Language of document : ECLI:EU:T:2008:477

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

5 novembre 2008 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative représentant un arc stylisé avec surface pleine – Marque communautaire figurative antérieure représentant un arc stylisé – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94 »

Dans l’affaire T‑304/07,

Calzaturificio Frau SpA, établie à San Giovanni Ilarione (Italie), représentée par MA. Rizzoli, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par MM. O. Montalto et L. Rampini, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Camper, SL, établie à Inca (Espagne), représentée par MI. Temiño Ceniceros, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 14 juin 2007 (affaire R 768/2006-1), relative à une procédure d’opposition entre Camper, SL et Calzaturificio Frau SpA,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (sixième chambre),

composé de M. A. W. H. Meij, président, Mme I. Wiszniewska‑Białecka et M. V. Vadapalas (rapporteur), juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 10 août 2007,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 22 novembre 2007,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 8 novembre 2007,

vu la modification de la composition des chambres du Tribunal,

vu la désignation d’un autre juge pour compléter la chambre à la suite de l’empêchement d’un de ses membres,

à la suite de l’audience du 19 juin 2008,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 9 octobre 2003, la requérante, Calzaturificio Frau SpA, a présenté une demande de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié.

2        L’enregistrement a été demandé pour le signe figuratif reproduit ci-après :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 18 et 25 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante :

–        classe 18 : « Cuir et imitations du cuir, produits en ces matières non compris dans d’autres classes, peaux d’animaux, malles et valises, parapluies, parasols et cannes, fouets et sellerie » ;

–        classe 25 : « Vêtements, chaussures, chapellerie ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 28/2004, du 12 juillet 2004.

5        Le 24 septembre 2004, l’intervenante, Camper, SL, a formé une opposition à l’encontre de l’enregistrement de la marque demandée à l’égard de tous les produits visés, en se fondant sur plusieurs droits antérieurs, dont sa marque communautaire figurative n° 1834738, enregistrée le 10 octobre 2001, notamment pour des produits relevant de la classe 18 au sens de l’arrangement de Nice (« cuir et imitations du cuir, produits en ces matières non compris dans d’autres classes, peaux d’animaux, malles et valises, parapluies, parasols et cannes, fouets et sellerie »), et reproduite ci-après :

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6        Par décision du 6 avril 2006, la division d’opposition a, d’une part, accueilli l’opposition en ce qui concerne les produits relevant de la classe 25, sur la base des marques antérieures enregistrées au Royaume‑Uni pour les produits relevant de la classe 25, mais l’a, d’autre part, rejetée en ce qui concerne les produits relevant de la classe 18. à cet égard, la division d’opposition a considéré que la marque communautaire antérieure n° 1834738, enregistrée pour les produits relevant de la classe 18, et la marque demandée n’étaient pas similaires.

7        Le 2 juin 2006, l’intervenante a formé un recours auprès de la chambre de recours de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94, contre la décision de la division d’opposition en ce qui concerne le rejet de l’opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits relevant de la classe 18.

8        Par décision du 14 juin 2007 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours a annulé la décision de la division d’opposition et a fait droit à l’opposition sur la base de la marque communautaire antérieure n° 1834738, visant des produits identiques relevant de la classe 18. Elle a considéré, en substance, que la marque demandée et cette marque antérieure représentaient le même « motif figuratif », à savoir un arc ou un pont, que le consommateur garderait en mémoire, et que les différences découlant de la couleur et de l’inclinaison de la marque demandée ne l’emportaient pas sur cette similitude, un risque de confusion ne pouvant donc pas être exclu.

 Conclusions des parties

9        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée, dans la mesure où elle annule la décision de la division d’opposition, rejette la demande d’enregistrement pour tous les produits contestés et condamne la requérante à supporter les frais des procédures d’opposition et de recours ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

10      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

11      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer irrecevable toute conclusion de la requérante visant à obtenir une décision allant au-delà de la confirmation ou de l’annulation de la décision attaquée ;

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur l’objet du litige

12      À titre liminaire, il convient d’observer que le dispositif de la décision attaquée vise le rejet de la demande d’enregistrement pour « les produits contestés ». Il y a lieu d’interpréter ce dispositif à la lumière des limites du litige devant la chambre de recours, qui portait uniquement sur le rejet de l’opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits relevant de la classe 18.

13      La requérante ayant confirmé lors de l’audience que le premier chef de ses conclusions visait uniquement à l’annulation de la décision attaquée, il convient de constater que l’objet du présent recours porte, comme c’était le cas devant la chambre de recours, sur l’opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits relevant de la classe 18.

 Sur le fond

14      À l’appui de son recours, la requérante invoque deux moyens tirés des violations, respectivement, de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 et de l’article 73 du même règlement.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94

–       Arguments des parties

15      La requérante soutient que la chambre de recours a commis une erreur en concluant à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en cause.

16      Concernant la comparaison visuelle, la chambre de recours aurait minimisé les différences entre les signes en cause, ressortant du fait que l’un est noir et l’autre transparent, ainsi que de l’inclinaison particulière du signe demandé. Elle aurait également omis de prendre en compte le fait que la direction de l’inclinaison des signes est différente, l’un étant orienté à droite, l’autre à gauche.

17      S’agissant de la comparaison conceptuelle, la chambre de recours aurait considéré à tort que la marque demandée représente un arc ou un pont. À la différence de la marque antérieure, la marque demandée ne serait pas perçue comme un pont, mais constituerait un signe de fantaisie caractérisé par son irrégularité. Sa forte inclinaison notamment exclurait toute référence à un pont.

18      À cet égard, dans le cadre de l’enregistrement italien n° 921984, la marque demandée aurait été décrite comme un « signe graphique de fantaisie, constitué d’un trait irrégulier ». Dans le cadre de l’enregistrement communautaire, les signes en cause auraient été classés différemment en vertu de l’arrangement de Vienne instituant la classification internationale des éléments figuratifs des marques, du 12 juin 1973, tel que modifié. La marque demandée aurait été classée dans la section 26.13.25, intitulée « Autres figures géométriques, dessins indéfinissables », tandis que la marque antérieure aurait été classée dans la section 7.5.10, intitulée « Arcs de triomphe, portiques, portes de ville ».

19      Ensuite, la requérante fait valoir que le caractère distinctif de la marque antérieure est faible, en ce qu’elle représente une forme géométrique stylisée et que de nombreuses marques similaires existent dans le secteur concerné. En effet, il serait habituel d’utiliser des formes géométriques en tant que marques figuratives pour les produits relevant des classes 18 et 25. À cet égard, la requérante se réfère à certaines marques communautaires qui, selon elle, présenteraient une plus grande similitude avec la marque antérieure que la marque demandée.

20      La chambre de recours n’aurait pas vérifié le caractère distinctif de la marque antérieure. La requérante estime que cette lacune de raisonnement l’a conduite à conclure erronément à l’existence d’un risque de confusion. En effet, au vu du faible caractère distinctif de la marque antérieure, même des différences minimes par rapport à la marque demandée auraient suffi à exclure tout risque de confusion.

21      La requérante se réfère également à des décisions antérieures de l’OHMI concernant la comparaison de marques figuratives, ainsi qu’à une décision de la chambre de recours dans l’affaire R 464/2003‑1, concernant deux différentes représentations graphiques stylisées de la lettre « t ».

22      En outre, elle indique avoir obtenu l’enregistrement d’un signe, identique à la marque demandée, aux États-Unis. Le fait que l’examinateur américain n’a pas relevé d’office l’existence de marques antérieures similaires signifierait qu’il a estimé que les marques en cause étaient différentes.

23      Enfin, la requérante soutient que le degré d’attention du consommateur concerné est assez élevé. Le consommateur de certains des produits relevant de la classe 18, notamment ceux destinés à l’équitation, serait très attentif. En effet, les cuirs et les peaux d’animaux non finis seraient destinés à des experts du secteur. D’autres produits, comme les « valises, parapluies, parasols et cannes », ne requerraient pas un degré d’attention élevé.

24      L’OHMI et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

–       Appréciation du Tribunal

25      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée.

26      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion, dans le cadre de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, en tenant compte de tous les facteurs caractérisant le cas d’espèce, notamment de l’interdépendance entre la similitude des signes et celle des produits ou des services désignés [arrêts de la Cour du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec. p. I‑3819, points 17 et 18, et du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 32].

27      Aux fins de cette appréciation globale, le consommateur moyen est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a cependant lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause et le fait que le consommateur n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image imparfaite de celles-ci qu’il a gardée en mémoire [arrêt Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 26, et arrêt du Tribunal du 30 juin 2004, BMI Bertollo/OHMI – Diesel (DIESELIT), T‑186/02, Rec. p. II‑1887, point 38].

28      En l’espèce, il ressort du point 8 de la décision attaquée que la chambre de recours a pris sa décision sur la base de la marque antérieure n° 1834738, sans qu’il ait été procédé à l’appréciation du risque de confusion avec les autres marques antérieures invoquées. Dès lors, dans le cadre du présent recours, il y a lieu de vérifier l’appréciation opérée par la chambre de recours du risque de confusion entre la marque demandée et la marque antérieure n° 1834738.

29      Les marques en cause concernent des produits identiques relevant de la classe 18, à savoir les « cuir et imitations du cuir, produits en ces matières non compris dans d’autres classes, peaux d’animaux, malles et valises, parapluies, parasols et cannes, fouets et sellerie ».

30      En ce qui concerne le degré d’attention du consommateur de ces produits, il convient de relever que, pris globalement, ils s’adressent au consommateur moyen [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 23 février 2006, Ponte Finanziaria/OHMI – Marine Enterprise Projects (BAINBRIDGE), T‑194/03, Rec. p. II‑445, point 78].

31      Cette appréciation, relative aux catégories de produits dont l’enregistrement a été demandé prises dans leur ensemble, ne saurait être remise en cause par l’argument de la requérante, selon lequel ces catégories, décrites en termes très larges, incluent éventuellement certains produits individuels susceptibles de susciter un degré d’attention élevé.

32      La requérante conteste la comparaison des marques en cause opérée par la chambre de recours et, en outre, soutient que celle-ci a omis de prendre en compte le caractère distinctif prétendument faible de la marque antérieure.

33      En ce qui concerne la comparaison visuelle des signes en cause, la chambre de recours a constaté, à juste titre, que ceux-ci représentaient le même « motif figuratif », à savoir un arc ou un pont stylisé à deux jambes biseautées, l’une plus longue que l’autre, et que les différences résultant de leur présentation n’étaient pas susceptibles de l’emporter sur la similitude tirée de ce motif commun (points 10 et 11 de la décision attaquée).

34      Cette appréciation n’est pas remise en cause par les arguments de la requérante relatifs à la forme du signe demandé. À cet égard, il convient de tenir compte du fait que le consommateur moyen n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image non parfaite qu’il en a gardée en mémoire (arrêt Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 26). Or, le fait que le signe demandé est incliné vers la droite ne constitue pas un élément que le consommateur moyen peut garder en mémoire pour distinguer les signes en cause.

35      En outre, la conclusion de la chambre de recours quant à la similitude visuelle des signes en cause n’est pas infirmée par l’argument de la requérante tiré du fait que le signe demandé représente une figure avec surface pleine. En effet, le consommateur moyen pourrait raisonnablement penser qu’il s’agit de la version en couleur de la marque antérieure [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec. p. II‑5409, point 104]. D’ailleurs, la couleur du signe demandé n’est ni inhabituelle ni frappante et n’est donc pas de nature à modifier significativement son impression globale.

36      En ce qui concerne la comparaison conceptuelle, la chambre de recours a constaté que les deux signes en cause faisaient penser à un arc ou à un pont à deux jambes et étaient, à cet égard, similaires (point 12 de la décision attaquée).

37      À cet égard, il convient de constater que les signes en cause représentent des motifs similaires dessinés dans des proportions comparables, et que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en les décrivant comme un arc ou un pont. Au vu de cette similitude, il ne saurait être considéré que le consommateur attribue aux signes en cause des significations différentes.

38      Dans ces conditions, il y a lieu de relever que, indépendamment de la question de savoir si les signes en cause sont dotés ou non d’une signification précise, ils ne présentent pas, en tout état de cause, de différence conceptuelle de nature à neutraliser leur similitude visuelle.

39      Cette considération ne saurait être infirmée par les arguments de la requérante tirés de la description des éléments figuratifs des marques en cause dans le cadre de la procédure d’enregistrement ainsi que de leur classement dans le cadre de la classification de Vienne, ceux-ci étant effectués à des fins exclusivement administratives.

40      En outre, l’appréciation de la chambre de recours quant à la similitude des marques en cause ne saurait être infirmée par les arguments de la requérante tirés des décisions antérieures de l’OHMI et de l’enregistrement de sa marque aux États-Unis.

41      En effet, d’une part, concernant ces premières, il convient d’observer que la légalité de la décision attaquée doit être appréciée uniquement sur la base du règlement n° 40/94, tel qu’interprété par le juge communautaire, et non sur la base d’une pratique décisionnelle de l’OHMI antérieure à celle-ci [arrêts du Tribunal du 27 février 2002, Streamserve/OHMI (STREAMSERVE), T‑106/00, Rec. p. II‑723, point 66, et du 13 avril 2005, Duarte y Beltrán/OHMI – Mirato (INTEA), T‑353/02, non publié au Recueil, point 36].

42      En outre, si les motifs de fait ou de droit figurant dans une décision antérieure peuvent constituer des arguments à l’appui d’un moyen tiré de la violation d’une disposition du règlement n° 40/94 [arrêts du Tribunal du 20 novembre 2002, Bosch/OHMI (Kit Pro et Kit Super Pro), T‑79/01 et T‑86/01, Rec. p. II‑4881, point 33, et INTEA, précité, point 36], en l’espèce, la requérante n’a pas démontré que les situations de fait et de droit à l’origine des décisions invoquées étaient comparables à celle de l’espèce. En particulier, la décision de la première chambre de recours dans l’affaire R 464/2003‑1, invoquée par la requérante, concerne des marques représentant la lettre « t » stylisée, qui ne sont nullement comparables aux signes en cause.

43      D’autre part, la référence à la décision d’enregistrement d’un signe identique à la marque demandée aux États-Unis est inopérante, le régime communautaire des marques étant un système autonome dont l’application est indépendante de tout système national [arrêt du Tribunal du 5 décembre 2000, Messe München/OHMI (electronica), T‑32/00, Rec. p. II‑3829, point 47], et notamment des enregistrements effectués dans des pays tiers [arrêt du Tribunal du 8 juin 2005, Wilfer/OHMI (ROCKBASS), T‑315/03, Rec. p. II‑1981, point 35]. En tout état de cause, la requérante ne présente aucun argument pertinent tiré de cette décision d’enregistrement, puisqu’elle s’appuie sur le seul fait que l’examinateur n’a pas relevé d’office l’existence de la marque antérieure présentant une similitude avec la marque demandée.

44      Il s’ensuit que les arguments de la requérante ne permettent pas de remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours quant à la similitude des marques concernées.

45      Ensuite, concernant le caractère distinctif de la marque antérieure, il convient de rappeler qu’il s’agit d’un élément qui doit être pris en compte pour apprécier l’existence d’un risque de confusion (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, point 24).

46      En l’espèce, il ressort du point 13 de la décision attaquée que la chambre de recours a rejeté les arguments de la requérante, selon lesquels la marque antérieure représente une simple forme géométrique, courante dans le secteur et présente dans les marques enregistrées par les autres fabricants.

47      Dans le cadre du présent recours, la requérante réitère essentiellement les mêmes arguments, arguant que la marque antérieure a un caractère faiblement distinctif.

48      À cet égard, premièrement, il convient de considérer que la chambre de recours a constaté, à juste titre, que les signes en cause ne pouvaient pas être décrits comme représentant des formes géométriques dotées d’un caractère distinctif faible. En effet, la figure stylisée représentée par la marque antérieure se distingue clairement des formes géométriques simples. Deuxièmement, il convient de constater que les marques enregistrées par les autres fabricants, invoquées aux points 31 à 34 de la requête, ne comprennent pas d’élément figuratif comparable à celui de la marque antérieure, à l’exclusion de la marque italienne appartenant à Wilson Sporting Goods Co., qui toutefois se distingue par la présence de la lettre « w » stylisée au centre du dessin.

49      Dès lors, il y a lieu de considérer que la requérante n’a pas établi que la marque antérieure est dotée d’un caractère distinctif faible.

50      En tout état de cause, il convient de rappeler que, si le caractère distinctif de la marque antérieure doit être pris en compte pour apprécier le risque de confusion, il n’est qu’un élément parmi d’autres intervenant lors de cette appréciation. Ainsi, même en présence d’une marque antérieure à caractère distinctif faible, il peut exister un risque de confusion, notamment, compte tenu du degré de similitude des signes et des produits [arrêt du Tribunal du 13 décembre 2007, Xentral/OHMI – Pages jaunes (PAGESJAUNES.COM), T‑134/06, non encore publié au Recueil, point 70].

51      En particulier, la thèse selon laquelle un risque de confusion n’existe qu’en cas de reproduction complète de la marque antérieure dotée d’un faible caractère distinctif, est contredite par la nature même de l’appréciation globale exigée par l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 15 mars 2007, T.I.M.E. ART/Devinlec et OHMI, C‑171/06 P, non publié au Recueil, point 41).

52      Dès lors, même à supposer que la marque antérieure ne soit pas particulièrement distinctive, cette circonstance ne serait pas, compte tenu de l’identité des produits en cause et de la similitude entre les signes concernés, de nature à infirmer l’appréciation globale du risque de confusion opérée par la chambre de recours en l’espèce.

53      Au vu de ce qui précède, il convient de considérer que la chambre de recours a conclu, à bon droit, à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en cause.

54      Dès lors, il convient de rejeter le premier moyen.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 73 du règlement nº 40/94

–       Arguments des parties

55      La requérante soutient que la chambre de recours a violé l’article 73 du règlement n° 40/94 du fait qu’elle n’a pas pris position sur le caractère distinctif de la marque antérieure.

56      L’OHMI et l’intervenante contestent l’argumentation de la requérante.

–       Appréciation du Tribunal

57      En vertu de l’article 73 du règlement n° 40/94, les décisions de l’OHMI doivent être motivées. L’obligation de motivation ainsi consacrée a la même portée que celle découlant de l’article 253 CE (arrêt de la Cour du 21 octobre 2004, KWS Saat/OHMI, C‑447/02 P, Rec. p. I‑10107, point 64).

58      Il est de jurisprudence constante que la motivation exigée par l’article 253 CE doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’auteur de l’acte. Cette obligation a pour double objectif de permettre, d’une part, aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et, d’autre part, au juge communautaire d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision (arrêt KWS Saat/OHMI, précité, point 65).

59      En l’espèce, les motifs de la décision attaquée font apparaître de façon claire le raisonnement suivi quant à l’appréciation du risque de confusion. En particulier, contrairement à ce que soutient la requérante, le point 13 de la décision attaquée expose clairement le raisonnement de la chambre de recours ayant conduit au rejet de la thèse de la requérante quant au caractère distinctif faible de la marque antérieure. La requérante n’est donc pas fondée à soutenir que la chambre de recours n’a pas pris position sur cet élément.

60      Par conséquent, le second moyen doit être rejeté. Il y a lieu, dès lors, de rejeter le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

61      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Calzaturificio Frau SpA est condamnée aux dépens.

Meij

Wiszniewska‑Białecka

Vadapalas

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 5 novembre 2008.

Signatures


* Langue de procédure : l’italien.