Language of document : ECLI:EU:T:2006:105

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

5 avril 2006 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque figurative comprenant l’élément verbal ‘SELEZIONE ORO Barilla’ – Opposition – Marques verbales antérieures ORO et ORO SAIWA – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94 – Rejet de l’opposition »

Dans l’affaire T-344/03,

Saiwa SpA, établie à Gênes (Italie), représentée par Mes G. Sena, P. Tarchini, J.-P. Karsenty et M. Karsenty-Ricard, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme M. Capostagno et M. O. Montalto, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Barilla Alimentare SpA, établie à Parme (Italie), représentée par Mes A. Vanzetti et S. Bergia, avocats,

ayant pour objet un recours contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 18 juillet 2003 (R 480/2002-4), relative à une procédure d’opposition entre les sociétés Saiwa SpA et Barilla Alimentare SpA,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (première chambre),

composé de MM. J. D. Cooke, président, R. García-Valdecasas et Mme I. Labucka, juges,

greffier : Mme B. Pastor, greffier adjoint,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 22 novembre 2005,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 17 juin 1996, Barilla Alimentare SpA (ci-après l’« intervenante ») a présenté, en vertu du règlement (CE) nº 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié, une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif comprenant l’élément verbal « SELEZIONE ORO Barilla », reproduit ci-après :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 30 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Pâtes alimentaires, farines et préparations faites de céréales, pain, pâtisserie et confiserie ; levure et poudres pour faire lever ; sauces (condiments) ».

4        Le 22 juin 1998, Saiwa SpA (ci-après la « requérante ») a formé une opposition à l’enregistrement de la marque communautaire demandée. L’opposition visait tous les produits désignés dans la demande de marque communautaire.

5        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était le risque de confusion visé par l’article 8, paragraphes 1, sous a) et b), et 5, du règlement n° 40/94, entre la marque demandée et deux marques antérieures dont la requérante est titulaire. La première est constituée par le signe verbal ORO, qui a fait l’objet d’un enregistrement en Italie, sous le n° 307 376, ayant pris effet le 28 septembre 1977, et d’un enregistrement international n° 435 773, du 13 avril 1978, étendu, notamment, à l’Autriche, à l’Allemagne, à l’Espagne, à la France et au Benelux, pour les produits suivants de la classe 30 : « Café, thé, cacao, sucre, riz, tapioca, sagou, succédanés de café, farines et préparations faites de céréales, pain, biscuits, tartes, pâtisserie, bonbons, confiserie, glaces comestibles, miel, sirop de mélasse ; levure, poudre pour faire lever ; sel, moutarde ; poivre, vinaigre, sauces, épices, glace à rafraîchir ». La seconde est constituée par le signe verbal ORO SAIWA, qui a fait l’objet d’un enregistrement en Italie, sous le n° 332 864, ayant pris effet le 25 juin 1956, pour les produits suivants de la classe 30 : « Galettes au lait, biscuits, pain, pâtisserie et confiserie ».

6        Le 28 mars 2002, la division d’opposition de l’OHMI a rejeté l’opposition, en raison de l’absence d’identité des signes et des produits en cause. La division d’opposition a analysé les marques en conflit, prises dans leur ensemble, et a estimé que la composante commune « oro » n’était pas dotée d’un caractère distinctif suffisant – ni intrinsèquement ni par acquisition en raison de l’usage – pour conclure à une similitude entre ces marques.

7        Le 31 mai 2002, la requérante a formé un recours contre cette décision, qui fut rejeté le 18 juillet 2003 par la décision R 480/2002-4 (ci-après la « décision attaquée »). La chambre de recours a considéré qu’aucun risque de confusion entre les signes n’existait pour le consommateur. Elle a constaté, contrairement à la division d’opposition, qu’il y avait une identité substantielle entre les produits. Elle a estimé qu’un caractère distinctif accru ne pouvait pas être reconnu à la marque ORO, la requérante n’ayant pas prouvé que cette marque avait fait l’objet d’un usage significatif avant le dépôt de la demande de marque communautaire. Elle a également confirmé que la marque ORO possédait intrinsèquement un caractère peu distinctif et que, dans le cas de la marque ORO SAIWA, l’élément dominant était « SAIWA ». Elle en a conclu que la présence du terme « oro » dans les marques en conflit ne suffisait pas à établir de similitude entre elles.

 Procédure et conclusions des parties

8        Par requête reçue au greffe du Tribunal le 2 octobre 2003, la requérante a introduit le présent recours.

9        L’OHMI et l’intervenante ont déposé leur mémoire au greffe du Tribunal, respectivement le 22 et le 13 janvier 2004.

10      Dans son mémoire du 13 janvier 2004, l’intervenante a demandé au Tribunal de suspendre la présente procédure dans l’attente d’une décision définitive du Tribunale ordinario di Milano sur la validité des marques ORO et ORO SAIWA. Après avoir recueilli les observations de l’OHMI et de la requérante, le Tribunal (première chambre) n’a pas fait droit à cette demande.

11      Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 9 février 2004, la requérante a demandé, conformément à l’article 135, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, l’autorisation de déposer un mémoire en réplique. Le 10 mars 2004, le Tribunal (première chambre) a décidé de rejeter cette demande.

12      Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 14 novembre 2005, l’intervenante a communiqué le jugement n° 14002/2004 du Tribunale ordinario di Milano du 14 octobre 2004, lequel a déclaré nulles les marques ORO dont se prévaut la requérante dans le présent litige, à savoir l’enregistrement national italien n° 307 376 et l’enregistrement international n° 435 773, en demandant que ce jugement soit versé à la procédure. Le Tribunal (première chambre) a fait droit à cette demande ainsi qu’à celle de la requérante de verser à la présente procédure l’acte d’appel qui a été formé contre ce jugement.

13      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (première chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale.

14      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l’audience du 22 novembre 2005.

15      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        rejeter la demande d’enregistrement de l’intervenante ;

–        condamner l’intervenante aux dépens.

16      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

17      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Arguments des parties

18      À l’appui de son recours, la requérante invoque un unique moyen d’annulation, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, relatif au risque de confusion entre des marques similaires.

19      La requérante fait valoir, premièrement, que c’est à tort que l’OHMI, pour apprécier si le terme « oro » avait acquis un caractère distinctif, en raison de l’usage qui en avait été fait en Italie, a distingué entre la marque ORO et la marque ORO SAIWA. Elle indique, à cet égard, que ses campagnes de publicité et ses ventes, ainsi qu’il ressort des documents qu’elle a soumis à l’OHMI, visent indistinctement l’ensemble des produits de la gamme ORO. Elle fait également remarquer que les deux marques sous lesquelles ses produits sont commercialisés font apparaître le terme « oro ». Elle ajoute que, dans la pratique, dans le cas d’un signe distinctif unique, il est d’usage que l’opérateur souhaitant protéger celui-ci procède non seulement au simple enregistrement de la marque verbale choisie, mais également à plusieurs demandes d’enregistrement de cette même marque dans ses différentes représentations – en noir et blanc et en caractères normaux ou avec une graphie spéciale et l’utilisation de différentes couleurs – ou combinaisons – par exemple, avec l’ajout de la dénomination du producteur. La requérante conteste également la pertinence de la distinction entre l’hypothèse de l’usage de la marque constituée par le seul terme « oro », accompagné, sur l’emballage, de la dénomination sociale « Saiwa », et l’hypothèse de l’usage de la marque complexe ORO SAIWA, puisque dans les deux cas, le terme « oro » est utilisé sur l’emballage avec le nom du fabricant, à savoir Saiwa SpA.

20      Deuxièmement, la requérante estime que le terme « oro » a un caractère distinctif intrinsèque, ce qui aurait été admis par la chambre de recours, même si, selon cette dernière, celui-ci serait réduit. La requérante invoque la décision de la division d’opposition n° 908/2000 du 22 mai 2000 dans laquelle la division d’opposition aurait reconnu que le mot « oro », écrit en caractères stylisés pour désigner du café, revêtait un caractère distinctif, bien que pouvant suggérer une certaine qualité des produits. Elle cite également d’autres exemples jurisprudentiels de signes métaphoriques utilisés pour exprimer une certaine qualité des produits qui ont été admis à l’enregistrement, comme « ultraplus », « vitalité », « quick », « optimus », « golden » et « maxima ».

21      La requérante ajoute que, en raison du principe d’interdépendance selon lequel le risque de confusion doit être évalué en prenant en considération les divers facteurs pertinents et, en particulier, le degré de similitude entre les biens et le degré de capacité distinctive des signes, une éventuelle faiblesse du caractère distinctif du signe « oro » serait compensée par l’identité des signes et des produits.

22      Troisièmement, la requérante considère qu’il est nécessaire de procéder, dans l’analyse comparative des signes, à un examen de leur aspect conceptuel, c’est-à-dire du message qui est communiqué au consommateur. En l’espèce, deux messages seraient transmis à ce dernier : le premier, résultant du mot commun aux marques en conflit, à savoir « oro », serait attaché au produit et serait identique dans les deux marques en conflit, tandis que le second, qui serait déterminé par les dénominations « Saiwa » et « Barilla », serait différent, car il concernerait l’indication de l’entreprise de production. Le consommateur serait amené à considérer que les produits sont substantiellement identiques, bien que provenant de sources de production différentes, éventuellement liées par des contrats de licence, d’échange de savoir-faire, ou, plus généralement, de collaboration.

23      La requérante indique que la particularité du litige est constituée par le fait que les marques en conflit mentionnent le nom de l’entreprise productrice de manière à réduire le risque de confusion sur la source d’origine des produits. Néanmoins, elle considère que la fonction essentielle de la marque ne peut être exclusivement l’indication de la source d’origine des produits. Une interprétation aussi rigoureuse aurait pour effet d’exclure tout risque de confusion, même en cas de reproduction d’une marque, dès lors qu’il serait fait mention, sur l’emballage, l’étiquette ou le produit lui-même, d’éléments permettant d’exclure que le produit se rattache à la même source de production.

24      Selon la requérante, l’absence de tout risque de confusion entre les sources d’origine n’exclut pas automatiquement tout risque de confusion ou d’association entre les produits et entre leurs caractéristiques commerciales et qualitatives. Or, l’exclusion de ce risque ferait également partie des fonctions attachées à la marque. En s’appuyant sur les conclusions de l’avocat général M. Ruíz-Jarabo Colomer sous l’arrêt de la Cour du 12 novembre 2002, Arsenal Football Club, (C‑206/01, Rec. p. I‑10273, I-10275), présentées le 13 juin 2002, elle estime que la marque a également pour fonction l’identification d’un produit spécifique avec ses caractéristiques commerciales et qualitatives. En l’espèce, cette dernière fonction serait déterminante dans le présent litige, dont l’objet serait l’utilisation d’un même signe spécial caractérisant le produit en association avec la dénomination de l’entreprise productrice. La requérante estime que la présence de la dénomination des entreprises productrices n’empêcherait pas le risque de confusion pour le public concerné en ce qui concerne les produits.

25      L’OHMI et l’intervenante contestent le bien-fondé du présent recours. En l’absence de similitude, l’OHMI et l’intervenante estiment qu’il n’y a aucun risque de confusion entre les marques en conflit, puisque l’une des deux conditions visées par l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 n’est pas remplie.

 Appréciation du Tribunal

26      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, une marque est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée.

27      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement.

28      Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance entre la similitude des signes et celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 31 à 33, et la jurisprudence citée].

 Sur le public ciblé

29      Les produits en cause sont des produits alimentaires de consommation courante et quotidienne. Partant, c’est à bon droit que la chambre de recours a constaté, au point 23 de la décision attaquée, que le public visé était constitué par le grand public, c’est-à-dire le consommateur moyen.

 Sur la similitude entre les produits

30      La requérante n’a pas contesté la considération de la chambre de recours selon laquelle il existait une identité substantielle entre les produits (décision attaquée, points 11 et 24). En effet, les produits de la classe 30, visés dans la demande de marque et correspondant à la description « Farines et préparations faites de céréales, pain, pâtisserie et confiserie » sont identiques à ceux de la marque ORO et très semblables à ceux de la marque ORO SAIWA.

 Sur la similitude entre les signes

31      Selon une jurisprudence bien établie, l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci, en tenant compte en particulier de leurs éléments distinctifs et dominants. Le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails [voir arrêts du Tribunal du 14 octobre 2003, Phillips-Van Heusen/OHMI – Pash Textilvertrieb und Einzelhandel (BASS), T‑292/01, Rec. p. II‑4335, point 47, et du 6 juillet 2004, Grupo El Prado Cervera/OHMI – Héritiers Debuschewitz (CHUFAFIT), T‑117/02, non encore publié au Recueil, point 44, et la jurisprudence citée].

32      En l’espèce, c’est à bon droit que la chambre de recours a estimé, au point 22 de la décision attaquée, que la marque ORO possédait en elle-même un caractère peu distinctif. En effet, comme l’a indiqué la chambre de recours (points 20 et 21 de la décision attaquée), le consommateur de produits alimentaires raisonnablement avisé attribuera au mot « oro » la signification de qualité supérieure, car il implique une allusion aux caractéristiques positives d’un produit en suggérant sa qualité, son utilité et sa valeur supérieure. En Italie, ce signe a un très faible caractère distinctif, car ce mot sert principalement à définir une gamme élevée de produits qui se distingue d’une gamme standard et il s’agit d’un terme très fréquemment utilisé par les fabricants de toutes sortes de produits alimentaires pour vanter la haute qualité de leurs produits. Il existe une grande variété de secteurs qui, comme le secteur alimentaire, utilisent dans le langage commercial, le terme « oro », notamment celui des cartes de crédit, du tabac, des produits d’hygiène, des produits textiles, ou encore le domaine discographique. Par ailleurs, tant devant les instances de l’OHMI que devant le Tribunal, la requérante n’a apporté aucun élément de nature à établir la force distinctive intrinsèque du signe « oro » dans les pays concernés par l’enregistrement international n° 435 773.

33      S’agissant de l’argument de la requérante relatif à l’existence d’un caractère distinctif accru par l’usage en Italie, le Tribunal considère que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré (décision attaquée, point 19) qu’aucun usage significatif de la marque ORO ne pouvait être constaté avant le dépôt de la marque communautaire, les documents produits ne permettant d’établir que l’usage en Italie de la marque ORO SAIWA.

34      En ce qui concerne les pièces que la requérante a produites à l’annexe de son mémoire devant la chambre de recours, c’est à juste titre que celle-ci ne les a pas pris en considération au motif, notamment, qu’elles décrivaient des faits survenus après le dépôt de la demande de marque communautaire (décision attaquée, point 18). En effet, ces documents, notamment l’enquête d’opinion du mois de juin 2002 et le tableau des ventes publicitaires, sont postérieurs de plusieurs années à la date du dépôt de la demande de marque communautaire et, dès lors, ne peuvent pas être pris en considération pour démontrer la renommée de marques antérieures au moment du dépôt de la demande de marque communautaire [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 13 décembre 2004, El Corte Inglés/OHMI – Pucci (EMILIO PUCCI), T-8/03, non encore publié au Recueil, points 71 et 72].

35      S’agissant des résultats de l’enquête d’opinion réalisée en janvier 2000, ils sont également dénués de pertinence. Il convient, à cet égard, de relever que cette enquête a été réalisée trois ans et demi après le dépôt de la demande de marque communautaire. En outre, comme la décision attaquée l’a relevé aux points 13 et 14 de la décision attaquée, les conclusions de cette enquête n’ont pas de valeur probante, dès lors que la question « Si vous deviez définir la qualité supérieure d’un produit, quelle expression, en un seul mot, utiliseriez-vous ? » induisait le consommateur à répondre en utilisant des expressions courantes comme « bon », « excellent », « délicieux », « meilleur », mais ne permettait pas d’effectuer l’analyse de la signification que pouvait produire, auprès du consommateur, une indication métaphorique comme « oro ».

36      S’agissant, enfin, des autres documents soumis à la division d’opposition, à savoir le tableau statistique qui illustre les investissements publicitaires réalisés entre 1983 et 2000 et les campagnes publicitaires effectuées, la chambre de recours a correctement observé qu’ils ne permettaient pas de distinguer quelle était la part de l’usage qui concernait la marque ORO de celle qui était liée à l’utilisation de la marque ORO SAIWA. Comme elle l’a constaté, les investissements publicitaires se réfèrent de façon générale aux produits de la « ligne » ORO, sans opérer de distinction selon la marque concernée. C’est également à bon droit que la chambre de recours a relevé que, s’agissant des campagnes publicitaires, les seuls produits qui faisaient l’objet d’une publicité étaient les biscuits et que, dans ces publicités, le terme « oro » était toujours utilisé en étroite association avec le terme « Saiwa ».

37      Or, la requérante n’a pas contesté ces constatations, mais s’est contentée d’indiquer que les documents qu’elle avait soumis à l’OHMI concernaient indistinctement tous les produits de la « gamme » ORO. Ce faisant, la requérante n’a fourni aucun argument pour démontrer que la chambre de recours avait commis une erreur d’appréciation en exigeant une distinction entre les marques ORO el ORO SAIWA, en ce qui concerne les preuves de l’usage de ses marques antérieures et l’allégation selon laquelle la marque ORO, prise isolément, aurait acquis un caractère distinctif en raison de son usage. Le Tribunal relève, à cet égard, que la requérante ne peut utiliser les preuves relatives à l’usage de la marque ORO SAIWA pour démontrer que la marque ORO a acquis un caractère distinctif en raison de l’usage, les deux marques ORO et ORO SAIWA étant des marques distinctes.

38      Il en découle que c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu que, dans la marque ORO SAIWA, l’élément dominant était SAIWA.

39      S’agissant de la comparaison visuelle et phonétique entre les marques ORO et ORO SAIWA, d’une part, et SELEZIONE ORO Barilla, d’autre part, le Tribunal estime qu’il y a d’importantes différences visuelles et phonétiques dans la perception des marques en conflit par le consommateur et que la simple présence du terme « oro » n’est pas susceptible d’entraîner entre elles une similitude.

40      Quant au point de vue conceptuel, le sens qui serait attaché au nom commun « oro » joue un rôle secondaire, voire négligeable, dans la perception du consommateur, lequel n’a pas l’habitude d’attribuer ce mot à un fabricant déterminé, ainsi que l’a constaté la chambre de recours, au point 25 de la décision attaquée. L’existence d’un faible degré de similitude conceptuelle entre les marques en conflit n’est donc pas de nature à contrebalancer leurs différences visuelles et phonétiques.

41      C’est enfin à juste titre que la chambre de recours a considéré, au point 25 de la décision attaquée, que le mot « oro » avait, dans la marque demandée, une fonction descriptive par rapport au terme « selezione », pour indiquer au consommateur qu’il s’agissait d’un produit Barilla haut de gamme. En effet, en étant immédiatement accolé au mot « selezione », le mot « oro » n’a pas une fonction distinctive autonome, mais doit être compris comme étant apposé au terme descriptif « selezione ». Il en résulte que, dans la marque demandée, le caractère distinctif du signe est dû au terme « Barilla ».

42       Il résulte de ce qui précède que l’impression d’ensemble produite par les marques en conflit, en tenant compte de leurs éléments distinctifs et dominants, n’est pas susceptible de créer, entre elles, une similitude suffisante pour entraîner un risque de confusion dans l’esprit du consommateur.

43      Enfin, les arguments de la requérante sur la fonction essentielle de la marque sont dépourvus de fondement.

44      Selon une jurisprudence constante, la fonction essentielle de la marque est de garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit ou du service marqué, en lui permettant de distinguer sans confusion possible ce produit ou ce service de ceux qui ont une autre provenance. Une marque doit distinguer les produits ou les services concernés comme provenant d’une entreprise déterminée (arrêt du Tribunal du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OAMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T-6/01, Rec. p. II-4335, point 58 ; voir également, par analogie, arrêts de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C-39/97, Rec. p. II-5507, point 28, du 4 octobre 2001, Merz & Krell, C‑517/99, Rec. p. I‑6959, point 22, et du 6 mai 2003, Libertel, C‑104/01, Rec. p. I‑3793, point 62).

45      Contrairement à ce que soutient la requérante, les particularités du présent litige, à savoir l’utilisation d’un même signe caractérisant le produit en accolant à celui-ci la dénomination de l’entreprise productrice, ne sauraient modifier l’impression d’ensemble produite par les marques en cause, ni induire en erreur le consommateur sur les produits en question. En effet, ainsi qu’il a été exposé au point 41 ci-dessus, le mot « oro » remplit, dans la marque demandée, une fonction descriptive en étant apposé au terme « selezione ». Dès lors, il doit être considéré comme qualifiant les dénominations « Saiwa » ou « Barilla », lesquelles, désignant les entreprises productrices, écartent tout risque de confusion pour le consommateur.

46      Enfin, l’identification d’un produit spécifique n’est pas la fonction essentielle d’une marque, mais plutôt une caractéristique propre aux marques qui jouissent déjà d’une grande renommée et pour lesquelles, dans l’esprit du public, le produit concerné peut être désigné ou identifié par simple référence à la marque.

47      À la lumière de l’ensemble de ce qui précède, il y a lieu de constater l’absence d’un risque de confusion entre les marques en conflit et, partant, de rejeter le moyen tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

48      Il s’ensuit que le recours doit être rejeté.

 Sur les dépens

49      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

50      En l’espèce, la requérante a succombé et l’OHMI et l’intervenante concluent à ce que la requérante soit condamnée aux dépens. Il y a donc lieu de condamner la requérante aux dépens exposés tant par l’OHMI que par l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La requérante est condamnée aux dépens.


Cooke

García-Valdecasas

Labucka

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 5 avril 2006.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

      R. García-Valdecasas


* Langue de procédure : l’italien.