Language of document : ECLI:EU:T:2006:334

ARRÊT DU TRIBUNAL (juge unique)

25 octobre 2006 (*)

« Fonction publique – Exercice d’une activité extérieure – Participation à des conférences en qualité d’orateur – Accord – Demande d’octroi d’un congé spécial au titre de la formation – Refus »

Dans l’affaire T‑281/04,

Paola Staboli, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles (Belgique), représentée par Me L. Vogel, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. G. Berscheid et Mme H. Tserepa-Lacombe, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation des décisions de la Commission des 12 mars et 6 avril 2004 rejetant sa réclamation formée contre la décision du 9 mai 2003 en tant que l’institution a refusé de lui accorder un congé spécial au titre de la formation pour l’exercice d’une activité extérieure, par ailleurs autorisée par la même décision, et, en tant que de besoin, l’annulation de la décision, susmentionnée, du 9 mai 2003,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (juge unique),

juge : M. H. Legal,

greffier : M. I. Natsinas, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 8 février 2006,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique du litige

1        L’article 12, troisième alinéa, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, dans sa version applicable aux faits de l’espèce (ci-après le « statut »), dispose :

« Si le fonctionnaire se propose d’exercer une activité extérieure, rémunérée ou non, ou de remplir un mandat en dehors des Communautés, il doit en demander l’autorisation à l’autorité investie du pouvoir de nomination. Cette autorisation est refusée si l’activité ou le mandat sont de nature à nuire à l’indépendance du fonctionnaire ou à porter préjudice à l’activité des Communautés. »

2        Aux termes de l’article 24, troisième alinéa, du statut :

« [Les Communautés] facilitent le perfectionnement professionnel du fonctionnaire dans la mesure où celui-ci est compatible avec les exigences du bon fonctionnement des services et conforme à leurs propres intérêts. »

3        L’article 57, deuxième alinéa, du statut, dispose :

« En dehors de ce congé [annuel], [le fonctionnaire] peut se voir accorder, à titre exceptionnel, sur sa demande, un congé spécial. Les modalités d’octroi de ces congés sont fixées à l’annexe V. »

4        L’annexe V, article 6, du statut dispose :

« En dehors du congé annuel, le fonctionnaire peut se voir accorder, sur sa demande, un congé spécial. En particulier, les cas prévus ci-après ouvrent droit à ce congé dans les limites suivantes :

[…]

En outre, l’institution peut accorder un congé spécial en cas de perfectionnement professionnel, dans la limite prévue au programme de perfectionnement professionnel fixé par l’institution en application de l’article 24, troisième alinéa, du statut. »

5        Enfin, aux termes de l’article 8 de la décision de la Commission du 14 mai 1992 relative aux critères applicables aux demandes d’autorisation d’activités extérieures des fonctionnaires et autres agents :

« Dans le cas d’activités non rémunérées présentant un intérêt pour les Communautés, l’ [autorité investie du pouvoir de nomination] peut accorder un congé spécial, à raison de la moitié des jours ouvrables considérés et jusqu’à un maximum de douze jours par an. »

 Antécédents du litige

6        En application de l’article 12, troisième alinéa, du statut, Mme Staboli, fonctionnaire de grade LA 4 à la direction générale de la traduction, a rempli, le 16 avril 2003, le formulaire de demande d’« autorisation pour l’exercice d’une activité extérieure » en vue de participer, le 26 juin 2003 et un jour entre le 2 et le 5 juillet 2003, à des conférences qui devaient se tenir aux universités de Melbourne et de Perth, en Australie, et de bénéficier, à ce titre, d’un congé spécial d’une durée de neuf jours pour une activité de formation mentionnée sur sa « carte de formation » pour l’année 2003.

7        Le chef d’unité de la requérante a donné, le 23 avril 2004, un avis favorable à la demande d’autorisation concernant la participation et l’intervention de Mme Staboli à l’activité en cause, précisant que l’objet de l’intervention, relatif à Dante et au Moyen Âge, avait un caractère strictement personnel et promouvait une image positive du personnel des institutions, que cette intervention ne pouvait affecter les intérêts et la position des Communautés mais qu’elle était dépourvue d’intérêt pour celles-ci. Concernant l’octroi d’un congé spécial, le chef d’unité faisait observer que la participation de Mme Staboli à des conférences sur des sujets linguistiques et littéraires avait un caractère récurrent et qu’il conviendrait d’examiner, de façon globale, si une telle participation pouvait être reconnue comme activité de formation et bénéficier, de ce fait, de jours de congé spécial.

8        Le directeur de la direction générale de la traduction a donné, le 2 mai 2003, un avis favorable s’agissant de la participation et de l’intervention de Mme Staboli aux conférences, compte tenu du caractère personnel et du sujet littéraire de l’intervention. Il a, en revanche, émis un avis défavorable à l’octroi d’un congé spécial à ce titre au motif que l’activité concernée n’avait aucune relation avec le travail des fonctionnaires de la Commission et visait exclusivement à l’épanouissement personnel de l’intéressée. Le directeur ajoutait, s’agissant de l’inclusion de telles activités dans la carte de formation et de l’octroi de congés spéciaux à cet effet, que Mme Staboli devrait revoir sa carte de formation avec son supérieur hiérarchique.

9        Le directeur général de la direction générale de la traduction a donné, le 9 mai 2003, un avis favorable à la demande d’autorisation pour l’exercice de l’activité extérieure en cause et rejeté la demande d’octroi d’un congé spécial à ce titre.

10      La requérante a introduit, le 8 août 2003, conformément à l’article 90, paragraphe 2, du statut, une réclamation, enregistrée le 29 août suivant, contre la décision refusant de « considérer comme action de formation [s]a participation en tant qu’orateur et auditeur à des conférences concernant la langue et la littérature italiennes ».

11      Cette réclamation a été rejetée par une décision du directeur général de la direction générale du personnel et de l’administration de la Commission, en date du 12 mars 2004, à laquelle a été substituée une décision identique, en date du 6 avril 2004, émanant de la même autorité, et corrigeant certaines erreurs factuelles contenues dans la précédente décision, relatives à l’identification exacte de la demande d’autorisation pour l’exercice d’une activité extérieure.

12      Dans la décision portant rejet de la réclamation, le directeur, après avoir cité les dispositions de l’article 12 du statut, indique que la décision de la Commission du 14 mai 1992, relative aux critères applicables aux demandes d’autorisation d’activités extérieures des fonctionnaires et autres agents, qui a été rappelée dans les Informations administratives nº 932 du 10 avril 1996, précise, en son article 2, que l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») tient compte, pour apprécier les demandes en question, notamment, « de l’intérêt que l’activité présente pour les Communautés » et prévoit, à l’article 8, la possibilité pour l’AIPN d’accorder un congé spécial « dans le cas d’activités non rémunérées présentant un intérêt pour les Communautés ».

13      Dans la décision rejetant la réclamation, il est indiqué que, conformément à l’article 8 de la décision du 14 mai 1992, la décision du 9 mai 2003 refusant l’octroi d’un congé spécial n’a fait que prendre acte du fait qu’aucun intérêt de service ne justifiait l’octroi d’un tel congé s’agissant, en l’espèce, de la participation de Mme Staboli à deux colloques dans le domaine de la langue et de la culture italiennes prévus aux mois de juin et de juillet 2003 et se déroulant aux universités de Melbourne et de Perth. Quant à la reconnaissance éventuelle de l’activité en cause comme faisant partie de la formation de la requérante, le directeur général fait observer que l’intéressée n’a pas présenté de demande de formation en ce sens dans les conditions prévues par les dispositions générales d’exécution de l’article 24, troisième alinéa, du statut relatif au perfectionnement professionnel du personnel de la Commission.

 Procédure et conclusions des parties

14      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 9 juillet 2004, la requérante a introduit le présent recours.

15      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les décisions de la Commission des 12 mars et 6 avril 2004 rejetant sa réclamation dirigée contre la décision du 9 mai 2003 refusant de lui accorder un congé spécial, au titre de la formation, pour l’exercice d’une activité extérieure ;

–        annuler, en tant que de besoin, la décision du 9 mai 2003 refusant de lui accorder un congé spécial, au titre de la formation, pour l’exercice d’une activité extérieure ;

–        condamner la Commission à lui verser une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

–        condamner la Commission à l’intégralité des dépens prévus par le règlement de procédure du Tribunal.

16      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours en annulation comme étant non fondé et, de plus, irrecevable en tant qu’il concerne la décision du 12 mars 2004 ;

–        rejeter le recours en indemnisation comme étant irrecevable et, en tout cas, non fondé ;

–        statuer sur les dépens comme de droit.

 En droit

 Sur la recevabilité et la portée des conclusions en annulation

 Arguments des parties

17      La Commission fait valoir, à titre liminaire, que le recours est irrecevable en tant qu’il conclut à l’annulation de la décision de rejet de la réclamation du 12 mars 2004, car la décision du 6 avril 2004, qui a corrigé des erreurs factuelles figurant dans la précédente, s’est substituée à celle-ci.

18      Le conseil de la requérante a indiqué à l’audience avoir choisi d’attaquer les deux décisions afin de ne pas risquer de se heurter à une forclusion au regard des délais de recours fixés aux articles 90 et 91 du statut.

 Appréciation du Tribunal

19      Premièrement, il convient de rappeler que la requérante demande l’annulation de deux décisions de la Commission, en date des 12 mars et 6 avril 2004, rejetant sa réclamation dirigée contre la décision du 9 mai 2003. Comme indiqué au point 11 ci-dessus, la décision du 12 mars 2004, qui comportait des erreurs factuelles concernant les dates exactes des demandes d’autorisation pour l’exercice d’une activité extérieure, présentées par Mme Staboli, a été remplacée par la décision du 6 avril 2004. Cette seconde décision, identique à la précédente à l’exception des corrections apportées à des erreurs que l’intéressée avait signalées à l’AIPN, a été adressée à la requérante accompagnée d’une note de transmission, en date du 7 avril 2004, signée du directeur de la direction B « Statut : politique, gestion et conseil » de la direction générale « Personnel et administration », qui indique explicitement qu’elle « se substitue à celle que Monsieur Horst Reichenbach, directeur général de [la direction générale de l’administration et du personnel], avait adoptée, en sa qualité d’AIPN, le 12 mars dernier » et mentionne les deux corrections apportées.

20      La décision du 12 mars 2004, retirée par la décision du 6 avril 2004 qui s’y est substituée, n’existait donc plus lorsque la requête a été introduite, le 9 juillet 2004. Cette première décision, dont le seul effet juridique, indépendamment du refus de reconsidérer la non-prise en compte de l’activité extérieure en cause comme une action de formation, était d’ouvrir le délai de recours contentieux de trois mois, conformément à l’article 91, paragraphe 3, du statut, avait, en l’espèce, rouvert ce délai, car une décision implicite de rejet de la réclamation de la requérante, enregistrée le 29 août 2003, était née, le 29 décembre 2003, du silence gardé par l’administration à l’expiration du délai de quatre mois imparti à celle-ci, selon l’article 90, paragraphe 2, deuxième alinéa, du statut, pour prendre une décision sur une réclamation.

21      Or, la décision du 6 avril 2004 a repris tous les effets de la décision du 12 mars 2004 à laquelle elle s’est substituée, notamment celui de prolonger le délai de recours prévu par l’article 91, paragraphe 3, précité, du statut.

22      Il résulte de ce qui précède que les conclusions tendant à l’annulation de la décision du 12 mars 2004 sont dépourvues d’objet. En tout état de cause, il résulte des dispositions combinées de l’article 91, paragraphe 3, du statut et de l’article 101 du règlement de procédure que les conclusions dirigées contre la décision du 12 mars 2004, notifiée le 15 mars, contenues dans la requête introduite le 9 juillet 2004, étaient tardives. Par conséquent, les conclusions tendant à l’annulation de la décision du 12 mars 2004 sont irrecevables.

23      Deuxièmement, il y a lieu de préciser la portée des conclusions en annulation de la requérante, dans la mesure où celle-ci demande formellement l’annulation du rejet de sa réclamation introduite « contre une décision du 9 mai 2003 qui refusait une demande de congé de formation […] en vue de participer à des conférences données à Melbourne et Perth, en Australie, entre le 26 juin et le 5 juillet 2003 ».

24      Or, la décision du 9 mai 2003 comporte deux volets : d’une part, une autorisation d’exercer une activité extérieure accordée sur demande de Mme Staboli et, d’autre part, un refus de lui accorder le bénéfice d’un congé de formation pour l’exercice de cette activité comme l’intéressée l’avait demandé. Il ressort clairement des écrits des parties et des débats oraux que le litige ne porte que sur le second volet de cette décision. La requête doit par conséquent être comprise comme tendant à l’annulation de la décision par laquelle la Commission a rejeté la réclamation de Mme Staboli dirigée contre la décision du 9 mai 2003, en tant que cette décision a refusé de lui accorder un congé spécial, au titre de la formation, pour l’exercice d’une activité extérieure.

25      Troisièmement, s’agissant du deuxième chef des conclusions de la requérante par lequel celle-ci demande l’annulation « en tant que de besoin », de la décision du 9 mai 2003 refusant de lui accorder le bénéfice d’un congé de formation pour l’exercice de l’activité en cause, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie, il résulte des articles 90 et 91 du statut que le recours d’un fonctionnaire dirigé contre une décision de l’AIPN ou contre l’abstention de cette autorité de prendre une mesure imposée par le statut n’est recevable que si l’intéressé a préalablement saisi l’AIPN d’une réclamation et si celle-ci a, au moins partiellement, fait l’objet d’un rejet explicite ou implicite.

26      La réclamation administrative et son rejet, explicite ou implicite, font ainsi partie intégrante d’une procédure complexe et ne constituent qu’une condition préalable à la saisine du juge communautaire. Dans ces conditions, le recours, même formellement dirigé contre le rejet de la réclamation, a pour effet de saisir le juge de l’acte faisant grief contre lequel la réclamation a été présentée (arrêt de la Cour du 17 janvier 1989, Vainker/Parlement, 293/87, Rec. p. 23, points 7 et 8), sauf dans l’hypothèse où le rejet de la réclamation a une portée différente de celle de l’acte contre lequel cette réclamation a été formée.

27      Le présent recours doit par conséquent être considéré comme étant dirigé contre la décision initiale faisant grief. En effet, si, en l’espèce, la décision du 6 avril 2004 rejetant la réclamation de Mme Staboli comporte une motivation en droit et en fait plus circonstanciée que les indications portées sur le formulaire qui contient la décision du 9 mai 2003, la seconde décision n’en a pas moins la même portée que la première.

28      Étant donné que, dans le système du statut, le fonctionnaire doit présenter une réclamation contre la décision qu’il conteste et se pourvoir devant le juge communautaire contre la décision qui rejette sa réclamation, la Cour a jugé que le recours est recevable, qu’il soit dirigé contre la seule décision initialement contestée, contre la décision portant rejet de la réclamation ou contre ces deux décisions conjointement, dans la mesure où la réclamation et le pourvoi ont été formés dans les délais prévus par les articles 90 et 91 du statut (arrêt de la Cour du 26 janvier 1989, Koutchoumoff/Commission, 224/87, Rec. p. 99, point 7).

29      Par conséquent, les conclusions tendant à l’annulation, d’une part, de la décision du 9 mai 2003, en tant qu’elle a refusé d’accorder à Mme Staboli le bénéfice d’un congé de formation pour l’exercice de l’activité extérieure en cause et, d’autre part, de la décision du 6 avril 2004 rejetant sa réclamation dirigée contre la précédente décision, sont recevables.

 Sur la demande en annulation

 Arguments des parties

30      Premièrement, la requérante soutient que la Commission a violé les dispositions applicables relatives à la formation des fonctionnaires des Communautés. Le refus opposé par la Commission méconnaîtrait l’article 24, troisième alinéa, du statut, qui prévoit que les Communautés facilitent le perfectionnement professionnel du fonctionnaire. Il violerait également les articles 1er, 2 et 3 de la décision de la Commission du 7 mai 2002 relative à la formation du personnel, car cette décision retiendrait, comme objectif de la formation permanente du personnel, le souci d’assurer l’épanouissement personnel des intéressés et celui de participer au rayonnement et à l’image d’excellence de la fonction publique européenne. Il méconnaîtrait, enfin, la décision par laquelle l’AIPN aurait approuvé la carte de formation de Mme Staboli pour l’année 2003 sur laquelle sa participation aux conférences en cause aurait été explicitement mentionnée. En outre, la requérante estime qu’il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir introduit une demande de formation dans les conditions prescrites dès lors que la Commission refusait de considérer l’activité concernée comme relevant de la formation professionnelle.

31      Deuxièmement, la requérante fait valoir que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en refusant de reconnaître que sa participation aux conférences en cause relevait de sa formation continue, car le thème abordé, relatif à la littérature du Moyen Âge et, plus particulièrement, à l’œuvre de Dante, présenterait un lien direct avec ses activités au sein du service de la traduction de la Commission, lui permettant d’améliorer sa connaissance de la langue italienne.

32      Troisièmement, la requérante soutient que la Commission a violé le principe de non-discrimination, car d’autres fonctionnaires seraient régulièrement autorisés à participer à des activités analogues au titre de la formation professionnelle et qu’elle-même a déjà participé, en qualité d’orateur ou d’auditeur, à des conférences semblables dans le cadre de la formation professionnelle.

33      La Commission fait valoir, premièrement, qu’elle n’a pas méconnu les dispositions applicables et que la demande présentée par la requérante concernait seulement l’autorisation d’exercer une activité extérieure, telle que prévue par l’article 12, troisième alinéa, du statut. Elle indique qu’elle a traité cette demande au regard de sa décision du 14 mai 1992, relative aux critères applicables aux demandes d’autorisation d’activités extérieures des fonctionnaires et autres agents, décision qui ne crée pas de droit subjectif à l’octroi d’un congé spécial, mais en prévoit seulement la possibilité lorsque l’activité en question présente un intérêt pour les Communautés. La Commission soutient que la participation aux conférences en cause ne peut être qualifiée d’action de formation, conformément aux modalités d’application des dispositions générales d’exécution de l’article 24, troisième alinéa, du statut relatif au perfectionnement professionnel du personnel de la Commission (publiées aux Informations administratives nº 839, du 18 mars 1994), et que la carte de formation ne constitue qu’un document indicatif et prévisionnel qui ne préjuge pas des décisions ultérieures.

34      Deuxièmement, la Commission soutient qu’elle n’a pas commis d’erreur, a fortiori d’erreur manifeste, dans l’appréciation d’une demande d’action de formation dont elle n’avait, au demeurant, pas été saisie. Elle fait valoir que l’activité extérieure en cause relevait du seul épanouissement personnel de Mme Staboli, docteur en philologie et ancien professeur d’université de langue italienne, et ne présentait pas d’intérêt pour les Communautés, faute de lien direct avec le travail de traducteur de l’intéressée, à la différence d’autres conférences auxquelles la requérante avait auparavant participé.

35      Troisièmement, la Commission soutient qu’elle n’a pas non plus méconnu le principe d’égalité de traitement et que la requérante ne fait pas état de la participation d’autres traducteurs à des manifestations comparables aux colloques ici en cause. Elle ajoute que des traducteurs, n’ayant pas la formation et le passé professionnel de la requérante, qui assisteraient comme auditeurs à de telles manifestations, ne seraient pas dans la même situation que la requérante.

 Appréciation du Tribunal

36      Le litige porte essentiellement sur la question de savoir si le congé spécial, dont le bénéfice a été refusé à la requérante, s’inscrivait dans le cadre d’une action de formation que la requérante souhaitait suivre ou dans celui d’une activité extérieure qu’elle désirait exercer.

37      Il est constant que, lorsque Mme Staboli a envisagé d’intervenir, comme orateur, à des conférences données aux universités de Melbourne et de Perth, elle n’a pas présenté de demande de participation à une action de formation professionnelle, mais a rempli un formulaire de demande d’autorisation pour l’exercice d’une activité extérieure, tout en sollicitant, sur le même formulaire, pour l’exercice de cette activité, un « congé spécial » de neuf jours dont l’intéressée justifiait le bénéfice par l’indication suivante : « [c]e qui est normal pour des activités de formation (voir ma carte de formation) ».

38      Il ressort du dossier que l’AIPN a examiné les deux volets de la demande de la requérante, à savoir une demande d’autorisation pour l’exercice d’une activité extérieure et une demande de congé spécial, que l’intéressée liait à sa formation, dans le cadre de la décision de la Commission du 14 mai 1992 relative aux critères applicables aux demandes d’autorisation d’activités extérieures des fonctionnaires et autres agents, dont l’article 8, cité au point 5 ci-dessus, prévoit la possibilité, pour l’AIPN, d’accorder un congé spécial, dans le cas d’activités non rémunérées présentant un intérêt pour les Communautés.

39      S’agissant du perfectionnement professionnel des fonctionnaires et des congés spéciaux susceptibles de leur être accordés à ce titre, il résulte de l’annexe V, article 6, deuxième alinéa, du statut, qu’un congé spécial peut être accordé en cas de perfectionnement professionnel dans la limite prévue au programme correspondant, fixé en application de l’article 24 du statut, lequel prévoit, en son troisième alinéa, que le perfectionnement professionnel du fonctionnaire doit être compatible avec les exigences de bon fonctionnement des services et conforme à leurs propres intérêts.

40      S’agissant de l’exercice, par un fonctionnaire, d’activités extérieures, l’article 8 de la décision de la Commission du 14 mai 1992 prévoit la possibilité pour l’AIPN d’accorder un congé spécial dans le cas d’activités extérieures non rémunérées présentant un intérêt pour les Communautés, à raison de la moitié des jours ouvrables consacrés à ces activités et sous un plafond de douze jours par an.

41      Compte tenu des modalités de prise en compte et des différents plafonds applicables, d’une part, aux activités de formation professionnelle et, d’autre part, aux autres activités présentant un intérêt pour les Communautés en vue de l’octroi d’un congé spécial, force est de constater qu’il s’agit de deux hypothèses distinctes qui ne se recouvrent pas, même si elles ont été pour partie confondues dans les réponses de l’AIPN.

42      Par conséquent, pour ouvrir droit à un congé spécial, l’activité extérieure au titre de laquelle la requérante demandait à bénéficier d’un tel congé devait nécessairement soit être utile à son perfectionnement professionnel, soit présenter, à un autre titre, un intérêt pour les Communautés.

43      Or, la Commission a refusé, par décision du 9 mai 2003, d’accorder le congé spécial litigieux, auquel elle a implicitement dénié le caractère d’une action de formation telle que la présentait la demande de l’intéressée, au motif, exposé dans l’avis du directeur de la direction générale de la traduction du 2 mai 2003, mentionné au point 8 ci-dessus, auquel renvoie la décision du 9 mai 2003, que « [c]ette participation active à un colloque n’a aucune relation avec le travail [effectué] par les fonctionnaires de la Commission […] », ajoutant, dans la décision du 6 avril 2004 rejetant la réclamation de Mme Staboli, que le « refus [d’]octroi d’un tel congé spécial ne fait que prendre acte du fait, qu’en l’espèce, aucun intérêt de service ne le justifiait ».

44      Il apparaît, ainsi, que la Commission a estimé que le congé spécial demandé par Mme Staboli n’était pas justifié par le perfectionnement professionnel de l’intéressée et que l’activité en vue de laquelle il était demandé ne présentait pas non plus d’intérêt pour les Communautés.

45      Il convient donc de déterminer si l’activité envisagée pouvait être qualifiée soit d’action de formation, comme le soutient la requérante, et, à ce titre, susceptible, le cas échéant, de permettre l’octroi d’un congé spécial, dans la mesure où l’action en cause serait compatible avec le bon fonctionnement du service, soit d’activité extérieure présentant un intérêt pour les Communautés pour l’exercice de laquelle le bénéfice d’un congé spécial pouvait également être envisagé.

46      À cet égard, ni le formulaire de demande d’autorisation d’exercice d’une activité extérieure rempli par l’intéressée, ni la carte de formation dont se prévaut la requérante, ni aucune autre pièce du dossier ne mentionnent le titre des conférences visées par cette demande pas plus que leur contenu exact, ni d’ailleurs celui des interventions de la requérante qui y auraient été prévues, le formulaire et la carte de formation se bornant à mentionner, de façon au demeurant sommaire, les dates et lieux desdites conférences. Seul l’avis du chef d’unité de l’intéressée, en date du 23 avril 2003, mentionné au point 7 ci-dessus, indique que l’intervention a pour objet « Dante et le Moyen Âge », la décision du 6 avril 2004, rejetant la réclamation de Mme Staboli se référant, pour sa part, à « deux colloques dans le domaine de la langue et de la culture italienne ». Aucun autre élément ne figure au dossier, lequel ne contient pas, en particulier, le programme des colloques en question. Interrogé à l’audience, le conseil de la requérante n’a pas été en mesure d’apporter plus de précision au Tribunal, en particulier sur l’objet linguistique, littéraire ou autre desdites conférences.

47      Force est de constater que la requérante, faute d’apporter la moindre précision sur l’activité extérieure en question, ne démontre pas le caractère allégué d’action de formation de celle-ci. Au demeurant, il ne peut être raisonnablement soutenu, à défaut d’autres précisions, que la présentation de conférences sur « Dante et le Moyen Âge », dont l’objet linguistique n’a, en outre, pas été établi, comporte un lien direct avec l’activité qu’exerce dans le service un fonctionnaire, comme la requérante, travaillant comme traducteur de langue italienne à la direction générale de la traduction de la Commission et dont il n’est pas contesté que l’activité consiste en la traduction de textes de caractère normatif et décisionnel, comportant souvent des annexes de caractère technique, ainsi que de divers documents administratifs. La participation auxdites conférences ne pouvait par conséquent ni être qualifiée d’action de formation au regard de l’article 24, troisième alinéa, du statut, précité, relatif au perfectionnement professionnel du fonctionnaire ni d’activité non rémunérée présentant un intérêt pour les Communautés au sens de l’article 8 de la décision de la Commission du 14 mai 1992.

48      Il résulte de ce qui précède que c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la Commission a refusé d’accorder le congé spécial demandé, en considérant que la participation aux conférences en cause ne présentait pas d’intérêt pour les Communautés. Il y a lieu de rappeler, à cet égard, que le bénéfice d’un tel congé en vue d’exercer une activité extérieure ne constitue pas, dans le contexte du statut, un droit subjectif de l’agent concerné mais représente seulement une possibilité pour l’AIPN à laquelle il revient d’apprécier si la demande est compatible avec le bon fonctionnement du service et justifiée au regard de l’intérêt des Communautés.

49      Les arguments développés par la requérante concernant, d’une part, une prétendue violation de la décision de la Commission du 7 mai 2002 relative à la formation du personnel, en particulier de ses articles 1er, 2 et 3, des lignes directrices pour la formation annexées à cette décision, en particulier de leur point 5.5, et de la carte de formation de l’intéressée, dans la mesure où l’un des objectifs de la formation serait l’épanouissement personnel des intéressés et où l’action en cause aurait été explicitement mentionnée sur sa carte de formation, et, d’autre part, la méconnaissance du principe de non-discrimination, n’affectent pas les conclusions qui précèdent.

50      Premièrement, si l’article 1er de la décision du 7 mai 2002, relatif aux principes directeurs de la formation, indique que celle-ci « sert à la fois les intérêts de la personne et ceux de l’institution » et si l’article 2 de cette décision, relatif aux objectifs de la formation, précise que, au niveau individuel, « la formation devrait […] contribuer à l’épanouissement […] de tout membre du personnel », cette disposition indique auparavant que « [l]’objectif fondamental de la formation du personnel au sein de la Commission sera d’étendre et d’améliorer les compétences de chacun afin que tout membre du personnel puisse contribuer de manière optimale à la réalisation des objectifs de l’institution », marquant ainsi la prééminence de l’intérêt des Communautés dans la mise en œuvre de la formation. Par ailleurs, la circonstance selon laquelle l’article 3 de la décision du 7 mai 2002, relatif au temps consacré à la formation sur les heures de travail, prévoit un objectif de dix jours de formation par membre du personnel et par an, est sans incidence sur la légalité du refus de congé spécial opposé par l’AIPN dès lors que l’activité au titre de laquelle ce congé était demandé ne présentait pas le caractère d’une action de formation.

51      Deuxièmement, les arguments de la requérante selon lesquels sa carte de formation pour l’exercice 2003 marquerait l’approbation donnée par l’AIPN aux formations visées par ce document, notamment, les conférences en vue desquelles l’intéressée a demandé un congé spécial, et aurait donc fondé son droit à se voir accorder ledit congé, ne sauraient être accueillis. En effet, il y a lieu de constater que ladite carte se borne à mentionner, sous une rubrique intitulée « Suggestion », la participation de Mme Staboli en qualité d’oratrice à des conférences universitaires ayant lieu, notamment, aux universités de Melbourne et de Perth, au mois de juin et de juillet, sans qu’aucune indication propre à faire apparaître le lien des interventions en cause avec le perfectionnement professionnel de l’intéressée soit mentionnée. Un tel document dont l’imprécision, quant au contenu et aux dates exactes des formations envisagées, ne permet pas d’apprécier leur conformité aux intérêts des Communautés et leur compatibilité avec le bon fonctionnement du service, conformément à l’article 24, troisième alinéa, du statut, ne saurait avoir qu’une valeur indicative. Il ne saurait, en tout état de cause, valoir autorisation de participation aux activités mentionnées.

52      Cette conclusion est corroborée par le fait que les modalités d’application des dispositions générales d’exécution du statut relatives au perfectionnement professionnel du personnel de la Commission, en date du 18 mars 1994, prévoient que les agents, avant de s’inscrire à l’action de formation envisagée, doivent remplir un formulaire intitulé « Demande de participation à une action de formation », accompagné, le cas échéant, de pièces justificatives telles que, s’agissant de formations externes, le programme de l’organisme extérieur. Il ressort également de ce formulaire que la décision d’autorisation concernant l’action de formation envisagée est prise par le service de la formation sur avis des supérieurs hiérarchiques du fonctionnaire. Ce n’est donc qu’au terme de cette procédure que l’AIPN décide d’autoriser ou non l’action de formation en cause.

53      Troisièmement, le point 5.5 des lignes directrices pour la formation, relatif au processus d’approbation des activités de formation, mentionné par le conseil de la requérante à l’audience, qui indique que « [c]haque activité de formation entreprise par un membre du personnel devra être approuvée par le supérieur hiérarchique et par le responsable de formation », confirme la nécessité d’une approbation de chaque action de formation par les autorités susmentionnées selon la procédure décrite au point précédent. La carte de formation de la requérante pour l’année 2003, laquelle au demeurant ne comporte pas ces approbations expresses, ne saurait, contrairement à ce qu’a soutenu la partie requérante à l’audience, valoir l’approbation visée au point 5.5, précité, des lignes directrices.

54      Quatrièmement, l’argument tiré de la violation alléguée du principe de non‑discrimination ne saurait être accueilli.

55      D’une part, à supposer que la requérante se soit vu accorder dans le passé des congés spéciaux pour exercer des activités extérieures, qui, par leur similitude avec celle ici en cause, n’auraient pas justifié de tels congés, la requérante ne saurait se prévaloir des illégalités qui auraient alors été commises à son profit (arrêt du Tribunal du 30 novembre 1994, Dornonville de la Cour/Commission, T‑498/93, RecFP p. I‑A‑257 et II‑813, point 58).

56      D’autre part, et à supposer que d’autres fonctionnaires aient été autorisés à participer à des conférences analogues à celles de l’espèce au titre de la formation, de surcroît en qualité de conférencier, ce dont la requérante ne fournit aucun exemple concret, l’intéressée ne saurait, en invoquant le principe d’égalité de traitement, se prévaloir d’une pratique contraire aux dispositions du statut, nul ne pouvant invoquer à son profit une illégalité commise en faveur d’autrui (arrêt du Tribunal du 14 mai 1991, Zoder/Parlement, T-30/90, Rec. p. II‑207, point 26).

57      Il résulte de ce qui précède que la requérante n’est pas fondée à demander l’annulation de la décision par laquelle la Commission a refusé de lui accorder un congé spécial en vue d’exercer des activités extérieures qui ne présentaient pas d’intérêt pour le service et s’avéraient sans lien avec sa formation professionnelle.

58      Les conclusions tendant à l’annulation de cette décision doivent, par conséquent, être rejetées.

 Sur la demande en indemnité

 Arguments des parties

59      La requérante fait valoir que les décisions attaquées l’ont contrainte à imputer la durée de sa participation aux conférences en question sur ses congés annuels et qu’elle a ainsi été privée, de manière illégitime, de neuf jours de congé. Elle demande en réparation de ce préjudice une somme qu’elle évalue, provisoirement, à 5 000 euros.

60      La Commission soutient que le rejet des conclusions en annulation doit entraîner celui des conclusions en indemnité en raison du lien étroit existant entre ces deux ordres de conclusions. À supposer que les premières conclusions soient accueillies, la défenderesse fait valoir que l’annulation constituerait une sanction suffisante et adéquate, l’institution étant alors tenue d’en tirer les conséquences et d’examiner si l’octroi de jours de congés ne serait pas la voie la plus appropriée. Elle soutient, en outre, que le préjudice n’est pas démontré et que le montant demandé est excessif.

 Appréciation du Tribunal

61      Il est de jurisprudence bien établie en matière de fonction publique que les conclusions tendant à la réparation d’un préjudice doivent être rejetées dans la mesure où elles présentent un lien étroit avec les conclusions en annulation qui ont elles-mêmes été rejetées soit comme irrecevables, soit comme non fondées (voir arrêt du Tribunal du 30 septembre 2003, Martínez Valls/Parlement, T‑214/02, RecFP p. I‑A‑229 et II‑1117, point 43, et la jurisprudence citée).

62      Le préjudice invoqué par la requérante est tiré de l’illégalité que la Commission aurait commise en refusant de considérer sa participation aux conférences en cause comme une action de formation et de lui accorder un congé spécial à ce titre. Les conclusions indemnitaires en vue d’obtenir la réparation du préjudice allégué présentent donc un lien étroit avec les conclusions en annulation, qui ont été rejetées, comme indiqué au point 57 ci-dessus. Elles doivent, par voie de conséquence du rejet desdites conclusions, être également rejetées.

 Sur les dépens

63      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois en vertu de l’article 88 du même règlement, les frais exposés par les institutions dans les recours des agents des Communautés restent à la charge de celles-ci. La requérante ayant succombé, il y a donc lieu de décider que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (juge unique)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Chaque partie supportera ses propres dépens.

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 25 octobre 2006.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       H. Legal


* Langue de procédure : le français.