Language of document : ECLI:EU:T:2021:122

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

10 mars 2021 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Conjoint survivant – Pension de survie – Articles 18, 19 et 20 de l’annexe VIII du statut – Conditions d’éligibilité – Durée du mariage – Exception d’illégalité – Égalité de traitement – Proportionnalité »

Dans l’affaire T‑694/19,

FI, représenté par Me F. Moyse, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. B. Mongin et T. Bohr, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

Parlement européen, représenté par MM. J. Van Pottelberge et J. Steele, en qualité d’agents,

et par

Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. M. Bauer et R. Meyer, en qualité d’agents,

parties intervenantes,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 270 TFUE et tendant à l’annulation des décisions de la Commission des 8 mars et 1er avril 2019 rejetant la demande d’octroi d’une pension de survie au requérant,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. R. da Silva Passos, président, Mme I. Reine (rapporteure) et M. L. Truchot, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

1        L’article 79, premier alinéa, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») prévoit :

« Dans les conditions prévues au chapitre 4 de l’annexe VIII [du statut], le conjoint survivant d’un fonctionnaire ou d’un ancien fonctionnaire a droit à une pension de survie égale à 60 % de la pension d’ancienneté ou de l’allocation d’invalidité dont son conjoint bénéficiait ou dont il aurait bénéficié s’il avait pu y prétendre, sans condition de service ni d’âge, au moment de son décès. »

2        L’article 18 de l’annexe VIII du statut indique ce qui suit :

« Le conjoint survivant d’un ancien fonctionnaire titulaire d’une pension d’ancienneté, pour autant que le mariage ait été contracté avant que l’intéressé ait cessé d’être au service d’une institution et qu’il ait été son conjoint pendant un an au moins, a droit, sous réserve des dispositions prévues à l’article 22 [de la présente annexe], à une pension de survie égale à 60 % de la pension d’ancienneté dont bénéficiait son conjoint au jour de son décès […]

La condition de durée du mariage prévue au premier alinéa ne joue pas si un ou plusieurs enfants sont issus d’un mariage du fonctionnaire contracté antérieurement à sa cessation d’activité, pour autant que le conjoint survivant pourvoie ou ait pourvu aux besoins de ces enfants. »

3        L’article 19, premier alinéa, de l’annexe VIII du statut prévoit :

« Le conjoint survivant d’un ancien fonctionnaire titulaire d’une allocation d’invalidité, pour autant qu’il ait été son conjoint à la date de son admission au bénéfice de cette allocation, a droit, sous réserve des dispositions de l’article 22 [de l’annexe VIII du statut], à une pension de survie égale à 60 % de l’allocation d’invalidité dont bénéficiait son conjoint au jour de son décès. »

4        L’article 20 de l’annexe VIII du statut se lit comme suit :

« La condition d’antériorité prévue [aux articles 18 et 19 de l’annexe VIII du statut] ne joue pas si le mariage, même contracté postérieurement à la cessation d’activité du fonctionnaire, a duré au moins cinq années. »

 Antécédents du litige

5        Le requérant, FI, et sa conjointe, agent temporaire puis fonctionnaire de la Commission européenne, ont vécu en couple dès 2001. En 2005, la conjointe du requérant a été reconnue comme étant définitivement en incapacité d’exercer ses fonctions, en raison d’une maladie dégénérative grave dont elle souffrait depuis plusieurs années. En conséquence, elle a été mise d’office à la retraite le 31 août 2005, à l’âge de 39 ans, et admise au bénéfice d’une allocation d’invalidité.

6        Le requérant et sa conjointe se sont mariés le 12 mai 2014. Cette dernière est décédée le 25 janvier 2019.

7        Le 12 février 2019, le requérant, en sa qualité de conjoint survivant d’une ancienne fonctionnaire de l’Union européenne, a introduit une demande d’octroi d’une pension de survie au titre du chapitre 4 de l’annexe VIII du statut.

8        Par courriel du 8 mars 2019, puis par lettre du 1er avril 2019, la cheffe de l’unité « Pensions » de l’Office « Gestion et liquidation des droits individuels » (PMO) de la Commission a rejeté la demande d’octroi d’une pension de survie du requérant (ci-après les « décisions attaquées »). Celle-ci a estimé, en substance, que le requérant ne remplissait pas la condition d’une durée minimale de cinq années de mariage prévue par l’article 20 de l’annexe VIII du statut pour pouvoir bénéficier d’une pension de survie.

9        Par lettre du 30 avril 2019, enregistrée par la Commission le même jour, le requérant a introduit une réclamation contre les décisions attaquées.

10      Par décision du 12 août 2019, l’autorité investie du pouvoir de nomination de la Commission (ci-après l’« AIPN ») a rejeté la réclamation du requérant (ci-après la « décision de rejet de la réclamation »).

 Procédure et conclusions des parties

11      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 9 octobre 2019, le requérant a introduit le présent recours.

12      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 21 octobre 2019, en application de l’article 66 du règlement de procédure du Tribunal, le requérant a demandé le bénéfice de l’anonymat, qui lui a été accordé par décision du Tribunal du 11 décembre 2019.

13      Par lettre du 3 janvier 2020, le Tribunal a invité les parties principales, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure, à lui présenter leurs observations sur les conséquences à tirer, pour la présente affaire, de l’arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission (C‑460/18 P, EU:C:2019:1119). Les parties principales ont déféré à cette demande dans le délai imparti.

14      Par actes déposés au greffe du Tribunal, respectivement, le 13 janvier et le 16 janvier 2020, le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne ont demandé à intervenir au soutien des conclusions de la Commission.

15      Le 30 janvier 2020, en application des dispositions de l’article 83, paragraphe 1, du règlement de procédure, le Tribunal a décidé qu’un deuxième échange de mémoires n’était pas nécessaire.

16      Par décision du 10 février 2020 du président de la septième chambre du Tribunal, le Parlement et le Conseil ont été admis à intervenir au soutien des conclusions de la Commission.

17      Le 23 octobre 2020, le Tribunal a adressé des questions aux parties au titre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure. Celles-ci ont répondu aux questions posées et ont ensuite présenté leurs observations sur les réponses formulées par les autres parties.

18      Les parties principales n’ayant pas demandé la tenue d’une audience, le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier, a décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure, de statuer sans phase orale de la procédure.

19      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les décisions attaquées ainsi que la décision de rejet de la réclamation ;

–        condamner la Commission aux dépens.

20      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours partiellement irrecevable et en tout état de cause non fondé et le rejeter dans son intégralité ;

–        condamner le requérant aux dépens.

21      Le Parlement et le Conseil concluent à ce qu’il plaise au Tribunal de rejeter le recours.

 En droit

 Sur l’objet du recours

22      Par son premier chef de conclusions, le requérant demande au Tribunal d’annuler, d’une part, les décisions contenues dans le courriel du 8 mars 2019 et dans la lettre du 1er avril 2019 et, d’autre part, la décision de rejet de la réclamation.

23      Premièrement, dans son courriel du 8 mars 2019, la cheffe de l’unité « Pensions » du PMO a indiqué au requérant que, selon l’article 20 de l’annexe VIII du statut, le mariage devait avoir duré au moins cinq années et qu’elle regrettait dès lors ne pas pouvoir donner une suite favorable à sa demande. Elle a confirmé cette décision dans sa lettre du 1er avril 2019, au motif que le requérant ne satisfaisait pas à la condition d’une durée minimale du mariage requise.

24      Il y a lieu de constater que la lettre du 1er avril 2019 ne contient aucun élément nouveau par rapport au courriel du 8 mars 2019. En outre, il ne ressort pas du dossier que la décision qu’elle contient a été précédée d’un réexamen de la situation du requérant. Par conséquent, la lettre du 1er avril 2019 constitue une décision purement confirmative de la décision de refus d’octroi d’une pension de survie contenue dans le courriel du 8 mars 2019.

25      À cet égard, il ressort de la jurisprudence que le recours contre une décision confirmative est irrecevable seulement si la décision confirmée est devenue définitive à l’égard de l’intéressé, faute d’avoir fait l’objet d’un recours contentieux introduit dans le délai requis. Dans le cas contraire, la personne intéressée est en droit d’attaquer soit la décision confirmée, soit la décision confirmative, soit l’une et l’autre de ces décisions (arrêt du 18 décembre 2007, Weißenfels/Parlement, C‑135/06 P, EU:C:2007:812, point 54).

26      En l’espèce, le requérant a contesté le refus de l’AIPN de lui verser une pension de survie en introduisant une réclamation le 30 avril 2019, soit dans le délai statutaire de trois mois à compter du courriel du 8 mars 2019 et de la lettre du 1er avril 2019, prévu par l’article 90, paragraphe 2, du statut. En outre, la décision de rejet de la réclamation ayant été adoptée le 12 août 2019 et le présent recours introduit le 9 octobre 2019, le délai de recours prévu à l’article 91, paragraphe 3, du statut a été respecté en l’espèce.

27      Par conséquent, en application de la jurisprudence rappelée au point 25 ci-dessus, le requérant est recevable à demander, en l’espèce, l’annulation de chacune des décisions attaquées.

28      Deuxièmement, selon une jurisprudence constante, des conclusions en annulation formellement dirigées contre la décision de rejet d’une réclamation ont pour effet de saisir le Tribunal de l’acte contre lequel la réclamation a été présentée lorsqu’elles sont, en tant que telles, dépourvues de contenu autonome (voir arrêt du 13 juillet 2018, Curto/Parlement, T‑275/17, EU:T:2018:479, point 63 et jurisprudence citée).

29      En l’espèce, étant donné que la décision de rejet de la réclamation ne fait que confirmer les décisions attaquées, en précisant les motifs venant au soutien de celles-ci, il convient de constater que les conclusions en annulation de la décision de rejet de la réclamation sont dépourvues de contenu autonome et qu’il n’y a donc pas lieu de statuer spécifiquement sur celles-ci. Toutefois, dans l’examen de la légalité des décisions attaquées, il est nécessaire de prendre en considération la motivation figurant dans la décision de rejet de la réclamation, cette motivation étant censée coïncider avec celle des décisions attaquées (voir, en ce sens, arrêt du 30 avril 2019, Wattiau/Parlement, T‑737/17, EU:T:2019:273, point 43 et jurisprudence citée).

 Sur le fond

30      Le requérant soulève trois moyens. Le premier moyen est tiré d’une exception d’illégalité des articles 18 à 20 de l’annexe VIII du statut, en raison de la violation du principe d’égalité de traitement et du principe de non-discrimination en raison de l’âge, de l’état civil et du handicap. Le deuxième moyen est tiré d’une erreur de droit dans l’application des articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut ainsi que d’une erreur d’interprétation de la notion de conjoint. Le troisième moyen est tiré d’une erreur manifeste d’appréciation en raison de la non-prise en compte de la situation particulière du requérant.

31      À l’appui de son premier moyen, le requérant fait valoir, en substance, que l’article 20 de l’annexe VIII du statut impose une durée minimale de cinq années de mariage pour pouvoir bénéficier d’une pension de survie, alors qu’une telle condition n’est pas imposée par les articles 18 et 19 de cette annexe pour les couples qui se sont mariés avant la cessation d’activité du fonctionnaire. Or, selon le requérant, les couples qui se marient sont dans une situation familiale comparable, quel que soit le moment qu’ils choisissent pour se marier. Ils sont supposés partager le même domicile et la même vie familiale quotidienne et affronter les charges financières en commun selon leurs possibilités contributives respectives.

32      Le requérant reconnaît que la lutte contre la fraude constitue un objectif légitime. Toutefois, l’exigence d’une durée minimale de cinq années de mariage constituerait une atteinte démesurée et excessive aux droits des fonctionnaires, ainsi que l’aurait reconnu M. l’avocat général Pikamäe dans ses conclusions dans l’affaire HK/Commission (C‑460/18 P, EU:C:2019:646).

33      La Commission répond que la conjointe du requérant avait cessé ses activités à la suite de sa mise en invalidité, hypothèse qui relève de l’article 19 de l’annexe VIII du statut, et non de l’article 18 de cette annexe.

34      La Commission, soutenue par le Conseil, fait également valoir que les fonctionnaires en activité et ceux qui ont cessé leur activité ne sont pas dans la même situation, seul le premier continuant à travailler et à cotiser au régime de pension. Cette différence de situation aurait été reconnue par le Tribunal dans l’arrêt du 17 juin 1993, Arauxo-Dumay/Commission (T‑65/92, EU:T:1993:47, point 33). De plus, le conjoint d’un fonctionnaire en activité serait davantage dépendant des revenus de ce dernier que le conjoint d’un fonctionnaire ayant cessé son activité. Par ailleurs, le fonctionnaire en activité aurait généralement déplacé le centre de ses intérêts et son foyer en dehors de son État membre d’origine pour prendre ses fonctions, tandis que le fonctionnaire qui a cessé son activité ne serait pas tenu par une obligation de résidence et ne devrait pas contraindre son conjoint à le suivre et à quitter son emploi.

35      En outre, la Commission estime que la condition d’une durée minimale de cinq années de mariage est justifiée par l’objectif de lutte contre la fraude et les mariages blancs, car il existerait un risque accru d’abuser de la faiblesse d’un fonctionnaire tombé gravement malade et reconnu invalide.

36      La Commission ajoute que, même s’il doit résulter dans des situations marginales des inconvénients casuels de l’instauration d’une réglementation générale et abstraite, il ne pourrait être reproché au législateur d’avoir eu recours à une catégorisation, dès lors qu’elle n’est pas discriminatoire par essence au regard de l’objectif qu’elle poursuit.

37      Le Parlement soutient que l’espérance de vie du fonctionnaire après la cessation de ses fonctions est réduite. Dans le but d’éviter toute fraude et tout abus de droit, il conviendrait de répercuter ce fait par un allongement de la période minimale de mariage exigée. Une durée minimale de cinq années de mariage serait justifiée dans le cas d’un mariage contracté après la mise en invalidité d’un fonctionnaire compte tenu du fait que celui-ci est souvent affecté d’une pathologie de nature à limiter son espérance de vie. Le Parlement ajoute que, aux termes de l’article 53 du statut, un fonctionnaire admis au bénéfice d’une pension d’invalidité est mis d’office à la retraite. Il serait donc logique qu’il soit soumis aux règles applicables aux fonctionnaires retraités.

 Sur la portée de l’exception d’illégalité

38      Dans ses  réponses aux mesures d’organisation de la procédure, le requérant a indiqué que, dans la requête, il avait cité les articles 18 à 20 de l’annexe VIII du statut comme formant un ensemble de règles. Toutefois, il souligne que son premier moyen repose principalement sur l’illégalité de l’article 20 de l’annexe VIII.

39      Ainsi, le requérant fait valoir que, en l’espèce, seul l’article 20 de l’annexe VIII du statut doit être considéré comme étant entaché d’une illégalité, de sorte que l’exception d’illégalité soulevée doit être comprise comme visant cette unique disposition, et non les articles 18 et 19 de cette annexe VIII.

40      À cet égard, il y a lieu de relever que, d’une part, la Commission et les parties intervenantes ont présenté dans leurs écritures des arguments visant à réfuter l’illégalité alléguée de l’article 20 de l’annexe VIII du statut et, d’autre part, leurs observations sur les réponses du requérant aux mesures d’organisation de la procédure ne comportent pas d’objection quant à l’étendue de l’objet du premier moyen tel qu’il est présenté au point 38 ci-dessus.

41      Il convient donc d’examiner uniquement la légalité de l’article 20 de l’annexe VIII du statut, à la lumière des arguments du requérant.

 Sur le fond

–       Observations liminaires

42      Il convient de rappeler que le principe d’égalité de traitement constitue un principe général du droit de l’Union, consacré à l’article 20 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), dont le principe de non-discrimination énoncé à son article 21, paragraphe 1, est une expression particulière. Ce principe exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (voir arrêt du 5 juillet 2017, Fries, C‑190/16, EU:C:2017:513, points 29 et 30 et jurisprudence citée).

43      Selon la jurisprudence, pour qu’il puisse être reproché au législateur de l’Union d’avoir violé le principe d’égalité de traitement, il faut qu’il ait traité d’une façon différente des situations comparables entraînant un désavantage pour certaines personnes par rapport à d’autres (voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2018, FV/Conseil, T‑750/16, EU:T:2018:972, point 89 et jurisprudence citée).

44      En ce qui concerne l’exigence tenant au caractère comparable des situations, celle-ci s’apprécie au regard de l’ensemble des éléments qui les caractérisent. Ces éléments doivent, notamment, être déterminés et appréciés à la lumière de l’objet et du but de l’acte de l’Union qui institue la distinction en cause. Doivent, en outre, être pris en considération les principes et les objectifs du domaine dont relève l’acte en cause (voir arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission, C‑460/18 P, EU:C:2019:1119, point 67 et jurisprudence citée).

45      De plus, en vue de déterminer si le traitement par le statut des situations à comparer porte atteinte au principe d’égalité de traitement, il convient de se fonder sur une analyse centrée sur l’ensemble des règles de droit régissant les positions de chacune des situations à comparer, en tenant compte notamment de l’objet de la disposition contestée (voir, par analogie, arrêt du 9 mars 2017, Milkova, C‑406/15, EU:C:2017:198, point 58).

46      Pour qu’une différence de traitement puisse être compatible avec les principes généraux d’égalité de traitement et de non-discrimination, cette différence doit être justifiée sur la base d’un critère objectif et raisonnable et proportionnée par rapport au but poursuivi par cette différenciation (voir, en ce sens, arrêt du 15 février 2005, Pyres/Commission, T‑256/01, EU:T:2005:45, point 61). À cet égard, aux termes de l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, toute limitation de l’exercice des droits et des libertés reconnus par celle-ci doit être prévue par la loi et respecter le contenu essentiel de ces droits et de ces libertés. Dans le respect du principe de proportionnalité, des limitations ne peuvent être apportées que si elles sont nécessaires et répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union ou au besoin de protection des droits et des libertés d’autrui.

47      Il ressort de la jurisprudence que le principe de proportionnalité exige que les actes des institutions de l’Union ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs légitimes poursuivis par la réglementation en cause, étant entendu que, lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante et que les inconvénients causés ne doivent pas être démesurés par rapport aux buts visés (voir arrêt du 26 février 2016, Bodson e.a./BEI, T‑240/14 P, EU:T:2016:104, point 116 et jurisprudence citée).

48      Il convient néanmoins d’ajouter que, en vue de lutter contre les abus, voire la fraude, le législateur de l’Union dispose d’une marge d’appréciation dans l’établissement du droit à une pension de survie (arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission, C‑460/18 P, EU:C:2019:1119, point 89). La reconnaissance d’un tel pouvoir d’appréciation du législateur implique la nécessité de vérifier s’il n’apparaît pas déraisonnable pour le législateur de l’Union d’estimer que la différence de traitement instituée puisse être appropriée et nécessaire aux fins de la réalisation de l’objectif poursuivi (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 14 décembre 2018, FV/Conseil, T‑750/16, EU:T:2018:972, point 114 et jurisprudence citée).

49      C’est à la lumière de l’ensemble de ces principes qu’il convient de vérifier si la condition d’une durée minimale du mariage prévue à l’article 20 de l’annexe VIII du statut va à l’encontre du principe général d’égalité de traitement, dont le principe de non-discrimination est une expression particulière, au vu des objectifs poursuivis par cette condition. Il convient donc d’examiner si cette condition est prévue par la loi et respecte le contenu essentiel du droit à l’égalité de traitement, si les situations visées par les articles 19 et 20 de l’annexe VIII du statut sont comparables et, dans l’affirmative, si la condition de la durée minimale de cinq années de mariage prévue à l’article 20 de l’annexe VIII du statut poursuit un objectif d’intérêt général. À cet égard, il y a lieu de vérifier s’il n’apparaît pas déraisonnable pour le législateur de l’Union d’estimer que la différence de traitement instituée puisse être appropriée et nécessaire aux fins de la réalisation d’un tel objectif.

–       Sur l’existence d’une différence de traitement

50      Il y a lieu de rappeler que, dans son arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission (C‑460/18 P, EU:C:2019:1119, point 68), la Cour a jugé que l’objectif de la pension de survie était d’octroyer au conjoint survivant un revenu de remplacement destiné à compenser partiellement la perte des revenus du conjoint décédé. Selon la Cour, ce droit n’est pas soumis à des conditions de ressources ou de patrimoine devant caractériser une incapacité du conjoint survivant à faire face à ses besoins et démontrant ainsi sa dépendance financière passée par rapport au défunt (voir, en ce sens, arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission, C‑460/18 P, EU:C:2019:1119, point 69).

51      L’octroi de la pension de survie dépend, en revanche, seulement de la nature juridique des liens qui unissaient la personne concernée au fonctionnaire décédé (voir, en ce sens, arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission, C‑460/18 P, EU:C:2019:1119, point 70). À cette condition s’ajoute celle de la durée minimale du mariage, en l’occurrence cinq années selon l’article 20 de l’annexe VIII du statut.

52      Cela étant précisé, il y a lieu de constater que l’article 19 de l’annexe VIII du statut octroie une pension de survie au conjoint survivant d’un ancien fonctionnaire titulaire d’une allocation d’invalidité pour autant qu’il ait été son conjoint à la date de son admission au bénéfice de cette allocation, sans aucune condition de durée minimale du mariage. En revanche, il ressort de l’article 20 de l’annexe VIII du statut que, lorsque le mariage du conjoint survivant et de l’ancien fonctionnaire a été conclu après la date d’admission au bénéfice de l’allocation d’invalidité de ce dernier, le conjoint survivant n’a droit à une pension de survie que si ce mariage a duré au moins cinq années. Ainsi, les articles 19 et 20 de l’annexe VIII du statut traitent différemment les conjoints survivants d’anciens fonctionnaires selon que le mariage a été contracté avant ou après la mise en invalidité de ces derniers. La date du mariage constitue donc le critère retenu par le législateur pour distinguer les deux situations.

53      Or, la nature juridique des liens qui unissaient le conjoint survivant au fonctionnaire décédé est identique, que le mariage ait été conclu avant ou après la mise en invalidité et la cessation d’activité de ce dernier. Cette nature juridique ne diffère pas selon que les fonctionnaires exerçaient une activité professionnelle ou non et selon le montant des cotisations au régime de pension de l’Union qui ont été payées ou qui seraient encore dues.

54      De plus, les articles 19 et 20 de l’annexe VIII du statut, à l’instar de l’article 18 de cette annexe, ouvrent le droit à une pension de survie au conjoint survivant d’un ancien fonctionnaire qui n’est plus en activité.

55      Ainsi, la Commission ne saurait se prévaloir de l’arrêt du 17 juin 1993, Arauxo-Dumay/Commission (T‑65/92, EU:T:1993:47), pour démontrer que les situations visées par les articles 19 et 20 de l’annexe VIII du statut sont différentes. En effet, ainsi qu’il ressort du point 33 de cet arrêt, le Tribunal y a procédé à une comparaison entre, d’une part, la situation du conjoint survivant d’un ancien fonctionnaire décédé après avoir bénéficié d’une mesure de cessation de fonctions et avoir reçu les prestations et les avantages prévus par un règlement spécifique régissant cette situation et, d’autre part, la situation du conjoint survivant d’un fonctionnaire décédé alors qu’il était encore en activité, prévue par l’article 17 de l’annexe VIII du statut.

56      En outre, l’objectif de la pension de survie, dont le régime est établi, notamment, par les articles 19 et 20 de l’annexe VIII du statut, est de compenser, au bénéfice du conjoint survivant, la perte de revenus découlant du décès de l’ancien fonctionnaire. Il s’agit donc d’octroyer un revenu de remplacement au conjoint survivant. Ainsi, la circonstance que le fonctionnaire défunt se soit marié avant ou après son admission au bénéfice d’une allocation d’invalidité n’est pas de nature à modifier de façon essentielle la situation du conjoint survivant, en ce qui concerne ses droits patrimoniaux. De plus, ainsi qu’il ressort du point 50 ci-dessus, la Cour a jugé que le niveau des besoins financiers du conjoint survivant et son éventuelle dépendance financière à l’égard du fonctionnaire ou de l’ancien fonctionnaire décédé ne constituent pas un critère à prendre en compte.

57      Ainsi, il y a lieu de constater que la situation des conjoints survivants d’un ancien fonctionnaire qui se sont mariés avant la mise en invalidité de celui-ci n’est pas différente de celle des conjoints survivants d’un ancien fonctionnaire qui ont contracté mariage après cette mise en invalidité aux fins de l’octroi d’une pension de survie en application de l’article 19 ou de l’article 20 de l’annexe VIII du statut.

58      Il résulte de tout ce qui précède qu’il existe une différence de traitement de situations comparables en fonction de la date de la conclusion du mariage, dès lors qu’il s’agit de l’unique élément qui détermine l’application de la condition d’une durée minimale du mariage conformément à l’article 20 de l’annexe VIII du statut.

59      Cette différence de traitement entraîne un désavantage, au sens de la jurisprudence citée au point 43 ci-dessus, pour les conjoints survivants d’anciens fonctionnaires qui se sont mariés après l’admission de l’ancien fonctionnaire au bénéfice d’une pension d’invalidité, auxquels le régime de l’article 20 de l’annexe VIII du statut s’applique, par rapport aux conjoints survivants d’un ancien fonctionnaire qui ont contracté mariage avant cette mise en invalidité et qui relèvent de l’article 19 de cette annexe.

–       Sur le respect des critères énoncés à l’article 52, paragraphe 1, de la Charte et la justification de la différence de traitement

60      À titre liminaire, il y a lieu de constater que la différence de traitement instituée par l’article 20 de l’annexe VIII du statut est prévue par la « loi » au sens de l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, dans la mesure où cette disposition trouve son origine dans le statut.

61      Par ailleurs, aux fins de justifier la différence de traitement en cause, la Commission, soutenue par le Parlement et le Conseil, fait valoir que la durée minimale de cinq années de mariage prévue à l’article 20 de l’annexe VIII du statut permet de lutter contre la fraude et les mariages blancs, car il existerait un risque accru d’abuser de la faiblesse d’un fonctionnaire tombé gravement malade, reconnu invalide et dont la pathologie est généralement de nature à limiter son espérance de vie.

62      En l’espèce, premièrement, il y a lieu de rappeler que, selon la Cour, le principe d’interdiction de la fraude et de l’abus de droit constitue un principe général du droit de l’Union dont le respect s’impose aux justiciables (arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission, C‑460/18 P, EU:C:2019:1119, points 88 et 89). La lutte contre la fraude constitue donc un objectif d’intérêt général.

63      À cet égard, il ressort, en substance, de l’arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission (C‑460/18 P, EU:C:2019:1119, points 89 et 90), qu’une condition de durée minimale du mariage d’un an, telle que celle prévue à l’article 17 de l’annexe VIII du statut, vise à s’assurer de la réalité et de la stabilité des relations entre les personnes concernées et n’apparaît pas, à ce titre, manifestement inadéquate eu égard à l’objectif de lutte contre la fraude.

64      Ainsi, il n’apparaît pas déraisonnable de subordonner le droit du conjoint survivant d’un fonctionnaire ou d’un ancien fonctionnaire à percevoir une pension de survie à la condition que le mariage ait satisfait à une condition de durée minimale. Une telle condition permet, en effet, de s’assurer que ce mariage ne repose pas exclusivement sur des considérations étrangères à un projet de vie commun, telles que des considérations purement financières ou liées à l’obtention d’un droit de séjour.

65      Toutefois, il convient de souligner que l’article 20 de l’annexe VIII du statut, qui s’applique lorsque le mariage a été conclu après la mise en invalidité du fonctionnaire, impose une condition de durée minimale du mariage de cinq années, alors qu’aucune condition de durée minimale du mariage n’est prévue par l’article 19 de l’annexe VIII du statut.

66      À cet égard, il n’est nullement contesté que le législateur de l’Union dispose d’un large pouvoir d’appréciation dans l’établissement d’un seuil tel que celui d’une durée minimale de cinq années de mariage dans le cadre de l’article 20 de l’annexe VIII du statut. Toutefois, comme il ressort de la jurisprudence citée aux points 48 et 49 ci-dessus, ce pouvoir n’est pas illimité et doit s’exercer dans le respect des principes généraux du droit de l’Union, tels que les principes d’égalité de traitement et de proportionnalité.

67      Ainsi, il convient encore de vérifier si la condition d’une durée minimale du mariage requise par l’article 20 de l’annexe VIII du statut, qui s’applique sans aucune exception possible, ne va pas manifestement au-delà de ce qui est nécessaire pour garantir l’absence de fraude.

68      À cet égard, tout d’abord, il y a lieu de constater que le dossier ne contient aucune explication convaincante ni le moindre élément de preuve permettant d’étayer la prémisse, avancée par la Commission et le Parlement, selon laquelle la probabilité de conclure un mariage frauduleux apparaît dès que le fonctionnaire concerné est mis en invalidité, de sorte, par exemple, qu’un fonctionnaire qui se marierait la veille de son admission au bénéfice d’une pension d’invalidité ne serait pas susceptible de conclure un mariage frauduleux, contrairement à un fonctionnaire qui se marierait le lendemain d’une telle admission. La Commission et le Parlement n’ont pas davantage expliqué pour quel motif un fonctionnaire qui a été admis au bénéfice d’une pension d’invalidité serait moins apte à se prémunir contre les intentions frauduleuses d’une personne souhaitant l’épouser qu’un fonctionnaire qui serait encore en activité, de sorte qu’il serait nécessaire d’imposer une durée minimale de mariage de cinq années, qui n’est nullement prévue pour le cas où le mariage est contracté avant la mise en invalidité du fonctionnaire.

69      En outre, il y a lieu de constater que l’article 20 de l’annexe VIII du statut instaure, dans les faits, une présomption générale de fraude à l’égard des mariages dont la durée est inférieure à cinq années. Cette présomption ne peut pas être renversée, de sorte qu’elle revêt un caractère irréfragable.

70      Il en résulte que, aux fins de l’application de l’article 20 de l’annexe VIII du statut, des mariages, même conclus de bonne foi, sont présumés frauduleux lorsqu’ils ont duré moins de cinq années.

71      Or, selon une jurisprudence bien établie, une présomption générale de fraude ne saurait suffire à justifier une mesure qui porte atteinte aux objectifs du traité FUE (voir arrêt du 19 décembre 2012, Commission/Belgique, C‑577/10, EU:C:2012:814, point 53 et jurisprudence citée).

72      En outre, il y a lieu de relever que la durée du mariage n’est pas nécessairement le seul élément représentatif de la sincérité de celui-ci (voir, par analogie, arrêts du 20 juin 2013, Giersch e.a., C‑20/12, EU:C:2013:411, points 72 et 73 et jurisprudence citée, et du 18 juillet 2013, Prinz et Seeberger, C‑523/11 et C‑585/11, EU:C:2013:524, points 36 et 37 et jurisprudence citée).

73      Or, l’article 20 de l’annexe VIII du statut utilise exclusivement la condition d’une durée minimale de cinq années de mariage, sans prévoir aucune exception, de sorte qu’il est impossible pour le conjoint survivant ayant contracté un mariage après la mise en invalidité de l’ancien fonctionnaire de faire valoir que le mariage a été conclu de bonne foi, et ce quels que soient les éléments de preuve objectifs qu’il pourrait présenter à cet égard. Ce faisant, cette disposition institue une présomption générale et irréfragable de fraude envers les mariages ayant duré moins de cinq années.

74      En revanche, l’article 19 de l’annexe VIII du statut, qui ne prévoit aucune condition de durée minimale du mariage lorsque celui-ci a été conclu avant l’admission au bénéfice d’une pension d’invalidité du fonctionnaire, ne contient aucune présomption de fraude en ce qui concerne un tel mariage.

75      Par ailleurs, l’article 18, deuxième alinéa, de l’annexe VIII du statut prévoit des circonstances objectives dans lesquelles aucune durée minimale du mariage n’est requise, à savoir la naissance d’un enfant issu du mariage du fonctionnaire avant la cessation de ses activités, pour autant que le conjoint survivant pourvoie ou ait pourvu aux besoins de celui-ci. Le législateur a donc considéré, dans le cas d’un mariage conclu avant la cessation d’activité de l’ancien fonctionnaire, qu’il existait des circonstances objectives qui permettaient de renverser la présomption de fraude.

76      Les circonstances objectives rappelées au point 75 ci-dessus constituent des critères clairs permettant de gérer efficacement les pensions de survie, dans le respect du principe de sécurité juridique.

77      En l’espèce, même si le mariage du requérant et de son épouse a été conclu après l’admission au bénéfice d’une pension d’invalidité de cette dernière, il existe plusieurs éléments objectifs susceptibles de démontrer que ce mariage n’est pas frauduleux. En effet, le requérant et son épouse ont vécu en couple à partir de 2001. En raison du fait que celle-ci souffrait d’une maladie dégénérative grave, le couple a déménagé au Portugal, où ils se sont mariés le 12 mai 2014. Pendant toute la durée de leur vie commune et jusqu’au décès de celle-ci, plus de quatre ans et huit mois après leur mariage, le requérant s’est occupé de son épouse. Au demeurant, ni la Commission ni le Parlement n’ont soutenu que le cas d’espèce était entaché de fraude.

78      Par ailleurs, au vu de l’état de santé des anciens fonctionnaires bénéficiaires d’une allocation d’invalidité, qui souffrent d’une invalidité permanente considérée comme totale et dont l’espérance de vie est généralement plus limitée que celle d’un fonctionnaire qui n’est pas bénéficiaire d’une telle allocation, l’exigence d’une durée de cinq années de mariage prévue par l’article 20 de l’annexe VIII du statut est particulièrement difficile à remplir pour les conjoints survivants ayant épousé un tel ancien fonctionnaire. Elle est ainsi susceptible d’exclure du bénéfice de la pension de survie un nombre significatif de ces conjoints qui, pourtant, auraient pu établir l’absence de fraude.

79      Enfin, il y a lieu de rappeler que le législateur n’a pas toujours exclu toute appréciation individuelle dans le statut. Ainsi, l’article 1er, paragraphe 1, sous d), de l’annexe VII du statut prévoit qu’un fonctionnaire ne remplissant pas les conditions prévues pour l’octroi de l’allocation de foyer peut, sur « décision spéciale et motivée de l’[AIPN], prise sur la base de documents probants », en bénéficier lorsqu’il assume cependant effectivement des charges de famille.

80      Il résulte de tout ce qui précède qu’il est déraisonnable de considérer que la condition d’une durée minimale de cinq années de mariage prévue par l’article 20 de l’annexe VIII du statut, qui n’est en revanche nullement prévue par l’article 19 de cette annexe et qui ne souffre aucune exception permettant d’établir l’absence de fraude, quels que soient les éléments de preuve objectifs apportés, puisse être nécessaire aux fins de la réalisation de l’objectif de lutte contre la fraude.

81      Par conséquent, l’article 20 de l’annexe VIII du statut instaure une différence de traitement entre conjoints survivants d’anciens fonctionnaires qui n’est pas justifiée par l’objectif de lutte contre la fraude, dès lors qu’elle n’est pas nécessaire pour réaliser cet objectif.

82      En outre, en ce qu’il instaure une présomption générale et irréfragable de fraude envers les couples dont le mariage a duré moins de cinq années, alors même qu’une présomption générale de fraude ne saurait suffire à justifier une mesure qui porte atteinte aux objectifs du traité FUE, l’article 20 de l’annexe VIII du statut ne respecte pas le contenu essentiel du droit à l’égalité de traitement.

83      Partant, l’article 20 de l’annexe VIII du statut viole le principe général d’égalité de traitement. Il y a donc lieu de faire droit à l’exception d’illégalité soulevée par le requérant.

84      Par voie de conséquence, les décisions attaquées, adoptées sur le fondement de l’article 20 de l’annexe VIII du statut, se trouvent privées de base légale, de sorte qu’il convient de les annuler, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête.

 Sur les dépens

85      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions du requérant.

86      Par ailleurs, selon l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, les institutions qui sont intervenues au litige supportent leurs propres dépens. Il convient donc de décider que le Parlement et le Conseil supporteront chacun leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Les décisions de la Commission européenne du 8 mars 2019 et du 1er avril 2019 rejetant la demande d’octroi d’une pension de survie à FI sont annulées.

2)      La Commission supportera, outre ses propres dépens, les dépens de FI.

3)      Le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne supporteront chacun leurs propres dépens.

da Silva Passos

Reine

Truchot

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 10 mars 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : le français.