Language of document : ECLI:EU:T:2005:361

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

18 octobre 2005 (*)

« Fonctionnaires – Rapport d’évolution de carrière – Période d’évaluation 2001/2002 »

Dans l’affaire T‑51/04,

Carlos Alberto Leite Mateus, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Zaventem (Belgique), représenté par Mes S. Orlandi, A. Coolen, J.-N. Louis et E. Marchal, avocats, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. J. Currall et H. Krämer, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision de l’évaluateur d’appel du 14 mars 2003 établissant le rapport d’évolution de carrière du requérant pour l’exercice d’évaluation 2001/2002,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (première chambre),

composé de MM. J. D. Cooke, président, R. García-Valdecasas et Mme I. Labucka, juges,

greffier : M. I. Natsinas, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 10 mai 2005,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

1       L’article 25, deuxième alinéa, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, dans sa rédaction applicable à la présente espèce (ci-après le « statut »), dispose :

« Toute décision individuelle prise en application du présent statut doit être communiquée par écrit, sans délai, au fonctionnaire intéressé. Toute décision faisant grief doit être motivée ».

2       L’article 26, premier alinéa, du statut indique ce qui suit :

« Le dossier individuel du fonctionnaire doit contenir :

a)       toutes pièces intéressant sa situation administrative et tous rapports concernant sa compétence, son rendement ou son comportement »

3       L’article 43 du statut énonce :

« La compétence, le rendement et la conduite dans le service de chaque fonctionnaire, à l’exception de ceux des grades A 1 et A 2, font l’objet d’un rapport périodique établi au moins tous les deux ans, dans les conditions fixées par chaque institution, conformément aux dispositions de l’article 110.

Ce rapport est communiqué au fonctionnaire. Celui-ci a la faculté d’y joindre toutes observations qu’il juge utiles ».

4       L’article 4, paragraphe 1, de la décision de la Commission du 26 avril 2002 relative aux dispositions générales d’exécution de l’article 43 du statut (ci-après les « DGE »), intitulé « Périodicité », apporte les précisions suivantes :

« La première période d’évaluation marquera la transition entre le système de notation précédent et le nouveau système. Elle s’étendra du 1er juillet 2001 au 31 décembre 2002. Par dérogation à l’article 7, paragraphe 1, l’évaluation du rendement du fonctionnaire pendant cette période sera effectuée, à la clôture de la période de référence pour l’évaluation, nonobstant l’absence d’une fixation préalable des objectifs ».

5       L’article 7 des DGE énonce :

« 1.  Au début de la période d’évaluation, l’évaluateur établit, dans un délai raisonnable, avec le titulaire du poste, un plan définissant les objectifs à atteindre dans le cadre du poste et les compétences particulières qu’il exige, ainsi que la manière dont ils seront évalués et les conditions dans lesquelles ils sont censés être obtenus ; le plan examine également les besoins en matière de formation. Les objectifs à atteindre constituent la base de référence pour l’évaluation du rendement. Il convient de les réexaminer régulièrement au cours de l’année et de les adapter, le cas échéant, en fonction des changements intervenus dans le travail. En cas de désaccord entre l’évaluateur et le titulaire du poste sur le contenu du plan, le validateur, après avoir entendu le titulaire du poste, tranchera. Le contenu de ce plan est exposé dans les sections correspondantes du rapport d’évaluation [...]

4      Préalablement au dialogue annuel formel, mentionné au paragraphe 1, le fonctionnaire concerné établit, dans les huit jours ouvrables suivant la demande de l’évaluateur, une auto-évaluation qui fait partie intégrante du rapport final. L’évaluateur procède au dialogue avec l’intéressé dans les huit jours ouvrables. Après ce dialogue annuel formel, l’évaluateur et le validateur établissent le rapport et le transmettent à l’intéressé dans les huit jours ouvrables ».

6       L’article 8, paragraphe 7, des DGE dispose :

« L’avis du comité d’évaluation, notifié au titulaire du poste ainsi qu’à l’évaluateur et au validateur, est transmis à l’évaluateur d’appel. Dans un délai de trois jours ouvrables, soit ce dernier confirme le rapport, soit il le modifie, avant de le transmettre à l’intéressé. Lorsque l’évaluateur d’appel s’écarte des recommandations figurant dans l’avis du comité paritaire d’évaluation, il justifie les motifs de sa décision. Une copie du rapport est transmise au comité paritaire d’évaluation. Le rapport est alors considéré comme définitif ».

 Faits à l’origine du litige

7       Le requérant, fonctionnaire de grade B 2 à la Commission, est actuellement affecté à la division « Droits administratifs et rémunérations » de la direction « Personnel » de la direction générale (DG) « Personnel et administration ».

8       Le 3 février 2003, l’évaluateur a établi et visé le rapport d’évolution de carrière (ci-après le « REC ») concernant le requérant pour la période du 1er juillet 2001 au 31 décembre 2002, en lui attribuant une note globale de 13/20 qui se décompose comme suit :

« Rendement: 6/10. M. Leite Mateus assure seul les tâches liées aux engagements budgétaires pour la paie. Il a les qualités pour assurer ces tâches extrêmement délicates et complexes.

Aptitudes (compétences) : 5/6. M. Leite Mateus assume ses tâches avec calme et compétence. Il dispose d’un excellent esprit d’analyse.

Conduite dans le service : 2/4. Collègue toujours très aimable tant avec ses collègues de l’unité qu’avec ses ‘clients’. Bonne conscience professionnelle, même si un peu d’engagement serait souhaitable ».

9       Le commentaire de synthèse du REC était rédigé comme suit : « Bon collaborateur, précis et compétent. Devrait prendre spontanément plus d’initiative dans son travail. » Au point « Potentiel », l’évaluateur a indiqué ce qui suit :

« Les compétences [du requérant] vont sans doute au-delà des tâches qu’il exerce. Même s’il devrait souhaiter assumer plus de responsabilités, une promotion au grade B 1 serait amplement méritée. »

10     Le 12 février 2003, le requérant a déposé une demande de révision du REC auprès du validateur. À propos de sa conduite dans le service, le requérant a précisé qu’il avait travaillé dans des conditions précaires de santé tout en assumant le respect des délais qui lui étaient fixés, qu’il avait pris en charge des tâches supplémentaires et qu’il avait été disponible pour travailler pendant la période des vacances de Noël. Le 27 février 2003, le validateur a visé le REC sans le modifier ni formuler d’observations.

11     Le 3 mars 2003, le requérant a saisi le comité paritaire d’évaluation (ci-après le « CPE »), demandant que ses observations soient prises en compte. Le 10 mars 2003, le CPE a rendu un avis aux termes duquel il a estimé que « […] le REC a[vait] été globalement établi équitablement, objectivement et conformément aux normes d’évaluation ». Par ailleurs, le CPE a considéré « que les procédures, notamment en matière de dialogue et de délais, ont [avaient] été correctement suivies ». Toutefois, le CPE a constaté « que le validateur n’a[vait] pas présenté une motivation suffisamment détaillée et [a] recommand[é] à l’évaluateur d’appel, sans modification de la note finale, une répartition entre les rubriques internes plus cohérentes et de compléter les motivations appropriées ».

12     Le 14 mars 2003, l’évaluateur d’appel a décidé de maintenir inchangée la note globale tout en diminuant d’un point la note attribuée au requérant pour ses « aptitudes » et en augmentant d’un point celle pour sa « conduite dans le service ». Le requérant conteste cette décision (ci-après la « décision attaquée »). En se référant à l’avis du CPE, l’évaluateur d’appel a ainsi noté ce qui suit :

« […] l’évaluation globale […] reste inchangée en référence aux standards applicables. Toutefois, [le requérant], tout en ayant une excellente capacité d’analyse, ne contribue pas suffisamment à la coordination des priorités en matière budgétaire de l’unité et sa note relative à la rubrique ‘aptitudes’ sera de 4. Par contre, conformément à ses commentaires et aux standards, sa note relative à la conduite dans le service est portée à 3 ».

13     Le 13 juin 2003, le requérant a introduit une réclamation contre la décision attaquée. Selon cette réclamation :

« […] le noté constate que, s’il assume ses tâches avec compétence comme mentionné par l’évaluateur, il ne peut pas en même temps contribuer de façon insuffisante à la coordination des priorités en matière budgétaire. Il précise que les tâches de coordination budgétaire n’ont jamais fait partie de ses attributions […] »

Le 23 octobre 2003, l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après « l’AIPN ») y a opposé une décision explicite de rejet, aux termes de laquelle elle a considéré que « […] les appréciations de l’évaluateur d’appel contenues dans le REC contesté [avaient] été adoptées [dans l’]exercice de son pouvoir d’appréciation et en accord par ailleurs avec l’avis rendu par le CPE » et que la décision attaquée n’était « donc entachée d’aucun vice substantiel […] ».

 Procédure et conclusions des parties

14     Par requête déposée au greffe du Tribunal le 9 février 2004, le requérant a introduit le présent recours.

15     Le Tribunal a invité la Commission à fournir, lors de l’audience, des arguments additionnels à l’appui de l’allégation selon laquelle la fonction « coordination des priorités en matière budgétaire de l’unité » relevait des attributions du requérant et à clarifier le contenu de la fonction susmentionnée. La Commission a également été invitée à préciser les raisons pour lesquelles l’évaluateur d’appel avait estimé que le requérant ne contribuait pas suffisamment à l’exécution de cette fonction.

16     Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 10 mai 2005.

17     Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–       déclarer le recours recevable ;

–       annuler la décision attaquée ;

–       condamner la défenderesse aux dépens.

18     La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–       rejeter le recours comme non fondé ;

–       statuer sur les dépens comme de droit.

 En droit

19     À l’appui de son recours, le requérant invoque trois moyens. Le premier moyen est tiré d’une erreur manifeste d’appréciation ; le second moyen est tiré de l’incohérence entre les commentaires et la notation chiffrée ; le troisième moyen est tiré d’une violation de l’obligation de motivation.

 Sur le premier moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation

 Arguments des parties

20     Le requérant considère que la décision attaquée, diminuant la note relative à l’appréciation de ses aptitudes de 5/6 à 4/6, est fondée erronément sur des compétences qui ne relèvent pas des exigences du poste qu’il occupe. Selon lui, la coordination des priorités en matière budgétaire ne ferait pas partie de ses tâches ou objectifs, dès lors qu’elle ne serait mentionnée ni dans la « description du poste » ni dans son « auto-évaluation ».

21     À son avis, compte tenu du caractère transitoire de la période d’évaluation 2001/2002 et en l’absence de critères d’évaluation préalablement fixés, toute appréciation allant à l’encontre des éléments tangibles figurant dans l’auto-évaluation doit être spécialement motivée.

22     Par conséquent, le requérant considère que la décision attaquée est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation en ce qu’elle a violé les mesures transitoires applicables à la période d’évaluation 2001/2002.

23     À propos de la résolution de problèmes (l’une des compétences figurant dans la grille d’évaluation), le requérant indique qu’il convient de vérifier si les problèmes liés à la coordination des priorités en matière budgétaire lui sont imputables ou si ces tâches relevaient bien de sa compétence.

24     Quant aux exigences du poste, le requérant considère qu’elles ne peuvent pas servir de critère d’évaluation pour les compétences et la conduite dans le service pour la période d’évaluation 2001/2002. Au soutien de sa thèse, il cite le document intitulé « Guide – système d’évaluation du personnel centré sur l’évolution de carrière » (ci-après « le Guide d’évaluation »), selon lequel « [l]es évaluations couvrant cette période […] seront centrées sur le rendement (en l’absence d’objectifs), les compétences et la conduite dans le service (ces deux derniers éléments étant à apprécier uniquement sur la base de la grille des compétences et aspects de la conduite et non sur les compétences et aspects de la conduite spécifiques du poste) ».

25     Enfin, le requérant ajoute qu’il a contribué à la mise en œuvre du nouveau règlement financier et a travaillé sur la modernisation de la comptabilité – ces activités concernant de récentes évolutions en matière budgétaire. Le requérant fait aussi référence à ses conditions difficiles de travail.

26     La Commission rétorque que le seul but de l’auto-évaluation consiste en la préparation du dialogue formel entre le fonctionnaire noté et l’évaluateur et qu’elle ne constitue ni le standard de référence de l’appréciation relative à la rubrique « aptitudes (compétences) », ni, par ailleurs, celui de l’appréciation relative à toute autre rubrique. Au contraire, selon la Commission, il ressort de l’article 7, paragraphe 4, des DGE et du point 4.1 du Guide d’évaluation que la fonction d’auto-évaluation consiste à préparer le dialogue formel entre le fonctionnaire noté et l’évaluateur et il est erroné de prétendre que toute appréciation, par l’évaluateur, s’écartant de l’auto-évaluation devrait être spécialement motivée. La Commission déclare ne pas voir non plus pourquoi, pendant la période de transition, l’auto-évaluation devrait jouer un rôle plus important.

27     La Commission indique que l’appréciation relative à la rubrique « aptitudes (compétences) » est effectuée, d’une part, de manière générale, par référence à la grille de compétences figurant à l’annexe V du Guide d’évaluation et, d’autre part, de manière plus spécifique, par référence aux « exigences du poste » figurant, comme élément de la « description du poste », au point 3.2 du REC. Elle estime qu’en abaissant le nombre de points attribués au titre de la rubrique « aptitudes (compétences) » de 5/6 à 4/6, l’évaluateur d’appel a appliqué les standards de référence pertinents aux fins de l’appréciation relative à cette rubrique, à savoir la grille d’évaluation des compétences et de la conduite ainsi que les « exigences du poste ».

28     Le manque de contribution suffisante de la part du requérant à la coordination des priorités en matière budgétaire, constaté par l’évaluateur d’appel, s’analyse, aux dires de la Commission, comme un degré de performance réduit du requérant quant aux compétences plus générales mentionnées au point 3.2 du REC, non liées à ses tâches spécifiques.

29     La Commission considère également que la question de savoir si les causes d’éventuels problèmes concernant la coordination des priorités en matière budgétaire de l’unité étaient imputables ou non au requérant est dépourvue de pertinence. L’appréciation de la compétence liée à la résolution de divers problèmes concernerait précisément la question de savoir de quelle manière le fonctionnaire réagit face à un problème objectif et il ne s’agirait nullement de lui imputer une responsabilité pour ce problème.

30     Lors de l’audience, en répondant aux questions écrites du Tribunal (voir point 15 ci-dessus), la Commission a exposé que le requérant était chargé du système de paie des agents auxiliaires et que, de ce fait, il avait été appelé à coordonner l’activité d’une équipe de quatre à cinq personnes. À ce titre, a-t-elle également indiqué, il participait à la réunion hebdomadaire des responsables des différents secteurs de son unité, se tenant sous l’autorité du chef d’unité, et il était donc, dans ce cadre, appelé à contribuer à l’activité de coordination des priorités budgétaires au sein de son unité. Par conséquent, selon la Commission, il ne s’agissait pas d’une fonction individuellement définie, mais plutôt d’une fonction partagée à laquelle le requérant aurait dû davantage contribuer en raison de sa fonction spécifique. Elle rappelle que l’évaluateur d’appel a simplement indiqué que le requérant ne contribuait pas suffisamment à la coordination des priorités en matière budgétaire, n’entendant pas en cela que cette tâche aurait correspondu à une seule responsabilité ou à une seule fonction bien définie pour lui, dès lors qu’il s’agissait d’une fonction partagée qu’il se devait d’exercer dans le cadre de ses fonctions de responsable de secteur, en coopération avec ses collègues et sous l’autorité de son chef d’unité. Répondant à ces considérations, le requérant a de nouveau refusé d’admettre que cette fonction lui appartenait.

31     Concernant les exigences du poste, la Commission précise qu’il ressort du point 3.2 du REC qu’au nombre d’entre elles figure, notamment, celle tenant au fait de disposer des compétences suivantes : « [c]apacité à replacer des activités distinctes dans un contexte global/plus large » et « [a]ptitude à cerner les problèmes, à mettre en place des solutions et à évaluer des résultats ». Il s’agit donc, selon la Commission, de compétences plus générales, non liées aux tâches spécifiques du fonctionnaire et les observations de l’évaluateur d’appel figurant au point 9.3 du REC se rattachent précisément à ce standard de référence.

32     La Commission note aussi que le requérant, dans sa requête, n’a pas avancé de grief tiré de l’absence de prise en compte de ses conditions de travail et des difficultés particulières rencontrées pendant la période de référence. Elle soutient que, dans la mesure où ce grief est avancé au stade de la réplique, il s’agit d’un moyen nouveau produit en cours d’instance, en violation de l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal. Sur le fond, la Commission indique que, au point 6.1 (« rendement ») du REC, l’évaluateur a souligné que le requérant assurait « seul les tâches liées aux engagements budgétaires pour la paie » et que ces tâches étaient « extrêmement délicates et complexes ». Or, fait-elle valoir, il n’est pas possible de déduire de ces commentaires, ainsi que le requérant l’a fait dans son mémoire en réplique, que l’évaluateur a mentionné les prétendues difficultés particulières que le requérant aurait rencontrées sur son lieu de travail.

33     Selon la Commission, il s’ensuit que le premier moyen n’est pas fondé.

 Appréciation du Tribunal

34     Selon une jurisprudence bien établie, il n’appartient pas au Tribunal de contrôler le bien-fondé de l’appréciation portée, par l’administration, sur les aptitudes professionnelles d’un fonctionnaire, lorsque cette appréciation comporte des jugements complexes de valeur qui, par leur nature même, ne sont pas susceptibles d’une vérification objective. Toutefois, cette jurisprudence ne concerne que des jugements de valeur et le Tribunal est tenu d’exercer un contrôle sur les éventuelles irrégularités de forme et de procédure, sur les erreurs de faits manifestes entachant les appréciations portées par l’administration ainsi que sur un éventuel détournement de pouvoir (arrêt de la Cour du 5 mai 1983, Ditterich/Commission, 207/81, Rec. p. 1359 ; arrêts du Tribunal du 24 janvier 1991, Latham/Commission, T‑63/89, Rec. p. II‑19, et du 10 décembre 1992, Williams/Cour des comptes, T‑33/91, Rec. p. II‑2499).

35     Il est aussi de jurisprudence constante que le but des articles 26 et 43 du statut est d’assurer le respect des droits de la défense du fonctionnaire, en évitant que des décisions prises par l’AIPN et affectant sa situation administrative et sa carrière ne soient fondées sur des faits concernant son comportement non mentionnés dans son dossier individuel. Une décision fondée sur de tels éléments est contraire aux garanties du statut et doit être annulée comme étant intervenue à la suite d’une procédure entachée d’illégalité (voir arrêts du Tribunal du 5 décembre 1990, Marcato/Commission, T‑82/89, Rec. p. II‑735, arrêt du Tribunal du 8 juin 1995, Allo/Commission, T‑496/93, RecFP p. I‑A‑127 et II‑405, point 75, du 21 octobre 1997, Patronis/Conseil, T‑168/96, RecFP p. I‑A‑299 et II‑833, et du 20 septembre 2001, Recalde Langarica/Commission, T‑344/99, RecFP p. I‑A‑183 et II‑833).

36     Dans la présente affaire, le requérant lui-même a spécifié qu’il avait contribué à la mise en œuvre des conséquences du nouveau règlement financier et travaillé à la modernisation de la comptabilité. Selon lui, ces activités concernaient de récentes évolutions en matière budgétaire. Dans son auto-évaluation, il est indiqué que le requérant assurait les fonctions d’ordonnateur subdélégué suppléant pour, notamment, l’établissement des renumérotations auxiliaires. Comme il a été rappelé au point 30 ci-dessus, le requérant était, plus largement, chargé du système de paie des agents auxiliaires. Il est donc exact que les fonctions spécifiquement confiées au requérant n’incluaient pas expressément la détermination des priorités budgétaires.

37     Toutefois, ainsi que le soutient à bon droit la Commission, cette circonstance ne saurait conduire à omettre le fait que les fonctions confiées au requérant comportaient également des tâches d’encadrement et l’ont ainsi conduit à coordonner l’activité d’une équipe de quatre à cinq personnes. Dans le cadre de la réunion hebdomadaire des responsables des différents secteurs de l’unité du requérant, se tenant sous l’autorité du chef d’unité, il était appelé à contribuer à l’activité de coordination des priorités budgétaires. Par conséquent, la Commission est fondée à soutenir qu’il ne s’agissait pas d’une fonction précisément définie, mais plutôt de l’exercice d’une compétence d’ordre général, attendue d’un fonctionnaire responsable d’un secteur donné et assurant l’encadrement d’un certain nombre d’agents. Ainsi que le fait valoir la Commission, une telle compétence trouvait à s’exercer de façon privilégiée lors des réunions au cours desquelles le requérant se trouvait en présence de ses homologues, afin de participer à la définition des missions de l’unité. La Commission était donc en droit d’exiger du requérant qu’il contribuât davantage à cette tâche au regard des fonctions qui lui étaient spécifiquement dévolues. Dans ce contexte, il va de soi que la question de l’insuffisante contribution du requérant à la détermination des priorités de son unité en matière budgétaire relève de l’appréciation de la performance professionnelle du requérant et non seulement de sa conduite dans le service, qui n’a jamais été remise en cause dans la présente affaire. Le Tribunal considère par conséquent, que la fonction susmentionnée relevait bien des attributions du requérant et que la Commission était donc en droit de procéder à son évaluation dans le cadre du REC et, par suite, dans la décision attaquée.

38     Les deux points subsidiaires soulevés par les parties portent, premièrement, sur l’importance respective, dans la fixation de la notation, des exigences du poste, de la grille des compétences et de l’auto-évaluation, et, deuxièmement, sur la prise en compte des conditions de travail prétendument difficiles du requérant.

39     Premièrement, le Tribunal rappelle que les DGE et l’ensemble des documents internes à une institution destinés à préciser les modalités de mise en œuvre des dispositions du statut ont pour but d’aider à évaluer la compétence du fonctionnaire noté mais ne peuvent pas créer une compétence non existante auparavant.

40     Dans cette perspective, afin de déterminer l’importance de l’auto-évaluation, il importe de rappeler qu’il ressort de l’article 7, paragraphe 4, des DGE et du point 4.1. du Guide d’évaluation que la fonction de l’auto-évaluation consiste simplement à préparer le dialogue formel entre le fonctionnaire noté et l’évaluateur. Il est donc erroné de prétendre que toute appréciation de l’évaluateur s’écartant de l’auto-évaluation aurait à être spécialement motivée. Le Tribunal rejette en outre l’argument selon lequel, pendant la période de transition, l’auto-évaluation revêtirait une importance accrue, cette phase du processus de notation étant, comme il vient d’être dit, purement préparatoire. L’exercice d’évaluation même perdrait toute raison d’être si le fonctionnaire évalué y jouait un rôle prépondérant et s’il s’agissait simplement pour l’évaluateur de réfuter les affirmations dudit fonctionnaire.

41     Deuxièmement, à propos des conditions de travail prétendument difficiles du requérant et des doutes de la défenderesse à propos de la recevabilité de cet argument, le Tribunal considère que, en faisant référence à ses conditions de travail difficiles, le requérant n’a pas introduit de moyen nouveau, ce qui, à ce stade de la procédure, serait évidemment contraire à l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure. Il s’agit plutôt pour le requérant de souligner la qualité de son travail en dépit de prétendues difficultés. Par conséquent, cet argument ne mérite pas une analyse détaillée.

42     Le moyen tiré d’une erreur manifeste d’appréciation doit, par conséquent, être rejeté.

 Sur le second moyen, tiré de l’incohérence entre les commentaires et la notation chiffrée

 Arguments des parties

43     Le requérant estime que le résultat de l’évaluation (à savoir la note globale de 13/20), le situant au-dessous de la moyenne ciblée de 14/20, est incohérent par rapport aux commentaires élogieux de ses supérieurs hiérarchiques.

44     Selon le requérant, il est indiqué au point 3 du REC, intitulé « Description du poste », que le fonctionnaire doit avoir de « bonnes » compétences ou aptitudes dans tous les domaines décrits. Or, il ressortirait des commentaires de l’évaluateur d’appel que les tâches concrètement accomplies par le requérant étaient d’un niveau d’exigence supérieur à celui mentionné dans le REC.

45     La Commission considère que la réduction du nombre de points attribués a été effectuée par l’évaluateur d’appel conformément à l’article 8, paragraphe 7, des DGE. Cette réduction aurait été accompagnée d’une modification implicite, par celui-ci, des commentaires de l’évaluateur sous la rubrique d’évaluation en cause ainsi qu’au point 6.5 du REC, relatif au « potentiel » du fonctionnaire. En effet, en indiquant, au point 9.3 du REC, que le requérant ne contribuait pas suffisamment à la coordination des priorités en matière budgétaire de son unité, l’évaluateur d’appel aurait apporté une réserve à la teneur de ces commentaires.

46     Selon la Commission, le passage relatif aux compétences du requérant se réfère aux tâches effectivement assumées par celui-ci, alors que les commentaires de l’évaluateur d’appel reflètent le fait que le requérant avait fait preuve d’un degré de performance réduit quant à ses compétences plus générales, non liées à ses tâches spécifiques. Dans ces conditions, il n’y aurait pas de contradiction entre, d’une part, la description positive des compétences du requérant et les commentaires de l’évaluateur d’appel figurant au point 9.3 du REC, selon lesquels le requérant « ne contribu[ait] pas suffisamment à la coordination des priorités en matière budgétaire de l’unité ».

47     La Commission estime enfin que l’argument du requérant, selon lequel les tâches qu’il a concrètement accomplies étaient d’un niveau d’exigence supérieur à celui indiqué dans la rubrique « description du poste », est dépourvu de pertinence. Même à considérer que l’appréciation de l’évaluateur, selon laquelle le requérant avait les qualités pour assurer des tâches extrêmement délicates et complexes, revienne à affirmer que ce dernier avait, concernant les compétences directement liées à ses tâches spécifiques, un niveau supérieur à celui correspondant à de « bonnes » compétences, cette appréciation n’impliquerait pas pour autant qu’il ait possédé un niveau élevé concernant d’autres compétences, plus générales. La Commission précise que les jugements de valeur portés sur les fonctionnaires sont exclus du contrôle juridictionnel.

 Appréciation du Tribunal

48     Il convient tout d’abord de souligner que les commentaires accompagnant les appréciations formulées dans la grille analytique ont pour objet de justifier ces appréciations, afin de permettre au requérant d’en apprécier le bien-fondé en toute connaissance de cause et, le cas échéant, au Tribunal d’exercer son contrôle juridictionnel. Un tel contrôle, même restreint, exige notamment une cohérence entre ces appréciations et les commentaires destinés à les justifier (arrêt du Tribunal du 21 octobre 1992, Maurissen/Cour des comptes, T‑23/91, Rec. p. II‑2377, point 41). Or, en l’espèce, force est de considérer qu’une certaine incohérence entre lesdites appréciations et les commentaires destinés à les justifier ressort des documents présentés par les parties. En l’espèce, il convient d’examiner si le prétendu décalage entre lesdites appréciations et les commentaires destinés à les justifier constitue une incohérence manifeste qui serait susceptible d’entraîner l’annulation de la décision attaquée.

49     Dans cette optique, il importe de rappeler que l’AIPN dispose d’un large pouvoir d’appréciation pour évaluer les qualifications et les mérites des fonctionnaires notés. Dans ce domaine, le contrôle du juge communautaire doit se limiter à la question de savoir si, eu égard aux considérations qui ont pu conduire l’administration à son appréciation, celle-ci s’est tenue dans des limites raisonnables et n’a pas usé de son pouvoir de manière manifestement erronée. Le Tribunal ne saurait donc substituer son appréciation des qualifications et mérites des candidats à celle de l’autorité investie du pouvoir de nomination (voir, en ce sens, arrêt Allo/Commission, T‑496/93, précité, points 39 et 46).

50     Si les notateurs jouissent d’un large pouvoir d’appréciation dans les jugements portés sur le travail des personnes qu’ils ont la charge de noter, il importe toutefois de relever que, comme l’a jugé la Cour dans son arrêt du 21 novembre 1991, Technische Universität München (C‑269/90, Rec. p. I‑5469, point 14), lorsque l’administration dispose d’un tel pouvoir d’appréciation, « le respect des garanties conférées par l’ordre juridique communautaire [...] revêt une importance d’autant plus fondamentale ». Selon la Cour, « [p]armi ces garanties figurent notamment l’obligation pour l’institution compétente d’examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d’espèce, le droit de l’intéressé de faire connaître son point de vue ainsi que celui de voir motiver la décision de façon suffisante ». La Cour conclut en jugeant que « [c]’est seulement ainsi que [le juge communautaire] peut vérifier si les éléments de fait et de droit dont dépend l’exercice du pouvoir d’appréciation ont été réunis ».

51     Les jugements de valeur portés sur les fonctionnaires dans les rapports de notation sont exclus du contrôle juridictionnel, lequel ne s’exerce que sur les éventuelles irrégularités de forme, les erreurs de fait manifestes entachant les appréciations portées par l’administration ainsi que sur un éventuel détournement de pouvoir (arrêt du Tribunal 15 mai 1996, Dimitriadis/Cour des comptes, T‑326/94, RecFP p. I‑A‑217 et II‑613).

52     Compte tenu de la réponse apportée par le Tribunal au premier moyen et de l’évidente absence d’irrégularités formelles ou procédurales (sous réserve de l’examen de la question de la motivation, qui sera traitée ci-après dans le cadre du troisième moyen) lors de l’évaluation, le Tribunal peut procéder directement à l’analyse de la question de la concordance entre les points attribués au requérant et les commentaires justifiant la notation.

53     Selon le Guide d’évaluation, l’attribution de douze à seize points à un fonctionnaire correspond à une progression de carrière normale. Par conséquent, l’attribution de treize points au requérant ne semble pas gravement incohérente avec les commentaires, surtout positifs, dont il a fait l’objet.

54     En outre, cette question doit être analysée dans le contexte du présent système d’évaluation. Il faut noter que, selon le Guide d’évaluation, l’évaluateur se réfère aux lignes directrices fournies par la DG « Personnel et administration » quant aux fourchettes de référence et à la moyenne ciblée pour la Commission, en termes de points de mérite. De surcroît, pour une période d’évaluation donnée, chaque DG reçoit une enveloppe – un nombre de points limité – de points de priorité à distribuer. Toute DG ayant attribué un nombre de points de mérite pour un grade donné qui dépasse l’objectif de la Commission de plus d’un point subit une réduction correspondante de son enveloppe de points de priorité.

55     À cet égard, il convient de rappeler qu’une décision d’une institution communautaire communiquée à l’ensemble de son personnel et visant à garantir aux fonctionnaires concernés un traitement identique en ce qui concerne la notation constitue une directive interne et doit, en tant que telle, être considérée comme une règle de conduite indicative que l’administration s’impose à elle-même et dont elle ne peut s’écarter sans préciser les raisons qui l’y ont amenée, sous peine d’enfreindre le principe de l’égalité de traitement » (arrêt Latham/Commission, précité, point 25, et la jurisprudence y citée).

56     Ainsi, bien que l’évaluateur ait pu considérer que le requérant était un bon collaborateur (comme il résulte des commentaires justifiant la notation), cela ne faisait pas obstacle à ce qu’il considère d’autres fonctionnaires de l’unité comme étant aussi bons ou meilleurs que le requérant. Or, comme il vient d’être rappelé, dans le cadre du système d’évaluation en cause, pour éviter une pénalisation sous forme de réduction de points de priorité, les évaluateurs doivent observer les moyennes ciblées et les fourchettes données, ce qui fait peser sur eux une certaine limite quant à la possibilité d’évaluer chaque personne in abstracto, isolement des mérites des autres fonctionnaires pouvant lui être comparés.

57     Par conséquent, le Tribunal ne considère pas, dans le cas d’espèce, que la légère incohérence constatée entre les commentaires justifiant la notation chiffrée et cette dernière soit constitutive d’une illégalité.

58     Le moyen tiré de l’incohérence entre les commentaires et la notation chiffrée doit, par conséquent, être rejeté.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation

 Arguments des parties

59     Le requérant fait valoir que l’évaluateur d’appel n’a pas suffisamment motivé sa décision de ne pas suivre l’avis du CPE. Ainsi, il convient de considérer qu’il invoque, en substance, une violation de l’article 8, paragraphe 7, troisième phrase, des DGE selon lequel, « lorsque l’évaluateur d’appel s’écarte des recommandations figurant dans l’avis du [CPE], il justifie les motifs de sa décision ».

60     Le requérant estime que l’évaluateur d’appel n’a pas suivi l’avis du CPE et qu’il n’a pas rendu la correspondance entre les commentaires et les rubriques internes plus cohérente.

61     Le requérant s’interroge également sur la validité de la recommandation du CPE. Dès lors que le CPE recommande à l’évaluateur d’appel de procéder à une répartition plus cohérente entre les rubriques internes et de compléter les motivations appropriées, il serait impossible au CPE de déterminer a priori la note globale qui peut résulter de ce complément d’information.

62     La Commission conteste la recevabilité de ce moyen, dans la mesure où il n’a pas été soulevé expressément dans la réclamation et où il ne constitue pas le développement d’un moyen y ayant été soulevé.

63     À titre subsidiaire, la Commission considère, quant au fond, que le CPE a uniquement demandé à l’évaluateur d’appel de procéder, sans modification de la note finale, à une répartition plus cohérente entre les rubriques internes et de compléter les motivations appropriées. L’évaluateur d’appel aurait précisément suivi cette recommandation.

64     La Commission relève qu’il résulte d’une lecture d’ensemble de l’avis du CPE que, dans la mesure où celui-ci a demandé à l’évaluateur d’appel de « compléter les motivations appropriées », il visait uniquement une motivation concernant la redistribution, par l’évaluateur d’appel, du nombre de points entre les différentes rubriques d’évaluation. En revanche, le CPE n’aurait pas demandé à l’évaluateur d’appel de fournir des compléments de motivation quant à l’attribution des points telle qu’effectuée par l’évaluateur et le validateur. En effet, une telle demande aurait été dépourvue de sens, dès lors que l’évaluateur d’appel était précisément invité à redistribuer le nombre de points attribués au titre des différentes rubriques. Dès lors, l’avis du CPE ne serait nullement incohérent.

65     Il s’ensuit que, selon la Commission, le troisième moyen n’est pas fondé.

 Appréciation du Tribunal

66     Il convient, tout d’abord, d’examiner la question de la recevabilité du troisième moyen.

67     Le Tribunal a toujours accordé la plus haute importance à l’observation des principes essentiels du droit. Selon une jurisprudence bien établie, l’obligation de motiver toute décision faisant grief, édictée à l’article 25, deuxième alinéa, du statut, constitue un principe essentiel du droit communautaire auquel il ne saurait être dérogé qu’en raison de considérations impérieuses. Elle a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour apprécier le bien-fondé de l’acte lui faisant grief et l’opportunité d’introduire un recours devant le Tribunal et, d’autre part, de permettre à celui-ci d’exercer son contrôle (voir arrêt du Tribunal du 20 juillet 2001, Brumter/Commission, T‑351/99, RecFP p. I‑A‑165 et II‑757, points 28 et 29, et la jurisprudence citée).

68     La règle de la concordance entre la réclamation administrative préalable et le recours exige, sous peine d’irrecevabilité, qu’un moyen soulevé devant le juge communautaire l’ait déjà été dans le cadre de la procédure précontentieuse, afin que l’AIPN ait été en mesure de connaître d’une façon suffisamment précise les critiques que l’intéressé formule à l’encontre de la décision contestée. Toutefois, si les conclusions présentées devant le juge communautaire ne peuvent contenir que des chefs de contestation reposant sur la même cause que ceux invoqués dans la réclamation, ces chefs de contestation peuvent, devant le juge communautaire, être développés par la présentation de moyens et d’arguments ne figurant pas nécessairement dans la réclamation, mais s’y rattachant étroitement. D’ailleurs, la procédure précontentieuse ayant un caractère informel et les intéressés agissant, en général, à ce stade, sans le concours d’un avocat, l’administration ne doit pas examiner les réclamations de façon restrictive, mais doit, au contraire, les examiner dans un esprit d’ouverture (arrêt Allo/Commission, précité, points 26 et 27).

69     De plus, le Tribunal rappelle que le juge communautaire est tenu de rechercher d’office si une institution a satisfait à l’obligation qui lui incombe de motiver ses décisions. Cet examen pouvant avoir lieu à tout stade de la procédure, aucun requérant ne saurait être forclos à se prévaloir de ce moyen au seul motif qu’il ne l’a pas soulevé dans sa réclamation (arrêt du Tribunal du 19 septembre 1996, Allo/Commission, T‑386/94, RecFP p. I‑A‑393 et II‑1161, point 53).

70     Pour cette raison, le Tribunal considère que le moyen concernant la violation de l’obligation de motivation est recevable.

71     Concernant l’examen au fond de ce moyen, il importe tout d’abord de s’assurer de l’existence même de la motivation, en analysant les réponses apportées à la recommandation du CPE par l’évaluateur d’appel, avant que d’examiner, le cas échéant, si la motivation adoptée par la défenderesse est conforme aux règles et à la jurisprudence communautaires en la matière.

72     Premièrement, en ce qui concerne l’obligation de l’évaluateur d’appel de motiver toute décision s’écartant des recommandations du CPE, force est de constater qu’elle ne trouvait pas à s’appliquer en l’espèce, puisque l’évaluateur d’appel les a pleinement suivies. En effet, le nombre total des points attribués au requérant est resté inchangé et l’ajustement interne a été accompli. Par conséquent, seule demeure en litige la question de la motivation relative à l’abaissement des points attribués au titre des « aptitudes », un tel abaissement devant être motivé au titre de l’article 25 du statut. 

73     Deuxièmement, il importe de rappeler que le but de la motivation d’une décision est de permettre au fonctionnaire noté d’en apprécier le bien-fondé en toute connaissance de cause et, le cas échéant, au Tribunal d’exercer son contrôle juridictionnel (arrêt Maurissen/Cour des comptes, précité).

74     À la lumière de la jurisprudence précitée et compte tenu de l’analyse exposée dans le cadre du premier moyen, qui a démontré que les explications contenues dans la décision attaquée répondaient largement aux exigences de motivation, de même que la constatation que l’évaluateur d’appel a précisément suivi la recommandation du CPE, le Tribunal considère que, dans le cas d’espèce, la Commission a suffisamment motivé sa décision.

75     Le moyen tiré d’une violation de l’obligation de motivation doit, par conséquent, être rejeté et, par suite, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

76     Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, en vertu de l’article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les dépens exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. Le requérant ayant succombé, il y a lieu de décider que chaque partie supportera ses propres dépens, conformément aux conclusions en ce sens de la défenderesse.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Chaque partie supportera ses propres dépens.

Cooke

García-Valdecasas

Labucka

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 18 octobre 2005.

Le greffier

 

      Le président

E. Coulon

 

      R. García-Valdecasas


* Langue de procédure : le français.