Language of document : ECLI:EU:T:2022:350

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

8 juin 2022 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de déchéance – Marques de l’Union européenne verbales THINK DIFFERENT – Absence d’usage sérieux des marques – Article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001] – Obligation de motivation – Droit d’être entendu – Article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 »

Dans les affaires T‑26/21 à T‑28/21,

Apple Inc., établie à Cupertino, Californie (États-Unis), représentée par Mes I. Junkar, I. Fowler, M. Petersenn et B. Lüthge, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. T. Frydendahl et A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Swatch AG, établie à Bienne (Suisse), représentée par Me P. González-Bueno Catalán de Ocón, avocat,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de Mme A. Marcoulli, présidente, MM. C. Iliopoulos (rapporteur) et R. Norkus, juges,

greffier : Mme A. Juhász-Tóth, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 10 février 2022, au cours de laquelle des observations ont été présentées par les parties sur la jonction éventuelle des affaires T‑26/21 à T‑28/21 aux fins de l’arrêt,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Par ses trois recours fondés sur l’article 263 TFUE, la requérante, Apple Inc., demande l’annulation des décisions de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 4 novembre 2020 (affaires R 2011/2018-4, R 2012/2018-4 et R 2013/2018-4) (ci-après les « décisions attaquées »).

 Première marque contestée (affaire T26/21)

2        Le 7 novembre 1997, la requérante a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’EUIPO, en vertu du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié, lui-même remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

3        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal THINK DIFFERENT.

4        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, notamment, de la classe 9 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Ordinateurs, terminaux d’ordinateurs, claviers, imprimantes, unités d’affichage, terminaux ; modems ; unités de disques ; périphériques d’ordinateurs ; équipements de communication ; télécopieurs, répondeurs automatiques, systèmes de récupération d’informations basés sur la téléphonie ; adaptateurs, cartes d’adaptateurs, connecteurs et gestionnaires ; supports de stockage informatiques vierges, programmes informatiques, systèmes d’exploitation, matériel informatique, logiciels et micrologiciels ; dispositifs de mémoires d’ordinateurs ; enregistrements de données ; appareils photographiques ; polices de caractères, dessins et symboles typographiques, tous enregistrés électroniquement ou intégrés dans un logiciel ; puces, disques et bandes contenant des programmes informatiques ou des logiciels ou destinés à l’enregistrement de ceux-ci ; mémoires vives, mémoires mortes ; appareils de mémoires à semi-conducteurs ; équipements et instruments électroniques de communication ; appareils et instruments de télécommunications ; jeux informatiques et électroniques ; et leurs équipements informatiques associés ; produits multimédia comprenant les produits précités ou s’utilisant avec ceux-ci ; produits interactifs comprenant les produits précités ou s’utilisant avec ceux-ci ; pièces et parties constitutives de tous les produits précités ».

5        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 8/1999, du 8 février 1999. Le 6 septembre 1999, le signe verbal THINK DIFFERENT a été enregistré en tant que marque de l’Union européenne sous le numéro 671321.

 Deuxième marque contestée (affaire T27/21)

6        Le 9 juin 1998, la requérante a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’EUIPO, en vertu du règlement no 40/94.

7        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal THINK DIFFERENT.

8        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, notamment, de la classe 9 au sens de l’arrangement de Nice et correspondent à la description suivante : « Ordinateurs, terminaux d’ordinateurs, claviers, imprimantes, unités d’affichage, terminaux ; modems ; lecteurs de disquettes ; périphériques adaptés pour utilisation avec des ordinateurs ; appareils de communication ; télécopieurs, répondeurs téléphoniques, systèmes de récupération d’informations par téléphone ; adaptateurs, cartes d’adaptateurs, connecteurs et gestionnaires ; supports de stockage informatiques vierges, programmes informatiques, systèmes d’exploitation, matériel informatique, logiciels et micrologiciels ; dispositifs de mémoires pour ordinateurs ; enregistrements des données ; appareils photo ; polices de caractères, dessins et symboles typographiques, tous enregistrés électroniquement ou intégrés dans un logiciel ; puces, disques et bandes contenant des programmes informatiques ou des logiciels ou destinés à l’enregistrement de ceux-ci ; mémoires vives, mémoires mortes ; appareils de mémoires à semi-conducteurs ; appareils de communication ; appareils et instruments de télécommunication ; jeux informatiques et électroniques ; équipements informatiques associés et manuels vendus avec ceux-ci ; produits multimédia comprenant les produits précités ou s’utilisant avec ceux-ci ; produits interactifs comprenant les produits précités ou s’utilisant avec ceux-ci ; pièces et parties constitutives et accessoires de tous ces articles ».

9        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 33/1999, du 26 avril 1999. Le 18 novembre 1999, le signe verbal THINK DIFFERENT a été enregistré en tant que marque de l’Union européenne sous le numéro 845461.

 Troisième marque contestée (affaire T28/21)

10      Le 29 avril 2005, la requérante a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’EUIPO, en vertu du règlement no 40/94.

11      La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal THINK DIFFERENT.

12      Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, notamment, de la classe 9 au sens de l’arrangement de Nice et correspondent à la description suivante : « Ordinateurs, terminaux d’ordinateurs, claviers, imprimantes, unités d’affichage, terminaux ; modems ; lecteurs de disquettes ; périphériques adaptés pour utilisation avec des ordinateurs ; appareils de communication ; télécopieurs, répondeurs téléphoniques, systèmes de récupération d’informations par téléphone ; adaptateurs, cartes d’adaptateurs, connecteurs et gestionnaires ; supports de stockage informatiques vierges, programmes informatiques, systèmes d’exploitation, matériel informatique, logiciels et micrologiciels ; dispositifs de mémoire pour ordinateurs ; enregistrement des données ; appareils photo ; polices de caractères, dessins et symboles typographiques, tous enregistrés électroniquement ou intégrés dans un logiciel ; puces, disques et bandes contenant des programmes informatiques ou des logiciels ou destinés à l’enregistrement de ceux-ci ; mémoires vives, mémoires mortes ; appareils de mémoires à semi-conducteurs ; appareils de communication ; appareils et instruments de télécommunication ; jeux informatiques et électroniques ; équipements informatiques associés et manuels vendus avec ceux-ci ; produits multimédia comprenant les produits précités ou s’utilisant avec ceux-ci ; produits interactifs comprenant les produits précités ou s’utilisant avec ceux-ci ; pièces et parties constitutives et accessoires de tous ces articles ».

13      La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 42/2005, du 17 octobre 2005. Le 8 mai 2006, le signe verbal THINK DIFFERENT a été enregistré en tant que marque de l’Union européenne sous le numéro 4415063.

 Procédures de déchéance

14      Le 14 octobre 2016, l’intervenante, Swatch AG, a présenté auprès de l’EUIPO trois demandes en déchéance des marques contestées sur le fondement de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 [devenu article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001]. Dans ces trois demandes, elle faisait valoir que les marques contestées n’avaient pas fait l’objet d’un usage sérieux pour les produits visés au point 4 ci-dessus, s’agissant de la première marque contestée, au point 8 ci-dessus, s’agissant de la deuxième marque contestée, et au point 12 ci-dessus, s’agissant de la troisième marque contestée (ci-après, ensemble, les « produits concernés ») pendant une période ininterrompue de cinq ans.

15      Le 24 mars 2017, la requérante a présenté des éléments de preuve afin d’établir l’usage sérieux des marques contestées, qui consistaient notamment en :

–        une déclaration de témoin de son directeur du service juridique, datée du 23 mars 2017, contenant des informations sur l’historique de l’entreprise, le lancement de la campagne publicitaire intitulée « THINK DIFFERENT » en 1997, les récompenses reçues pour cette campagne ainsi que les dépenses publicitaires et les chiffres de ventes au cours des années 1994 à 2016. Cette déclaration incluait également des photographies, non datées, des étiquettes apposées sur l’emballage d’un ordinateur iMac, lesquelles arborent les marques contestées ;

–        un article du site Internet « www.macrumors.com » ainsi que des articles des magazines Forbes (2012,2015), The Telegraph (2012) et Time (2015) relatifs à la requérante ;

–        des articles parus dans les magazines Wall Street Journal (1998), Forbes (2011) et Advertising Age (1998), des impressions des sites Internet des prix Effie et Emmy Awards ainsi que des photos tirées du livre Think different (1998) contenant des informations sur la campagne de marketing menée avec les marques contestées ;

–        de nombreux articles publiés entre 1997 et 2016 contenant des informations sur la requérante et sur la campagne publicitaire « THINK DIFFERENT », des parodies « THINK DIFFERENT » et la comédie musicale « Nerds » à Broadway ;

–        des rapports annuels pour les années 2009, 2010, 2013 et 2015.

16      Le 31 mai 2017, l’intervenante a présenté des observations sur les éléments de preuve soumis par la requérante. La requérante a répondu auxdites observations le 31 octobre 2017.

17      Le 16 mars 2018, l’intervenante, dans le but de démontrer la position plutôt secondaire des marques contestées sur l’emballage d’un ordinateur de bureau iMac, a produit plusieurs photographies de cet emballage dans son ensemble, y compris l’étiquette mentionnée au point 15 ci-dessus.

18      Par décisions du 24 août 2018, la division d’annulation a déclaré la déchéance des marques contestées pour tous les produits concernés relevant de la classe 9, à compter du 14 octobre 2016.

19      Le 17 octobre 2018, la requérante a formé trois recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre les trois décisions de la division d’annulation. Le 21 décembre 2018, elle a présenté des mémoires exposant les motifs des recours, auxquels étaient joints des éléments de preuve supplémentaires, dont une déclaration de témoin de son directeur du service juridique, des photographies de l’emballage d’un ordinateur de bureau iMac arborant les marques contestées et une impression de son site Internet contenant une liste de tous les numéros de produits iMac ainsi que la date de leur première mise sur le marché.

20      Par les décisions attaquées, la quatrième chambre de recours a rejeté les recours. En particulier, tout d’abord, elle a constaté que, la première marque contestée ayant été enregistrée le 6 septembre 1999, la deuxième marque contestée le 18 novembre 1999, la troisième marque contestée le 8 mai 2006 et les trois demandes en déchéance ayant été déposées le 14 octobre 2016, la requérante devait apporter la preuve de l’usage sérieux de ces marques dans l’Union européenne pendant les cinq années précédant cette date, c’est-à-dire du 14 octobre 2011 au 13 octobre 2016. Ensuite, elle a observé que la requérante a distingué deux périodes d’usage des marques contestées, à savoir, premièrement, l’usage des marques contestées dans le cadre d’une campagne de marketing entre 1997 et 2000 pour les ordinateurs iMac et, deuxièmement, l’usage sur les cartons d’emballage des ordinateurs iMac depuis l’année 2009, et tout au long de la période pertinente. S’agissant de la première période, elle a relevé que la campagne de marketing était antérieure de plus de dix ans à la période pertinente et ne saurait, dès lors, être prise en considération. Par ailleurs, l’usage occasionnel des marques contestées sur le site Internet de la requérante, au cours de la période pertinente pour commémorer l’anniversaire des personnes célèbres ou des événements spéciaux, était un usage isolé et éphémère. S’agissant de la seconde période, la chambre de recours, après avoir précisé que les éléments de preuve présentés par la requérante ne portaient que sur les ordinateurs et les périphériques d’ordinateurs relevant de la classe 9, a considéré que la preuve de l’usage sérieux des marques contestées pour ces produits n’avait pas été apportée, dès lors que les pièces fournies montraient l’usage des marques contestées à un seul endroit sur le carton d’emballage, en caractères de taille assez réduite à côté de la liste des spécifications techniques. Elle a ajouté que, compte tenu du caractère hautement technique des produits concernés, ainsi que de la longueur du texte figurant sur l’emballage des ordinateurs iMac, écrit en petits caractères, le public pertinent percevrait les éléments « think different » comme un message promotionnel l’invitant à penser différemment, en d’autres termes, à « sortir des sentiers battus ». Enfin, la chambre de recours est parvenue à cette conclusion sans estimer nécessaire d’apprécier si les chiffres de ventes mondiales d’ordinateurs iMac depuis l’année 2009 étaient suffisants pour démontrer un usage sérieux des marques contestées.

 Conclusions des parties

21      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les décisions attaquées ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.

22      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter les recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

23      Les parties ayant été entendues sur ce point lors de l’audience, le Tribunal décide de joindre les présentes affaires aux fins de l’arrêt, conformément à l’article 68, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal.

 Sur l’étendue du litige

24      Lors de l’audience, la requérante a admis, en réponse à une question du Tribunal, qu’elle n’avait avancé aucun argument ni aucun élément de preuve concernant la partie des produits relevant de la classe 9 qui figure au point 27 des décisions attaquées, à savoir, pour la première marque contestée, les « imprimantes, télécopieurs, répondeurs automatiques, systèmes de récupération d’informations basés sur la téléphonie ; polices de caractères, dessins et symboles typographiques, tous enregistrés électroniquement ou intégrés dans un logiciel ; puces, disques et bandes contenant des programmes informatiques ou des logiciels ou destinés à l’enregistrement de ceux-ci ; mémoires vives, mémoires mortes ; appareils de mémoires à semi-conducteurs ; équipements et instruments électroniques de communication ; appareils et instruments de télécommunications ; jeux informatiques et électroniques ; et leurs équipements informatiques associés ; produits multimédia comprenant les produits précités ou s’utilisant avec ceux-ci ; pièces et parties constitutives de tous les produits précités » et, pour les deuxième et troisième marques contestées, les « imprimantes ; télécopieurs, répondeurs téléphoniques, systèmes de récupération d’informations par téléphone ; polices de caractères, dessins et symboles typographiques, tous enregistrés électroniquement ou intégrés dans un logiciel ; appareils et instruments de télécommunication ; jeux informatiques et électroniques ; équipements informatiques associés et manuels vendus avec ceux-ci ; produits multimédia comprenant les produits précités ou s’utilisant avec ceux-ci ; pièces et parties constitutives et accessoires de tous ces articles ». Il en a été pris acte dans le procès-verbal de l’audience.

25      Partant, il y a lieu de considérer que, par ses recours devant le Tribunal, la requérante remet en cause les décisions attaquées uniquement en ce qu’elles rejettent les trois recours pour les autres produits relevant de la classe 9 et qui sont énumérés au point 26 de ces décisions attaquées, à savoir, pour la première marque contestée, les « ordinateurs, terminaux d’ordinateurs, claviers, unités d’affichage, terminaux ; modems ; unités de disques ; périphériques d’ordinateurs ; équipements de communication ; adaptateurs, cartes d’adaptateurs, connecteurs et gestionnaires ; supports de stockage informatiques vierges, programmes informatiques, systèmes d’exploitation, matériel informatique, logiciels et micrologiciels ; dispositifs de mémoires d’ordinateurs ; enregistrements de données ; appareils photographiques ; puces, disques et bandes contenant des programmes informatiques ou des logiciels ou destinés à l’enregistrement de ceux-ci ; mémoires vives, mémoires mortes ; appareils de mémoires à semi-conducteurs ; équipements et instruments électroniques de communication ; produits interactifs comprenant les produits précités ou s’utilisant avec ceux-ci ; pièces et parties constitutives de tous les produits précités » et, pour les deuxième et troisième marques contestées, les « ordinateurs, terminaux d’ordinateurs, claviers, unités d’affichage, terminaux ; modems ; lecteurs de disquettes ; périphériques adaptés pour utilisation avec des ordinateurs ; appareils de communication ; adaptateurs, cartes d’adaptateurs, connecteurs et gestionnaires ; supports de stockage informatiques vierges, programmes informatiques, systèmes d’exploitation, matériel informatique, logiciels et micrologiciels ; dispositifs de mémoire pour ordinateurs ; enregistrements des données ; appareils photo ; puces, disques et bandes contenant des programmes informatiques ou des logiciels ou destinés à l’enregistrement de ceux-ci ; mémoires vives, mémoires mortes ; appareils de mémoires à semi-conducteurs ; appareils de communication ; produits interactifs comprenant les produits précités ou s’utilisant avec ceux-ci ; pièces et parties constitutives et accessoires de tous ces articles ».

 Sur la recevabilité des pièces présentées pour la première fois devant le Tribunal 

26      L’EUIPO et l’intervenante font valoir que le document présenté en annexe A.6 est irrecevable au motif qu’il a été produit pour la première fois devant le Tribunal. L’EUIPO précise que la requérante avait la possibilité de présenter ces éléments de preuve pendant la procédure administrative, mais qu’elle ne l’avait pas fait.

27      Tout en admettant que le document produit en annexe A.6 n’avait pas été présenté au cours de la procédure administrative devant l’EUIPO, la requérante a précisé que cette annexe était néanmoins recevable, car il s’agirait de répondre à une dénaturation des faits par la chambre de recours relative au niveau d’attention du public et au mode d’achat des produits pertinents. Elle cite à cet égard l’arrêt du 12 septembre 2007, Koipe/OHMI – Aceites del Sur (La Española) (T‑363/04, EU:T:2007:264, points 76 et 77).

28      Il ressort de la jurisprudence que le recours devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO au sens de l’article 72 du règlement 2017/1001, de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des documents présentés pour la première fois devant lui [voir arrêt du 27 février 2018, Gramberg/EUIPO – Mahdavi Sabet (Étui pour téléphone portable), T‑166/15, EU:T:2018:100, point 17 et jurisprudence citée].

29      En l’espèce, la requérante a présenté, en annexe A.6 aux requêtes, un rapport d’expert portant sur les circonstances factuelles entourant l’achat de produits informatiques tels que les ordinateurs et en particulier les ordinateurs iMac.

30      Il n’est pas contesté que le rapport d’expert présenté en annexe A.6 a été produit pour la première fois devant le Tribunal, nonobstant la circonstance que la requérante avait la possibilité de produire un tel rapport pendant la procédure administrative. En effet, il convient notamment de relever que, dès lors que la division d’annulation avait indiqué, dans ses décisions du 24 août 2018, que les marques contestées étaient affichées sur l’emballage des ordinateurs iMac « dans des caractères de taille plutôt réduite », il appartenait à la requérante, le cas échéant, si telle avait été son intention, de présenter, devant la chambre de recours, les arguments et les documents susceptibles de remettre en cause cette appréciation.

31      En ce qui concerne l’argument de la requérante tiré de l’arrêt du 12 septembre 2007, La Española (T‑363/04, EU:T:2007:264, points 76 et 77), force est de constater que les circonstances de ladite affaire ne sont pas transposables au cas d’espèce. En effet, il ressort des points 76 et 77 dudit arrêt que, d’une part, dans la décision contestée dans ladite affaire, la chambre de recours n’avait fourni aucune explication au soutien de son analyse relative aux pratiques dans un secteur économique donné et, d’autre part, que le document produit devant le Tribunal, à savoir une « attestation notariée authentifiant un dossier photographique », visait à démontrer que ladite analyse des pratiques du secteur était erronée. En revanche, dans les décisions attaquées dans la présente affaire, la chambre de recours a exposé les raisons pour lesquelles elle a considéré que l’utilisation des marques contestées à un seul endroit sur le carton d’emballage ne pouvait être qualifiée de sérieuse au regard des caractéristiques de cet usage, notamment la taille et l’emplacement. En outre, dans le cas d’espèce, le rapport d’expert produit en tant qu’annexe A.6 porte sur les circonstances factuelles entourant l’achat de produits informatiques tels que les ordinateurs, et en particulier les ordinateurs iMac. Or, si la requérante estimait que de telles explications étaient nécessaires afin d’apprécier les éléments de preuve produits devant les instances de l’EUIPO, il lui incombait de produire un tel rapport d’expert devant lesdites instances. En revanche, il n’appartient pas au Tribunal de réexaminer lesdits éléments de preuve sur la base d’informations que la requérante n’a pas fournies aux instances de l’EUIPO afin de démontrer l’usage sérieux des marques contestées.

32      Par conséquent, eu égard à la jurisprudence rappelée au point 28 ci-dessus, le document précité doit être écarté comme étant irrecevable.

 Sur le fond

33      À l’appui des recours, la requérante invoque deux moyens, tirés, le premier, d’une violation de l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 18 du même règlement et, le second, de la violation de l’article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001.

34      Compte tenu de la date d’introduction des demandes en déchéance en cause, en l’occurrence le 14 octobre 2016, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, le présent litige est régi par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009 (voir, en ce sens, arrêts du 6 juin 2019, Deichmann/EUIPO, C‑223/18 P, non publié, EU:C:2019:471, point 2, et du 3 juillet 2019, Viridis Pharmaceutical/EUIPO, C‑668/17 P, EU:C:2019:557, point 3). Par ailleurs, dans la mesure où, selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à la date à laquelle elles entrent en vigueur (voir arrêt du 11 décembre 2012, Commission/Espagne, C‑610/10, EU:C:2012:781, point 45 et jurisprudence citée), le litige est régi par les dispositions procédurales du règlement 2017/1001. En outre, eu égard au fait que les recours devant la chambre de recours ont été introduits après le 1er octobre 2017, le 17 octobre 2018, il résulte de l’article 82, paragraphe 2, sous j), du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1), que ce sont les dispositions de procédure du titre V du règlement délégué 2018/625, notamment l’article 26, paragraphe 1, qui s’appliquaient à la procédure de recours devant la chambre de recours.

35      Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites par la chambre de recours dans les décisions attaquées et par les parties dans leurs écritures à l’article 18, et à l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, comme visant l’article 15, et l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, d’une teneur identique.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001

36      Le second moyen soulevé par la requérante se divise en deux branches, tirées, la première, d’une violation du droit d’être entendu et, la seconde, d’une violation de l’obligation de motivation.

–       Sur la première branche du second moyen, tirée de la violation du droit d’être entendu

37      La requérante fait grief à la chambre de recours d’avoir violé son droit d’être entendue en fondant les trois décisions attaquées sur des arguments et sur des éléments de preuve sur lesquels elle n’avait pas pu se prononcer. À cet égard, elle reproche, en particulier, à la chambre de recours de ne pas lui avoir donné la possibilité de prendre position sur des photographies de la présentation des ordinateurs iMac en magasin, produites pour la première fois par l’intervenante dans ses observations en réponse au recours du 9 mai 2019, ni sur le contexte factuel du processus d’achat des ordinateurs iMac.

38      L’EUIPO et l’intervenante contestent ces arguments.

39      En vertu de l’article 94, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement 2017/1001, les décisions de l’EUIPO ne peuvent être fondées que sur des motifs ou sur des preuves au sujet desquels les parties ont pu prendre position.

40      Cette disposition constitue une application spécifique du principe général du respect des droits de la défense, consacré, par ailleurs, à l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, selon lequel les personnes dont les intérêts sont affectés par des décisions des autorités publiques doivent être mises en mesure de faire connaître utilement leur point de vue.

41      Le droit d’être entendu s’étend à tous les éléments de fait ou de droit qui constituent le fondement de l’acte décisionnel, mais non pas à la position finale que l’administration entend adopter. Il ne commande pas non plus que, avant d’adopter sa position finale sur l’appréciation des éléments présentés par une partie, la chambre de recours de l’EUIPO soit tenue d’offrir à cette partie une nouvelle possibilité de s’exprimer au sujet desdits éléments (voir arrêt du 4 mars 2020, Tulliallan Burlington/EUIPO, C‑155/18 P à C‑158/18 P, EU:C:2020:151, point 94 et jurisprudence citée).

42      En l’espèce, force est de constater que, contrairement à ce qu’allègue la requérante, la chambre de recours ne s’était pas appuyée sur des éléments de preuve produits par l’intervenante pour la première fois dans ses observations en réponse au recours du 9 mai 2019. En effet, il ressort des points 5 et 31 des décisions attaquées que la chambre de recours a pris en compte les photographies de la présentation des ordinateurs iMac en magasin présentées par l’intervenante dans le cadre des observations du 16 mars 2018 devant la division d’annulation mentionnées dans le point 17 ci-dessus. Par conséquent, la requérante a eu l’opportunité de présenter ses observations sur lesdites photographies devant la chambre de recours.

43      S’agissant du grief par lequel la requérante reproche à la chambre de recours de ne pas l’avoir invitée à présenter des observations sur le contexte factuel du processus d’achat des ordinateurs iMac, il convient de constater que cet élément factuel a été invoqué par l’intervenante dans ses observations du 9 mai 2019 en réponse au recours et, en particulier, au mémoire exposant les motifs du recours de la requérante datant du 21 décembre 2018.

44      Conformément à la procédure prévue par l’article 26, paragraphe 1, du règlement délégué 2018/625, après la présentation des observations en réponse par l’autre partie à la procédure, le requérant avait la possibilité de demander à la chambre de recours l’autorisation de présenter un mémoire en réplique sur lesdites observations, y compris sur les éventuels nouveaux éléments de preuve présentés.

45      Or, en l’espèce, il suffit de constater que, à la suite de la réception des observations du 9 mai 2019, la requérante n’a pas demandé l’autorisation de présenter un mémoire en réplique en tant que moyen à sa disposition pour faire valoir ses observations à l’encontre des nouveaux arguments et des nouveaux éléments de preuve produits par l’intervenante dans ses observations en réponse.

46      Dans ces conditions, aucune violation du droit d’être entendu ne saurait être constatée en l’espèce [voir, en ce sens, arrêt du 16 juin 2021, Fidia farmaceutici/EUIPO – Ioulia and Irene Tseti Pharmaceutical Laboratories (HYAL), T‑215/20, non publié, EU:T:2021:371, points 88 et 89].

47      Il s’ensuit que la première branche du second moyen doit être rejetée.

–       Sur la seconde branche du second moyen, tirée de la violation de l’obligation de motivation

48      La requérante fait valoir que les trois décisions attaquées étaient entachées d’une insuffisance de motivation à trois égards. La chambre de recours aurait omis, premièrement d’expliquer, au point 31 de ces décisions, pourquoi les consommateurs n’examineraient vraisemblablement pas l’emballage des ordinateurs iMac et leurs spécifications techniques, deuxièmement, de motiver, au point 32 des mêmes décisions, l’absence de prise en compte de la perception du public non anglophone, et troisièmement, d’exposer, au point 33 desdites décisions, les raisons pour lesquelles les éléments de preuve démontrant l’immense niveau de reconnaissance des termes « think different » devaient être écartés, ni pourquoi les éléments verbaux des marques contestées ne comportaient qu’une « [simple] promesse promotionnelle ».

49      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

50      Il convient de rappeler que l’obligation de motivation qui s’impose à la chambre de recours, laquelle découle notamment de l’article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, a pour double objectif de permettre, d’une part, aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et, d’autre part, au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision [voir arrêt du 19 décembre 2019, Currency One/EUIPO – Cinkciarz.pl (CINKCIARZ), T‑501/18, EU:T:2019:879, point 67 et jurisprudence citée].

51      L’obligation de motivation constitue une formalité substantielle, qui doit être distinguée de la question du bien-fondé des motifs, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux. En effet, la motivation d’une décision consiste à exprimer formellement les motifs sur lesquels repose cette décision. Si ces motifs sont entachés d’erreurs, celles-ci entachent la légalité au fond de la décision, mais non la motivation de celle-ci, qui peut être suffisante tout en exprimant des motifs erronés [voir arrêts du 22 septembre 2016, Pensa Pharma/EUIPO, C‑442/15 P, non publié, EU:C:2016:720, point 35 et jurisprudence citée, et du 14 juillet 2017, Sata/EUIPO (4600), T‑214/16, non publié, EU:T:2017:501, point 59 et jurisprudence citée]. Il s’ensuit que les griefs et arguments visant à contester le bien-fondé de l’acte litigieux sont dénués de pertinence dans le cadre d’un moyen tiré du défaut ou de l’insuffisance de la motivation (voir, en ce sens, arrêt du 12 mai 2011, Région Nord-Pas-de-Calais et Communauté d’agglomération du Douaisis/Commission, T‑267/08 et T‑279/08, EU:T:2011:209, point 45 et jurisprudence citée).

52      En l’espèce, contrairement à ce que soutient la requérante, les décisions attaquées exposent clairement les raisons pour lesquelles la chambre de recours a estimé que les éléments de preuve présentés ne permettaient pas de constater un usage sérieux « en tant que marque » pendant la période pertinente.

53      Les critiques de la requérante reprises au point 48 ci-dessus sur les explications que la chambre de recours aurait omis de fournir dans le cadre du raisonnement contenu aux points 31 à 33 des décisions attaquées se confondent avec les critiques sur le bien-fondé dudit raisonnement, lesquelles seront analysées dans le cadre de l’examen du premier moyen ci-dessous. Aucune violation de l’obligation de motivation ne saurait donc être constatée à cet égard.

54      Il s’ensuit que, contrairement à ce que soutient la requérante, la chambre de recours a motivé à suffisance de droit les décisions attaquées quant à la question de savoir si celle-ci avait rapporté la preuve de l’usage sérieux des marques contestées.

55      La seconde branche du second moyen doit donc être rejetée et, partant, le second moyen dans son ensemble.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, lu conjointement avec l’article 15 du même règlement

56      Par ce moyen, la requérante prétend, premièrement, que la chambre de recours n’a pas dûment tenu compte du niveau d’attention du public pertinent, ni de l’importance de l’examen visuel de l’emballage des ordinateurs iMac et de leurs spécifications techniques au moment de leur achat. Deuxièmement, la chambre de recours aurait commis une erreur en affirmant, au point 32 des décisions attaquées, que la requérante avait fourni des chiffres de ventes concernant l’usage des marques contestées uniquement pour certains États membres de l’Union, à savoir le Royaume-Uni, la Finlande, le Danemark et l’Allemagne. Troisièmement, la requérante conteste la conclusion de la chambre de recours selon laquelle il lui incombait de démontrer que les marques contestées ont été utilisées isolément et apposées à un endroit particulier sur les produits ou leur emballage et dans des caractères de grande taille. Ce faisant, la chambre de recours aurait, selon la requérante, introduit de nouveaux critères de preuve de l’usage sérieux non prévus, ni par le règlement no 207/2009 ni par la jurisprudence.

57      L’EUIPO et l’intervenante contestent l’ensemble des arguments de la requérante.

58      Aux termes de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, le titulaire de la marque de l’Union européenne est déclaré déchu de ses droits, sur demande présentée auprès de l’EUIPO ou sur demande reconventionnelle dans une action en contrefaçon, si, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque n’a pas fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union pour les produits ou les services pour lesquels elle a été enregistrée et s’il n’existe pas de justes motifs pour le non-usage.

59      En l’espèce, la première marque contestée a été enregistrée le 6 septembre 1999, la deuxième marque contestée a été enregistrée le 18 novembre 1999, la troisième marque contestée a été enregistrée le 8 mai 2006 et les demandes en déchéance ont été déposées le 14 octobre 2016. Par conséquent, les marques contestées ayant été enregistrées depuis plus de cinq ans à la date de dépôt desdites demandes, la requérante devait prouver l’usage sérieux de ces marques pour les produits concernés au cours des cinq années précédant cette dernière date, à savoir du 14 octobre 2011 au 13 octobre 2016.

60      En effet, dans le cadre d’une procédure de déchéance d’une marque, c’est au titulaire de cette dernière qu’il incombe, en principe, d’établir l’usage sérieux de ladite marque (voir arrêt du 23 janvier 2019, Klement/EUIPO, C‑698/17 P, non publié, EU:C:2019:48, point 57 et jurisprudence citée).

61      À cet égard, il ressort de la jurisprudence qu’une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque [voir arrêt du 8 juillet 2004, Sunrider/OHMI – Espadafor Caba (VITAFRUIT), T‑203/02, EU:T:2004:225, point 39 et jurisprudence citée].

62      Dans l’interprétation de la notion d’usage sérieux, il convient de prendre en compte le fait que la ratio legis de l’exigence selon laquelle la marque doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux ne vise pas à évaluer la réussite commerciale, ni à contrôler la stratégie économique d’une entreprise ou encore à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes [voir arrêt du 8 juillet 2004, MFE Marienfelde/OHMI – Vétoquinol (HIPOVITON), T‑334/01, EU:T:2004:223, point 32 et jurisprudence citée].

63      L’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’étendue et la fréquence de l’usage de la marque (voir arrêt du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 40 et jurisprudence citée).

64      Pour examiner le caractère sérieux de l’usage d’une marque antérieure, il convient de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce (voir arrêt du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 42 et jurisprudence citée).

65      L’usage sérieux d’une marque ne peut être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de la marque sur le marché concerné [voir arrêt du 15 septembre 2011, centrotherm Clean Solutions/OHMI – Centrotherm Systemtechnik (CENTROTHERM), T‑427/09, EU:T:2011:480, point 30 et jurisprudence citée].

66      Dans le cadre de l’appréciation des preuves de l’usage sérieux d’une marque, il ne s’agit pas d’analyser chacune des preuves de façon isolée, mais conjointement, afin d’en identifier le sens le plus probable et le plus cohérent. Ainsi, même si la valeur probante d’un élément de preuve est limitée, dans la mesure où, pris isolément, il ne démontre pas avec certitude si et comment les produits concernés ont été mis sur le marché, et si cet élément n’est dès lors pas décisif à lui seul, il peut néanmoins être pris en compte dans l’appréciation globale du caractère sérieux de l’usage de la marque contestée. Il en va ainsi, par exemple, lorsque cet élément vient s’ajouter à d’autres éléments de preuve [voir arrêt du 30 janvier 2020, Grupo Textil Brownie/EUIPO – The Guide Association (BROWNIE), T‑598/18, EU:T:2020:22, point 51 et jurisprudence citée].

67      C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’analyser les arguments avancés par la requérante.

–       Sur le niveau d’attention du public pertinent, le processus d’achat et l’importance des spécifications techniques des produits en cause

68      La requérante reproche à la chambre de recours de ne pas avoir pris en compte le niveau d’attention élevé du public pertinent dans le cadre de l’appréciation de l’usage sérieux des marques contestées. En particulier, elle fait valoir que la chambre de recours a méconnu la jurisprudence selon laquelle le consommateur fait preuve d’un niveau d’attention élevé lors de l’achat de produits durables et hautement techniques et effectue, par la même occasion, un examen minutieux de leurs spécifications techniques. La chambre de recours aurait ainsi conclu, à tort, que le public pertinent ignorait aisément la partie supérieure de l’emballage des ordinateurs iMac affichant leurs spécifications.

69      Par ailleurs, selon la requérante, la chambre de recours n’aurait pas tenu compte du fait que les ordinateurs et les accessoires informatiques relevant de la classe 9 sont souvent vendus « tels que présentés » dans les rayons des grands magasins ou des magasins spécialisés, où les consommateurs ont la possibilité d’examiner visuellement leurs emballages avant de les acheter. Elle ajoute que dans ces magasins, selon une configuration classique, lesdits produits sont vendus en libre-service, ainsi que le montrent les nouvelles photographies figurant dans la requête, et dans ce cas les consommateurs se fient principalement à l’emballage d’origine.

70      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

71      S’agissant du niveau d’attention du public pertinent, il y a lieu de constater d’emblée qu’il n’est pas contesté par les parties que les ordinateurs et les accessoires informatiques compris dans la classe 9 sont des produits hautement techniques et innovants, ainsi que la chambre de recours l’a relevé au point 33 des décisions attaquées. Il n’est pas, non plus, contesté que le consommateur fera preuve d’un niveau d’attention élevé lors de l’achat de tels produits.

72      Or, il importe de constater que, quand bien même la chambre de recours n’aurait pas tenu compte du niveau d’attention élevé du public pertinent pour les ordinateurs personnels et les accessoires informatiques relevant de la classe 9, cela ne saurait avoir une influence sur la conclusion exposée au point 31 des décisions attaquées selon laquelle les marques contestées n’occupent qu’un espace assez insignifiant sur l’emballage à côté du code-barres. En tout état de cause, la requérante ne démontre pas qu’une telle prise en compte aurait conduit la chambre de recours à considérer que le consommateur allait examiner l’emballage dans le moindre détail et qu’il aurait porté une attention particulière aux marques contestées.

73      S’agissant du processus d’achat des produits en cause, il convient, d’abord, de relever que dans certains cas, les ordinateurs et les accessoires informatiques relevant de la classe 9 peuvent être effectivement vendus en libre-service aux consommateurs, présentés sur des rayonnages. Ensuite, dans d’autres cas, ainsi que le souligne l’intervenante, ils sont stockés dans un endroit qui n’est pas directement accessible au public (par exemple dans leur emballage ou dans une réserve). Les consommateurs peuvent, toutefois, essayer les modèles d’exposition qui sont présentés sans leur emballage sur la table et consulter les fiches techniques placées à côté de chaque produit. Enfin, lesdits produits peuvent aussi faire l’objet d’un achat en ligne, sur la base d’informations figurant dans des catalogues spéciaux ou sur Internet.

74      L’argument de la requérante selon lequel les consommateurs sont toujours en mesure d’examiner visuellement les étiquettes apposées sur les emballages des ordinateurs iMac avant de les acheter ne saurait être accueilli sans qu’il soit besoin de statuer sur la recevabilité des nouvelles photographies figurant dans la requête.

75      Il convient également de rejeter l’argument de la requérante tiré des arrêts du 23 septembre 2011, NEC Display Solutions Europe/OHMI – C More Entertainment (see more) (T‑501/08, non publié, EU:T:2011:527, point 53), et du 2 décembre 2020, inMusic Brands/EUIPO – Equipson (Marq) (T‑687/19, non publié, EU:T:2020:582, point 98). En effet, cette jurisprudence, relative à l’importance qu’il convient d’accorder aux similitudes visuelle et phonétique des signes en cause dans le cadre de l’appréciation du risque de confusion, n’est pas pertinente dans le cadre de l’examen de l’usage sérieux des marques contestées.

–       Sur les chiffres de ventes d’ordinateurs de bureau iMac sur l’ensemble de l’Union

76      La requérante reproche, en substance, à la chambre de recours d’avoir considéré, à tort, que les chiffres de ventes d’ordinateurs de bureau iMac fournis par la requérante visaient uniquement certains États membres de l’Union, à savoir le Royaume-Uni, la Finlande, le Danemark et l’Allemagne. Elle prétend avoir vendu plus de quatre millions d’ordinateurs iMac sous la marque THINK DIFFERENT pendant la période pertinente dans l’ensemble de l’Union, ainsi que cela serait établi par la déclaration de témoin de son directeur du service juridique, datée du 23 mars 2017.

77      À cet égard, il y a lieu de rappeler que selon une jurisprudence constante, il convient, pour apprécier la valeur probante d’un document, de vérifier la vraisemblance et la véracité de l’information qui y est contenue. Il faut tenir compte notamment, de l’origine du document, des circonstances de son élaboration et de son destinataire et se demander si, d’après son contenu, il semble sensé et fiable [voir arrêt du 8 mai 2017, Les Éclaires/EUIPO – L’éclaireur International (L’ECLAIREUR), T‑680/15, non publié, EU:T:2017:320, point 72 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, arrêt du 16 décembre 2008, Deichmann-Schuhe/OHMI – Design for Woman (DEITECH), T‑86/07, non publié, EU:T:2008:577, point 47 et jurisprudence citée].

78      En l’espèce, comme le fait valoir à juste titre l’EUIPO, la déclaration de témoin a été établie par le directeur du service juridique de la requérante et ne saurait donc présenter le même caractère fiable et crédible qu’une déclaration provenant d’une personne tierce ou indépendante de la société en cause. Dès lors, ladite déclaration n’est pas suffisante à elle seule et ne constitue qu’un indice nécessitant d’être corroboré par d’autres éléments probants [voir, en ce sens, arrêt du 21 septembre 2017, Repsol YPF/EUIPO – Basic (BASIC), T‑609/15, EU:T:2017:640, point 64 et jurisprudence citée].

79      À ce titre, il convient de relever que selon la déclaration de témoin du 23 mars 2017, plus de quatre millions d’ordinateurs iMac sous la marque THINK DIFFERENT avaient effectivement été vendus pendant la période pertinente dans l’ensemble de l’Union. Or, lesdits chiffres de ventes figurant dans la déclaration de témoin ne sont corroborés par aucun autre élément probant. En effet, les rapports annuels pour les années 2009, 2010, 2013 et 2015, joints à la déclaration de témoin du 23 mars 2017, contiennent uniquement des informations sur les ventes mondiales nettes d’ordinateurs iMac. Ils ne fournissent aucune précision quant aux chiffres de ventes d’ordinateurs iMac dans l’Union.

80      Partant, il convient de rejeter le grief de la requérante selon lequel la chambre de recours n’aurait à tort pas tenu compte des chiffres de ventes d’ordinateurs iMac dans l’ensemble de l’Union, avancés dans la déclaration de témoin du 23 mars 2017.

–       Sur l’application de critères erronés et inadéquats de l’usage sérieux des marques contestées

81      En substance, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir examiné les éléments de preuve relatifs à l’usage sérieux des marques contestées pour les produits concernés en considération de critères erronés.

82      En premier lieu, la requérante fait valoir que, contrairement au raisonnement tenu par la chambre de recours, l’emploi conjoint de plusieurs marques sur l’emballage des ordinateurs de bureau iMac ne saurait, par lui-même, porter atteinte à la fonction d’identification remplie par les marques contestées à l’égard des produits concernés. Selon elle, les marques contestées étaient utilisées conjointement, mais de manière autonome, avec les autres marques apposées sur l’emballage des ordinateurs iMac dans la mesure où elles figuraient clairement à part des autres marques sur l’emballage et elles étaient placées à une distance suffisante de la marque la plus proche, à savoir Macintosh.

83      En deuxième lieu, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir tenu compte, lors de l’appréciation du caractère sérieux de l’usage des marques contestées, de nouveaux critères, contrairement à la jurisprudence établie. En effet, selon la requérante, il n’existe aucune jurisprudence exigeant qu’il soit démontré que les marques contestées aient été apposées à un endroit particulier sur l’emballage du produit concerné et qu’elles apparaissent dans des caractères de grande taille. Au soutien de son argument, elle invoque les arrêts du 27 septembre 2007, La Mer Technology/OHMI – Laboratoires Goëmar (LA MER) (T‑418/03, non publié, EU:T:2007:299, point 83), du 30 novembre 2009, Esber/OHMI – Coloris Global Coloring Concept (COLORIS) (T‑353/07, non publié, EU:T:2009:475, point 49), et du 15 décembre 2016, Aldi/EUIPO – Cantina Tollo (ALDIANO) (T‑391/15, non publié, EU:T:2016:741, points 29 à 31).

84      En troisième lieu, la requérante conteste l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle les marques contestées seront comprises par le public pertinent comme un « message promotionnel ». Sur le plan juridique, elle soutient, d’une part, que la motivation, figurant aux points 32 et 33 des décisions attaquées, est confuse en ce sens qu’elle ne permet pas de comprendre clairement en quoi le positionnement des marques contestées à côté de la marque « Macintosh » ferait que celles-ci seraient perçues comme un message promotionnel. D’autre part, dans le cadre d’une procédure de déchéance pour non-usage sérieux d’une marque enregistrée, il n’est pas possible de constater un motif absolu de refus, tel que l’absence de caractère distinctif. Sur le plan factuel, la requérante avance, premièrement, que la conclusion de la chambre de recours sur le caractère distinctif des marques contestées était contredite par un faisceau d’éléments de preuve, en particulier la déclaration de témoin du directeur de son service juridique attestant du grand succès de la campagne publicitaire « THINK DIFFERENT », mais également par de nombreux articles de presse démontrant que, après le lancement de cette campagne en 1997, les marques contestées étaient rapidement devenues associées à l’image de la requérante. Deuxièmement, selon la requérante, le fait qu’il existe un litige entre l’intervenante et elle, portant sur d’autres marques que celles en cause constitue un indice révélateur du caractère distinctif des marques contestées.

85      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

86      Premièrement, s’agissant de l’utilisation des marques contestées conjointement avec d’autres éléments verbaux, la chambre de recours a relevé, au point 32 des décisions attaquées, que les marques contestées n’étaient pas utilisées sur l’emballage en tant que telles, mais étaient combinées au mot « macintosh », à savoir la marque utilisée pour désigner les ordinateurs personnels fabriqués par la requérante, qui a été ensuite abrégée par le mot « mac ». Elle a aussi affirmé que l’expression « think different », combinée au terme « macintosh », serait perçue par le public pertinent comme un message promotionnel l’invitant à penser différemment.

87      Il est vrai, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence invoquée par la requérante, qu’il n’existe aucune règle en matière de marque de l’Union européenne obligeant son titulaire à prouver l’usage de la marque antérieure de manière isolée, indépendamment de toute autre marque ou de tout autre signe. Dès lors, il est possible que deux ou plusieurs marques fassent l’objet d’un usage conjoint et autonome avec ou sans le nom de la société du fabricant [voir, en ce sens, arrêts du 8 décembre 2005, Castellblanch/OHMI – Champagne Roederer (CRISTAL CASTELLBLANCH), T‑29/04, EU:T:2005:438, points 33 et 34 ; du 14 décembre 2011, Völkl/OHMI – Marker Völkl (VÖLKL), T‑504/09, EU:T:2011:739, point 100, et du 6 novembre 2014, Popp et Zech/OHMI – Müller-Boré & Partner (MB), T‑463/12, non publié, EU:T:2014:935, point 43]. Ainsi, comme la requérante l’a fait valoir, l’emploi conjoint d’une autre marque avec les marques contestées ne saurait, par lui-même, porter atteinte à la fonction d’identification remplie par cette autre marque à l’égard des produits concernés.

88      Toutefois, une marque enregistrée qui est utilisée conjointement avec une autre marque doit continuer d’être perçue comme une indication de l’origine du produit en cause afin que cet usage satisfasse à la notion d’« usage sérieux » au sens de l’article 15, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 (voir, par analogie, arrêt du 18 avril 2013, Colloseum Holding, C‑12/12, EU:C:2013:253, point 35).

89      En l’espèce, il convient d’observer que, contrairement à ce que prétend la requérante, la chambre de recours n’a pas fondé ses conclusions relatives à l’absence d’usage sérieux des marques contestées sur le seul constat de la présence de la marque verbale Macintosh sur l’emballage des ordinateurs iMac aux côtés des marques contestées.

90      Au contraire, ainsi qu’il ressort des points 20 et 30 à 33 des décisions attaquées, le motif principal sur lequel la chambre de recours a fondé sa conclusion est tiré du fait que certains éléments de preuve produits par la requérante, à cet effet, ne relèvent pas de la période pertinente, et que les images produites par la requérante font apparaître les marques contestées à un seul endroit sur le carton d’emballage et que cette seule utilisation ne pouvait être qualifiée de sérieuse au regard des caractéristiques de cet usage, notamment la taille et l’emplacement.

91      Il s’ensuit que la chambre de recours n’a nullement remis en cause la jurisprudence sur la possibilité d’un usage conjoint de plusieurs marques citée au point 87 ci-dessus.

92      Deuxièmement, s’agissant des exigences liées au positionnement et à la taille des marques contestées sur l’emballage, il ressort de la jurisprudence rappelée au point 61 ci‑dessus, que l’usage sérieux d’une marque ne peut être constaté que lorsque cette marque est utilisée pour garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle avait été enregistrée.

93      En l’espèce, ainsi que l’illustrent les photographies d’emballages des ordinateurs iMac présentes dans le dossier, les éléments verbaux « think different » ne figurent pas sur les étiquettes apposées sur les cartons d’emballages d’une manière qui attire particulièrement l’attention du consommateur. Au contraire, ainsi que l’a souligné, à bon droit, la chambre de recours au point 30 des décisions attaquées, ces éléments verbaux sont placés sous les spécifications techniques des ordinateurs iMac, et juste au-dessus du code-barres dans une taille de caractères assez réduite. Ladite expression est d’ailleurs accompagnée du mot « macintosh » de même taille et écrit avec la même police de caractères.

94      Il convient donc de conclure que la façon dont il est fait usage des marques contestées sur l’emballage des ordinateurs iMac ne permet pas de conclure que celles-ci ont été utilisées en tant que marques, c’est-à-dire conformément à leur fonction essentielle qui est de donner une indication de l’origine commerciale des produits concernés.

95      Par ailleurs, la jurisprudence citée par la requérante à l’appui de son argumentation n’est pas pertinente en l’espèce, dans la mesure où elle porte sur des circonstances de fait différentes de celles du cas présent. En effet, dans l’arrêt du 27 septembre 2007, LA MER (T‑418/03, non publié, EU:T:2007:299, point 83), le Tribunal, après avoir constaté que la marque LABORATOIRE DE LA MER figurait au-dessous de la représentation graphique du produit, a conclu qu’un examen minutieux de l’emballage des produits permettait de lire distinctement la marque concernée. En revanche, dans les présentes affaires, l’expression « think different » des marques contestées apparaît simplement après une longue liste décrivant les spécifications techniques du produit iMac. En outre, il convient de relever que l’arrêt du 30 novembre 2009, COLORIS (T‑353/07, non publié, EU:T:2009:475), s’inscrit dans un cadre différent de celui de l’espèce, en ce que le terme « coloris », figurant sur les étiquettes à apposer sur les pots en métal pour colorants, avait une dimension nettement plus grande que celle des autres éléments verbaux. Enfin, à la différence de la présente affaire, dans l’arrêt du 15 décembre 2016, ALDIANO (T‑391/15, non publié, EU:T:2016:741, point 31), la marque antérieure qui constituait, également, la dénomination sociale de la requérante, était apposée sur les emballages des boissons alcoolisées en cause. De surcroît, le contexte factuel de ces trois affaires était différent de celui de la présente affaire, dans la mesure où il portait sur des produits très différents des produits technologiques du cas d’espèce, à savoir des produits cosmétiques, des produits de peinture et des boissons alcoolisées, vendus dans des magasins différents et pour un montant substantiellement moins élevé.

96      Troisièmement, s’agissant de l’appréciation du caractère distinctif des marques contestées, la chambre de recours a considéré au point 32 des décisions attaquées, que lesdites marques, combinées avec la marque Macintosh, seront comprises comme un message promotionnel invitant les consommateurs à penser différemment, en d’autres termes, à « sortir des sentiers battus ». Au point 33 de ces décisions attaquées, elle a indiqué que le caractère distinctif intrinsèque des marques contestées et, partant, sa capacité à exercer la fonction essentielle d’une marque, à savoir celle d’identifier l’origine des produits visés, doivent être considérés comme étant plutôt faibles, ce qui rend encore moins plausible le fait que les consommateurs anglophones lui attribueront une fonction de marque.

97      À titre liminaire, il convient de rappeler que, dans le cadre d’une procédure de déchéance pour défaut d’usage sérieux, la conclusion de la chambre de recours sur le caractère distinctif des marques contestées n’a pas d’incidence sur la question de savoir si, en l’espèce, la requérante a, effectivement, apporté la preuve du fait que les marques contestées ont été utilisées conformément à leur fonction essentielle, qui, selon la jurisprudence, consiste à garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit ou du service désigné par les marques, en lui permettant de distinguer sans confusion possible ce produit ou ce service de ceux qui ont une autre provenance (voir arrêt du 8 juin 2017, W. F. Gözze Frottierweberei et Gözze, C‑689/15, EU:C:2017:434, point 41 et jurisprudence citée).

98      En tout état de cause, en premier lieu, pour autant que la requérante fait grief à la chambre de recours d’avoir conclu que les marques contestées étaient dépourvues de caractère distinctif, force est de constater que cet argument procède d’une lecture erronée des décisions attaquées. En effet, ainsi que l’EUIPO le souligne à juste titre, la chambre de recours a expressément indiqué, au point 33 desdites décisions, que le caractère distinctif intrinsèque des termes « think different » était « plutôt faible ».

99      Il s’ensuit que la chambre de recours n’a pas dénié aux termes « think different » tout caractère distinctif, mais leur a attribué un caractère distinctif plutôt faible.

100    En deuxième lieu, et contrairement à ce que prétend la requérante, les conclusions de la chambre de recours sur le caractère distinctif des marques contestées n’est pas contredite par un faisceau d’éléments de preuve visant à établir l’usage sérieux de celles-ci. Certes, il est vrai que, parmi les éléments de preuves de l’usage sérieux déposés devant l’EUIPO figurent de nombreux articles de presse évoquant le succès de la campagne publicitaire intitulée « THINK DIFFERENT » au moment de son lancement en 1997. Toutefois, il convient de souligner, ainsi que la chambre de recours l’a relevé aux points 19 et 20 des décisions attaquées, que lesdits articles de presse sont antérieurs de plus de dix ans à la période pertinente.

101    En troisième lieu, en ce qui concerne l’argument de la requérante tiré de l’existence d’un litige entre les parties portant sur une autre marque que celle faisant l’objet du présent recours, il y a lieu de noter, ainsi que l’admet la requérante elle-même, que cet argument, qui vise à démontrer le caractère distinctif des marques contestées, est dénué de pertinence dans le cadre de procédures de déchéance, pour non-usage sérieux des marques contestées, engagées en application de l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009.

102    Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le premier moyen et, partant, les recours dans leur ensemble.

 Sur les dépens

103    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

104    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Les affaires T26/21 à T28/21 sont jointes aux fins de l’arrêt.

2)      Les recours sont rejetés.

3)      Apple Inc. est condamnée aux dépens.

Marcoulli

Iliopoulos

Norkus

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 juin 2022.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.