Language of document : ECLI:EU:T:2003:267

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

15 octobre 2003 (1)

«Marque communautaire - Règlement (CE) n° 40/94 -

Vocable OLDENBURGER - Motif absolu de refus - Caractère descriptif - Provenance géographique - Article 7, paragraphe 1, sous c), et paragraphe 2 - Limitation du droit conféré - Article 12, sous b) -

Déclaration sur l'étendue de la protection - Article 38, paragraphe 2»

Dans l'affaire T-295/01,

Nordmilch eG, établie à Zeven (Allemagne), représentée par Me C. Spintig, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par MM. A. von Mühlendahl et G. Schneider, en qualité d'agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours contre la décision de la troisième chambre de recours de l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) du 19 septembre 2001 (affaire R 826/2000-3) concernant la demande d'enregistrement du vocable OLDENBURGER,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

composé de Mme V. Tiili, président, MM. P. Mengozzi et M. Vilaras, juges,

greffier: Mme D. Christensen, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du 26 mars 2003,

rend le présent

Arrêt

Antécédents du litige

1.
    Le 14 août 1997, Westdeutsche Butter Zentrale Hermann von Uum GmbH & Co. KG (ci-après la «déposante») a présenté, en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié (ci-après le «règlement»), une demande de marque communautaire à l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI).

2.
    La demande de marque communautaire a été transférée à Nordmilch eG (ci-après la «requérante»). Le transfert a été inscrit au registre de l'OHMI le 12 avril 2000.

3.
    La marque dont l'enregistrement a été demandé est le vocable OLDENBURGER.

4.
    Les produits pour lesquels l'enregistrement a été demandé, à la suite des remaniements du 17 septembre 1998 de la liste initialement déposée, relèvent des classes 29, 30 et 32 au sens de l'arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l'enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante:

-    classe 29: «Lait et produits laitiers, produits frais à base de lait et de produits laitiers; lait, lait entier, lait en poudre, produits à base de lait en poudre à usage alimentaire, lait épais, lait écrémé, lait caillé, babeurre, également avec adjonction de fruits ou de céréales et/ou de cacao, lait pasteurisé, stérilisé et condensé, lait condensé, crème pour café, crème, produits à base de crème, également salés ou avec adjonction d'herbes, fromage blanc, crème, crème épaisse, kéfir, beurre, beurre aux herbes, préparations à base de beurre, fromages, préparations à base de fromage, fromages frais, préparations à base de fromage frais, fromages durs, fromages en tranche, fromages mous, fromages fondus et préparations à base de fromage fondu, crème fraîche, yaourt, préparations à base de yaourt, desserts, desserts préparés, en particulier à base de yaourt, fromage blanc et crème; les produits précités également avec adjonction de fruits ou d'herbes ou de pâtisserie; produits à base de fromage blanc et de lait caillé, également avec adjonction de fruits ou d'herbes ou de légumes; conserves de lait, lait en poudre, petit lait; boissons lactées mélangées alcooliques et non alcooliques; produits à base de fromage et de lait sous forme de snacks; riz au lait, riz au lait aux fruits, bouillie de semoule; plats préparés et snacks, en particulier à base de lait ou de fromage; articles à grignoter; préparations contenant au moins un des produits précités; viande, poisson, volaille et gibier»;

-    classe 30: «Glaces comestibles, confit de crème glacée, produits à base de crème glacée, pouding; produits à base de fromage et de lait sous forme de snacks; pâtisserie et confiserie, en particulier à base de lait, confiseries et chocolats, gaufrettes pour la glace, produits à base de muesli, contenant du lait, crème épaisse, babeurre, lait caillé, yaourt, kéfir, fromage blanc, également avec adjonction de fruits et/ou de céréales; bouillie de semoule; plats préparés, en particulier à base de lait ou de fromage; coulis de fruits; articles à grignoter; préparations contenant au moins un des produits précités»;

-    classe 32: «Boissons lactées sans alcool».

5.
    La demande a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 48/1999 du 21 juin 1999.

6.
    Des objections ayant été présentées, conformément à l'article 41 du règlement, et à la suite des observations formulées par la déposante initiale ainsi que par la requérante, l'examinateur a rejeté la demande par décision du 7 juin 2000.

7.
    Le 4 août 2001, la requérante a formé un recours auprès des chambres de recours de l'OHMI contre la décision de l'examinateur conformément à l'article 59 du règlement.

8.
    Par décision du 19 septembre 2001 (ci-après la «décision attaquée»), notifiée à la requérante le 1er octobre 2001, la chambre de recours a rejeté le recours. En substance, elle a considéré que le vocable demandé pouvait constituer une indication de provenance géographique faisant référence à une région allemande connue pour la production des produits désignés dans la demande pour laquelle il existait un intérêt général de libre disposition.

9.
    Entre-temps, une opposition a été formée contre la demande d'enregistrement de marque communautaire. À la suite de la réouverture de la procédure d'examen et de la demande de la déposante, la division d'opposition a suspendu la procédure d'opposition, conformément à la règle 20, paragraphe 6, du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d'application du règlement n° 40/94 (JO 1995, L 303, p. 1) (ci-après le «règlement d'exécution»), jusqu'à ce qu'une décision définitive soit rendue sur le présent recours.

Procédure et conclusions des parties

10.
    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 3 décembre 2001, la requérante a introduit le présent recours. L'OHMI a déposé son mémoire en réponse le 27 mars 2002.

11.
    La requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    annuler la décision attaquée;

-    ordonner à l'OHMI de reprendre la procédure d'enregistrement;

-    à titre subsidiaire, constater que l'article 7, paragraphes 1, sous c), et 2, du règlement ne fait pas obstacle à l'enregistrement et renvoyer l'affaire devant la chambre de recours;

-    à titre plus subsidiaire, ordonner à l'OHMI de lui accorder un délai pour fournir une déclaration au sens de l'article 38, paragraphe 2, du règlement;

-    à titre infiniment subsidiaire, constater que l'article 7, paragraphes 1, sous c), et 2, du règlement ne fait pas obstacle à l'enregistrement de la demande de la marque si la requérante fournit à la défenderesse une déclaration en application de l'article 38, paragraphe 2, du règlement et renvoyer l'affaire devant la chambre de recours afin qu'elle tienne compte de la déclaration et de la position du Tribunal;

-    condamner l'OHMI aux dépens.

12.
    L'OHMI conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    rejeter le recours;

-    condamner la requérante aux dépens.

13.
    Lors de l'audience, la requérante a renoncé à sa conclusion visant à ce qu'il plaise au Tribunal d'ordonner à l'OHMI de reprendre la procédure d'enregistrement.

Sur la demande en annulation

14.
    À l'appui de son recours, la requérante soulève trois moyens tirés, premièrement, de la violation de l'article 7, paragraphes 1, sous c), et 2, deuxièmement, de l'article 12, sous b), et, troisièmement, de l'article 38, paragraphe 2, du règlement.

Sur le premier moyen, tiré de la violation de l'article 7, paragraphes 1, sous c), et 2, du règlement

Arguments des parties

15.
    La requérante ne conteste pas que l'indication «Oldenburg» désigne le chef-lieu de la circonscription de Weser-Ems du Land de Basse-Saxe et une ville du même nom dans le Land de Schleswig-Holstein en Allemagne. Elle ne conteste pas non plus que des produits du type de ceux couverts par la demande d'enregistrement soient fabriqués dans la circonscription de Weser-Ems.

16.
    En revanche, elle conteste que la marque demandée OLDENBURGER soit exclusivement composée d'une indication qui, prise isolément, désigne ou pourrait désigner la provenance géographique du produit sur lequel elle est apposée.

17.
    La requérante remarque que la chambre de recours a indiqué, au point 21 de la décision attaquée, qu'il convient d'apprécier si le nom géographique revendiqué se réfère à un lieu sans apprécier si l'indication géographique désigne un lieu qui, aux yeux des milieux intéressés, désigne la provenance géographique des produits revendiqués. Elle souligne également que la chambre a évité par la suite d'affirmer que la marque litigieuse OLDENBURGER désignait la provenance géographique des produits revendiqués.

18.
    La requérante considère que la chambre de recours a étendu le motif absolu de refus des termes exclusivement descriptifs de la provenance à une indication qui ne fait que se référer à une indication géographique ou qui en est dérivée.

19.
    Elle ne conteste pas que la marque OLDENBURGER se réfère à l'indication géographique Oldenburg, ni même qu'elle en est dérivée. Elle fait valoir qu'il ne s'agit pas de l'adjectif «oldenburger» mais, ainsi qu'il ressort clairement de l'emploi des majuscules, de la personnification masculine ou d'un citoyen de la ville d'Oldenburg.

20.
    La requérante estime qu'en général le public ne pose pas un regard analytique et linguistique sur les signes qu'il rencontre.

21.
    En ce qui concerne les décisions antérieures des chambres de recours, elle considère que les situations diffèrent de la présente. De même, la jurisprudence issue de l'arrêt de la Cour du 4 mai 1999, Windsurfing Chiemsee (C-108/97 et C-109/97, Rec. p. I-2779), ne serait pas pertinente dans la mesure où le signe demandé est OLDENBURGER et non Oldenburg. À cet égard, la requérante fait valoir que sa position repose sur la pratique de l'OHMI qui a enregistré plusieurs indications ayant un lien avec une zone géographique.

22.
    À titre liminaire, l'OHMI fait observer que la liste des produits relevant de la classe 30, telle qu'elle figure dans le recours en annulation, n'est pas conforme à la liste des produits litigieuse.

23.
    L'OHMI rappelle que, en vertu de l'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement, sont refusées à l'enregistrement les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d'indications pouvant servir pour désigner la provenance géographique de produits ou de services. En effet, la monopolisation de tels signes, qui résulterait des droits exclusifs conférés par l'article 9 du règlement, ne serait pas admissible, car il existerait un intérêt général qui exige que ces signes restent disponibles (arrêt Windsurfing Chiemsee, précité, points 25 et 26).

24.
    L'OHMI considère que ne sont pas enregistrables les signes qui sont perçus immédiatement et sans plus de réflexion comme une indication géographique par le public concerné. En revanche, sont enregistrables les indications qui, bien que désignant un lieu géographique, sont inconnues du public ou perçues comme des appellations de fantaisie ou connues mais exclues, a priori, pour servir de référence à la provenance des produits ou des services pour lesquels a été déposée une demande d'enregistrement.

25.
    L'OHMI estime que la forme adjectivale de l'appellation d'un lieu relève manifestement du champ d'application de l'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement qui ne contient pas d'interdiction d'enregistrement des noms géographiques en tant que tels (OLDENBURG ou Oldenburg), mais bien une interdiction d'enregistrer des indications pouvant servir pour désigner la provenance géographique.

26.
    En ce qui concerne des enregistrements antérieurs, l'OHMI rappelle la jurisprudence du Tribunal sur la compétence des chambres de recours et souligne que les exemples avancés par la requérante ne concernent pas des noms géographiques connus dans le contexte des produits désignés.

Appréciation du Tribunal

27.
    Aux termes de l'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement, sont refusées à l'enregistrement «les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d'indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l'espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l'époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d'autres caractéristiques de ceux-ci».

28.
    En outre, l'article 7, paragraphe 2, du règlement dispose que «[l]e paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n'existent que dans une partie de la Communauté».

29.
    L'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement poursuit un but d'intérêt général, lequel exige que les signes ou indications descriptives des catégories de produits ou de services pour lesquelles l'enregistrement est demandé puissent être librement utilisés par tous. Cette disposition empêche, dès lors, que de tels signes ou indications soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque (voir, par analogie, arrêt Windsurfing Chiemsee, précité, point 25).

30.
    S'agissant plus particulièrement des signes ou indications pouvant servir pour désigner la provenance géographique des catégories de produits pour lesquelles l'enregistrement de la marque est demandé, en particulier les noms géographiques, il existe un intérêt général à préserver leur disponibilité en raison notamment de leur capacité non seulement de révéler éventuellement la qualité et d'autres propriétés des catégories de produits concernées, mais également d'influencer diversement les préférences des consommateurs, par exemple en rattachant les produits à un lieu qui peut susciter des sentiments positifs (voir, par analogie, arrêt Windsurfing Chiemsee, précité, point 26).

31.
    En outre, il convient de relever que sont exclus, d'une part, l'enregistrement des noms géographiques en tant que marques lorsqu'ils désignent des lieux géographiques déterminés qui sont déjà réputés ou connus pour la catégorie de produits concernée et qui, dès lors, présentent un lien avec celui-ci aux yeux des milieux intéressés et, d'autre part, l'enregistrement des noms géographiques susceptibles d'être utilisés par les entreprises qui doivent également être laissés disponibles pour celles-ci en tant qu'indications de provenance géographique de la catégorie de produits concernée (voir, par analogie, arrêt Windsurfing Chiemsee, précité, points 29 et 30).

32.
    À cet égard, il y a lieu de relever que le législateur communautaire a réservé, par dérogation à l'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement, la possibilité d'enregistrer des signes pouvant servir à désigner la provenance géographique en tant que marque collective conformément à l'article 64, paragraphe 2, du règlement et, pour certains produits, lorsqu'ils remplissent les conditions nécessaires, en tant qu'indications géographiques ou appellations d'origine protégées dans le cadre des dispositions du règlement (CEE) n° 2081/92 du Conseil, du 14 juillet 1992, relatif à la protection des indications géographiques et des appellations d'origine des produits agricoles et des denrées alimentaires (JO L 208, p. 1).

33.
    Toutefois, il y a lieu de relever que, en principe, l'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement ne s'oppose pas à l'enregistrement de noms géographiques qui sont inconnus dans les milieux intéressés ou, à tout le moins, inconnus en tant que désignation d'un lieu géographique ou encore des noms pour lesquels, en raison des caractéristiques du lieu désigné, il n'est pas vraisemblable que les milieux intéressés puissent envisager que la catégorie de produits concernée provienne de ce lieu (voir, par analogie, arrêt Windsurfing Chiemsee, précité, point 33).

34.
    Au vu de tout ce qui précède, l'appréciation du caractère descriptif d'un signe ne peut être opérée que, d'une part, par rapport aux produits ou aux services concernés et, d'autre part, par rapport à la compréhension qu'en a le public pertinent.

35.
    En l'espèce, il y a lieu de relever, tout d'abord, que les produits désignés, tels qu'ils figurent au point 1 de la décision attaquée, sont des produits alimentaires de consommation courante destinés à l'ensemble des consommateurs. Par conséquent, le public pertinent est censé être le consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Par ailleurs, le signe en cause étant relatif à un nom géographique allemand, le public pertinent par rapport auquel il convient d'apprécier le motif absolu de refus est le consommateur moyen de l'État membre dans lequel le lieu désigné par ce nom est situé [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 27 février 2002, Ellos/OHMI (ELLOS), T-219/00, Rec. p. II-753, points 30 et 31].

36.
    Il convient de faire observer, ensuite, que le vocable OLDENBURGER dérive directement, sous forme adjectivale, du nom de la ville allemande d'Oldenburg, chef-lieu de la circonscription administrative de Weser-Ems en Basse-Saxe.

37.
    À cet égard, la chambre de recours a constaté aux points 27 à 29 de la décision attaquée qu'il est connu en Allemagne, à l'échelle nationale, que Oldenburg est la capitale d'une région essentiellement axée sur l'agriculture, notamment dans le domaine des industries laitières, de l'élevage et du traitement des viandes, ce que la requérante ne conteste pas. De ce point de vue, il y a lieu de relever que de nombreux produits agricoles portent l'appellation «Oldenburger» accompagnée d'un terme générique ou l'appellation «Oldenburg» accompagnée du nom du producteur.

38.
    Compte tenu du fait que l'aire géographique directement évoquée par le public ciblé est connue comme étant une région productrice des produits en cause, celui-ci peut percevoir ce nom géographique comme une indication de la provenance géographique desdits produits.

39.
    En effet, la forme adjectivale ne constitue pas, pour le public pertinent, un écart perceptible suffisant pour lui permettre de penser que le signe OLDENBURGER renvoie à une référence autre que le nom géographique Oldenburg et, en conséquence, que ce signe serait apposé sur les produits pour indiquer une caractéristique autre que leur provenance.

40.
    À cet égard, n'est pas pertinent l'argument de la requérante selon lequel le vocable OLDENBURGER ne serait qu'une référence ou une forme dérivée d'une indication géographique. En effet, d'une part, le vocable en cause est habituellement utilisé dans le secteur des produits concernés et, d'autre part, la forme adjectivale est également couramment utilisée en langue allemande pour la construction d'appellations d'origine ou d'indications géographiques protégées qui ont, notamment, pour fonction de renseigner le consommateur sur la provenance géographique des produits.

41.
    En outre, l'OHMI a fait valoir, à juste titre, que les autres significations qui pourraient être envisagées sont aberrantes au point qu'elles ne peuvent être retenues, par exemple, OLDENBURGER pour «Mann aus Oldenburg» (l'homme d'Oldenburg).

42.
    De plus, le signe demandé ne comporte pas d'éléments additionnels susceptibles d'écarter l'application de l'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement. En effet, d'une part, ainsi que la requérante l'admet elle-même, le public ne pose pas, en général, un regard analytique sur les signes qu'il rencontre; il ne portera donc pas un regard suffisamment précis pour trouver une quelconque signification à une police de caractères banale même utilisée en majuscules. D'autre part, le fait qu'un nom géographique soit utilisé seul ne constitue pas non plus un écart perceptible par rapport à la pratique usuelle à l'égard de produits agroalimentaires, selon laquelle, au contraire, il est habituel qu'ils soient désignés par un terme géographique seul ou accompagné de termes génériques désignant le type de produit.

43.
    En ce qui concerne la remarque de la requérante selon laquelle la chambre de recours a soigneusement évité d'affirmer que la marque litigieuse OLDENBURGER désignait la provenance géographique des produits revendiqués, il y a lieu de relever que la chambre de recours a établi, à suffisance de droit, que le lien entre la dénomination du lieu et les produits peut permettre au public pertinent de percevoir le signe en cause comme une indication de provenance de ces produits sans qu'il soit nécessaire, dans ce contexte, de savoir si la dénomination désigne effectivement la provenance géographique réelle des produits.

44.
    En ce qui concerne les produits, tels que les poissons, pour lesquels il n'est pas établi que la zone géographique évoquée par le signe demandé à l'enregistrement soit réputée ou connue, il y a lieu de relever que la chambre de recours a considéré au point 32 de la décision attaquée, à juste titre, et conformément à la jurisprudence de la Cour (voir, par analogie, arrêt Windsurfing Chiemsee, précité, point 31), qu'il est raisonnable qu'un lien soit établi à l'avenir entre ces produits et le vocable en cause aux yeux des milieux intéressés.

45.
    Dès lors, force est de constater que le signe en cause est exclusivement constitué d'un vocable qui indique, ou est susceptible d'indiquer, au public pertinent la provenance géographique des produits désignés.

46.
    Cette appréciation ne saurait par ailleurs être remise en cause par la plaidoirie de la requérante à l'audience consistant, en résumé, à faire valoir que le vocable OLDENBURGER n'étant pas, de façon abstraite, le terme générique désignant les produits revendiqués dans la demande de marque, il ne tomberait pas sous le coup de l'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement. En effet, d'une part, n'est pas pertinent, dans ce cadre, le fait que le vocable demandé ne soit pas le terme générique désignant les produits s'il est établi qu'il peut indiquer leur provenance et, d'autre part, ainsi que l'OHMI a rétorqué à juste titre, que l'examen de la marque demandée ne peut être effectué de façon abstraite mais doit être mené par rapport aux produits désignés.

47.
    En ce qui concerne, enfin, l'existence de décisions antérieures, il suffit de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie, d'une part, le régime communautaire des marques est un système autonome et, d'autre part, la légalité des décisions des chambres de recours s'apprécie uniquement sur la base du règlement, tel qu'interprété par le juge communautaire, et non pas sur la base d'une pratique décisionnelle antérieure de celles-ci [arrêts du Tribunal du 5 décembre 2000, Messe München/OHMI (electronica), T-32/00, Rec. p. II-3829, points 45 à 47, et du 27 février 2002, Streamserve/OHMI (STREAMSERVE), T-106/00, Rec. p. II-723, point 66].

48.
    De plus, ainsi que l'Office l'a fait valoir, ne saurait être retenue comme pertinente la référence à des cas concernant des noms géographiques pour lesquels il n'est pas établi qu'ils étaient connus dans le contexte des produits concernés.

49.
    Dès lors, les arguments de la requérante tirés de la seule existence des enregistrements effectués par l'OHMI ou par l'Office allemand des brevets sont non pertinents.

50.
    En outre, il y a lieu de relever que, pour être admis, il suffit qu'un des motifs de refus établis à l'article 7, paragraphe 1, du règlement existe dans une partie de la Communauté, laquelle est, en l'espèce, constituée par l'Allemagne [voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 30 mars 2000, Ford Motor/OHMI (OPTIONS), T-91/99, Rec. p. II-1925, points 25 à 27].

51.
    Au vu de l'ensemble des éléments qui précèdent, il y a lieu de rejeter le premier moyen.

Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l'article 12, sous b), du règlement

Arguments des parties

52.
    La requérante soutient que, dans les cas où il existe un risque que l'enregistrement de la marque déposée entrave l'utilisation de l'adjectif «oldenburger», les termes univoques de l'article 12, sous b), du règlement empêchent cette entrave.

53.
    L'OHMI estime que la limitation du droit exclusif du titulaire d'une marque enregistrée telle que prévue à l'article 12, sous b), du règlement ne peut avoir pour effet que des marques autrement exclues de la protection en vertu de l'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement puissent malgré tout être enregistrées.

54.
    Par ailleurs, l'OHMI admet que, dans son arrêt du 20 septembre 2001, Procter & Gamble/OHMI (C-383/99 P, Rec. p. I-6251), la Cour a établi un lien entre les articles 7, paragraphe 1, et 12 du règlement mais estime que ce rapport ne permet pas d'affirmer que des signes non susceptibles de protection devraient être enregistrés. En outre, en l'espèce, les conditions de l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt Procter & Gamble/OHMI, précité, ne sont manifestement pas remplies, «Oldenburger» n'étant pas une juxtaposition de mots inhabituelle, mais une appellation commerciale habituellement utilisée pour désigner des produits provenant d'Oldenburg.

Appréciation du Tribunal

55.
    Il y a lieu de relever que l'article 12, sous b), du règlement a pour objet, dans le cadre de son articulation avec l'article 7, paragraphe 1, sous c), du même règlement, en particulier pour les marques qui ne tombent pas sous le coup de cette disposition parce qu'elles ne sont pas exclusivement descriptives, de permettre, notamment, que l'utilisation d'une indication relative à la provenance géographique qui constitue par ailleurs un élément d'une marque complexe ne tombe pas sous l'interdiction que pourrait demander le titulaire d'une telle marque sur la base de l'article 9 du règlement, lorsque l'usage d'une telle indication est fait conformément aux usages honnêtes en matière industrielle ou commerciale [voir, par analogie, arrêt Windsurfing Chiemsee, précité, point 28, et arrêt du Tribunal du 7 juin 2001, DKV/OHMI (EuroHealth), T-359/99, Rec. p. II-1645, point 28].

56.
    Dès lors, son éventuelle application suppose la constatation préalable d'une marque valablement enregistrée, pour laquelle un titulaire fait valoir des droits. Le présumé contrefacteur peut alors, en défense, faire valoir l'article 12 du règlement pour s'exonérer de toute atteinte aux droits du titulaire.

57.
    En conséquence, l'application de cette disposition ne saurait être prise en compte lors de la procédure d'enregistrement. Dès lors, étant donné que la marque n'est pas enregistrable, le deuxième moyen doit être également rejeté.

Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l'article 38, paragraphe 2, du règlement

Arguments des parties

58.
    La requérante fait valoir que sa demande pourrait être enregistrée si elle était assortie d'une déclaration, au sens de l'article 38, paragraphe 2, du règlement, et de la règle 11, paragraphe 2, du règlement d'exécution, dont la teneur serait la suivante:

«La déposante de la demande d'enregistrement de marque communautaire 607 895 OLDENBURGER déclare, conformément à l'article 38, paragraphe 2, du règlement et à la règle 11, paragraphe 2, du règlement d'exécution, renoncer à tout droit exclusif sur l'adjectif phonétiquement identique oldenburger.»

59.
    Elle considère qu'une telle déclaration limiterait la protection au terme «OLDENBURGER» en lettres capitales et pris isolément. D'ailleurs, elle souligne qu'elle utilise elle-même sa marque OLDENBURGER à côté de l'indication géographique et descriptive «Oldenburger Butter» (ou bien «OLDENBURGER BUTTER»).

60.
    La requérante fait valoir que, aux termes de l'article 38, paragraphe 2, du règlement, de la règle 11, paragraphe 2, du règlement d'exécution et du point 8.13 des directives d'examen du 26 mars 1996 (Journal officiel de l'Office 1996, p. 1347), l'OHMI aurait dû l'inviter à fournir une telle déclaration.

61.
    En ce qui concerne ce moyen du recours, l'OHMI ne voit pas quelle disposition a été enfreinte. En effet, la requérante ne précise pas clairement si elle invoque une violation du droit d'être entendu ou une violation de l'article 38, paragraphe 2, du règlement combiné avec la règle 11 du règlement d'exécution.

Appréciation du Tribunal

62.
    Il y a lieu de relever que l'article 38, paragraphe 2, du règlement prévoit que l'OHMI peut demander une déclaration lorsque la marque comporte un élément qui est dépourvu de caractère distinctif.

63.
    En l'espèce, la demande de marque en cause ne comporte qu'un seul et unique élément.

64.
    Dès lors, il suffit de constater que, d'une part, les dispositions relatives à la déclaration au sens de l'article 38 du règlement n'impliquent pas que l'OHMI est tenu de demander qu'une déclaration soit déposée et, d'autre part, qu'une telle déclaration ne peut être demandée s'il n'existe pas d'éléments sur lesquels pourrait porter la renonciation. Or, l'élément unique constitutif de la marque ne pouvant être protégé en tant que tel, il n'existe pas d'autres éléments auxquels la requérante aurait pu renoncer.

65.
    En conséquence, le troisième moyen doit être rejeté.

66.
    Il s'ensuit que le recours doit être rejeté dans son intégralité.

Sur les dépens

67.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La partie requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par l'OHMI, conformément aux conclusions de celui-ci.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête:

1)    Le recours est rejeté.

2)    La requérante est condamnée aux dépens.

Tiili
Mengozzi

Vilaras

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 octobre 2003.

Le greffier

Le président

H. Jung

V.Tiili


1: Langue de procédure: l'allemand.