Language of document : ECLI:EU:T:2021:415

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

7 juillet 2021 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Recrutement – Avis de concours EPSO/AST-SC/03/15 – Non-admission à participer aux épreuves d’évaluation – Demande de réexamen – Refus de transmettre cette demande au jury du concours général pour cause de tardiveté – Répartition des compétences entre l’EPSO et le jury de concours – Intérêt à agir »

Dans l’affaire T‑587/16 RENV,

HM, représentée par Me H. Tettenborn, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. T. Bohr et G. Gattinara, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 270 TFUE et tendant à l’annulation de la décision de l’Office européen de sélection du personnel (EPSO) du 17 août 2015 de ne pas prendre en considération la demande de réexamen de la décision du jury de ne pas admettre la requérante à l’étape suivante du concours EPSO/AST‑SC/03/15-3,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de MM. S. Gervasoni, président, L. Madise (rapporteur) et Mme R. Frendo, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

1        Aux termes de l’article 7 de l’annexe III du statut des fonctionnaires de l’Union européenne, dans sa version applicable au présent litige (ci-après le « statut ») :

« 1.      Les institutions, après consultation du comité du statut, confient à l’[Office européen de sélection du personnel (EPSO)], la responsabilité de prendre les mesures nécessaires pour garantir l’application de normes uniformes dans les procédures de sélection des fonctionnaires de l’Union [européenne] et dans les procédures d’évaluation et d’examen visées aux articles 45 et 45 bis du statut.

2.      Les tâches de l’[EPSO] sont les suivantes :

a)      à la demande d’une institution, organiser des concours généraux ;

b)      à la demande d’une institution, fournir un appui technique aux concours internes qu’elle organise ;

c)      déterminer la teneur de toutes les épreuves organisées par les institutions, afin de garantir l’application harmonisée et cohérente des conditions établies à l’article 45 bis, paragraphe 1, point c) ;

d)      assumer la responsabilité générale de la définition et de l’organisation de l’évaluation des capacités linguistiques afin de garantir l’application harmonisée et cohérente des conditions établies à l’article 45, paragraphe 2.

3.      L’[EPSO] peut, à la demande d’une institution, exécuter d’autres tâches liées à la sélection des fonctionnaires.

[...] »

2        Le 1er mars 2014, l’EPSO a publié au Journal officiel de l’Union européenne un document intitulé « Dispositions générales applicables aux concours généraux » (JO 2014, C 60 A, p. 1, ci-après les « dispositions générales »), qui se divise en trois sections.

3        La troisième section des dispositions générales, intitulée « Informations générales », comporte un point 3.1, intitulé « Communication », dont le contenu est libellé comme suit :

« 3.1.1. Communications d[e l]’EPSO adressées aux candidats

Vos résultats et toutes les convocations vous seront adressés uniquement via votre compte EPSO [...]

Il vous appartient de consulter votre compte EPSO à intervalles réguliers – au minimum deux fois par semaine – pour suivre l’évolution du concours et vérifier les informations qui concernent votre candidature.

Si, en raison d’un problème technique dépendant d[e l]’EPSO, vous n’êtes pas en mesure de vérifier ces informations, il est de votre responsabilité de le signaler immédiatement à EPSO via le formulaire de contact en ligne.

Des informations générales relatives aux étapes des concours peuvent être consultées sur la page du concours en question du site internet d[e l]’EPSO (http ://blogs.ec.europa.eu/eu-careers.info).

3.1.2. Communications des candidats adressées à EPSO

[...]

3.1.3. Communications des candidats adressées aux jurys

[...] »

4        La sous-section 3.4 de la troisième section des dispositions générales, relative aux plaintes, prévoit, notamment :

« [...]

3.4.3. Procédure de réexamen interne

Vous pouvez demander un réexamen de toute décision du jury ou d[e l]’EPSO qui affecte directement et immédiatement votre statut juridique dans le concours (c’est-à-dire qui établit vos résultats et/ou détermine si vous pouvez passer à l’étape suivante du concours ou si vous en êtes exclu).

Les demandes de réexamen peuvent se fonder sur une ou plusieurs des raisons suivantes :

–        une irrégularité matérielle dans le processus du concours,

–        le jury ou [l’]EPSO n’a pas respecté les règles régissant la procédure de concours, telles que visées dans le [statut], l’avis de concours, les présentes règles générales et la jurisprudence.

[...]

Modalités

Vous devez introduire votre demande dans un délai de dix jours de calendrier à compter de la date de téléchargement sur votre compte EPSO de la décision que vous voulez contester :

[...]

Vous devez indiquer clairement la décision que vous voulez contester et formuler les motifs sur lesquels se fonde votre demande.

La procédure de réexamen interne est gérée par l’équipe juridique d[e l]’EPSO.

Dès la réception de votre demande, nous vous enverrons un accusé de réception dans un délai de quinze jours ouvrables.

Votre demande sera ensuite analysée et soumise à l’examen de l’organe qui a pris la décision contestée (soit le jury, soit [l’]EPSO) [en raison de la division des compétences imposée par le statut]. Le jury ou [l’]EPSO prendra ensuite une décision concernant votre demande. Une fois la décision prise, l’équipe juridique préparera une réponse motivée répondant à vos arguments.

[...] »

 Antécédents du litige

5        Le 8 janvier 2015, l’EPSO a publié au Journal officiel de l’Union européenne l’avis de concours général sur épreuves EPSO/AST-SC/03/15-3, en vue de la constitution d’une liste de réserve de secrétaires et de commis (grades SC 1 et SC 2) dans différents domaines (JO 2015, C 3 A, p. 1, ci-après le « concours général »).

6        L’annexe III, point 2, de cet avis de concours prévoit, s’agissant des conditions d’admission spécifiques relatives aux diplômes, trois conditions distinctes, dont seule la dernière est pertinente en l’espèce. Cette condition est formulée comme suit :

« [U]ne formation professionnelle (équivalant au niveau 4 du cadre européen des certifications) d’une durée minimale d’un an, suivie d’une expérience professionnelle d’au moins trois ans. La formation et l’expérience professionnelle doivent être pour l’essentiel liées à la nature des fonctions. »

7        Le 12 février 2015, la requérante, HM, a déposé sa candidature au concours général.

8        La requérante a participé aux tests d’accès le 25 mars 2015.

9        Par courrier du 11 juin 2015, l’EPSO a informé la requérante qu’elle avait réussi les tests d’accès et que l’étape suivante de ce concours serait l’étude, par le jury du concours général (ci‑après le « jury »), des candidatures électroniques, afin de vérifier l’admissibilité des candidats.

10      Un désaccord existe entre les parties au litige sur la question de savoir si c’était à la date du 30 juillet 2015, ou plus tardivement, que la requérante a été informée, par une communication électronique sur son compte EPSO, que le jury, après examen de sa candidature en ligne, avait décidé de ne pas l’admettre à l’étape suivante du concours général. Dans sa décision (ci-après la « décision de rejet de candidature »), le jury s’est fondé sur le fait que la requérante ne disposait pas des qualifications exigées, à savoir que, alors même qu’elle justifiait d’une formation professionnelle d’une durée d’un an, celle-ci n’était pas, pour l’essentiel, liée à la nature des fonctions faisant l’objet du concours général.

11      Un désaccord additionnel existe entre les parties sur la question de savoir à quelles dates la requérante a consulté son compte EPSO. En effet, alors que cette dernière soutient avoir régulièrement consulté son compte et en dernier lieu les 29 juillet et 4 août 2015, sans y trouver, toutefois, de nouveaux messages ou communications, la Commission européenne avance que le journal électronique du système informatique concernant les comptes EPSO montre que ce n’est que le 8 août 2015, à 20 h 41, que la requérante a consulté son compte, sur lequel la décision de rejet de candidature aurait bien été mise à disposition neuf jours auparavant.

12      Le 7 août 2015, la requérante a reçu, de la part de l’EPSO, un message électronique automatique, dont le contenu était le suivant :

« Date d’envoi : vendredi 7 août 2015 à 15 h 26 […]

Objet : Un nouveau message a été publié dans votre compte EPSO. […]

Ceci est un message électronique automatique. Veuillez ne pas répondre.

Cher candidat, chère candidate,

Cette notification concerne votre candidature à un concours ou une procédure de sélection UE Carrières organisée par [l’EPSO].

Un nouveau message a été publié dans votre compte EPSO.

Vous pouvez accéder à votre compte en visitant le lien suivant : […]

Cordialement,

NB : Nous vous rappelons que vous devez vérifier votre compte EPSO au moins deux fois par semaine comme indiqué dans le Guide applicable aux concours généraux ou dans l’appel à manifestation d’intérêt. Toute communication officielle est envoyée via le compte EPSO et seules les dates mentionnées dans ces lettres publiées ont valeur juridique.

La présente notification par courriel est un service supplémentaire d[e l]’EPSO sans valeur juridique.

La notification par courriel est envoyée en même temps que le nouveau message est publié sur votre compte EPSO. Pour des raisons hors de notre contrôle, la livraison des notifications par courriel pourrait dans certains cas être retardée. Aucune plainte sur [la] base de ce retard ne sera prise en compte.

L’équipe EPSO. »

13      Le 13 août 2015, la requérante a introduit, sur la base du point 3.4.3 des dispositions générales, une demande de réexamen de la décision de rejet de candidature (ci-après la « demande de réexamen »). Elle a soutenu, en substance, que la communication électronique sur son compte EPSO portant sur la décision de rejet de candidature n’était pas suffisamment motivée, dans la mesure où elle consistait en une simple répétition du libellé de l’avis du concours général. En outre, d’une part, elle a indiqué qu’elle avait été autorisée par un jury d’un concours précédent à se présenter aux épreuves d’évaluation de ce concours, qui, selon elle, concernait également des activités de secrétariat et qui prévoyait un niveau de qualifications plus élevé que celui prévu dans le cadre du concours général. D’autre part, la requérante a prétendu que, dans un tel cas de figure, le fait que le jury n’avait pas retenu l’appréciation suivie dans le cadre d’un concours antérieur devait être motivé de manière spécifique.

14      Par courriel du 17 août 2015, l’EPSO a, par l’intermédiaire de Mme N. H., en sa qualité de chef d’équipe pour les relations avec les candidats, fait savoir à la requérante qu’il ne pouvait pas prendre en considération sa demande de réexamen, celle-ci n’ayant pas été introduite dans le délai de dix jours calendaires fixé par les dispositions générales (ci-après la « décision attaquée »). L’EPSO a indiqué à la requérante que ce délai avait commencé à courir le 30 juillet 2015, par suite du téléchargement de la décision de rejet de candidature sur le compte EPSO.

15      Le 1er septembre 2015, la requérante a, par courriel, demandé à l’EPSO de transmettre sans délai sa demande de réexamen au jury. Elle s’est fondée, à cet égard, sur le point 3.4.3 des dispositions générales, conformément auquel les demandes de réexamen sont « soumise[s] à l’examen de l’organe qui a pris la décision contestée (soit le jury, soit [l’]EPSO) ». Elle a avancé que, dès lors que la demande de réexamen était dirigée contre la décision de rejet de candidature, prise par le jury, elle aurait dû être soumise, en tout état de cause, à celui-ci.

16      Le 16 septembre 2015, l’EPSO a informé la requérante que sa demande de réexamen ne serait pas prise en considération, en raison de son caractère tardif. Par courriel du 20 septembre 2015, la requérante a demandé une nouvelle fois si sa demande de réexamen avait été transmise au jury.

17      Par courriel du 25 septembre 2015, la requérante a reçu la réponse suivante de l’EPSO :

« [C]omme cela a déjà été expliqué dans mes précédentes lettres, nous (EPSO) ne transmettons au jury, dans le cadre de notre champ de compétences, que les plaintes [(Beschwerden)] qui ont été soumises dans les délais. Étant donné que cela n’est pas le cas s’agissant de votre plainte [(Beschwerde)], cette dernière n’a pas été transmise. »

18      Le 4 novembre 2015, la requérante a introduit, par écrit, une réclamation contre la décision attaquée ainsi que contre les « décisions » des 16 et 25 septembre 2015, par lesquelles l’EPSO lui aurait communiqué que sa demande de réexamen ne serait pas prise en considération.

19      Par décision du 17 mars 2016, la réclamation de la requérante a été rejetée. La traduction allemande de cette décision lui a été transmise le 18 avril 2016.

 Procédure et conclusions des parties

 Procédure devant le Tribunal de la fonction publique

20      Par requête déposée au greffe du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne le 23 mars 2016, la requérante a formé un recours tendant à l’annulation de la décision attaquée. L’affaire a été enregistrée sous le numéro F‑17/16.

21      La requérante a présenté une demande d’anonymat, à laquelle il a été fait droit.

22      La Commission a déposé le mémoire en défense le 14 juin 2016.

 Procédure devant le Tribunal

23      En application de l’article 3 du règlement (UE, Euratom) 2016/1192 du Parlement européen et du Conseil, du 6 juillet 2016, relatif au transfert au Tribunal de la compétence pour statuer, en première instance, sur les litiges entre l’Union européenne et ses agents (JO 2016, L 200, p. 137), cette affaire a été transférée au Tribunal dans l’état où elle se trouvait à la date du 31 août 2016. Elle a été enregistrée sous la référence T‑587/16.

24      La requérante et la Commission ont déposé respectivement une réplique et une duplique le 21 décembre 2016 et le 15 février 2017.

25      Le 15 mars 2017, le président de la quatrième chambre du Tribunal a fait droit à la demande de la requérante de pouvoir déposer des observations sur les nouvelles preuves produites dans le cadre de la duplique (ci-après les « observations sur les preuves produites dans le cadre de la duplique »), lesquelles ont été déposées le 30 mars 2017.

26      Le 5 février 2018, le Tribunal a posé des questions écrites à la Commission. Ses réponses ont été déposées au greffe du Tribunal le 20 février 2018 (ci-après les « réponses de la Commission aux questions du Tribunal »). Le 13 mars 2018, la requérante a présenté ses observations à cet égard.

27      Par arrêt du 21 novembre 2018, HM/Commission (T‑587/16, ci‑après l’« arrêt initial », EU:T:2018:818), le Tribunal a accueilli le premier moyen de la requérante, tiré d’un défaut de compétence de l’EPSO pour adopter la décision attaquée, et annulé celle-ci. Le Tribunal a considéré, à cet égard, qu’il était constant que l’organe qui avait pris la « décision contestée », au sens du point 3.4.3 des dispositions générales, à savoir la décision de rejet de candidature, était le jury, et non pas l’EPSO, de sorte que, en application de ce point, c’était au jury, et non à l’EPSO, qu’il appartenait de se prononcer sur la demande de réexamen. Le Tribunal a précisé que la circonstance que ladite demande avait fait l’objet d’un rejet pour un motif purement formel était dépourvue d’incidence à cet égard, dès lors que les dispositions générales n’opéraient aucune distinction selon que le rejet était fondé sur des motifs de fond ou de forme et que, au contraire, il ressortait du point 3.4.3 des dispositions générales que le domaine de compétences de l’équipe juridique de l’EPSO était limité à la gestion de la procédure de réexamen interne. Le Tribunal a conclu de ce qui précède que c’était en l’absence de toute base juridique à cet effet que l’EPSO avait rejeté la demande de réexamen. Le Tribunal n’a donc pas examiné les trois autres moyens présentés par la requérante, lesquels étaient tirés, le deuxième, d’une violation du principe de sécurité juridique, le troisième, d’une erreur de qualification de la demande de réexamen et, le quatrième moyen, d’une erreur dans l’appréciation du respect du délai dans lequel la demande de réexamen pouvait être introduite. Le Tribunal a, par ailleurs, rejeté comme irrecevable le deuxième chef de conclusions de la requérante, visant à l’annulation d’une prétendue décision implicite de rejet de la demande de réexamen qui aurait été adoptée par le jury. Le Tribunal a considéré à cet égard que, dès lors que le jury n’avait pas eu connaissance de l’existence de la demande de réexamen, il ne pouvait être considéré qu’il avait adopté une quelconque « décision implicite » de rejet de celle-ci.

 Procédure sur pourvoi

28      Par requête déposée au greffe de la Cour le 30 janvier 2019, la Commission a formé un pourvoi contre l’arrêt initial. Ce pourvoi a été enregistré sous le numéro C‑70/19 P.

29      Par arrêt du 9 juillet 2020, Commission/HM (C‑70/19 P, ci-après l’« arrêt sur pourvoi », EU:C:2020:544), la Cour a annulé l’arrêt initial, renvoyé l’affaire devant le Tribunal et réservé les dépens afférents à la procédure de première instance et au pourvoi.

30      S’agissant du premier moyen présenté par la requérante au soutien du recours, la Cour a confirmé la réponse du Tribunal concernant l’incompétence de l’EPSO pour adopter la décision attaquée, telle qu’elle est exposée au point 27 ci-dessus. En revanche, la Cour a jugé que, conformément à la jurisprudence [arrêts du 6 juillet 1983, Geist/Commission, 117/81, EU:C:1983:191, points 6 et 7, et du 4 mai 2017, Schräder/OCVV – Hansson (SEIMORA), T‑425/15, T‑426/15 et T‑428/15, non publié, EU:T:2017:305, point 109], une partie requérante n’avait aucun intérêt légitime à l’annulation, pour vice de forme, d’une décision lorsque l’administration ne disposait d’aucune marge d’appréciation et qu’elle était tenue d’agir comme elle l’a fait, puisque, en pareille hypothèse, l’annulation de cette décision ne pourrait que donner lieu à l’intervention d’une nouvelle décision, identique, quant au fond, à la décision annulée.

31      Or, la Cour a constaté que, en l’espèce, le Tribunal avait accueilli le recours en faisant droit au premier moyen invoqué par la requérante, tiré d’un défaut de compétence, sans se prononcer sur les autres moyens présentés au soutien du recours, notamment le quatrième moyen, tiré d’une erreur dans l’appréciation du délai dans lequel la demande de réexamen pouvait être introduite, ni sur la recevabilité des documents présentés par la Commission pour la première fois en annexe à la duplique ou au stade de ses réponses aux questions du Tribunal, alors même que, selon la Commission, ces documents avaient pour objet d’apporter la preuve que la demande de réexamen était tardive.

32      La Cour en a conclu que le Tribunal avait commis une erreur dans la mesure où il lui incombait de déterminer si les éléments fournis par la Commission permettaient de démontrer à suffisance que la demande de réexamen était tardive – de sorte que, si le jury s’était prononcé à cet égard, il aurait rendu une décision identique à la décision attaquée. En effet, dans une telle hypothèse le constat opéré par le Tribunal dans le cadre du premier moyen, selon lequel l’EPSO n’était pas compétent pour adopter cette décision, ne devrait, conformément à la jurisprudence citée au point 30 ci-dessus, pas entraîner l’annulation de cette décision.

33      Dans ces conditions, le Tribunal s’étant limité à examiner l’un des moyens invoqués par la requérante, sans se prononcer , en particulier, sur le quatrième moyen, ni sur la recevabilité des documents présentés par la Commission pour la première fois en annexe à la duplique ou au stade de ses réponses aux questions du Tribunal, alors que leur examen pouvait être déterminant pour l’issue du recours, la Cour a considéré que le litige n’était pas en état d’être jugé et qu’il convenait dès lors de renvoyer l’affaire devant le Tribunal.

 Procédure et conclusions des parties après renvoi

34      Conformément à l’article 217, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, la Commission et la requérante ont déposé des observations sur la suite de la procédure, respectivement les 17 et 21 septembre 2020.

35      Dans le cadre de ses observations sur la suite de la procédure, la requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission à l’intégralité des dépens.

36      Dans le cadre de ses observations sur la suite de la procédure, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens dans la présente procédure et dans l’affaire C‑70/19 P.

 En droit

37      Au soutien du recours, la requérante invoquait quatre moyens tirés, le premier, du défaut de compétence de l’EPSO pour adopter la décision attaquée, le deuxième, de la violation du principe de sécurité juridique, le troisième, d’une erreur de qualification de la demande de réexamen et, le quatrième, d’une erreur dans l’appréciation du respect du délai dans lequel la demande de réexamen pouvait être introduite.

38      Il convient de rappeler que, en vertu de l’article 61 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, lorsque le pourvoi est fondé et que l’affaire est renvoyée devant le Tribunal pour qu’il statue sur le litige, celui-ci est lié par les points de droit tranchés par la décision de la Cour. Ainsi, à la suite de l’annulation par la Cour et du renvoi de l’affaire devant le Tribunal, celui-ci est saisi, en application de l’article 215 du règlement de procédure, par l’arrêt de la Cour et doit se prononcer une nouvelle fois sur l’ensemble des moyens d’annulation soulevés par la partie requérante, à l’exclusion des éléments du dispositif non annulés par la Cour ainsi que des considérations qui constituent le fondement nécessaire desdits éléments, ceux-ci étant passés en force de chose jugée (voir arrêt du 3 juillet 2018, Keramag Keramische Werke e.a./Commission, T‑379/10 RENV et T‑381/10 RENV, non publié, EU:T:2018:400, point 26 et jurisprudence citée).

39      En l’espèce, ainsi qu’il ressort du point 30 ci-dessus, l’arrêt sur pourvoi a confirmé l’arrêt initial concernant l’incompétence de l’EPSO pour adopter la décision attaquée, de sorte qu’il n’y a plus lieu de se prononcer sur le premier moyen.

40      Il ressort, en revanche, du point 32 ci-dessus que, pour décider s’il y a lieu ou non d’annuler la décision attaquée, en l’espèce, il convient d’examiner, en premier lieu, le quatrième moyen par lequel la requérante soutient que sa demande de réexamen n’était pas tardive. En effet, si cette demande n’était pas tardive, le jury, contrairement à ce que soutient la Commission, n’aurait pas nécessairement rendu une décision identique à celle adoptée par l’EPSO. Cela implique d’examiner, dans un premier temps, la recevabilité des documents produits par la Commission, pour la première fois, en annexe à la duplique ou au stade de ses réponses aux questions du Tribunal et visant à prouver le caractère tardif de la demande de réexamen de la requérante et, dans un second temps, les arguments de la requérante tendant, sur le fond, à établir l’absence de caractère tardif de la demande de réexamen.

41      Des éléments de preuve ont été présentés par la Commission pour la première fois en annexe à la duplique, dans le cadre de sa réponse au quatrième moyen, et en annexe à ses réponses aux questions du Tribunal.

42      La requérante conteste la recevabilité de ces annexes, de sorte que, comme cela a été indiqué au point 40 ci-dessus, le Tribunal doit se prononcer sur leur recevabilité avant d’examiner le quatrième moyen sur le fond.

43      La requérante soulève également une fin de non-recevoir à l’encontre de l’annexe B.1 du mémoire en défense, au motif que la Commission n’apporterait aucune précision concernant la façon dont la preuve qu’elle allègue résulterait du document ainsi produit. Il s’agirait donc d’un renvoi global à une annexe qui, selon une jurisprudence constante, serait irrecevable.

 Sur la recevabilité de l’annexe B.1 et des éléments de preuve présentés par la Commission pour la première fois en annexe à la duplique et en annexe à ses réponses aux questions du Tribunal

44      D’une part, s’agissant du document constituant l’annexe B.1 du mémoire en défense, contrairement à ce qu’indique la requérante, cette annexe ne peut être déclarée irrecevable au motif que la Commission ne préciserait pas la façon dont la preuve qu’elle allègue résulterait de ce document. En effet, comme l’indique la Commission dans le mémoire en défense, ledit document, qu’elle présente comme un « fichier journal » du système informatique, vise à démontrer que l’EPSO a téléchargé la décision de rejet de candidature sur le compte EPSO de la requérante le 30 juillet 2015. Le mémoire en défense indique donc bien comment la preuve que la Commission allègue résulte, selon elle, de ce document.

45      D’autre part, en annexe à la duplique et aux réponses de la Commission aux questions du Tribunal, celle-ci a produit, dans le cadre de sa réponse au quatrième moyen, les éléments de preuve suivants :

–        premièrement, l’annexe D.1 de la duplique, à savoir le jeu de données provenant de la version allemande du fichier journal électronique du système informatique de l’EPSO ;

–        deuxièmement, les annexes D.2 et D.3 de la duplique, à savoir le jeu de données provenant des versions française et anglaise du fichier journal électronique dudit système informatique ;

–        troisièmement, l’annexe D.4 de la duplique, à savoir un extrait du fichier journal électronique dudit système informatique relatif à l’utilisation du compte EPSO par une tierce personne également candidate au concours général ;

–        quatrièmement, l’annexe D.5 de la duplique, à savoir une liste des connexions de la requérante à son compte EPSO, provenant dudit système informatique ;

–        cinquièmement, l’annexe S.2 des réponses de la Commission aux questions du Tribunal, à savoir une déclaration de M. X, qu’elle présente comme un consultant en informatique qui a contribué à la mise en place du système informatique pour l’EPSO et les concours.

46      Dans ses observations sur les preuves produites dans le cadre de la duplique, la requérante estime que les annexes D.1 à D.5 de la duplique sont des nouvelles preuves visées par l’article 85, paragraphe 2, du règlement de procédure.

47      Premièrement, en ce qui concerne les jeux de données provenant de fichiers journaux qui constituent les annexes D.1, D.2 et D.3 de la duplique, ils différeraient de manière importante tant quant à leur présentation que quant à leur volume et à leur contenu du fichier journal constituant l’annexe B.1 du mémoire en défense.

48      Deuxièmement, en ce qui concerne l’extrait du fichier journal électronique du système informatique relatif à l’utilisation du compte EPSO d’une tierce personne également candidate au concours général constituant l’annexe D.4 de la duplique, cette pièce serait totalement nouvelle.

49      Troisièmement, en ce qui concerne la liste des connexions de la requérante à son compte EPSO provenant du système informatique, constituant l’annexe D.5 de la duplique, il s’agirait d’un document nettement plus volumineux que l’extrait de cette liste constituant l’annexe B.3 du mémoire en défense et qui, en outre, différerait de manière importante de cette dernière quant à sa présentation et à son contenu, de sorte qu’il ne s’agirait pas du même document.

50      Ainsi, les annexes D.1 à D.5 de la duplique auraient été produites de manière tardive sans que la Commission allègue, et encore moins établisse, de justification pour le retard dans leur présentation. La requérante ajoute que ces documents existaient déjà à la date du dépôt du mémoire en défense et auraient, dès lors, pu être produits sans difficulté en annexe à ce mémoire. La requérante en conclut que, faute d’être recevables, les annexes D.1 à D.5 de la duplique sont dépourvues de toute valeur probante et ne peuvent être utilisées par la Commission.

51      Dans ses réponses aux questions du Tribunal, la Commission fait valoir que les annexes du mémoire en duplique étaient présentées « à titre d’explications », afin de répondre aux arguments avancés par la requérante dans le mémoire en réplique. La Commission se serait ainsi vu obligée de produire ces pièces supplémentaires afin de prouver l’exactitude des affirmations contenues dans le mémoire en défense. La Commission en conclut que les annexes D.1 à D.5 ne peuvent qu’être déclarées recevables en vertu de l’article 85, paragraphes 1 et 2, du règlement de procédure.

52      Par ailleurs, dans ses observations relatives aux réponses de la Commission aux questions du Tribunal, la requérante demande que soit déclarée irrecevable, en vertu de l’article 85, paragraphe 2, du règlement de procédure, l’annexe S.2, déposée dans le cadre des réponses de la Commission aux questions du Tribunal, dès lors que la Commission aurait pu et dû présenter cet élément de preuve dès le dépôt du mémoire en défense, car il se rapporterait à des faits qui avaient déjà été exposés dans la requête.

53      Il convient donc d’examiner si le Tribunal peut tenir compte des éléments de preuve constituant les annexes D.1 à D.5 de la duplique et l’annexe S.2 des réponses de la Commission aux questions du Tribunal, que celle-ci a produits à l’appui de sa réponse au quatrième moyen.

54      Aux termes de l’article 85 du règlement de procédure :

« 1      Les preuves et les offres de preuve sont présentées dans le cadre du premier échange de mémoires.

2      Les parties principales peuvent encore produire des preuves ou faire des offres de preuve dans la réplique et la duplique à l’appui de leur argumentation, à condition que le retard dans la présentation de celles-ci soit justifié.

3      À titre exceptionnel, les parties principales peuvent encore produire des preuves ou faire des offres de preuve avant la clôture de la phase orale de la procédure ou avant la décision du Tribunal de statuer sans phase orale de la procédure, à condition que le retard dans la présentation de celles-ci soit justifié.

4      […] »

55      Selon la jurisprudence, la preuve contraire et l’ampliation des offres de preuve fournies à la suite d’une preuve contraire de la partie adverse dans le mémoire en réplique ne sont pas visées par la règle de forclusion prévue à l’article 85, paragraphe 2, du règlement de procédure. En effet, cette disposition concerne les offres de preuve nouvelles et doit être lue à la lumière de l’article 92, paragraphe 7, dudit règlement, qui prévoit expressément que la preuve contraire et l’ampliation des offres de preuve restent réservées (voir arrêt du 8 mai 2019, PT/BEI, T‑571/16, non publié, EU:T:2019:301, point 143 et jurisprudence citée).

56      En ce qui concerne les éléments de preuve figurant à l’annexe D.1 de la duplique (jeu de données provenant de la version allemande du fichier journal électronique du système informatique), la Commission présente cette annexe comme une version intégrale de la version allemande dudit fichier et précise que les données figurant à l’annexe B.1 du mémoire en défense se trouvent à la troisième page de l’annexe D.1.

57      En ce qui concerne les éléments de preuve figurant à l’annexe D.5 de la duplique (liste des connexions de la requérante à son compte EPSO, provenant du système informatique), la Commission affirme au point 47 de la duplique qu’il s’agit du « même document » que l’annexe B.3 du mémoire en défense, laquelle constitue un extrait de la liste complète.

58      Ainsi qu’il ressort du point 51 ci-dessus, la Commission a exposé, dans ses réponses aux questions du Tribunal, que les annexes du mémoire en duplique étaient présentées « à titre d’explications », afin de répondre aux arguments avancés par la requérante dans le mémoire en réplique, et qu’elle se serait ainsi vu obligée de présenter ces annexes supplémentaires afin de prouver l’exactitude des affirmations contenues dans le mémoire en défense.

59      En effet, il convient de constater que, d’une part, certaines données figurant à la troisième page de l’annexe D.1 de la duplique figuraient déjà à l’annexe B.1 du mémoire en défense, consistant en une liste de 21 personnes, et que, d’autre part, les 75 connections de la requérante à son compte EPSO répertoriées à la première page de l’annexe D.5 de la duplique figuraient déjà en partie dans les 26 connections de la requérante audit compte identifiées dans l’annexe B.3 du mémoire en défense.

60      Dès lors, la production des éléments de preuve figurant dans les annexes D.1 et D.5 de la duplique ne constitue pas la production de preuves nouvelles mais l’ampliation de preuves qui avaient déjà été produites par la Commission au stade du mémoire en défense. Par ailleurs, cette ampliation vise à répondre en détail à l’argumentation développée aux points 28 à 36 de la réplique en ce qui concerne l’annexe B.1 du mémoire en défense et aux points 41 à 45 de la réplique en ce qui concerne l’annexe B.3 du mémoire en défense, par laquelle la requérante soutient que la décision de rejet de candidature n’a pas été téléchargée sur son compte EPSO le 30 juillet 2015 comme le prétend la Commission, compte que la requérante prétend avoir consulté le 4 août 2015 sans y avoir trouvé trace de ladite décision.

61      Dans ces conditions, il convient de constater que les annexes D.1 et D.5 de la duplique sont recevables (voir, par analogie, arrêt du 1er juillet 2009, Espagne/Commission, T‑259/05, non publié, EU:T:2009:232, point 64).

62      En ce qui concerne les éléments de preuve figurant aux annexes D.2 et D.3 de la duplique (jeu de données provenant des versions française et anglaise du fichier journal électronique du système informatique), la Commission explique, dans ses réponses aux questions du Tribunal, qu’elle a présenté ces éléments à titre de preuve pour répondre à l’argument avancé par la requérante au stade de la réplique selon lequel la lecture de l’annexe B.1 permettrait de présumer que la requérante et une autre personne également candidate au concours général ont été les seules personnes, sur les 21 personnes mentionnées à l’annexe B.1, à consulter la communication de l’EPSO et qu’il manquerait donc, pour les 19 autres personnes, un enregistrement confirmant la consultation de cette communication, ce qui ferait douter de la réalité de cette communication, faute pour la plupart des participants de l’avoir consultée (point 35 de la réplique).

63      Or, il est vrai que ce n’est que lorsqu’elle a pris connaissance de l’annexe B.1 du mémoire en défense que la requérante a pu, au stade de la réplique, soulever l’argument évoqué au point 62 ci-dessus.

64      En conséquence, dès lors que la Commission a produit les éléments de preuve constituant les annexes D.2 et D.3, dans le cadre du second échange de mémoires, en réponse à un argument soulevé par la requérante au stade de la réplique, lesdites annexes doivent être considérées comme recevables, conformément à la jurisprudence mentionnée au point 55 ci-dessus.

65      En ce qui concerne les éléments de preuve figurant à l’annexe D.4 de la duplique (extrait du fichier journal électronique du système informatique relatif à l’utilisation du compte EPSO par une tierce personne également candidate au concours général), la Commission indique qu’elle a produit cet élément pour répondre aux affirmations formulées par la requérante au stade de la réplique selon lesquelles les problèmes techniques exposés aux points 60 à 64 de la requête, qui seraient survenus dans le système informatique de l’EPSO au cours de la période durant laquelle sont intervenus le téléchargement de la décision de rejet de candidature et l’envoi du message électronique correspondant, constitueraient une preuve supplémentaire que ce téléchargement et cet envoi ont eu lieu avec retard (point 39 de la réplique).

66      Or, il convient de constater que la requérante avait déjà soulevé aux points 60 à 64 de la requête l’argument selon lequel un autre candidat avait indiqué avoir vérifié son compte EPSO au cours de la période concernée et n’y avoir trouvé aucune notification. La Commission le reconnaît d’ailleurs au point 40 de la duplique. Dès lors, celle-ci n’a pas démontré que l’annexe D.4 de la duplique ne pouvait pas être produite dans le cadre du premier échange de mémoires. Par conséquent, cette annexe, déposée en méconnaissance des exigences posées à l’article 85, paragraphe 1, du règlement de procédure et sans fournir de justification telle que prévue au paragraphe 2 de cet article, est irrecevable.

67      Enfin, en ce qui concerne la présentation des éléments de preuve figurant à l’annexe S.2 des réponses de la Commission aux questions du Tribunal (déclaration de M. X), il convient de rappeler que, selon l’article 85, paragraphes 1 et 3, du règlement de procédure, les preuves sont présentées dans le cadre du premier échange de mémoires, les parties principales pouvant encore, à titre exceptionnel, produire des preuves avant la clôture de la phase orale de la procédure, à condition que le retard dans la présentation de celles-ci soit justifié.

68      Toutefois, une telle justification de la présentation d’éléments de preuve après le premier échange de mémoires ne saurait être exigée lorsque ceux-ci sont produits en réponse à une mesure d’organisation de la procédure dans le délai requis pour cette réponse (voir, en ce sens, arrêt du 16 octobre 2018, OY/Commission, T‑605/16, non publié, EU:T:2018:687, points 31, 34 et 35). La pièce constituant l’annexe S.2 ayant été produite à la suite de questions du Tribunal, la Commission n’était donc pas tenue de justifier un quelconque retard dans sa production.

69      Il ressort de ce qui précède qu’il y a lieu d’écarter l’annexe D.4 de la duplique comme irrecevable en vertu de l’article 85, paragraphe 2, du règlement de procédure et de constater que les éléments de preuve constituant l’annexe B.1, les annexes D.1 à D.3 et D.5 et l’annexe S.2 sont recevables.

 Sur le fond

–       Arguments des parties

70      La requérante conteste, en particulier, pour démontrer que la demande de réexamen avait été présentée dans les délais, en premier lieu, que la communication du 30 juillet 2015 ait été téléchargée sur son compte à cette date, comme le soutient l’EPSO. Elle souligne que l’EPSO n’a produit jusqu’à présent aucune preuve de nature à étayer cette affirmation. Elle affirme que la communication du 30 juillet 2015 ne peut pas avoir été consultable sur son compte EPSO avant le 4 août 2015, dans la mesure où elle a consulté son compte EPSO ce jour-là et qu’elle ne l’y a pas trouvée. Elle conteste donc l’affirmation de l’EPSO selon laquelle elle ne se serait pas connectée sur son compte EPSO entre le 29 juillet 2015 et le 8 août 2015.

71      La requérante avance, à cet égard, principalement, deux séries d’éléments qui démontreraient l’inexactitude de l’affirmation de l’EPSO selon laquelle la communication en question a été téléchargée sur son compte le 30 juillet 2015.

72      D’une part, la requérante indique qu’elle n’a reçu que le 7 août 2015 la notification par courriel lui indiquant que la communication de l’EPSO au sujet de sa candidature avait été chargée sur son compte. Or, la requérante observe qu’il ressort de ce courriel que « [l]a notification par courriel est envoyée en même temps que le nouveau message est publié [sur le] compte EPSO ». Étant donné que la communication en question aurait été téléchargée, selon les propres indications de l’EPSO, en même temps que le message électronique, il en résulterait nécessairement qu’elle n’a pas été téléchargée le 30 juillet 2015, mais le 7 août 2015. La requérante ajoute que l’hypothèse selon laquelle la notification du courrier électronique aurait été décalée de plus d’une semaine de son envoi est totalement invraisemblable et irréaliste.

73      D’autre part, la requérante fait valoir qu’il y a eu au moins un autre cas dans lequel l’EPSO a insisté sur le fait qu’une communication rejetant une candidature avait été téléchargée sur le compte EPSO d’une candidate le 30 juillet 2015, alors que cette candidate soutenait qu’elle avait vérifié son compte au cours de la période en question et qu’elle ne l’y avait pas trouvée. La requérante produit, à cet égard, un échange de messages entre l’EPSO et cette autre candidate attestant de ses dires, ayant eu lieu sur le blog de l’EPSO consacré aux procédures de sélection. La requérante affirme, en outre, que l’on trouve sur le blog de l’EPSO, pour la période allant du 10 au 12 août 2015, plusieurs questions de candidats qui soutenaient de manière concordante avoir reçu un courrier électronique de l’EPSO sans avoir trouvé de communication sur leur compte. Elle produit également la copie de ces questions et des réponses de l’administratrice de l’EPSO sur ce blog.

74      La requérante en conclut que, à l’évidence, l’EPSO a connu au cours de la période en question des problèmes techniques qui ont retardé l’envoi des notifications de messages électroniques et que, étant donné que l’envoi desdites notifications a eu lieu, selon les propres indications de l’EPSO, « en même temps » que le téléchargement des communications sur le compte EPSO, il existe des motifs raisonnables de soupçonner que ces problèmes techniques ont concerné également le téléchargement des communications avec pour conséquence que celui-ci, non plus, n’a pas eu lieu le 30 juillet 2015.

75      En deuxième lieu, dans le mémoire en réplique, la requérante conteste la fiabilité des éléments de preuve produits par la Commission dans le cadre du mémoire en défense, à savoir, d’une part, ce que la Commission désigne comme un « fichier journal » du système informatique de l’EPSO qui attesterait de ce que la décision de rejet de candidature a été chargée le 30 juillet 2015 sur le compte de la requérante et, d’autre part, un autre document désigné comme un« fichier journal » relatif à l’utilisation du compte EPSO de la requérante qui montrerait que la requérante n’aurait pas, contrairement à ce qu’elle affirme, consulté son compte avant le 8 août 2015.

76      La requérante soutient, à cet égard, que ces documents sont incomplets et qu’ils ne contiennent aucune information quant à leur genèse (auteur et date de création notamment). Elle souligne également, s’agissant de l’annexe B.1, que certaines mentions figurant dans cette annexe ne sont en elles-mêmes pas compréhensibles et qu’il est prévu dans ce document que certaines colonnes peuvent être effacées, ce qui serait incompatible avec l’essence même d’un fichier journal électronique du système informatique. Elle ajoute, s’agissant de l’annexe B.3, que, en raison des problèmes techniques survenus au niveau de l’EPSO dont elle aurait documenté l’existence, il est possible que la consultation de son compte le 4 août 2015 n’ait pas été enregistrée.

77      En troisième lieu, dans ses observations sur les preuves produites dans le cadre de la duplique, à savoir les preuves visées au point 45 ci-dessus, la requérante ajoute que les annexes D.1 à D.3 et D.5 diffèrent de manière importante, en ce qui concerne leur présentation et leur contenu, des annexes B.1 et B.3, alors qu’elles sont pourtant censées constituer le contenu intégral des documents dont sont extraites ces deux dernières annexes. Par ailleurs, les annexes D.1 à D.3 ne contiendraient aucune indication permettant de déterminer à quoi se rapporte concrètement leur contenu.

78      En quatrième lieu, la requérante soutient que, dans ses réponses aux questions du Tribunal, la Commission n’a pas été en mesure de lever les doutes existants. En particulier, en réponse à la troisième question du Tribunal, la Commission se serait contentée d’affirmer qu’un certain nombre d’autres candidats avaient reçu la communication de la décision relative à leur candidature dès le 30 juillet 2015. Or, cette affirmation ne permettrait en aucune manière de tirer des conclusions quant à la question de savoir quand la requérante a reçu cette communication. La Commission n’aurait, par ailleurs, apporté aucune réponse à la huitième question, qui sollicitait des précisions de sa part sur l’authenticité et la complétude des annexes B.1, B.3 et D.1 à D.5.

79      Par ailleurs, dans ses réponses aux questions du Tribunal, la Commission n’aurait pas apporté la moindre réponse concrète à la question du Tribunal visant à savoir « comment le système informatique de l’EPSO, auquel elle se réfère au point 35 de [la] duplique, permet[tait] de s’assurer que divers documents [étaient] réellement parvenus sur les comptes EPSO des candidats et qu’ils [étaient] téléchargeables par ceux-ci ». Elle se serait contentée à cet égard d’une affirmation globale en totale contradiction avec la réalité des faits, selon laquelle le système informatique de l’EPSO existait « depuis cinq ans » et « a[vait] toujours fonctionné sans problème ». En outre, la Commission a joint l’annexe S.2, à savoir une déclaration de M. X, qu’elle présente comme un « consultant en informatique qui a contribué à la mise en place du système informatique pour EPSO et les concours », qui ne serait pas de nature à apporter la preuve incombant à la Commission, ne serait-ce déjà que parce qu’elle ne contiendrait aucune indication permettant de déterminer quand la communication de la décision de rejet de candidature a été téléchargée sur le compte EPSO de la requérante.

80      Ainsi, quels que soient les documents produits par la Commission qui seraient pris en considération dans le cadre de l’examen au fond du quatrième moyen, celle-ci n’aurait apporté aucune preuve que la requérante avait présenté la demande de réexamen de manière tardive. En revanche, la requérante aurait produit, dans le cadre de la procédure devant le Tribunal, un certain nombre d’indices probants pour démontrer qu’elle avait présenté la demande de réexamen en temps utile, car la communication de la décision de rejet de candidature, laquelle faisait l’objet de cette demande, n’aurait été téléchargée sur son compte EPSO que le 7 août 2015, de sorte que le délai prévu à cet égard n’était pas encore écoulé lorsqu’elle a présenté ladite demande le 13 août 2015.

81      La Commission maintient que l’EPSO a téléchargé la décision concernée sur le compte EPSO de la requérante le 30 juillet 2015 à 00 h 01. La preuve de ce téléchargement ressortirait des données du fichier journal du système informatique de l’EPSO, constituant l’annexe B.1, données qui seraient confirmées par les versions intégrales de ce fichier en allemand, en français et en anglais, que la Commission a jointes à sa duplique (annexes D.1, D.2 et D.3). Il ressortirait également de l’annexe B.1 que les autres candidats auraient eux aussi reçu la décision les concernant au même moment. Le courriel automatique que la requérante a reçu le 7 août 2015, qui serait une aide supplémentaire de l’EPSO et qui ne produirait aucun effet juridique, ne serait pas nécessairement envoyé en même temps que la décision est chargée sur le compte EPSO, comme cela ressortirait des termes mêmes de ce courriel. Le téléchargement sur le compte EPSO et l’envoi du courriel automatique seraient deux opérations distinctes. Ce ne serait pas parce que le courriel automatique aurait été envoyé avec retard que le téléchargement sur le compte EPSO aurait également eu lieu tardivement. Dans la pratique, le téléchargement sur le compte EPSO s’effectuerait en premier lieu. Le courriel serait envoyé en deuxième lieu, normalement en même temps ou peu après.

82      L’argument de la requérante selon lequel d’autres candidats auraient rencontré le même problème n’aurait aucun lien avec la question de savoir à quel moment la décision a été téléchargée sur son compte, tandis que la Commission aurait apporté la preuve que le téléchargement a eu lieu le 30 juillet 2015 à 00 h 01.

83      Par ailleurs, si la requérante affirme qu’elle a consulté son compte EPSO le 4 août 2015 sans y trouver trace de la communication litigieuse, elle ne donnerait pas d’information complémentaire permettant de le prouver. Au contraire, cette allégation contredirait le fichier journal relatif à l’utilisation du compte EPSO de la requérante, qui indiquerait que, au cours de la période concernée, celle-ci ne l’a pas consulté à la date indiquée, mais seulement le 8 août 2015, date à laquelle elle pouvait toujours introduire une demande de réexamen.

84      Il résulterait de ce qui précède que la requérante était en mesure de prendre connaissance de la décision de rejet de candidature à partir du téléchargement de celle-ci sur son compte le 30 juillet 2015.

85      La Commission aurait en outre établi, de manière plausible, qu’aucun problème technique n’était survenu lors du téléchargement de la décision de rejet ou d’acceptation de candidature sur le compte EPSO de tous les candidats. Elle aurait reçu de la part de l’EPSO et des informaticiens qui y travaillent, ce qui attesterait par ailleurs de leur authenticité, tous les éléments de preuve concernant le système informatique, qu’elle a produits dans les annexes. La déclaration de M. X que la Commission a jointe à ses réponses aux questions du Tribunal (annexe S.2) confirmerait qu’il est impossible qu’un candidat consulte son compte EPSO sans que cette connexion soit enregistrée dans le système informatique.

86      La requérante n’ayant introduit sa demande de réexamen que le 13 août 2015 et le délai à cette fin ayant expiré le 9 août 2015, il y aurait lieu de considérer que cette demande a été présentée en dehors du délai de dix jours et était donc tardive. Partant, le jury, en tant qu’organe compétent, aurait rendu une décision identique à la décision attaquée, de sorte que cette décision ne pourrait pas encourir l’annulation.

–       Appréciation du Tribunal

87      La Cour a annulé l’arrêt initial au motif que, dans les circonstances de l’espèce, en annulant la décision attaquée sur la base du premier moyen, tiré d’un défaut de compétence de l’EPSO, et en omettant, ce faisant, d’examiner la question de savoir si la demande de réexamen était tardive, le Tribunal avait commis une erreur de droit, dès lors que, comme cela a été indiqué au point 27 ci-dessus, il n’a pas examiné si la requérante avait un intérêt à obtenir cette annulation, ce qui n’aurait pas été le cas si la demande de réexamen avait effectivement été introduite hors délai, puisque, dans ce cas-là, le jury, en sa qualité d’autorité compétente pour connaître de cette demande, serait contraint d’adopter une décision identique.

88      La Cour a constaté, à cet égard, au point 120 de l’arrêt sur pourvoi, qu’un « doute persist[ait] en ce qui concerne la date exacte de la [communication] à [la requérante] de la décision de rejet de [...] candidature et, par voie de conséquence, en ce qui concerne la date à compter de laquelle le délai de dix jours calendaires prévu par les dispositions générales pour l’introduction d’une réclamation a commencé à courir ».

89      La Cour a précisé, au point 123 de l’arrêt sur pourvoi, que c’est à la Commission que revenait la charge de la preuve que la requérante avait effectivement présenté la demande de réexamen de manière tardive, comme l’a fait valoir la Commission devant le Tribunal. Elle a ajouté que, s’il existait un doute en ce qui concerne le moment à compter duquel le délai pour introduire cette demande avait commencé à courir, ce doute devait profiter à la requérante.

90      Dans le cadre de la procédure de renvoi, il incombe donc au Tribunal de déterminer si la requérante a présenté la demande de réexamen de manière tardive, ce qui implique de déterminer si, comme le soutient la Commission, la décision de rejet de candidature a bien été téléchargée sur le compte EPSO de la requérante le 30 juillet 2015, de sorte que ce serait à cette date que le délai pour introduire une demande de réexamen aurait commencé à courir.

91      S’il ne peut être établi que la requérante a présenté la demande de réexamen de manière tardive, il devra en être conclu que le jury, s’il avait été saisi de cette demande, aurait pu prendre une décision favorable à la requérante, ce qui signifie que, conformément à la jurisprudence citée par la Cour et évoquée au point 30 ci-dessus, la requérante aurait établi l’existence d’un intérêt légitime à l’annulation de la décision attaquée, de sorte que celle-ci devrait être annulée.

92      À cet égard, d’une part, il convient de constater que les éléments de preuve produits par la requérante pour contester la présence de la décision de rejet de candidature sur son compte EPSO le 30 juillet 2015 engendrent un doute quant à la date réelle de téléchargement de ladite décision.

93      En effet, premièrement, comme cela a été rappelé au point 72 ci-dessus, la requérante a reçu de la part de l’EPSO, le 7 août 2015, un courrier électronique concernant sa candidature au concours général indiquant qu’un « nouveau message [avait] été publié sur [son] compte EPSO » et contenant un lien lui permettant de consulter directement ce message. Ce courriel indiquait notamment que « [l]a notification par courriel [était] envoyée en même temps que le nouveau message ».

94      Partant, à suivre ce courriel, la décision de rejet de candidature a été téléchargée sur le compte EPSO de la requérante en même temps que ledit courriel lui a été adressé, soit le 7 août 2015.

95      La Commission indique d’ailleurs, au stade de la duplique, que « le courriel est envoyé dans un deuxième stade, normalement en même temps ou peu après » le téléchargement de la notification sur le compte EPSO. Dans ces conditions, un écart de plus d’une semaine entre la prétendue notification du rejet de la candidature d’un candidat sur son compte EPSO et l’envoi du courriel l’informant de cette notification ne peut que susciter un doute quant à la date exacte de ladite notification, ce qui rend crédible l’hypothèse d’un problème technique ayant retardé le téléchargement de la décision de rejet de candidature.

96      Certes, le même courriel indiquait également que, « [p]our des raisons hors [du] contrôle [de l’EPSO], la livraison des notifications par courriel pourrait dans certains cas être retardée » et qu’« [a]ucune plainte sur [la] base de ce retard ne sera[it] prise en compte ». Toutefois, il ne peut être présumé qu’un délai de plus d’une semaine a pu s’écouler entre la notification sur le compte EPSO de la requérante de la décision de rejet de candidature et l’envoi du courriel la prévenant de cette notification.

97      De même, le fait que ce courriel indiquait que la notification réalisée par celui-ci était « un service supplémentaire d[e l]’EPSO sans valeur juridique » est sans incidence, dans la mesure où cela ne démontre pas que le courriel de l’EPSO informant la requérante du téléchargement de la décision de rejet de candidature sur son compte EPSO aurait pu être envoyé plus d’une semaine après ce téléchargement, alors même que ce courriel indique que les deux opérations sont, en principe, simultanées.

98      Deuxièmement, le doute engendré par le fait que la requérante n’a reçu que le 7 août 2015 le courriel l’informant du téléchargement de la décision de rejet de candidature sur son compte, et non le 30 juillet 2015, alors que le téléchargement d’une décision de rejet sur le compte EPSO d’un candidat et l’envoi du courriel l’en informant sont présentés par l’EPSO comme étant en principe simultanés (même si, ainsi qu’il découle des indications figurant dans ce courriel mentionnées au point 96 ci-dessus, l’EPSO admet la possibilité d’un retard d’un tel courriel par rapport au téléchargement de la décision), est renforcé par le fait que le cas de la requérante n’est pas isolé.

99      En effet, la requérante expose, en s’appuyant sur des extraits d’un blog de l’EPSO, le cas d’au moins une autre candidate qui aurait été confrontée à un problème similaire au cours de la période pertinente. Il ressort de l’échange de courriels entre cette candidate et l’EPSO que la demande de réexamen de celle-ci a été considérée comme tardive par rapport à la date alléguée de publication des résultats du concours général le 30 juillet 2015, alors même qu’elle affirmait, comme la requérante, n’avoir reçu la notification relative au téléchargement de la décision la concernant que le 7 août 2015, par le même courriel type.

100    La candidate concernée écrivait ainsi, dans un courriel du 10 août 2015, que, « si les dix jours [étaient] décomptés à partir de la date à laquelle les résultats ont été publiés dans nos comptes, [elle] pri[ait l’EPSO] de bien vouloir prendre note du fait qu’aucune lettre ne se trouvait sur [s]on compte le 30 juillet [2015] ». Cette candidate poursuivait en demandant à l’EPSO de « vérifier s’il y a[vait] eu un problème avec [s]on compte » ou de lui « indique[r] comment [elle pourrait] le prouver ». À la suite de la réponse de l’EPSO selon laquelle « la lettre a[vait] été envoyée le 30 [juillet] 2015 et [...], par conséquent, les dix jours [étaient], à présent, écoulés », ladite candidate a répondu qu’elle avait « vérifié une nouvelle fois la notification concernant le message électronique et [que] celle-ci [était] datée du 7 août [2015] », et qu’elle « sa[vait qu’elle avait] vérifié [s]on compte avant cette date et qu’aucune lettre ne s’y trouvait ».

101    Troisièmement, comme le souligne la requérante dans ses observations sur la suite de la procédure, il ressort des fichiers produits par la Commission en tant qu’annexes D.1 à D.3 que la plupart des candidats au concours général ont consulté la communication du jury les concernant sur leur compte EPSO non le 30 juillet 2015 – date à laquelle toutes les communications ont prétendument été téléchargées sur les comptes EPSO des candidats – ou l’un des jours suivants, mais le 7 août 2015, qui correspond précisément à la date à laquelle la requérante a reçu le courrier électronique envoyé, selon les indications de l’EPSO, « en même temps » que la communication a été téléchargée sur son compte EPSO. Cela constitue un indice important en ce sens que, à tout le moins, ces candidats – au nombre desquels figure la requérante – ne pouvaient pas consulter les communications les concernant auparavant, car celles‑ci n’étaient pas accessibles sur leurs comptes.

102    D’autre part, il convient de constater que les éléments de preuve produits par la Commission ne permettent pas de lever ce doute quant à la date de téléchargement de la décision de rejet de candidature.

103    En premier lieu, comme cela a été indiqué au point 81 ci-dessus, pour établir que la décision de rejet de candidature a été téléchargée le 30 juillet 2015, la Commission produit, en tant qu’annexe B.1, une page extraite du site Internet de l’EPSO. Cette page mentionne certaines informations sur des candidats, dont la requérante, sous la forme de colonnes. S’agissant de la requérante, les deux premières colonnes contiennent des numéros non identifiés, les troisième et quatrième colonnes, ses prénom et nom, et les colonnes suivantes, les informations ci-dessous :

Cinquième colonne

Sixième colonne

Septième colonne

Huitième colonne

Neuvième colonne

« Y

vlachma 30/07/2015

00 :01 »

« N »

« Y

08/08/2015

20 :41 »

« View »

« Delete »

104    Dans le mémoire en duplique, la Commission a expliqué que la cinquième colonne de l’annexe B.1 portait sur la date de téléchargement de la décision concernant la candidature d’un candidat et la septième colonne indiquait si un candidat avait consulté la décision dans sa version en allemand sur son compte, « N » signifiant « non » et « Y », « oui », la date indiquée dans ce dernier cas correspondant à la date de cette consultation. La Commission, en réponse à la sixième question du Tribunal, a indiqué que le mot « vlachma » était, dans le système informatique, le nom d’utilisateur d’une fonctionnaire de l’EPSO qui avait, pour le concours général, téléchargé dans ce système et dans le dossier EPSO des candidats les lettres informant ces derniers de la décision du jury relative à l’admission à ce concours. Selon la Commission, ce document permet de prouver que la décision de rejet de candidature a été téléchargée sur le compte EPSO de la requérante le 30 juillet 2015 (cinquième colonne) et qu’elle n’a été consultée par celle-ci que le 8 août 2015 (septième colonne).

105    Toutefois, il y a lieu de constater, premièrement, que la pièce figurant à l’annexe B.1 est incomplète, puisqu’il s’agit d’une des dix pages d’un document plus important, à savoir la page où figure le nom de la requérante, ce qui ne permet pas de savoir de quel document cette pièce est issue et, dès lors, d’accorder une valeur probante suffisante à celle-ci. Deuxièmement, ne figure, de façon claire, nulle part, dans l’annexe B.1, la date d’élaboration du document qui est pourtant présenté comme un « fichier journal électronique du système informatique », ce qui laisse supposer un degré minimal de précision, puisqu’un fichier journal, par sa nature, est censé garantir une certaine authenticité des données qu’il présente. La seule date mentionnée dans ladite annexe sous la forme de ce qui s’apparente à une date d’impression du document, est celle du 23 mai 2016, soit près d’un an après la date alléguée du téléchargement de la décision de rejet de candidature sur le compte EPSO de la requérante. L’heure exacte de téléchargement de ladite décision n’est pas non plus reflétée par l’annexe B.1. En effet, l’heure mentionnée dans la cinquième colonne, à savoir « 00 :01 », signifie, selon la Commission, que le téléchargement de cette décision a eu lieu à une heure quelconque de la journée le 30 juillet 2015, ce qui est peu cohérent avec la précision alléguée du fichier journal concerné. Troisièmement, la dernière colonne comporte un bouton « delete », ce qui n’est pas non plus de nature à permettre de garantir l’authenticité des données présentées.

106    En deuxième lieu, pour démontrer le téléchargement de la décision de rejet de candidature, la Commission produit l’annexe D.1, qu’elle présente comme la version intégrale de l’annexe B1, et dont la troisième page, qui mentionne le nom de la requérante, reprend effectivement certaines données figurant dans l’annexe B.1.

107    Toutefois, il convient de constater que l’annexe D.1 ne contient aucun intitulé, ni aucune mention du concours général. Par ailleurs, une analyse comparative de l’annexe B.1 et de l’annexe D.1 ne permet pas de considérer qu’il s’agisse d’un même document, comme le suggère pourtant la Commission, qui présente l’annexe B.1 comme un extrait de l’annexe D.1. En effet, les deux documents diffèrent en ce qui concerne tant leur présentation que leur contenu. Comme le fait valoir la requérante dans ses observations sur les preuves produites dans le cadre de la duplique, premièrement, ces deux annexes présentent des typographies très différentes, deuxièmement, l’annexe D.1 comporte des intitulés de colonne qui ne sont pas présents dans l’annexe B.1, troisièmement, les données figurant dans l’annexe D.1 se trouvent dans des cases aux bordures apparentes, alors que, dans l’annexe B.1, une telle structure apparente fait défaut, quatrièmement, dans la première colonne de l’annexe B.1 apparaît un nombre de huit chiffres, sous la forme « 1040xxxx », qui ne figure pas dans l’annexe D.1 et, cinquièmement, l’indication « vlachma » inscrite sur l’ensemble des lignes de l’annexe B.1 fait également défaut dans l’annexe D.1.

108    Dès lors, il résulte des constatations effectuées au point 107 ci-dessus que l’annexe D.1 est un document différent de l’annexe B.1, ce qui empêche de considérer, contrairement à ce qu’affirme la Commission, qu’elle constitue une version intégrale de l’annexe B.1.

109    Dans ces conditions, il y a lieu de constater que, compte tenu, d’une part, des doutes entourant la fiabilité et l’authenticité de chacun de ces deux documents et, d’autre part, de l’absence d’élément permettant de déterminer lequel de ces deux documents est censé être le véritable fichier journal électronique du système informatique, à supposer que celui-ci puisse consister en l’un de ces deux documents, ceux-ci ne peuvent pas constituer une preuve d’une fiabilité suffisante pour considérer que la communication de la décision de rejet de candidature a été téléchargée le 30 juillet 2015 sur le compte EPSO de la requérante.

110    Par conséquent, ni l’annexe B.1 ni l’annexe D.1 ne possèdent de valeur probante suffisante pour démontrer que la requérante a effectivement présenté la demande de réexamen de manière tardive. En effet, un doute subsiste sur la date de téléchargement de la communication de l’EPSO relative à la décision de rejet de candidature.

111    En troisième lieu, la Commission produit l’annexe B.3, qui consiste en un fichier journal électronique du système informatique relatif à l’utilisation du compte EPSO de la requérante, comportant la mention de certaines dates (correspondant à 26 « visites » sur 167) auxquelles celle-ci se serait connectée à ce compte, pour prouver que la requérante, contrairement à ses affirmations, n’a pas consulté son compte EPSO le 4 août 2015 sans y trouver la communication de la décision de rejet de candidature qui y aurait été téléchargée le 30 juillet 2015.

112    L’annexe B.3 est composée de deux pages. La première et la partie supérieure de la seconde de ces pages contiennent des données personnelles relatives à la requérante. Par ailleurs, sur le côté droit de la partie inférieure de la seconde page figure une liste comportant des indications de dates et d’horaires de connexions qui concerneraient la requérante.

113    Toutefois, comme le souligne la requérante, rien n’indique que cette liste de connexions ait fait partie, à l’origine, de ce document, dans la mesure où elle diffère de manière importante du reste de celui-ci au regard de sa structure typographique (taille des caractères, formation des indications de dates ou d’horaires). Comme le souligne également la requérante, tant ce formatage que le positionnement de ladite liste le long de la marge latérale droite (alors que toutes les autres données se trouvent sur le côté gauche) ne permettent pas d’exclure que cette liste ait été copiée et ensuite insérée sur la seconde page dudit document. Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que cette pièce ne permet pas d’établir que la requérante n’a pas consulté son compte EPSO le 4 août 2015.

114    Cette conclusion n’est pas infirmée par la production, en quatrième lieu, du document figurant à l’annexe D.5, que la Commission présente comme le fichier journal électronique du système informatique concernant l’utilisation du compte EPSO de la requérante avec la mention de toutes les dates où celle-ci se serait connectée à ce compte, laquelle annexe constituerait la version intégrale de l’annexe B.3.

115    L’annexe D.5 est composée de cinq pages. La partie supérieure de la première page et la deuxième page contiennent des données personnelles relatives à la requérante. Sur le côté droit de la partie inférieure de la première page figure une liste comportant des indications de dates et d’horaires de connexions qui concerneraient la requérante. Les troisième, quatrième et cinquième pages comportent également une liste d’indications de dates et d’horaires de connexions qui concerneraient la requérante, mais leur présentation diffère de la liste présente sur le côté droit de la partie inférieure de la première page.

116    Or, comme le souligne la requérante, les listes des connexions, visibles, d’une part, sur la première page de l’annexe D.5 et, d’autre part, sur les troisième, quatrième et cinquième pages de cette annexe sont incomplètes, dès lors que toutes les dates où elle se serait connectée à son compte n’y sont pas retranscrites (puisque n’y figurent que 172 dates sur les 175 annoncées sur le côté gauche de la partie inférieure de la première page et de la partie supérieure de la troisième page).

117    Dans ces conditions, il convient de considérer que ni l’annexe B.3 ni l’annexe D.5 ne permettent de dissiper le doute sur la date de consultation par la requérante de la communication de l’EPSO relative à la décision de rejet de candidature. Le Tribunal ne peut donc écarter avec certitude l’allégation de la requérante selon laquelle elle a consulté son compte EPSO le 4 août 2015, comme elle l’affirme, sans y trouver trace de ladite décision. Rien n’exclut, en effet, que le système informatique de l’EPSO ait connu des dysfonctionnements pendant la période en cause.

118    En cinquième lieu, la Commission produit, à cet égard, la pièce constituant l’annexe S.2, à savoir une déclaration de M. X, qu’elle présente, dans ses observations sur la suite de la procédure, comme un « consultant en informatique qui a contribué à la mise en place du système informatique pour EPSO et les concours ».

119    Dans lesdites observations, la Commission fait valoir que cette déclaration confirmerait qu’il est « impossible » qu’un candidat consulte son compte EPSO sans que cette connexion soit enregistrée dans le système informatique, contrairement à ce qu’affirme la requérante.

120    Toutefois, comme le souligne la requérante, loin d’être un « consultant », à savoir un professionnel indépendant de l’entité pour laquelle il intervient, l’expert en cause est, selon le site d’information relatif aux agents et aux personnes travaillant pour les institutions européennes (EU Whoiswho), « Advisor ICT policy » de l’EPSO (conseiller sur la stratégie dans le domaine de la technique de l’information et de la communication), à savoir un agent de l’EPSO. L’annexe S.2, qui porte l’en-tête « EPSO The Director », suggère, par ailleurs, que le déclarant est rattaché au directeur de l’EPSO, ce qui ne permet pas d’exclure que cette déclaration ait pu être formulée au préalable au niveau de la direction. Or, comme cela ressort de la jurisprudence, il convient de prendre en considération le fait que la déclaration en cause a été établie par une personne qui ne saurait être qualifiée d’indépendante de l’EPSO, dans la mesure où M. X non seulement est membre du personnel de l’EPSO, mais aussi témoigne dans un document portant l’en-tête de la direction de celui-ci. Par conséquent, en l’absence d’autre élément de preuve venant corroborer le témoignage qu’il comporte, ce document émanant d’une personne ayant un lien de subordination avec l’EPSO ne saurait établir la réalité des circonstances qui y sont relatées (voir, en ce sens, arrêt du 5 octobre 2020, HeidelbergCement et Schwenk Zement/Commission, T‑380/17, EU:T:2020:471, point 169 et jurisprudence citée), faute d’être corroboré par des éléments objectifs émanant du dossier (voir, en ce sens, arrêt du 8 octobre 2008, Carbone-Lorraine/Commission, T‑73/04, EU:T:2008:416, point 205).

121    En tout état de cause, il convient de relever, tel que le fait valoir la requérante, que l’auteur de la déclaration figurant à l’annexe S.2 indique uniquement « ne pas être au courant d’incident dans le passé ». Il déclare donc non pas qu’un incident n’a pas eu lieu, mais seulement qu’il n’a pas connaissance d’un incident.

122    Dès lors, il convient d’en conclure que la déclaration en cause ne permet pas d’exclure tout dysfonctionnement du système informatique de l’EPSO.

123    Ainsi, compte tenu, premièrement, du fait que les preuves fournies par la Commission pour établir la date de notification du rejet de candidature apparaissent comme étant d’une fiabilité limitée, en dépit du deuxième jeu de pièces fourni par la Commission lors du second échange de mémoires, deuxièmement, qu’un courriel de l’EPSO du 7 août 2015 adressé à la requérante indiquait que le téléchargement de la décision de rejet de candidature, qui aurait été prétendument réalisé le 30 juillet 2015 par l’EPSO, intervenait, en principe, « en même temps » que cet email, ce que confirme la Commission dans ses écritures, troisièmement, que la requérante fait mention d’une autre candidate qui a indiqué avoir reçu la notification de la décision relative à sa candidature non pas le 30 juillet 2015, mais le 7 août 2015, à savoir le jour de l’envoi de l’email mentionné ci-dessus de l’EPSO, et, quatrièmement, que la plupart des candidats au concours général ont consulté leur compte EPSO le 7 août 2015, et non le 30 juillet 2015, il y a lieu de considérer qu’il existe un doute quant à la date effective de téléchargement de la décision de rejet de candidature sur le compte EPSO de la requérante. En effet, bien que la Commission soutienne qu’il s’agit du 30 juillet 2015, il n’apparaît pas moins probable que, comme la requérante l’affirme, cette décision ait été téléchargée le 7 août 2015, date de la réception du courriel de l’EPSO l’informant de ce téléchargement « en même temps » que celui-ci, d’après les termes clairs de ce courriel, ce qui serait, du reste, de nature à expliquer que la plupart des candidats aient également consulté leurs propres comptes EPSO à cette date.

124    Il y a donc lieu d’accueillir le quatrième moyen, sur la base des arguments visés aux points 70 à 80 ci-dessus, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres arguments présentés par la requérante dans le cadre de ce moyen. Le quatrième moyen étant accueilli, il y a lieu d’accueillir le recours, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur les deuxième et troisième moyens.

 Sur les dépens

125    Conformément à l’article 133 du règlement de procédure, il est statué sur les dépens dans l’arrêt qui met fin à l’instance. Dans l’arrêt initial, le Tribunal avait condamné la Commission aux dépens. Dans l’arrêt sur pourvoi, la Cour a réservé les dépens. Il y a donc lieu de statuer, dans le présent arrêt, sur l’ensemble des dépens relatifs, d’une part, à la procédure engagée devant le Tribunal de la fonction publique et poursuivie devant le Tribunal, puis à celle engagée devant le Tribunal par suite du renvoi opéré par la Cour, et, d’autre part, à la procédure de pourvoi devant la Cour, conformément à l’article 219 du règlement de procédure.

126    À cet égard, aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

127    En l’espèce, certes, la Commission a obtenu gain de cause dans la procédure de pourvoi. Toutefois, elle a finalement succombé sur le fond, dans la mesure où elle est restée en défaut d’établir que la requérante avait présenté sa demande de réexamen de manière tardive et, partant, de justifier que la requérante n’avait pas d’intérêt à l’annulation de la décision attaquée. Dans ces conditions, la Commission doit être condamnée aux dépens relatifs à la procédure initialement engagée devant le Tribunal de la fonction publique dans l’affaire F‑17/16, à la procédure qui lui a succédé devant le Tribunal, dans l’affaire T‑587/16, par suite du transfert de compétence au Tribunal opéré par l’article 3 du règlement 2016/1192, à la procédure de pourvoi dans l’affaire C‑70/19 P et à la présente procédure après renvoi dans l’affaire T‑587/16 RENV.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de l’Office européen de sélection du personnel (EPSO) du 17 août 2015 de ne pas prendre en compte la demande de réexamen de la décision du jury de ne pas admettre la requérante à l’étape suivante du concours EPSO/AST-SC/03/15-3 est annulée.

2)      La Commission européenne est condamnée aux dépens afférents à la procédure initiale devant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (F17/16) et le Tribunal (T587/16), à la procédure devant la Cour dans l’affaire C70/19 P ainsi qu’à la présente procédure de renvoi (T587/16 RENV).

Gervasoni

Madise

Frendo

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 juillet 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.