Language of document : ECLI:EU:T:2015:402

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (troisième chambre)

9 juin 2015 (*)

« Aides d’État – Mesures adoptées par l’Allemagne en faveur de l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables et d’entreprises électro-intensives – Décision d’ouverture de la procédure prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE – Adoption de la décision finale postérieurement à l’introduction du recours – Non-lieu à statuer – Recours en annulation – Demande d’adaptation des conclusions – Absence d’élément nouveau – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T‑172/14,

Stahlwerk Bous GmbH, établie à Bous (Allemagne), représentée par Mes H. Höfler, C. Kahle et V. Winkler, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. T. Maxian Rusche et R. Sauer, en qualité d’agents, assistés de Me C. Renner, avocat,

partie défenderesse,

soutenue par

Autorité de surveillance AELE, représentée par MM. X. Lewis, M. Schneider, Mmes M. Moustakali et C. Perrin, en qualité d’agents,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande d’annulation partielle de la décision C (2013) 4424 final de la Commission, du 18 décembre 2013, d’ouvrir la procédure prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE au sujet des mesures mises en œuvre par la République fédérale d’Allemagne en faveur de l’électricité d’origine renouvelable et des gros consommateurs d’énergie [Aide d’État SA. 33995 (2013/C) (ex 2013/NN)],

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

composé de MM. S. Papasavvas (rapporteur), président, N. J. Forwood et E. Bieliūnas, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Faits, procédure et conclusions des parties

1        Par décision C (2013) 4424 final, du 18 décembre 2013, la Commission européenne a ouvert la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE au sujet de mesures mises en œuvre par la République fédérale d’Allemagne sous la forme d’une aide en faveur de l’électricité d’origine renouvelable et des gros consommateurs d’énergie [Aide d’État SA. 33995 (2013/C) (ex 2013/NN)] (ci-après la « décision attaquée »). La décision attaquée est publiée au Journal officiel de l’Union européenne du 7 février 2014 (JO C 37, p. 73) dans la langue faisant foi (l’allemand), précédée d’un résumé dans les autres langues officielles.

2        Les mesures faisant l’objet de la décision attaquée résultent du Gesetz für den Vorrang Erneuerbarer Energien (Erneuerbare-Energien-Gesetz) (loi sur la priorité aux énergies renouvelables), du 25 octobre 2008 (BGBl. I, p. 2074), tel que modifié par le Gesetz zur Neuregelung des Rechtsrahmens für die Förderung der Stromerzeugung aus Erneuerbaren Energien (loi portant nouvelle réglementation du cadre juridique de la promotion de l’électricité produite à partir d’énergies renouvelables), du 28 juillet 2011 (BGBl. I, p. 1634) et entré en vigueur le 1er janvier 2012 (ci-après l’« EEG de 2012 »).

3        Dans la décision attaquée, la Commission est parvenue à trois séries de conclusions provisoires relatives aux mesures en cause. En premier lieu, elle a considéré que celles-ci constituaient des aides d’État. En deuxième lieu, elle a estimé que ces aides d’État étaient à considérer, d’une part, comme nouvelles et, d’autre part, comme illégales dès lors qu’elles avaient été mises à exécution par la République fédérale d’Allemagne sans lui avoir été notifiées, en violation de l’article 108, paragraphe 3, TFUE. En troisième et dernier lieu, la Commission a conclu qu’il existait des doutes sérieux quant à la compatibilité de certains aspects de ces aides d’État avec le marché intérieur. Eu égard à ces conclusions, la Commission a invité la République fédérale d’Allemagne à lui soumettre ses observations, accompagnées de tout renseignement complémentaire susceptible de contribuer à l’évaluation des mesures en cause. Elle a également invité tout tiers intéressé à lui faire part d’éventuelles observations.

4        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 20 mars 2014, la requérante, Stahlwerk Bous GmbH, a introduit le présent recours.

5        Par acte séparé déposé le même jour, elle a également demandé qu’il soit statué sur l’affaire selon une procédure accélérée. Le 10 avril 2014, le Tribunal a décidé de ne pas faire droit à cette demande.

6        Par ailleurs, par acte déposé au greffe du Tribunal le 31 mars 2014, la requérante a demandé qu’il soit sursis à l’exécution de la décision attaquée. Le président du Tribunal a rejeté cette demande par ordonnance du 10 juin suivant, tout en réservant les dépens.

7        Par acte également déposé au greffe du Tribunal le 31 mars 2014, la Commission a demandé que la présente affaire et les affaires T‑173/14, WeserWind/Commission, T‑174/14, Dieckerhoff Guss/Commission, T‑175/14, Walter Hundhausen/Commission, T‑176/14, Georgsmarienhütte/Commission, T‑177/14, Harz Guss Zorge/Commission, T‑178/14, Friedrich Wilhelms-Hütte Eisenguss/Commission, T‑179/14, Schmiedewerke Gröditz/Commission, T‑183/14, Schmiedag/Commission, soient jointes pour cause de connexité. Par ordonnance du président de la troisième chambre du Tribunal du 29 avril suivant, celles-ci ont été jointes aux fins de la procédure écrite, la requérante entendue.

8        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 19 juin 2014, l’Autorité de surveillance AELE  a demandé à intervenir au litige, au soutien des conclusions de la Commission. Par acte séparé, elle a également demandé à être autorisée à utiliser l’anglais aux fins des procédures écrite et orale. Par ordonnance du président de la troisième chambre du Tribunal du 1er octobre 2014, l’Autorité de surveillance AELE a été admise à intervenir et autorisée à utiliser l’anglais aux fins des procédures tant écrite qu’orale, les parties entendues.

9        Par actes respectivement déposés au greffe du Tribunal le 21 août et les 3 et 9 septembre 2014, Flachglas Torgau GmbH et Saint-Gobain Isover G+H AG, Kronotex GmbH & Co. KG et Kronoply GmbH, Bayer MaterialScience AG, Sabic Polyolefine GmbH, Ineos Manufacturing Deutschland GmbH, Ineos Phenol GmbH et Ineos Vinyls Deutschland GmbH, ainsi que Advansa GmbH, Akzo Nobel Industrial Chemicals GmbH, Aurubis AG, CBW Chemie GmbH, CFB Chemische Fabrik Brunsbüttel GmbH & Co. KG, Clariant Produkte (Deutschland) GmbH, Dralon GmbH, Hahl Filaments GmbH, Messer Produktionsgesellschaft mbH Siegen, Messer Produktionsgesellschaft mbH Salzgitter, Nabaltec AG, Siltronic AG et Wacker Chemie AG, ont demandé à intervenir au litige, au soutien des conclusions de la requérante.

10      Dans la requête, la requérante conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler partiellement la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

11      Dans le mémoire en défense, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable ou, subsidiairement, comme non-fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 Faits postérieurs à l’introduction du recours

12      Par décision C (2014) 8786 final, du 25 novembre 2014, relative à l’aide d’État SA. 33995 (2013/C) (ex 2013/NN) mise en œuvre par la République fédérale d’Allemagne en faveur de l’électricité d’origine renouvelable et des gros consommateurs d’énergie (ci-après la « décision du 25 novembre 2014 »), la Commission a mis fin à la procédure ouverte par la décision attaquée, en se prononçant, de façon définitive, sur la qualification des mesures faisant l’objet de cette décision, au regard de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, et sur leur compatibilité avec le marché intérieur, au regard de l’article 107, paragraphe 3, TFUE.

13      Le 10 décembre 2014, le Tribunal a demandé à la Commission de produire cette décision. La Commission a déféré à cette demande.

14      Le 6 janvier 2015, le Tribunal a demandé aux parties de présenter leurs observations relatives aux conséquences à tirer de l’adoption de la décision du 25 novembre 2014 dans le cadre de la présente affaire. Il a, en particulier, invité la requérante à indiquer si elle entendait maintenir son recours ou non. Les parties ont déféré à cette demande. Dans ses observations, la requérante a, en substance, indiqué au Tribunal, d’une part, qu’elle considérait que l’adoption de la décision du 25 novembre 2014 avait rendu son recours contre la décision attaquée sans objet et, d’autre part, qu’elle entendait adapter ses conclusions en vue de demander l’annulation de la décision du 25 novembre 2014. Pour sa part, la Commission a fait savoir au Tribunal qu’elle estimait, notamment, que le recours avait perdu son objet du fait de l’adoption de la décision du 25 novembre 2014.

15      Le 5 février 2015, le Tribunal a tenu une réunion informelle en présence des parties principales et de la partie intervenante. Le procès-verbal de cette réunion a été signifié à l’ensemble des parties. Un délai de cinq semaines a, à cette occasion, été donné aux parties principales pour présenter des observations complémentaires.

16      Les 9 et 17 mars 2015, la requérante a adressé des observations complémentaires au Tribunal, dans le cadre desquelles elle a, notamment, demandé que la Commission soit condamnée aux dépens, en exposant les raisons justifiant selon elle une telle condamnation. Le 2 mars 2015, la Commission avait elle aussi adressé des observations complémentaires au Tribunal, dans le cadre desquelles elle avait, notamment, demandé que la requérante soit condamnée aux dépens.

 En droit

17      En vertu de l’article 113 de son règlement de procédure, le Tribunal peut à tout moment, d’office, les parties entendues, statuer sur les fins de non-recevoir d’ordre public ou constater que le recours est devenu sans objet et qu’il n’y a plus lieu de statuer. La décision est prise dans les conditions prévues à l’article 114, paragraphes 3 et 4, de ce même règlement, qui dispose notamment que, sauf décision contraire du Tribunal, la suite de la procédure est orale.

18      En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide de statuer sans poursuivre la procédure.

19      À cet égard, il convient de constater que la requérante et la Commission s’accordent à considérer, en substance, que le présent recours est devenu sans objet, postérieurement à l’introduction de la requête, dès lors que la procédure qui avait été ouverte par la décision attaquée, en application de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, à l’encontre de certaines des mesures prévues par l’EEG de 2012, a été clôturée par la décision du 25 novembre 2014, dans laquelle la Commission a procédé à une qualification et à une appréciation définitives de ces mesures au regard de l’article 107 TFUE. De ce fait, la requérante estime, notamment, que la décision attaquée ne produit plus d’effets juridiques en ce qui la concerne.

20      Par voie de conséquence, la requérante et la Commission estiment toutes deux qu’il n’y a plus lieu de statuer sur le présent recours. À cet égard, si la requérante s’est d’abord limitée, dans ses observations du 20 janvier 2015, à indiquer que ledit recours était devenu sans objet, elle a ensuite exposé, dans ses observations du 9 mars 2015, qu’il n’y avait, selon elle, plus lieu de statuer à son sujet, ainsi que la Commission l’avait également fait valoir dans ses observations du 2 mars 2015.

21      Eu égard à ces éléments, il convient de considérer que le présent recours est devenu sans objet et qu’il n’y a plus lieu de statuer.

22      Dans la mesure où la requérante a, par ailleurs, indiqué, dans ses observations du 20 janvier 2015, puis lors de la réunion informelle du 5 février 2015, sans toutefois réitérer cette position dans ses observations du 9 mars 2015, qu’elle entendait adapter ses conclusions pour demander l’annulation de la décision du 25 novembre 2014 en lieu et place de la décision attaquée, il convient de relever que, lorsqu’une décision est, en cours de procédure, modifiée ou remplacée par une décision ayant le même objet, cette dernière doit être considérée comme un élément nouveau permettant à la partie requérante d’adapter ses conclusions et moyens. Il serait, en effet, contraire à une bonne administration de la justice et à une exigence d’économie de procédure d’obliger celle-ci à introduire un nouveau recours. Il serait, en outre, injuste que la Commission puisse, pour faire face aux critiques contenues dans une requête présentée au juge de l’Union européenne contre sa décision, adapter celle-ci ou lui en substituer une autre et se prévaloir, en cours d’instance, de cette modification ou de cette substitution pour priver l’autre partie de la possibilité d’étendre ses conclusions et ses moyens initiaux à la décision ultérieure ou de présenter des conclusions et moyens supplémentaires contre celle-ci (arrêts du 3 mars 1982, Alpha Steel/Commission, 14/81, Rec, EU:C:1982:76, point 8, et du 21 octobre 2004, Lenzing/Commission, T‑36/99, Rec, EU:T:2004:312, point 54).

23      Or, en l’espèce, force est de constater que, d’une part, la décision attaquée n’a été ni modifiée ni remplacée par la décision du 25 novembre 2014. D’autre part, ces deux décisions n’ont pas le même objet, ainsi que le relève, à juste titre, la Commission. En effet, comme le prévoient l’article 4, paragraphe 4, l’article 6, paragraphe 1, et l’article 13, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [108 TFUE] (JO L 83, p. 1), la première d’entre elles avait pour objet d’ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE à l’égard de certaines mesures prévues par l’EEG de 2012, compte tenu de la conclusion provisoire à laquelle était parvenue la Commission quant à la qualification et à l’appréciation de ces mesures au regard de l’article 107 TFUE, et de permettre à cette institution de se forger une conviction définitive à ce sujet. Pour sa part, la seconde décision a pour objet de mettre un terme à ladite procédure formelle d’examen, en application de l’article 7 et de l’article 13, paragraphe 1, du règlement n° 659/1999, en procédant à une qualification définitive des mesures en cause au regard des règles applicables aux aides d’État et en appréciant, de façon également définitive, sa compatibilité avec le marché intérieur.

24      Il s’ensuit que la décision du 25 novembre 2014 ne peut pas être regardée comme un élément nouveau permettant à la requérante d’adapter les conclusions du présent recours et que la demande tendant à adapter ces dernières doit, par voie de conséquence, être rejetée comme irrecevable. Un tel rejet est sans préjudice de la possibilité dont jouit la requérante d’introduire un recours contre ladite décision, ainsi qu’elle en a évoqué l’éventualité dans l’hypothèse où sa demande tendant à adapter les conclusions présentées dans le cadre du présent recours serait rejetée comme irrecevable.

25      Par suite, il n’y a plus lieu de statuer sur les demandes d’intervention visées au point 9 ci-dessus.

 Sur les dépens

26      Aux termes de l’article 87, paragraphe 6, du règlement de procédure, en cas de non-lieu à statuer, le Tribunal règle librement les dépens. En l’espèce, il convient de décider que la requérante supportera ses propres dépens et ceux exposés par la Commission dans le cadre du présent recours. Elle supportera également ses propres dépens et ceux exposés par la Commission dans le cadre de sa demande en référé.

27      Par ailleurs, conformément à l’article 87, paragraphe 4, deuxième alinéa, du règlement de procédure, l’Autorité de surveillance AELE supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

ordonne :

1)      Il n’y a plus lieu de statuer sur le présent recours.

2)      La demande tendant à ce que les conclusions du présent recours soient adaptées pour viser la décision C (2014) 8786 final de la Commission, du 25 novembre 2014, relative à l’aide d’État SA. 33995 (2013/C) (ex 2013/NN) mise en œuvre par la République fédérale d’Allemagne en faveur de l’électricité d’origine renouvelable et des gros consommateurs d’énergie, est rejetée comme irrecevable.

3)      Il n’y a plus lieu de statuer sur les demandes d’intervention présentées par Flachglas Torgau GmbH et Saint-Gobain Isover G+H AG, par Kronotex GmbH & Co. KG et Kronoply GmbH, par Bayer MaterialScience AG, par Sabic Polyolefine GmbH, par Ineos Manufacturing Deutschland GmbH, Ineos Phenol GmbH et Ineos Vinyls Deutschland GmbH, ainsi que par Advansa GmbH, Akzo Nobel Industrial Chemicals GmbH, Aurubis AG, CBW Chemie GmbH, CFB Chemische Fabrik Brunsbüttel GmbH & Co. KG, Clariant Produkte (Deutschland) GmbH, Dralon GmbH, Hahl Filaments GmbH, Messer Produktionsgesellschaft mbH Siegen, Messer Produktionsgesellschaft mbH Salzgitter, Nabaltec AG, Siltronic AG et Wacker Chemie AG.

4)      Stahlwerk Bous GmbH supportera ses propres dépens et ceux exposés par la Commission européenne, y compris ceux afférents à la procédure de référé.

5)      L’Autorité de surveillance AELE supportera ses propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 9 juin 2015.

Le greffier

 

      Le président

E. Coulon

 

      S. Papasavvas


* Langue de procédure : l’allemand.