Language of document : ECLI:EU:T:2023:760

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

29 novembre 2023 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative CROSSWOD EQUIPMENT – Marques de l’Union européenne et enregistrement international d’une marque verbaux antérieurs CROSSFIT – Marque de l’Union européenne verbale antérieure CROSS – Motifs relatifs de refus – Absence de risque de confusion – Absence de similitude des signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 – Absence d’atteinte à la renommée – Article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑506/22,

CrossFit LLC, établie à Boulder, Colorado (États-Unis), représentée par Me D. Mărginean, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. E. Markakis, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Pitk Pelotas, SL, établie à Noain (Espagne),

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de MM. D. Spielmann, président, R. Mastroianni (rapporteur) et Mme M. Brkan, juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, CrossFit LLC, demande l’annulation et la réformation de la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 22 juin 2022 (affaire R 325/2021-1) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 14 mai 2019, Pitk Pelotas, SL a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

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3        La marque demandée désignait les produits relevant des classes 25 et 28 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 25 : « Vêtements, chaussures, chapellerie ; vêtements de gymnastique ; vêtements de sport ; survêtements » ;

–        classe 28 : « Jeux, jouets ; articles de gymnastique et de sport ; articles de gymnastique ; appareils pour le culturisme ; articles de gymnastique ; équipements de sport ».

4        Le 9 octobre 2019, la requérante a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était fondée, notamment, sur les droits antérieurs suivants :

–        la marque de l’Union européenne verbale CROSSFIT, enregistrée le 28 juin 2014 sous le numéro 12850673 pour les produits relevant des classes 16 et 28 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 16 : « Articles en papier et produits de l’imprimerie, à savoir série de livres, articles écrits, documentation et feuilles de travail dans les domaines de la remise en forme, de la nutrition, du sport et de l’exercice ; matériel imprimé d’instruction, d’éducation, et d’enseignement dans les domaines de la remise en forme, de la nutrition, du sport et de l’exercice ; magazines dans les domaines de la condition physique, de la nutrition, du sport et de l’exercice ; magazines à caractère général ; cahiers d’exercice ; affiches, autocollants pour voitures » ;

–        classe 28 : « Appareils pour le maintien de la forme physique, à savoir barres d’haltérophilie, haltères, balles utilisées en médecine, filets [articles de sport], barres d’exercices, machines et installations de remise en forme, notamment rameurs ; poids pour l’exercice ; articles de gymnastique » ;

–        la marque de l’Union européenne verbale CROSSFIT, enregistrée le 2 août 2007 sous le numéro 5049192 et renouvelée jusqu’au 2 mai 2026 pour les produits et services relevant des classes 9, 38 et 41 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 9 : « Revues en ligne dans le domaine de la remise en forme physique et de la nutrition ; enregistrement audio et audiovisuels, à savoir cassettes, disques compacts, vidéos, DVD et CD-ROM préenregistrés dans le domaine de la santé, de la remise en forme ou de la nutrition ; dispositifs semi-conducteurs contenant des sons et/ou des vidéos et/ou des images enregistrés ; musique, sons, images, textes, signaux, logiciels, informations, données et codes fournis par des réseaux de télécommunications, par livraison en ligne et via l’internet ; films photographiques et cinématographiques destinés à la projection ; logiciels informatiques ; publications non imprimées ; cartes de crédit, d’identité et/ou de membre électroniques, magnétiques et optiques ; lunettes de soleil et leurs étuis et sacs » ;

–        classe 38 : « Services d’un forum de discussion et d’un tableau d’affichage électronique ; diffusion et distribution électroniques de données et d’informations dans le domaine de la remise en forme physique et de la nutrition ; services d’informations, de conseils et d’assistance concernant les services précités, y compris fourniture de ces services en ligne à partir de l’internet ou d’extranets » ;

–        classe 41 : « Fitness ; fourniture de services de remise en forme physique interactifs en ligne permettant aux utilisateurs de créer et/ou d’utiliser des programmes de remise en forme physique et du culturisme ; fourniture d’informations dans le domaine de la remise en forme physique et du culturisme ; services d’assistance en matière de dispositifs d’entraînement de remise en forme physique ; services d’éducation, d’instruction et de formation ; organisation et conduite de conférences et de séminaires éducatifs et de formation ; production d’enregistrements sonores et vidéo à caractère éducatif ; crédit-bail et location de matériel d’instruction et d’enseignement ; services d’éducation en ligne via une base de données informatique ou Internet ou encore des extranets ; organisation de cours, séminaires et ateliers ; conception, organisation, gestion et correction d’examens ; test de personnes ; fourniture de revues en ligne contenant des informations liées à la remise en forme physique et à la nutrition ; fourniture de blogs contenant des informations liées à la remise en forme physique et à des manifestations spéciales ; services d’informations, de conseils et d’assistance concernant les services précités, y compris fourniture de ces services en ligne à partir de l’internet ou d’extranets » ;

–        l’enregistrement international désignant l’Union européenne de la marque verbale CROSSFIT, enregistré le 13 juillet 2011 sous le numéro 1086145 pour les produits relevant de la classe 25 et correspondant aux « vêtements, à savoir chemises, pantalons, shorts, vestes, sweat-shirts, pantalons de survêtement, chapellerie, chaussettes et chaussures » ;

–        la marque de l’Union européenne verbale CROSS, enregistrée le 25 mai 2018 sous le numéro 17849894 pour les produits et services relevant des classes 28 et 41 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 28 : « Articles et équipement de sport ; barres à disques pour l’haltérophilie ; haltères pour l’haltérophilie ; balles d’exercice ; balles de gymnastique ; ballons de sport ; baudriers d’escalade ; filets [articles de sport] ; barres d’exercice physique ; engins pour exercices corporels ; rameurs (machines à ramer) ; haltères pour faire de l’exercice ; appareils de gymnastique ; équipements d’exercice physique à commande manuelle ; planches à roulettes ; jeux ; bicyclettes fixes d’entraînement » ;

–        classe 41 : « Enseignement ; formation ; services de divertissement ; activités sportives et culturelles ; cours de remise en forme physique ; services de sport et de remise en forme ; services de conseils relatifs à la forme physique ; services de préparateurs physiques [fitness] ; services d’éducation et d’instruction ; organisation de conférences en matière de formation professionnelle ; production d’enregistrements sonores et vidéo à caractère éducatif ; location de matériel pédagogique ; services d’éducation en ligne via des bases de données informatiques, Internet ou des extranets ; organisation de cours, de séminaires et d’ateliers ; organisation de tests mesurant le rendement ; services de cours d’évaluation de compétences ; publication en ligne de livres et revues spécialisées électroniques ; mise à disposition de publications électroniques en ligne non téléchargeables ; services de rédaction de blogs ; consultation en matière de formation en remise en forme physique ; services de renseignements concernant le monde du spectacle fournis en ligne à partir d’une base de données ou d’Internet ; publication de matériel éducatif accessible via des bases de données ou Internet ; fourniture d’informations sur les exercices de remise en forme via un portail en ligne ; services de reporters ; fourniture de divertissement via le podcast ; informations concernant des activités culturelles ; informations en matière de divertissement et d’évènements récréatifs par le biais de réseaux en ligne et d’Internet ; fourniture d’informations en matière d’activités sportives ; mise à disposition d’informations en matière d’éducation ; services d’enseignement en matière de nutrition ; mise à disposition d’informations en matière d’exercice physique par le biais d’un site Web en ligne ; mise à disposition en ligne de musique non téléchargeable ; fourniture de supports audio et visuels par le biais de réseaux de communication ; services de bibliothèques électroniques pour la fourniture d’informations électroniques (y compris informations d’archives) sous forme de textes, d’informations audio ou vidéo ; production d’enregistrements de sons ; production d’enregistrements audiovisuels ; services de jeux en ligne ; organisation et présentation de spectacles ; organisation de spectacles à des fins éducatives ; organisation de spectacles à des fins culturelles ; organisation de spectacles à des fins de divertissement ; organisation de manifestations sportives ; organisation de spectacles en direct ; représentation de spectacles ; organisation de jeux ; organisation de compétitions sportives ; organisation de compétitions ; organisation de cérémonies de remises de prix ; services de billetterie et de réservation pour évènements ; préparation et coordination de cours magistraux ; organisation et conduite de séminaires ; organisation et conduite d’ateliers de formation ; services d’entraînement physique ; organisation d’activités et de compétitions sportives ; mise à disposition de divertissement sportif via un site web ; services de conseil concernant les exercices physiques [fitness] ».

6        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), paragraphe 4, et paragraphe 5, du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

7        Le 18 décembre 2020, la division d’opposition a fait droit à l’opposition sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

8        Le 15 février 2021, Pitk Pelotas a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

9        Par la décision attaquée, la chambre de recours a accueilli le recours et rejeté l’opposition. Premièrement, s’agissant de l’existence d’un risque de confusion en ce qui concerne la marque demandée et les marques antérieures composées de l’élément verbal « crossfit », la chambre de recours a considéré, en substance, qu’il n’existait pas un tel risque dans l’esprit du public pertinent, compte tenu du faible caractère distinctif intrinsèque desdites marques antérieures, de leur faible degré de similitude visuelle, de leur degré moyen de similitude phonétique ainsi que de leur faible degré de similitude conceptuelle. Deuxièmement, s’agissant de l’existence d’un risque de confusion en ce qui concerne la marque demandée et la marque antérieure CROSS, la chambre de recours a considéré, en substance, que, en dépit de l’identité des produits, il n’existait pas un tel risque, compte tenu du faible caractère distinctif de la marque CROSS, du faible degré de similitude visuelle et conceptuelle entre les deux marques et de leur similitude phonétique tout au plus moyenne. En particulier, concernant le caractère distinctif faible de la marque CROSS, elle a considéré que le public pertinent comprendrait que ladite marque faisait référence à un certain type d’activités sportives, à savoir le « cross-country », évoquant la nature et la destination des produits visées par la marque antérieure. Troisièmement, la chambre de recours a considéré, en substance, que les éléments de preuve produits par la requérante afin de démontrer l’existence d’un caractère distinctif accru et d’une renommée de la marque antérieure CROSSFIT étaient insuffisants.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler partiellement la décision attaquée ;

–        rejeter la demande d’enregistrement ;

–        condamner Pitk Pelotas aux dépens.

11      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens en cas de convocation à une audience.

 En droit 

12      La requérante invoque trois moyens. Les premier et deuxième moyens sont tirés de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 en ce que la chambre de recours aurait conclu, à tort, qu’il n’y avait pas de risque de confusion, d’une part, en ce qui concerne le signe demandé et les marques antérieures CROSSFIT et, d’autre part, entre le signe demandé et la marque antérieure CROSS. Le troisième moyen est tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, en ce que la chambre de recours aurait conclu, à tort, que la renommée de la marque antérieure CROSSFIT n’avait pas été démontrée.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 en ce qui concerne les marques antérieures CROSSFIT

13      Dans le cadre de son premier moyen, premièrement, la requérante fait valoir que la chambre de recours a commis une erreur en considérant que l’élément « cross », commun aux marques en conflit, possédait un caractère distinctif faible. Deuxièmement, elle fait valoir que la chambre de recours a commis une erreur en considérant que, même s’il était établi, le caractère distinctif accru de la marque antérieure CROSSFIT ne modifierait pas le degré de caractère distinctif desdites marques antérieures. Troisièmement, la requérante soutient que la chambre de recours a commis une erreur en considérant que le caractère distinctif accru ainsi que la renommée des marques antérieures en cause n’étaient pas établis. Quatrièmement, la requérante fait valoir l’existence d’une contradiction dans l’argumentation de la chambre de recours en ce qui concerne la perception du mot « crossfit » par le public pertinent.

 Observations liminaires

14      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

15      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

16      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

17      Lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de l’Union européenne, il y a lieu de prendre en compte la perception des marques en conflit par le consommateur des produits ou des services en cause sur ce territoire. Toutefois, il convient de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001  existe dans une partie de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée].

18      C’est à la lumière des principes susmentionnés qu’il convient d’examiner le présent moyen.

 Sur le public pertinent

19      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que, pour les trois marques antérieures CROSSFIT, le territoire pertinent était celui de l’Union. En outre, elle a considéré que, les produits et les services en cause étant essentiellement des vêtements et des équipements de sport, le public pertinent était composé du grand public faisant preuve d’un niveau d’attention moyen ainsi que de professionnels opérant dans le domaine du sport et de la remise en forme. Cette appréciation n’a pas été contestée par les parties.

 Sur la comparaison des produits

20      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que les produits en cause étaient en partie identiques et en partie faiblement similaires aux produits et services couverts par les trois marques antérieures CROSSFIT. Cette appréciation n’a pas été contestée par les parties.

 Sur la comparaison des marques

21      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

22      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

23      Par ailleurs, il y a lieu d’observer que le caractère distinctif plus ou moins élevé des éléments communs à une marque demandée et à une marque antérieure est un des facteurs pertinents dans le cadre de l’appréciation de la similitude des signes [voir, en ce sens, arrêt du 14 septembre 2017, Aldi Einkauf/EUIPO – Weetabix (Alpenschmaus), T‑103/16, non publié, EU:T:2017:605, point 47 et jurisprudence citée].

24      À titre liminaire, il convient de relever que les marques antérieures sont notamment trois marques verbales composées du mot « crossfit ». La marque demandée, quant à elle, se compose de trois lettres en majuscules noires, « C », « R » et « O », d’un élément figuratif en rouge qui peut être perçu comme une lettre « s » stylisée, comme une double lettre « s » stylisée ou comme un élément fantaisiste, et de trois autres lettres en majuscules noires, « W », « O » et « D ». En dessous de ces éléments figure le terme « equipment » en caractères plus maigres.

–       Sur les éléments distinctifs et dominants

25      D’une part, la chambre de recours a considéré, en ce qui concerne les marques antérieures, que l’élément « cross », commun aux signes en conflit, présentait un caractère distinctif faible. En effet, en s’appuyant sur l’Oxford English Dictionary, elle a considéré que le mot anglais « cross », dans le cadre des activités sportives, était utilisé comme une forme abrégée de l’expression « cross-country », cette dernière se référant aux sports de course, d’équitation, de ski ou de conduite de véhicules à travers les champs ou les campagnes, par opposition aux routes et aux pistes. En outre, la chambre de recours a relevé que cette signification était associée à un mot figurant dans des dictionnaires français, allemand, italien et espagnol. Elle a ajouté que, compte tenu du caractère international des activités et des compétitions sportives, il était probable que les personnes non anglophones d’autres parties de l’Union connaissent la terminologie sportive anglaise et la signification du mot « cross » dans ce domaine. D’autre part, la chambre de recours a considéré que, s’agissant de l’élément « fit », malgré les différentes significations possibles de ce mot, il était compris dans l’ensemble de l’Union dans le contexte des produits et des services liés au sport et à la remise en forme physique comme faisant référence au terme anglais « fitness » (remise en forme), qui a fait sa place dans presque toutes les langues officielles de l’Union. Partant, la chambre de recours a considéré que, dans les marques antérieures, ni l’élément « cross » ni l’élément « fit » n’était dominant ou plus distinctif que l’autre.

26      S’agissant de la marque demandée, la chambre de recours a retenu, sans que la requérante ne le conteste, que, compte tenu de la taille, de la position et du caractère descriptif de l’élément « equipment », l’élément « crosswod » était l’élément distinctif et dominant de cette marque.

27      La requérante soutient que la chambre de recours a commis une erreur en concluant que l’élément verbal commun aux signes en conflit, à savoir « cross », possédait un faible caractère distinctif. Selon elle, en premier lieu, la définition donnée par la chambre de recours du terme « cross-country », duquel « cross » serait l’abréviation, ne figure pas dans le lien hypertexte produit, ni ne présente la simple définition du terme « cross ». En outre, la requérante fait valoir, s’agissant de l’existence du mot « cross » dans des dictionnaires français, allemand, italien et espagnol, que, même si le fait qu’un mot soit dans un dictionnaire constitue généralement la confirmation d’un usage relativement courant, il faut garder à l’esprit que tout le monde n’utilise pas ou ne comprend pas effectivement tous les mots et toutes les définitions figurant dans les dictionnaires. De plus, selon la requérante, l’utilisation d’un terme anglais dans une autre langue a habituellement lieu quand il n’y a pas d’équivalent de ce mot dans cette langue et que cela n’est pas le cas dans les quatre langues susmentionnées. Par conséquent, selon elle, le public dans les pays où lesdites langues sont parlées est plus enclin à utiliser le mot correspondant à « cross » et à « cross-country » dans sa propre langue que dans la version anglaise de ces mots.

28      En deuxième lieu, la requérante soutient que les significations les plus immédiates du terme « cross » pour les personnes anglophones ou non, y compris celles qui pratiquent le sport ou le fitness ou qui s’y intéressent, sont, d’une part, « une marque, un objet ou une figure comprenant deux lignes ou éléments courts formant une intersection » et, d’autre part, « un symbole de la chrétienté ». De plus, la requérante fait valoir que le grand public de l’Union n’est pas uniquement constitué de consommateurs anglophones et que, dès lors, il ne saurait être correct d’analyser la perception du mot « cross » qu’en fonction de la partie anglophone dudit public.

29      En troisième lieu, la requérante soutient qu’elle est également titulaire de la marque antérieure CROSS pour certains produits relevant des classes 28 et 41 et que ladite marque a été enregistrée sans avoir fait l’objet d’une opposition. Par conséquent, selon elle, l’élément « cross » ne peut avoir un caractère distinctif faible en lien avec les produits et les services en cause.

30      Enfin, la requérante fait valoir, en substance, qu’il existe un risque de confusion pour une partie du public susceptible de ne reconnaître aucun contenu sémantique dans les mots « crossfit », « cross » et « fit ».

31      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

32      Ainsi que l’a soulevé à juste titre la chambre de recours, il convient de relever que le Tribunal a déjà constaté que l’élément verbal « cross » pouvait être utilisé comme une abréviation du mot « cross-country » [voir, en ce sens, arrêt du 29 janvier 2020, Volkswagen/EUIPO (CROSS), T‑42/19, non publié, EU:T:2020:15, points 27 et 28]. En outre, à l’instar de la chambre de recours, il y a lieu de constater que le fait que « cross » soit considéré comme une abréviation de « cross‑country » figure également dans la version en ligne de quatre dictionnaires non anglophones, à savoir le dictionnaire français Le Robert, le dictionnaire allemand Duden, le dictionnaire italien Dizionario italiano De Mauro ainsi que le dictionnaire espagnol Diccionario de la Real Academia Española.

33      Dès lors, il y a lieu de constater que l’élément « cross » est compris, dans le contexte des produits et des services en cause, qui relèvent pour la plupart du domaine du sport et de la remise en forme, comme une évocation d’une telle discipline ou épreuve sportive. Une telle compréhension est partagée dans une partie significative de l’Union compte tenu également, ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours, du caractère international des activités et des compétitions sportives.

34      S’agissant des significations des éléments « crossfit » et « fit », il y a lieu de constater, à l’instar de l’EUIPO, que le public pertinent dans le domaine du sport et de la remise en forme dans l’ensemble de l’Union est susceptible de comprendre certains types de programmes de sports ou d’entraînements à travers l’expression « crossfit » ou à travers les mots « cross » et « fit », même si une partie dudit public n’est pas anglophone. Partant, la chambre de recours a conclu à juste titre que l’élément commun « cross » des signes en conflit, l’élément « fit » ainsi que l’élément « crossfit » dans son ensemble possédaient un caractère distinctif faible en ce qu’ils se référaient aux produits et services couverts par les marques antérieures et relevant des classes 25, 28 et 41.

35      Dès lors, il convient de constater que la chambre de recours a considéré à juste titre que, d’une part, ni l’élément « cross » ni l’élément « fit » des marques antérieures n’était dominant ou distinctif et que, d’autre part, dans la marque demandée, l’élément « crosswod » était l’élément le plus distinctif et dominant.

–       Sur les similitudes visuelle, phonétique et conceptuelle

36      Premièrement, la chambre de recours a considéré que, sur le plan visuel, les signes en conflit coïncidaient par l’élément « cross » et différaient par les éléments « wod », pour la marque demandée, et « fit » pour les marques antérieures. De plus, il existe des différences entre lesdits signes qui découlent de la présence d’éléments graphiques dans la marque demandée, à savoir la stylisation de la lettre « s » et la disposition du mot supplémentaire « equipment » sous le mot « crosswod », qui ne sera pas ignoré. Au vu de ce qui précède, la chambre de recours a considéré que le degré de similitude visuel entre les marques en conflit était faible.

37      Deuxièmement, sur le plan phonétique, la chambre de recours a considéré que la prononciation de l’élément « cross » des marques en conflit était identique ou similaire dans toutes les langues pertinentes, à savoir les langues officielles de l’Union, et que ladite prononciation différait par les éléments « fit » et « wod ». Elle ajoute qu’il est peu probable que l’élément non distinctif « equipment » de la marque demandée soit prononcé. Par conséquent, la chambre de recours a retenu un degré moyen de similitude phonétique.

38      Enfin, sur le plan conceptuel, la chambre de recours a considéré que, tout d’abord, dans son ensemble, l’élément verbal « crosswod » de la marque demandée était dépourvu de signification. Ensuite, elle a considéré que le mot « crossfit » pouvait être compris soit comme un programme de remise en forme intensif qui intègre des éléments issus d’un éventail de sports et d’exercices tels que l’haltérophilie et la gymnastique, soit comme n’ayant pas de signification claire mais comme évoquant une activité sportive liée au fitness dans la campagne ou mêlant différents exercices. Enfin, la chambre de recours a considéré que, dans la mesure où l’élément « cross » est considéré comme un mot anglais, la similitude conceptuelle reste faible en ce que « cross » sera perçu comme un mot faisant allusion au sport et au fitness.

39      Ces appréciations de la chambre de recours sur les similitudes visuelle, phonétique et conceptuelle n’ont pas été contestées par les parties.

 Sur l’appréciation globale du risque de confusion

40      En premier lieu, la chambre de recours a considéré que, compte tenu du faible caractère distinctif intrinsèque de l’élément « crossfit » pour les services liés au fitness compris dans la classe 41, un éventuel caractère distinctif accru de la marque antérieure pour les autres services couverts par cette marque et relevant de la classe 41 pourrait tout au plus conduire à un degré normal de caractère distinctif et ne suffirait pas à établir un risque de confusion en ce qui concerne les produits qui ne sont similaires qu’à un faible degré. Puis, elle a considéré que les preuves produites par la requérante n’étaient pas suffisantes pour établir le caractère distinctif accru des marques antérieures pour les services relevant de la classe 41.

41      En second lieu, la chambre de recours a considéré que, compte tenu du faible caractère distinctif de l’élément « cross » commun aux signes en conflit, du faible degré de similitude visuelle et conceptuelle ainsi que de la similitude tout au plus moyenne sur le plan phonétique, il n’existait pas de risque de confusion, même pour les produits identiques. Ainsi, elle a relevé que, malgré le fait que les signes en conflit ont en commun l’élément « cross », les différences entre ces signes, à savoir l’élément « wod » et la double lettre « s » stylisée de la marque demandée ainsi que l’élément « fit » de la marque antérieure, étaient suffisantes pour les distinguer avec certitude, même s’ils figurent sur des produits identiques.

42      En premier lieu, la requérante fait valoir que la chambre de recours a commis une erreur en considérant que l’élément verbal commun aux signes en conflit, à savoir « cross », possédait un faible caractère distinctif (voir points 27 à 29 ci-dessus). La requérante soutient qu’elle est également titulaire de la marque antérieure CROSS pour certains produits relevant des classes 28 et 41 et que ladite marque a été enregistrée sans avoir fait l’objet d’une opposition. Par conséquent, selon elle, l’élément « cross » ne peut avoir un caractère distinctif faible en lien avec les produits et les services en cause. Enfin, elle fait également valoir qu’il existe un risque de confusion pour une partie du public susceptible de ne pas comprendre la signification des mots « crossfit », « cross » et « fit ».

43      En deuxième lieu, s’agissant du caractère distinctif des marques antérieures CROSSFIT, la requérante soutient, en substance, que la chambre de recours a commis des erreurs d’appréciation, premièrement, en examinant le caractère distinctif accru des marques antérieures dans la partie qui analyse le risque de confusion et pas dans le cadre de l’appréciation de leur renommée, deuxièmement, en concluant que les éléments de preuve produits pour établir un caractère distinctif accru et la renommée de ses marques antérieures étaient insuffisants pour les services relevant de la classe 41 et, troisièmement, en considérant que, même s’il était établi, le caractère distinctif accru des marques antérieures CROSSFIT pourrait conduire tout au plus à un degré moyen de caractère distinctif.

44      En troisième lieu, s’agissant de l’appréciation globale du risque de confusion, la requérante, en substance, fait valoir qu’il y a une certaine contradiction entre le point 26 de la décision attaquée, selon lequel « une partie du public aura compris la marque antérieure comme une combinaison des mots “cross” et “fit” », et le point 40 de cette décision, d’après lequel « l’hypothèse selon laquelle les consommateurs pourraient diviser le mot “crossfit” en une partie significative (“fit”) et une partie qui n’aurait prétendument aucune signification pour les produits et services en cause (“cross”) contredit la règle générale selon laquelle un signe est perçu dans son ensemble ». Selon la requérante, il existe un risque de confusion pour une partie du public susceptible de ne reconnaître aucun contenu sémantique dans les mots « crossfit », « cross » et « fit ».

45      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

46      Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou services concernés, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services concernés. En application du principe d’interdépendance, il peut exister un risque de confusion, malgré un faible degré de similitude entre les marques en cause, lorsque la similitude des produits ou des services visés par celles-ci est grande [voir arrêt du 23 octobre 2002, Oberhauser/OHMI – Petit Liberto (Fifties), T‑104/01, EU:T:2002:262, point 50 et jurisprudence citée].

47      Ainsi qu’il découle du considérant 11 du règlement 2017/1001, l’appréciation du risque de confusion dépend de nombreux facteurs et notamment de la connaissance qu’a le public de la marque sur le marché en cause. Comme le risque de confusion est d’autant plus étendu que le caractère distinctif de la marque s’avère important, les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance qu’en a le public, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (voir, par analogie, arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 24 ; du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 18, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 20).

48      En outre, selon la jurisprudence, lorsque la marque antérieure et la marque demandée coïncident dans un élément de caractère faiblement distinctif au regard des produits en cause, l’appréciation globale du risque de confusion n’aboutit fréquemment pas au constat de l’existence de ce risque (arrêt du 18 juin 2020, Primart/EUIPO, C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 53).

49      Enfin, si le caractère distinctif des marques antérieures doit être pris en compte pour apprécier le risque de confusion, il n’est qu’un élément parmi d’autres intervenant lors de cette appréciation [voir, en ce sens, arrêt du 13 décembre 2007, Xentral/OHMI – Pages jaunes (PAGESJAUNES.COM), T‑134/06, EU:T:2007:387, point 70].

50      Il résulte des considérations déjà exposées aux points 19 à 39 ci-dessus que, tout d’abord, le public pertinent est composé du grand public faisant preuve d’un niveau d’attention moyen ainsi que de professionnels opérant dans le domaine du sport et de la remise en forme. Ensuite, il a été constaté que les produits en cause étaient en partie identiques et en partie faiblement similaires aux produits et aux services couverts par les marques antérieures. En outre, il convient de relever que l’élément « cross », commun aux signes en conflit, possède un faible caractère distinctif, que les similitudes visuelle et conceptuelle sont à tout le moins faibles et que la similitude phonétique est à tout le moins moyenne.

51      Ensuite, ainsi que le fait valoir à juste titre l’EUIPO, il y a lieu de constater que le public pertinent dans le domaine du sport et de la remise en forme dans l’ensemble de l’Union est susceptible de comprendre certains types de programmes de sports ou d’entraînements à travers l’expression « crossfit » ou à travers les mots « cross » et « fit », même si une partie dudit public n’est pas anglophone. À cet égard, comme l’a relevé la chambre de recours au point 38 de la décision attaquée, si, conformément à la jurisprudence citée au point 47 ci‑dessus, le risque de confusion est d’autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure s’avère important, l’inverse est également vrai. S’agissant d’une marque présentant un caractère distinctif faible, ayant ainsi une capacité réduite à identifier comme provenant d’une entreprise donnée les produits ou services pour lesquels elle avait été enregistrée, le degré de similitude entre les signes aurait, en principe, dû être élevé pour justifier d’un risque de confusion, sauf à risquer de conférer à celle-ci et à son titulaire une protection excessive [voir, en ce sens, arrêt du 5 octobre 2020, Eugène Perma France/EUIPO – SPI Investments Group (NATURANOVE), T‑602/19, non publié, EU:T:2020:463, point 56].

52      Enfin, en l’espèce, même en considérant que les marques antérieures possèdent un caractère distinctif accru acquis par l’usage et bénéficient de ce fait d’une protection plus étendue, il n’en reste pas moins que, compte tenu des constatations faites au point 50 ci-dessus, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu à l’absence de risque de confusion. Dès lors, à supposer que la chambre de recours ait commis une erreur en ne reconnaissant pas aux marques antérieures un caractère distinctif accru par l’usage, cette erreur ne serait pas susceptible de remettre en cause le bien-fondé de sa conclusion relative à l’absence de risque de confusion en l’espèce.

53      Par conséquent, il n’est pas nécessaire d’analyser les différents éléments de preuve produits dans le cadre de la procédure de l’EUIPO afin de démontrer un caractère distinctif accru des marques antérieures.

54      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le premier moyen.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 en ce qui concerne la marque antérieure CROSS

55      Dans le cadre de son deuxième moyen, la requérante fait valoir qu’il existe un risque de confusion en ce qui concerne sa marque antérieure CROSS et la marque demandée. Dans le cadre de son analyse, la requérante renvoie aux arguments qu’elle a exposés dans son premier moyen.

56      Premièrement, la requérante soutient que la chambre de recours a commis une erreur en retenant dans l’appréciation globale du risque de confusion un prétendu résultat neutre de la comparaison conceptuelle, qu’elle n’avait pas effectivement établi. Plus précisément, la requérante fait valoir que les deux signes en conflit ont une signification conceptuelle, ce qui ne peut pas conduire à un résultat neutre de la comparaison conceptuelle desdits signes. En effet, selon elle, l’élément « cross », commun aux signes en conflit, et l’élément « wod » de la marque demandée, qui serait une abréviation de « workout of the day » (entraînement du jour), sont liés au domaine du fitness et du sport et, dès lors, aux services couverts par la marque antérieure. Par conséquent, la similitude conceptuelle entre ces deux signes doit être considérée comme étant élevée.

57      Deuxièmement, la requérante soutient que les éléments de la marque demandée qui diffèrent par rapport à la marque antérieure sont « wod » et « equipment », qui sont perçus par une partie du public pertinent comme étant dépourvus de caractère distinctif en ce qui concerne les produits et les services dans le domaine du sport et du fitness. S’agissant de la présentation stylisée de la double lettre « s » de la marque demandée qui ne figure pas dans la marque antérieure, cette dernière aurait une incidence moindre sur les consommateurs car il s’agit d’un élément ayant un caractère distinctif faible.

58      Troisièmement, la requérante conteste l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle certains éléments de preuve qu’elle aurait produits confirment que, dans le domaine pertinent du sport et de la remise en forme physique, la présentation visuelle joue un rôle important dans la commercialisation des produits et des services. Plus particulièrement, la requérante fait valoir que les produits en cause qui ont été considérés identiques, à savoir les équipements de sport, les articles de gymnastique et les appareils de culturisme, ne sont pas choisis en raison du caractère attractif de leur emballage, mais plutôt en raison de leurs caractéristiques et de leurs fonctions.

59      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

60      À titre liminaire, il y a lieu de constater que, en l’espèce, la requérante ne conteste pas le bien-fondé de la décision attaquée en ce qui concerne l’identité et la similitude des produits et des services couverts par les signes en conflit.

61      Elle ne conteste pas davantage que le public pertinent par rapport auquel il faut apprécier le risque de confusion est constitué du grand public faisant preuve d’un niveau d’attention moyen, mais aussi des professionnels actifs dans le domaine du sport et de la remise en forme.

62      Seule l’appréciation de la chambre de recours quant à la similitude des signes en conflit est contestée. Il convient donc d’examiner si la chambre de recours a considéré à bon droit qu’il existait un faible degré de similitude entre ces signes.

 Sur la comparaison des marques

63      Selon la jurisprudence, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents, à savoir les aspects visuel, phonétique et conceptuel [voir arrêt du 17 février 2011, Annco/OHMI – Freche et fils (ANN TAYLOR LOFT), T‑385/09, EU:T:2011:49, point 26 et jurisprudence citée]. À cet égard, il ressort également de la jurisprudence que le fait qu’une marque demandée soit composée exclusivement de la marque antérieure à laquelle un autre mot est accolé donne une indication de la similitude entre ces deux marques [arrêts du 21 mars 2011, Visti Beheer/OHMI – Meister (GOLD MEISTER), T‑372/09, non publié, EU:T:2011:97, point 27, et du 7 mars 2013, FairWild Foundation/OHMI – Wild (FAIRWILD), T‑247/11, non publié, EU:T:2013:112, point 31].

64      En l’espèce, il y a lieu de constater, à l’instar de la chambre de recours, que la marque antérieure se compose uniquement de l’élément verbal « cross », tandis que la marque demandée est composée comme indiqué au point 24 ci-dessus.

65      En premier lieu, s’agissant du caractère distinctif des différents éléments de la marque demandée, il convient de constater que, premièrement, l’élément commun « cross » des signes en conflit possède un caractère distinctif faible (voir point 34 ci-dessus). Deuxièmement, s’agissant de l’élément « wod » du signe demandé, la requérante n’a pas démontré qu’une partie significative du public pertinent comprenait qu’il s’agissait de l’abréviation de « workout of the day » (entraînement du jour). Dès lors, il y a lieu de constater que ledit élément est pourvu d’un caractère distinctif moyen. Troisièmement, s’agissant de la stylisation de la double lettre « s », il convient de relever qu’elle n’a qu’une incidence moindre sur la perception par le public pertinent de la marque demandée.

66      En deuxième lieu, s’agissant de la comparaison visuelle des marques en conflit, la chambre de recours a considéré que leur degré de similitude était faible. En effet, selon elle, lesdites marques antérieures coïncidaient par le terme commun « cross » et différaient par l’élément « wod », par la stylisation de la double lettre « s » de la marque demandée ainsi que par leur longueur et leur structure globales. Cette appréciation n’a pas été contestée par les parties.

67      En troisième lieu, s’agissant de la comparaison phonétique des signes en conflit, la chambre de recours a considéré que la prononciation de l’élément commun « cross » était similaire ou identique dans les différentes langues de l’Union, mais que ces signes différaient par le nombre de syllabes, par le placement de l’accent tonique sur la première ou la deuxième syllabe, et par l’élément supplémentaire « wod » de la marque demandée. Après avoir ajouté qu’il était peu probable que l’élément non distinctif « equipment » de la marque demandée soit prononcé, la chambre de recours en a conclu que les signes en conflit présentaient un degré de similitude phonétique tout au plus moyen. Cette appréciation n’a pas été contestée par les parties.

68      En quatrième lieu, sur le plan conceptuel, la chambre de recours a considéré que le terme « crosswod » n’avait de signification claire ni en anglais, ni dans d’autres langues officielles de l’Union. Elle a ajouté que, l’élément « cross » de la marque demandée étant perçu comme faisant allusion au sport et au fitness, la similitude conceptuelle entre les signes en conflit était faible.

69      Tout d’abord, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours a commis une erreur en prenant en compte le résultat neutre de la comparaison conceptuelle des signes en conflit, il convient de relever, à l’instar de l’EUIPO, qu’il s’agit d’une erreur sans influence sur la conclusion retenue dans la décision attaquée. En effet, au sein du même point de la décision attaquée, la chambre de recours prend en compte le caractère distinctif faible de la marque antérieure qui résulte, ainsi qu’indiqué aux points 32 à 34 ci-dessus, de la compréhension du terme « crossfit » par le public pertinent, dans le contexte des produits et des services en cause, comme une évocation d’une discipline ou d’une épreuve sportive qui est partagée dans une partie significative de l’Union compte tenu du caractère international des activités et compétitions sportives. Dès lors, il y a lieu de constater que, par la présence de l’élément « cross » au sein des signes en conflit, la chambre de recours a considéré que la similitude conceptuelle entre lesdits signes était faible et pas neutre comme indiqué au point 57 de la décision attaquée.

70      S’agissant de la signification du terme « wod » du signe demandé, il a été constaté au point 65 ci-dessus qu’il possédait un caractère distinctif moyen, en ce qu’il n’était pas compris par une partie significative du public pertinent comme étant l’abréviation de « workout of the day » (séance d’entraînement du jour). Contrairement à ce que soutient la requérante, les mots « wod » et « cross » ne véhiculent donc pas des concepts identiques liés à la pratique du sport. Dès lors, la chambre de recours a conclu à juste titre que la similitude conceptuelle entre les signes en conflit était faible.

 Sur l’appréciation globale du risque de confusion

71      La chambre de recours a considéré que, compte tenu du faible caractère distinctif de la marque antérieure, du faible degré de similitude visuelle et conceptuelle (voir point 69 ci-dessus) ainsi que de la similitude phonétique tout au plus moyenne, il n’y avait pas de risque de confusion entre les signes en conflit. Elle a ajouté que les produits et les services en cause n’étaient pas connus pour être choisis ou commandés oralement et que les éléments de preuve produits par la requérante confirmaient que, dans le domaine pertinent du sport et de la remise en forme physique, la présentation visuelle jouait un rôle important dans la commercialisation desdits produits et services.

72      Il convient de considérer que, s’il est vrai que, d’après la jurisprudence citée au point 63 ci‑dessus, le fait qu’une marque demandée soit composée exclusivement de la marque antérieure à laquelle un autre mot est accolé donne une indication de la similitude entre ces deux marques, il n’en demeure pas moins que, en l’espèce, le faible caractère distinctif de l’élément commun auxdits signes « cross » ainsi que l’élément « wod » de la marque demandée permettent de conclure à un faible degré de similitude entre ces signes.

73      Dans ces circonstances et compte tenu, d’une part, des considérations déjà exposées aux points 60 à 70 ci-dessus et, d’autre part,  de la jurisprudence rappelée aux points 46 à 48 et 51 ci-dessus, c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu à l’absence de risque de confusion pour les produits en cause, en raison notamment du caractère distinctif faible de l’élément « cross », commun auxdits signes.

74      Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de rejeter le deuxième moyen.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001

75      La requérante fait valoir, en substance, que les éléments de preuve qu’elle a produits montrent que la marque antérieure CROSSFIT enregistrée sous le numéro 5049192 jouit d’une renommée dans l’Union à l’égard d’une partie importante du public pertinent au regard des services compris dans la classe 41 et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit de la renommée de la marque antérieure, au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001.

76      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

77      Aux termes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure au sens de l’article 8, paragraphe 2, du même règlement, la marque demandée est refusée à l’enregistrement si elle est identique ou a des similitudes avec la marque antérieure et si elle est destinée à être enregistrée pour des produits ou des services qui n’ont pas de similitudes avec ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque, dans le cas d’une marque de l’Union européenne antérieure, celle-ci jouit d’une renommée dans l’Union et, dans le cas d’une marque nationale antérieure, celle-ci jouit d’une renommée dans l’État membre concerné et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’il leur porterait préjudice.

78      La protection élargie accordée à la marque antérieure par l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 présuppose donc la réunion de plusieurs conditions. Premièrement, la marque antérieure prétendument renommée doit être enregistrée. Deuxièmement, cette dernière et celle dont l’enregistrement est demandé doivent être identiques ou similaires. Troisièmement, elle doit jouir d’une renommée dans l’Union, dans le cas d’une marque de l’Union européenne antérieure, ou dans l’État membre concerné, dans le cas d’une marque nationale antérieure. Quatrièmement, l’usage sans juste motif de la marque demandée doit conduire au risque qu’un profit puisse être indûment tiré du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’un préjudice puisse être porté au caractère distinctif ou à la renommée de la marque antérieure. Ces conditions étant cumulatives, l’absence de l’une d’entre elles suffit à rendre inapplicable ladite disposition [voir arrêts du 22 mars 2007, Sigla/OHMI – Elleni Holding (VIPS), T‑215/03, EU:T:2007:93, points 34 et 35 et jurisprudence citée, et du 31 mai 2017, Alma-The Soul of Italian Wine/EUIPO – Miguel Torres (SOTTO IL SOLE ITALIANO SOTTO il SOLE), T‑637/15, EU:T:2017:371, point 29 et jurisprudence citée]. Par ailleurs, il ne ressort ni du libellé de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 et de l’article 8, paragraphe 5, du même règlement ni de la jurisprudence que la similitude entre les marques en conflit devrait être appréciée de manière différente selon qu’elle est effectuée au regard de l’une ou de l’autre de ces dispositions (voir, en ce sens, arrêt du 24 mars 2011, Ferrero/OHMI, C‑552/09 P, EU:C:2011:177, point 54).

79      Selon la jurisprudence, la notion de similitude entre les marques en conflit et les critères à prendre en compte lors de l’appréciation de la similitude entre les marques en cause sont les mêmes dans le cas de figure du refus de l’enregistrement d’une marque demandée en raison d’un risque de confusion, en application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, et du refus en raison d’une atteinte à la renommée d’une marque antérieure, aux termes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001. En effet, dans ces deux cas de figure permettant de refuser l’enregistrement d’une marque demandée, la condition d’une similitude entre la marque demandée et la marque antérieure suppose l’existence, en particulier, d’éléments de ressemblance visuelle, phonétique ou conceptuelle, de sorte que, du point de vue du public pertinent, il existe entre les marques en cause une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents [voir arrêt du 12 novembre 2014, Volvo Trademark/OHMI – Hebei Aulion Heavy Industries (LOVOL), T‑524/11, EU:T:2014:944, point 21 et jurisprudence citée].

80      En l’espèce, comme il a été constaté aux points 36 à 39 et 50 ci-dessus, les similitudes visuelle et conceptuelle étant à tout le moins faibles et la similitude phonétique étant à tout le moins moyenne, la deuxième condition exposée au point 78 ci-dessus est satisfaite étant donné que les marques en conflit présentent un certain degré de similitude. Il convient dès lors d’examiner les deuxième et troisième conditions exposées au point 78 ci-dessus.

81      La requérante fait valoir que la chambre de recours a commis des erreurs dans l’appréciation des éléments de preuve qu’elle a produits afin de démontrer la renommée de sa marque antérieure dans l’Union à la date de dépôt de la marque demandée, à savoir le 14 mai 2019, pour certains services couverts par la classe 41, à savoir les services de « fitness » et les « services liés au fitness ».

82      Plus particulièrement, premièrement, elle soutient que l’un des aspects les plus importants de son programme d’entraînement « CrossFit » est sa disponibilité en ligne. En effet, elle précise que ce programme est proposé sous forme de « wod », à savoir de « workout of the day » (séance d’entraînement du jour) depuis 2001 (annexe 5) et qu’il est repris par la plupart des salles de sport affiliées sur leur propre site Internet, sur leurs réseaux sociaux ou encore sur un tableau à la « box », c’est-à-dire sur le lieu physique desdites salles (annexes 1 et 11). La requérante ajoute que les annexes 1, 2, 3 et 11 ont été produites pour informer les personnes intéressées sur le fonctionnement de ce programme. Dès lors, elle fait valoir que ledit programme est également proposé sur son site Internet, et non seulement sur celui des salles de sport affiliées, et qu’il est accessible dans le monde entier, ce qui fournirait une indication du degré de connaissance du programme d’entraînement et des marques CROSSFIT par le public de l’Union (annexe 10).

83      Deuxièmement, la requérante fait valoir que la chambre de recours a considéré à tort que l’usage de la marque antérieure CROSSFIT par ses affiliés ne constituait pas une preuve de la connaissance par le public pertinent des services de remise en forme qu’elle fournit au sein de l’Union (annexe 17). En outre, elle soutient que les déclarations sous serment émanant de propriétaires de salles de sport affiliées (annexe 18) ont été produites pour démontrer la manière dont les salles affiliées utilisent cette marque en lien avec les services de remise en forme et qu’elles proposent des cours sous le nom « crossfit ». Par ailleurs, la requérante soutient que le nombre d’abonnés sur les réseaux sociaux est également révélateur du nombre de personnes qui ont connaissance des services de remise en forme sous le nom « crossfit » proposés par des salles de sport (annexes 6 et 12) et que si les déclarations sous serment datent de 2018, soit antérieurement à la date d’enregistrement de la marque demandée, les impressions des comptes sur les réseaux sociaux datent de 2020. S’agissant de l’étendue géographique et de l’intensité de l’usage de la marque antérieure, supposée démontrer la connaissance de cette marque par le public pertinent, la requérante fait valoir qu’elles résultent de différents éléments de preuve qu’elle a produits, à savoir le nombre total de salles de sport affiliées dans l’Union (annexe 12) et des contrats d’affiliation « crossfit » conclus entre elle et des propriétaires de salles de sport depuis 2008 (annexe 17).

84      S’agissant plus particulièrement desdits contrats d’affiliation, la requérante fait valoir qu’ils indiquent que les affiliés sont libres d’inclure la marque antérieure CROSSFIT dans le nom de leur salle de sport ou un nom de domaine enregistré, mais qu’ils ne sont pas autorisés à utiliser ladite marque et les services faisant l’objet de la licence à moins que la salle de sport affiliée ne propose de tels entraînements par des formateurs titulaires d’une licence « crossfit ». Dès lors, bien que chaque salle de sport affiliée ait conservé son individualité en utilisant différents autres noms et éléments figuratifs en lien avec la marque antérieure sous licence, la requérante soutient que les consommateurs ont connaissance du lien existant entre les salles de sport affiliées et elle et de la véritable origine des services en cause.

85      Troisièmement, la requérante s’appuie sur des impressions d’un site d’archives d’Internet relatives à la tenue de séminaires de formation (annexe 9) dans lesquelles figure une déclaration qui précise clairement le nombre de personnes ayant participé aux cours de certification « crossfit » organisés dans l’Union. En outre, elle relève que le fait que le nombre de participants ait fluctué d’une année à l’autre ne reflète pas une perte d’intérêt pour le programme « crossfit » ou une baisse du nombre de salles de sport affiliées (annexe 7).

86      Quatrièmement, la requérante conteste la conclusion de la chambre de recours selon laquelle il n’existe aucune preuve des investissements réalisés pour promouvoir le programme d’entraînement « CrossFit ». Selon elle, tout d’abord, la principale publicité de son programme est avant tout réalisée par les salles de sport affiliées elles-mêmes. Ensuite, un autre outil promotionnel important se trouverait dans les « CrossFit Games », à savoir une manifestation d’ampleur mondiale organisée par la requérante au cours de laquelle des qualifications régionales sont organisées, y compris dans l’Union (annexe 21). En outre, il y aurait un renforcement de la popularité en ce que le nombre de vues sur le site Internet YouTube a considérablement augmenté entre 2008 et 2014 (annexe 11). Enfin, un autre moyen de promouvoir la marque antérieure serait la vente de produits promotionnels sur lesquels figure cette marque, comme des vêtements créés en collaboration avec la marque REEBOK ou d’autres produits tels que des posters, aimants, bouteilles d’eau, bracelets, colliers d’haltères ou carnets de notes (annexe 22).

87      En conclusion, la requérante fait valoir que la chambre de recours a examiné chaque élément de preuve sans le replacer dans son contexte, en appréciant sa valeur probante en lien avec les autres éléments de preuve produits.

88      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

89      Selon la jurisprudence, pour satisfaire à la condition relative à la renommée, une marque antérieure doit être connue d’une partie significative du public concerné pour les produits ou les services couverts par elle, c’est-à-dire, en fonction du produit ou du service commercialisé, soit par le grand public, soit par un public plus spécialisé tel qu’un milieu professionnel donné. Dans l’examen de cette condition, il convient de prendre en considération tous les éléments pertinents en cause, à savoir, notamment, la part de marché détenue par la marque antérieure, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de son usage ainsi que l’importance des investissements réalisés par l’entreprise pour la promouvoir [arrêt du 13 décembre 2004, El Corte Inglés/OHMI – Pucci (EMILIO PUCCI), T‑8/03, EU:T:2004:358, point 67].

90      Toutefois, l’énumération qui précède n’ayant qu’un caractère illustratif, il ne saurait être exigé que la preuve de la renommée d’une marque porte sur l’ensemble de ces éléments [voir arrêt du 13 mai 2020, Divaro/EUIPO – Grendene (IPANEMA), T‑288/19, non publié, EU:T:2020:201, point 30 et jurisprudence citée].

91      Ainsi, il convient de procéder à une appréciation globale des éléments de preuve qui sont rapportés par le titulaire d’une marque pour établir si cette dernière est renommée (voir, en ce sens, arrêt du 10 mai 2012, Rubinstein et L’Oréal/OHMI, C‑100/11 P, EU:C:2012:285, point 72). En effet, il ne peut être exclu qu’un faisceau d’éléments de preuve permette d’établir les faits à démontrer, alors même que chacun de ces éléments, pris isolément, serait impuissant à rapporter la preuve de l’exactitude de ces faits [voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 9 décembre 2010, Tresplain Investments/OHMI – Hoo Hing (Golden Elephant Brand), T‑303/08, EU:T:2010:505, point 106 et jurisprudence citée].

92      Par ailleurs, si la renommée d’une marque antérieure doit être établie à la date de dépôt de la demande de marque, les documents portant une date postérieure à cette date ne sauraient toutefois être privés de valeur probante s’ils permettent de tirer des conclusions sur la situation telle qu’elle se présentait à cette même date. Il ne saurait être exclu a priori qu’un document établi un certain temps avant ou après cette date puisse contenir des indications utiles compte tenu du fait que la renommée d’une marque s’acquiert, en général, progressivement. La valeur probante d’un tel document est susceptible de varier en fonction de la proximité plus ou moins élevée de la période couverte avec la date de dépôt [arrêt du 16 décembre 2010, Rubinstein et L’Oréal/OHMI – Allergan (BOTOLIST et BOTOCYL), T‑345/08 et T‑357/08, non publié, EU:T:2010:529, point 52].

93      En l’espèce, la chambre de recours a estimé que les éléments de preuve produits par la requérante devant les instances de l’EUIPO étaient insuffisants et ne permettaient pas d’établir que la marque antérieure jouissait d’une renommée à la date de dépôt de la demande d’enregistrement, à savoir le 14 mai 2019 (ci-après la « date pertinente »), pour certains services couverts par la classe 41, à savoir le « fitness » et les « services liés au fitness » dans l’Union.

94      Premièrement, il convient de constater, à l’instar de la chambre de recours, que ni le glossaire relatif au « crossfit » figurant sur le site Internet de la requérante (annexe 1), ni la vidéo expliquant les spécificités du programme d’entraînement « CrossFit » figurant sur le site Internet YouTube (annexe 11) ne sauraient être qualifiés d’actes d’usage des marques antérieures pour le « fitness » et les « services liés au fitness » compris dans la classe 41. En effet, la requérante ne fournit aucune indication sur le fait que des vidéos d’exercice physique ou des séances d’entraînement en ligne ont été proposées sur son site Internet. Le simple nombre de visites sur le site Internet de la requérante, la durée de ces visites et le nombre de vues de la vidéo (annexes 10 et 11) ne suffisent pas à démontrer que la marque antérieure est connue par une partie significative du public pertinent.

95      Deuxièmement, s’agissant des rapports de 2018 et de 2019 sur le marché européen de la santé et du fitness établi par la société Deloitte et concernant la situation du marché, respectivement, en Allemagne en 2017 (annexe 13) et en Espagne en 2018 (annexes 15 et 16), la chambre de recours a considéré à juste titre que la liste des dix principaux opérateurs réguliers par nombre de clubs de sport ne mentionnait pas la requérante et que rien ne prouvait que le public pertinent percevait toutes les salles de sport affiliées comme appartenant à un seul et même opérateur portant le nom de la marque antérieure.

96      Troisièmement, il y a lieu de constater, à l’instar de la chambre de recours, que les déclarations sous serment (annexe 18) ne suffisent pas non plus à établir une renommée de la marque antérieure, mais confirment l’existence de salles de sport affiliées dans différents États membres de l’Union. En effet, si celles-ci indiquent le nombre approximatif de membres par an ayant participé au programme de formation « crossfit » avant la date pertinente, aucune information n’est fournie en ce qui concerne la base sur laquelle ces chiffres ont été calculés, le chiffre d’affaires généré par ces cours ou les investissements réalisés pour la publicité du programme d’entraînement « CrossFit ». Contrairement à ce qu’affirme la requérante, ces chiffres ne sauraient être considérés comme étant étayés par le nombre d’abonnés aux comptes sur les réseaux sociaux des salles de sport affiliées, étant donné que le nombre d’abonnés auxdits médias sociaux indique des chiffres globaux qui ne permettent de faire aucune déduction concernant le public pertinent dans l’Union.

97      Il en est de même concernant les différentes impressions tirées des sites Internet archivés des salles de sport affiliées (annexe 7). En effet, bien que lesdites impressions confirment l’existence de salles de sport proposant le programme d’entraînement « CrossFit » avant la date pertinente, elles ne contiennent aucune information permettant d’établir, par exemple en termes de contrats d’adhésion conclus, de nombre de cours proposés, de nombre de personnes ayant assisté à ces cours ou de chiffres d’affaires générés, la connaissance des marques antérieures par le public pertinent.

98      Quatrièmement, ainsi que le relève à juste titre la chambre de recours, c’est également pour la même raison que les références faites au programme d’entraînement « CrossFit » dans un livre ou un article en ligne (annexes 1, 2, 7, 8 et 23) ou l’usage de la marque pour des vêtements ou des chaussures de sport (annexe 22) n’ont en soi aucune valeur probante dans l’appréciation de la connaissance de la marque antérieure par une partie significative du public pertinent pour les services de « fitness » compris dans la classe 41.

99      Cinquièmement, s’agissant de la valeur probante des contrats d’affiliation conclus par la requérante depuis 2008 avec des salles de sport situées dans des États membres de l’Union (annexe 17), ils ne prouvent pas, ainsi que le relève la chambre de recours, dans quelle mesure ces salles de sport ont fait usage de la marque antérieure et, partant, ne démontrent pas la connaissance de la marque antérieure par une partie significative du public pertinent. Par ailleurs, la chambre de recours a considéré que d’après lesdits contrats les affiliés n’opéraient pas sous la marque CROSSFIT, mais sous des signes qui incluent l’élément « crossfit » parmi d’autres éléments, comme l’illustrent les captures d’écran issues des comptes des médias sociaux des salles de sport (annexe 6). Les contrats prévoient également que, lorsque la société affiliée fournit « d’autres services distincts des services sous licence », cela ne signifie pas que ces autres services sont approuvés par la requérante. Ces éléments de preuve démontrent donc que la société affiliée propose des services autres que le programme d’entraînement « CrossFit » et que la simple existence d’une salle de sport affiliée ne permet pas de tirer de conclusion quant à l’étendue de l’utilisation de la marque antérieure pour le programme d’entraînement « CrossFit ».

100    Sixièmement, il y a lieu de constater, à l’instar de la chambre de recours, que douze documents sur vingt-deux éléments de preuve produits par la requérante afin de démontrer sa renommée, à savoir les annexes 5, 6, 7, 10, 11, 12, 13, 15, 18, 19, 20 et 21, se réfèrent à des périodes antérieures à la date pertinente.

101    À cet égard, même s’il est possible de prendre en compte, au sens de la jurisprudence citée au point 89 ci-dessus, des éléments de preuve antérieurs à la date d’enregistrement de la marque demandée, il n’en demeure pas moins, au sens de cette même jurisprudence, que lesdits éléments doivent permettre d’établir que la renommée d’une marque a été acquise de façon progressive. Or, il y a lieu de constater que ce n’est pas le cas en l’espèce et qu’il convient de considérer lesdits éléments de preuve comme étant insuffisants pour démontrer la renommée de la marque antérieure.

102    Enfin et en tout état de cause, il y a lieu de relever que, conformément à la jurisprudence citée aux points 90 et 91 ci-dessus, la renommée de la marque antérieure s’apprécie de manière globale eu égard à l’ensemble des éléments de preuve fournis par la requérante. En l’espèce, il ressort des points 94 à 99 ci-dessus que la chambre de recours a fondé son appréciation sur un ensemble d’éléments de preuve ne démontrant pas que la renommée de la marque antérieure était établie sur le territoire pertinent.

103    Dès lors, l’une des conditions cumulatives d’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, au sens de la jurisprudence citée au point 78 ci-dessus, à savoir celle selon laquelle la marque antérieure doit jouir d’une renommée dans l’Union, n’étant pas remplie, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu au rejet de l’opposition formée par la requérante sur le fondement de cette disposition.

104    Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le troisième moyen et, partant, le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

105    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

106    Bien que la requérante ait succombé, l’EUIPO n’a conclu à la condamnation de celle-ci aux dépens qu’en cas de convocation à une audience. En l’absence d’organisation d’une audience, il convient de décider que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      CrossFit LLC et l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) supporteront leurs propres dépens.

Spielmann

Mastroianni

Brkan

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 29 novembre 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.