen comparatif des mérites des fonctionnaires promouvables qui constitue la base de la procédure de promotion.

56      En second lieu, il ressort de la décision de rejet de la réclamation que la position de la requérante a été comprise comme telle. En effet, premièrement, cette décision examine l’appréciation de tous les éléments pris en compte dans le cadre de l’examen comparatif des mérites effectué dans le cas de la requérante.

57      Deuxièmement, l’ensemble des développements présents dans la décision de rejet de la réclamation concernant la comparaison des mérites, l’utilisation des langues dans l’exercice des fonctions et le niveau des responsabilités exercées sont repris par la Commission dans le mémoire en défense, respectivement aux points 41 à 46 dans le cadre de la réfutation de la première branche du premier moyen, au point 61 dans le cadre de la réfutation de la deuxième branche du premier moyen et aux points 64 et 69 à 72 dans le cadre de la réfutation de la troisième branche du premier moyen.

58      Par conséquent, il ressort de ce qui précède que les éléments essentiels fondant le premier moyen pouvaient être déduits de la réclamation et, par conséquent, le recours contentieux ne modifie ni la cause ni l’objet de la réclamation.

59      Ainsi, conformément aux principes rappelés aux points 49 à 52 ci‑dessus, les arguments avancés par la requérante dans le cadre des trois premières branches de son premier moyen n’enfreignent pas la règle de concordance et, partant, la seconde fin de non‑recevoir soulevée par la Commission doit être rejetée.

b)      Sur le bienfondé du premier moyen

60      Par son premier moyen, divisé en quatre branches, la requérante allègue des erreurs manifestes d’appréciation résultant de la subjectivité qui a affecté l’examen comparatif de ses mérites dans le cadre de la procédure de promotion, notamment en ce qui concerne les rapports d’évaluation (première branche), l’évaluation de la maîtrise des langues (deuxième branche), l’évaluation du niveau de responsabilités exercées (troisième branche) et le choix des éléments factuels à prendre en considération dans la décision de l’AIPN relative à l’exercice de promotion 2018 (quatrième branche).

1)      Observations liminaires relatives à la nature et à l’intensité du contrôle juridictionnel en l’espèce

61      Selon une jurisprudence constante, pour évaluer les mérites à prendre en considération dans le cadre d’une décision de promotion au titre de l’article 45 du statut, l’AIPN dispose d’un large pouvoir d’appréciation et le contrôle du juge de l’Union doit se limiter à la question de savoir si, eu égard aux voies et aux moyens qui ont pu conduire l’administration à son appréciation, celle-ci s’est tenue dans des limites non critiquables et n’a pas usé de son pouvoir de manière manifestement erronée. Le juge ne saurait donc substituer son appréciation des qualifications et des mérites des fonctionnaires à celle de l’AIPN. Il doit se limiter à contrôler l’objectivité et l’exactitude de l’examen comparatif des mérites prévu par l’article 45, paragraphe 1, du statut à l’aune des précisions apportées par l’AIPN au sujet de l’exercice de promotion, préalablement audit examen. Ainsi, il n’appartient pas au juge de l’Union de contrôler le bien-fondé de l’appréciation, comportant des jugements de valeur complexes qui, par leur nature, ne sont pas susceptibles d’une vérification objective, portée par l’administration sur les aptitudes professionnelles d’un fonctionnaire (voir arrêts du 16 mai 2013, Canga Fano/Conseil, T‑281/11 P, EU:T:2013:252, point 41 et jurisprudence citée, et du 13 juillet 2018, Pereira/Commission, T‑606/16, non publié, EU:T:2018:470, point 107).

62      Selon cette même jurisprudence, le pouvoir d’appréciation ainsi reconnu à l’administration est sans préjudice de la nécessité de procéder à l’examen comparatif des mérites avec soin et impartialité, dans l’intérêt du service et conformément au principe d’égalité de traitement. Si l’AIPN dispose du pouvoir statutaire de procéder à un tel examen selon la procédure ou la méthode qu’elle estime la plus appropriée, ledit examen doit, en pratique, être conduit sur une base égalitaire et à partir de sources d’informations et de renseignements comparables (voir arrêts du 16 mai 2013, Canga Fano/Conseil, T‑281/11 P, EU:T:2013:252, point 42 et jurisprudence citée, et du 13 juillet 2018, Pereira/Commission, T‑606/16, non publié, EU:T:2018:470, point 108).

63      L’obligation pour l’AIPN de procéder à un examen comparatif des mérites des fonctionnaires susceptibles d’être promus, prévu par l’article 45 du statut, est l’expression à la fois du principe d’égalité de traitement des fonctionnaires et de leur vocation à la carrière, l’appréciation de leurs mérites constituant ainsi le critère déterminant. À cet égard, l’article 45, paragraphe 1, du statut prévoit que, aux fins de l’examen comparatif des mérites, l’AIPN prend en considération, outre les rapports dont les fonctionnaires font l’objet, l’utilisation par ceux-ci, dans l’exercice de leurs fonctions, des langues autres que la langue dont ils ont justifié avoir une connaissance approfondie et le niveau des responsabilités exercées. L’article 45, paragraphe 1, du statut laisse une certaine marge d’appréciation à l’AIPN quant à l’importance que celle‑ci entend accorder à chacun des trois critères mentionnés dans cette disposition lors de l’examen comparatif des mérites, dans le respect toutefois du principe d’égalité de traitement (voir, en ce sens, arrêts du 16 mai 2013, Canga Fano/Conseil, T‑281/11 P, EU:T:2013:252, point 43 et jurisprudence citée, et du 13 juillet 2018, Pereira/Commission, T‑606/16, non publié, EU:T:2018:470, point 109).

64      Dans le contexte du contrôle exercé par le juge de l’Union sur les choix opérés par l’administration en matière de promotion, une erreur est manifeste lorsqu’elle est aisément perceptible et peut être détectée à l’évidence, à l’aune des critères auxquels le législateur a entendu subordonner les décisions en matière de promotion. En conséquence, afin d’établir que l’administration a commis une erreur manifeste dans l’appréciation des faits qui soit de nature à justifier l’annulation d’une décision, les éléments de preuve, qu’il incombe à la partie requérante d’apporter, doivent être suffisants pour priver de plausibilité les appréciations retenues par l’administration. Autrement dit, le moyen tiré de l’erreur manifeste doit être rejeté si, en dépit des éléments avancés par la partie requérante, l’appréciation mise en cause peut être admise comme étant vraie ou valable (arrêts du 23 novembre 2017, PF/Commission, T‑617/16, non publié, EU:T:2017:829, point 58, et du 13 juillet 2018, Pereira/Commission, T‑606/16, non publié, EU:T:2018:470, point 110).

65      C’est à l’aune de ces principes qu’il convient d’apprécier si, en l’espèce, l’AIPN a satisfait à ces obligations à l’égard de la requérante. Il y a lieu de préciser que, conformément aux considérations exposées aux points 18 à 22 ci‑dessus, la motivation au regard de laquelle le Tribunal est appelé à exercer son contrôle de légalité est notamment celle exposée dans la décision de rejet de la réclamation, censée coïncider avec celle de la décision attaquée qui rejette implicitement la promotion de la requérante (voir, en ce sens, arrêt du 26 octobre 2017, Paraskevaidis/Cedefop, T‑601/16, EU:T:2017:757, point 37 et jurisprudence citée).

2)      Sur la première branche du premier moyen, tirée de l’imprécision et de la subjectivité des rapports d’évaluation dont les fonctionnaires font l’objet

66      Dans le cadre de la première branche du premier moyen, la requérante allègue, en substance, que les rapports d’évaluation dont les fonctionnaires font l’objet sont subjectifs et imprécis, rendant ainsi la source d’information non pertinente et inutilisable à des fins de comparaison et, par conséquent, entachant d’erreurs la procédure d’examen comparatif des mérites menant à la décision de promotion.

67      À l’appui de ses allégations, la requérante avance, principalement, que ses rapports d’évaluation, premièrement, ont été rédigés par son supérieur hiérarchique seul, deuxièmement, ne contiennent ni fait précis, ni date, ni exemple factuel, à l’instar des rapports d’évaluation des fonctionnaires promus, et, troisièmement, bien qu’ils contiennent son auto-évaluation, celle‑ci n’est pas prise en compte dans l’examen de ses mérites, seules l’étant les allégations de son supérieur hiérarchique qui ne coïncident pas avec cette auto-évaluation.

68      En ce qui concerne le premier grief, relatif à la subjectivité des rapports d’évaluation de la requérante pris en compte par l’AIPN, conformément à l’article 45, paragraphe 1, du statut, dans le cadre de l’exercice de promotion 2018, il doit être relevé, premièrement, que la requérante n’apporte pas d’élément spécifique démontrant concrètement ledit caractère subjectif, mais allègue que cette subjectivité ressort de facto du fait de leur rédaction par une personne unique.

69      À cet égard, l’existence d’un degré de subjectivité d’une évaluation n’est pas en elle-même un motif permettant de venir au soutien d’un grief à l’encontre de la régularité de la procédure de promotion. En effet, le Tribunal a déjà reconnu le caractère subjectif des rapports d’évaluation dans la mesure où, selon la jurisprudence, ils expriment l’opinion librement formulée des évaluateurs (voir, en ce sens, arrêt du 6 novembre 1997, Liao/Conseil, T‑15/96, EU:T:1997:169, point 56). Il s’ensuit que la requérante ne saurait reprocher aux commentaires leur subjectivité, qui est inhérente à toute opinion personnelle (voir, en ce sens, arrêt du 16 mai 2006, Magone/Commission, T‑73/05, EU:T:2006:127, point 28). Dans la mesure où toute appréciation des mérites des fonctionnaires dans le cadre de l’exercice d’évaluation comporte, en général et de façon inhérente, un certain risque d’hétérogénéité lié à la subjectivité des différents évaluateurs, il doit être admis que, pour un examen comparatif aux fins de la promotion conforme aux exigences établies par l’article 45 du statut, il est nécessaire et suffisant que les institutions encadrent cette hétérogénéité des évaluations en la limitant autant que possible au risque inhérent à tout exercice d’appréciation (voir, en ce sens, arrêt du 1er mars 2017, Silvan/Commission, T‑698/15 P, non publié, EU:T:2017:131, point 24).

70      Comme le Tribunal l’a déjà souligné, cet encadrement est assuré par le respect particulièrement scrupuleux des règles régissant l’organisation de l’évaluation et le déroulement de la procédure prévue à cet effet (voir, en ce sens, arrêt du 30 septembre 2009, Skareby/Commission, T‑193/08 P, EU:T:2009:377, point 70 et jurisprudence citée). Or, en l’espèce, ces procédures, dont le respect n’est pas contesté, ont été mises en œuvre conformément aux DGE 43, dont la légalité n’est pas remise en cause.

71      Ainsi, dans le cadre de l’exercice de promotion 2018, l’AIPN a disposé, aux fins de l’examen comparatif des mérites de la requérante, de rapports d’évaluation dont la nature ne peut conduire en elle‑même à l’identification par le juge de l’Union d’une erreur manifeste d’appréciation.

72      Contrairement à ce qu’affirme la requérante, ces éléments permettent de rejeter l’argument selon lequel la nature des commentaires des évaluateurs pourrait en elle-même conduire à entacher l’appréciation, faite par l’AIPN, des mérites des candidats à l’exercice de promotion 2018 d’une erreur manifeste.

73      Deuxièmement, il convient de traiter ensemble les arguments de la requérante consistant, d’une part, à remettre en question la pertinence d’avoir eu, comme évaluateur, un supérieur hiérarchique qui n’avait pas souvent travaillé avec elle et, d’autre part, à alléguer que la rédaction par une seule personne de ses rapports d’évaluation exclut l’évaluation des autres supérieurs ayant été amenés à travailler avec elle.

74      Tout d’abord, il y a lieu de relever, d’une part, que le rapport d’évaluation de la requérante a été établi par son chef d’unité, conformément à l’article 3, paragraphe 1, des DGE 43, dont la légalité n’est pas contestée, qui prévoit que l’évaluateur est le supérieur hiérarchique direct du titulaire de poste et, en règle générale, son chef d’unité.

75      Ensuite, sauf preuve contraire, absente du dossier en l’espèce, un chef d’unité est amené, de par sa fonction, à connaître de la qualité du travail des fonctionnaires placés sous son autorité.

76      Enfin, conformément à l’article 5 des DGE 43, l’évaluateur tient compte du contexte dans lequel le titulaire de poste a exécuté ses fonctions. Or, en l’espèce, la requérante n’a pas fourni d’élément venant contredire le fait que la position de chef d’unité est celle permettant de porter l’appréciation la plus adéquate possible sur les activités des personnes exerçant sous ses ordres, dans la mesure où celui-ci bénéficie d’une vision globale au sein de son service, ce qui pourrait ne pas être le cas d’un autre supérieur hiérarchique qui, bien qu’ayant travaillé directement avec le candidat à une promotion, n’aurait pas connaissance de l’ensemble des activités de cette personne. En effet, au soutien de ses affirmations selon lesquelles son travail a fait l’objet d’évaluations positives de la part d’autres supérieurs ayant travaillé de manière plus substantielle avec elle, la requérante produit une note du chef des coordinations d’équipes de son unité faisant état d’un avis positif à l’égard de certaines tâches qu’elle a effectuées. Ce document ne permet donc pas de considérer que le fait d’avoir été évaluée par son chef d’unité est constitutif d’une erreur.

77      Ainsi, dans le cadre de l’exercice de promotion 2018, l’AIPN a disposé, aux fins de l’examen comparatif des mérites de la requérante, d’un rapport d’évaluation dont la provenance ne peut pas conduire en elle‑même à l’identification, par le juge de l’Union, d’une erreur manifeste d’appréciation.

78      Il convient de préciser que, si, par son allégation relative à l’exclusion de son rapport d’évaluation d’avis positifs émis par d’autres supérieurs, la requérante cherche à critiquer le fait que lesdites opinions positives ne figurent pas dans son rapport d’évaluation, alors cet argument doit être écarté comme irrecevable. En effet, l’absence de telles opinions serait un grief relatif au contenu du rapport d’évaluation qui aurait dû, à ce titre, être soulevé dans le cadre de la contestation dudit rapport (voir point 39 ci‑dessus).

79      En ce qui concerne le deuxième grief, relatif à l’imprécision du contenu  des rapports d’évaluation pris en compte par l’AIPN, conformément à l’article 45, paragraphe 1, du statut, dans le cadre de l’exercice de promotion 2018, il convient de rappeler que, si l’administration a l’obligation de motiver tout rapport d’évaluation de façon suffisante et circonstanciée, afin de mettre l’intéressé en mesure de formuler des observations sur cette motivation, les évaluateurs, disposant d’un large pouvoir d’appréciation dans les jugements relatifs au travail des personnes qu’ils ont la charge d’évaluer, n’ont pas l’obligation de faire figurer dans ledit rapport tous les éléments de fait et de droit pertinents à l’appui de leur évaluation. À cet égard, il suffit, en principe, que le rapport d’évaluation extraie les traits saillants des prestations du fonctionnaire en termes, notamment, de rendement, de compétences et de conduite dans le service et les évalue. Sous réserve de l’obligation de motivation, et pour autant que l’évaluation soit clairement individualisée et non impersonnelle, l’évaluateur n’est pas tenu de détailler les motifs de son évaluation en indiquant des exemples concrets pour étayer ses jugements de valeur (voir, en ce sens, arrêt du 12 juillet 2018, PA/Parlement, T‑608/16, non publié, EU:T:2018:440, points 30 à 32 et jurisprudence citée).

80      Dans ce contexte, tout d’abord, il y a lieu de relever qu’il ne peut être donné raison à la requérante lorsqu’elle affirme que le fait de ne pas indiquer, dans le rapport d’évaluation, de fait précis ou de date est incompatible avec les exigences de précision et d’argumentation posées par la jurisprudence rappelée au point 79 ci‑dessus.

81      Ensuite, la requérante extrait deux passages de son rapport d’évaluation pour l’année 2017, desquels elle conclut que les constatations vagues et imprécises qu’ils comportent rendent impossibles non seulement la détermination de la nature du travail dont il est question et de la proportion du travail concernée par les reproches qui y figurent, mais également la compréhension des raisons pour lesquelles des reproches lui sont faits.

82      Cependant, d’une part, il convient d’observer que, à la lecture de l’intégralité du rapport d’évaluation que la requérante produit en annexe à la requête, il ressort que les appréciations qui y figurent permettent d’avoir une vue d’ensemble de ses prestations suffisamment détaillée pour que l’AIPN puisse procéder à une comparaison effective de ses mérites avec ceux d’autres fonctionnaires promouvables de même grade. À cet égard, l’évaluateur n’a manqué ni de souligner les aspects positifs, ni d’observer des difficultés liées aux prestations spécifiques de la requérante avec, à chaque fois, le même degré de précision. En outre, il peut être rappelé, dans ce contexte, que le rapport d’évaluation vise non pas à dresser un tableau exhaustif des prestations qu’un fonctionnaire a été amené à réaliser dans le cadre de l’exécution des tâches relevant de son poste, mais à mettre en exergue, à partir d’éléments déterminants, la compétence, le rendement et la conduite dans le service de chaque fonctionnaire (arrêt du 12 juillet 2018, PA/Parlement, T‑608/16, non publié, EU:T:2018:440, points 31 ; voir également, en ce sens, arrêt du 12 mars 2020, QB/BCE, T‑215/18, non publié, EU:T:2020:92, point 110).

83      D’autre part, il doit être rappelé que, lors d’un exercice de promotion, l’AIPN prend en compte, aux fins de l’examen comparatif des mérites, l’ensemble des rapports d’évaluation des candidats depuis leur dernière promotion, conformément à l’article 4, paragraphe 1, sous a), des DGE 45. Or, il y a lieu de relever, à cet égard, que les remarques des évaluateurs de la requérante dans les rapports d’évaluation pour les années précédentes dans le même grade ont parfois été encore plus détaillées en ce qui concernait ses tâches et ses prestations spécifiques.

84      Par conséquent, même si les deux passages que la requérante met en relief pour souligner une prétendue imprécision de son rapport d’évaluation pour l’année 2017 étaient considérés comme démontrant ses allégations, la requérante ne prouverait cependant pas à suffisance de droit que l’AIPN ne pouvait pas procéder à un examen approprié de ses mérites, dans la mesure où d’autres informations suffisamment pertinentes, au regard des caractéristiques requises par la jurisprudence citée au point 79 ci‑dessus, avaient été mises à la disposition de cette dernière pour effectuer son appréciation. À cet égard, il convient d’ajouter que les extraits des rapports d’évaluation pour l’année 2017 de trois fonctionnaires promus au grade AST 5 lors de l’exercice de promotion 2018, fournis par la Commission en annexe au mémoire en défense, montrent le même degré satisfaisant de précision, permettant ainsi d’opérer une comparaison sur une base égalitaire. Les objections de la requérante quant au caractère subjectif de ces documents doivent être écartées pour les mêmes raisons que celles exposées aux points 69 et 70 ci‑dessus.

85      Enfin, la requérante indique, premièrement, que, dans le courant de l’année 2017, elle a exercé majoritairement des tâches d’administrateur plutôt que des tâches d’assistant. Deuxièmement, elle considère que les termes employés dans tous les rapports d’évaluation sont généraux et subjectifs et ne permettent pas d’objectiver la comparaison des mérites. Troisièmement, elle affirme que les rapports d’évaluation des trois personnes promues, utilisés à titre illustratif par la Commission, sont entachés d’erreurs manifestes d’appréciation.

86      Or, il suffit, à cet égard, de relever que de telles allégations ne se fondent sur aucun élément de preuve concret, mais expriment des convictions personnelles, qui ne sauraient constituer la preuve irréfutable d’une erreur manifeste d’appréciation (voir, en ce sens, arrêts du 23 janvier 2003, Angioli/Commission, T‑53/00, EU:T:2003:12, point 94 et jurisprudence citée, et du 8 mai 2019, Stamatopoulos/ENISA, T‑99/18, non publié, EU:T:2019:305, point 39).

87      Ainsi, il peut être conclu que, dans le cadre de l’exercice de promotion 2018, l’AIPN a disposé, aux fins de l’examen comparatif des mérites de la requérante, de rapports d’évaluation dont le contenu ne peut conduire en lui‑même à l’identification par le juge de l’Union d’une erreur manifeste d’appréciation.

88      Il convient de préciser que, si les allégations de la requérante relatives à l’impossibilité de comprendre ce à quoi l’évaluation fait référence visaient à démontrer qu’elle n’était pas en mesure de formuler des observations sur sa motivation, alors cet argument doit être écarté comme irrecevable. En effet, la violation de l’obligation de motivation de l’administration dans le cadre du rapport d’évaluation serait un grief relatif au contenu dudit rapport qui aurait dû, à ce titre, être soulevé dans le cadre de la contestation de ce rapport (voir point 39 ci‑dessus).

89      De la même manière, si, en citant des extraits de son rapport d’évaluation pour l’année 2017 en vue de préciser que, à leur égard, il lui est impossible de comprendre les raisons pour lesquelles des reproches lui sont faits, la requérante entend contester la véracité des propos tenus, alors son argument doit être écarté comme irrecevable. En effet, l’inexactitude des déclarations figurant dans le rapport d’évaluation serait également un grief relatif au contenu dudit rapport qui aurait dû, à ce titre, être soulevé dans le cadre de la contestation de ce rapport (voir point 39 ci‑dessus).

90      En ce qui concerne le troisième grief, relatif à l’absence de prise en compte de l’auto‑évaluation de la requérante par l’AIPN dans le cadre de l’exercice de promotion 2018, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 6, paragraphe 2, des DGE 43, le titulaire de poste établit une auto‑évaluation qui est intégrée dans la rubrique appropriée du rapport d’évaluation. Or, comme cela est rappelé au point 83 ci‑dessus, l’AIPN dispose, pour effectuer l’examen comparatif des mérites des fonctionnaires candidats à une promotion, des rapports d’évaluation dont les fonctionnaires ont fait l’objet depuis leur dernière promotion. Par conséquent, l’auto‑évaluation de la requérante a été mise à la disposition de l’AIPN dans le cadre de l’exercice de promotion 2018.

91      En outre, il ressort du rapport d’évaluation de la requérante pour l’année 2017 que son évaluateur a expressément fait référence, à plusieurs reprises, à l’auto‑évaluation de la requérante, la prenant ainsi en compte dans ses propres appréciations. L’AIPN disposait, dès lors, d’indications relatives à cette auto‑évaluation tant dans des rubriques spécifiquement dédiées à celle‑ci qu’au sein même de l’évaluation effectuée par le supérieur hiérarchique de la requérante.

92      Par conséquent, l’argument de la requérante selon lequel son auto‑évaluation n’a pas été prise en compte dans l’ensemble de la procédure d’examen comparatif des mérites manque en fait.

93      Cette conclusion n’est pas remise en question par les allégations de la requérante selon lesquelles, d’une part, il faut distinguer la prise en compte formelle de la prise en compte réelle de son propre avis. À cet égard, elle estime que ce n’est ni en annexant simplement son auto‑évaluation à son rapport d’évaluation, ni en se bornant à se référer à des points de cette auto‑évaluation de manière superficielle que le contenu de ladite auto‑évaluation est réellement pris en considération. En effet, l’évaluateur, dans le rapport d’évaluation, se serait contenté de faire référence à ce que la requérante avait mentionné dans son auto‑évaluation, sans en tirer aucune conséquence.

94      À cet égard, force est de constater que la différence faite par la requérante entre la prise en compte réelle et la prise en compte formelle de son auto‑évaluation manque de clarté en l’espèce et s’apparente, en réalité, à un reproche dirigé contre la Commission quant au fait que son évaluation n’ait pas été identique à son auto-évaluation.

95      En tout état de cause, les allégations de la requérante quant à l’absence de prise en compte de son auto‑évaluation dans le cadre de la procédure de promotion manquent également en droit, dans la mesure où elle se contente de pures affirmations et n’apporte aucune preuve au soutien de celles‑ci. À cet égard, il convient de rappeler (voir point 86 ci‑dessus) que de telles allégations ne sauraient constituer la preuve irréfutable d’une erreur manifeste d’appréciation (voir, en ce sens, arrêts du 23 janvier 2003, Angioli/Commission, T‑53/00, EU:T:2003:12, point 94 et jurisprudence citée, et du 8 mai 2019, Stamatopoulos/ENISA, T‑99/18, EU:T:2019:305, point 39).

96      D’autre part, la requérante souligne le fait que, à aucun moment, une mise au point n’a été faite pour déterminer d’où venait la différence entre les deux évaluations. Cependant, dans la mesure où elle n’a pas contesté son évaluation, ni même ajouté de commentaire à cet égard dans la rubrique réservée à cette fin, comme l’article 6, paragraphe 8, des DGE 43 le lui permettait, l’AIPN était en droit de présumer que, le rapport d’évaluation étant devenu définitif, la requérante avait accepté l’intégralité de son contenu et qu’elle n’entendait pas le remettre en cause. À cet égard, dans la mesure où la requérante réitère les raisons pour lesquelles elle s’est abstenue de contester son rapport d’évaluation en application des droits dont elle disposait au moment de sa communication, il est renvoyé aux points 41 à 44 ci‑dessus exposant les raisons pour lesquelles ces justifications doivent être rejetées.

97      Dans le cadre de son troisième grief, la requérante réitère également, sans autre précision, ses allégations relatives aux caractères subjectif et imprécis de ses rapports d’évaluation ainsi que de ceux des autres fonctionnaires promus, rendant la comparaison entre eux incohérente et dépourvue de pertinence. Dans la mesure où ces affirmations ne font que reprendre l’argumentation déjà rejetée dans le cadre de l’analyse des premier et deuxième griefs, il est renvoyé aux développements exposés aux points 68 à 77 ci-dessus, d’une part, et aux points 79 à 87 ci-dessus, d’autre part.

98      Il convient de préciser que la contestation de la requérante quant à la véracité des fautes qui lui sont reprochées dans son rapport d’évaluation pour l’année 2017 doit être écartée comme irrecevable. En effet, l’inexactitude des propos figurant dans le rapport d’évaluation serait un grief relatif au contenu dudit rapport qui aurait dû, à ce titre, être soulevé dans le cadre de la contestation de ce rapport (voir point 39 ci‑dessus).

99      De la même manière, si l’affirmation de la requérante selon laquelle les allégations de son supérieur hiérarchique ne coïncident pas avec son auto‑évaluation consiste à remettre en question l’évaluation dont elle a fait l’objet, alors cet argument doit être rejeté comme irrecevable. En effet, l’inexactitude des déclarations figurant dans le rapport d’évaluation serait également un grief relatif au contenu dudit rapport qui aurait dû, à ce titre, être soulevé dans le cadre de la contestation de ce rapport (voir point 39 ci‑dessus).

100    Eu égard aux développements qui précèdent, il ressort qu’aucun des trois griefs constituant la première branche du premier moyen, relative aux caractères subjectif et imprécis des rapports d’évaluation, ne permet de conduire à l’identification d’une erreur manifeste d’appréciation commise par l’AIPN dans l’examen comparatif des mérites, dont l’objectivité et l’exactitude n’ont pu être remises en question, effectué dans le cadre de l’exercice de promotion 2018.

101    Par conséquent, il convient de conclure au caractère non fondé de la première branche du premier moyen.

3)      Sur la deuxième branche du premier moyen, tirée de l’absence de test objectif d’évaluation de la maîtrise des langues

102    Dans le cadre de la deuxième branche du premier moyen, la requérante allègue, en substance, que, en ne recourant pas à des tests objectifs d’évaluation de sa maîtrise des langues et, par conséquent, en évaluant subjectivement son utilisation des langues, la procédure d’examen comparatif des mérites menant à la décision de promotion est entachée d’erreurs manifestes.

103    Au soutien de sa démonstration du caractère subjectif de l’évaluation de sa maîtrise des langues dans l’exercice de ses fonctions, la requérante réitère ses arguments portant sur le fait que son rapport d’évaluation a été établi par un rédacteur unique et sur le caractère imprécis dudit rapport. À cet égard, il suffit, pour rejeter ces allégations, de renvoyer aux développements exposés aux points 68 à 77 ci-dessus, d’une part, et aux points 79 à 87 ci-dessus, d’autre part.

104    Par conséquent, contrairement aux affirmations de la requérante, l’évaluation de sa maîtrise des langues étrangères dans l’exercice de ses fonctions, telle qu’elle ressort de son rapport d’évaluation, n’est pas dépourvue de tout fondement objectif et, dès lors, il ne peut être reproché à l’AIPN d’avoir commis une erreur manifeste d’appréciation en se fondant sur cette source d’informations et de renseignements pour effectuer l’examen comparatif des mérites des candidats à l’exercice de promotion 2018.

105    Ainsi, comme cela ressort de la décision attaquée, l’AIPN a pu procéder, avec soin et impartialité, sur une base égalitaire, conformément au principe d’égalité de traitement, à l’examen comparatif des mérites des candidats quant à leurs aptitudes linguistiques dans l’exercice de leurs fonctions et a pu identifier des évaluations des aptitudes linguistiques de certains fonctionnaires plus élogieuses que celle de la requérante.

106    Au regard de ce qui précède et dans la mesure où, dans le cadre du présent recours, le juge de l’Union doit se limiter à exercer un contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation (voir, à cet égard, points 61 à 65 ci‑dessus), il est inutile d’examiner si l’AIPN aurait dû utiliser une autre méthode pour évaluer la maîtrise des langues étrangères par la requérante dans l’exercice de ses fonctions, en recourant à des tests de langues objectifs disponibles sur le marché, comme cette dernière le prétend. En effet, dans le cadre du contrôle qu’il lui revient d’exercer en l’espèce, le juge de l’Union ne peut substituer son appréciation à celle de l’administration, ce qui implique qu’il ne s’agit pas de savoir si la méthode arrêtée était la seule ou la meilleure possible, seul le caractère manifestement inapproprié de celle-ci par rapport à l’objectif poursuivi pouvant affecter la légalité de la décision de l’AIPN (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 8 juin 2010, Vodafone e.a., C‑58/08, EU:C:2010:321, point 52 et jurisprudence citée).

107    En tout état de cause, il peut être relevé qu’il a été jugé que l’article 45, paragraphe 1, du statut ne subordonnait pas la prise en compte d’une langue au titre du critère tenant aux aptitudes linguistiques à la condition que le fonctionnaire qui s’en prévalait en ait une connaissance parfaite. En effet, le niveau minimal de connaissance requis à cet effet doit être déterminé par seule référence aux besoins du service, en fonction notamment de la nature des tâches à accomplir (arrêt du 16 mai 2013, Canga Fano/Conseil, T‑281/11 P, EU:T:2013:252, point 117), conformément au libellé de cette disposition qui vise expressément l’utilisation des langues « dans l’exercice des fonctions ».

108    Il s’ensuit qu’il n’est pas nécessaire que le niveau de connaissance des langues soit certifié au cas par cas par des tests officiels existant sur le marché. Il suffit que le titulaire du poste maîtrise la langue au niveau minimal requis, déterminé par les besoins de son service. Par conséquent, contrairement à ce qu’affirme la requérante, l’inadéquation de la méthode d’évaluation existante ne ressort pas de la non‑utilisation des tests de langues disponibles sur le marché. Au contraire, une telle utilisation pourrait s’avérer inadéquate, dans la mesure où l’évaluation du niveau de connaissance des langues risquerait d’être détachée de la nécessité d’en identifier la maîtrise pour les besoins spécifiques des fonctions exercées dans son poste par le candidat à une promotion.

109    Dans ce contexte, il convient de relever que, d’une part, la requérante affirme, dans la requête, que l’évaluation de sa maîtrise des langues est dépourvue de tout fondement objectif et, d’autre part, elle soutient, dans la réplique, que cette évaluation est erronée soit en raison du fait que, si le critère requis consiste en la satisfaction d’un niveau minimal déterminé par les besoins de son service, elle y répond manifestement, soit en raison du fait qu’elle n’a jamais eu de remarque négative concernant sa maîtrise des langues et que ses évaluations ont toujours été positives. Or, si par ces affirmations, la requérante vise à remettre en question l’évaluation dont elle a fait l’objet à cet égard, alors ces arguments doivent être rejetés comme irrecevables. En effet, l’inexactitude des déclarations figurant dans le rapport d’évaluation serait un grief relatif au contenu dudit rapport qui aurait dû, à ce titre, être soulevé dans le cadre de la contestation de ce rapport (voir point 39 ci‑dessus).

110    De la même manière, il convient de rejeter, pour les motifs exposés au point 39 ci‑dessus, l’affirmation de la requérante selon laquelle elle estime parler l’anglais couramment du fait qu’elle le parle avec son époux et l’utilise la plupart du temps au travail.

111    Eu égard aux développements qui précèdent, aucun des arguments présentés au soutien de la deuxième branche du premier moyen, relative à l’absence de test objectif d’évaluation de la maîtrise des langues, ne permet de conduire à l’identification d’une erreur manifeste d’appréciation commise par l’AIPN dans l’examen comparatif des mérites, dont l’objectivité et l’exactitude n’ont pu être remises en question, effectué dans le cadre de l’exercice de promotion 2018.

112    Par conséquent, il convient de conclure au caractère non fondé de la deuxième branche du premier moyen.

4)      Sur la troisième branche du premier moyen, tirée de la subjectivité de l’évaluation du niveau des responsabilités exercées

113    Dans le cadre de la troisième branche du premier moyen, la requérante invoque, en substance, le caractère subjectif de l’évaluation du niveau des responsabilités exercées effectuée aux fins de l’examen comparatif des mérites lors de la procédure de promotion, une telle comparaison étant ainsi dénuée de sens et la décision de l’AIPN fondée sur un tel élément étant, par conséquent, entachée d’erreurs.

114    En premier lieu, la requérante estime que l’AIPN n’a pas apporté la preuve que le niveau des responsabilités exercées par les personnes qui avaient été promues était supérieur au sien, dans la mesure où l’administration n’a pas suivi un schéma d’analyse tel que celui qu’elle propose dans la requête ou similaire à celui‑ci, permettant d’objectiver la procédure. En d’autres termes, la requérante reproche à l’AIPN d’avoir commis une erreur manifeste d’appréciation en se fondant sur son rapport d’évaluation, alors que ce dernier est entaché d’une subjectivité flagrante, comme elle l’allègue dans le cadre des autres branches du premier moyen, pour procéder à l’examen comparatif du niveau des responsabilités exercées par les candidats dans le cadre de l’exercice de promotion 2018.

115    À titre liminaire, il convient de rappeler qu’il a été conclu que les arguments précédemment développés par la requérante au soutien de ses allégations relatives à la prise en compte inappropriée de son rapport d’évaluation aux fins d’un examen comparatif des mérites des candidats à une promotion, du fait de la subjectivité dudit rapport, devaient être rejetés (voir points 68 à 77, 79 à 87 et 103 à 105 ci‑dessus). Il ne peut, dès lors, être reproché à l’AIPN d’avoir utilisé le rapport d’évaluation de la requérante dans le cadre de son examen comparatif du niveau des responsabilités exercées par lesdits candidats.

116    En tout état de cause, il y a lieu de relever que, comme cela est rappelé aux points 61 à 65 ci‑dessus, la jurisprudence reconnaît à l’AIPN un large pouvoir d’appréciation pour évaluer les mérites à prendre en considération dans le cadre d’une décision de promotion selon la procédure ou la méthode qu’elle estime la plus appropriée. À cet égard, le juge de l’Union doit se limiter à contrôler l’objectivité et l’exactitude de l’examen comparatif des mérites prévu par l’article 45, paragraphe 1, du statut à l’aune des précisions apportées par l’AIPN au sujet de l’exercice de promotion, préalablement audit examen (voir, en ce sens, arrêt du 13 juillet 2018, Pereira/Commission, T‑606/16, non publié, EU:T:2018:470, point 107 et jurisprudence citée).

117    Or, dans ce contexte, la procédure suivie par l’administration s’est déroulée conformément à l’article 5 des DGE 45, dont la légalité n’est pas contestée, ce qui n’est pas remis en cause par la requérante. Cette dernière n’apporte aucun élément tendant à démontrer le caractère inapproprié de cette procédure, mis à part la prise en compte d’un élément dont il ressortirait une subjectivité préjudiciable, argument qui a cependant été rejeté (voir point 115 ci‑dessus).

118    À cet égard, le fait que la requérante estime qu’une autre méthode aurait dû être suivie est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée. En effet, comme cela est souligné au point 106 ci‑dessus, dans le cadre du présent recours, il n’appartient pas au juge de l’Union de déterminer si la méthode arrêtée était la seule ou la meilleure possible, seul le caractère manifestement inapproprié de celle-ci par rapport à l’objectif poursuivi pouvant affecter la légalité de la décision de l’AIPN (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 8 juin 2010, Vodafone e.a., C‑58/08, EU:C:2010:321, point 52 et jurisprudence citée).

119    Par ailleurs, la méthode proposée par la requérante est dictée par la nécessité de pouvoir identifier les responsabilités exercées in concreto afin de déterminer si celles‑ci sont supérieures à celles attendues. Or, il suffit de rappeler que, le niveau des responsabilités exercées par un fonctionnaire faisant l’objet d’un onglet spécifique dans le rapport d’évaluation, tant l’évaluateur que l’évalué sont amenés à y indiquer si celles‑ci excèdent celles normalement dévolues à un autre agent de son grade. De telles indications permettent ainsi à l’AIPN de prendre en compte ces informations dans le cadre de l’examen comparatif des mérites, conformément à l’article 4, paragraphe 1, sous c), des DGE 45 et aux principes posés par la jurisprudence à cet égard (voir point 121 ci‑après).

120    Par conséquent, la requérante reste en défaut d’apporter la preuve que l’AIPN, en suivant la procédure prévue à cet effet pour effectuer l’examen comparatif du niveau des responsabilités exercées par les fonctionnaires promouvables, a commis une erreur manifeste d’appréciation.

121    En second lieu, la requérante rappelle que, selon la jurisprudence, l’administration ne doit tenir compte du niveau des responsabilités exercées par un agent que si celles‑ci excèdent celles normalement dévolues à un autre agent de son grade, étant donné que, en principe, les agents d’un même grade sont censés occuper des fonctions de responsabilité équivalente (arrêt du 10 novembre 2011, Merhzaoui/Conseil, F‑18/09, EU:F:2011:180, point 59). Or, elle estime que l’AIPN n’a pas apporté la preuve que le niveau des responsabilités exercées par les personnes qui avaient été promues était supérieur au sien.

122    À titre liminaire, d’une part, il convient d’observer que, sauf à être interprété de la manière présentée au point 114 ci‑dessus et alors rejeté comme non fondé selon la conclusion exposée au point 120 ci‑dessus, cet argument ne présente pas de lien évident avec la troisième branche du premier moyen, dans la mesure où celle‑ci est tirée de la subjectivité de l’évaluation du niveau des responsabilités exercées. D’autre part, cet argument n’est étayé par aucune preuve, la requérante se contentant, dans la requête, d’une simple affirmation.

123    Néanmoins, premièrement, il ressort des éléments que l’AIPN a fournis à cet égard dans la décision attaquée que les fonctionnaires promus avaient exercé des responsabilités d’un niveau plus élevé que celui des responsabilités exercées par la requérante.

124    Aux fins de la contestation de cette appréciation, d’une part, la requérante réitère ses allégations, écartées comme non fondées dans le cadre de l’examen des première et deuxième branches du premier moyen, relatives à l’absence de pertinence d’une comparaison entre des évaluations subjectives (voir point 97 ci‑dessus) et au fait qu’elle a majoritairement exercé des tâches réservées normalement à un poste d’administrateur et non d’assistant (voir points 85 et 86 ci‑dessus). Il convient de rejeter cette dernière assertion, dans la mesure où il ressort d’une jurisprudence constante que le fait qu’un fonctionnaire ait des mérites évidents et reconnus n’exclut pas, dans le cadre de l’examen comparatif des mérites des candidats à la promotion, que d’autres fonctionnaires aient des mérites égaux ou supérieurs (arrêts du 13 décembre 2001, Cubero Vermurie/Commission, C‑446/00 P, EU:C:2001:703, point 21, et du 4 juillet 2007, Lopparelli/Commission, T‑502/04, EU:T:2007:197, point 95).

125    D’autre part, la requérante estime que la comparaison n’est pas possible, dans la mesure où elle porte sur des tâches très différentes. À cet égard, il convient de relever que le fait que les fonctionnaires de même grade exercent des tâches différentes n’empêche pas de déterminer, ni de comparer, le niveau de responsabilités attendu de ces fonctionnaires sur la base des commentaires des évaluateurs. En effet, il ressort de la jurisprudence que la comparaison, au sein d’un grade, du niveau de responsabilités se fait uniquement par rapport aux fonctions effectivement exercées (voir, en ce sens, arrêts du 16 décembre 2010, Conseil/Stols, T‑175/09 P, EU:T:2010:534, point 48, et du 16 mai 2013, Canga Fano/Conseil, T‑281/11 P, EU:T:2013:252, point 78). Par conséquent, l’objection de la requérante doit être écartée.

126    Deuxièmement, il est de jurisprudence constante que l’AIPN n’est pas tenue de révéler au fonctionnaire non promu l’appréciation comparative portée sur lui et sur les fonctionnaires retenus pour la promotion, ni d’exposer en détail la façon dont elle a estimé que les candidats promus méritaient la promotion, dans la mesure où il suffit que, dans la décision de rejet de la réclamation, l’AIPN indique au fonctionnaire concerné le motif individuel et pertinent justifiant la décision de ne pas le promouvoir (voir arrêts du 23 novembre 2017, PF/Commission, T‑617/16, non publié, EU:T:2017:829, point 35 et jurisprudence citée, et du 8 juillet 2020, EP/Commission, T‑605/19, non publié, EU:T:2020:326, point 35). Il revient, au contraire, à la requérante de démontrer, d’une part, qu’elle a exercé un niveau de responsabilités supérieur aux autres fonctionnaires promouvables de son grade et, d’autre part, que ce niveau supérieur de responsabilités n’a pas été pris en compte dans le cadre de l’exercice de promotion. Or, force est de constater que la requérante n’a pas effectué une telle démonstration (voir, à cet égard, points 85 et 86 ci‑dessus).

127    Eu égard aux développements qui précèdent, il ressort qu’aucun des arguments présentés au soutien de la troisième branche du premier moyen, relative à la subjectivité de l’évaluation du niveau des responsabilités exercées, ne permet de conduire à l’identification d’une erreur manifeste d’appréciation commise par l’AIPN dans l’examen comparatif des mérites, dont l’objectivité et l’exactitude n’ont pu être remises en question, effectué dans le cadre de l’exercice de promotion 2018.

128    Par conséquent, il convient de conclure au caractère non fondé de la troisième branche du premier moyen.

5)      Sur la quatrième branche du premier moyen, tirée de la subjectivité du choix des éléments factuels à prendre en considération

129    Dans le cadre de la quatrième branche du premier moyen, la requérante fait valoir, en substance, que, l’AIPN n’ayant pas prouvé de manière objective que les fonctionnaires promus avaient des mérites supérieurs aux siens, elle aurait dû tenir compte, conformément à la jurisprudence pertinente, d’autres critères tels que l’âge des candidats et leur ancienneté dans le grade ou le service. Or, tous les fonctionnaires promus avaient une ancienneté dans le grade inférieure à celle de la requérante. En ne procédant pas de la sorte, l’AIPN lui aurait porté préjudice et aurait commis une erreur manifeste d’appréciation.

130    Dans ce contexte, il y a lieu de rappeler que l’obligation, pour l’AIPN, de procéder à un examen comparatif des mérites des fonctionnaires susceptibles d’être promus, prévu par l’article 45 du statut, est l’expression à la fois du principe d’égalité de traitement des fonctionnaires et de leur vocation à la carrière, l’appréciation de leurs mérites constituant ainsi le critère déterminant (voir arrêt du 13 juillet 2018, Pereira/Commission, T‑606/16, non publié, EU:T:2018:470, point 109 et jurisprudence citée).

131    À cet égard, l’article 45, paragraphe 1, du statut prévoit que, aux fins de l’examen comparatif des mérites, l’AIPN prend en considération, outre les rapports dont les fonctionnaires font l’objet, l’utilisation par ceux-ci, dans l’exercice de leurs fonctions, des langues autres que la langue dont ils ont justifié avoir une connaissance approfondie et le niveau des responsabilités exercées.

132    Le libellé de l’article 45, paragraphe 1, du statut n’excluant pas la possibilité d’une pondération, cette disposition laisse une certaine marge d’appréciation à l’AIPN quant à l’importance que celle-ci entend accorder à chacun des trois critères lors de l’examen comparatif des mérites, dans le respect toutefois du principe d’égalité (voir, en ce sens, arrêt du 16 mai 2013, Canga Fano/Conseil, T‑281/11 P, EU:T:2013:252, point 43 et jurisprudence citée, et ordonnance du 20 septembre 2013, Van Neyghem/Conseil, T‑113/13 P, EU:T:2013:568, point 23).

133    Ainsi, l’article 4, paragraphe 2, des DGE 45 dispose que, en cas d’égalité de mérites entre les fonctionnaires promouvables sur la base des trois critères, l’AIPN peut, à titre subsidiaire, prendre en considération d’autres éléments.

134    Comme cela ressort de la jurisprudence, l’un de ces autres éléments peut être, notamment, l’ancienneté des fonctionnaires dans le grade (arrêt du 15 janvier 2014, Stols/Conseil, T‑95/12 P, EU:T:2014:3, point 34).

135    En l’espèce, l’AIPN n’a pas conclu à l’existence d’une égalité de mérites entre les fonctionnaires.

136    Par conséquent, contrairement à ce qu’allègue la requérante dans le cadre de la quatrième branche du premier moyen, l’AIPN n’avait pas à recourir à un critère subsidiaire, tel que l’ancienneté dans le grade, lors de l’examen comparatif des mérites des fonctionnaires promouvables pour l’exercice de promotion 2018.

137    Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’allégation de la requérante selon laquelle, puisque l’AIPN n’a pas prouvé de manière objective que les fonctionnaires promus avaient des mérites supérieurs aux siens, elle aurait dû tenir compte de ce critère supplémentaire. En effet, il ressort de l’examen des trois premières branches du premier moyen que la requérante n’a pas démontré à suffisance de droit la subjectivité de l’examen comparatif des mérites opéré dans le cadre de l’exercice de promotion 2018 la concernant.

138    Dès lors, en n’intégrant pas, dans l’examen comparatif des mérites réalisé dans le cadre de l’exercice de promotion 2018, le critère subsidiaire relatif à l’ancienneté des fonctionnaires dans le grade, l’AIPN n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation.

139    Eu égard aux développements qui précèdent, il ressort qu’aucun des arguments présentés au soutien de la quatrième branche du premier moyen, relative à la subjectivité du choix des éléments factuels à prendre en considération, ne permet de conduire à l’identification d’une erreur manifeste d’appréciation commise par l’AIPN dans l’examen comparatif des mérites, dont l’objectivité et l’exactitude n’ont pu être remises en question.

140    Par conséquent, il convient de conclure au caractère non fondé de la quatrième branche du premier moyen.

141    Partant, le premier moyen, tiré d’erreurs manifestes d’appréciation dans la procédure de promotion, doit être rejeté dans son intégralité.

2.      Sur le second moyen, tiré de la violation des principes d’égalité de traitement et de nondiscrimination

142    Par son second moyen, la requérante soutient, en substance, que la décision attaquée est fondée sur une discrimination directe en raison de sa couleur de peau.

143    En premier lieu, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 1er quinquies, paragraphe 5, du statut, dès lors qu’une personne relevant dudit statut, qui s’estime lésée par le non‑respect à son égard du principe d’égalité de traitement, tel que défini au paragraphe 1 de cette disposition interdisant toute discrimination fondée notamment sur la couleur, établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, il incombe à l’institution de prouver qu’il n’y a pas eu violation du principe d’égalité de traitement.

144    En l’espèce, la requérante estime que la décision attaquée est fondée sur sa couleur de peau. Au titre des faits permettant de présumer l’existence d’une telle discrimination à son égard, la requérante relève, premièrement, que la subjectivité découlant de la procédure de promotion, telle qu’elle l’a établie dans le cadre de son premier moyen, joue uniquement en sa défaveur, deuxièmement, que, en réponse à son questionnement sur les raisons de sa non‑promotion, son supérieur hiérarchique lui a fait part de sa réputation au sein de sa DG, ce qui, selon elle, prouverait que la décision attaquée est subjective et n’est pas fondée sur une procédure objective et impartiale, troisièmement, qu’une certaine presse fait état de la discrimination raciale persistante au sein de la Commission et, quatrièmement, qu’elle est victime de nombreuses remarques et comportements déplacés.

145    Premièrement, en ce qui concerne les faits relatifs à la subjectivité de la procédure de promotion, il suffit de rappeler que l’examen des quatre branches du premier moyen, visant toutes à démontrer cette subjectivité, a conduit à conclure au caractère non fondé dudit moyen. Par conséquent, la requérante ne peut plus en tirer argument dans le cadre de son second moyen. Ainsi, ses allégations concernant les raisons de son absence de promotion depuis l’année 2009, les conclusions qu’elle tire de la comparaison avec ses évolutions de carrière lorsqu’elle était en poste à Bruxelles (Belgique) et le fait qu’elle soit la seule personne au sein de sa DG à subir un statu quo dans son évolution de carrière doivent être écartées. En tout état de cause, il y a également lieu de relever dans ce contexte que les allégations établissant une corrélation entre sa situation et sa couleur de peau manquent en fait. En effet, il ressort de documents produits par la Commission dans la duplique que deux autres fonctionnaires du même grade que la requérante, qui – à la connaissance de la Commission – n’ont pas la même couleur de peau que celle-ci, sont restés sans promotion depuis plus longtemps qu’elle.

146    Deuxièmement, en ce qui concerne les propos du supérieur hiérarchique de la requérante, il suffit de relever qu’il n’est fait référence à aucun moment à la couleur de peau de cette dernière. Contrairement à ce qu’elle affirme, la simple allégation d’une référence à sa réputation ne permet pas de satisfaire à l’obligation qui lui incombe de rapporter des faits laissant présumer l’existence d’une discrimination, au sens de l’article 1er quinquies, paragraphe 1, du statut, qu’elle qualifie elle‑même comme fondée sur sa couleur de peau.

147    Troisièmement, en ce qui concerne l’article de presse faisant référence à une prétendue discrimination raciale existant au sein de la Commission, il ressort de sa lecture que, comme le souligne la Commission, il s’agit d’un article doté d’un très grand degré de généralité, qui ne présente pas de lien évident venant au soutien du second moyen de la requérante. À cet égard, il peut être relevé que le propos de l’article de presse porte sur l’accès à l’emploi et non l’avancement de carrière, les minorités dans leur ensemble et pas seulement les minorités raciales et ethniques, l’absence de collectes statistiques concernant les origines ethniques, la situation à Bruxelles et non à Luxembourg et des exemples visant des associations professionnelles, des organisations internationales, des gouvernements des États membres de l’Union, des groupes de réflexion ou encore des institutions de l’Union, parmi lesquelles figure, dans une certaine mesure, la Commission. En fait, ce document vise principalement à souligner le manque de diversité à l’embauche chez certains employeurs à Bruxelles. Ainsi, contrairement aux affirmations de la requérante, ce document n’établit pas un contexte général de discrimination qui la concernerait. Par conséquent, une telle source d’informations ne présentant pas de lien suffisamment étroit avec la prétendue situation individuelle de la requérante, elle ne peut être considérée comme un indice permettant de présumer que la décision attaquée résulterait de l’existence d’une discrimination à son égard en raison de sa couleur de peau.

148    Quatrièmement, en ce qui concerne la discrimination que la requérante subirait sur son lieu de travail à Luxembourg, elle rapporte un certain nombre de remarques et de comportements, qu’elle estime déplacés, de la part de certains de ses collègues et supérieurs hiérarchiques. Or, il suffit d’observer qu’aucune des attitudes auxquelles elle fait référence n’a de lien direct avec sa couleur de peau, au point de permettre de présumer l’existence d’une discrimination à son égard ayant pu affecter la procédure de promotion la concernant. En tout état de cause, les éléments qu’elle apporte ne sont étayés par aucune preuve.

149    Au regard de ce qui précède et malgré l’attention que le Tribunal a portée aux arguments des parties présentés dans le cadre du second moyen tant dans leurs écritures qu’au cours de l’audience, il ne ressort pas d’indices suffisamment pertinents et précis permettant de présumer que la non-promotion de la requérante serait le résultat d’une discrimination directe ou indirecte à son égard en raison de sa couleur de peau. La requérante n’ayant pas satisfait à la condition posée à l’article 1er quinquies, paragraphe 5, du statut lui permettant de renverser la charge de la preuve quant à la démonstration d’une telle discrimination, il ne peut être reproché à la Commission une quelconque violation des principes d’égalité de traitement et de non‑discrimination en l’espèce.

150    En second lieu, il convient de relever que, dans la réplique, la requérante s’appuie sur l’article 2, paragraphe 2, sous b), de la directive 2000/43/CE du Conseil, du 29 juin 2000, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique (JO 2000, L 180, p. 22), pour alléguer, à titre subsidiaire, que, à supposer que les systèmes d’évaluation et de promotion soient considérés d’apparence neutre, ils sont néanmoins susceptibles d’entraîner un désavantage particulier pour des personnes d’une race ou d’une origine ethnique donnée par rapport à d’autres personnes.

151    Premièrement, il convient de rappeler que, conformément à l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure, la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite, à moins qu’ils ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure.

152    Par conséquent, si, par cette allégation, la requérante cherche à exciper de l’illégalité des systèmes d’évaluation et de promotion, qui constitueraient une discrimination indirecte au sens de l’article 2, paragraphe 2, sous b), de la directive 2000/43, alors ce moyen doit être considéré comme irrecevable.

153    En effet, dans la requête, la requérante a seulement allégué l’existence d’une discrimination fondée sur sa couleur de peau, en l’espèce, du fait de sa non-promotion, sans mettre en cause la légalité, au regard du principe de non‑discrimination, des règles d’évaluation et de promotion en tant que telles. Un tel argument constituerait alors un moyen nouveau. Or, rien n’indique qu’il pourrait se fonder sur des éléments de droit et de fait qui se seraient révélés pendant la procédure. Dès lors, la condition posée à l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure n’est pas remplie en l’espèce.

154    Deuxièmement et en tout état de cause, cet argument nouveau n’est pas fondé. En effet, il convient de rappeler que les directives sont adressées aux États membres et non aux institutions de l’Union. Par conséquent, les dispositions de cette directive ne sauraient, en principe, être considérées comme pouvant s’appliquer aux institutions dans leurs rapports avec leur personnel.

155    Certes, les dispositions d’une directive peuvent s’imposer indirectement à une institution si elles constituent l’expression d’un principe général du droit de l’Union, qu’il incombe à l’institution concernée d’appliquer comme tel (voir, en ce sens, arrêts du 9 septembre 2003, Rinke, C‑25/02, EU:C:2003:435, points 25 à 28, et du 26 septembre 2017, Hanschmann/Europol, T‑562/16, non publié, EU:T:2017:664, point 47). En outre, une directive peut lier une institution quand celle-ci a, dans le cadre de son autonomie organisationnelle et dans les limites du statut, entendu donner exécution à une obligation énoncée par cette directive ou encore lorsqu’un acte de portée générale, d’application interne, renvoie expressément aux mesures arrêtées par le législateur de l’Union en application des traités (arrêt du 26 septembre 2017, Hanschmann/Europol, T‑562/16, non publié, EU:T:2017:664, point 48).

156    Cependant, la requérante ne présente aucun argument visant à démontrer que l’une de ces exceptions s’appliquerait en l’espèce.

157    Troisièmement et en tout état de cause, il a été conclu que, contrairement à ses allégations, la requérante ne se trouvait pas dans une situation unique l’individualisant qui révélerait que les systèmes d’évaluation et de promotion seraient d’apparence neutre, mais susceptibles d’entraîner un désavantage particulier pour des personnes d’une race ou d’une origine ethnique donnée par rapport à d’autres personnes (voir point 145 ci‑dessus).

158    Partant, le second moyen, tiré de la violation des principes d’égalité de traitement et de non‑discrimination, doit être écarté.

159    Il s’ensuit que les conclusions visant l’annulation de la décision attaquée doivent être rejetées.

C.      Sur la demande d’indemnisation des préjudices moral et matériel

160    La requérante fait valoir, d’une part, un préjudice moral résultant de la discrimination à la base de la décision attaquée et, d’autre part, un préjudice matériel du fait de l’absence de promotion résultant de la décision attaquée.

161    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, les conclusions tendant à la réparation d’un préjudice matériel ou moral doivent être rejetées lorsqu’elles présentent un lien étroit avec les conclusions en annulation qui ont, elles-mêmes, été rejetées comme étant non fondées (voir arrêt du 24 avril 2017, HF/Parlement, T‑584/16, EU:T:2017:282, point 165 et jurisprudence citée).

162    En l’espèce, la demande d’indemnisation des prétendus préjudices matériel et moral résultant de la non-promotion de la requérante en 2018 et de la discrimination alléguée étant liée aux conclusions en annulation, lesquelles ont été rejetées (voir point 159 ci‑dessus), il convient de rejeter cette demande, conformément à la jurisprudence rappelée au point 161 ci‑dessus.

D.      Sur la demande d’injonction à l’encontre de la Commission relative à la réévaluation des mérites et, le cas échéant, à la promotion

163    Dans le cadre de sa demande d’indemnisation et comme chef de conclusions à part entière, la requérante demande au Tribunal d’enjoindre à la Commission de réévaluer ses mérites de manière impartiale et, le cas échéant, de la promouvoir.

164    Force est de constater que, par ce chef de conclusions, la requérante demande, en substance, au Tribunal d’adresser des injonctions à la Commission. Or, selon une jurisprudence bien établie, le juge de l’Union ne saurait, sans empiéter sur les prérogatives de l’autorité administrative, adresser des injonctions à une institution de l’Union. Le Tribunal n’est pas seulement incompétent, dans le cadre d’un recours en annulation, pour connaître des conclusions visant à ordonner à l’institution défenderesse de prendre les mesures qu’implique l’exécution d’un arrêt d’annulation, mais il l’est également, en principe, dans le cadre d’un recours de pleine juridiction, tel qu’un recours en indemnité dans le cadre duquel une partie requérante demande la condamnation de l’institution défenderesse à prendre des mesures déterminées en vue de réparer le préjudice allégué (voir, en ce sens, arrêt du 15 janvier 2019, HJ/EMA, T‑881/16, non publié, EU:T:2019:5, point 26 et jurisprudence citée).

165    Par conséquent, la demande de la requérante visant à enjoindre à la Commission de réévaluer ses mérites de manière impartiale et, le cas échéant, de la promouvoir, formulée tant dans le cadre de sa demande d’indemnisation que comme chef de conclusions pouvant être interprété comme découlant de sa demande en annulation de la décision attaquée, doit être rejetée pour cause d’incompétence ainsi que, par voie de conséquence, le recours dans son intégralité.

III. Sur les dépens

166    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

167    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Mme Élise Hill Mansilla est condamnée aux dépens.

Kanninen

Jaeger

Porchia

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 juin 2021.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

S. Papasavvas


*      Langue de procédure : le français.