Language of document : ECLI:EU:T:2019:630

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

19 septembre 2019 (*)

« Clause compromissoire – Convention de subvention conclue dans le cadre du programme-cadre eTEN, relatif aux réseaux de télécommunications transeuropéens – Projet “SafeChemo” – Rapport d’enquête de l’OLAF ayant constaté le caractère non éligible de certaines dépenses exposées – Remboursement partiel des sommes versées – Demande reconventionnelle »

Dans l’affaire T‑786/17,

BTC Srl, établie à Bolzano (Italie), représentée par Mes L. von Lutterotti et A. Frei, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par Mme A. Katsimerou et M. B.- R. Killmann, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet, d’une part, une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation, premièrement, de la décision Ares(2017) 4709558 de la Commission, du 27 septembre 2017, sollicitant le remboursement d’une somme versée à la requérante en exécution de la convention C046311 pour le financement du projet intitulé « ePrescription and Automation for a Safe Management of Cytostatistics », conclue dans le cadre du programme  eTEN, relatif aux réseaux transeuropéens de télécommunications, deuxièmement, de la lettre Ares(2017) 4790311 de la Commission, du 2 octobre 2017, transmettant la note de débit no 3241712708 et, troisièmement, de la note de débit no 3241712708 et, d’autre part, une demande fondée sur l’article 272 TFUE et tendant à faire déclarer non fondée la demande de remboursement de la Commission, ainsi qu’une demande reconventionnelle tendant à obtenir la condamnation de la requérante au remboursement d’une somme indûment versée en exécution de cette convention,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de Mme I. Pelikánová, président, MM. V. Valančius (rapporteur) et U. Öberg, juges,

greffier : Mme E. Artemiou, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 12 mars 2019,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        La requérante, BTC Srl, est une société à responsabilité limitée de droit italien établie à Bolzano (Italie) qui fournit des services de conseil et de conception dans le domaine de la biotechnologie et celui des systèmes informatiques destinés à des établissements de santé.

2        Le 29 juin 2007, la Commission européenne a signé, avec l’ensemble des membres d’un consortium de sociétés dont la requérante faisait partie, la convention de subvention C046311 (ci-après la « convention de subvention »), prévoyant un financement, par l’Union européenne, du projet « ePrescription and Automation for a Safe Management of Cytostatics », également appelé projet « SafeChemo » (ci-après le « projet »), au titre du programme  eTEN, relatif aux réseaux transeuropéens de télécommunications.

3        La convention de subvention contenait, à l’article 5, paragraphe 2, une clause compromissoire attribuant compétence aux juridictions de l’Union pour le règlement du contentieux, entre l’Union et les bénéficiaires de la convention, lié à la validité, à l’exécution et à l’interprétation de ladite convention.

4        Le projet, objet de la convention de subvention, visait au développement d’un système informatique permettant, sur la base de prescriptions électroniques, le dosage automatisé des médicaments cytostatiques destinés à être administrés à des patients, par perfusion, dans le cadre de traitements contre le cancer.

5        La convention de subvention prévoyait que le projet devait avoir une durée de 18 mois, à compter du 1er avril 2007. Par la signature d’un avenant à la convention de subvention le 7 avril 2009, la durée du projet a été étendue à 22 mois, pour s’achever le 31 janvier 2009.

6        Les conditions générales relatives à l’exécution du projet, figurant à l’annexe II de la convention de subvention, stipulaient, notamment, ce qui suit :

« Article 1 – Définitions

[…]

2. “Bénéficiaire” désigne une entité juridique, une organisation internationale ou le Centre commun de recherche (JRC) qui a conclu le présent contrat de financement avec la Communauté.

[…]

4. “Membre” désigne une entité juridique, une organisation internationale, ou le JR, autre qu’un bénéficiaire, ayant conclu, avec l’accord de la Communauté et conformément au présent contrat de financement, un contrat de participation avec un bénéficiaire et qui a, en vertu dudit contrat de participation, les mêmes droits et obligations que le bénéficiaire sauf stipulation contraire dans le contrat de financement.

5. “participant” désigne un bénéficiaire ou un membre.

[…]

28. “coûts éligibles” désigne les coûts visés aux articles 14 et 15 de la présente annexe, conformément aux conditions figurant aux articles 13.1 à 13.7 de la présente annexe.

[…]

32. “irrégularité” désigne toute violation du droit communautaire ou tout manquement à une obligation contractuelle résultant d’une action ou d’une omission d’un bénéficiaire ou d’un membre qui a, ou aurait, pour effet de porter préjudice au budget général des Communautés européennes au moyen de dépenses injustifiées.

[…]

Article 3 – La contribution financière de la Communauté

[…]

4. Sous réserve de l’article 17 de la présente annexe, tout paiement ne sera considéré comme exigible qu’après que le dernier élément à livrer [a] été approuvé.

[…]

6. Après la date d’expiration du contrat de financement, la résiliation du contrat de financement ou la fin de la participation d’un bénéficiaire ou d’un membre, la Commission pourra ou devra, selon le cas, demander au bénéficiaire en cause ou au bénéficiaire impliqué au titre d’un de ses membres le remboursement de l’intégralité de la contribution financière communautaire qui lui aura été versée, si une fraude ou de graves irrégularités financières sont découvertes au cours de l’audit réalisé conformément à l’article 17 de la présente annexe. Le montant à rembourser sera majoré d’intérêts correspondant au taux que la BCE pratique pour ses opérations principales de refinancement au premier jour de calendrier du mois au cours duquel le participant concerné a reçu les fonds, plus trois points et demi pour cent. Les intérêts courront depuis la perception des fonds jusqu’à leur remboursement.

[…]

Article 13 – Coûts éligibles – Principes généraux

1. Les coûts éligibles sont les coûts visés aux articles 14 et 15 de la présente annexe. Ils doivent remplir les conditions suivantes :

– être nécessaires pour le projet ;

– être engagés au cours de la durée du projet ;

– être déterminés conformément au principe comptable des coûts historiques et aux règles internes usuelles du participant, sous réserve qu’elles soient considérées comme acceptables par la Commission ;

– être inscrits dans la comptabilité, au plus tard lors de l’établissement des bilans comptables finaux, ou dans les documents fiscaux ou, le cas échéant, au plus tard à la date d’établissement du certificat d’audit visé à l’article 4.2.c de la présente annexe, la date devant être privilégiée étant la première des deux ;

et

– exclure toute marge de profit.

[…]

Article 14 – Coûts directs

1. Personnel

En ce qui concerne les frais de personnel :

a) Seuls les frais des heures réellement prestées par les personnes réalisant directement le travail de gestion et le travail technique relevant du projet peuvent être imputés au contrat de financement.

Ces personnes doivent :

– être recrutées directement par le participant, dans le respect de la législation nationale ;

– être sous la surveillance du participant uniquement ; et

– être rémunérées conformément aux pratiques normales du participant, sous réserve qu’elles soient considérées comme acceptables par la Commission.

Tout le temps de travail imputé au contrat de financement doit être enregistré pendant toute la durée du projet et, dans le cas du coordinateur, pour une période maximale de deux mois à compter de la fin du projet ; ce temps doit être certifié au moins une fois par mois par la personne responsable du travail désignée par le participant conformément à l’article 2.2.b de la présente annexe ou par le directeur financier dûment habilité du participant.

[…]

Article 16 – Justification des coûts

Les coûts éligibles sont remboursés lorsqu’ils sont motivés par le participant.

À cette fin, le participant est tenu de conserver, sur une base régulière et conformément aux conventions comptables usuelles de son État d’établissement, la comptabilité relative au projet et une documentation appropriée pour étayer et justifier dans le détail les frais et le temps figurant dans ses écritures comptables.

La documentation doit être précise, complète et efficace.

Article 17 – Audit financier

1. La Commission, ou tout représentant autorisé par celle-ci, pourra lancer un audit concernant un participant à tout moment pendant la durée du contrat de financement et pour une durée de cinq ans à compter du paiement final de la contribution de la Communauté visé à l’article 3.

La procédure d’audit à l’égard d’un bénéficiaire est réputée avoir été engagée à la date de la réception par celui-ci de la lettre recommandée avec accusé de réception envoyée par la Commission.

[…]

3. Sur la base des conclusions de l’audit financier concernant un bénéficiaire, un rapport provisoire est établi. Il est envoyé par la Commission au bénéficiaire concerné, qui peut faire des observations dans un délai d’un mois à compter de sa réception.

Le rapport final est envoyé au bénéficiaire concerné. Ce dernier peut communiquer ses observations à la Commission dans un délai d’un mois à compter de sa réception.

[…]

4. Sur la base des conclusions de l’audit, la Commission prendra toutes les mesures appropriées qu’elle jugera utiles, y compris la mise en recouvrement de tout ou partie des paiements qu’elle aura effectués. La mise en recouvrement sera adressée au bénéficiaire concerné, ou au bénéficiaire impliqué si l’audit financier vise l’un de ses membres.

5. L’Office européen de lutte antifraude et la Cour des comptes peuvent vérifier l’utilisation faite de la contribution financière accordée par la Communauté dans le cadre de [la présente] convention de subvention, sur la base de leurs propres règles.

[…]

Article 19 – Remboursement à la Commission et mises en recouvrement

1. Si un montant est indûment versé au participant ou si le recouvrement est justifié en vertu des clauses du contrat, le bénéficiaire entreprend de rembourser à la Commission la somme en cause, selon les modalités et à la date précisées par la Commission.

2. Si le bénéficiaire omet de payer à la date fixée par la Commission, la somme due sera majorée d’intérêts au taux fixé à l’article 3.6 de la présente annexe. Les intérêts de retard courront depuis la date impartie pour le paiement, exclue, jusqu’à la date, inclue, à laquelle la Commission percevra la totalité du montant dû.

[…] »

7        À la suite de la clôture du projet, le chef de file du consortium a remis à la Commission, le 30 avril 2009, un rapport final. Par lettre du 26 mai 2009, la Commission a informé le chef de file qu’elle était d’avis que le projet avait été mené à bonne fin et a approuvé ce rapport final. Le dernier paiement représentant les montants non encore versés au titre de la convention de subvention a été effectué par la Commission le 9 avril 2010.

8        Pour sa participation au projet, la requérante a reçu une subvention d’un montant total de 408 466,50 euros.

9        Le 27 septembre 2010, l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) a ouvert une enquête administrative, enregistrée sous la référence OF/2010/496, en raison de soupçons d’irrégularités qui auraient été commises lors de l’exécution du projet.

10      Le 25 avril 2013, l’OLAF a adressé à la requérante un courrier recommandé l’informant de l’existence de l’enquête administrative ouverte le 27 septembre 2010 (ci-après la « lettre du 25 avril 2013 »). Par cette lettre, l’OLAF a également informé la requérante que, dans le cadre de ladite enquête, il entendait vérifier la régularité des dépenses liées à ses coûts de personnel et à ceux de ses sous-traitants. À cette fin, l’OLAF a indiqué à la requérante qu’il souhaitait procéder à une audition, dans les locaux de celle-ci, le 7 mai 2013.

11      Le 7 mai 2013, le gérant de la requérante a fait l’objet d’une audition par des agents de l’OLAF (ci-après l’« audition du 7 mai 2013 »). À l’issue de cette audition, le gérant de la requérante a été invité à relire, puis à signer le procès-verbal de celle-ci. Interrogé sur les dépenses de personnel imputées à la convention de subvention, le gérant de la requérante a notamment déclaré ce qui suit :

« […] Il est clair que sur ces tarifs horaires, qui vont de 15 à 50 euros de l’heure, il y a un bénéfice pour la société. En réalité, sur la fiche de paie, je ne verse pas au personnel qui travaille au projet l’argent déclaré à la Commission […] »

12      L’OLAF a transmis son rapport d’enquête à la Commission, dans lequel il était constaté qu’une partie des coûts de personnel déclarés par la requérante ne reflétait pas les coûts réels en ce qu’ils incluaient une marge de profit, et a recommandé à la Commission de procéder au recouvrement de la totalité des paiements liés aux coûts de personnel déclarés.

13      Par lettre du 18 novembre 2015, portant la référence Ares (2015) 5172361 (ci-après la « lettre du 18 novembre 2015), la Commission a, en substance, informé la requérante que, en raison, en particulier, des déclarations formulées par son gérant lors de l’audition du 7 mai 2013, l’OLAF avait constaté qu’une partie des coûts de personnel déclarés ne reflétait pas les coûts réels en ce qu’ils incluaient une marge de profit prohibée par l’article 13 de l’annexe II de la convention de subvention. De l’avis de la Commission, cette circonstance permettait d’établir l’existence d’une irrégularité financière, de sorte que les coûts de personnel déclarés ne pouvaient être des coûts éligibles au financement par l’Union. Ainsi, la Commission a informé la requérante qu’elle entendait, sur le fondement de l’article 17, paragraphe 4, et de l’article 19 de l’annexe II de la convention de subvention, solliciter le remboursement de la totalité des paiements liés aux coûts de personnel déclarés par la requérante, soit un montant de 380 989,49 euros.

14      La requérante a présenté à la Commission des observations, par lettre du 15 janvier 2016, et a sollicité de celle-ci la communication du rapport d’enquête de l’OLAF relatif au projet.

15      Par lettre du 18 avril 2016, la Commission a communiqué à la requérante les extraits du rapport d’enquête de l’OLAF relatif au projet la concernant. Le 30 mai 2016, la requérante a présenté ses observations en réponse et a demandé que certaines annexes au procès-verbal de l’audition du 7 mai 2013 lui soient communiquées.

16      Le 27 octobre 2016, la Commission a communiqué à la requérante les pièces demandées. La requérante a présenté de nouvelles observations par lettre du 7 décembre 2016.

17      Par lettre du 27 septembre 2017, portant la référence Ares(2017) 4709558 (ci-après la « lettre du 27 septembre 2017 »), la Commission a annoncé à la requérante qu’elle allait lui transmettre une note de débit d’un montant de 380 989,49 euros. Par lettre du 2 octobre 2017, portant la référence Ares(2017) 4790311 (ci-après la « lettre du 2 octobre 2017 »), la Commission a transmis à la requérante la note de débit no 3241712708, émise sur le fondement de l’article 19 de l’annexe II de la convention de subvention et d’un montant de 380 989,49 euros (ci-après la « note de débit »).

 Procédure et conclusions des parties

18      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 4 décembre 2017, la requérante a introduit le présent recours.

19      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal, annuler la lettre du 27 septembre 2017 ainsi que la lettre du 2 octobre 2017 et la note de débit (ci-après, pris ensemble, les « actes attaqués ») ;

–        à titre subsidiaire, déclarer que le montant de 380 989,49 euros perçu en exécution de la convention de subvention, dont la Commission demande le remboursement par la note de débit, n’est pas dû ou, à tout le moins, pas intégralement dû ;

–        condamner la Commission aux dépens.

20      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable en tant qu’il tend à l’annulation de la lettre du 27 septembre 2017 et de la note de débit ;

–        rejeter le recours comme non fondé pour le surplus ;

–        à titre reconventionnel, condamner la requérante au paiement du montant de 380 989,49 euros, assorti d’intérêts à hauteur du taux d’intérêt appliqué au 1er novembre 2017 par la Banque centrale européenne (BCE) à ses opérations principales de refinancement, majoré de 3,5 points de pourcentage, à compter du 17 novembre 2017 ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

21      Aux termes de sa requête, la requérante a fondé son recours tant sur l’article 263 TFUE que sur l’article 272 TFUE.

22      Aux termes de l’article 272 TFUE, lu en combinaison avec l’article 256 TFUE, le Tribunal est compétent pour statuer en première instance en vertu d’une clause compromissoire contenue dans un contrat de droit public ou de droit privé passé par l’Union ou pour son compte.

23      En l’occurrence, la convention de subvention sur le fondement de laquelle la Commission a procédé au recouvrement contesté contient, en son article 5, une clause compromissoire. Celle-ci prévoit que le Tribunal et, en cas d’appel, la Cour sont seuls compétents pour examiner un litige entre l’Union et les bénéficiaires concernant l’interprétation, l’application ou la validité de la convention de subvention, laquelle est régie par le droit de l’Union, complété, en cas de besoin, par le droit belge.

 Sur la recevabilité

24      La Commission, sans soulever formellement une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 130 du règlement de procédure du Tribunal, excipe de l’irrecevabilité partielle du recours.

25      En particulier, la Commission fait valoir que la demande en annulation, fondée sur l’article 263 TFUE, de la lettre du 27 septembre 2017 et de la note de débit, lesquelles s’inscrivent selon elle dans un cadre purement contractuel, doit être rejetée comme étant irrecevable, de même que, partant, les quatre premiers moyens du recours, soulevés au soutien de cette demande en annulation.

26      La requérante soutient, quant à elle, que l’acte adopté par une institution dans un contexte contractuel doit être considéré comme détachable de ce dernier lorsqu’il a été adopté par cette institution dans l’exercice de ses prérogatives de puissance publique et que, à ce titre, il peut faire l’objet d’un recours en annulation fondé sur l’article 263 TFUE.

27      Selon la requérante, la lettre du 27 septembre 2017 est une mesure administrative adoptée par la Commission dans l’exercice de ses prérogatives de puissance publique, en ce que, par cette lettre, la Commission fait savoir à la requérante que la question de l’éligibilité au financement par l’Union des frais de personnel déclarés est définitivement tranchée, ce qui produirait des effets juridiques à son égard. En outre, la lettre du 2 octobre 2017 et la note de débit, adoptées dans le prolongement de la lettre du 27 septembre 2017, seraient de simples mesures de suivi de cette lettre et revêtiraient les mêmes caractéristiques. Ainsi, la requérante conclut que sa demande en annulation des actes attaqués, fondée sur l’article 263 TFUE, est recevable, de même que, partant, les quatre moyens soulevés au soutien de cette demande.

28      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le recours en annulation au titre de l’article 263 TFUE est ouvert à l’encontre de tous les actes pris par les institutions, quelles qu’en soient la nature ou la forme, qui visent à produire des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts de la partie requérante, en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique (voir arrêt du 9 septembre 2015, Lito Maieftiko Gynaikologiko kai Cheirourgiko Kentro/Commission, C‑506/13 P, EU:C:2015:562, point 16 et jurisprudence citée).

29      En revanche, la compétence d’interprétation et d’application des dispositions du traité par le juge de l’Union ne trouve pas à s’appliquer lorsque la situation juridique de la partie requérante s’inscrit dans le cadre de relations contractuelles dont le régime juridique est régi par la loi nationale désignée par les parties contractantes (arrêt du 9 septembre 2015, Lito Maieftiko Gynaikologiko kai Cheirourgiko Kentro/Commission, C‑506/13 P, EU:C:2015:562, point 18).

30      Il en découle que, en présence d’un contrat liant la partie requérante à l’une des institutions, les juridictions de l’Union ne peuvent être saisies d’un recours sur le fondement de l’article 263 TFUE que si l’acte attaqué vise à produire des effets juridiques contraignants qui se situent en dehors de la relation contractuelle liant les parties et qui impliquent l’exercice de prérogatives de puissance publique conférées à l’institution contractante en sa qualité d’autorité administrative (arrêt du 9 septembre 2015, Lito Maieftiko Gynaikologiko kai Cheirourgiko Kentro/Commission, C‑506/13 P, EU:C:2015:562, point 20).

31      S’agissant, tout d’abord, de l’argumentation de la requérante selon laquelle la lettre du 27 septembre 2017 serait une mesure administrative adoptée par la Commission dans l’exercice de ses prérogatives de puissance publique, il y a lieu de constater que, par le biais de cette lettre, la Commission a répondu aux différentes observations de la requérante, contenues dans les lettres des 15 janvier, 30 mai et 7 décembre 2016, visant à contester les faits établis par l’OLAF (voir points 14 à 16 ci-dessus) et les conclusions qui en avaient été tirées par la Commission, lesquelles avaient été communiqués à la requérante par la lettre du 18 novembre 2015 (voir point 13 ci-dessus). Ainsi, il convient d’observer que la lettre du 27 septembre 2017 s’inscrivait dans un dialogue entre la requérante et la Commission qui, s’il avait certes été initié à la suite de l’envoi de la lettre du 18 novembre 2015, trouvait en réalité son origine dans les vérifications effectuées par l’OLAF lors de l’enquête réalisée sur le fondement de l’article 17, paragraphe 5, de l’annexe II de la convention de subvention.

32      Par ailleurs, dans la lettre du 27 septembre 2017, la Commission a confirmé sa position exprimée dans la lettre du 18 novembre 2015, selon laquelle l’existence d’une grave irrégularité financière était établie, de sorte que les coûts de personnel déclarés par la requérante ne pouvaient être qualifiés de coûts éligibles au financement par l’Union au regard de la convention de subvention et que, par conséquent, une note de débit correspondante allait être émise.

33      Il ressort des développements qui précèdent que la lettre du 27 septembre 2017 s’inscrivait dans le cadre des relations contractuelles entre la requérante et la Commission et ne renfermait aucune décision adoptée sur la base de l’exercice, par la Commission, de prérogatives de puissance publique. Par conséquent, cette lettre n’est pas susceptible de faire l’objet d’un recours en annulation sur le fondement de l’article 263 TFUE.

34      Il en va de même en ce qui concerne la lettre du 2 octobre 2017 et la note de débit. En effet, cette lettre, dont le seul objet était de transmettre la note de débit, s’inscrivait dans le cadre des relations contractuelles entre la requérante et la Commission en ce qu’elle avait pour objet le recouvrement d’une créance, née de l’inéligibilité de coûts de personnel, qui trouvait son fondement dans les stipulations de la convention de subvention. Ainsi, la note de débit doit être comprise comme une mise en demeure comportant l’indication de la date d’échéance ainsi que les conditions de paiement, qui ne saurait être assimilée à un titre exécutoire au sens de l’article 299 TFUE, bien qu’elle mentionne la voie exécutoire de l’article 299 TFUE comme étant une option possible parmi d’autres s’offrant à la Commission dans l’hypothèse où la requérante ne s’exécuterait pas à la date d’échéance fixée, à savoir le 16 novembre 2017 (voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2015, Lito Maieftiko Gynaikologiko kai Cheirourgiko Kentro/Commission, C‑506/13 P, EU:C:2015:562, point 23).

35      Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de déclarer irrecevable le recours en tant qu’il vise à l’annulation, fondée sur l’article 263 TFUE, de la lettre du 27 septembre 2017 ainsi que de la lettre du 2 octobre 2017 et la note de débit, celles-ci devant être considérées comme étant indissociables des rapports contractuels existant entre la requérante et la Commission. Par conséquent, il y a seulement lieu d’examiner le recours en tant qu’il est fondé sur l’article 272 TFUE.

 Sur le fond

36      À l’appui de son recours, fondé sur l’article 272 TFUE, la requérante soulève trois moyens, par lesquels elle demande au Tribunal, en substance, de déclarer que le montant réclamé dans la note de débit n’est pas dû, ou, à tout le moins, pas intégralement dû.

37      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, dans la mesure où il est saisi au titre d’une clause compromissoire sur le fondement de l’article 272 TFUE, le Tribunal doit trancher le litige sur la base du droit matériel applicable au contrat (voir arrêt du 1er mars 2017, Universiteit Antwerpen/REA, T‑208/15, non publié, EU:T:2017:136, point 53 et jurisprudence citée).

38      En effet, comme cela a été rappelé au point 23 ci-dessus, en vertu de la clause compromissoire qu’elle contient, la convention de subvention est régie par le droit de l’Union, complété, en cas de besoin, par le droit belge.

39      Conformément à l’article 1134, premier et troisième alinéas, du code civil belge, « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites » et « [les conventions légalement formées] doivent être exécutées de bonne foi ». En outre, l’article 1135 du code civil belge prévoit que « [l]es conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l’équité, l’usage ou la loi donnent à l’obligation d’après sa nature ».

40      L’article 1156 du code civil belge illustre l’application du principe d’exécution de bonne foi dans l’interprétation des conventions. Conformément à cette disposition, « [o]n doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s’arrêter au sens littéral des termes ».

41      C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner si la requérante s’est acquittée des obligations qui lui incombaient en vertu de la convention de subvention.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation, par la Commission, du principe de l’exécution de bonne foi des conventions

42      À l’appui de son premier moyen, la requérante invoque quatre griefs tirés, le premier, de l’absence d’audit financier, le deuxième, de la tardiveté de l’action de la Commission, le troisième, d’une violation du droit d’accès au rapport d’enquête de l’OLAF et, le quatrième, d’interprétations unilatérales des pièces du dossier et du désintérêt de la Commission pour ses arguments.

–       Sur le grief tiré de l’absence d’audit financier

43      La requérante soutient, en substance, que l’enquête administrative diligentée par l’OLAF ne saurait être assimilée à une vérification complète des comptes réalisée dans le cadre d’un audit financier, au sens de l’article 17, paragraphe 1, de l’annexe II de la convention de subvention et qu’un tel audit n’a jamais eu lieu. La requérante en déduit que le montant réclamé sur la base des constatations effectuées par l’OLAF dans le cadre de l’enquête administrative n’est pas dû, dès lors que la procédure suivie par la Commission ne respectait pas les stipulations de la convention de subvention à propos des audits financiers, en particulier celles de l’article 17, paragraphe 1, de l’annexe II de cette convention.

44      À cet égard, il y a lieu de relever d’emblée qu’il ressort de l’article 19, paragraphe 1, de l’annexe II de la convention de subvention que, en signant ladite convention, la requérante s’est, en tout état de cause, engagée à rembourser à la Commission tout montant indûment payé par celle-ci ou dont le recouvrement serait justifié, en particulier s’il était constaté que certains coûts ne remplissaient pas les conditions d’éligibilité contractuellement prévues.

45      En outre, il y a lieu d’observer que l’article 3, paragraphe 6, de l’annexe II de la convention de subvention stipule que la Commission doit demander au bénéficiaire en cause le remboursement de l’intégralité de la contribution financière de l’Union qui lui aura été versée si une fraude ou de graves irrégularités financières sont découvertes au cours de l’audit réalisé conformément à l’article 17 de cette annexe.

46      L’article 17, paragraphe 5 de l’annexe II de la convention de subvention prévoit la possibilité, indépendamment des dispositions qui figurent aux paragraphes 1 à 4 de cet article, que l’OLAF effectue des enquêtes administratives portant sur l’utilisation faite de la contribution financière accordée par l’Union, étant toutefois précisé que, dans ce cadre, l’OLAF est tenu d’appliquer ses propres règles de procédure.

47      Ainsi, en ne renvoyant pas expressément à un ou plusieurs paragraphes de l’article 17 de l’annexe II à la convention de subvention, l’article 3, paragraphe 6, de cette annexe reconnaît à la Commission la possibilité de demander le remboursement de l’intégralité de la contribution financière de l’Union qui a déjà été versée lorsque de graves irrégularités financières sont découvertes, soit dans le cadre d’un audit financier, réalisé conformément aux dispositions des paragraphes 1 à 4 de l’article 17 de l’annexe II de la convention de subvention, soit dans le cadre d’une enquête administrative menée par l’OLAF sur le fondement du paragraphe 5 de cet article. Il en résulte que la Commission n’est pas tenue, pour établir l’existence de graves irrégularités financières, de réaliser ou de faire réaliser un audit financier supplémentaire, respectant les dispositions des paragraphes 1 à 4 de l’article 17 de l’annexe II de la convention de subvention, si de telles irrégularités ont déjà été mises en lumière lors d’une enquête administrative de l’OLAF, menée sur le fondement du paragraphe 5 de cet article.

48      En l’espèce, il ressort des éléments du dossier, et en particulier de la lettre du 18 novembre 2015, que c’est à la suite des constatations effectuées par l’OLAF dans le cadre d’une enquête administrative prévue par l’article 17, paragraphe 5 de l’annexe II de la convention de subvention que la Commission a établi l’existence d’une irrégularité financière, en ce qu’une partie des coûts de personnel déclarés par la requérante ne reflétait pas les coûts réels, dès lors qu’ils incluaient une marge de profit prohibée par l’article 13 de l’annexe II de la convention de subvention, et a procédé à l’envoi à la requérante de la note de débit.

49      Par conséquent, il y a lieu d’écarter comme inopérante l’argumentation de la requérante fondée sur une violation des paragraphes 1 à 4 de l’article 17 de l’annexe II de la convention de subvention, ces dispositions n’étant applicables qu’aux situations dans lesquelles un audit financier est réalisé par la Commission ou, à la demande de celle-ci, par un représentant autorisé. Or, en l’espèce, un tel audit financier n’a pas été diligenté.

50      Il résulte de ce qui précède que le grief tiré de l’absence d’audit financier doit être écarté.

–       Sur le grief tiré de la tardiveté de l’action de la Commission

51      La requérante reproche tout d’abord à la Commission une violation du principe de l’exécution de bonne foi des conventions en raison d’une action tardive, au regard des stipulations de l’article 17, paragraphe 1, de l’annexe II de la convention de subvention. En effet, selon cette disposition, la Commission pouvait engager un audit financier concernant un participant à un projet, en vue de la mise en recouvrement de tout ou partie des paiements effectués, jusqu’à cinq ans à compter du paiement final de la contribution de l’Union. Or, selon la requérante, la lettre du 18 novembre 2015, par laquelle la Commission l’avait avertie de l’éventualité d’une demande de remboursement, lui aurait été envoyée plus de cinq ans après le dernier paiement, lequel était intervenu en avril 2010.

52      Ensuite, la requérante soutient que la lettre du 25 avril 2013 ne permettait pas de comprendre qu’une procédure d’audit financier, au sens de l’article 17, paragraphe 1, de l’annexe II de la convention de subvention, avait été engagée, par la Commission. Dès lors, la requérante estime, en substance, d’une part, que la lettre du 25 avril 2013 ne peut être considérée comme étant la communication visée par l’article 17, paragraphe 1, de l’annexe II de la convention de subvention, par laquelle la Commission est tenue d’informer le bénéficiaire concerné de l’ouverture d’une procédure d’audit à son égard et, d’autre part, que l’envoi de cette lettre n’était pas de nature à interrompre le délai de prescription de cinq ans prévu par cette même stipulation.

53      Enfin, la requérante fait valoir que Commission aurait dû agir dans un délai raisonnable, ce qui aurait permis d’éviter de l’exposer à une longue incertitude quant à la question de savoir si la subvention en cause allait être maintenue ou devrait être remboursée.

54      Certes, en application de l’article 17, paragraphe 1, de l’annexe II de la convention de subvention, la Commission pouvait effectuer ou faire réaliser un audit financier jusqu’à cinq ans après le paiement final de la contribution financière de l’Union octroyée en vertu de la convention de subvention. Toutefois, le paragraphe 5 du même article prévoit que l’OLAF pouvait vérifier l’utilisation faite de la contribution financière accordée par l’Union dans le cadre de cette convention de subvention selon ses propres règles procédurales. Ainsi, en signant la convention de subvention, la requérante a accepté de se soumettre à un éventuel audit financier de la part de la Commission ou d’un de ses représentants, dans le délai de cinq ans stipulé dans ladite convention, ou à une éventuelle enquête administrative diligentée par l’OLAF selon ses propres règles procédurales.

55      Ainsi, dès lors que l’article 17, paragraphe 5, de l’annexe II de la convention de subvention prévoit la possibilité que l’OLAF effectue des enquêtes administratives portant sur l’utilisation faite de la contribution financière accordée par l’Union, étant toutefois précisé que, dans ce cadre, l’OLAF est tenu d’appliquer ses propres règles de procédure, l’argumentation de la requérante, tirée d’une violation des règles de procédure prévues à l’article 17, paragraphe 1, de cette annexe doit être écartée comme étant inopérante. Par ailleurs, il y a lieu de relever qu’il n’existe aucune disposition réglementaire ni stipulation contractuelle qui précise la durée maximale de l’enquête administrative diligentée par l’OLAF ou le délai dans lequel celle-ci doit être effectuée.

56      Il ressort également des éléments du dossier que le contenu de la lettre du 25 avril 2013, dont l’objet était libellé « Convocation à une audition – personne soumise à enquête administrative », est dépourvu d’ambiguïté quant au contexte dans lequel une enquête administrative avait été ouverte et quant à la finalité de l’audition à intervenir. En effet, par cette lettre du 25 avril 2013, l’OLAF a clairement informé la requérante que, en raison d’irrégularités présumées qui auraient été commises lors de l’exécution du projet, une enquête administrative avait été ouverte et que, dans le cadre de cette enquête administrative, il entendait notamment, au cours d’une audition, vérifier la régularité des dépenses liées aux coûts de personnel de la requérante.

57      Ainsi, dès le 25 avril 2013, la requérante était dûment informée que l’éligibilité de certains des coûts de personnel qu’elle avait déclarés dans le cadre de la convention de subvention suscitait des interrogations sérieuses de la part de l’OLAF.

58      Cependant, ce n’est que par la lettre du 18 novembre 2015, soit plus de 30 mois après l’audition du 7 mai 2013, que la Commission a formellement informé la requérante que, en raison, en particulier, des déclarations formulées par son gérant lors de cette audition, l’OLAF avait constaté qu’une partie des coûts de personnel déclarés ne reflétait pas les coûts réels en ce qu’ils incluaient une marge de profit prohibée par l’article 13 de l’annexe II de la convention de subvention. Or, en vertu du principe selon lequel les parties à un contrat sont soumises à l’obligation de l’exécuter de bonne foi, la Commission était tenue de communiquer à la requérante, dans un délai raisonnable, les conclusions qu’elle tirait des constatations effectuées par l’OLAF et consignées dans son rapport d’enquête, afin de lui permettre de les contester de manière utile et, à titre plus général, de ne pas la laisser dans un état d’incertitude susceptible de lui être préjudiciable.

59      À cet égard, il convient de relever que le caractère raisonnable d’un délai doit être apprécié en fonction de l’ensemble des circonstances propres à chaque affaire et, notamment, de l’enjeu du litige pour l’intéressé, de la complexité de l’affaire et des différentes étapes procédurales que l’institution de l’Union a suivies, ainsi que du comportement des parties au cours de la procédure (voir arrêt du 14 juin 2016, Marchiani/Parlement, C‑566/14 P, EU:C:2016:437, point 99 et jurisprudence citée).

60      Eu égard au contenu du dossier, il apparaît qu’un laps de temps de plus de 30 mois n’est pas justifié et revêt un caractère déraisonnable. En effet, ainsi que cela ressort de la lettre du 18 novembre 2015, la Commission a, pour l’essentiel, repris à son compte les constatations effectuées par l’OLAF dans le cadre de son enquête administrative, en particulier au cours de l’audition du 7 mai 2013, et n’a procédé à aucune investigation complémentaire pour tirer ses propres conclusions. En outre, le contenu du rapport d’enquête de l’OLAF, en tant qu’il concernait la requérante, ne revêtait aucune complexité particulière.

61      Il résulte de ce qui précède que le laps de temps de plus de 30 mois intervenu entre l’audition du 7 mai 2013 et l’envoi à la requérante de la lettre du 18 novembre 2015 constitue, en l’espèce, un délai déraisonnable et, partant, un manquement, par la Commission, à ses obligations contractuelles telles qu’elles sont interprétées à l’aune du principe d’exécution de bonne foi des contrats.

62      Toutefois, il ne ressort pas du dossier que le délai déraisonnable dans la communication à la requérante des conclusions tirées par la Commission, sur la base des constatations effectuées par l’OLAF, dans la lettre du 18 novembre 2015 ait affecté la capacité de celle-là à les contester de manière effective.

63      En effet, premièrement, il convient de relever que la requérante a eu l’occasion à de multiples reprises, à savoir, notamment, ainsi que cela a été rappelé au point 31 ci-dessus, les 15 janvier, 30 mai et 7 décembre 2016, de transmettre des observations et des pièces justificatives à la Commission avant que celle-ci ne lui transmette à son tour la note de débit. Ainsi, force est de constater que l’envoi de la note de débit est intervenu à la suite de nombreux échanges entre la Commission et la requérante, constituant pour cette dernière autant d’opportunités de soumettre des observations et de présenter des pièces justificatives additionnelles.

64      Deuxièmement, il convient de relever que, en vertu de l’article 12, paragraphe 7, du règlement (CE) no 67/2010 du Parlement européen et du Conseil, du 30 novembre 2009, déterminant les règles générales pour l’octroi d’un concours financier communautaire dans le domaine des réseaux transeuropéens (JO 2010, L 27, p. 20), applicable à la convention de subvention, la requérante était tenue de conserver l’ensemble des pièces justificatives relatives aux dépenses afférentes au projet pendant une période de cinq ans à partir de la date du dernier paiement, c’est-à-dire, en l’espèce, jusqu’au 8 avril 2015. Or, dès la réception de la lettre du 25 avril 2013, il devait être clair pour la requérante qu’il était dans son intérêt de conserver tous les documents pertinents, susceptibles de démontrer le caractère éligible des dépenses imputées à la convention de subvention. Il s’ensuit que le retard dans la communication des conclusions, tirées par la Commission sur la base des constatations effectuées par l’OLAF, contenues dans la lettre du 18 novembre 2015 n’a pas affecté la capacité de la requérante à invoquer les pièces justificatives susvisées à l’appui de ses positions.

65      Troisièmement, il ressort du dossier que le gérant de la requérante à l’époque des faits occupait toujours ses fonctions à la date de l’introduction du présent recours, de sorte qu’il pouvait, à la suite de la réception de la lettre du 18 novembre 2015, procurer toute l’information nécessaire pour contester tant les constatations effectuées par l’OLAF que les conclusions qui en ont été tirées par la Commission.

66      S’agissant de l’argumentation de la requérante selon laquelle le délai déraisonnable dont il est question l’a exposée à une longue incertitude quant à la question de savoir si la subvention en cause allait être maintenue ou devrait être remboursée, il y a lieu de relever, pour l’écarter, que la situation d’incertitude dans laquelle a été placée la requérante est inhérente à toute procédure de vérification de l’éligibilité de dépenses imputées au budget de l’Union dans le cadre d’une convention de subvention telle que celle en cause dans la présente affaire. Par ailleurs, il était loisible à la requérante de s’enquérir auprès de la Commission de l’état d’avancement de son dossier, en vue de faire cesser ou d’abréger son incertitude.

67      Sur le fondement des développements qui précèdent, il convient d’écarter le grief tiré de la tardiveté de l’action de la Commission, de même que, partant, l’allégation de la requérante visant à lui reprocher une violation du principe de l’exécution de bonne foi des conventions en raison de cette tardiveté dans son action.

–       Sur le grief tiré d’une violation du droit d’accès au rapport d’enquête de l’OLAF

68      La requérante allègue une violation du principe de l’exécution de bonne foi des conventions, au motif qu’elle n’a eu qu’un accès partiel au rapport d’enquête de l’OLAF, par lequel ce dernier recommandait notamment à la Commission de procéder au recouvrement de la créance contractuelle litigieuse. Or, selon la requérante, les parties à la convention de subvention étaient tenues de se communiquer leurs contestations respectives de manière exhaustive.

69      D’une part, il y a lieu d’observer que, ainsi que cela a été rappelé au point 15 ci-dessus, par lettre du 18 avril 2016, la Commission a fait droit à la demande présentée par la requérante le 15 janvier 2016 et lui a communiqué l’intégralité des parties du rapport d’enquête de l’OLAF la concernant directement.

70      D’autre part, à supposer que, par son argumentation, la requérante reproche en réalité à la Commission de ne pas lui avoir communiqué l’intégralité du rapport d’enquête de l’OLAF, y compris les constatations qui ne la concernaient pas directement, mais qui se rapportaient au comportement d’autres participants au projet, il y a lieu de relever qu’une telle demande dépasse le cadre du droit à la communication exhaustive des contestations au titre de l’exécution de bonne foi de la convention de subvention. Un tel reproche s’inscrit, le cas échéant, dans le cadre du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43). Or, il y a lieu de relever que la requérante n’a, à aucun moment, formulé de demande d’accès au rapport d’enquête de l’OLAF en se fondant sur les dispositions du règlement no 1049/2001.

71      Il résulte de ce qui précède qu’il convient d’écarter le grief tiré d’une violation du droit d’accès au rapport d’enquête de l’OLAF.

–       Sur le grief tiré d’interprétations unilatérales des pièces du dossier et du désintérêt de la Commission pour les arguments de la requérante

72      La requérante invoque une méconnaissance du principe de l’exécution de bonne foi des conventions en ce que la Commission se serait contentée de reprendre à son compte les conclusions contenues dans le rapport d’enquête de l’OLAF, sans procéder à sa propre appréciation des faits. Outre que, selon la requérante, ces conclusions reposeraient sur de simples présomptions et suppositions, la Commission n’aurait, de surcroît, pas pris en compte les données et calculs relatifs aux frais de personnel qu’elle a présentés et qui, en substance, auraient dû faire l’objet d’une analyse minutieuse.

73      À cet égard, il y a lieu de relever que les éléments de preuve présentés par la requérante peuvent être résumés comme suit :

–        des bulletins de salaire de collaborateurs associés au projet et des bulletins de salaire du gérant de la requérante ;

–        des rapports trimestriels ;

–        des offres de preuve par témoignages de collaborateurs ;

–        des calculs de taux horaires et de frais de personnel effectués par un consultant extérieur ;

–        des relevés mensuels d’horaires de travail de collaborateurs ;

–        des factures et documents relatifs aux prestations d’un ingénieur.

74      Premièrement, par la lettre du 18 novembre 2015, la Commission a certes fait part à la requérante des constatations factuelles de l’OLAF, mais elle a également procédé à une évaluation de ces faits au regard des stipulations contenues aux articles 13, 14 et 15 de l’annexe II de la convention de subvention pour conclure, en substance, à l’existence d’une irrégularité, en ce que les coûts de personnel déclarés n’excluaient pas toute marge de profit et s’analysaient, dès lors, en des coûts inéligibles dont le recouvrement était justifié. Partant, il y a lieu de considérer que l’argumentation de la requérante selon laquelle la Commission n’aurait pas procédé à sa propre appréciation des constatations factuelles de l’OLAF manque en fait.

75      Deuxièmement, il convient de rappeler (voir points 31 et 63 ci-dessus) que de nombreux échanges écrits, s’inscrivant dans le cadre d’un dialogue entre la Commission et la requérante, constituant d’ailleurs pour cette dernière autant d’opportunités de soumettre des observations et, le cas échéant, de présenter des pièces justificatives additionnelles, ont eu lieu à partir du 18 novembre 2015 et jusqu’en décembre 2016. Il ressort également du dossier que ces échanges se sont poursuivis jusqu’en octobre 2017, de sorte que le reproche adressé à la Commission de l’interprétation unilatérale des faits de l’espèce et du désintérêt pour les arguments de la requérante ne saurait être fondé.

76      Troisièmement, la requérante reconnaît elle-même que certaines des affirmations figurant dans le rapport d’enquête de l’OLAF ont été écartées par la Commission lorsqu’elle a procédé à sa propre appréciation des faits, de sorte qu’il ne saurait être reproché à cette institution de s’être contentée de reprendre intégralement à son compte les conclusions contenues dans le rapport d’enquête de l’OLAF.

77      Quatrièmement, s’agissant de la demande de la requérante de désigner un expert afin d’examiner le bien-fondé de son argumentation relative à la prise en compte, par la Commission, des données et des calculs relatifs aux frais de personnel présentés, il suffit de relever, pour écarter cette demande, qu’elle ne saurait être accueillie dans la mesure où il incombait à la requérante, en vertu de ses engagements contractuels, d’apporter elle-même la preuve de l’éligibilité au financement par le budget de l’Union de ses dépenses, conformément aux exigences de preuve requises par l’article 16 de l’annexe II de la convention de subvention.

78      En outre, il y a lieu de considérer que les éléments de preuve fournis par la requérante, d’une part, ne permettent pas d’établir spécifiquement l’éligibilité des coûts de personnel et, d’autre part, ont, pour l’essentiel, été soumis par des personnes exposées à un risque de conflit d’intérêts ou concernent de telles personnes. À cet égard, le Tribunal rappelle que, afin que la Commission puisse exercer son contrôle, les bénéficiaires des subventions sont tenus de démontrer la réalité des coûts imputés aux projets subventionnés. La communication d’informations fiables par ces derniers est indispensable au bon fonctionnement du système de contrôle de preuves mis en place pour vérifier si les conditions d’éligibilité sont remplies.

79      Quant aux nouveaux calculs communiqués par la requérante au stade de sa réplique, ceux-ci ne sont pas de nature, en tout état de cause, à démontrer avec précision une correspondance entre les coûts de personnel déclarés et les coûts de personnel réellement supportés, c’est-à-dire les coûts de personnel éligibles au financement par le budget de l’Union. En effet, selon les hypothèses de calcul retenues, les conclusions de la requérante varient entre, d’un côté, l’absence totale de marge de profit concernant ses coûts de personnel déclarés et, de l’autre, des coûts de personnel déclarés qui seraient supérieurs aux coûts réellement supportés et, partant, inéligibles, à hauteur d’environ 27 000 euros.

80      En l’espèce, le caractère éligible des différentes dépenses de personnel aurait dû être démontré par la requérante au moyen de pièces comptables conformes aux conditions techniques fixées pour l’octroi de la subvention concernée, susceptibles d’être contrôlées dans le cadre d’un audit. Ainsi, le Tribunal estime que la requérante n’a pas fourni des éléments de preuve suffisants aux fins de démontrer avec précision l’éligibilité au financement par le budget de l’Union des coûts de personnel déclarés.

81      Il résulte de ce qui précède qu’il convient d’écarter le grief tiré d’interprétations unilatérales des pièces du dossier et du désintérêt de la Commission pour les arguments de la requérante.

82      Partant, il convient d’écarter le premier moyen, tiré d’une violation, par la Commission, du principe de l’exécution de bonne foi des conventions.

 Sur le deuxième moyen, tiré du caractère injustifié de la note de débit

83      La requérante, qui soutient avoir correctement calculé les frais de personnel et ne pas avoir réalisé la marge de profit qui lui est reprochée, fait valoir que l’instruction menée par la Commission a été insuffisante et confuse, de sorte que la note de débit qui lui a été transmise était injustifiée.

84      En l’espèce, il a déjà été constaté que les éléments de preuve fournis par la requérante, présentés au point 73 ci-dessus, d’une part, étaient trop généraux, en ce qu’ils ne permettaient pas de conclure spécifiquement à l’éligibilité au financement par le budget de l’Union des coûts de personnel et, d’autre part, avaient, pour l’essentiel, été soumis par des personnes exposées à un risque de conflit d’intérêts ou concernaient de telles personnes.

85      Par conséquent, il n’y a pas de raison de s’écarter de la conclusion, tirée au point 80 ci-dessus, selon laquelle la requérante n’a pas fourni d’éléments de preuve suffisants aux fins de démontrer l’éligibilité des coûts de personnel déclarés.

86      En outre, pour être éligibles et, partant, être valablement imputés à la convention de subvention, les coûts de personnel doivent remplir un certain nombre de conditions, dont les conditions communes à l’ensemble des coûts imputés, quelle que soit leur nature, fixées à l’article 13 de l’annexe II de la convention de subvention et au rang desquelles figure l’exclusion de toute marge de profit. Ainsi, s’il vient à être constaté que des coûts déclarés, quelle que soit leur nature, comportent une marge de profit, ces coûts ne peuvent plus être considérés comme étant des coûts éligibles au financement par le budget de l’Union et doivent, en application de l’article 19 de l’annexe II de la convention de subvention, faire l’objet d’un recouvrement. En d’autres termes, selon les stipulations contractuelles susmentionnées, la seule existence d’une marge de profit, quelle qu’en soit l’ampleur, implique qu’une dépense déclarée perde sa qualification de coût éligible et puisse, dans sa totalité, faire l’objet d’un recouvrement.

87      En l’espèce, en s’appuyant sur les constatations du rapport d’enquête de l’OLAF, la Commission a conclu à l’inéligibilité des coûts de personnel déclarés par la requérante, dès lors que ceux-ci comportaient une marge de profit et a, par conséquent, sollicité le remboursement de la totalité des paiements liés aux coûts de personnel déclarés par la requérante. Ainsi, il y a lieu de constater que la Commission est strictement restée à l’intérieur du cadre contractuel qui la liait à la requérante, puisqu’elle s’est contentée de faire application de l’article 19 de l’annexe II à la convention de subvention, lu en combinaison avec l’article 13 de cette même annexe, en sollicitant le remboursement de coûts inéligibles au financement de l’Union, la requérante n’étant pas parvenue à démontrer que toute marge de profit concernant ses dépenses de personnel avait été exclue.

88      Force est donc de constater que la requérante a violé une obligation financière stipulée dans la convention de subvention, dans la mesure où elle n’a pas dûment justifié les coûts de personnel déclarés. Or, le non-respect de cette obligation est un motif suffisant pour rejeter l’ensemble de ces coûts.

89      Dès lors, il y a lieu de conclure que la note de débit envoyée à la requérante, en ce qu’elle exige le remboursement de coûts inéligibles au financement de l’Union, est justifiée au regard des stipulations de la convention de subvention. Partant, il convient d’écarter le deuxième moyen du recours.

 Sur le troisième moyen, tiré du caractère disproportionné de la note de débit

90      La requérante, qui relève que la Commission n’a pas souhaité procéder au recouvrement de l’intégralité de la contribution financière de l’Union qui lui a été versée, mais seulement à celui des coûts de personnel déclarés, fait valoir que cette institution n’a pas agi sur le terrain de l’article 3, paragraphe 6, de l’annexe II de la convention de subvention, mais a uniquement souhaité procéder au recouvrement d’un montant indûment versé, en application de l’article 19 de cette annexe. Or, ce faisant, la Commission aurait dû déterminer avec exactitude le montant à rembourser, sans quoi cela constituerait tant une violation de la convention de subvention qu’une violation du principe de proportionnalité.

91      En l’espèce, il convient de relever, comme le fait valoir à juste titre la requérante, qu’il ressort clairement de la note de débit ainsi que des lettres des 18 novembre 2015 et 27 septembre 2017 que la Commission s’est fondée, pour demander le remboursement de la créance contractuelle litigieuse, sur l’article 19 de l’annexe II de la convention de subvention. Selon cette disposition, si un montant est indûment versé ou si le recouvrement est justifié en vertu des clauses du contrat, le bénéficiaire doit rembourser à la Commission la somme en cause.

92      Ainsi, en se prévalant, dans la note de débit, de l’article 19 de l’annexe II de la convention de subvention comme base juridique de la demande de remboursement de la créance contractuelle litigieuse, la Commission entendait procéder au recouvrement d’une somme en raison d’une violation de stipulations contractuelles, à savoir, en l’espèce, des coûts de personnel inéligibles au financement de l’Union en raison de la réalisation d’une marge de profit prohibée par l’article 13 de l’annexe II à la convention de subvention.

93      Force est donc de constater que, en se prévalant du seul article 19 de l’annexe II de la convention de subvention et en n’exigeant pas de la requérante le remboursement de l’intégralité de la contribution financière de l’Union qui lui a été versée, la Commission, contrairement à ce que soutient la requérante devant le Tribunal, n’a pas fondé sa demande de remboursement de la créance contractuelle litigieuse sur l’article 3, paragraphe 6, de l’annexe II de la convention de subvention, dont l’application aurait nécessité soit la démonstration de l’existence d’une fraude, soit l’appréciation circonstanciée du degré de gravité de l’irrégularité financière reprochée à la requérante et aurait entraîné le remboursement de l’intégralité de la contribution financière de l’Union versée à la requérante.

94      Quant à l’argumentation de la requérante selon laquelle, en substance, l’article 19 de l’annexe II de la convention de subvention permettait seulement à la Commission de demander le remboursement d’un montant indûment versé, c’est-à-dire, en l’espèce, la seule marge de profit le cas échéant réalisée, il y a lieu de relever que celle-ci procède d’une lecture erronée de la disposition en cause. En effet, selon cette disposition, deux situations distinctes sont envisagées, à savoir, d’une part, l’existence d’un versement indu de la part de la Commission et, d’autre part, le cas d’une somme dont le recouvrement, auprès du bénéficiaire, serait justifié en vertu des clauses du contrat. Or, en l’espèce, la situation dans laquelle se trouve la requérante est celle du recouvrement justifié en vertu des clauses du contrat lorsqu’est constaté le caractère inéligible d’une dépense. À cet égard, il est rappelé que la seule existence d’une marge de profit, quelle qu’en soit l’ampleur, implique qu’une dépense déclarée perde sa qualification de coût éligible et puisse, dans sa totalité, faire l’objet d’un recouvrement. Partant, cet argument doit être écarté.

95      S’agissant de l’argumentation de la requérante selon laquelle, en substance, l’action de la Commission constituerait une violation du principe de proportionnalité, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, le principe de proportionnalité constitue un principe général de droit de l’Union, qui est consacré par l’article 5, paragraphe 4, TUE, et qui exige que les actes des institutions de l’Union ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire pour atteindre le but recherché (arrêt du 25 janvier 2017, ANKO/Commission, T‑768/14, non publié, EU:T:2017:28, point 135).

96      Il convient également de relever que le principe de proportionnalité a vocation à régir tous les modes d’action de l’Union, qu’ils soient ou non contractuels (arrêt du 25 janvier 2017, ANKO/Commission, T‑768/14, non publié, EU:T:2017:28, point 136). En effet, dans le contexte de l’exécution d’obligations contractuelles, le respect de ce principe participe à l’obligation plus générale des parties à un contrat de l’exécuter de bonne foi. En vertu du droit belge applicable, à titre subsidiaire, à la convention de subvention, l’obligation d’exécuter de bonne foi les conventions interdit à une partie d’exercer un droit d’une manière qui excède manifestement les limites de l’exercice normal de ce droit par une personne prudente et diligente.

97      Comme cela a été expliqué au point 78 ci-dessus, afin que la Commission puisse exercer son contrôle, les bénéficiaires de subventions doivent démontrer le caractère éligible des coûts imputés aux projets subventionnés. Or, ainsi que cela a été constaté au point 88 ci-dessus, la requérante n’a pas dûment justifié les coûts de personnel déclarés, ce qui constitue un motif suffisant pour rejeter l’ensemble de ces coûts.

98      À cet égard, il convient de relever que la Commission est tenue, aux termes de l’article 317 TFUE, de respecter le principe de bonne gestion financière. Elle veille également à la protection des intérêts financiers de l’Union dans l’exécution du budget de celle-ci. Il en est de même en matière contractuelle, dès lors que les subventions accordées par la Commission sont issues du budget de l’Union. Par conséquent, la Commission ne peut pas, sans porter atteinte auxdits principes établis par le traité FUE, approuver une dépense à charge du budget de l’Union sans fondement juridique. Or, dans le contexte d’une subvention, c’est la convention de subvention qui régit les conditions d’octroi et d’utilisation de celle-ci et, plus particulièrement, les clauses relatives à la détermination du montant de cette subvention en fonction des coûts déclarés par le cocontractant de la Commission. Il s’ensuit que, si les coûts déclarés par un bénéficiaire ne sont pas éligibles au titre de la convention de subvention concernée, la Commission n’a d’autre choix que de procéder au recouvrement de la subvention à concurrence des montants non justifiés, dès lors que, sur la base du fondement juridique que constitue cette convention de subvention, cette institution n’est autorisée à liquider, à charge du budget de l’Union, que des sommes dûment justifiées.

99      À la lumière de ces principes et eu égard à l’ensemble des constatations effectuées par la Commission, il ne saurait être reproché à cette dernière d’avoir méconnu le principe d’exécution de bonne foi des conventions en demandant à la requérante le remboursement de la totalité des dépenses de personnel imputées à la convention de subvention, représentant certes la quasi-intégralité de la somme versée à la requérante au titre de la convention de subvention, en raison du caractère inéligible desdites dépenses de personnel.

100    En effet, compte tenu de la violation des obligations contractuelles constatée dans le rapport d’enquête de l’OLAF et le rejet par le Tribunal des arguments de la requérante visant à remettre en cause cette constatation, il y a lieu de considérer que la demande de la Commission visant à obtenir le remboursement de la quasi-intégralité de la somme versée à la requérante au titre de la convention de subvention n’apparaît contraire ni au principe d’exécution de bonne foi des conventions ni à celui de l’interdiction de l’abus de droit, de sorte que l’argumentation de la requérante à cet égard n’est pas fondée. En outre, contrairement à ce que prétend la requérante, aucun élément du dossier ne permet de conclure que la Commission a agi en faisant usage de ses prérogatives de puissance publique. En effet, la demande de recouvrement d’une partie de la somme versée à la requérante découlant des stipulations de la convention de subvention, il s’ensuit que le grief tiré d’une violation du principe de proportionnalité par la Commission, invoqué en l’espèce par la requérante dans le contexte de l’exécution de cette convention, doit être rejeté.

101    Eu égard à l’ensemble de ce qui précède, il y a lieu d’écarter le troisième moyen et, partant, de rejeter le recours dans son ensemble.

 Sur la demande reconventionnelle présentée par la Commission

102    Dans le cadre du mémoire en défense, la Commission réclame, à titre reconventionnel, le remboursement de l’intégralité des montants versés à la requérante, dont elle n’aurait pas démontré le caractère de coûts réels ou éligibles en vertu de la convention de subvention. En particulier, elle demande, sur le fondement des constatations consignées dans le rapport d’enquête de l’OLAF, des conclusions qu’elle en a tirées et des articles 3, paragraphe 6, 17 et 19 de l’annexe II de la convention de subvention, le remboursement de la somme de 380 989,49 euros, versée à la requérante au titre de sa participation au projet, augmentés d’intérêts dus à compter du 17 novembre 2017, au taux appliqué par la BCE pour ses opérations principales de refinancement, en vigueur au 1er novembre 2017, majoré de trois points et demi.

103    La requérante estime que les conditions d’application de l’article 3, paragraphe 6, de l’annexe II de la convention de subvention ne sont pas remplies, de sorte que la demande reconventionnelle présentée par la Commission doit être rejetée. Elle fait cependant valoir que la Commission pourrait, tout au plus, demander, sur la base de l’article 19 de l’annexe II de la convention de subvention, la restitution du montant des subventions indûment versé, mais que, dans cette hypothèse, cette institution serait cependant tenue de déterminer et de chiffrer le montant de sa demande, ce qu’elle ne fait pas.

–       Sur les conclusions tendant au paiement de la somme due au principal

104    À titre liminaire, il convient de relever que la requérante se méprend en estimant que la Commission doit supporter la charge de la preuve afin d’étayer sa demande reconventionnelle en l’espèce. En effet, ainsi que le fait valoir la Commission, ses prétentions découlent de l’inobservation des obligations contractuelles incombant à la requérante en vertu de l’article 19 de l’annexe II de la convention de subvention, lu en combinaison avec l’article 13 de cette même annexe.

105    À cet égard, la requérante tente de renverser la charge de la preuve, dans la mesure où elle n’a pas pu démontrer à suffisance de droit que les dépenses de personnel qu’elle avait déclarées dans le cadre de l’exécution de la convention de subvention étaient éligibles et qu’elle avait droit aux montants correspondants.

106    Au demeurant, le rapport d’enquête de l’OLAF était seulement un moyen permettant à la Commission de collecter des éléments de preuve, en vue d’une éventuelle action en responsabilité contractuelle devant le Tribunal (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 8 septembre 2015, Amitié/Commission, T‑234/12, non publié, EU:T:2015:601, point 136). Il s’ensuit que les conclusions tirées par la Commission ainsi que l’ensemble des éléments qui les fondent doivent être analysés comme des éléments de preuve, présentés et invoqués à l’appui de la demande reconventionnelle.

107    Ainsi que cela a déjà été constaté au point 80 ci-dessus, la requérante, à laquelle revient la charge de la preuve du caractère éligible des dépenses qu’elle a déclarées dans le cadre de l’exécution de la convention de subvention, n’a pas fourni d’éléments de preuve suffisants aux fins de démontrer l’éligibilité des coûts de personnel déclarés.

108    Il s’ensuit que la Commission est fondée à demander que la requérante soit condamnée à lui payer la somme de 380 989,49 euros, dont il est constant qu’elle ne lui a pas été remboursée à ce jour.

–       Sur les conclusions tendant à ce que la somme due au principal soit majorée d’intérêts moratoires

109    En l’espèce, la Commission réclame le remboursement de la somme de 380 989,49 euros, qui aurait été indûment perçue par la requérante, en se fondant sur les conclusions tirées à partir du rapport d’enquête de l’OLAF, lesquelles mettent en avant une violation des obligations contractuelles incombant à celle-ci en vertu de l’article 19 de l’annexe II à la convention de subvention, lu en combinaison avec l’article 13 de cette même annexe. Ainsi que cela a été jugé précédemment, cette conclusion n’a pas été utilement ou valablement remise en cause par la requérante, qui n’a pas établi que les dépenses de personnel qu’elle avait déclarées dans le cadre de l’exécution de la convention de subvention constituaient des coûts éligibles au sens de ladite convention.

110    À cet égard, il convient de rappeler, en premier lieu, que la somme de 380 989,49 euros, perçue par la requérante au titre de sa participation au projet ne correspond pas à des dépenses déclarées par elle qui constitueraient des coûts éligibles, conformément à l’article 13 de l’annexe II de la convention de subvention.

111    En deuxième lieu, la Commission a émis la note de débit informant la requérante qu’elle avait constaté que celle-ci était redevable d’une créance d’un montant de 380 989,49 euros et spécifiant les conditions de son recouvrement ainsi que la date fixée à cet effet.

112    En troisième lieu, il est constant que, à l’expiration du délai imparti par la note de débit, la requérante n’a pas acquitté la somme mentionnée dans celle-ci.

113    Par conséquent, la créance de 380 989,49 euros sur la requérante doit être considérée comme étant certaine, liquide et exigible et n’ayant pas été payée au terme du délai de paiement accordé par la Commission dans la note de débit.

114    Quant au taux des intérêts moratoires dont la somme due en principal peut être assortie, il convient de rappeler que, conformément à l’article 19 de l’annexe II de la convention de subvention, si l’obligation de paiement n’est pas honorée à la date fixée par la Commission, la somme due est porteuse d’intérêts au taux appliqué par la BCE à ses opérations principales de refinancement, en euros, majoré de trois points et demi de pourcentage. Le taux de référence auquel s’applique la majoration est celui en vigueur le premier jour du mois de la date limite de paiement, ainsi publié au Journal officiel de l’Union européenne. Par ailleurs, il découle de l’article 19, paragraphe 2 susmentionné que les intérêts de retard portent sur la période écoulée entre la date fixée pour le paiement, ladite date non comprise, et la date à laquelle la Commission reçoit le remboursement intégral du montant dû, ladite date comprise.

115    Partant, le taux des intérêts moratoires applicable à la somme indiquée au point 108 ci-dessus est de 3,50 %, ce qui correspond au taux d’intérêt appliqué par la BCE à ses opérations principales de refinancement au 1er novembre 2017 (JO 2017, C 373, p. 1), soit 0,00 %, majoré de trois points et demi de pourcentage. Ces intérêts, conformément aux mentions figurant dans la note de débit et à l’article 19 de l’annexe II de la convention de subvention, sont dus à compter du lendemain de la date d’échéance prévue par ladite note, à savoir à compter du 17 novembre 2017, jusqu’au paiement intégral du montant visé au point 108 ci-dessus.

116    Au vu de tout ce qui précède, il convient, d’une part, de rejeter les conclusions présentées par la requérante et, d’autre part, de faire droit à la demande reconventionnelle de la Commission.

 Sur les dépens

117    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours présenté par BTC Srl est rejeté.

2)      BTC est condamnée à payer à la Commission européenne la somme principale de 380 989,49 euros, majorée d’intérêts de retard au taux de 3,50 % à compter du 17 novembre 2017 et jusqu’à complet paiement de cette somme.

3)      BTC supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission.

Pelikánová

Valančius

Öberg

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 19 septembre 2019.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.