Language of document : ECLI:EU:T:2024:48

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

31 janvier 2024 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative Feed. – Marque de l’Union européenne figurative antérieure The Feed. – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑26/23,

Feed SA, établie à Paris (France), représentée par Mes V. Bouchara et A. Maier, avocates,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. M. Eberl et V. Ruzek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

The Feed.com, Inc., établie à Broomfield, Colorado (États-Unis), représentée par Me J. Lacker, avocat,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de Mme K. Kowalik‑Bańczyk, présidente, M. G. Hesse (rapporteur) et Mme B. Ricziová, juges,

greffier : Mme R. Ūkelytė, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 11 octobre 2023,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Feed SA, demande l’annulation de la décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 3 novembre 2022 (affaire R 552/2022-5) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 17 juillet 2019, la requérante a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

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3        La marque demandée désignait les produits et les services relevant des classes 29, 30, 32 et 43 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 29 : « Substitut de repas sous forme de barres à base de fruits à coque, de légumineuses, de noix, d’oléagineux, de fruits, poudres et boissons à base de lait et succédanés du lait, de légumineuse, d’oléagineux ; Substituts de repas liquides, solides ou en poudre à bases de fruits, de légumes, de lait et succédanés du lait, de champignons, de légumineuses, de graines, de fruits à coques, de noix, d’oléagineux ; repas lyophilisés, à savoir légumes lyophilisés, fruits lyophilisés, champignons lyophilisés ; substituts de repas non médicamenteux à base de fruits, de légumes, de lait et succédanés du lait, de champignons, de légumineuses, de graines, de fruits à coques, d’oléagineux, de noix » ;

–        classe 30 : « Substitut de repas sous forme de barres, poudres et boissons ; Substituts de repas liquides, solides ou en poudre ; plats lyophilisés dont la farine alimentaire est l’ingrédient principal ; Substituts de repas non médicamenteux à base de chocolat, de céréales, de café, de thé, d’arômes alimentaires, d’amidon à usage alimentaire, de fécule à usage alimentaire, de préparation aromatique à usage alimentaire, d’épices, de farine, de levure ; Substitut de repas sous forme de barres, poudres et boissons à base de chocolat, de céréales, de café, de thé, d’arômes alimentaires, d’amidon à usage alimentaire, de fécule à usage alimentaire, de préparation aromatique à usage alimentaire, d’épices, de farine, de levure ; Substituts de repas liquides, solides ou en poudre à base de chocolat, de céréales, de café, de thé, d’arômes alimentaires, d’amidon à usage alimentaire, de fécule à usage alimentaire, de préparation aromatique à usage alimentaire, d’épices, de farine, de levure » ;

–        classe 32 : « Concentrés et poudres pour la préparation des boissons non alcoolisées ; concentrés pour la préparation de boissons aux fruits ; préparations pour faire des boissons ; boissons énergisantes ; boissons enrichies d’un point de vue nutritionnel » ;

–        classe 43 : « Services de planification de repas sous format numérique, accessibles par le biais de l’internet ; Services de préparation de substituts de repas ».

4        Le 5 février 2020, Participant Sports LLC, le prédécesseur en droit de l’intervenante, The Feed.com, Inc., a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et les services mentionnés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était fondée sur les marques suivantes :

–        la marque de l’Union européenne figurative reproduite ci-après, enregistrée le 25 janvier 2020 sous le numéro 18081211 et désignant des produits et des services relevant de classes 9, 18, 21, 25, 35, 39 et 42 et correspondant, pour les services relevant de la classe 35, à la description suivante : « Services informatisés de commande en ligne et services de magasins de vente au détail en ligne et liés à la vente d’aliments en tant que substituts de repas, barres nutritionnelles, gels, aliments énergétiques, café, boissons énergétiques, poudres pour boissons énergétiques, mélanges pour boissons énergétiques, mélanges pour boissons, protéines, compléments et boissons nutritionnels, mélanges, compléments et boissons, boissons (en poudre ou lyophilisées), crèmes de chamois, crèmes à raser, embrocations (crèmes), lotions pour le soulagement de la douleur et la guérison, écrans solaires, livres de cuisine, bidons de sport, vêtements, chapeaux, rouleaux en mousse, rouleaux à usage thérapeutique, rouleaux thérapeutiques, manchons pour rouleaux thérapeutiques, étuis de transport pour rouleaux thérapeutiques, distributeurs de bâtonnets de sel et vitamines ; Services de magasins de vente au détail en ligne d’aliments en tant que substituts de repas, barres nutritionnelles, gels, aliments énergétiques, café, boissons énergétiques, poudres pour boissons énergétiques, mélanges pour boissons énergétiques, mélanges pour boissons, protéines, compléments et boissons nutritionnels, mélanges, compléments et boissons, boissons (en poudre ou lyophilisées), crèmes de chamois, crèmes à raser, embrocations (crèmes), lotions pour le soulagement de la douleur et la guérison, écrans solaires, livres de cuisine, bidons de sport, vêtements, chapeaux, rouleaux en mousse, rouleaux à usage thérapeutique, rouleaux thérapeutiques, manchons pour rouleaux thérapeutiques, étuis de transport pour rouleaux thérapeutiques, distributeurs de bâtonnets de sel et vitamines ; Services de vente d’aliments en tant que substituts de repas, barres nutritionnelles, gels, aliments énergétiques, café, boissons énergétiques, poudres pour boissons énergétiques, mélanges pour boissons énergétiques, mélanges pour boissons, protéines, compléments et boissons nutritionnels, mélanges, compléments et boissons, boissons (en poudre ou lyophilisées), crèmes de chamois, crèmes à raser, embrocations (crèmes), lotions pour le soulagement de la douleur et la guérison, écrans solaires, livres de cuisine, bidons de sport, vêtements, chapeaux, rouleaux en mousse, rouleaux à usage thérapeutique, rouleaux thérapeutiques, manchons pour rouleaux thérapeutiques, étuis de transport pour rouleaux thérapeutiques, distributeurs de bâtonnets de sel et vitamines ; Services de commande informatisés en ligne ; Ventes alimentaires par abonnement ; Services de vente de boissons (en poudre ou lyophilisées) par abonnement ; Services d’exécution de commande de nourriture par abonnement, à savoir services de vente au détail liés à la vente de boîtes par abonnement contenant de la nourriture ; Services de vente au détail de boîtes par abonnement contenant des aliments ; Services de secrétariat et d’administration pour la prise et le traitement de commandes de nourriture par abonnement ; Services d’exécution de commandes de boissons (en poudre ou lyophilisées) par abonnement, à savoir services de vente au détail liés à la vente de boîtes par abonnement contenant des boissons (en poudre ou lyophilisées) ; Services de vente au détail liés à la vente de boîtes par abonnement contenant des boissons (en poudre ou lyophilisées) ; Services de secrétariat et d’administration pour la prise et le traitement de commandes de boissons (en poudre ou lyophilisées) par abonnement ; Services automatiques de placement et de vente au détail liés à la vente de boîtes par abonnement contenant des aliments en tant que substituts de repas, des barres nutritionnelles, des gels, des aliments énergétiques, du café, des boissons énergétiques, des poudres pour boissons énergétiques, des mélanges pour boissons énergétiques, des mélanges pour boissons, des protéines, des compléments et boissons nutritionnels, des boissons (en poudre ou lyophilisées), des crèmes de chamois, des crèmes à raser, des embrocations (crèmes), des lotions pour le soulagement de la douleur et la guérison, des écrans solaires, des livres de cuisine, des bidons de sport, des vêtements, des chapeaux, des rouleaux en mousse, des rouleaux à usage thérapeutique, des rouleaux thérapeutiques, des manchons pour rouleaux thérapeutiques, des étuis de transport pour rouleaux thérapeutiques, des distributeurs de bâtonnets de sel et des vitamines ; Services d’abonnement pour aliments en tant que substituts de repas, barres nutritionnelles, gels, aliments énergétiques, café, boissons énergétiques, poudres pour boissons énergétiques, mélanges pour boissons énergétiques, mélanges pour boissons, protéines, compléments et boissons nutritionnels, boissons (en poudre ou lyophilisées), crèmes de chamois, crèmes à raser, embrocations (crèmes), lotions pour le soulagement de la douleur et la guérison, écrans solaires, livres de cuisine, bidons de sport, vêtements, chapeaux, rouleaux en mousse, rouleaux à usage thérapeutique, rouleaux thérapeutiques, manchons pour rouleaux thérapeutiques, étuis de transport pour rouleaux thérapeutiques, distributeurs de bâtonnets de sel et vitamines ; Fourniture d’informations concernant des produits de consommation tels que des aliments ou des boissons » :

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–        la marque de l’Union européenne verbale THE FEED, enregistrée le 9 juin 2014 sous le numéro 12392651 et désignant, notamment, des services relevant des classes 35 et 39.

6        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

7        Le 2 février 2022, la division d’opposition a fait droit à l’opposition et a rejeté la demande de marque dans son intégralité.

8        Le 1er avril 2022, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

9        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours. Plus particulièrement, elle a considéré qu’un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, était établi, compte tenu, notamment, de la similitude des produits et des services désignés, respectivement, par la marque de l’Union européenne figurative The Feed. et par la marque demandée et du fait que lesdites marques présentaient un degré élevé de similitude sur les plans visuel et phonétique et étaient identiques sur le plan conceptuel.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens, y compris à ceux afférents à la procédure devant l’EUIPO.

11      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens dans l’hypothèse où une audience serait tenue.

12      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, en ce que la chambre de recours aurait conclu à tort à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit.

14      L’EUIPO et l’intervenante contestent l’argumentation de la requérante.

15      À titre liminaire, il convient de constater que, si la requérante fait référence à la marque de l’Union européenne verbale THE FEED, la chambre de recours n’a pas examiné l’existence d’un risque de confusion au regard de cette marque. Dès lors, les arguments de la requérante à cet égard doivent être écartés comme inopérants.

16      Ensuite, il y a lieu de rappeler que, aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

17      Constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

 Sur le public pertinent

18      La chambre de recours a considéré que le public pertinent était notamment composé du grand public de l’Union européenne, dont le niveau d’attention était moyen, s’agissant des produits relevant des classes 29, 30 et 32 désignés par la marque demandée, et élevé, s’agissant des services relevant de la classe 43 désignés par cette même marque. Cette appréciation n’est pas contestée par la requérante.

19      De plus, la chambre de recours a considéré que le territoire pertinent était celui de l’Union, dans la mesure où l’opposition était fondée sur une marque de l’Union européenne. Cette appréciation n’est pas non plus contestée par la requérante.

 Sur la comparaison des produits et des services en cause

20      Pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 14 mai 2013, Sanco/OHMI – Marsalman (Représentation d’un poulet), T‑249/11, EU:T:2013:238, point 21 et jurisprudence citée].

21      En l’espèce, d’une part, la chambre de recours a considéré, au point 32 de la décision attaquée, que les produits relevant des classes 29, 30 et 32 désignés par la marque demandée étaient similaires à un degré moyen à certains services relevant de la classe 35 désignés par la marque antérieure.

22      D’autre part, la chambre de recours a considéré, au point 35 de la décision attaquée, que les services relevant de la classe 43 désignés par la marque demandée présentaient un rapport de complémentarité avec certains des services visés par la marque antérieure compris dans la classe 35. Elle en a conclu que ces services étaient similaires à un faible degré.

23      La requérante soutient que, non seulement les marques en conflit couvrent des classes de produits et de services différentes, mais également que les catégories elles-mêmes de produits et de services couverts par leurs désignations respectives sont globalement différentes. À cet égard, elle allègue en particulier, premièrement, que, même si les services couverts par la marque antérieure relevant des classes 35, 39 et 42 sont susceptibles d’avoir un lien indirect avec les aliments et les boissons, il n’en demeure pas moins que les activités couvertes par ladite marque doivent être considérées comme des services logistiques pour la mise en service d’une plateforme de vente en ligne, la livraison de produits et les logiciels connexes. Elle ajoute que la marque demandée couvre, quant à elle, des produits alimentaires qui constituent une catégorie très spécifique de biens de consommation produits par des entités spécialisées dans ce secteur particulier. Deuxièmement, elle fait valoir que les services désignés par la marque antérieure ne ciblent que le consommateur des États-Unis et que cette marque n’a jamais été utilisée directement pour des aliments ou pour des boissons.

24      Premièrement, il y a lieu de rappeler que les services relevant de la classe 35 couverts par la marque antérieure comprennent notamment des services de magasins de vente au détail en ligne liés aux substituts de repas, aux aliments énergétiques, aux barres nutritionnelles, aux gels, aux préparations, aux compléments et aux boissons. S’agissant des produits relevant des classes 29 et 30 visés par la marque demandée, ces produits comprennent différents substituts de repas présentés sous différentes formes telles que des barres, des poudres et des boissons qui contiennent des ingrédients d’origine animale ou végétale. Les produits compris dans la classe 32 visés par la marque demandée incluent quant à eux des concentrés et des poudres pour la préparation de boissons non alcoolisées, aux fruits ou enrichies d’un point de vue nutritionnel ainsi que des boissons énergisantes et des préparations pour faire des boissons.

25      D’emblée, il convient de rappeler que les principes applicables à la comparaison de produits s’appliquent également à la comparaison entre les produits et les services. Certes, du fait de leur nature même, les produits sont généralement différents des services, mais il n’en demeure pas moins qu’ils peuvent être complémentaires ou que les services peuvent avoir le même objet ou la même destination que les produits et se trouver, de ce fait, en concurrence avec ces derniers. Il s’ensuit que, dans certaines circonstances, une similitude peut être constatée entre des produits et des services [voir arrêt du 7 septembre 2016, Victor International/EUIPO – Ovejero Jiménez et Becerra Guibert (VICTOR), T‑204/14, non publié, EU:T:2016:448, point 105 et jurisprudence citée].

26      En l’espèce, à la lumière des éléments cités au point 24 ci-dessus, il convient de considérer que les services couverts par la marque antérieure relevant de la classe 35 présentent un lien indirect avec les produits désignés par la marque demandée. En effet, il y a lieu de constater que, même s’il est vrai que la nature des produits et des services en cause est différente, il n’en demeure pas moins que ces derniers ont la même finalité, dans la mesure où ils sont destinés à la consommation humaine et visent à satisfaire les besoins nutritionnels et peuvent s’adresser au même public pertinent.

27      En outre, ainsi que l’a rappelé la chambre de recours, des produits et des services, tels que ceux en cause, peuvent également être considérés comme étant similaires étant donné qu’ils sont complémentaires et que la prestation des services est généralement proposée dans les mêmes lieux que ceux où les produits sont proposés à la vente.

28      En effet, il ressort de la jurisprudence que les produits ou les services complémentaires sont ceux entre lesquels existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits ou de la fourniture de ces services incombe à la même entreprise [arrêts du 1er mars 2005, Sergio Rossi/OHMI – Sissi Rossi (SISSI ROSSI), T‑169/03, EU:T:2005:72, point 60 ; du 15 mars 2006, Eurodrive Services and Distribution/OHMI – Gómez Frías (euroMASTER), T‑31/04, non publié, EU:T:2006:81, point 35, et du 17 juin 2008, El Corte Inglés/OHMI – Abril Sánchez et Ricote Saugar (Boomerang TV), T‑420/03, EU:T:2008:203, point 98].

29      À cet égard, il convient de relever qu’il existe un lien étroit entre les services et les produits en cause, dans la mesure où ces produits sont indispensables pour la prestation desdits services, qui sont des services de vente et d’exécution de commande. Ce lien étroit est donc le signe de l’existence d’un rapport de complémentarité entre les produits et les services en cause.

30      Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, il existe une similitude entre des produits et les services de vente au détail qui portent sur ces produits [arrêts du 5 juillet 2012, Comercial Losan/OHMI – McDonald’s International Property (Mc. Baby), T‑466/09, non publié, EU:T:2012:346, point 24, et du 16 octobre 2013, El Corte Inglés/OHMI – Sohawon (fRee YOUR STYLe.), T‑282/12, non publié, EU:T:2013:533, point 37 ; voir également, en ce sens, arrêt du 24 septembre 2008, Oakley/OHMI – Venticinque (O STORE), T‑116/06, EU:T:2008:399, points 42 à 58].

31      En l’espèce, force est de constater que les services relevant de la classe 35 visés par la marque antérieure couvrent les produits relevant des classes 29, 30 et 32 visés par la marque demandée. Dès lors, il existe une similitude entre les services de vente au détail visés par la marque antérieure et les produits visés par la marque demandée, à savoir les aliments et les boissons.

32      De surcroît, il convient de souligner que les services couverts par la marque antérieure constituent un des possibles canaux de distribution des produits couverts par la marque demandée. Cette circonstance renforce donc leur similitude (voir, en ce sens, arrêt du 16 octobre 2013, fRee YOUR STYLe., T‑282/12, non publié, EU:T:2013:533, point 38).

33      Partant, il y a lieu de considérer que c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu, au point 32 de la décision attaquée, que les produits compris dans les classes 29, 30 et 32 couverts par la marque demandée présentaient un degré moyen de similitude avec les services de magasins de vente au détail en ligne d’aliments et de boissons relevant de la classe 35 visés par la marque antérieure.

34      En outre, parmi les services relevant de la classe 35 couverts par la marque antérieure se trouvent également les ventes alimentaires par abonnement, les services de vente de boissons (en poudre ou lyophilisés) par abonnement, les services d’exécution de commande de nourriture par abonnement, à savoir les services de vente au détail liés à la vente de boîtes par abonnement contenant de la nourriture, et la fourniture d’informations sur des produits de consommation tels que des aliments ou des boissons.

35      Les services relevant de la classe 43 visés par la marque demandée comprennent quant à eux des services de planification de repas sous format numérique, accessibles par le biais de l’internet, et des services de préparation de substituts de repas.

36      À cet égard, il y a tout d’abord lieu de constater que les services en cause ont en commun les produits fournis dans ce cadre, à savoir des repas, des substituts de repas, et des régimes alimentaires. La chambre de recours pouvait donc considérer à juste titre que ces services relevaient du même domaine commercial. Ensuite, il est vrai que, comme l’a affirmé la chambre de recours, les entreprises qui fournissent généralement des services de planification de repas, de préparation de repas et de préparation de substituts de repas proposent également des services tels que la génération de listes de courses et d’achats pour les utilisateurs, la vente directe de produits ou la fourniture d’informations sur des produits de consommation. Les consommateurs sont donc susceptibles, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence mentionnée au point 28 ci-dessus, de supposer que la responsabilité de la fourniture des services relevant de la classe 43 incombe à la même entreprise que celle responsable de la vente alimentaire par abonnement relevant de la classe 35.

37      Enfin, il y a lieu de constater que, en l’espèce, ces services peuvent s’adresser au même public pertinent et être vendus par les mêmes canaux de distribution.

38      Dans ces conditions, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que les services relevant de la classe 43 visés par la marque demandée et ceux compris dans la classe 35 visés par la marque antérieure présentaient un faible degré de similitude.

39      Dès lors, il y a lieu de rejeter l’argument de la requérante.

40      Deuxièmement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la marque antérieure ne cible que les consommateurs des États-Unis et que celle-ci n’a jamais été utilisée directement pour des aliments ou des boissons, il ressort de la jurisprudence que, afin d’apprécier la similitude des produits en cause, il y a lieu de prendre en compte le groupe de produits protégé par les marques en conflit et non les produits effectivement commercialisés sous ces marques [voir, en ce sens, arrêt du 16 juin 2010, Kureha/OHMI – Sanofi-Aventis (KREMEZIN), T‑487/08, non publié, EU:T:2010:237, point 71].

41      Cet argument doit, par conséquent, être écarté.

42      Dans ces conditions, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu que les produits relevant des classes 29, 30 et 32 visés par la marque demandée présentaient un degré moyen de similitude avec les services visés par la marque antérieure compris dans la classe 35 et que, s’agissant des services compris dans la classe 43, ces derniers étaient similaires à un faible degré avec les services visés par la marque antérieure compris dans la classe 35, et ce indépendamment de l’argumentation de la requérante relative aux services relevant des classes 39 et 42 désignés par la marque antérieure.

 Sur la comparaison des signes en conflit

43      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

 Sur les éléments distinctifs des marques en conflit

44      Il convient de rappeler que, afin d’apprécier le caractère distinctif d’un élément composant une marque, il y a lieu d’examiner l’aptitude plus ou moins grande de cet élément à contribuer à identifier les produits et services désignés par cette marque comme provenant d’une entreprise déterminée, et donc à distinguer ces produits et services de ceux d’autres entreprises. Lors de cette appréciation, il convient de prendre en considération notamment les qualités intrinsèques de l’élément en cause au regard de la question de savoir si celui-ci est ou non dénué de tout caractère descriptif des produits et services désignés par ladite marque [voir, en ce sens, arrêt du 3 septembre 2010, Companhia Muller de Bebidas/OHMI – Missiato Industria e Comercio (61 A NOSSA ALEGRIA), T‑472/08, EU:T:2010:347, point 47 et jurisprudence citée].

45      En l’espèce, la chambre de recours a considéré, aux points 45 à 47 de la décision attaquée, que, tant dans la marque antérieure que dans la marque demandée, pour la partie non anglophone du public pertinent, le mot « feed » serait perçu comme étant dépourvu de signification et possédait donc un degré normal de caractère distinctif. En revanche, pour la partie anglophone du public pertinent, le mot « feed » serait compris comme signifiant « the act or an instance of feeding » (l’acte ou une situation d’alimentation). Selon la chambre de recours, pour cette partie du public pertinent, le mot « feed » décrivait les caractéristiques des produits et des services concernés, ou y faisait allusion, de sorte qu’il était faiblement distinctif.

46      La requérante soutient que le mot « feed » est faiblement distinctif, dans la mesure où il décrit directement la nature et la caractéristique des produits et des services en cause. Selon elle, il s’agit d’un mot anglais de base issu du mot « food », qui est très couramment utilisé dans l’Union, y compris dans les États membres dont l’anglais n’est pas la langue officielle, et que, dès lors, il ne sera pas perçu comme dépourvu de signification par les consommateurs non anglophones.

47      En ce qui concerne le mot « the » présent uniquement dans la marque antérieure, la requérante fait valoir que ce terme est aussi important, voire plus, que le mot « feed », dans la mesure où les consommateurs ont tendance à focaliser leur attention sur le début des marques étant donné qu’ils lisent de gauche à droite.

48      À cet égard, il est indifférent que la signification du mot « feed » soit comprise par le public pertinent, dans la mesure où, contrairement à ce que soutient la requérante, cette circonstance n’influencera pas la perception d’ensemble de la marque antérieure.

49      Ainsi, si le public pertinent, anglophone ou non anglophone, comprend la signification du mot « feed », cet élément, qu’il compose la marque demandée ou la marque antérieure, sera, comme le soutient la requérante, faiblement distinctif, étant donné qu’il sera perçu comme faisant allusion aux produits et aux services en cause. Si le public pertinent ne comprend pas la signification du mot « feed », alors cet élément, qu’il compose la marque demandée ou la marque antérieure, possédera un degré normal de caractère distinctif.

50      Dans les deux cas, le mot « the », composant de la marque antérieure, sera reconnu par le public pertinent comme étant l’article défini couramment utilisé en anglais qui annonce simplement le mot qui suit, de sorte que cet élément ne peut posséder qu’un faible caractère distinctif.

51      Si, certes, comme le fait valoir la requérante, le début d’une marque peut être susceptible de retenir davantage l’attention du consommateur que le reste de la marque, une telle considération ne saurait prévaloir dans tous les cas [voir, en ce sens, arrêt du 9 décembre 2020, Almea/EUIPO – Sanacorp Pharmahandel (Almea), T‑190/20, non publié, EU:T:2020:597, point 35 et jurisprudence citée].

52      En l’espèce, rien dans la signification, la disposition ou la stylisation du mot « the » n’est de nature à attirer l’attention du public pertinent. Ainsi, contrairement à ce que soutient la requérante, le mot « the », composant de la marque antérieure, ne retiendra pas davantage l’attention du public pertinent que le mot « feed » qui le suit.

53      Dès lors, s’agissant de la marque antérieure, le mot « feed » revêtira soit un caractère distinctif faible, soit un caractère distinctif normal selon que le public pertinent comprendra ou non sa signification, le mot « the » conservera un caractère distinctif faible en toutes circonstances et le point, lequel n’est qu’un signe de ponctuation, n’attirera que peu l’attention du public pertinent. S’agissant de la marque demandée, celle-ci contient, comme l’a observé la chambre de recours, le mot « feed » dans une police de caractères similaire. Les mêmes constats s’appliquent donc à cette marque.

54      Dans ces conditions, il n’y a pas lieu de remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours concernant le caractère distinctif des divers composants des marques en conflit.

 Sur la similitude visuelle

55      La chambre de recours a considéré, en substance, que les marques en conflit présentaient un degré élevé de similitude visuelle. Elle a relevé que, si la marque demandée se distinguait de la marque antérieure par l’absence du terme anglais « the », ces deux marques partageaient néanmoins deux éléments importants, à savoir l’élément verbal « feed » et le point de ponctuation.

56      La requérante soutient que les marques en conflit ne sont pas similaires sur le plan visuel. Elle fait valoir que les marques en conflit ont des longueurs et des structures globales différentes. Elle ajoute que la marque demandée se compose d’un mot de quatre lettres suivi d’un point de ponctuation et stylisé dans une fine police de caractères de couleur noire alors que la marque antérieure est composée de deux mots de trois et quatre lettres, soit un total de sept lettres, suivis d’un point et stylisés dans une police de caractère gras de couleur noire.

57      Tout d’abord, il convient de constater que la marque demandée reproduit, dans une police de caractères similaire et plutôt standard, la marque antérieure, à l’exception du mot « the ». S’agissant dudit mot, celui-ci sera compris comme un simple article défini par le public pertinent, dans la mesure où il n’a que peu d’incidence sur la comparaison visuelle.

58      Ensuite, il y a lieu de constater que les marques en conflit sont composées de sept lettres pour la marque antérieure et de quatre lettres pour la marque demandée, dont quatre en commun et placées dans le même ordre. Le point de ponctuation est également commun aux marques en conflit.

59      Ainsi, la seule différence réside dans la partie initiale des marques en conflit. À cet égard, s’il est vrai, comme le soutient la requérante, que, selon la jurisprudence, le public pertinent prêtera généralement une plus grande attention aux débuts des marques qu’à leurs fins, cela ne signifie pas, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 51 ci-dessus, que les autres éléments ou les autres parties sont dénués de pertinence et que ces marques ne peuvent pas être considérées comme similaires sur le plan visuel. En l’espèce, dans la mesure où les autres lettres et le point de ponctuation des marques en conflit sont identiques et placés dans le même ordre, la différence créée par les premières lettres divergentes des marques en conflit ne suffit pas à compenser la similitude visuelle découlant de la présence commune des autres lettres.

60       En effet, l’élément verbal « feed » constitue l’élément le plus important des marques en conflit, de sorte que la présence de l’article « the » dans la marque antérieure n’est pas de nature à altérer de manière significative la perception de cette marque.

61      Enfin, contrairement aux allégations de la requérante, la représentation graphique des lettres dans une police de caractère légèrement différente peut facilement passer inaperçue auprès du public pertinent. Ainsi, force est de constater que cette représentation graphique est susceptible d’avoir un impact limité et n’attirera pas l’attention du public pertinent.

62      Dans ces conditions, il y a lieu de constater que la chambre de recours a considéré, à juste titre, que les marques en conflit présentaient un degré élevé de similitude visuelle.

 Sur la similitude phonétique

63      La chambre de recours a considéré que la prononciation de l’élément verbal « feed » était identique dans les deux marques en conflit et que la syllabe supplémentaire « the » incluse dans la marque antérieure avait un impact très limité. En conséquence, elle a conclu que ces marques étaient très similaires sur le plan phonétique.

64      La requérante fait valoir que la marque demandée ne contient qu’une seule syllabe, alors que la marque antérieure en contient deux. Elle ajoute que, dans la mesure où les marques en conflit sont de longueurs différentes et diffèrent considérablement au niveau de leurs premières syllabes, il existe d’importantes différences phonétiques entre elles.

65      En l’espèce, premièrement, il y a lieu de relever que la différence se situe dans la partie initiale de la marque antérieure, composée de l’article défini « the ». Comme la chambre de recours l’a fait observer en substance et à juste titre, au point 48 de la décision attaquée, sans que la requérante le conteste, cet article défini utilisé pour mettre en valeur le nom commun qui le suit aura un impact limité sur l’impression phonétique produite par la marque antérieure.

66      Deuxièmement, il y a lieu de constater que, si les marques en conflit comportent un nombre de syllabes différent, à savoir une et deux respectivement, cela ne saurait automatiquement empêcher de conclure à une similitude élevée entre elles. En effet, lesdites marques coïncident par quatre lettres sur sept et toutes les lettres identiques sont clairement audibles lorsque ces marques sont prononcées. Dès lors, il y a lieu de constater que lesdites différences ne sont pas suffisantes pour neutraliser la similitude phonétique des marques en conflit.

67      Dans ces conditions, il convient de relever que la chambre de recours a considéré, à juste titre, que les marques en conflit étaient similaires à un degré élevé sur le plan phonétique.

 Sur la similitude conceptuelle

68      La chambre de recours a considéré que, dans la mesure où l’élément verbal « feed » était présent dans les marques en conflit, ces marques étaient identiques sur le plan conceptuel.

69      La requérante avance que, même si les marques en conflit ont en commun l’élément verbal « feed », elles ont des significations globales différentes. Ainsi, la marque demandée contiendrait uniquement le mot « feed » et serait perçue comme un verbe, alors que la marque antérieure contiendrait quant à elle le mot « feed » précédé de l’article défini « the » et serait perçue comme un substantif.

70      Sans qu’il soit besoin de s’interroger sur la question de savoir si, dans la marque antérieure, le mot « feed » sera perçu comme un verbe ou comme un nom commun, il y a lieu de constater que, ainsi qu’il ressort du point 49 ci-dessus, la partie du public pertinent qui comprendra ce mot comprendra ce seul mot ou la combinaison des mots anglais « the » et « feed » comme renvoyant à une caractéristique des produits et des services en cause, à savoir qu’ils ont trait à la nourriture et aux boissons. Ainsi, pour le public pertinent qui comprendra le mot « feed », les marques en conflit seront au moins similaires à un degré élevé sur le plan conceptuel. S’agissant de la partie du public pertinent qui ne comprendra pas le mot « feed », les marques en conflit ne seront pas comparables sur le plan conceptuel, étant donné que le mot « feed » ne véhicule aucun concept.

71      Dans ces conditions, il y a lieu d’écarter l’argument de la requérante selon lequel les marques en conflit seraient différentes sur le plan conceptuel.

 Sur le caractère distinctif de la marque antérieure

72      Ainsi qu’il découle du considérant 11 du règlement 2017/1001, l’appréciation du risque de confusion dépend de nombreux facteurs et notamment de la connaissance qu’a le public de la marque antérieure sur le marché en cause. Comme le risque de confusion est d’autant plus étendu que le caractère distinctif de cette marque s’avère important, les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance qu’en a le public, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (voir, par analogie, arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 24 ; du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 18, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 20).

73      La chambre de recours a considéré que, s’agissant de la partie du public pertinent qui ne comprend pas le mot « feed », la marque antérieure possède un caractère distinctif intrinsèque normal et que, s’agissant de la partie du public pertinent qui comprend ce terme, la marque antérieure possède un caractère distinctif intrinsèque faible. De plus, elle a souligné que les marques antérieures enregistrées étaient présumées posséder au moins un degré minimal de caractère distinctif intrinsèque, conformément à la jurisprudence issue de l’arrêt du 24 mai 2012, Formula One Licensing/OHMI (C‑196/11 P, EU:C:2012:314).

74      La requérante allègue tout d’abord que la marque antérieure ne jouit pas d’une renommée. Ensuite, elle conclut au caractère, tout au plus, « très faiblement distinctif » de la marque antérieure, en faisant notamment valoir qu’elle est très faiblement distinctive eu égard aux produits et aux services en cause et que les termes « the » et « feed » comportent une signification descriptive.

75      À cet égard, il convient de rappeler que la question de savoir si une marque antérieure possède au moins le minimum de caractère distinctif requis pour son enregistrement ne peut pas être examinée dans le cadre d’une procédure d’opposition, dont l’objet est limité à l’examen des motifs relatifs de refus d’enregistrement de la marque demandée prévus à l’article 8 du règlement no 207/2009. En effet, la validité d’une marque antérieure ne peut pas être mise en cause dans le cadre d’une procédure d’enregistrement d’une marque de l’Union européenne [voir, en ce sens, arrêt du 24 septembre 2015, Primagaz/OHMI – Reeh (PRIMA KLIMA), T‑195/14, non publié, EU:T:2015:681, points 95 et 96 et jurisprudence citée].

76      Compte tenu de ce qui précède, en l’espèce, la chambre de recours était fondée à se prévaloir, comme elle l’a fait au point 61 de la décision attaquée, de la jurisprudence issue des points 40 à 47 de l’arrêt du 24 mai 2012, Formula One Licensing/OHMI (C‑196/11 P, EU:C:2012:314) [voir, en ce sens, arrêt du 12 mai 2016, Red Lemon/EUIPO – Lidl Stiftung (ABTRONIC), T‑643/14, non publié, EU:T:2016:294, point 57 et jurisprudence citée]. En effet, en toute hypothèse, la chambre de recours était en droit de considérer que la marque antérieure présentait un caractère distinctif intrinsèque minimal du seul fait qu’elle avait été enregistrée.

77      Par conséquent, il y a lieu de prendre en compte le caractère distinctif minimal de la marque antérieure et d’écarter les arguments de la requérante à cet égard.

 Sur l’appréciation globale du risque de confusion

78      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

79      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que le risque de confusion était établi, compte tenu, en substance, de la similitude des produits et des services en cause, de l’identité des marques en conflit sur le plan conceptuel et du degré élevé des similitudes visuelle et phonétique de ces marques. Elle a par ailleurs souligné que cette constatation ne saurait être remise en cause par le niveau d’attention plus élevé du public à l’égard de certains des services compris dans la classe 43, tels que les services de planification de repas.

80      La requérante rétorque que la chambre de recours a conclu à tort à l’existence d’un risque de confusion. Elle fait valoir à cet égard que les différences entre les marques en conflit produisent une impression d’ensemble différente et qu’il n’y aura pas de risque que le public pertinent puisse croire que les produits et les services en cause ont la même origine.

81      Tout d’abord, il convient de rappeler que les produits relevant des classes 29, 30 et 32 présentent un degré moyen de similitude avec les services visés par la marque antérieure compris dans la classe 35 et que, s’agissant des services compris dans la classe 43, ces derniers sont similaires à un faible degré avec les services visés par la marque antérieure compris dans la classe 35.

82      S’agissant de la similitude des marques en conflit, il convient de constater que, comme indiqué aux points 62 et 67 ci-dessus, c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a constaté que la marque antérieure présentait un degré de similitude visuelle et phonétique élevé avec la marque demandée. Quant à la comparaison des marques en conflit sur le plan conceptuel, il convient de rappeler que, comme il ressort du point 70 ci-dessus, celles-ci sont, pour une partie du public pertinent, similaires conceptuellement au moins à un degré élevé, tandis que, pour une autre partie de celui-ci, elles ne sont pas comparables.

83      Dès lors, quand bien même il existe un faible degré de similitude entre les services de la classe 35 et ceux de la classe 43, que le niveau d’attention du public pertinent sur ces derniers est élevé et que la marque antérieure est faiblement distinctive à l’égard de la partie du public comprenant le mot « feed », il y a lieu de constater que, dans la mesure où la marque demandée reproduit presque exactement deux éléments de la marque antérieure, il existera dans l’esprit de ce public, qui devra se fier à l’image imparfaite qu’il a gardée en mémoire, un risque de confusion. Le public pertinent pourra raisonnablement croire que les services en cause proviennent, si ce n’est de la même entreprise, d’entreprises économiquement liées.

84      Il en est, a fortiori, de même pour les produits des classes 29, 30 et 32 qui sont moyennement similaires aux services de la classe 35 et pour lesquels le niveau d’attention du public pertinent sera moyen.

85      Contrairement à ce que soutient la requérante, le fait que la marque antérieure contienne, à l’inverse de la marque demandée, le mot « the » ne permet pas à celle-ci de produire une impression globale à ce point différente de celle de la marque demandée qu’elle permettrait au public pertinent de savoir que les produits et les services en cause proviennent de deux entreprises différentes.

86      Partant, eu égard à l’interdépendance entre la similitude des produits et des services et la similitude des marques, il convient de considérer, dans le cadre d’une appréciation globale, que c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu qu’il existait un risque de confusion entre les marques en conflit, malgré le fait que la marque antérieure a un caractère distinctif faible à l’égard de la partie du public comprenant le mot « feed » et que le niveau d’attention de celui-ci est élevé pour les services relevant de la classe 43 désignés par la marque demandée.

87      Il résulte de ce qui précède qu’il convient d’écarter le moyen unique de la requérante et, par voie de conséquence, de rejeter le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

88      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

89      Une audience ayant eu lieu et la requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Feed SA est condamnée aux dépens.

Kowalik-Bańczyk

Hesse

Ricziová

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 31 janvier 2024.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.