Language of document : ECLI:EU:T:2011:321

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (huitième chambre)

30 juin 2011(*)

« Recours en indemnité – Enrichissement sans cause – Requête introductive d’instance – Exigences de forme – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T‑403/09,

Tecnoprocess Srl, établie à Rome (Italie), représentée par Me A. Majoli, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. A. Bordes et L. Prete, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours visant, d’une part, à faire constater l’enrichissement sans cause de la Commission européenne et des délégations de l’Union européenne au Maroc et au Nigeria et, d’autre part, à ordonner à la Commission le versement de la somme de 114 069,94 euros et des intérêts dus sur cette somme,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. L. Truchot, président, Mme M. E. Martins Ribeiro et M. H. Kanninen (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige

1        La requérante, Tecnoprocess Srl, conçoit, construit, installe, entretient et fournit des composants industriels dans différents secteurs tels que les secteurs alimentaire, chimique, pharmaceutique, environnemental, énergétique, pétrochimique ou de l’ingénierie.

2        Depuis 2002, la requérante participe à des appels d’offres dans le cadre de programmes d’aides extérieures aux pays tiers, financés par le budget de l’Union européenne et le Fonds européen de développement (FED).

3        Les principaux contrats conclus par la requérante depuis cette date sont énumérés comme suit dans la requête :

« 1) le contrat Maroc – EuropeAid/120888/D/S/M – CETIEV Lot 3 et lots 1 et 6, PAE – DQN – 022 et PAE – DQN – 010 bis – conclu dans le cadre du programme MEDA II – ’appui aux entreprises’ ;

2)      le contrat Maroc – EuropeAid/114205/D/S/MA – MAR/14/2003/MEDA/B7-4100/IB/96/0587 – MEDA I ;

3)      le contrat Nigeria – EuropeAid 123511/D/SUP/NG – 7 ACP UNI 062/24 – 7e Fonds européen de développement Partenariat Prime pour le renforcement de la vaccination ;

4)      le contrat Turquie – EuropeAid/124943/D/S – lots 4 et 5 – TR 0503.07-04/2003 – Budget général CE ;

5)      le contrat Congo EuropeAid 125294/C/SUP/CD – lot 4 – 7 ACP ZR 42/60 CONV. 5898/ZR ;

6)      le contrat Costa Rica – EuropeAid 126365/D/SUP/CR – lots 6, 8, 17, 21 – ALA/2005/017 – 534 ;

7)      le contrat Russie EuropeAid/125080(C/SUP/RU lot 2 et lot e – Budget général CE. »

4        Les premier et deuxième contrats cités dans la liste ci-dessus sont visés par la requête introduite par la requérante dans le cadre de l’affaire T‑264/09 (Tecnoprocess/Commission et délégation de l’Union au Maroc). Le troisième contrat mentionné dans ladite liste est visé par la requête introduite par la requérante dans le cadre de l’affaire T‑367/09 (Tecnoprocess/Commission).

5        Les 19 novembre 2008, 18 août et 24 septembre 2009, la requérante a soumis à la Commission des Communautés européennes et à la délégation de l’Union européenne au Maroc (ci-après la « délégation au Maroc ») les termes d’un règlement amiable afin que, en substance, les dettes et créances respectives de la requérante et de la délégation au Maroc soient réglées par compensation.

6        La Commission a répondu à la requérante qu’elle n’avait pas l’intention de donner suite à la proposition de transaction.

7        Le 20 avril 2009, la requérante a été mise en liquidation.

 Procédure et conclusions des parties

8        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 7 octobre 2009, la requérante a introduit le présent recours.

9        Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 12 novembre 2009, la Commission a soulevé, sur le fondement de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, une exception d’irrecevabilité. La requérante a présenté ses observations sur cette exception le 22 février 2010.

10      Par lettre du 12 janvier 2010, le Tribunal a invité les parties à se prononcer sur la question de savoir si la Commission pouvait être considérée comme l’unique partie défenderesse dans la présente affaire. Par courriers, respectivement des 14 et 24 janvier 2010, la Commission et la requérante ont marqué leur accord.

11      Dans la requête, la requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        constater l’enrichissement indu de la délégation de l’Union européenne au Nigeria (ci-après la « délégation au Nigeria »), de la délégation au Maroc et de la Commission ;

–        par voie de conséquence, condamner la délégation au Nigeria, la délégation au Maroc et la Commission, y compris solidairement, à lui verser la somme de 114 069,94 euros, outre les intérêts échus à la date du paiement, ou toute autre somme que le Tribunal jugera appropriée, augmentée des intérêts courant sur le montant retenu jusqu’à la date du paiement ;

–        condamner la délégation au Nigeria, la délégation au Maroc et la Commission, y compris solidairement, aux dépens.

12      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable ;

–        condamner la requérante aux dépens ;

–        à titre subsidiaire, dans l’hypothèse où la présente demande ne serait pas accueillie, fixer un nouveau délai pour la poursuite de l’instance, en application de l’article 114, paragraphe 4, second alinéa, du règlement de procédure.

13      Dans ses observations sur l’exception d’irrecevabilité, la requérante conclut au rejet de l’exception d’irrecevabilité et à ce qu’il soit fait droit au recours.

 En droit

14      En vertu de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure, si une partie le demande, le Tribunal peut statuer sur l’irrecevabilité sans engager le débat au fond. Conformément au paragraphe 3 du même article, la suite de la procédure sur l’exception d’irrecevabilité est orale, sauf décision contraire du Tribunal.

15      En l’espèce, le Tribunal estime qu’il est suffisamment éclairé par les pièces versées au dossier et qu’il n’y a pas lieu d’ouvrir la procédure orale.

 Observations liminaires

16      La Commission conteste d’abord la recevabilité du recours en tant qu’il est dirigé contre la délégation au Maroc et la délégation au Nigeria, lesquelles ne seraient pas dotées de la personnalité juridique. Elle soulève ensuite l’irrecevabilité du recours en ce qu’il serait contraire aux exigences fixées par l’article 21 du statut de la Cour de justice et les articles 44 et 48 du règlement de procédure.

17      En ce qui concerne la première fin de non-recevoir, il y a lieu de rappeler, comme il a été mentionné au point 10 ci-dessus, que, à la suite du courrier du greffe du 12 janvier 2010, la requérante a marqué son accord, par courrier du 24 janvier 2010, pour considérer la Commission comme l’unique partie défenderesse dans la présente affaire. Il s’ensuit que la requérante ayant renoncé à diriger son recours contre la délégation au Maroc et la délégation au Nigeria, il n’y a plus lieu d’examiner la première fin de non-recevoir.

 Sur la recevabilité du recours

 Arguments des parties

18      La Commission soutient en premier lieu que la description des faits dans la requête est, « d’une part, confuse et, d’autre part, pas tout à fait correcte ».

19      Elle soutient en second lieu que la requête ne satisfait pas aux conditions prévues par l’article 21 du statut de la Cour ainsi que par les articles 44 et 48 du règlement de procédure.

20      À cet égard, la Commission prétend que la requérante se borne à mentionner une liste de contrats conclus entre elle et certaines autorités des pays en voie de développement, lesquels ne seraient pas joints à la requête. En outre, la requérante invoquerait deux dispositions du règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil, du 25 juin 2002, portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes (JO L 248 p. 1, ci-après le « règlement financier »), sans justifier de leur pertinence en l’espèce. Elle se bornerait à faire un exposé succinct et général de l’objet des contrats en question, avec quelques références à des faits ou des arguments exposés dans des recours introduits dans d’autres affaires.

21      Quant aux moyens de droit, ils feraient défaut, la requérante se limitant à conclure que « [l]es faits décrits jusqu’ici démontrent de manière évidente qu’il y a eu enrichissement sans cause des institutions » et qu’« il est à peine besoin de relever que toutes les conditions du recours en question sont présentes ».

22      En conséquence, la Commission estime non seulement que son enrichissement sans cause est loin de ressortir « de manière évidente » de la requête, mais aussi qu’il n’est pas aisé de savoir exactement ce que vise la requérante, qui se contenterait d’affirmer qu’il est démontré « de manière évidente » que les conditions du recours « sont présentes ». Selon la Commission, les règles de procédure exigent que la requérante fasse la preuve de ses affirmations.

23      Or, en l’espèce, la requête ne contiendrait aucune description, fût‑elle sommaire, du comportement que la requérante reproche à la Commission, des raisons pour lesquelles elle estime qu’un lien de causalité existe entre le comportement et le préjudice qu’elle prétend avoir subi ainsi que du caractère et de l’étendue de ce préjudice. La requérante se contenterait de chiffrer son préjudice à 114 069,94 euros, sans toutefois expliquer comment elle parvient à ce résultat. Aucune explication ne ressortirait de la requête en ce qui concerne l’appauvrissement de la requérante et l’enrichissement de la Commission, le lien de causalité direct entre ces appauvrissement et enrichissement supposés ou la justification éventuelle de cet enrichissement.

24      La Commission soutient également qu’une partie ne peut pallier les vices qui entachent son recours en incorporant, par voie de simples références, les moyens et arguments soulevés dans d’autres recours. De plus, selon la Commission, si le corps de la requête peut être étayé et complété, sur des points spécifiques, par des renvois à des extraits de pièces qui y sont annexées, un renvoi global à d’autres écrits, même annexés à la requête, ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels de l’argumentation en droit qui devraient figurer dans celle-ci. Il n’appartiendrait pas au Tribunal de rechercher et d’identifier, dans les annexes, les moyens et arguments qu’il pourrait considérer comme constituant le fondement du recours, les annexes ayant une fonction purement probatoire et instrumentale.

25      Par ailleurs, la Commission soutient que la requête viole l’article 48 du règlement de procédure en ce qu’elle semble contourner l’interdiction de produire des moyens nouveaux en cours d’instance, en introduisant un moyen supplémentaire tiré de l’enrichissement sans cause, qui n’avait pas été soulevé dans l’acte introductif d’instance dans les affaires T‑264/09 et T‑367/09, susmentionnées. Selon la Commission, il serait manifeste que le présent recours et les deux recours antérieurs susmentionnés ont en commun un même objet, une même base juridique et les mêmes parties à la cause. D’ailleurs, la requérante décrirait elle‑même, dans la requête, le présent recours comme étant « ultérieur et additionnel » ou « accessoire » aux affaires T‑264/09 et T‑367/09, susmentionnées.

26      La requérante soutient que, à la suite de plusieurs comportements illicites de la Commission consistant pour l’essentiel en une exclusion implicite de la requérante des programmes d’assistance aux pays tiers, en un blocage des paiements de la requérante sans justification particulière, en la communication à de nombreux fournisseurs de la requérante des difficultés financières de celle-ci, en la totale inertie à fournir des réponses aux demandes d’éclaircissement, aux demandes de paiement, aux propositions de transaction, elle s’est trouvée dans une situation d’impasse l’empêchant de « s’engager dans de nouveaux projets économiques » avec pour conséquence inévitable sa mise en liquidation le 20 avril 2009.

27      La requérante indique ensuite que, « [comme cela a été souligné] dans les requêtes T‑264/09 et T‑367/09, les comportements étonnants tant de la délégation [au Maroc] et de la Commission dans le premier cas [que] de la délégation [au Nigeria] et de la Commission dans le second cas [l’]ont empêchée […] d’exécuter les prestations résultant des contrats respectifs et ont conduit à une suspension injustifiée des paiements ».

28      S’agissant spécifiquement des contrats conclus avec les bénéficiaires marocains, la requérante indique qu’elle a été « contrainte de travailler dans un climat de total désintérêt [de la part] de la Commission et de la [d]élégation [au Maroc] ainsi que d’une absence impressionnante de préparation technico-juridique ainsi que de sévères mesures d’obstruction de la part de cette dernière qui ont conduit non seulement à une impossibilité d’exécuter le contrat mais également à une situation d’impasse financière grave : ni la Commission ni la [d]élégation [au Maroc] n’ont fait quoi que se soit pour que le procès-verbal de réception provisoire (non définitif) de la marchandise achetée et fournie par [la requérante] soit signé, ce qui [a] empêch[é] le déblocage de la contrepartie en faveur de cette dernière ».

29      En ce qui concerne le contrat conclu avec le bénéficiaire nigérian, la requérante prétend, « comme cela [a] été amplement établi dans la requête T‑367/09, [qu’il] a été et est toujours caractérisé par une anomalie encore plus saisissante : il suffit de penser que pour l’achat et le transport de toutes les marchandises depuis le port de [Tin Can Island (Nigeria)], [la requérante] a été littéralement incapable d’achever le transport dans les 114 destinations finales en raison de l’absence de fourniture de la documentation fiscale et douanière qui aurait dû être acquise par le bénéficiaire, sous le contrôle de la [d]élégation [au Nigeria] ». La requérante souligne que cela « a conduit, bien sûr, à ce que le versement de l’avance n’ait pas encore été suivi du paiement du solde éventuel ; cela, malgré le fait que l’avance versée ne couvre pas les frais d’achat et de transport mais, surtout, il s’agit d’un chiffre dérisoire par rapport au montant des pénalités de retard et au montant de la surestarie (‘demurrage’) dont le paiement a été réclamé à tort à la requérante ».

30      La requérante évoque en outre la situation de plusieurs autres contrats en ces termes :

« Le contrat russe a expiré le 10 septembre 2009, sans que [la requérante] ait pu terminer d’exécuter ses propres prestations, en raison de la lenteur de la Fédération de Russie dans la délivrance de la certification GOST nécessaire à l’exportation des marchandises.

Le contrat Costa Rica résultant d’une adjudication plus récente a été caractérisé par le retrait du bénéficiaire ; cela s’explique soit par le retard imputable aux difficultés de construction de la machine principale (centrifugeuse) soit par la liquidation de [la requérante].

La conclusion du contrat Turquie prévoit l’émission de l’ordre de service au plus tard le 2 juin 2008.

Ce délai n’a pas été respecté par le bénéficiaire tandis que la requérante, confirmant sa volonté de poursuivre l’exécution du contrat, a demandé à plusieurs reprises d’obtenir une prolongation du délai pour exécuter ses obligations ; à la suite des refus répétés du bénéficiaire, [la requérante] a demandé – ou plutôt réitéré la demande – au bénéficiaire de trouver une solution amiable, prévoyant le remboursement de l’avance reçue.

Le contrat Congo : le contrat en question a fait l’objet d’une série d’enquêtes et de contrôles de la part de l’OLAF – enquêtes dont les modalités ont été contestées à plusieurs reprises par la même requérante.

Même dans un tel cas, [la requérante] a demandé à plusieurs reprises de conclure un règlement à l’amiable des litiges survenant en cours d’exécution du contrat, démontrant ainsi sa disponibilité à restituer l’avance perçue. »

31      La requérante soutient en outre qu’en procédant à la compensation des principales positions comptables des différents contrats, elle serait créancière d’une somme d’un montant égal à 114 069,94 euros indûment retenue. La requérante ajoute que, dans le cadre des contrats conclus avec les bénéficiaires marocains, elle a envoyé aux services centraux de la Commission ainsi qu’à la délégation au Maroc des propositions de transaction qui n’auraient fait l’objet d’aucune réponse.

32      Selon la requérante, il semble évident qu’il existe un enrichissement injustifié de la délégation au Maroc et de la délégation au Nigeria et, de manière indirecte, de la Commission elle-même, ce qui lui donnerait le droit de réclamer une indemnité égale à la diminution de son patrimoine, à laquelle devraient s’ajouter les intérêts. La requérante relève à cet égard qu’« il n’est guère besoin de souligner que, en l’espèce, tous les éléments sont réunis pour l’exercice du recours ».

33      Dans ses observations sur l’exception d’irrecevabilité, la requérante soutient que, dans la requête, non seulement le fondement juridique du recours est identifié, à savoir le règlement financier, mais que les faits à l’origine du litige sont également exposés et accompagnés d’un tableau qui mettrait en évidence les obligations réciproques de la requérante et de la Commission, dont la compensation aboutirait à la somme de 114 069,94 euros. Partant, la Commission ne saurait affirmer que la requérante n’explique pas « comment elle parvient à ce résultat ». Quant à son « appauvrissement », il suffirait, selon la requérante, de rappeler que, dans la requête, elle a clairement indiqué que « la perte de recettes et les nombreuses infractions imputables à certaines [d]élégations de la Commission et à la Commission ont créé une situation de crise financière et [provoqué] [sa] mise en liquidation […] ». Enfin, s’agissant du lien de causalité, il serait à peine besoin de relever que, pour qu’il y ait enrichissement sans cause, il suffit qu’il existe un fait générateur unique de l’enrichissement, à savoir, en l’espèce, le fait pour la Commission d’avoir indûment retenu des sommes, lesquelles seraient destinées à la requérante, qui constitueraient la contrepartie de prestations fournies par celle-ci.

34      Enfin, s’agissant de la violation de l’article 48 du règlement de procédure invoquée par la Commission, la requérante rappelle qu’elle a été mise en liquidation le 20 avril 2009, ce qui aurait impliqué de très grandes difficultés dans la reconstitution de sa situation comptable et une impossibilité objective de former le présent recours avant le mois d’octobre 2009.

 Appréciation du Tribunal

35      En vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour, applicable à la procédure devant le Tribunal conformément à l’article 53, premier alinéa, du même statut, et de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure, toute requête doit indiquer, notamment, l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens invoqués. Ces éléments doivent être suffisamment clairs et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant sans autres informations. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il est nécessaire, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit, sur lesquels celui-ci se fonde, ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même [ordonnances du Tribunal du 28 avril 1993, De Hoe/Commission, T‑85/92, Rec. p. II‑523, point 20, et du 8 juillet 2010, Strålfors/OHMI (IDENTIFICATION SOLUTIONS), T‑212/10, non publiée au Recueil, point 5].

36      Par ailleurs, si le corps de la requête peut être étayé et complété, sur des points spécifiques, par des renvois à des passages déterminés de pièces qui y sont annexées, un renvoi global à d’autres écrits, même annexés à la requête, ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels de l’argumentation en droit, qui, en vertu des dispositions ci-dessus rappelées, doivent figurer dans la requête (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, Rec. p. I‑5425, points 94 à 100, et ordonnance IDENTIFICATION SOLUTIONS, précitée, point 6). Il en est a fortiori de même du renvoi à des écrits présentés devant la même juridiction dans d’autres affaires (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 14 décembre 2005, Honeywell/Commission, T‑209/01, Rec. p. II‑5527, points 54 à 68).

37      En l’espèce, la requérante allègue, en premier lieu, l’impossibilité d’exécuter les contrats conclus avec les bénéficiaires marocains et nigérian et expose les raisons de cette inexécution de façon laconique, comme il ressort des points 27 à 29 ci-dessus.

38      La requérante prétend en second lieu qu’il « semble évident » que la Commission ainsi que la délégation au Maroc et la délégation au Nigeria se sont enrichies sans cause à son détriment. Sur la base d’un tableau, figurant dans la requête, la requérante fait valoir, en conséquence, que la Commission est redevable à son égard de la somme de 114 069,94 euros.

39      Force est de constater, tout d’abord, que les éléments de fait relatés dans la requête ne permettent pas de comprendre les raisons de l’inexécution des contrats conclus avec les bénéficiaires marocains et nigérian alléguée par la requérante. S’agissant des contrats conclus avec les bénéficiaires marocains, la requérante se borne à évoquer « un climat de total désintérêt » de la part de la Commission et de la délégation au Maroc, « une absence impressionnante de préparation technico-juridique », « de sévères mesures d’obstruction » de la part de la délégation au Maroc et relève enfin que ni celle-ci ni la Commission « n’ont fait quoi que ce soit pour que le procès-verbal de réception provisoire (non définitif) de la marchandise achetée et fournie par [la requérante] soit signé ». Quant au contrat conclu avec le bénéficiaire nigérian, la requérante se contente d’invoquer, pour expliquer son inexécution, l’absence de délivrance par le bénéficiaire de la documentation fiscale et douanière, sous le contrôle de la délégation au Nigeria.

40      Comme la requérante semble le soutenir, à supposer que des explications complémentaires ressortent des requêtes dans les affaires T‑264/09 et T‑367/09, susmentionnées, un tel renvoi à ces requêtes, même annexées à la requête dans la présente affaire, ne saurait pallier le manque de précision de celle-ci (voir point 36 ci-dessus).

41      Il y a lieu de relever ensuite que, sur la base d’un tableau portant sur sa situation comptable, la requérante prétend au paiement par la Commission d’une somme de 114 069,94 euros, sans expliciter le mode de calcul lui permettant de réclamer un tel montant. Dans la requête, la requérante se borne à soutenir que cette somme est le résultat de la compensation des principales positions comptables des différents contrats repris dans ledit tableau. Elle n’explicite pas davantage les modalités de calcul d’un tel montant dans ses observations sur l’exception d’irrecevabilité.

42      Enfin, les développements succincts et confus de la requête sur la situation des contrats conclus avec les bénéficiaires marocains et nigérian ne permettent pas au Tribunal de vérifier si, comme le prétend la requérante, la Commission s’est enrichie indûment.

43      En effet, selon la jurisprudence, bien que le recours fondé sur un enrichissement sans cause ne relève pas du régime de la responsabilité non contractuelle au sens strict, dont l’engagement dépend de la réunion d’un ensemble de conditions relatives à l’illégalité du comportement reproché à la Communauté, à la réalité du dommage et à l’existence d’un lien de causalité entre ce comportement et le préjudice invoqué (voir arrêt du 9 septembre 2008, FIAMM e.a./Conseil et Commission, C‑120/06 P et C‑121/06 P, Rec. p. I‑6513, point 106, et la jurisprudence citée), et qu’il s’en distingue en ce qu’il n’exige pas la preuve d’un comportement illégal du défendeur, ni même l’existence d’un comportement tout court, la preuve doit néanmoins être rapportée d’un enrichissement sans base légale valable du défendeur et d’un appauvrissement du requérant lié audit enrichissement. Pour que l’action fondée sur l’enrichissement sans cause soit accueillie, il est essentiel que l’enrichissement ne puise pas sa justification dans un contrat ou dans une obligation légale [voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 16 décembre 2008, Masdar (UK)/Commission, C‑47/07 P, Rec. p. I‑9761, points 44 à 49].

44      En l’espèce, il y a lieu de relever que, dans la partie intitulée « En droit » de la requête, la requérante fait valoir, d’une part, qu’« il semble évident que, à ce jour, il existe un enrichissement injustifié des institutions », d’autre part, qu’il est « irréfutable que les délégations, de façon tout à fait injustifiée, détiennent des sommes qui ne leur reviennent pas, mais qui [lui] reviennent » et conclut qu’« il n’est guère besoin de souligner qu’en l’espèce tous les éléments sont réunis pour l’exercice du recours ». Ce faisant, la requérante ne soulève aucun moyen ou argument en droit, ni n’avance un début de raisonnement, se bornant à avancer des allégations. Sur la base de la seule requête, le Tribunal ne saurait donc être en mesure de vérifier si les sommes prétendument retenues de manière indue par la Commission l’ont été légalement.

45      En conséquence, dès lors que la requête ne satisfait pas aux exigences minimales de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure, le recours doit être rejeté comme irrecevable, sans qu’il soit besoin d’examiner s’il méconnaît, par ailleurs, l’article 48 du règlement de procédure.

 Sur les dépens

46      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission, conformément aux conclusions de cette dernière.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

Ordonne :

1)      Le recours est rejeté comme irrecevable.

2)      Tecnoprocess Srl est condamnée aux dépens.

Fait à Luxembourg, le 30 juin 2011.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       L. Truchot


* Langue de procédure : l’italien.