Language of document : ECLI:EU:T:2011:327

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

4 juillet 2011 (*)

« Recours en annulation – Médicaments à usage humain – Substance active eszopiclone – Autorisation de mise sur le marché – Non‑reconnaissance de la qualité de nouvelle substance active – Acte non susceptible de recours – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T‑275/09,

Sepracor Pharmaceuticals (Ireland) Ltd, établie à Dublin (Irlande), représentée par M. I. Dodds-Smith, solicitor, M. D. Anderson, QC, et Mme J. Stratford, barrister,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée initialement par M. A. Sipos, puis par M. M. Wilderspin et Mme M. Šimerdová, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision que contiendrait la lettre de la Commission adressée à la requérante le 6 mai 2009, dans le contexte de la procédure d’autorisation de mise sur le marché du Lunivia, dans la mesure où elle concerne la qualification de la substance active eszopiclone,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de Mmes I. Pelikánová, président, K. Jürimäe (rapporteur) et M. M. van der Woude, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige

1        Le 20 juillet 2007, la requérante, Sepracor Pharmaceuticals (Ireland) Ltd, a déposé une demande d’autorisation de mise sur le marché auprès de l’Agence européenne des médicaments (EMA) pour les comprimés de 2 mg et de 3 mg de Lunivia, un médicament utilisé pour le traitement de l’insomnie. La substance active du Lunivia est l’eszopiclone.

2        Le 23 octobre 2008, le comité des médicaments à usage humain de l’EMA (ci-après le « comité ») a rendu son avis sur la demande d’autorisation de mise sur le marché du Lunivia (ci-après l’« avis initial »), conformément à l’article 9, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 726/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, établissant des procédures communautaires pour l’autorisation et la surveillance en ce qui concerne les médicaments à usage humain et à usage vétérinaire, et instituant une Agence européenne des médicaments (JO L 136, p. 1), tel que modifié. Dans cet avis, le comité a recommandé l’octroi d’une autorisation de mise sur le marché à la requérante, pour le Lunivia. Toutefois, il a considéré que la substance active eszopiclone ne pouvait pas être considérée comme une nouvelle substance active au sens de l’article 3, paragraphe 2, du règlement n° 726/2004.

3        Le 4 novembre 2008, conformément à l’article 62, paragraphe 1, du règlement n° 726/2004, la requérante a déposé une demande de réexamen de l’avis initial auprès de l’EMA, en ce que le comité y a affirmé que l’eszopiclone ne pouvait pas être considéré comme une nouvelle substance active.

4        Le 19 février 2009, le comité a rendu son avis définitif sur la demande d’autorisation de mise sur le marché du Lunivia. Il y a confirmé la recommandation formulée dans l’avis initial. L’avis définitif a été communiqué à la requérante le 20 février 2009.

5        Par lettres adressées à la Commission des Communautés européennes les 10 et 20 février 2009 ainsi que les 9 et 24 mars 2009, la requérante a notamment exposé que l’octroi d’une autorisation de mise sur le marché sans reconnaissance, pour l’eszopiclone, du statut de nouvelle substance active compromettrait la viabilité commerciale du lancement du Lunivia dans l’Union européenne, à tel point qu’elle était prête à retirer sa demande d’autorisation de mise sur le marché. Elle a expliqué que la non-reconnaissance du statut de nouvelle substance active permettrait aux producteurs de médicaments génériques d’utiliser les données pré-cliniques ou cliniques, obtenues par elle dans le cadre de ses efforts de recherche et développement, en vue d’obtenir une autorisation de mise sur le marché, et ce quand bien même elle ou ses partenaires contractuels n’auraient pas exploité leur propre autorisation. La requérante a demandé à la Commission de pouvoir s’entretenir avec elle de cette question. Une réunion entre la requérante et les services de la Commission a eu lieu le 2 avril 2009.

6        Par lettre du 6 mai 2009 (ci-après l’« acte attaqué »), la Commission a notamment informé la requérante que, après un examen approfondi des arguments avancés par cette dernière, elle ne voyait aucune raison de s’écarter de l’avis définitif du comité s’agissant du refus de reconnaître à l’eszopiclone le statut de nouvelle substance active.

7        Par lettre du 13 mai 2009, la requérante a fait savoir à l’EMA qu’elle retirait sa demande d’autorisation de mise sur le marché des comprimés de 2 mg et de 3 mg de Lunivia.

 Procédure et conclusions des parties

8        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 16 juillet 2009, la requérante a introduit le présent recours.

9        Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 12 octobre 2009, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal. La requérante a déposé ses observations sur l’exception soulevée par la Commission le 27 novembre 2009.

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours recevable ou, à titre subsidiaire, réserver sa décision sur la recevabilité jusqu’à ce qu’il soit statué au fond ;

–        annuler l’acte attaqué ;

–        condamner la Commission aux dépens.

11      Dans son exception d’irrecevabilité, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

12      En vertu de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure, si une partie le demande, le Tribunal peut statuer sur l’irrecevabilité sans engager le débat au fond. Conformément au paragraphe 3 du même article, la suite de la procédure est orale, sauf décision contraire du Tribunal.

13      En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide de statuer sans ouvrir la procédure orale.

14      La Commission excipe de l’irrecevabilité du recours. En substance, elle fait valoir que l’acte attaqué n’est pas un acte attaquable, au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE, mais qu’il s’agit, au contraire, d’un document à caractère purement informatif, dépourvu d’effets juridiques. En effet, premièrement, l’acte attaqué ne contiendrait pas la position définitive de la Commission qui aurait dû être formalisée dans une décision adoptée conformément à l’article 10, paragraphe 2, du règlement n° 726/2004. La Commission n’aurait pas eu compétence pour prendre une décision juridiquement contraignante concernant le statut de l’eszopiclone en tant que nouvelle substance active en dehors de la procédure établie par ledit règlement. Deuxièmement, l’acte attaqué aurait été rédigé dans le cadre de contacts informels, au cours desquels la Commission se serait contentée de répondre aux questions de la requérante. Troisièmement, l’acte attaqué expliquerait la notion de nouvelle substance active en des termes généraux sans toutefois examiner le cas concret de l’eszopiclone.

15      Il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, constituent des actes ou des décisions susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation au sens de l’article 230 CE les mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts du requérant, en modifiant de façon caractérisée la situation juridique de celui-ci. Pour déterminer si un acte attaqué produit de tels effets, il y a lieu de s’attacher à sa substance. La forme dans laquelle des actes ou des décisions sont pris est, en principe, indifférente en ce qui concerne la possibilité de les attaquer par un recours en annulation (arrêt de la Cour du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, Rec. p. 2639, point 9 ; arrêts du Tribunal du 22 juin 2000, Pays-Bas/Commission, C‑147/96, Rec. p. I‑4723, point 27, et du 30 septembre 2003, Eurocoton e.a./Conseil, C‑76/01 P, Rec. p. I‑10091, point 54).

16      En l’espèce, l’acte attaqué est une lettre adressée par les services de la Commission à la requérante. Afin de déterminer si ledit acte est de nature à produire des effets de droit pour cette dernière, conformément à la jurisprudence mentionnée au point 15 ci-dessus, il convient d’analyser tant son contenu que le contexte dans lequel il a été adopté.

17      En premier lieu, il ressort du contexte de l’acte attaqué qu’il ne fait que traduire l’opinion des services compétents de la Commission quant à la suite à réserver à l’avis définitif du comité, sans toutefois constituer l’acte décisionnel que la Commission se doit d’adopter à la suite dudit avis.

18      À cet égard, premièrement, il importe de remarquer que la procédure d’examen des demandes d’autorisation de mise sur le marché est précisément décrite dans le règlement n° 726/2004. Or, ce règlement établit sans ambiguïté que, après réception de l’avis définitif du comité, la Commission doit adopter une décision en bonne et due forme, conformément à l’une des procédures envisagées par la décision 1999/468/CE du Conseil, du 28 juin 1999, fixant les modalités de l’exercice des compétences d’exécution conférées à la Commission (JO L 184, p. 23).

19      Plus précisément, la procédure envisagée par le règlement n° 726/2004 est la suivante. En vertu de l’article 5, paragraphe 2, de ce règlement, le comité est chargé de formuler l’avis de l’EMA, en particulier, en ce qui concerne l’octroi d’une autorisation de mise sur le marché d’un médicament à usage humain. Aux termes de l’article 6, paragraphe 3, de ce règlement, l’EMA veille à ce que l’avis du comité soit rendu dans un délai de 210 jours suivant la réception d’une demande d’autorisation de mise sur le marché. Selon l’article 9, paragraphe 3, dudit règlement, l’EMA envoie l’avis du comité, dans les quinze jours suivant son adoption, à la Commission, aux États membres et aux demandeurs. En application de l’article 62, paragraphe 1, du règlement n° 726/2004, le demandeur d’autorisation de mise sur le marché peut déposer une demande de réexamen de l’avis du comité. L’article 10, paragraphe 1, dudit règlement prévoit que, dans les quinze jours suivant la réception de l’avis du comité, la Commission prépare un projet de décision concernant la demande d’autorisation de mise sur le marché. Il est précisé, dans ce paragraphe, que, dans les cas où le projet de décision n’est pas conforme à l’avis du comité, la Commission doit expliquer les raisons qui l’ont poussée à s’écarter de cet avis. En outre, l’article 10, paragraphe 2, du règlement n° 726/2004 précise que la Commission arrête une décision définitive conformément à la procédure visée à l’article 87, paragraphe 3, de ce même règlement, et ce dans les quinze jours suivant la fin de celle-ci. L’article 87, paragraphe 3, dudit règlement renvoie à la décision 1999/468.

20      À la lumière de ce qui précède, il y a lieu de constater qu’une simple lettre des services de la Commission exprimant leur position quant à la suite à donner à l’avis du comité ne saurait être considérée comme une décision de nature à produire des effets de droit pour la requérante. En effet, d’une part, la Commission étant tenue, en vertu de l’article 10, paragraphe 1, du règlement n° 726/2004, de formaliser sa position dans une décision adoptée conformément à la décision 1999/468, seule une telle décision est susceptible de modifier de façon caractérisée la situation juridique du demandeur d’autorisation de mise sur le marché. D’autre part, il ressort de l’article 10, paragraphe 1, de ce même règlement que la Commission peut s’écarter de l’avis du comité. Dès lors, quand bien même la Commission a exprimé, dans une lettre, son intention de ne pas s’écarter de l’avis du comité, il ne saurait être présumé que la décision définitive, arrêtée en application de l’article 10, paragraphe 2, dudit règlement, se conformerait nécessairement à cette intention.

21      Deuxièmement, il ressort des échanges entre la requérante et la Commission, ayant conduit à l’adoption de l’acte attaqué, qu’il n’était pas contesté, au moment où ils ont eu lieu, que ces échanges, qui ont été entamés par la requérante, étaient informels et se sont déroulés en marge de la procédure formelle prévue par le règlement n° 726/2004, que la Commission était tenue, en vertu dudit règlement, de formaliser sa position dans une décision adoptée selon les formes prescrites par la décision 1999/468 et que la question du statut de l’eszopiclone en tant que nouvelle substance active serait tranchée, en définitive, par cette dernière décision.

22      À cet égard, il convient de relever, d’abord, que, par les courriers des 10 et 20 février 2009, la requérante n’a pas tenté de convaincre la Commission que l’eszopiclone devait être considéré comme une nouvelle substance active. En revanche, elle a cherché, en substance, à obtenir de la Commission qu’elle confirme que la législation pertinente pouvait être interprétée de sorte que ses données cliniques et précliniques bénéficieraient d’une protection même si la décision de la Commission autorisant la mise sur le marché du Lunivia suivait l’avis du comité en refusant de reconnaître à l’eszopiclone le statut de nouvelle substance active. De surcroît, dans le courrier du 9 mars 2009, outre la confirmation de sa présence à la réunion du 2 avril 2009, la requérante faisait valoir qu’elle ne souhaitait pas que la Commission octroie une autorisation de mise sur le marché au Lunivia tant que la question de la protection des données cliniques et précliniques ne serait clarifiée. Enfin, dans le courrier du 24 mars 2009, la requérante a contesté la validité du test appliqué par le comité aux fins de la détermination du statut de la substance active eszopiclone et a prié la Commission de bien vouloir discuter cette question avec elle avant d’adopter sa décision.

23      Dans la mesure où, d’une part, la requérante n’ignorait pas que, au-delà de la réponse qu’elle obtiendrait dans le cadre de ces échanges informels, une décision au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE serait adoptée et, d’autre part, la Commission s’était contentée, dans l’acte attaqué, de répondre aux questions posées par la requérante en marge de la procédure formelle prévue par le règlement n° 726/2004, cette dernière ne saurait valablement soutenir que la position exprimée par la Commission par simple lettre a pu modifier sa situation juridique.

24      Troisièmement, il importe de relever que la requérante a retiré sa demande d’autorisation de mise sur le marché le 13 mai 2009 afin d’éviter, selon elle, que, lors de l’adoption de la décision de la Commission autorisant la mise sur le marché du Lunivia, ses données cliniques et précliniques ne soient immédiatement disponibles pour les fabricants de médicaments génériques. Cela signifie que l’acte attaqué ne constitue qu’une simple information quant au contenu probable de la future décision de la Commission et qu’il a été compris comme tel par la requérante. Il ne produit donc aucun effet juridique pour cette dernière, contrairement à la décision que la Commission aurait été tenue d’adopter, en vertu du règlement n° 726/2004 et dans les formes prescrites par la décision 1999/468, à la suite de l’avis définitif du comité, si la demande d’autorisation de mise sur le marché n’avait pas été retirée.

25      En second lieu, s’agissant du contenu de l’acte attaqué, il importe de relever que, en ce qui concerne la question de la qualité de la substance active eszopiclone, les termes employés par la Commission dans l’acte attaqué traduisent sans équivoque sa volonté de communiquer à la requérante une simple information quant au contenu probable d’une décision future. Rien dans les termes de l’acte attaqué ne laisse supposer que la Commission y a adopté une décision définitive relative à la qualité de ladite substance.

26      En effet, la question du statut de la substance active eszopiclone est traitée par la Commission, dans l’acte attaqué, en deux temps. Dans un premier temps, la Commission a exposé sa vision théorique, d’une part, de la notion de nouvelle substance active et, d’autre part, de l’évaluation que le comité doit mener afin de déterminer la présence d’une telle substance active dans un médicament pour lequel une demande d’autorisation de mise sur le marché a été déposée. Dans un second temps, la Commission a constaté que, sur la base de ces considérations théoriques, elle ne voyait aucune raison de s’écarter de l’avis dudit comité (« on the basis of the above, I would like to inform you that, after careful consideration of your arguments, we see no reason to depart from the scientific conclusions of the [committee] on this matter »). Il ressort des termes de cette constatation que la Commission n’a pas entendu adopter une décision définitive mais qu’elle s’est contentée d’informer la requérante sur la position qu’elle entendait, en principe, prendre dans une future décision.

27      Partant, il ne saurait être déduit de la substance et des termes de l’acte attaqué qu’il est de nature à modifier la situation juridique de la requérante.

28      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par les arguments de la requérante.

29      Premièrement, la requérante soutient que la décision d’octroi ou de refus d’une autorisation de mise sur le marché, si elle avait été adoptée, n’aurait pas abordé la question de savoir si l’eszopiclone est ou non une nouvelle substance active. Cela impliquerait que la position de la Commission concernant la notion de nouvelle substance active et le critère juridique appliqué par le comité pour déterminer si une substance active peut être considérée comme nouvelle ne pourrait faire l’objet d’un contrôle juridictionnel.

30      À cet égard, il convient de relever que la Commission ne conteste pas que, à supposer que la décision d’octroi d’une autorisation de mise sur le marché ait été adoptée en faveur de la requérante, le dispositif de cette décision aurait été limité à l’octroi de ladite autorisation et n’aurait pas abordé la question de savoir si l’eszopiclone est ou non une nouvelle substance active. Selon la Commission, le dispositif de la décision aurait contenu un simple renvoi à l’avis du comité.

31      Pour autant, cela ne signifie pas que cette question ne serait pas susceptible de faire l’objet d’un contrôle juridictionnel. En effet, l’avis du comité, selon lequel l’eszopiclone ne peut se voir reconnaître le statut de nouvelle substance active, doit être considéré comme un acte préparatoire par rapport à la décision d’octroi de l’autorisation de mise sur le marché à adopter par la Commission, en application du règlement n° 726/2004. Or, selon la jurisprudence, si des mesures de nature purement préparatoire ne peuvent en tant que telles faire l’objet d’un recours en annulation, les illégalités éventuelles qui les entachent peuvent être invoquées à l’appui d’un recours dirigé contre l’acte définitif dont elles constituent un stade d’élaboration (arrêt IBM/Commission, point 15 supra, point 12).

32      Dès lors, si la requérante n’avait pas retiré sa demande d’autorisation de mise sur le marché, elle aurait eu la possibilité de contester, par le biais d’un recours contre la décision de la Commission d’octroi de l’autorisation de mise sur le marché, tant le refus du comité de reconnaître à l’eszopiclone le statut de nouvelle substance active que le test juridique appliqué par ledit comité pour parvenir à cette conclusion. Partant, il ne saurait être soutenu à bon droit que le refus de reconnaître à l’eszopiclone le statut de nouvelle substance active, tel que décidé par le comité et confirmé par la Commission, ne pourrait faire l’objet d’aucun contrôle en cas de recours contre la décision d’octroi de l’autorisation de mise sur le marché, adoptée en vertu du règlement n° 726/2004.

33      Deuxièmement, la requérante fait valoir que ses droits n’auraient pas été protégés de manière adéquate ou effective par la possibilité de contester la décision d’octroi d’une autorisation de mise sur le marché. En effet, une telle décision aurait eu des effets graves et immédiats, en permettant aux producteurs de médicaments génériques d’utiliser aussitôt toutes les données précliniques et cliniques du dossier de la requérante en vue d’obtenir leur propre autorisation de mise sur le marché. Or, c’est l’acte attaqué qui aurait permis aux producteurs de médicaments génériques d’accéder auxdites données et aurait ainsi porté atteinte de manière irréversible à leur protection. L’acte attaqué s’apparenterait donc à une décision de communiquer une information confidentielle à un tiers, telle que celles ayant fait l’objet des arrêts de la Cour du 24 juin 1986, AKZO Chemie et AKZO Chemie UK/Commission (53/85, Rec. p. 1965), et du 28 novembre 1991, BEUC/Commission (C‑170/89, Rec. p. I‑5709).

34      Il importe d’observer que, par cet argument, la requérante se prévaut, en substance, des effets juridiques futurs de la décision d’octroi de l’autorisation de mise sur le marché – effets qui trouvent leur origine, selon la requérante, dans l’acte attaqué – et tend à anticiper le dommage que cette décision sera susceptible de lui causer.

35      Or, la jurisprudence ne reconnaît pas à la requérante la possibilité d’invoquer des effets juridiques futurs. La Cour a ainsi dit pour droit que ce n’est pas l’annonce de l’intention d’adopter une décision, mais l’adoption de la décision elle-même qui est susceptible de produire des effets juridiques à l’égard de la requérante (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 27 septembre 1988, Royaume-Uni/Commission, 114/86, Rec. p. 5289, point 13).

36      De surcroît, les arrêts mentionnés par la requérante ne soutiennent pas son argumentation.

37      En effet, l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt AKZO Chemie et AKZO Chemie UK/Commission, point 33 supra, concernait une procédure ouverte par la Commission à l’égard de AKZO Chemie, au titre de l’article 82 CE. Dans le cadre de cette procédure, la Commission avait accepté de communiquer des documents confidentiels à un concurrent de AKZO Chemie. Cette dernière a alors introduit un recours contre la décision de la Commission de transmettre lesdits documents au concurrent. La Cour a estimé que le recours était recevable dès lors que l’acte attaqué, d’une part, revêtait un caractère définitif, les documents confidentiels pouvant, en vertu de cet acte, être communiqués au concurrent et, d’autre part, était indépendant de la décision devant intervenir sur l’existence de l’infraction à l’article 82 CE. Or, si dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt AKZO Chemie et AKZO Chemie UK/Commission, point 33 supra, l’acte attaqué modifiait immédiatement et de façon définitive la position d’AKZO Chemie, tel n’est pas le cas en l’espèce. Dans l’acte attaqué, la Commission se contente d’annoncer son intention d’adopter une décision dont les effets seront immédiats et irréversibles. Ledit arrêt n’étaye donc pas l’argumentation de la requérante.

38      Il en va de même de l’arrêt BEUC/Commission, point 33 supra, dans la mesure où la Cour y a constaté que l’acte attaqué refusait au Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC) l’accès au dossier non confidentiel d’une procédure antidumping, ce qui a porté atteinte à ses intérêts. Il n’est donc pas question dans cet arrêt d’un acte attaqué qui produirait ses effets dans le futur.

39      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le recours comme étant irrecevable.

 Sur les dépens

40      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter les dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté comme irrecevable.

2)      Sepracor Pharmaceuticals (Ireland) Ltd est condamnée aux dépens.

Fait à Luxembourg, le 4 juillet 2011.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       I. Pelikánová


* Langue de procédure : l’anglais.