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CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. PHILIPPE LÉger

présentées le 28 septembre 2006 (1)

Affaire C‑283/05

ASML Netherlands BV

contre

Semiconductor Industry Services GmbH (SEMIS)

[demande de décision préjudicielle formée par l’Oberster Gerichtshof (Autriche)]

«Coopération judiciaire – Règlement (CE) n° 44/2001 – Article 34, point 2 – Motif de non‑reconnaissance d’une décision rendue dans un autre État membre – Violation des droits de la défense – Exception à l’application de ce motif de non‑reconnaissance – Possibilité pour le défendeur défaillant d’exercer un recours contre la décision rendue par défaut – Conditions – Signification ou notification de la décision»





1.        La présente procédure préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 34, point 2, du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil (2), qui prévoit dans quelles conditions un État membre peut s’opposer à la reconnaissance d’une décision de justice obtenue par défaut dans un autre État membre lorsque les droits de la défense ont été méconnus.

2.        Cette disposition énonce ainsi que ce motif de refus de reconnaissance ne trouve pas à s’appliquer lorsque le défendeur défaillant n’a pas exercé de recours à l’encontre de la décision rendue contre lui alors qu’il était en mesure de le faire.

3.        L’Oberster Gerichtshof (Autriche), la juridiction suprême de l’ordre judiciaire autrichien, invite la Cour à préciser le contenu de la condition selon laquelle le défendeur était en mesure de faire un recours. Elle cherche à savoir si cette condition doit être interprétée en ce sens qu’il suffit que le défendeur défaillant ait eu connaissance de l’existence de la décision rendue par défaut ou bien s’il est nécessaire que celle-ci lui ait été signifiée ou notifiée.

I –    Le cadre juridique

4.        Les dispositions de droit communautaire pertinentes pour la solution du litige au principal portent sur les trois points suivants: les garanties des droits de la défense au stade du procès initial dans l’État membre d’origine, ces garanties au stade de la reconnaissance et de l’exécution de la décision dans l’État requis et, enfin, la procédure applicable à l’exécution de celle-ci.

5.        Ces dispositions figurent principalement dans le règlement n° 44/2001. En ce qui concerne le contrôle, par le juge de l’État membre d’origine, de la convocation du défendeur défaillant, les dispositions pertinentes se trouvent aussi dans le règlement (CE) n° 1348/2000 du Conseil (3).

6.        Les règlements nos 44/2001 et 1348/2000 ont été adoptés par le Conseil de l’Union européenne sur le fondement des dispositions du titre IV du traité CE, qui donnent compétence à la Communauté pour adopter les mesures relevant de la coopération judiciaire en matière civile qui sont nécessaires au bon fonctionnement du marché commun.

7.        La coopération judiciaire en matière civile a relevé de conventions internationales jusqu’au traité d’Amsterdam. Le traité de Maastricht en a fait une question d’intérêt commun aux États membres, en l’intégrant à son titre VI, portant sur la coopération dans les domaines de la justice et des affaires intérieures et instituant ce qu’il a été convenu d’appeler le «troisième pilier» dans l’ordre juridique communautaire.

8.        Le traité d’Amsterdam, entré en vigueur le 1er mai 1999, a «communautarisé» cette matière, en l’intégrant au titre IV du traité CE. La reconnaissance de la compétence de la Communauté dans ce domaine a conduit le législateur communautaire à substituer des règlements aux conventions internationales existantes.

9.        Le règlement n° 44/2001, entré en vigueur le 1er mars 2002, a remplacé ainsi la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (4) dans tous les États membres ayant choisi de participer aux mesures prises en vertu de ce titre IV (5).

10.      Le règlement n° 44/2001 s’inspire largement de la convention de Bruxelles, avec laquelle le législateur communautaire a entendu assurer une véritable continuité (6). Il a pour objet d’unifier les règles de conflit de compétence en matière civile et commerciale et de simplifier les formalités en vue de la reconnaissance et de l’exécution rapides et simples des décisions rendues dans un autre État membre (7).

11.      De même, il reprend la plupart des règles de la convention de Bruxelles et ses dispositions sont le plus souvent analogues à l’article correspondant dans ladite convention.

12.      Le règlement n° 1348/2000, quant à lui, reprend largement le contenu de la convention établie par acte du Conseil du 26 mai 1997, relative à la signification et à la notification dans les États membres de l’Union européenne des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale (8).

13.      Cette convention, qui n’est pas entrée en vigueur, s’inspire elle‑même de la convention relative à la signification et à la notification à l’étranger des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale, conclue à La Haye le 15 novembre 1965 (9).

14.      Le règlement n° 1348/2000, entré en vigueur le 31 mai 2001, prévaut, dans tous les États membres à l’exception du Royaume de Danemark, sur les dispositions de la matière qu’il couvre et qui sont contenues dans la convention de Bruxelles et dans la convention de La Haye (10).

A –    La protection des droits du défendeur défaillant au stade du procès initial

15.      Lorsque le juge d’un État membre est saisi d’un litige à l’encontre d’un défendeur domicilié sur le territoire d’un autre État membre et qui ne comparaît pas, ce juge est tenu de surseoir à statuer aussi longtemps qu’il n’est pas établi soit que ce défendeur a été mis à même de recevoir l’acte introductif d’instance ou un acte équivalent en temps utile pour se défendre, soit que toute diligence a été faite à cette fin. Cette obligation est énoncée dans des termes comparables à l’article 26, paragraphe 2, du règlement n° 44/2001 et à l’article 20, deuxième alinéa, de la convention de Bruxelles.

16.      Toutefois, si l’acte introductif d’instance a dû être transmis d’un État membre à un autre en vertu du règlement n° 1348/2000 ou de la convention de La Haye, ce sont les dispositions de l’article 19 de ce règlement ou celles de l’article 15 de cette convention qui s’appliquent (11).

17.      Ces deux articles sont similaires. Ils prévoient que, lorsqu’un acte introductif d’instance ou un acte équivalent a dû être transmis dans un autre État membre ou un autre État contractant aux fins de signification ou de notification selon les dispositions du règlement n° 1348/2000 ou de la convention de La Haye et que le défendeur ne comparaît pas, le juge est tenu de surseoir à statuer aussi longtemps qu’il n’est pas établi:

–        que l’acte a été signifié ou notifié selon les formes prescrites par la législation de l’État requis pour la signification ou la notification des actes dressés dans ce pays et qui sont destinés aux personnes se trouvant sur son territoire;

–        ou bien que l’acte a été effectivement remis au défendeur ou à sa résidence selon un autre mode prévu par ledit règlement ou ladite convention,

et que, dans chacune de ces éventualités, soit la signification ou la notification (12), soit la remise a eu lieu en temps utile pour que le défendeur puisse se défendre.

18.      Ces deux mêmes articles disposent, en outre, que chaque État membre ou contractant peut apporter une atténuation à la règle précédente en prévoyant que ses juges peuvent statuer si toutes les conditions ci-après sont réunies:

–        l’acte a été transmis selon un des modes prévus par le règlement n° 1348/2000 ou la convention de La Haye;

–        un délai, que le juge appréciera dans chaque cas particulier et qui sera d’au moins six mois, s’est écoulé depuis la date d’envoi de l’acte;

–        aucune attestation n’a pu être obtenue nonobstant toutes les démarches effectuées auprès des autorités ou entités compétentes de l’État requis.

19.      Enfin, l’article 19, paragraphe 4, du règlement n° 1348/2000 énonce, dans des termes comparables à ceux de l’article 16 de la convention de La Haye:

«Lorsqu’un acte introductif d’instance ou un acte équivalent a dû être transmis dans un autre État membre aux fins de signification ou de notification, selon les dispositions du présent règlement, et qu’une décision a été rendue contre un défendeur qui n’a pas comparu, le juge a la faculté de relever le défendeur de la forclusion résultant de l’expiration des délais de recours, si les conditions ci-après sont réunies:

a)      le défendeur, sans qu’il y ait eu faute de sa part, n’a pas eu connaissance dudit acte en temps utile pour se défendre et de la décision en temps utile pour exercer un recours;

b)      les moyens du défendeur n’apparaissent pas dénués de tout fondement.

La demande tendant au relevé de la forclusion doit être formée dans un délai raisonnable à partir du moment où le défendeur a eu connaissance de la décision.

Chaque État membre a la faculté de préciser, conformément à l’article 23, paragraphe 1, que cette demande est irrecevable si elle n’est pas formée dans un délai qu’il indiquera dans sa communication, ce délai ne pouvant toutefois être inférieur à un an à compter du prononcé de la décision.»

B –    La vérification du respect des droits du défendeur défaillant au stade de la reconnaissance et de l’exécution de la décision dans l’État requis

20.      Conformément à l’article 26 de la convention de Bruxelles et à l’article 33 du règlement n° 44/2001, les décisions rendues dans un État contractant ou un État membre sont reconnues dans les autres États contractants ou les autres États membres, sans qu’il soit nécessaire de recourir à aucune procédure.

21.      Toutefois, la convention de Bruxelles et le règlement n° 44/2001 énumèrent limitativement les motifs en vertu desquels il doit être dérogé à ce principe. Parmi ces motifs figure celui selon lequel, malgré les garanties prévues au stade du procès initial, les droits du défendeur défaillant n’ont pas été respectés.

22.      L’article 27, point 2, de la convention de Bruxelles dispose, à cet égard:

«Les décisions ne sont pas reconnues:

[…]

2)      si l’acte introductif d’instance ou un acte équivalent n’a pas été signifié ou notifié au défendeur défaillant, régulièrement et en temps utile, pour qu’il puisse se défendre».

23.      Le règlement n° 44/2001 a apporté plusieurs modifications à la définition des motifs justifiant un refus de reconnaissance et d’exécution, énoncés par la convention de Bruxelles. En ce qui concerne le motif tiré de la violation des droits du défendeur défaillant, l’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001 est rédigé comme suit:

«Une décision n’est pas reconnue si:

[…]

2)      l’acte introductif d’instance ou un acte équivalent n’a pas été signifié ou notifié au défendeur défaillant en temps utile et de telle manière qu’il puisse se défendre, à moins qu’il n’ait pas exercé de recours à l’encontre de la décision alors qu’il était en mesure de le faire».

C –    La procédure applicable à l’exécution de la décision dans l’État requis

24.      Le règlement n° 44/2001 a apporté également des modifications dans la procédure applicable à l’exécution de la décision dans l’État requis qui sont pertinentes pour la présente instance.

25.      Ainsi, comme dans la convention de Bruxelles, la demande en exequatur procède d’une requête unilatérale, ne pouvant donner lieu à débat contradictoire qu’en cas d’appel.

26.      Toutefois, à la différence de ladite convention, le règlement n° 44/2001 prévoit que l’examen de cette requête ne donne pas lieu à un jugement d’une juridiction mais à une simple déclaration constatant la force exécutoire, prise soit par une juridiction, soit par une autorité compétente et à l’issue d’un contrôle purement formel.

27.      Contrairement à ce que prévoit la convention de Bruxelles, dans le règlement n° 44/2001, ce n’est que s’il y a un recours contre cette déclaration que les motifs de refus, tel celui tiré de la violation des droits de la défense énoncé à l’article 34, point 2, de ce règlement, sont examinés par une juridiction. Ainsi, selon l’article 41 du règlement n° 44/2001, la décision est déclarée exécutoire dès l’achèvement des formalités prévues à l’article 53, sans examen des motifs de refus énoncés, notamment, à l’article 34 dudit règlement.

28.      Ces formalités, selon les articles 53 à 55 du règlement n° 44/2001, consistent dans la production d’une expédition de la décision permettant d’en attester l’authenticité et d’un certificat délivré par la juridiction ayant rendu ladite décision ou l’autorité compétente de l’État d’origine, ou, le cas échéant, un document équivalent. Ce certificat, qui doit être établi selon le modèle joint en annexe V audit règlement, doit mentionner, notamment, la date de la signification ou de la notification de l’acte introductif d’instance lorsque la décision a été rendue par défaut et que ladite décision est exécutoire dans l’État d’origine.

29.      Toutefois, le règlement n° 44/2001 ne reprend pas la condition prévue à l’article 47 de la convention de Bruxelles, selon lequel la partie qui demande l’exécution d’une décision doit produire également tout document de nature à établir que la décision a été signifiée selon la loi de l’État d’origine (13). L’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 44/2001 dispose, à cet égard:

«La déclaration constatant la force exécutoire est signifiée ou notifiée à la partie contre laquelle l’exécution est demandée, accompagnée de la décision si celle-ci n’a pas encore été signifiée ou notifiée à cette partie.»

II – Le litige au principal et les questions préjudicielles

30.      La présente procédure a pour origine le litige qui oppose ASML Netherlands BV (14), société établie à Veldhoven (Pays‑Bas), à Semiconductor Industry Services GmbH (SEMIS) (15), société établie à Feistritz‑Drau (Autriche). Celui‑ci a trait à l’exécution en Autriche d’un jugement rendu par défaut aux Pays‑Bas le 16 juin 2004 par le Rechtbank ’s‑Hertogenbosch, condamnant SEMIS à verser une somme d’argent à ASML.

31.      Il ressort de l’ordonnance de renvoi que l’assignation à comparaître à l’audience devant le Rechtbank ’s‑Hertogenbosch, fixée par celui-ci à la date du 19 mai 2004, n’a été signifiée à SEMIS que le 25 mai 2004. Il en ressort également que le jugement rendu par défaut le 16 juin 2004 par le Rechtbank ’s‑Hertogenbosch n’a pas été signifié ni notifié à SEMIS.

32.      Sur demande formée par ASML, la force exécutoire du jugement rendu par défaut a été reconnue par ordonnance du 20 décembre 2004 du Bezirksgericht Villach, le juge autrichien requis en première instance, au vu d’un certificat établi par le Rechtbank ’s‑Hertogenbosch en date du 6 juillet 2004, déclarant le jugement par défaut «exécutoire par provision». Le juge autrichien a ordonné également l’exécution forcée dudit jugement.

33.      Une expédition de cette ordonnance a été notifiée à SEMIS. Le jugement rendu par défaut n’était pas joint à cette notification.

34.      Sur appel de SEMIS à l’encontre de ladite ordonnance, le Landesgericht Klagenfurt (Autriche) a rejeté la demande d’exécution au motif que la condition d’être en mesure d’exercer un recours contre un jugement rendu par défaut, au sens de l’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001, suppose, selon lui, une signification ou une notification de ce jugement au défendeur défaillant. Le Landesgericht Klagenfurt a écarté l’argumentation d’ASML, selon laquelle l’exception au motif de non‑reconnaissance visée audit article 34, point 2, trouverait à s’appliquer parce que SEMIS aurait eu connaissance, d’une part, de la procédure engagée contre elle aux Pays-Bas du fait de la signification ou de la notification de l’assignation le 25 mai 2004 et, d’autre part, de l’existence du jugement par défaut à la suite de la notification de l’ordonnance rendue par le Bezirksgericht Villach le 20 décembre 2004.

35.      Statuant sur le pourvoi formé par ASML, l’Oberster Gerichtshof estime que la solution du litige dépend du point de savoir si la condition de l’exception au motif de non‑reconnaissance, énoncée à l’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001, doit être considérée comme satisfaite, c’est-à-dire s’il convient ou non de retenir que SEMIS n’a pas exercé de recours à l’encontre du jugement par défaut alors qu’elle était en mesure de le faire.

36.      L’Oberster Gerichtshof a donc décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)      Convient-il d’interpréter la formule ‘[…] à moins que [le défendeur] n’ait pas exercé de recours à l’encontre de la décision alors qu’il était en mesure de le faire’ figurant à l’article 34, [point] 2, du [règlement n° 44/2001], en ce sens que le fait d’être ‘en mesure de le faire’ au sens précité suppose, en tout état de cause, que le défendeur ait reçu, conformément à la législation applicable en la matière, signification ou notification d’une expédition d’un jugement rendu par défaut dans un État membre et faisant droit à la demande?

2)      En cas de réponse négative à la première question:

Faut-il considérer que la seule signification ou notification d’une expédition de l’ordonnance relative à la demande de faire constater la force exécutoire, en Autriche, du jugement rendu par défaut par le Rechtbank ’s‑Hertogenbosch le 16 juin 2004 et de faire ordonner l’exécution forcée en vertu du titre exécutoire étranger dont la force exécutoire a été constatée aurait dû inciter la partie défenderesse et débitrice (la partie défenderesse dans la procédure relative au jugement dont l’exécution est demandée) à vérifier, d’une part, l’existence de ce jugement, ainsi que, d’autre part, l’existence d’une voie de recours (éventuelle) dans l’ordre juridique de l’État dans lequel le jugement a été rendu, en vue de déterminer si elle était en mesure d’exercer un recours, à titre de condition essentielle pour l’applicabilité de l’exception à l’obstacle à la reconnaissance prévu à l’article 34 du règlement n° 44/2001?»

III – Analyse

37.      Il est constant que le motif de non‑reconnaissance, visé à l’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001, a vocation à s’appliquer en l’espèce. Cette disposition prévoit, en effet, qu’une décision n’est pas reconnue si l’acte introductif d’instance ou un acte équivalent n’a pas été signifié au défendeur défaillant en temps utile et de telle manière qu’il puisse se défendre.

38.      Il ressort des indications fournies par la juridiction de renvoi que l’assignation à comparaître à l’audience devant le juge néerlandais, fixée à la date du 19 mai 2004, n’a été signifiée à la partie défenderesse en Autriche que postérieurement à cette audience, soit le 25 mai 2004, et que le Rechtbank ’s‑Hertogenbosch a rendu son jugement par défaut, condamnant SEMIS à payer une somme d’argent à ASML, le 16 juin 2004. La signification ou la notification de l’acte introductif d’instance n’a donc pas été effectuée en temps utile pour permettre à SEMIS de se défendre.

39.      La présente procédure préjudicielle a pour objet de déterminer si les conditions de l’exception à l’application de ce motif de non‑reconnaissance sont réunies. L’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001 prévoit, en effet, que le motif de non‑reconnaissance fondé sur la violation des droits de la défense doit être écarté si le défendeur défaillant n’a pas exercé de recours à l’encontre de la décision rendue par défaut alors qu’il était en mesure de le faire.

40.      Par ses deux questions préjudicielles, que nous proposons à la Cour d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi cherche à savoir si la condition d’avoir été en mesure de faire un recours contre la décision rendue par défaut requiert que le défendeur défaillant ait pu prendre connaissance du contenu de cette décision, de sorte que celle-ci doit lui avoir été signifiée ou notifiée, ou bien s’il suffit qu’il ait eu simplement connaissance de l’existence de ladite décision.

41.      Elle demande ainsi, en substance, si l’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001 doit être interprété en ce sens que l’exception qu’il prévoit, selon laquelle le motif de non‑reconnaissance fondé sur la violation des droits de la défense ne s’applique pas lorsque le défendeur défaillant n’a pas exercé de recours à l’encontre de la décision alors qu’il était en mesure de le faire, requiert que cette décision lui ait été signifiée ou notifiée, ou bien s’il suffit qu’il ait eu connaissance de son existence.

42.      Les positions défendues au cours de la présente procédure peuvent être regroupées en deux thèses opposées.

43.      D’une part, ASML et le gouvernement du Royaume‑Uni soutiennent que l’exception visée à l’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001 ne requiert pas la signification ou la notification de la décision. Selon ce gouvernement, admettre une telle exigence d’une manière systématique serait méconnaître l’intention du législateur communautaire, qui a supprimé la condition de la régularité de la signification ou de la notification de l’acte introductif d’instance, énoncée à l’article 27, point 2, de la convention de Bruxelles. Le gouvernement du Royaume‑Uni estime, par conséquent, qu’il suffit que la partie qui poursuit l’exécution de la décision informe le défendeur défaillant de l’existence de cette décision et qu’il incombe à ce dernier de vérifier s’il peut l’attaquer. Il appartiendrait alors au juge de l’État requis d’apprécier si, dans les circonstances particulières de chaque cas d’espèce, le défendeur a disposé d’une possibilité raisonnable d’exercer un recours.

44.      D’autre part, les gouvernements allemand, néerlandais, autrichien et polonais ainsi que la Commission font valoir que la possibilité d’exercer un recours contre une décision requiert d’en connaître le contenu. La simple connaissance de son existence ne suffirait pas. Ils sont donc d’avis que l’exception prévue à l’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001 implique que la décision ait fait l’objet d’une signification ou d’une notification.

45.      Les gouvernements allemand et autrichien soulignent toutefois que les exigences formelles de cette signification ou notification doivent être comparables à celles prévues par le législateur communautaire à l’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001 en ce qui concerne les actes introductifs d’instance, de sorte qu’une simple irrégularité formelle qui ne porte pas atteinte aux droits de la défense ne doit pas suffire à écarter l’application de l’exception.

46.      Nous adhérons à la seconde des deux thèses en présence. La condition d’avoir été en mesure d’exercer un recours suppose, selon nous, que le défendeur défaillant ait pu prendre connaissance du contenu de la décision en cause. Cette condition implique, par conséquent, que celle-ci lui ait été signifiée ou notifiée, avec les mêmes exigences que celles prévues à l’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001 en ce qui concerne l’acte introductif d’instance, c’est-à-dire qu’une simple irrégularité formelle ne portant pas atteinte aux droits de la défense ne doit pas suffire à écarter l’application de l’exception.

47.      Nous fondons notre position, tout d’abord, sur la genèse de l’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001, ensuite, sur les dispositions de ce règlement relatives à l’exécution, en particulier l’article 42, paragraphe 2, et, enfin, sur le principe fondamental des droits de la défense.

1.      La genèse de l’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001

48.      Le contenu de l’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001 ne fournit pas réellement d’indication sur la réponse à donner à la question examinée dans le cadre de la présente procédure. En revanche, la genèse de cette disposition permet d’apprécier la portée des modifications que le législateur communautaire a voulu apporter au contenu du motif de non‑reconnaissance fondé sur la violation des droits de la défense.

49.      En prévoyant que ce motif de non‑reconnaissance ne s’applique pas lorsque le défendeur défaillant s’est abstenu d’exercer un recours contre la décision en cause alors qu’il était en mesure de le faire, le législateur communautaire a voulu incontestablement restreindre la portée dudit motif, tel qu’il est prévu à l’article 27, point 2, de la convention de Bruxelles.

50.      Les motifs de cette restriction ne figurent pas explicitement dans les considérants du règlement n° 44/2001. Ils apparaissent néanmoins très clairement dans le commentaire qui sous-tend l’article 41, point 2, de la proposition de règlement présentée par la Commission des Communautés européennes au Conseil le 14 juillet 1999 (16). Ce commentaire paraît pertinent pour l’interprétation de l’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001, puisque cette disposition est quasiment identique à la proposition de la Commission (17).

51.      Selon ledit commentaire, la suppression de l’adverbe «régulièrement» et l’ajout de l’exception litigieuse à l’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001 ont pour but de supprimer deux conséquences qui ont été déduites par la Cour du contenu de l’article 27, point 2, de la convention de Bruxelles.

52.      La première de ces conséquences, dégagée dans l’arrêt du 3 juillet 1990, Lancray (18), est qu’une irrégularité formelle dans la signification de l’acte introductif d’instance fait obstacle à la reconnaissance d’une décision par défaut, même si cette irrégularité n’a pas porté préjudice aux intérêts du défendeur et que celui-ci a disposé d’un délai suffisant pour assurer sa défense (19). Selon la Cour, la condition de régularité, requise par l’adverbe «régulièrement», et celle de temporalité de la signification ou de la notification de l’acte introductif d’instance, contenue dans les mots «en temps utile», visées à l’article 27, point 2, de la convention de Bruxelles, doivent être réunies cumulativement pour qu’une décision étrangère rendue par défaut soit reconnue dans l’État requis.

53.      La seconde de ces conséquences a été dégagée dans l’arrêt du 12 novembre 1992, Minalmet (20). Dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, une société de droit anglais souhaitait obtenir l’exécution en Allemagne d’un jugement par défaut rendu au Royaume‑Uni, condamnant une société allemande à lui payer une somme d’argent. L’acte introductif d’instance n’avait pas été notifié régulièrement à la partie défenderesse. En revanche, le jugement par défaut lui avait été régulièrement notifié.

54.      La Cour a jugé que l’article 27, point 2, de la convention de Bruxelles doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à la reconnaissance d’un jugement rendu par défaut lorsque l’acte introductif d’instance n’a pas été notifié régulièrement au défendeur défaillant, même si celui-ci a eu ensuite connaissance de la décision rendue et n’a pas fait usage des voies de recours disponibles prévues dans le droit de l’État d’origine.

55.      La même position a été adoptée dans l’arrêt du 10 octobre 1996, Hendrikman et Feyen (21), à propos d’un défendeur ignorant la procédure engagée contre lui mais pour le compte duquel avait comparu un avocat qu’il n’avait pas mandaté. La Cour a estimé qu’un tel défendeur devait être considéré comme défaillant au sens de l’article 27, point 2, de la convention de Bruxelles et que cette analyse n’était pas mise en cause par la circonstance que ce défendeur avait eu la possibilité de former un recours en annulation pour vice de représentation contre la décision rendue.

56.      Ainsi que la Commission l’a souligné, cette jurisprudence pouvait présenter l’inconvénient d’encourager la passivité d’un débiteur, voire sa mauvaise foi (22). Ainsi, un débiteur qui ne disposait pas de bien saisissable dans l’État d’origine avait tout intérêt à s’abstenir d’exercer les recours ouverts contre la décision rendue dans celui-ci et à s’opposer ensuite à son exequatur, en invoquant le fait que l’acte introductif d’instance ne lui avait pas été signifié ni notifié en temps utile pour qu’il puisse se défendre.

57.      Il convient de rappeler, à cet égard, que la Cour a jugé que le requérant qui a obtenu dans un État contractant une décision de justice en sa faveur, susceptible de recevoir l’exequatur dans un autre État contractant, ne peut pas engager dans celui-ci une nouvelle action ayant le même objet contre son débiteur (23). Compte tenu de cette jurisprudence, si l’exequatur n’est pas accordé dans l’État requis, le demandeur se trouve dans l’impossibilité d’obtenir dans cet État tant l’exécution du jugement obtenu dans l’État d’origine qu’une nouvelle décision de justice exécutoire.

58.      L’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001 a donc pour objet, d’une part, d’écarter la possibilité qu’une simple irrégularité formelle de l’acte introductif d’instance puisse entraîner le refus d’exequatur lorsque cette irrégularité n’a pas empêché le défendeur d’assurer sa défense. Il vise, d’autre part, à empêcher le défendeur défaillant d’attendre la procédure de reconnaissance et d’exécution dans l’État requis pour se prévaloir de la violation de ses droits de la défense lorsqu’il a eu la possibilité de défendre ses droits en exerçant un recours contre la décision en cause dans l’État d’origine.

59.      Il s’agit donc simplement d’éviter les abus de procédure. En choisissant de mettre un terme à la jurisprudence dégagée dans l’arrêt Minalmet, précité, le législateur communautaire a voulu que le défendeur défaillant ne tire pas profit de sa propre négligence à défendre ses droits dans l’exercice des recours qui s’offraient à lui.

60.      Cependant, il n’a pas voulu, à notre avis, obliger le défendeur à accomplir des démarches nouvelles allant au-delà d’une diligence normale dans la défense de ses droits, telles que rechercher une décision rendue dans un autre État membre, dont il ne comprend pas nécessairement la langue et dont il ne connaît pas le système judiciaire. Mettre à la charge du défendeur défaillant de telles démarches excéderait manifestement, selon nous, la portée de l’exception litigieuse.

61.      En effet, en prévoyant que la décision rendue par défaut doit être reconnue dans l’État requis si le défendeur s’est abstenu d’engager un recours contre cette décision, le législateur communautaire a estimé que l’atteinte aux droits de la défense entachant la procédure initiale pouvait être réparée par l’exercice de ce recours et que celui-ci devait permettre au défendeur de défendre valablement ses droits devant le juge de l’État d’origine.

62.      Le législateur communautaire a infirmé ainsi le raisonnement qui sous‑tendait la position de la Cour dans l’arrêt Minalmet, précité, selon lequel le moment pertinent pour que le défendeur puisse se défendre est celui de l’introduction de l’instance et la possibilité de faire usage ultérieurement d’une voie de recours contre une décision par défaut, déjà rendue exécutoire, ne peut pas constituer une voie équivalant à une défense préalable à la décision (24).

63.      Cette nouvelle approche du législateur communautaire conduit à considérer que le défendeur défaillant peut réellement être dans une position comparable à celle dans laquelle il se trouve lorsqu’il est assigné pour la première fois devant le juge de l’État d’origine. Dans cette mesure, la décision rendue par défaut joue le même rôle que l’acte introductif d’instance. Elle doit permettre au défendeur défaillant d’être informé des éléments du litige et le mettre en mesure de se défendre (25).

64.      Il est donc essentiel que le défendeur défaillant puisse prendre connaissance du contenu de cette décision. La possibilité pour lui d’exercer un recours effectif qui lui permette de défendre ses droits comme il aurait pu le faire lors de l’audience initiale si l’acte introductif d’instance lui avait été régulièrement signifié ou notifié requiert bien, par conséquent, qu’il puisse prendre connaissance des motifs de la décision rendue par défaut afin de pouvoir les combattre utilement.

65.      Il s’ensuit logiquement que cette décision doit lui être signifiée ou notifiée, comme doit l’être l’acte introductif d’instance. L’exception à l’application du motif de non‑reconnaissance, instaurée dans le règlement n° 44/2001, conduit nécessairement à établir un parallèle entre l’acte introductif d’instance et la décision rendue par défaut. Cette exception ne saurait donc trouver à s’appliquer si le défendeur défaillant a simplement été informé de l’existence de la décision rendue par défaut, au travers, comme en l’espèce, de la signification ou de la notification de la déclaration constatant sa force exécutoire.

66.      Conformément à ce que prévoit le règlement n° 1348/2000, le défendeur défaillant doit pouvoir recevoir la signification ou la notification de cette décision dans une langue qu’il comprend. Ainsi, comme il est énoncé à l’article 8 de ce règlement, le défendeur défaillant doit être avisé qu’il peut refuser de recevoir ladite décision si elle est rédigée dans une langue autre que la langue officielle de l’État membre requis ou, s’il existe plusieurs langues officielles dans cet État membre, la langue officielle ou l’une des langues officielles du lieu où il doit être procédé à la signification ou à la notification, ou encore dans une langue autre qu’une langue de l’État membre d’origine qu’il comprend.

67.      De même, bien que les règlements nos 1348/2000 et 44/2001 ne contiennent pas de prescription en ce sens, nous sommes enclin à penser, comme le gouvernement polonais, que la signification ou la notification de la décision devrait également informer le défendeur des voies de recours ouvertes contre celle-ci. La condition d’être en mesure d’exercer un recours implique aussi, selon nous, de connaître les voies de recours ouvertes à l’encontre de la décision dont l’exécution est demandée.

68.      Certes, comme le gouvernement du Royaume‑Uni le souligne, une telle exigence constitue une charge pour le demandeur à l’exécution. Toutefois, cette charge doit être appréciée en fonction de la situation respective des parties en présence et de la recherche d’un juste équilibre entre leurs obligations. Il est constant que la détermination des voies de recours ouvertes contre la décision rendue par défaut s’impose nécessairement à l’une ou à l’autre des parties en présence. Nous sommes d’avis que c’est le demandeur à l’exécution qui est le mieux placé pour l’assumer. D’une part, ces voies de recours seront, le plus souvent, celles de son ordre juridique national. D’autre part, il a un intérêt certain à l’application de l’exception litigieuse et à faire en sorte que le défendeur défaillant ait été mis en mesure, de manière non contestable, d’exercer un recours contre la décision rendue par défaut.

69.      Enfin, comme l’ont souligné les gouvernements allemand et autrichien, les exigences formelles de la signification ou de la notification au défendeur défaillant de la décision dont l’exécution est demandée doivent être comparables à celles prévues par le législateur communautaire à l’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001 en ce qui concerne les actes introductifs d’instance. Une simple irrégularité formelle, qui ne porte pas atteinte aux droits de la défense, c’est-à-dire à la capacité du défendeur défaillant de prendre connaissance des éléments du litige et de défendre ses droits, ne doit pas suffire à écarter l’application de l’exception.

70.      Il s’ensuit que, au regard de la genèse de l’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001, la condition de l’exception selon laquelle le défendeur défaillant doit avoir été en mesure d’exercer un recours contre la décision rendue par défaut requiert que celle-ci lui ait été signifiée ou notifiée.

71.      Cette analyse est confirmée, à notre avis, par les dispositions du règlement n° 44/2001 relatives à la procédure d’exécution, en particulier l’article 42, paragraphe 2.

2.      Les règles relatives à la procédure d’exécution

72.      Ainsi que nous l’avons déjà indiqué, le règlement n° 44/2001 ne reprend pas l’exigence énoncée expressément à l’article 47, point 1, de la convention de Bruxelles, en vertu de laquelle la partie qui demande l’exécution d’une décision de justice doit produire tout document de nature à établir que cette décision a été signifiée selon la loi de l’État d’origine.

73.      Le règlement n° 44/2001 exige, comme la convention de Bruxelles, que le demandeur à la reconnaissance et à l’exécution d’une décision rendue dans un autre État membre produise une expédition de celle-ci, réunissant les conditions nécessaires à son authenticité. Il requiert également la production d’un certificat délivré par la juridiction ou l’autorité compétente de l’État d’origine, ou, le cas échéant, un document équivalent, attestant que cette décision est exécutoire dans cet État et faisant apparaître, notamment, la date de la signification ou de la notification de l’acte introductif d’instance au cas où la décision en cause a été rendue par défaut.

74.      Il prévoit ensuite que la décision dont l’exécution est demandée est déclarée exécutoire dès l’achèvement de ces formalités. L’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 44/2001 dispose, enfin, que «[l]a déclaration constatant la force exécutoire est signifiée ou notifiée à la partie contre laquelle l’exécution est demandée, accompagnée de la décision si celle-ci n’a pas encore été signifiée ou notifiée à cette partie».

75.      Nous sommes d’avis que la «décision» visée à cette disposition dans le membre de phrase «accompagnée de la décision si celle-ci n’a pas encore été signifiée ou notifiée à cette partie» ne peut être que la décision de justice dont l’exécution est demandée et dont la force exécutoire dans l’État requis se trouve reconnue. Cette interprétation est également partagée par la Commission, ainsi que celle-ci l’a déclaré lors de l’audience, en réponse à une question posée par la Cour.

76.       Deux conséquences peuvent être tirées, selon nous, du contenu de l’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 44/2001.

77.      La première de ces conséquences est que le règlement n° 44/2001 admet ainsi que la signification ou la notification de la décision dont l’exécution est demandée ne constitue pas une condition préalable au dépôt de la requête en exécution dans l’État requis et que cette décision peut être signifiée ou notifiée à la partie défenderesse en même temps que la déclaration constatant sa force exécutoire dans ledit État.

78.      Cette première conséquence vise, à notre avis, à tirer les effets de l’interprétation de l’article 47, point 1, de la convention de Bruxelles, faite par la Cour dans l’arrêt du 14 mars 1996, Van der Linden (26).

79.      Dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, M. van der Linden, domicilié en Belgique, contestait l’exécution dans cet État de deux jugements rendus contre lui par défaut par une juridiction allemande, le condamnant à payer des sommes d’argent à une société d’assurances établie en Allemagne. M. van der Linden faisait valoir que la preuve de la signification de ces jugements n’avait pas été apportée au moment du dépôt de la requête en exécution.

80.      Toutefois, la société d’assurances avait fait procéder à une nouvelle signification desdits jugements selon les règles du droit belge, au cours de la procédure de recours intentée par M. van der Linden contre la décision reconnaissant leur caractère exécutoire en Belgique. Il s’agissait donc de savoir si l’article 47, point 1, de la convention de Bruxelles devait être interprété en ce sens que la preuve de la signification de la décision dont l’exécution est demandée pouvait être apportée après le dépôt de la requête en exécution, en particulier au cours de la procédure de recours intentée par le défendeur défaillant contre la décision autorisant l’exécution dans l’État requis.

81.      La Cour a répondu par l’affirmative à cette question en se fondant sur les objectifs qui sous-tendent l’exigence de signification énoncée à l’article 47, point 1, de la convention de Bruxelles. Elle a rappelé que cette exigence a pour but, d’une part, de porter à la connaissance du défendeur la décision rendue contre lui et, d’autre part, de lui donner la possibilité d’exécuter volontairement cette décision avant que l’exequatur ne soit demandé (27). Elle en a déduit que la preuve de la signification de la décision en cause pouvait, lorsque les règles de procédure nationales le permettent, être apportée après le dépôt de la requête, notamment au cours de la procédure de recours intentée par la partie défenderesse contre l’autorisation d’exécution dans l’État requis, à condition que celle-ci dispose d’un délai raisonnable pour exécuter volontairement la décision concernée et que la partie qui en demande l’exécution supporte la charge de toute procédure inutile.

82.      Elle a admis aussi, implicitement, que cette signification ou notification pouvait avoir lieu conformément aux règles applicables dans l’État requis, et pas uniquement selon la loi de l’État d’origine, comme il est mentionné à l’article 47, point 1, de la convention de Bruxelles.

83.      L’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 44/2001 transforme ainsi en règle communautaire la possibilité qui a été admise par la Cour dans l’arrêt Van der Linden, précité, dans le cadre de la convention de Bruxelles.

84.      La seconde conséquence qui nous paraît devoir être tirée du contenu de l’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 44/2001 est que la décision faisant l’objet de la demande d’exécution doit nécessairement, à un moment ou à un autre, être signifiée ou notifiée à la partie à l’encontre de laquelle cette exécution est demandée.

85.      Cette analyse est corroborée par la différence des termes employés à l’article 42, paragraphe 1, qui concerne le demandeur à l’exécution, et au paragraphe 2 de cet article, qui s’applique au défendeur. L’article 42, paragraphe 1, prévoit ainsi que la décision relative à la demande de déclaration constatant la force exécutoire est aussitôt «portée à la connaissance» du demandeur à l’exécution. L’article 42, paragraphe 2, utilise quant à lui les termes «signifiée» et «notifiée».

86.      Comme l’indique le gouvernement néerlandais, il ressort ainsi de l’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 44/2001 que la signification ou la notification de la décision dont l’exécution est demandée doit être effectuée préalablement au dépôt de la requête en exécution dans l’État requis. À défaut, elle doit avoir lieu, en tout état de cause, en même temps que la signification ou la notification de la déclaration constatant la force exécutoire.

87.      Conformément au système de la procédure d’exécution dans le règlement n° 44/2001 et à la position adoptée par la Cour dans l’arrêt Van der Linden, précité, c’est au demandeur à l’exécution qu’il incombe d’apporter la preuve que cette signification ou notification a déjà été effectuée.

88.      Lorsque la décision par défaut est signifiée ou notifiée en même temps que la déclaration constatant sa force exécutoire, le défendeur défaillant, conformément à la position adoptée par la Cour dans l’arrêt Van der Linden, précité, doit alors disposer d’un délai suffisant pour exécuter cette décision volontairement. Il doit également disposer d’un tel délai pour former un recours contre celle-ci dans l’État membre d’origine.

89.      Cette analyse est corroborée par l’article 46, paragraphe 1, du règlement n° 44/2001, qui traite des conséquences d’un recours contre la déclaration constatant la force exécutoire du jugement étranger, formé par la partie contre laquelle l’exécution de ce jugement est demandée. Conformément à cette disposition, la juridiction saisie de ce recours peut surseoir à statuer si ce jugement fait l’objet d’un recours dans l’État d’origine. En vertu de la même disposition, cette juridiction peut aussi, lorsque le délai pour former un tel recours n’est pas expiré, impartir à la partie défenderesse un délai pour exercer ce recours (28).

90.      Dans ce cas de figure, pour que l’exception à l’application du motif de non‑reconnaissance visée à l’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001 trouve à s’appliquer, le juge de l’État requis, qui aura imparti un délai au défendeur défaillant pour former un recours, devrait vérifier que ce dernier a pu obtenir, s’il le souhaite, une signification ou une notification de la décision faisant l’objet de la demande d’exécution dans une langue qu’il comprend, conformément à l’article 8 du règlement n° 1348/2000 (29) et, à notre avis, qu’il a été informé des voies de recours ouvertes dans l’État d’origine contre la décision en cause.

91.      Il s’ensuit, en tout état de cause, que, conformément à l’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 44/2001, si la décision dont l’exécution est demandée n’a pas été signifiée ou notifiée préalablement au dépôt de la requête en exécution, elle doit l’être obligatoirement en même temps que la déclaration constatant sa force exécutoire dans l’État requis.

92.      Selon les indications fournies par la juridiction de renvoi, cette exigence n’a pas été respectée en l’espèce. L’Oberster Gerichtshof expose, en effet, dans sa décision de renvoi préjudiciel (30), que SEMIS n’a reçu notification que d’une expédition de l’ordonnance rendue par la juridiction autrichienne de première instance, le 20 décembre 2004, constatant la force exécutoire en Autriche du jugement par défaut du 16 juin 2004.

93.      C’est bien la raison pour laquelle l’Oberster Gerichtshof demande à la Cour de dire pour droit si la condition selon laquelle le défendeur «était en mesure» de faire un recours contre la décision rendue par défaut peut être satisfaite lorsque le défendeur a eu simplement connaissance de l’existence de cette décision en raison de la signification ou de la notification de la déclaration constatant la force exécutoire de ladite décision.

94.      Toutefois, admettre que cette condition puisse être remplie dans un tel cas de figure aboutirait à donner de l’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001 une interprétation qui serait contraire aux prescriptions de l’article 42, paragraphe 2, du même règlement.

95.      Cette dernière disposition confirme, par conséquent, que la condition de l’exception selon laquelle le défendeur défaillant doit avoir été en mesure d’exercer un recours contre la décision rendue par défaut requiert que celle-ci lui ait été signifiée ou notifiée.

96.      Enfin, cette analyse nous paraît s’imposer au vu des exigences qu’impose le principe fondamental des droits de la défense.

3.      Les droits de la défense

97.      La simplification des formalités auxquelles sont subordonnées la reconnaissance et l’exécution réciproques des décisions judiciaires ne doit pas être poursuivie en affaiblissant, de quelque manière que ce soit, les droits de la défense. Cette jurisprudence constante, qui a guidé la Cour dans l’interprétation de l’article 27, point 2, de la convention de Bruxelles (31), est transposable, selon nous, dans le cadre de l’interprétation de l’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001.

98.      Ce dernier article, comme l’article 27, point 2, de la convention de Bruxelles, vise à protéger ces droits en prévoyant qu’une décision n’est pas reconnue ni exécutée dans l’État requis si le défendeur n’a pas eu la possibilité de se défendre devant le juge de l’État d’origine (32).

99.      L’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001 a apporté une exception à ce motif de non‑reconnaissance. Ainsi que nous l’avons exposé précédemment, le législateur communautaire a estimé que les droits de la défense du défendeur défaillant pouvaient être rétablis par la possibilité d’exercer un recours devant le juge de l’État d’origine. Il a prévu que, si le défendeur défaillant s’est abstenu d’introduire un tel recours, il ne peut plus se prévaloir valablement de la violation de ses droits de la défense au cours de la procédure initiale. La perte de cette possibilité résulte, dans le système de l’exception litigieuse, de l’abstention du défendeur défaillant à introduire un recours alors qu’il était «en mesure de le faire».

100. Admettre, dans ce contexte, que le défendeur défaillant était en mesure de faire un tel recours sans qu’il ait pu prendre connaissance du contenu de la décision rendue par défaut serait contraire, à notre avis, à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme.

101. De plus, compte tenu du fait que, dans le système de reconnaissance et d’exécution instauré par le règlement n° 44/2001, l’examen des motifs de non‑reconnaissance ne constitue plus un préalable à la reconnaissance de la force exécutoire mais n’intervient qu’en cas de recours du défendeur, la thèse défendue par ASML et le gouvernement du Royaume‑Uni créerait un déséquilibre trop important au préjudice du défendeur défaillant.

102. Sur le premier point, il est constant que les droits fondamentaux font partie intégrante des principes généraux du droit dont la Cour assure le respect. À cet effet, la Cour s’inspire des traditions constitutionnelles communes aux États membres ainsi que des indications fournies par les instruments internationaux concernant la protection des droits de l’homme auxquels les États membres ont coopéré ou adhéré, parmi lesquels figure la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (33) qui revêt une signification toute particulière (34).

103. La Cour a reconnu expressément le principe général de droit communautaire selon lequel toute personne a droit à un procès équitable, qui s’inspire de ces droits fondamentaux (35). Elle a jugé que le respect des droits de la défense dans toute procédure ouverte à l’encontre d’une personne et susceptible d’aboutir à un acte faisant grief constitue un principe fondamental de droit communautaire (36).

104. Pour l’interprétation de la portée de ce principe fondamental, elle prend en considération la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme relative à l’article 6 de la CEDH (37).

105. Il ressort de cette jurisprudence que les droits de la défense, qui dérivent du droit à un procès équitable, exigent une protection concrète et effective, propre à garantir l’exercice effectif des droits du défendeur (38). Elle a jugé, en matière pénale, que le défaut de connaissance par l’accusé des motifs de l’arrêt d’une cour d’appel, à l’intérieur du délai imparti pour former un pourvoi contre cet arrêt devant la Cour de cassation, constituait une violation des dispositions combinées de l’article 6, paragraphes 1 et 3, de la CEDH, parce que l’intéressé avait été dans l’impossibilité d’exercer son recours de manière utile et effective (39).

106. Dans le même ordre d’idée, la Cour européenne des droits de l’homme a jugé également que le droit à une procédure contradictoire, qui est l’un des éléments d’une procédure équitable au sens de l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH, implique que chaque partie à un procès, pénal ou civil, doit en principe avoir la faculté de prendre connaissance et de discuter toute pièce ou observation présentée au juge en vue d’influencer sa décision (40).

107. Il serait contraire à cette jurisprudence, selon nous, d’admettre que le défendeur défaillant a été en mesure d’exercer un recours contre la décision rendue par défaut du seul fait qu’il a été informé de l’existence de cette décision et sans qu’il ait pu prendre connaissance de son contenu.

108. Sur le second point, le règlement n° 44/2001, comme nous l’avons vu, a pour objet de faciliter la circulation des jugements au sein de l’Union en simplifiant les formalités en vue de leur reconnaissance et de leur exécution. En introduisant l’exception litigieuse à l’article 34, point 2, dudit règlement, le législateur communautaire a voulu empêcher les entraves à cette circulation qui procèdent de comportements abusifs.

109. Il importe toutefois, selon nous, de ne pas donner à cette exception une portée qui excède cet objectif.

110. Afin d’apprécier l’enjeu de la présente affaire pour les droits de la défense, il convient de bien prendre en compte le fait que, dans le système du règlement n° 44/2001, l’examen des motifs de non‑reconnaissance, tel que celui fondé sur la violation des droits de la défense, ne constitue plus un préalable à la constatation de la force exécutoire de la décision rendue dans l’État d’origine. Le législateur communautaire a franchi ainsi une nouvelle étape significative dans la reconnaissance des décisions rendues dans un autre État membre. Une décision de justice, dès lors qu’elle est exécutoire dans l’État d’origine, doit désormais être reconnue d’une manière quasi automatique dans n’importe quel État requis.

111. Ce n’est que si le défendeur exerce un recours contre la déclaration constatant cette force exécutoire que le juge de l’État requis, statuant sur ce recours, pourra examiner un motif de non‑reconnaissance, tel que celui visé à l’article 34, point 2, du règlement nº 44/2001.

112. Nous savons que ce motif de non‑reconnaissance vise à permettre au juge de l’État requis de contrôler le respect des droits de la défense au stade de la procédure initiale, bien que ce contrôle incombe aussi au juge de l’État d’origine, en vertu de l’article 26, paragraphe 2, du règlement nº 44/2001. Les États contractants, dans la convention de Bruxelles, puis le législateur communautaire, dans le règlement nº 44/2001, ont ainsi prévu que le respect des droits de la défense justifiait de faire l’objet d’un double contrôle (41). Il est important, selon nous, après cette nouvelle étape dans la reconnaissance des décisions rendues au sein de l’Union, de ne pas réduire trop vite la portée de ce double contrôle. La présente affaire illustre bien la nécessité du maintien d’un tel contrôle par le juge de l’État requis.

113. Ainsi, lorsque nous examinons la procédure qui a abouti au jugement rendu par défaut le 16 juin 2004, il existe de bonnes raisons de penser qu’elle n’est pas conforme aux prescriptions du règlement n° 1348/2000, applicable en l’espèce. Il ressort, en effet, de l’article 19 de ce règlement que, lorsque le défendeur est non‑comparant, le juge doit surseoir à statuer jusqu’à ce qu’il soit établi que l’acte introductif d’instance ou un acte équivalent a été signifié ou notifié ou remis à ce défendeur en temps utile pour qu’il puisse se défendre. Il ne peut statuer, le cas échéant, qu’après un délai de six mois au moins suivant l’envoi de l’acte et si les autres conditions de l’article 19, paragraphe 2, dudit règlement sont satisfaites.

114. La juridiction de renvoi n’indique pas si, avant de rendre son jugement par défaut le 16 juin 2004, le Rechtbank ’s‑Hertogenbosch avait reçu la justification de la signification de l’acte introductif d’instance à SEMIS le 25 mai 2004. Mais même si cette juridiction avait été informée de cette signification, nous sommes d’avis qu’elle aurait dû constater que SEMIS n’avait pas été convoquée en temps utile pour pouvoir se défendre et, conformément à ses règles de procédure nationale, faire en sorte que cette partie soit convoquée à une audience ultérieure.

115. Nous relevons, à cet égard, que le gouvernement néerlandais a indiqué à l’audience que la procédure néerlandaise n’avait pas été appliquée correctement.

116. Admettre qu’une décision rendue dans ces conditions devrait être exécutée dans l’État requis dès lors que SEMIS a été simplement informée de son existence et n’a pas exercé de recours priverait le double contrôle du respect des droits de la défense d’une grande partie de sa portée et aboutirait, selon nous, à mettre à la charge du défendeur défaillant des obligations excessives, allant au-delà des obligations qui peuvent être légitimement attendues d’un défendeur normalement diligent.

117. C’est pourquoi nous proposerons de répondre aux questions posées que l’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001 doit être interprété en ce sens que l’exception qu’il prévoit, selon laquelle le motif de non‑reconnaissance fondé sur la violation des droits de la défense ne s’applique pas lorsque le défendeur défaillant n’a pas exercé de recours à l’encontre de la décision alors qu’il était en mesure de le faire, requiert que cette décision lui ait été signifiée ou notifiée.

IV – Conclusion

118. Au vu de l’ensemble de ces considérations, nous proposons à la Cour de répondre de la manière suivante aux questions posées par l’Oberster Gerichtshof:

«L’article 34, point 2, du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, doit être interprété en ce sens que l’exception qu’il prévoit, selon laquelle le motif de non‑reconnaissance fondé sur la violation des droits de la défense ne s’applique pas lorsque le défendeur défaillant n’a pas exercé de recours à l’encontre de la décision alors qu’il était en mesure de le faire, requiert que cette décision lui ait été signifiée ou notifiée.»


1 – Langue originale: le français.


2 – Règlement du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2001, L 12, p. 1).


3 – Règlement du 29 mai 2000, relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale (JO L 160, p. 37).


4 – JO 1972, L 299, p. 32. Convention telle que modifiée par la convention du 9 octobre 1978, relative à l’adhésion du Royaume de Danemark, de l’Irlande et du Royaume‑Uni de Grande‑Bretagne et d’Irlande du Nord (JO L 304, p. 1, et texte modifié p. 77); par la convention du 25 octobre 1982, relative à l’adhésion de la République hellénique (JO L 388, p. 1); par la convention du 26 mai 1989, relative à l’adhésion du Royaume d’Espagne et de la République portugaise (JO L 285, p. 1), et par la convention du 29 novembre 1996, relative à l’adhésion de la République d’Autriche, de la République de Finlande et du Royaume de Suède (JO 1997, C 15, p. 1). Une version consolidée de la convention, telle que modifiée par ces quatre conventions d’adhésion, est publiée au JO 1998, C 27, p. 1 (ci-après la «convention de Bruxelles»).


5 – Trois États membres, le Royaume‑Uni de Grande‑Bretagne et d’Irlande du Nord, l’Irlande et le Royaume de Danemark, ont obtenu de ne pas participer en principe aux mesures prises sur le fondement du titre IV du traité CE. Néanmoins, le Royaume‑Uni et l’Irlande ayant notifié leur souhait de participer à l’adoption et à l’application du règlement n° 44/2001 (voir vingtième considérant de celui-ci), seul le Royaume de Danemark n’est pas lié par le règlement n° 44/2001 (vingt et unième considérant et article 1er, paragraphe 3, de celui-ci). C’est la convention de Bruxelles qui continue de s’appliquer entre cet État et les autres États membres. Ladite convention, conformément à l’article 68 du règlement n° 44/2001, continue également de s’appliquer aux territoires des États membres qui ne relèvent pas du champ d’application du traité CE, tel qu’il est défini à son article 299. Enfin, le règlement n° 44/2001 s’applique depuis le 1er mai 2004 aux dix nouveaux États membres de l’Union européenne.


6 – Dix-neuvième considérant du règlement n° 44/2001.


7 – Deuxième considérant du règlement n° 44/2001.


8 – JO 1997, C 261, p. 1.


9 – Ci-après la «convention de La Haye».


10 – Article 20, paragraphe 1, du règlement n° 1348/2000 ainsi que dix-huitième considérant de celui-ci.


11 – Article 26, paragraphes 3 et 4, du règlement n° 44/2001. L’article 20, dernier alinéa, de la convention de Bruxelles ne renvoie, quant à lui, qu’à l’article 15 de la convention de La Haye.


12 –      Les termes «signification» et «notification» ne figurent pas dans la version allemande du règlement n° 1348/2000, mais le sens de la phrase n’est pas pour autant différent.


13 – Nous précisons toutefois que, dans la version allemande de la convention de Bruxelles, l’expression «selon la loi de l’État d’origine» se rapporte seulement au caractère exécutoire de la décision.


14 – Ci-après «ASML».


15 – Ci-après «SEMIS» ou la «partie défenderesse».


16 – Proposition de règlement (CE) du Conseil concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale [COM (1999) 348 final].


17 – Les seules différences avec le texte de l’article 34, point 2, du règlement n° 44/2001 sont purement formelles, puisque l’article 41, point 2, de la proposition de la Commission est libellé comme suit:


«l’acte introductif d’instance ou un acte équivalent n’a pas été notifié ou signifié au défendeur défaillant en temps utile et de telle manière qu’il puisse se défendre, à moins qu’il n’ait pas exercé de recours contre la décision alors qu’il était en mesure de le faire».


18 – C‑305/88, Rec. p. I‑2725.


19 – L’irrégularité consistait, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Lancray, précité, en un défaut de traduction de l’acte introductif d’instance alors que la langue de cet acte était utilisée par les parties dans leurs relations commerciales.


20 – C‑123/91, Rec. p. I‑5661.


21 – C‑78/95, Rec. p. I‑4943.


22 – Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen: «Vers une efficacité accrue dans l’obtention et l’exécution des décisions au sein de l’Union européenne» (JO 1998, C 33, p. 3).


23 – Arrêt du 30 novembre 1976, De Wolf (42/76, Rec. p. 1759).


24 – Arrêt Minalmet, précité, point 19. À l’appui de cette analyse, la Cour indiquait que, dès lors qu’une décision exécutoire est intervenue, le défendeur ne peut obtenir, le cas échéant, le sursis à l’exécution de cette décision que dans des conditions plus difficiles et peut en outre être confronté à des difficultés de procédure. Les possibilités de défense d’un défendeur défaillant sont donc sensiblement affaiblies (point 20).


25 – Arrêt du 21 avril 1993, Sonntag (C‑172/91, Rec. p. I‑1963, point 39).


26 – C‑275/94, Rec. p. I‑1393.


27 – Point 15.


28 – Il convient également de prendre en compte les dispositions de l’article 19, paragraphe 4, du règlement n° 1348/2000 qui précisent, ainsi que nous l’avons vu, dans quelles conditions un tel recours doit encore être admis lorsque les délais de recours dans l’État membre d’origine ont expiré. Il requiert, rappelons-le, premièrement, que le défendeur, sans faute de sa part, n’a pas eu connaissance en temps utile de l’acte introductif d’instance pour se défendre ni de la décision rendue contre lui pour exercer un recours, deuxièmement, que ses moyens n’apparaissent pas dénués de tout fondement et, troisièmement, que sa demande tendant au relevé de la forclusion soit formée dans un délai raisonnable à partir du moment où il a eu connaissance de la décision en cause.


29 – Voir, en ce sens, arrêt du 8 novembre 2005, Leffler (C‑443/03, Rec. p. I‑9611, point 68).


30 – Point A, paragraphe 4, p. 3 et 4.


31 – Voir, notamment, arrêt du 16 février 2006, Verdoliva (C‑3/05, Rec. p. I‑1579, point 26 et jurisprudence citée).


32 – Voir, en ce qui concerne la convention de Bruxelles, arrêt du 13 octobre 2005, Scania Finance France (C‑522/03, Rec. p. I‑8639, point 16 et jurisprudence citée).


33 – Ci-après la «CEDH».


34 – Arrêt du 28 mars 2000, Krombach (C‑7/98, Rec. p. I‑1935, point 25).


35 – Arrêts du 17 décembre 1998, Baustahlgewebe/Commission (C‑185/95 P, Rec. p. I‑8417, points 20 et 21), et du 11 janvier 2000, Pays‑Bas et Van der Wal/Commission (C‑174/98 P et C‑189/98 P, Rec. p. I‑1, point 17). Ce droit est également énoncé à l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (JO 2000, C 364, p. 1), proclamée le 7 décembre 2000 à Nice.


36 – Arrêt Krombach, précité, point 42 et jurisprudence citée.


37 – Ibidem, point 39.


38 – Voir Cour eur. D. H., arrêts Artico c. Italie du 13 mai 1980, série A n° 37, § 33, et T. c. Italie du 12 octobre 1992, série A n° 245 C, § 28.


39 – Voir Cour eur. D. H., arrêt Hadjianastassiou c. Grèce du 16 décembre 1992, série A n° 252, § 29 à 37.


40 – Voir Cour eur. D. H., arrêt Pellegrini c. Italie du 20 octobre 2001, Recueil des arrêts et décisions 2001‑VIII, § 44.


41 – Voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 1982, Pendy Plastic (228/81, Rec. p. 2723, point 13).