Language of document : ECLI:EU:T:2024:70

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

7 février 2024 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative J&B BRO – Marques de l’Union européenne figuratives antérieures 4BRO – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Similitude des signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑318/23,

J&B Ltd, établie à Road Town (Îles Vierges britanniques), représentée par Mes C. Thomas et B. Reiter, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme S. Scardocchia et M. A. Ringelhann, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Engin Ergün, demeurant à Dortmund (Allemagne),

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de MM. A. Kornezov (rapporteur), président, D. Petrlík et K. Kecsmár, juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, J&B Ltd, demande l’annulation de la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 12 avril 2023 (affaire R 2012/2022-1) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 22 septembre 2020, la requérante, J&B Ltd, a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

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3        La marque demandée désignait les produits relevant des classes 32 et 34 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 32 : « Boissons énergisantes » ;

–        classe 34 : « Cigarettes ; cigares ; cigarettes à filtre ; pipes ; blagues à tabac ; pots à tabac ; briquets pour fumeurs ; cigarettes contenant des succédanés du tabac non à usage médical ; étuis à cigarettes ; herbes à fumer ; filtres pour cigarettes ».

4        Le 4 février 2021, M. Engin Ergün a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était notamment fondée sur deux marques identiques dont la demande d’enregistrement a été déposée le 24 juin 2020, à savoir, d’une part, la marque de l’Union européenne figurative 4BRO enregistrée le 16 juin 2021 sous le numéro 18461989, désignant notamment les produits « tabac ; articles pour fumeurs ; allumettes » relevant de la classe 34, et, d’autre part, la marque de l’Union européenne figurative 4BRO enregistrée le 23 février 2022 sous le numéro 18260881 et désignant notamment les « bières ; eaux minérales et gazeuses et autres boissons non alcooliques ; boissons à base de fruits et jus de fruits ; sirops et autres préparations pour faire des boissons », relevant de la classe 32 (ci-après, prises ensemble, les « marques antérieures »). La représentation graphique de ces deux marques, qui est identique, est reproduite ci-dessous :

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6        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

7        Le 16 août 2022, la division d’opposition a fait droit à l’opposition.

8        Le 17 octobre 2022, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

9        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        annuler la décision de la division d’opposition et, par conséquent, rejeter l’opposition ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

11      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        si une procédure orale est organisée, condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur le fond

12      La requérante invoque, en substance, un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

13      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsqu’en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée. Ce risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

14      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion, le risque que le public puisse croire que les produits ou services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celles des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

15      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

16      En l’espèce, la chambre de recours a relevé que, étant donné que les marques antérieures étaient des marques de l’Union européenne, l’appréciation du risque de confusion dépendait de la perception du public pertinent des États membres de l’Union européenne. Elle a également observé, en substance, que les produits compris dans les classes 32 et 34 s’adressaient au grand public, qui était censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. La requérante ne conteste pas cette définition du public pertinent.

17      Aux points 19 et 20 de la décision attaquée, la chambre de recours a renvoyé à la motivation de la décision de la division d’opposition sur la comparaison des produits en cause, selon laquelle ces derniers sont pour partie identiques et pour partie similaires. La requérante ne conteste pas non plus l’analyse de la chambre de recours sur ce point.

 Sur la comparaison des signes

18      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des marques en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

19      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée).

–       Sur les éléments distinctifs et dominants des marques en conflit

20      La requérante fait valoir, en substance, que l’élément « 4bro » des marques antérieures et l’élément verbal « bro » de la marque demandée ne sauraient dominer l’impression d’ensemble des marques en conflit en raison du fait qu’ils n’ont qu’un degré de caractère distinctif faible, voire inexistant. Ainsi, la chambre de recours aurait commis une erreur d’appréciation en considérant que les autres éléments desdites marques, et notamment leurs représentations graphiques respectives, n’avaient qu’un impact limité dans la comparaison des signes.

21      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

22      S’agissant de l’appréciation du caractère dominant d’un ou plusieurs composants déterminés d’une marque complexe, il convient de prendre en compte, notamment, les qualités intrinsèques de chacun de ces composants en les comparant à celles des autres composants. En outre et de manière accessoire, peut être prise en compte la position relative des différents composants dans la configuration de la marque complexe [arrêt du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, EU:T:2002:261, point 35].

23      À cet égard, il convient tout d’abord de relever qu’il n’est pas contesté que l’élément verbal « bro », commun aux marques en conflit, sera compris, au moins par une partie du public pertinent, comme une abréviation du mot anglais « brother » (« frère » ou « copain ») tandis que le chiffre « 4 » des marques antérieures sera compris, par cette même partie du public pertinent, comme faisant référence au mot « for » (« pour »), et que, partant, l’élément verbal « 4bro » sera compris par ledit public comme signifiant « pour les frères » ou « pour les copains ».

24      À supposer même que, comme le fait valoir la requérante, l’élément verbal « bro » de la marque demandée et l’élément verbal « 4bro » des marques antérieures ne soient, en raison de cette signification, que faiblement distinctifs, cela n’implique pas nécessairement que ceux-ci ne sauraient constituer un élément dominant, dès lors que, en raison, notamment, de leur position dans les signes en cause ou de leur dimension, ils sont susceptibles de s’imposer à la perception du consommateur et d’être gardés en mémoire par celui-ci [arrêt du 13 juin 2006, Inex/OHMI – Wiseman (Représentation d’une peau de vache), T‑153/03, EU:T:2006:157, point 32]. Il en va d’autant plus ainsi qu’il résulte de la jurisprudence que les critères au regard desquels le caractère distinctif d’un élément composant une marque complexe est apprécié sont différents de ceux relatifs au caractère dominant d’un tel élément [voir, en ce sens, arrêt du 25 octobre 2023, Olimp Laboratories/EUIPO – Schmitzer (HPU AND YOU), T‑511/22, non publié, EU:T:2023:673, points 39 et 47 et jurisprudence citée].

25      En l’espèce, premièrement, il convient de constater, à l’instar de la chambre de recours, que la marque demandée est une marque figurative composée de l’élément verbal « bro », représenté en lettres majuscules, dans une police de caractères légèrement stylisée. Cet élément revêt une dimension prépondérante et une position centrale au sein de celle-ci, notamment par rapport à l’élément verbal « j&b », lequel se situe devant l’élément verbal « bro », verticalement, dans une police de caractère beaucoup plus petite, qui le rend difficilement visible. Comme l’a relevé à juste titre, en substance, la chambre de recours, ce dernier apparait donc, en raison de sa taille et de sa position au sein de la marque demandée, comme négligeable dans l’impression d’ensemble de celle-ci et n’est pratiquement pas lisible. De même, la légère stylisation de ladite marque ne revêt qu’une importance secondaire. Dès lors, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, en substance, que l’élément verbal « bro » constituait l’élément dominant de la marque demandée.

26      Deuxièmement, s’agissant des marques antérieures, force est de constater, à l’instar de la chambre de recours au point 24 de la décision attaquée, qu’elles sont identiques, que l’élément verbal « 4bro » constitue l’unique élément verbal de celles-ci et qu’elles ne comportent, outre la légère stylisation de cet élément, aucun élément figuratif. De plus, la police de caractères, majuscule avec des lettres légèrement allongées verticalement, est plutôt usuelle. Comme l’a estimé à juste titre la chambre de recours, les deux petits traits verticaux disposés en haut et en bas de la lettre « b » sont à peine perceptibles et, partant, négligeables. De même, la couleur dorée utilisée dans lesdites marques n’est pas, à elle seule, susceptible de dominer leur impression d’ensemble, en ce qu’elle remplit une fonction purement décorative et ne saurait être considérée comme un élément original. Partant, il convient, d’une part, de rejeter l’argument de la requérante selon lequel l’élément verbal « 4bro » ne saurait dominer l’impression d’ensemble des marques antérieures et, d’autre part, de constater que c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a considéré, en substance, que la représentation graphique des marques antérieures n’avait qu’un impact limité dans l’impression d’ensemble créée par celles-ci.

–       Sur la similitude visuelle

27      La requérante fait valoir, en substance, qu’en raison de la présence du chiffre « 4 » dans les marques antérieures ainsi que de la couleur et de la police de caractères des marques en conflit, il existe, tout au plus, une faible similitude visuelle entre les marques en conflit et non pas une similitude au moins moyenne, comme l’a constaté la chambre de recours.

28      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

29      En l’espèce, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, au point 26 de la décision attaquée, que les marques en conflit coïncidaient par leur l’élément verbal commun « bro », lequel constitue l’élément dominant de la marque demandée et qu’ils différaient, en substance, par la présence du chiffre « 4 » dans les marques antérieures, la présence de l’élément « j&b » dans la marque demandée, ainsi que par leur représentation graphique.

30      Comme relevé aux points 25 et 26 ci-dessus, les représentations graphiques des marques en conflit ne remplissent qu’une fonction purement décorative. En outre, la police de caractères utilisée dans la marque demandée correspond à une police majuscule standard, qui ne se différencie pas de manière substantielle de celle utilisée dans les marques antérieures, elle aussi majuscule, mais légèrement allongée verticalement.

31      Ainsi, les représentations graphiques de ces éléments ne sont pas à même de réduire sensiblement la similitude visuelle résultant de l’élément verbal « bro » commun aux marques aux conflits, lequel constitue l’élément dominant de la marque demandée et la quasi-totalité de l’unique élément verbal des marques antérieures.

32      Quant à la différence résultant de la présence du chiffre « 4 » dans les marques antérieures, contrairement à ce que soutient la requérante, il découle du point 26 de la décision attaquée que la chambre de recours a pris en considération cet élément, en conjonction avec d’autres, pour conclure à l’existence d’un degré de similitude visuelle moyen. C’est donc précisément en raison des éléments de différenciation identifiés par la requérante que la chambre de recours a conclu, à bon droit, à un degré de similitude visuelle moyen et non élevé.

–       Sur la similitude phonétique

33      Sur le plan phonétique, la requérante considère, en substance, que la chambre de recours n’a pas porté une attention suffisante à la prononciation du chiffre « 4 » des marques antérieures, qui constituerait un élément de distinction clair des marques en conflit. En particulier, elle fait valoir que le début d’une marque fait l’objet d’une attention particulière et que les marques antérieures contiennent deux syllabes, à la différence de la marque contestée, constituée, quant à elle, d’une seule syllabe. Partant, les marques en conflit seraient différentes sur le plan phonétique et non pas hautement similaires, comme l’a considéré la chambre de recours.

34      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

35      En l’espèce, il convient de rappeler que, comme relevé au point 25 ci-dessus, l’élément « J&B » occupe une position négligeable, au sein de la marque demandée, et que celui-ci n’est que difficilement lisible. Ainsi, en raison de sa position au sein de cette dernière et de sa petite taille, il ne sera vraisemblablement pas prononcé par le public pertinent. Partant, c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a constaté, au point 27 de la décision attaquée, que la marque demandée sera prononcée par le public pertinent en une seule syllabe « bro ». Quant aux marques antérieures, comme relevé à juste titre par la chambre de recours, celles-ci seront prononcées en deux syllabes « for » et « bro », ce qui n’est pas contesté par la requérante.

36      Partant, force est de constater que, comme l’a relevé en substance la chambre de recours, l’élément verbal « bro », seul élément prononcé de la marque demandée, est entièrement inclus dans la prononciation des marques antérieures. Ces dernières partagent donc avec la marque demandée une syllabe sur deux. Dès lors, il convient de rejeter l’argument de la requérante selon lequel les marques en conflit seraient différentes sur le plan phonétique.

37      Toutefois, comme le fait valoir la requérante, l’adjonction du chiffre « 4 » – prononcé « for » – au terme « bro » dans les marques antérieures double le nombre de syllabes des celles-ci par rapport à celui de la marque demandée, ce qui atténue le degré de similitude phonétique entre les marques en conflit.

38      À la lumière de ces considérations, il y a lieu de conclure à un degré de similitude phonétique moyen entre les marques en conflit, et non élevé, comme cela a été retenu par la chambre de recours au point 27 de la décision attaquée.

–       Sur la similitude conceptuelle

39      La requérante estime que le chiffre « 4 » inclus dans les marques antérieures introduit une distinction claire sur le plan conceptuel entre les marques en conflit. Elle en conclut que lesdites marques présentent un faible degré de similitude conceptuelle, et non pas élevé comme l’a considéré la chambre de recours, en ce que la marque demandée signifierait « frère » ou « copain », alors que les marques antérieures signifieraient « pour les frères » ou « pour les copains ».

40      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

41      Premièrement, il convient de relever que la requérante ne conteste pas le fait que l’élément « j&b » de la marque demandée est négligeable dans la comparaison conceptuelle.

42      Deuxièmement, comme relevé à juste titre par la chambre de recours, sans que cela soit contesté par la requérante, les marques en conflit coïncident par la signification de leur élément « bro », lequel sera compris comme signifiant « frère » ou « copain ».

43      Toutefois, dans la mesure où la requérante fait valoir que les marques en conflit ne présentent qu’un faible degré de similitude conceptuelle, étant donné que les marques antérieures seraient comprises comme signifiant « pour les frères » ou « pour les copains » tandis que la marque demandée évoquerait uniquement le concept de « frère » ou de « copain », il convient de relever que ces deux significations conceptuelles ne sont pas fondamentalement différentes. En effet, elles évoquent toutes les deux, en substance, le même concept, soit de fraternité, soit d’amitié.

44      Dans ces circonstances, c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un degré de similitude conceptuelle élevé entre les marques en conflit.

 Sur le caractère distinctif des marques antérieures

45      La requérante conteste la conclusion de la chambre de recours selon laquelle le caractère distinctif des marques antérieures est moyen. À cet égard, elle fait valoir, en premier lieu, que l’élément verbal « 4bro » n’est perçu par le public pertinent que comme un simple slogan publicitaire et que, dès lors, il est dépourvu de caractère distinctif et « pourrait être contesté en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du [règlement 2017/1001] ».

46      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

47      À cet égard, il convient de rappeler que le caractère distinctif des marques antérieures concerne l’aptitude de ces marques à identifier les produits ou les services pour lesquels elles ont été enregistrées comme provenant d’une entreprise déterminée et donc à distinguer ces produits ou services de ceux d’autres entreprises (voir arrêt du 11 juin 2020, China Construction Bank/EUIPO, C‑115/19 P, EU:C:2020:469, point 56 et jurisprudence citée).

48      Dans ce contexte, le caractère distinctif d’une marque doit être apprécié en fonction des produits ou des services visés par celle-ci et de la perception présumée des milieux intéressés (voir arrêt du 11 juin 2020, China Construction Bank/EUIPO, C‑115/19 P, EU:C:2020:469, point 72 et jurisprudence citée).

49      En l’espèce, premièrement, il est constant entre les parties que les marques antérieures, comprises comme signifiant « pour les frères » ou « pour les copains », n’ont aucun lien direct et évident avec les produits qu’elles visent et que, partant, elles ne sont pas descriptives de ces derniers.

50      Deuxièmement, en soutenant que le public pertinent percevrait l’unique élément verbal des marques antérieures, à savoir « 4bro », comme un slogan publicitaire à caractère laudatif qui « pourrait être contesté en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du [règlement 2017/1001] », la requérante conteste, en réalité, le caractère enregistrable de ces marques en ce qu’elles seraient dépourvues de caractère distinctif.

51      Toutefois, le fait qu’une marque antérieure ait été enregistrée implique qu’elle jouit d’un minimum de caractère distinctif intrinsèque, puisque l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 exclut l’enregistrement d’une marque dépourvue de caractère distinctif. Or, un demandeur de marque ne peut, dans le cadre d’une procédure d’opposition, remettre en cause la validité de ladite marque antérieure. S’agissant plus particulièrement d’une marque de l’Union européenne antérieure, telle que les marques antérieures, sa validité ne peut être remise en cause à ce titre que dans le cadre d’une demande en nullité formée sur le fondement de l’article 63, paragraphe 1, sous a) du règlement 2017/1001, lu en combinaison avec l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement [voir arrêt du 30 mars 2022, Kalita et Haas/EUIPO – Kitzbühel Tourismus (Représentation de deux animaux), T‑206/21, non publié, EU:T:2022:191, point 59 et jurisprudence citée].

52      Partant, le grief de la requérante selon lequel les marques antérieures seraient dépourvues de caractère distinctif doit être rejeté.

53      Cette conclusion n’est pas remise en cause par les décisions de l’EUIPO et du Deutsches Patent- und Markenamt (Office des brevets et des marques allemand, Allemagne), auxquelles fait référence la requérante afin de démontrer l’absence de caractère distinctif de marques composées des éléments « for » ou « bro ». En effet, il suffit de rappeler, d’une part, que le régime des marques de l’Union européenne est autonome et que la légalité des décisions des chambres de recours s’apprécie uniquement sur la base du règlement 2017/1001, de sorte que l’EUIPO ou, sur recours, le Tribunal, ne sont pas tenus de parvenir à des résultats identiques à ceux atteints par les administrations ou les juridictions nationales dans une situation similaire [voir arrêt du 15 décembre 2015, LTJ Diffusion/OHMI – Arthur et Aston (ARTHUR & ASTON), T‑83/14, EU:T:2015:974, point 37 et jurisprudence citée].

54      D’autre part, les décisions que les chambres de recours de l’EUIPO sont amenées à prendre, en vertu du règlement 2017/1001, concernant l’enregistrement d’un signe en tant que marque de l’Union européenne, relèvent de l’exercice d’une compétence liée et non d’un pouvoir discrétionnaire. Dès lors, la légalité desdites décisions doit être appréciée uniquement sur le fondement de ce règlement, tel qu’interprété par le juge de l’Union, et non sur celui d’une pratique décisionnelle antérieure à celles-ci (voir, en ce sens, arrêt du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, EU:C:2007:252, point 65).

55      En second lieu, selon la requérante, les marques antérieures n’auraient, tout au plus, qu’un faible caractère distinctif dû à leur représentation graphique, l’élément verbal « 4bro » ne constituant qu’un message promotionnel purement laudatif.

56      À cet égard, à supposer même que les marques antérieures ne sont que faiblement distinctives, il convient de constater qu’une telle circonstance demeurerait sans incidence sur la légalité de la décision attaquée pour les motifs exposés au point 63 ci-après.

 Sur le risque de confusion

57      Aux points 29 et 30 de la décision attaquée, la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion compte tenu du fait que les produits en cause étaient similaires ou identiques, du degré de similitude élevé sur les plans phonétique et conceptuel et moyen sur le plan visuel des marques en conflit, du niveau d’attention moyen du public pertinent et du caractère distinctif moyen des marques antérieures.

58      Reprenant, en substance, les arguments résumés aux points 20, 27, 33, 39, 45 et 55 ci-dessus, la requérante soutient qu’il n’existe, tout au plus, qu’un faible degré de similitude sur les plans visuel et conceptuel, une absence de similitude sur le plan phonétique et que les marques antérieures sont, soit dépourvues de caractère distinctif, soit, tout au plus, pourvues d’un caractère distinctif faible. Elle ajoute que la présence de l’élément « j&b » permet d’identifier la marque demandée comme étant celle de la requérante, de sorte que tout risque de confusion serait exclu.

59      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

60      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermseister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

61      En l’espèce, il convient de relever que l’essentiel de l’argumentation de la requérante relative au risque de confusion repose sur des prémisses erronées, lesquelles ont été rejetées aux points 32, 44, 52 et 56 ci-dessus.

62      En effet, compte tenu du niveau d’attention moyen du public pertinent, du fait que les produits en cause sont en partie similaires et en partie identiques, de la similitude moyenne entre les marques en conflit sur les plans visuels et phonétiques et élevée sur le plan conceptuel, ainsi que du fait que les marques antérieures sont pourvues d’un certain caractère distinctif, il convient de considérer, dans le cadre d’une appréciation globale, que c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu qu’il existait un risque de confusion.

63      Cette conclusion demeure valide même dans l’hypothèse où le caractère distinctif des marques antérieures devait être considéré comme étant faible. En effet, si le caractère distinctif des marques antérieures doit être pris en compte pour apprécier le risque de confusion, il n’est qu’un élément parmi d’autres intervenant lors de cette appréciation. Ainsi, même en présence d’une marque antérieure à caractère distinctif faible, il peut exister un risque de confusion, notamment, en raison d’une similitude des signes et des produits ou des services visés, comme c’est le cas en l’espèce [voir arrêt du 5 octobre 2020, Eugène Perma France/EUIPO – SPI Investments Group (NATURANOVE), T‑602/19, non publié, EU:T:2020:463, point 55 et jurisprudence citée].

64      Quant à l’argument de la requérante relatif à l’élément « j&b » de la marque demandée en tant qu’élément de distinction entre les marques en conflit, susceptible d’ôter le risque de confusion, il suffit de rappeler que, comme constaté au point 25 ci-dessus, cet élément n’a qu’un caractère négligeable au sein de la marque demandée, de sorte que cet argument ne peut qu’être rejeté.

65      Compte tenu de l’ensemble de ces facteurs, c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion.

66      Au vu de ce qui précède, le moyen unique tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 doit être rejeté et, par voie de conséquence, le recours dans son intégralité, sans qu’il soit besoin de se prononcer, d’une part, sur la recevabilité de la première partie du deuxième chef de conclusions de la requérante, consistant en une demande d’annulation de la décision de la division d’opposition et, d’autre part, sur les arguments de la requérante relatifs à la marque de l’Union européenne antérieure no 18145698, laquelle ne fait pas l’objet du présent recours.

 Sur les dépens

67      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

68      Bien que la requérante ait succombé, l’EUIPO n’a conclu à la condamnation de celle-ci aux dépens qu’en cas d’organisation d’une procédure orale. En l’absence d’organisation d’une audience, il convient de décider que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      J&B Ltd et l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) supporteront leurs propres dépens.

Kornezov

Petrlík

Kecsmár

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 février 2024.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.