Language of document : ECLI:EU:T:2015:511

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

15 juillet 2015 (*) (1)

« Concurrence – Ententes – Marché européen de l’acier de précontrainte – Fixation des prix, partage du marché et échange d’informations commerciales sensibles – Décision constatant une infraction à l’article 101 TFUE – Coopération durant la procédure administrative – Délai raisonnable »

Dans l’affaire T‑423/10,

Redaelli Tecna SpA, établie à Milan (Italie), représentée par Mes R. Zaccà, M. Todino, E. Cruellas Sada et S. Patuzzo, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée initialement par MM. B. Gencarelli, L. Prete et V. Bottka, puis par MM. Bottka, G. Conte et P. Rossi, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation et de réformation de la décision C (2010) 4387 final de la Commission, du 30 juin 2010, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/38344 – Acier de précontrainte), modifiée par la décision C (2010) 6676 final de la Commission, du 30 septembre 2010, et par la décision C (2011) 2269 final de la Commission, du 4 avril 2011,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. S. Frimodt Nielsen (rapporteur), président, F. Dehousse et A. M. Collins, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 9 juillet 2014,

rend le présent

Arrêt

 Objet du litige

1        Le présent recours est intenté à l’encontre de la décision C (2010) 4387 final de la Commission, du 30 juin 2010, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/38344 – Acier de précontrainte) (ci-après la « décision initiale »), sanctionnant une entente entre des fournisseurs d’acier de précontrainte (ci-après « APC ») qui ont pris part à des opérations de fixation de quotas, de partage de clientèle, de fixation des prix et d’échange d’informations commerciales sensibles portant sur le prix, le volume et les clients aux niveaux européen, régional et national.

2        La décision initiale a été adressée par la Commission européenne à:

–        ArcelorMittal SA,

–        ArcelorMittal Wire France SA,

–        ArcelorMittal Fontaine SA,

–        ArcelorMittal Verderio Srl,

–        Emesa-Trefilería, SA (ci-après « Emesa »),

–        Industrias Galycas, SA (ci-après « Galycas »),

–        ArcelorMittal España, SA,

–        Trenzas y Cables de Acero PSC, SL (ci-après « Tycsa »),

–        Trefilerías Quijano, SA (ci-après « TQ »),

–        Moreda-Riviere Trefilerías, SA (ci-après « MRT »),

–        Global Steel Wire SA (ci-après « GSW »),

–        Socitrel – Sociedade Industrial de Trefilaria, SA (ci-après),

–        Companhia Previdente – Sociedade de Controle de Participações Financeiras SA (ci-après « Companhia Previdente »),

–        voestalpine Austria Draht GmbH (ci-après « Austria Draht »),

–        voestalpine AG,

–        Fapricela Industria de Trefilaria SA (ci-après « Fapricela »),

–        Proderac – Productos Derivados del Acero SA (c (ci-après « Proderac »),

–        Westfälische Drahtindustrie GmbH (ci-après « WDI »),

–        Westfälische Drahtindustrie Verwaltungsgesellschaft mbH & Co. KG (ci‑après « WDV »),

–        Pampus Industriebeteiligungen GmbH & Co. KG (ci-après « Pampus »),

–        Nedri Spanstaal BV (ci-après « Nedri »),

–        Hit Groep BV,

–        DWK Drahtwerk Köln GmbH et Saarstahl AG (ci-après, prises ensemble, « DWK »),

–        Ovako Hjulsbro AB,

–        Ovako Dalwire Oy Ab,

–        Ovako Bright Bar AB,

–        Rautaruukki Oyj,

–        Italcables SpA (ci-après « ITC »),

–        Antonini SpA,

–        Redaelli Tecna SpA, la requérante,

–        CB Trafilati Acciai SpA (ci-après « CB »),

–        ITAS – Industria Trafileria Applicazioni Speciali SpA,

–        Siderurgica Latina Martin SpA (ci-après « SLM »),

–        Ori Martin SA,

–        Emme Holding SpA, anciennement, puis de nouveau dénommée Trafilerie Meridionali SpA, (ci-après « Trame »).

3        La décision initiale a été modifiée à deux reprises par la Commission.

4        Premièrement, la Commission a adopté, le 30 septembre 2010, la décision C (2010) 6676 final amendant la décision initiale (ci-après la « première décision modificative »). En substance, la première décision modificative a eu pour effet de diminuer le montant des amendes imposées aux sociétés suivantes : ArcelorMittal Verderio, ArcelorMittal Fontaine, ArcelorMittal Wire France, ArcelorMittal España, WDI et WDV.

5        La première décision modificative a été adressée à l’ensemble des destinataires de la décision initiale.

6        Deuxièmement, la Commission a adopté, le 4 avril 2011, la décision C (2011) 2269 final modifiant la décision initiale (ci-après la « seconde décision modificative »). En substance, la seconde décision modificative a, notamment, eu pour effet de diminuer le montant des amendes imposées aux sociétés suivantes : d’une part, ArcelorMittal, ArcelorMittal Verderio, ArcelorMittal Fontaine et ArcelorMittal Wire France, et d’autre part, SLM et Ori Martin. Seules ces sociétés étaient destinataires de la seconde décision modificative.

7        Le cas échéant à l’initiative du Tribunal, toutes les sociétés ayant introduit un recours contre la décision initiale ont reçu communication de la seconde décision modificative.

8        La requérante a été interrogée par le Tribunal sur les conséquences susceptibles d’être tirées de ces modifications de la décision initiale sur le contenu de son argumentation et a eu la possibilité d’adapter ses moyens et conclusions pour tenir compte de ces éventuelles conséquences.

9        Ainsi, la décision initiale, telle que modifiée par la première et la seconde décision modificatives, constitue, aux fins du présent recours, la « décision attaquée ».

10      Vingt-huit recours ont été introduits contre la décision initiale, la première décision modificative, la seconde décision modificative ou les lettres adressées par la Commission à la suite de demandes formées par certains des destinataires de la décision initiale visant à la réappréciation de leur capacité contributive (affaires T‑385/10, ArcelorMittal Wire France e.a./Commission, T‑388/10, Productos Derivados del Acero/Commission, T‑389/10, SLM/Commission, T‑391/10, Nedri Spanstaal/Commission, T‑393/10, Westfälische Drahtindustrie e.a./Commission, T‑398/10, Fapricela/Commission, T‑399/10, ArcelorMittal España/Commission, T‑406/10, Emesa-Trefilería et Industrias Galycas/Commission, T‑413/10, Socitrel/Commission, T‑414/10, Companhia Previdente/Commission, T‑418/10, voestalpine et voestalpine Wire Rod Austria/Commission, T‑419/10, Ori Martin/Commission, T‑422/10, Trafilerie Meridionali/Commission, T‑423/10, Redaelli Tecna/Commission, T‑426/10, Moreda-Riviere Trefilerías/Commission, T‑427/10, Trefilerías Quijano/Commission, T‑428/10, Trenzas y Cables de Acero/Commission, T‑429/10, Global Steel Wire/Commission, T‑436/10, Hit Groep/Commission, T‑575/10, Moreda-Riviere Trefilerías/Commission, T‑576/10, Trefilerías Quijano/Commission, T‑577/10, Trenzas y Cables de Acero/Commission, T‑578/10, Global Steel Wire/Commission, T‑438/12, Global Steel Wire/Commission, T‑439/12, Trefilerías Quijano/Commission, T‑440/12, Moreda-Riviere Trefilerías/Commission, T‑441/12, Trenzas y Cables de Acero/Commission et T‑409/13, Companhia Previdente et Socitrel/Commission).

 Antécédents du litige

A –  Secteur faisant l’objet de la procédure

1.     Produits

11      L’entente sanctionnée par la Commission concernait l’APC, qui désigne des câbles métalliques et des torons en fil-machine et, notamment, d’une part, l’acier pour béton prétensionné, ce dernier servant pour la réalisation de balcons, de pieux de fondation ou de conduits, et, d’autre part, l’acier pour béton postcontraint, ce dernier servant en architecture industrielle, en architecture souterraine ou pour la construction de ponts (décision attaquée, considérant 2).

12      La gamme de produits en APC comprend plusieurs sortes de câbles unifilaires (par exemple, des câbles lisses, brillants ou galvanisés, à empreinte, nervurés) ainsi que plusieurs sortes de torons (par exemple, brillants, à empreinte, revêtus de polyéthylène ou métalliques). Les torons en APC se composent de trois ou sept fils. L’APC se vend en plusieurs diamètres. Les torons spéciaux, c’est-à-dire les torons galvanisés ou gainés – graissés ou cirés –, et les haubans, c’est-à-dire les torons galvanisés enduits et les câbles galvanisés utilisés dans la construction des ponts, n’ont toutefois pas été pris en considération par la Commission (décision attaquée, considérants 3 et 4).

13      Il est également indiqué dans la décision attaquée que, dans de nombreux pays, un agrément technique délivré par les autorités nationales est requis. Les procédures de certification nécessitent environ six mois (décision attaquée, considérant 5).

2.     Structure de l’offre

14      Pris dans leur ensemble et selon la décision attaquée, les membres de l’entente contrôlaient environ 80 % des ventes au sein de l’Espace économique européen (EEE). Dans la plupart des pays, plusieurs des plus grands producteurs étaient présents à côté de quelques producteurs locaux. La plupart de ces plus grands producteurs faisaient partie de groupes métallurgiques produisant également du fil-machine, une matière première de l’APC qui en constitue le principal élément de coût. Si les entreprises non intégrées étaient obligées d’acheter leurs propres matières premières sur le marché, les entreprises intégrées comptaient généralement sur des approvisionnements existant au sein de leur groupe. Durant toute la période de l’entente constatée dans la décision attaquée, l’industrie a déclaré des surcapacités substantielles et durables d’APC (décision attaquée, considérants 98 et 99).

15      En 2001, la valeur des ventes d’APC au sein de l’EEE s’est élevée à quelque 365 millions d’euros pour un volume total approchant les 600 000 tonnes au cours de cette même année. Ces ventes portaient, pour 20 à 25 %, sur du fil d’APC et, pour 75 à 80 %, sur du toron d’APC, ces moyennes présentant quelques différences selon chaque pays. L’Italie était le pays où la consommation d’APC était la plus importante (environ 28 % des ventes d’APC au sein de l’EEE). D’autres grands pays consommateurs étaient l’Espagne (16 %) ainsi que les Pays-Bas, la France, l’Allemagne et le Portugal (8 à 10 % chacun) (décision attaquée, considérant 100).

3.     Structure de la demande

16      Selon la décision attaquée, la structure de la demande en APC était très hétérogène. Les fabricants de matériaux de construction préfabriqués et les entreprises d’ingénierie spécialisées utilisaient de l’APC, par exemple dans des constructions visant à stabiliser les bâtiments ou les ponts. La clientèle se composait d’un très petit nombre de grands clients – par exemple, Addtek International Oy AB, qui représentait entre 5 et 10 % de la consommation en APC au sein de l’Union européenne – et d’un grand nombre de plus petits clients (décision attaquée, considérants 101 et 102).

17      Les habitudes commerciales variaient d’un État membre à l’autre. Les producteurs d’APC et leurs clients concluaient souvent des contrats-cadres de six ou douze mois. Dès lors, en fonction de la demande, les clients commandaient des tonnages s’inscrivant dans la plage du volume convenu au prix convenu. Les contrats étaient régulièrement prolongés à la suite d’autres négociations (décision attaquée, considérant 103).

4.     Échanges au sein de l’Union et de l’EEE

18      Selon ce qui est rapporté dans la décision attaquée, les volumes de ventes d’APC au cours de la période concernée par l’entente montrent que les échanges entre les États membres de l’Union étaient intensifs. De l’APC a été produit et commercialisé dans l’ensemble de l’EEE (décision attaquée, considérant 104).

B –  Redaelli

19      Redaelli Tecnasud SpA est une entreprise commune créée en 1979 entre la société qui était à l’époque la société de portefeuille du groupe Redaelli, Giuseppe & Fratello Redaelli SpA, et INSUD SpA, Iniziative per il Sud, par la suite Sviluppo Italia. Enregistrée à Caivano, en Italie, elle était active dans le domaine de la production et de la vente de torons à trois fils et à sept fils ainsi que d’autres types d’acier.

20      Du 20 décembre 1985 au 31 décembre 2003, Redaelli Tecnasud était contrôlée à 100 % par Redaelli Tecna, société enregistrée à Cologno Monzese, en Italie. Redaelli Tecna avait été fondée le 18 septembre 1981 pour être la nouvelle société de portefeuille du groupe à la suite de la crise financière qu’avait connue la précédente société de portefeuille. Le 19 janvier 1982, elle a repris la participation de Giuseppe & Fratello Redaelli dans Redaelli Tecnasud.

21      Le 31 décembre 2003, les sociétés suivantes ont été fusionnées par absorption au sein de Redaelli Tecna : Redaelli Tecna Cordati SpA, TECI SpA, Redaelli Tecnasud, Maroni Srl, Tecfin SpA et Redaelli Tecna Nastro Srl. Redaelli Tecna a également créé, le 18 avril 1990, Deriver Srl, qui a fait par la suite l’objet d’une procédure de mise en liquidation. Redaelli Tecnasud et Redaelli Tecna seront désignées indifféremment ci-après par le terme « Redaelli ». Le 30 juillet 2008, Redaelli a été rachetée par OAO Severstal, une entreprise située en Russie.

C –  Procédure administrative

22      Le 9 janvier 2002, le Bundeskartellamt (autorité de la concurrence allemande) a transmis à la Commission des documents portant sur une affaire en instance devant un tribunal du travail allemand, concernant le licenciement d’un ancien employé de WDI. Cet employé affirmait avoir été impliqué dans une infraction à l’article 101 TFUE concernant l’APC. Dans ce contexte, il a fait un relevé des entreprises impliquées et a fourni de premières informations sur l’infraction (décision attaquée, considérant 105).

1.     Première demande de clémence et immunité accordée à DWK

23      Le 18 juin 2002, DWK a soumis à la Commission un « mémorandum » relatif à une infraction à l’article 101 TFUE concernant l’APC, qui l’impliquait elle-même ainsi que d’autres entreprises. Dans ce contexte, DWK a précisé qu’elle espérait bénéficier de la communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 2002, C 45, p. 3, ci-après la « communication sur la clémence ») (décision attaquée, considérant 106).

24      Le 3 juillet 2002, les représentants de DWK ont rencontré la Commission et ont discuté de la procédure de clémence. Le 19 juillet 2002, la Commission a accordé à DWK l’immunité conditionnelle d’amendes en vertu du point 8, sous b), de la communication sur la clémence, étant donné qu’elle était la première à fournir des éléments de preuve qui allaient permettre à la Commission de constater une infraction à l’article 101 TFUE, relative à une entente présumée entre producteurs d’APC dans l’ensemble de l’Union (décision attaquée, considérant 107).

2.     Inspections et demandes de renseignements

25      Les 19 et 20 septembre 2002, la Commission a procédé à des vérifications dans les locaux, notamment, de DWK, de WDI, de Nedri, de Tréfileurope SA, de Tycsa, de Redaelli, de CB, d’Itas, d’ITC, de SLM et d’Edilsider (la société appartenant à un agent de vente de Tréfileurope Italia Srl, devenue ArcelorMittal Verderio) ainsi qu’auprès de leurs filiales ou entreprises liées respectives, conformément à l’article 14, paragraphes 2 ou 3, du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d’application des articles [101 TFUE] et [102 TFUE] (JO 1962, 13, p. 204) (décision attaquée, considérant 108).

26      À partir du 19 septembre 2002, la Commission a adressé plusieurs demandes de renseignements, conformément à l’article 11 du règlement n° 17 et à l’article 18 du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [101 TFUE] et [102 TFUE] (JO 2003, L 1, p. 1), aux entreprises destinataires de la décision initiale, à leurs sociétés mères, à d’autres entreprises, à certaines personnes (un salarié retraité de Redaelli et par la suite conseiller commercial, et un agent de vente de Tréfileurope Italia par l’intermédiaire d’Edilsider) et à certaines associations professionnelles (décision attaquée, considérant 109).

27      Les 7 et 8 juin 2006, la Commission a mené une inspection conformément à l’article 20 du règlement n° 1/2003 dans les locaux (« studio ») d’un membre de la famille de l’ancien salarié de Redaelli (décision attaquée, considérant 114).

3.     Autres demandes de clémence et réponses apportées par la Commission

28      Parmi les destinataires de la décision attaquée, certaines sociétés, telles ITC, Nedri, SLM, Redaelli et WDI, ont introduit des demandes officielles de clémence au titre de la communication sur la clémence. Tycsa a confirmé l’existence des arrangements anticoncurrentiels, mais n’a pas demandé la clémence (décision attaquée, considérant 110).

29      ITC a demandé la clémence le 21 septembre 2002, soumettant des éléments de preuve contemporains concernant les réunions qui se sont tenues entre les producteurs d’APC entre 1979 et 2002. Le 11 novembre 2002, elle a également soumis une déclaration d’entreprise. Le 10 janvier 2003, la Commission a accordé à ITC une réduction provisoire d’amendes de l’ordre de 30 à 50 %, à la condition qu’elle continue de respecter les conditions prévues au point 21 de la communication sur la clémence (décision attaquée, considérant 111).

30      Le 17 octobre 2002, Tycsa a répondu à une demande de renseignements, reconnaissant les faits et fournissant des preuves qui l’incriminaient. Le 21 octobre 2002, répondant à une demande de renseignements, Redaelli a soumis des preuves qui l’incriminaient et, le 20 mars 2003, elle a officiellement demandé à bénéficier de la communication sur la clémence. Le 23 octobre 2002, répondant à une demande de renseignements, Nedri a soumis des preuves, tout en demandant à bénéficier de l’application de ladite communication. Le 25 octobre 2002, Emesa a soumis des preuves incluant certaines déclarations auto-incriminantes. Le 30 octobre 2002, tout en répondant à une demande de renseignements, SLM a demandé une réduction d’amendes. Le 4 novembre 2002 et, par la suite, le 6 mars 2003 et le 11 juin 2003, Tréfileurope a soumis des informations auto-incriminantes en réponse à une demande de renseignements ainsi qu’une déclaration d’entreprise visant à bénéficier de l’application de la communication sur la clémence. Le 17 mars 2004, Galycas a répondu à une demande de renseignements en reconnaissant les faits et en faisant certaines déclarations incriminantes. Le 19 mai 2004, WDI a soumis une déclaration d’entreprise visant à bénéficier de l’application de la communication sur la clémence. Le 28 juin 2007, parmi d’autres contacts avec la Commission, ArcelorMittal a soumis une demande de clémence contenant principalement les notes manuscrites contemporaines couvrant la période allant de 1992 à 2002 d’un ancien employé d’Emesa (ci-après les « notes d’Emesa ») (décision attaquée, considérant 112).

31      Faisant suite aux demandes de clémence, la Commission a adressé à Nedri et à WDI une lettre datée du 19 septembre 2008, par laquelle elle les a informées de l’indisponibilité de l’immunité d’amendes et de son intention, en vertu du point 26 de la communication sur la clémence, d’appliquer une réduction d’amendes dans les limites prévues au point 23, sous b), de cette communication. Ce même jour, la Commission a également adressé une lettre à Redaelli et à SLM, rejetant leur demande de clémence (décision attaquée, considérant 113).

4.     Ouverture de la procédure et communication des griefs

32      Le 30 septembre 2008, la Commission a adopté une communication des griefs visant plusieurs sociétés, dont Redaelli.

33      Tous les destinataires de la communication des griefs ont soumis des remarques écrites en réponse aux griefs formulés par la Commission.

5.     Accès au dossier, audition et capacité contributive

34      Les destinataires de la communication des griefs ont pu obtenir l’accès au dossier de la Commission sous la forme d’une copie sur DVD. Parallèlement, ces sociétés ont également reçu une liste énumérant les documents contenus dans le dossier d’enquête et indiquant le degré d’accessibilité de chaque document. Elles ont été informées que le DVD leur donnait un accès total à tous les documents que la Commission avait pu obtenir en cours d’enquête, à l’exception des documents ou parties de document qui contenaient des secrets d’affaires et d’autres informations confidentielles. L’accès aux documents afférents à la clémence a été accordé dans les locaux de la Commission.

35      Une audition a eu lieu les 11 et 12 février 2009. Toutes les entreprises destinataires de la communication des griefs, à l’exception de HIT Groep, d’Emesa et de Galycas, y ont pris part.

36      Quatorze entreprises, dont Redaelli, ont également invoqué une incapacité à payer au sens du point 35 des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1/2003 (JO 2006, C 210, p. 2 ; ci-après les « lignes directrices de 2006 »). Elles ont fourni des justifications à l’appui de cette demande.

6.     Demandes complémentaires de renseignements

37      Par la suite, la Commission a adressé des demandes de renseignements à GSW, à MRT, à Tycsa, à TQ, à Companhia Previdente et à Socitrel, afin de clarifier certains points concernant, notamment, leur structure d’entreprise. Ces sociétés ont répondu entre le 6 mars et le 15 avril 2009.

38      La Commission a également adressé des demandes de renseignements à tous les destinataires de la décision initiale, afin d’établir la valeur des ventes des produits pertinents ainsi que le chiffre d’affaires des groupes. Tous les destinataires ont répondu à ces demandes.

D –  Décision attaquée

39      La décision attaquée concerne une entente entre des fournisseurs d’APC qui ont pris part à des opérations de fixation de quotas, de partage de clientèle, de fixation des prix et d’échange d’informations commerciales sensibles aux niveaux tant européen (club Zurich, club Europe…) que national et régional (club Italia, club España…). Selon le considérant 1 de la décision attaquée, ces entreprises ont ainsi commis une infraction unique et continue à l’article 101, paragraphe 1, TFUE, et, à partir du 1er janvier 1994, à l’article 53, paragraphe 1, de l’accord EEE. Les agissements illégaux se sont déroulés au moins à partir du début de l’année 1984 et se sont poursuivis jusqu’au 19 septembre 2002.

40      L’enquête a impliqué 18 entreprises. Aux considérants 122 à 133 de la décision attaquée, les arrangements d’entente faisant l’objet de la procédure sont décrits dans des termes généraux. Ces considérants sont résumés ci-après dans la mesure où les faits qui y sont décrits permettent une meilleure compréhension du cadre du litige.

41      Depuis la première moitié des années quatre-vingt (1984) au moins et jusqu’au moment des inspections de la Commission, les 19 et 20 septembre 2002, plusieurs entreprises actives dans le secteur de l’APC ont été partiellement ou constamment impliquées dans des arrangements paneuropéens consistant en une phase dite de Zurich et une phase dite européenne ou des arrangements nationaux ou régionaux selon le cas. Les arrangements paneuropéens et les arrangements nationaux ou régionaux poursuivaient le même objectif global de maintenir l’équilibre afin d’éviter la chute des prix sur un marché européen changeant, caractérisé par des capacités de production excessives. Les entreprises ont par conséquent tenté en permanence d’éviter une concurrence féroce sur leur marché national ou sur les marchés d’exportation, en passant des accords en termes de quotas, de prix ou d’attribution de clientèle.

1.     Club Zurich et accords régionaux

42      La première phase de l’accord paneuropéen est dénommée « club Zurich ». Ainsi, du 1er janvier 1984 au 9 janvier 1996, à la suite d’une forte pression exercée sur les prix à l’époque, Tréfileurope, Nedri, WDI, DWK – ou leurs prédécesseurs – et Redaelli – cette dernière représentant plusieurs autres entreprises italiennes (au moins en 1993 et en 1995) – ont fixé des quotas par pays (Allemagne, Autriche, Benelux, France, Italie et Espagne), se sont partagés des clients, ont arrêté des prix et échangé des informations commerciales sensibles. Ils ont été rejoints par les producteurs espagnols, Emesa, en 1992, et Tycsa, en 1993 – lesquels, vers la même époque, ont également commencé à se réunir, en ce qui concerne le marché ibérique, avec d’autres producteurs espagnols, dans un premier temps, puis également avec des producteurs portugais, au sein du « club España ». Au cours des années 1980, les réunions du club Zurich ont essentiellement eu lieu à Zurich (Suisse) et, dans les années 1990, à Düsseldorf (Allemagne).

43      Au plus tard à partir du 23 janvier 1995 et durant tout le reste de l’année 1995, les entreprises italiennes Redaelli, CB, Itas et ITC (les trois dernières étant souvent représentées par Redaelli) ont négocié un accord (révisé) de quotas avec les autres producteurs du club Zurich qui devait régir les ventes des producteurs italiens et des autres producteurs du club Zurich en Italie et dans le reste de l’Europe. Aucun accord n’a finalement pu être conclu en raison du fait que les quotas à l’exportation revendiqués par les producteurs italiens ont été jugés trop élevés. Cela a contribué à la dissolution du club Zurich, dont la dernière réunion attestée a eu lieu le 9 janvier 1996.

44      Le 5 décembre 1995, les entreprises italiennes Redaelli, CB, Itas et ITC ont néanmoins passé entre elles un accord fixant des quotas à la fois au sein du marché italien et concernant les exportations de l’Italie vers le reste de l’Europe. Par la suite, ces entreprises italiennes ont été (de nouveau) rejointes par Tréfileurope et Tréfileurope Italia, SLM, Trame, Tycsa, DWK et Austria Draht (le « club Italia »). Les rencontres avaient lieu régulièrement pour surveiller l’exécution de l’arrangement sur les quotas, fixer les prix (y compris une surtaxe dénommée « supplément »), se répartir la clientèle et échanger des informations commercialement sensibles, et ce jusqu’à l’inspection par la Commission. Ces sociétés ont recouru à un système de surveillance sophistiqué par l’intermédiaire de tiers indépendants qui contrôlaient régulièrement les prix et le volume réel vendu aux clients en Italie.

45      Une coordination spécifique existait entre le club Zurich et le club Italia. Redaelli, et par la suite Tréfileurope, tenait les membres de l’arrangement paneuropéen informés. De leur côté, les participants du club Italia étaient aussi informés des développements pertinents de l’arrangement paneuropéen par l’intermédiaire de Redaelli, puis de Tréfileurope, de DWK et de Tycsa, qui participaient aux deux clubs.

46      Parallèlement, pendant toute l’année 1996, les entreprises italiennes (du moins Redaelli, CB, Itas et ITC), Tycsa et Tréfileurope ont négocié et sont parvenues fin 1996 à un accord spécifique intitulé « accord du Sud », qui arrêtait le taux de pénétration de chacun des participants dans les pays du Sud (Espagne, Italie, France, Belgique et Luxembourg) et contenait un engagement de leur part à négocier ensemble les quotas avec les autres producteurs d’Europe du Nord.

2.     Club Europe et accords régionaux

47      Afin de surmonter la crise du club Zurich, les anciens participants à celui-ci (avec une participation moins régulière cependant des producteurs italiens, en particulier Redaelli) ont également continué à se réunir régulièrement entre janvier 1996 et mai 1997. Tréfileurope, Nedri, WDI, DWK, Tycsa et Emesa (ci-après les « membres permanents » ou les « six producteurs ») ont finalement adopté, en mai 1997, un arrangement paneuropéen révisé, par lequel ils partageaient des quotas qui étaient calculés sur la base d’une région de référence et d’une période de référence spécifiques (quatrième trimestre 1995-premier trimestre 1997). Cette deuxième phase de l’arrangement paneuropéen est dénommée « club Europe ».

48      Les six producteurs se sont en outre réparti la clientèle et ont fixé les prix des produits (de façon spécifique à la fois par pays et par client). Ils sont convenus de règles de coordination incluant la nomination de coordonnateurs responsables de la mise en œuvre des arrangements par pays et de la coordination avec d’autres entreprises intéressées, actives dans ces mêmes pays ou concernant les mêmes clients. De plus, leurs représentants se sont réunis régulièrement à différents niveaux (directeurs et représentants des ventes), afin de surveiller la mise en œuvre des arrangements. Ils ont échangé des informations commerciales sensibles. En cas d’écart par rapport au comportement commercial convenu, un système de compensation adéquat était appliqué.

49      Dans le cadre de cet arrangement paneuropéen, les six producteurs, rejoints occasionnellement par les producteurs italiens et Fundia Hjulsbro AB (ci-après « Fundia »), entretenaient également des contacts bilatéraux ou multilatéraux et participaient à la fixation des prix et à l’attribution de clientèle sur une base ad hoc, s’ils y avaient un intérêt (en fonction de leur présence sur le marché discuté).

50      Au cours de la période allant, au moins, de septembre 2000 jusqu’aux inspections de la Commission, en septembre 2002, les six producteurs, Redaelli, CB, Itas, ITC et SLM se sont réunis régulièrement dans le but d’intégrer les entreprises italiennes dans le club Europe en tant que membres permanents.

51      Au cours de la même période, en plus de la fixation de quotas généraux par zone géographique, la répartition des quotas par client a été discutée. L’entreprise qui coordonnait habituellement le marché d’un pays donné devait également gérer les négociations pour une attribution de quotas par client installé dans ce pays.

52      Les membres du club Europe ont également tenté d’accueillir en tant que membres permanents non seulement les producteurs italiens, mais aussi tous les autres producteurs importants d’APC avec lesquels ils avaient eu des arrangements ou avaient entretenu des contacts bilatéraux ou multilatéraux par le passé, et de redistribuer les quotas européens par pays, comme cela se faisait dans le cadre du club Zurich.

53      En parallèle à l’arrangement paneuropéen et au club Italia, cinq entreprises espagnoles [TQ, Tycsa, Emesa, Galycas et Proderac (cette dernière à partir de mai 1994)] et deux entreprises portugaises (Socitrel à partir d’avril 1994 et Fapricela à partir de décembre 1998) sont convenues, pour l’Espagne et le Portugal, de maintenir leur part de marché stable et de fixer des quotas, de s’attribuer des clients, y compris pour les marchés publics de travaux, et de fixer les prix et les conditions de paiement. Elles ont en outre échangé des informations commerciales sensibles (club España). En dehors du fait que Tycsa participait à la fois aux réunions du club Europe et du club España, des discussions et des arrangements fréquents ont également eu lieu entre d’autres participants des deux clubs.

54      Les arrangements paneuropéens et régionaux (club Italia/club España/accord du Sud) sont restés en vigueur jusqu’au moment des inspections qui ont été menées par la Commission en septembre 2002.

55      Redaelli est tenue responsable de sa participation à l’entente pour la période allant du 1er janvier 1984 au 19 septembre 2002. Pour cette infraction, Redaelli s’est vu infliger une amende d’un montant de 6,3 millions d’euros. Dans le calcul du montant de l’amende, la Commission a tenu compte de la limite légale liée au seuil de 10 % du chiffre d’affaires.

 Procédure et conclusions des parties

56      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 16 septembre 2010, Redaelli a formé le présent recours.

57      Par décision du 29 octobre 2010, le Tribunal (première chambre) a informé la requérante qu’elle disposait de la possibilité d’adapter ses moyens et conclusions pour tenir compte des modifications apportées par la première décision modificative. Redaelli n’a pas donné suite à cette possibilité.

58      Par décision du 6 juin 2011, le Tribunal a demandé à la Commission de lui fournir la seconde décision modificative.

59      Le 22 juin 2011, la Commission a communiqué au Tribunal la seconde décision modificative.

60      Par décision du 30 juin 2011, le Tribunal (première chambre) a informé la requérante qu’elle disposait de la possibilité d’adapter ses moyens et conclusions pour tenir compte des modifications apportées par la seconde décision modificative. Redaelli n’a pas donné suite à cette possibilité.

61      Le 25 octobre 2011, la Commission a déposé l’original de sa duplique dans la langue de procédure, ce qui a entraîné la clôture de la procédure écrite.

62      La composition du Tribunal ayant été modifiée, à partir du 23 septembre 2013, le juge rapporteur a été affecté à la sixième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

63      Le rapport préalable, visé à l’article 52, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991, a été communiqué à la sixième chambre le 15 novembre 2013.

64      Le 17 décembre 2013, dans le cadre de mesures d’organisation de la procédure adoptées en application de l’article 64 de son règlement de procédure du 2 mai 1991, le Tribunal a demandé aux parties de répondre à une série de questions et à la Commission de produire des documents.

65      Les 27 et 28 février 2014, respectivement, Redaelli et la Commission ont présenté leurs réponses à ces demandes.

66      Le 16 mai 2014, dans le cadre de mesures d’instruction adoptées en application de l’article 65 de son règlement de procédure du 2 mai 1991, le Tribunal a demandé à la Commission de produire les documents que celle-ci avait refusé de produire en réponse aux mesures d’organisation de la procédure adoptées le 17 décembre 2013.

67      Le 27 mai 2014, la Commission a produit les documents demandés, auxquels Redaelli a eu accès avant l’audience.

68      Le 8 juillet 2014, la Commission a produit une nouvelle série de documents afin de compléter sa réponse aux mesures d’organisation de la procédure adoptées le 17 décembre 2013.

69      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 9 juillet 2014. Dans ce cadre, après avoir demandé à la Commission de préciser le contenu des documents produits le 8 juillet 2014 à l’égard des autres documents déjà produits le 28 février 2014, le Tribunal a décidé de verser ces documents au dossier de l’affaire. Comme cela est indiqué au procès-verbal de l’audience, Redaelli ne s’est pas opposée à une telle décision.

70      Redaelli conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée dans la mesure où elle constate sa participation à l’entente sanctionnée pour la période allant de 1984 à 1992 ;

–        annuler la décision attaquée dans la mesure où elle rejette sa demande de clémence et, statuant directement sur cette demande, lui accorder une juste réduction du montant de l’amende en raison de la contribution apportée à l’enquête ;

–        réduire encore, pour des raisons d’équité, le montant de l’amende infligée, à titre de compensation pour la durée déraisonnable de la procédure ;

–        condamner la Commission aux dépens.

71      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

72      À l’appui de son recours, Redaelli avance trois moyens. Par le premier moyen, divisé en trois branches, Redaelli conteste les conclusions de la Commission concernant l’application de la communication sur la clémence. Par le deuxième moyen, Redaelli prétend que la Commission a commis une erreur en ce qui concerne la durée de l’infraction. Enfin, par le troisième moyen, Redaelli critique la durée de la procédure administrative.

73      À titre liminaire, s’agissant d’une décision adoptée par la Commission afin de sanctionner une infraction au droit de la concurrence, il convient de rappeler que le contrôle juridictionnel exercé par le juge de l’Union comprend, outre le contrôle de légalité, prévu à l’article 263 TFUE, une compétence de pleine juridiction, qui est reconnu audit juge en vertu de l’article 31 du règlement n° 1/2003, conformément à l’article 261 TFUE. Cette compétence habilite le juge, au-delà du simple contrôle de légalité de la sanction, à substituer son appréciation à celle de la Commission et, en conséquence, le cas échéant, à supprimer, à réduire ou à majorer l’amende infligée (voir arrêt du 8 décembre 2011, KME Germany e.a./Commission, C‑272/09 P, Rec, EU:C:2011:810, points 93 et 103 et jurisprudence citée).

A –  Sur le moyen relatif à l’application de la communication sur la clémence

74      Dans le premier moyen, divisé en trois branches, Redaelli conteste le résultat de l’appréciation de sa coopération avec la Commission au titre de la communication sur la clémence. Premièrement, la Commission aurait apprécié erronément la valeur ajoutée de la contribution fournie par Redaelli à cet égard. Deuxièmement, la Commission aurait méconnu le principe de protection de la confiance légitime ainsi que, troisièmement, le principe d’égalité de traitement. En conséquence, Redaelli demande au Tribunal d’annuler la décision attaquée sur ce point et, au titre de sa compétence de pleine juridiction, de lui reconnaître le bénéfice de la clémence en l’incluant dans le troisième groupe d’entreprises visé au point 23 de la communication sur la clémence, à savoir le groupe réunissant les entreprises qui peuvent bénéficier d’une réduction allant jusqu’à 20 % de la valeur de l’amende infligée, afin de lui accorder ainsi une réduction appropriée du montant de l’amende du fait de la contribution apportée lors de la procédure administrative.

1.     Rappel du contenu de la décision attaquée

75      Les considérants 1122 à 1125 de la décision attaquée exposent les raisons pour lesquelles la Commission a considéré qu’il n’y avait pas lieu d’accorder à Redaelli, au titre de la communication sur la clémence, une réduction du montant de l’amende qui lui était infligée comme suit :

« (1122)      Redaelli a répondu à une demande de renseignements le 21 octobre 2002 et a soumis une demande de clémence le 20 mars 2003, admettant principalement l’existence de certains accords au niveau italien entre 1990 et 1993 et entre 1995 et 2002, et au niveau paneuropéen de 1995 à 2002. Les contributions de Redaelli incluent certaines preuves documentaires contemporaines. Elles n’ont cependant ni ajouté un élément important ni clarifié des points pour lesquels la Commission ne disposait pas encore de preuves suffisantes. Le 19 septembre 2008, la Commission a donc rejeté la demande de clémence de Redaelli conformément au point 23 de la communication sur la clémence.

(1123)      Dans sa réponse à la communication des griefs, Redaelli conteste la conclusion de la Commission selon laquelle les preuves qu’elle a fournies n’apportaient aucune valeur ajoutée significative. Elle fait remarquer qu’elle a totalement collaboré avec la Commission malgré les difficultés liées à la restructuration de la société au fil des ans non seulement en fournissant, en octobre 2002, des informations qui l’incriminaient et en les intégrant dans une demande de clémence le 20 mars 2003, mais aussi en répondant à de nombreuses demandes de renseignements de la Commission. Elle déclare que la Commission a fréquemment fait référence dans la communication des griefs aux informations communiquées par cette entreprise. Elle conteste le fait qu’aucune réduction provisoire de l’amende ne lui a été accordée à la différence des autres entreprises et en particulier de Nedri, qui a soumis sa demande de clémence le 23 octobre 2003.

(1124)            [Il est rappelé] que pour prétendre à une réduction d’amende au titre de la communication sur la clémence une entreprise doit fournir à la Commission des preuves apportant une valeur ajoutée significative aux preuves déjà en la possession de la Commission. Si la Commission a effectivement parfois fait référence aux preuves et déclarations soumises par Redaelli dans la communication des griefs et dans la présente décision, aucun des éléments fournis par Redaelli n’a apporté de valeur ajoutée significative, contrairement aux preuves présentées par d’autres sociétés telles que Nedri […]

(1125)            Quant à l’affirmation de Redaelli selon laquelle elle a toujours totalement coopéré avec la Commission en répondant aux nombreuses demandes de renseignements, la Commission fait remarquer que les entreprises ont une obligation légale de répondre aux demandes de renseignements de la Commission. Ce fait en soi ne leur donne donc pas droit à une réduction d’amende. »

2.     Sur l’appréciation erronée de la valeur ajoutée significative des éléments de preuve fournis par Redaelli lors de la procédure administrative

76      En substance, Redaelli rappelle avoir pleinement coopéré avec la Commission lors de la procédure. Elle relève également que, à de nombreuses reprises, la décision attaquée fait état des documents et des déclarations fournis à ce titre. Ces références constitueraient parfois l’unique preuve citée par la Commission à l’appui de son argumentation. Plusieurs exemples illustreraient la valeur ajoutée significative de ces éléments de preuve, ce qui justifierait la réduction du montant de l’amende en application de la communication sur la clémence.

77      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, dans la communication sur la clémence (voir point 23 ci-dessus), la Commission a défini les conditions dans lesquelles les entreprises coopérant avec elle au cours de son enquête sur une entente peuvent être exemptées de l’amende ou bénéficier d’une réduction du montant de l’amende qu’elles auraient dû acquitter.

78      Ladite communication a remplacé une première communication de la Commission concernant la non-imposition d’amendes ou la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO1996, C 207, p. 4, ci-après la « communication de 1996 ») afin de lui permettre d’adapter sa politique en la matière au vu de l’expérience acquise après cinq années de mise en œuvre. En particulier, la Commission a considéré que, si la validité des principes à la base de la communication de 1996 a été confirmée, l’expérience a montré que, si les réductions du montant de ces amendes étaient octroyées dans des conditions de transparence et de certitude accrues, l’efficacité de cette communication s’en trouverait renforcée. De même, la Commission a indiqué qu’une correspondance plus étroite entre le niveau de réduction du montant des amendes et l’importance de la contribution de l’entreprise à l’établissement de l’infraction pourrait encore améliorer cette efficacité (communication sur la clémence, considérant 5).

79      Il appartient au Tribunal de tenir compte de ces évolutions souhaitées par la Commission quand elle a remplacé la communication de 1996 par la communication sur la clémence.

a)     Conditions énoncées pour obtenir une réduction du montant de l’amende

80      Même si elle ne remplit pas les conditions énoncées par la communication sur la clémence pour obtenir une immunité d’amende, une entreprise peut encore bénéficier d’une réduction du montant de l’amende qui à défaut lui aurait été infligée.

81      Pour pouvoir prétendre à une telle réduction, il ressort en effet du point 21 de la communication sur la clémence qu’une entreprise doit, d’une part, « fournir à la Commission des éléments de preuve de l’infraction présumée qui apportent une valeur ajoutée significative par rapport aux éléments de preuve déjà en possession de la Commission » et, d’autre part, « mettre fin à sa participation à l’activité illégale présumée au plus tard au moment où elle fournit ces éléments de preuve ».

82      Le point 23, sous a), de ladite communication indique à ce propos que, dans toute décision finale arrêtée au terme de la procédure administrative, la Commission déterminera « si les éléments de preuve fournis par une entreprise ont représenté une valeur ajoutée significative par rapport aux éléments déjà en possession de la Commission ».

83      La notion de « valeur ajoutée » est précisée comme suit par le point 22 de la communication sur la clémence :

« La notion de ‘valeur ajoutée’ vise la mesure dans laquelle les éléments de preuve fournis renforcent, par leur nature même et/ou leur niveau de précision, la capacité de la Commission d’établir les faits en question. Lors de cette appréciation, la Commission estimera généralement que les éléments de preuve écrits datant de la période à laquelle les faits se rapportent ont une valeur qualitative plus élevée que [celle d]es éléments de preuve établis ultérieurement. De même, les éléments de preuve se rattachant directement aux faits en question seront le plus souvent considérés comme qualitativement plus importants que ceux qui n’ont qu’un lien indirect avec ces derniers. »

84      Trois fourchettes de réduction du montant de l’amende sont prévues au point 23, sous b), premier alinéa, de la communication sur la clémence. La première entreprise à remplir la condition énoncée au point 21 de ladite communication bénéficiera d’une réduction comprise entre 30 et 50 %, la deuxième entreprise d’une réduction comprise entre 20 et 30 %, et les entreprises suivantes d’une réduction maximale de 20 %.

85      Le point 23, sous b), deuxième alinéa, de la communication sur la clémence indique que, « pour définir le niveau de réduction à l’intérieur de ces fourchettes, la Commission prendra en compte la date à laquelle les éléments de preuve remplissant la condition énoncée au point 21 ont été communiqués et le degré de valeur ajoutée qu’ils ont représenté » et qu’« elle pourra également prendre en compte l’étendue et la continuité de la coopération dont l’entreprise a fait preuve à partir de la date de sa contribution ».

86      Les termes de la communication sur la clémence supposent par conséquent de distinguer deux étapes (voir, par analogie, arrêt du 17 mai 2013, MRI/Commission, T‑154/09, Rec, EU:T:2013:260, point 320).

87      Premièrement, pour pouvoir bénéficier d’une réduction du montant de l’amende, il faut que l’entreprise fournisse des éléments de preuve ayant une valeur ajoutée significative par rapport aux éléments déjà en possession de la Commission. Ainsi, et comme cela est expressément relevé par la Commission dans ses écritures (voir, par exemple, mémoire en défense, point 27, et duplique, point 10), en établissant que les éléments fournis par une entreprise « apportent une valeur ajoutée significative par rapport aux éléments de preuve déjà en possession de la Commission », la communication sur la clémence impose une comparaison entre les éléments de preuve détenus antérieurement par la Commission et ceux acquis par le biais de la coopération offerte par le demandeur de clémence.

88      Deuxièmement, pour établir le cas échéant le taux de réduction du montant de l’amende qu’à défaut la Commission aurait infligée, celle-ci doit prendre en compte deux critères : la date à laquelle les éléments de preuve ont été communiqués et le degré de valeur ajoutée qu’ils ont représenté. Dans cette analyse, la Commission peut également tenir compte de l’étendue et de la continuité de la coopération dont l’entreprise a fait preuve à partir de la date de sa contribution.

89      Dès lors que les éléments de preuve fournis à la Commission ont une valeur ajoutée significative et que l’entreprise n’est pas la première ou la deuxième entreprise à communiquer de tels éléments, le taux maximal de réduction du montant de l’amende qui lui aurait à défaut été infligé par la Commission sera de 20 %. Plus la coopération aura été précoce et plus le degré de valeur ajoutée sera important, plus le taux de réduction augmentera, pour atteindre au maximum 20 % du montant qu’à défaut la Commission aurait infligé (voir, par analogie, arrêt MRI/Commission, point 86 supra, EU:T:2013:260, point 322).

90      L’ordre chronologique et la rapidité de la coopération offerte par les membres du cartel constituent donc des éléments fondamentaux du système mis en place par la communication sur la clémence [arrêts du 5 octobre 2011, Transcatab/Commission, T‑39/06, Rec, EU:T:2011:562, point 380, et du 16 septembre 2013, Roca/Commission, T‑412/10, Rec (Extraits), EU:T:2013:444, point 183]. Il en est de même en ce qui concerne le degré de valeur ajoutée attaché aux différents éléments de preuve fournis par une entreprise à cet égard.

91      Il convient de rappeler à ce propos que, si la Commission est tenue de motiver les raisons pour lesquelles elle estime que des éléments fournis par des entreprises dans le cadre de la communication sur la clémence constituent une contribution justifiant ou non une réduction du montant de l’amende infligée, il incombe en revanche aux entreprises souhaitant contester la décision de la Commission à cet égard de démontrer que les informations fournies volontairement par ces entreprises ont été déterminantes pour permettre à celle-ci de prouver l’essentiel de l’infraction et donc d’adopter une décision infligeant des amendes (voir arrêt Roca/Commission, point 90 supra, EU:T:2013:444, point 184 et jurisprudence citée).

92      Eu égard à la raison d’être de la réduction, la Commission ne peut faire abstraction de l’utilité de l’information fournie, laquelle est nécessairement fonction des éléments de preuve déjà en sa possession (voir arrêt Roca/Commission, point 90 supra, EU:T:2013:444, point 185 et jurisprudence citée).

93      Lorsqu’une entreprise ne fait, au titre d’une demande de clémence, que confirmer, et ce de manière moins précise et explicite, certaines des informations déjà données par une autre entreprise au titre de sa coopération, le degré de coopération fourni par cette entreprise, quoiqu’il puisse ne pas être dénué d’une certaine utilité pour la Commission, ne saurait être considéré comme comparable à celui fourni par la première entreprise à avoir donné lesdites informations. Une déclaration se limitant à corroborer, dans une certaine mesure, une déclaration dont la Commission disposait déjà ne facilite pas, en effet, sa tâche de manière significative. Partant, elle ne saurait être suffisante pour justifier une réduction du montant de l’amende au titre de la communication sur la clémence (voir, en ce sens, arrêts du 17 mai 2011, Arkema France/Commission, T‑343/08, Rec, EU:T:2011:218, point 137, et Roca/Commission, point 90 supra, EU:T:2013:444, point 186).

94      Il ressort également de la jurisprudence que la déclaration d’une entreprise inculpée pour avoir participé à une entente, dont l’exactitude est contestée par plusieurs autres entreprises inculpées, ne peut être considérée comme constituant une preuve suffisante de l’existence d’une infraction commise par ces dernières sans être étayée par d’autres éléments de preuve (voir arrêt Roca/Commission, point 90 supra, EU:T:2013:444, point 187 et jurisprudence citée).

95      Enfin, quand bien même il y aurait lieu de considérer que la Commission disposerait d’une marge d’appréciation dans le cadre de l’examen de la valeur ajoutée significative d’informations qui lui sont fournies en vertu de la communication sur la clémence, il n’en demeure pas moins que le Tribunal ne saurait s’appuyer sur ladite marge d’appréciation pour renoncer à exercer un contrôle approfondi tant de droit que de fait de l’appréciation de la Commission à cet égard (voir arrêts Roca/Commission, point 90 supra, EU:T:2013:444, point 188 et jurisprudence citée, et du 24 octobre 2013, Kone e.a./Commission, C‑510/11 P, EU:C:2013:696, points 24 et 92).

96      Cela est d’autant plus le cas quand il est demandé au Tribunal, comme ici, d’apprécier lui-même la valeur qu’il convient de reconnaître aux éléments de preuve présentés par la partie requérante lors de la procédure qui a conduit à sa sanction pour avoir commis une infraction au droit de la concurrence (voir point 74 ci-dessus).

97      C’est à la lumière des considérations qui précèdent qu’il convient d’examiner les arguments invoqués par Redaelli pour établir la valeur ajoutée significative des éléments communiqués à la Commission lors de la procédure administrative.

b)     Examen des arguments relatifs à la valeur ajoutée significative

 Observations liminaires sur le contexte et la chronologie

98      En premier lieu, il convient de rappeler que, pour être en mesure de se prononcer sur les arguments relatifs à la valeur ajoutée significative, le Tribunal a demandé à la Commission de lui présenter, pour chaque aspect de l’infraction pour lequel Redaelli invoque la valeur ajoutée significative de sa contribution, les différents éléments de preuve qu’elle a pris en considération pour arriver à la conclusion que cette contribution n’a « ni ajouté un élément important ni clarifié des points pour lesquels [elle] ne disposait pas encore de preuves suffisantes » ou qu’« aucun des éléments fournis par Redaelli n’a apporté de valeur ajoutée significative » (voir décision attaquée, considérants 1122 et 1124).

99      La Commission a satisfait à cette demande en communiquant ces éléments de preuve le 28 février 2014 et le 16 mai 2014.

100    Par la suite, le 8 juillet 2014, la Commission a communiqué au Tribunal une nouvelle série de documents afin de compléter sa réponse aux mesures d’organisation de la procédure adoptées le 17 décembre 2013. Ces documents ont été versés au dossier lors de l’audience (voir points 68 et 69 ci-dessus). Lesdits documents correspondaient aux versions complètes des documents fournis par Redaelli lors de la procédure administrative, lesquels étaient donc bien connus de la requérante. Ils avaient été produits auparavant par la Commission sous une forme partielle ne reprenant pas soit la lettre de couverture, soit les annexes accompagnant la lettre de couverture.

101    Même si la communication de la version complète des documents susmentionnés est intervenue tardivement, il convient néanmoins de relever que leur contenu avait déjà été exposé en détail dans la requête de Redaelli et que le Tribunal avait déjà, au titre notamment de l’instruction qui a suivi les réponses aux mesures d’organisation de la procédure et aux mesures d’instruction, une connaissance suffisamment précise de la contribution effectuée par Redaelli.

102    Il ressort de ce qui précède que le Tribunal estime être en mesure de contrôler de manière satisfaisante, en fait comme en droit, les appréciations faites par la Commission dans la décision attaquée sur la valeur ajoutée significative des différents éléments de preuve fournis par Redaelli lors de la procédure administrative au vu des arguments présentés à cet égard par la requérante.

103    En deuxième lieu, il importe de relever que, dans la présente affaire, Redaelli demande seulement au Tribunal de lui reconnaître le bénéfice de la clémence en l’incluant dans le troisième groupe d’entreprises visé au point 23 de la communication sur la clémence, à savoir le groupe réunissant les entreprises qui peuvent bénéficier d’une réduction allant jusqu’à 20 % de la valeur de l’amende infligée (voir points 74 et 84 ci-dessus).

104    Ce faisant, Redaelli ne demande ni ne conteste le traitement accordé, premièrement, à DWK, qui a obtenu l’exemption par la Commission de toute amende que cette entreprise aurait à défaut dû acquitter, deuxièmement, à ITC, qui a été considérée par la Commission comme la première entreprise à lui fournir des éléments de preuve qui apportent une valeur ajoutée significative par rapport aux éléments de preuve déjà en sa possession, ou encore, troisièmement, à Nedri, qui a été considérée par la Commission comme la deuxième entreprise à remplir la condition susmentionnée, énoncée au point 21 de la communication sur la clémence.

105    Redaelli a confirmé qu’il en était ainsi en réponse à une question du Tribunal sur ce point, ce dont il a été donné acte dans le procès-verbal de l’audience.

106    En troisième lieu, au vu des différents aspects de l’infraction à propos desquels Redaelli invoque la valeur ajoutée significative de sa contribution, il importe aussi de distinguer les éléments de preuve relatifs au club Italia de ceux concernant le club Zurich et son successeur, le club Europe, et de tenir compte de la chronologie, qui joue un rôle essentiel dans l’analyse des documents pertinents.

107    En effet, en ce qui concerne le club Italia, il ressort de la décision attaquée que la Commission disposait de nombreux éléments de preuve contemporains des faits, obtenus lors des inspections menées les 19 et 20 septembre 2002 ou fournis par la suite, notamment par ITC. Ces éléments de preuve lui ont permis d’établir cet aspect de l’infraction à compter de 1995 et jusqu’en 2002 aussi bien pour Redaelli que pour, notamment, trois autres producteurs italiens : CB, Itas et ITC.

108    En ce qui concerne le club Zurich, la phase initiale de l’infraction au niveau paneuropéen, laquelle réunit un acteur italien, Redaelli, et des acteurs sur d’autres marchés (WDI, Nedri, DWK, Tréfileurope …), la qualité des éléments de preuve disponibles est moindre. Pour cette phase, la Commission met plutôt en avant les déclarations faites par les différents demandeurs de clémence ou les notes d’Emesa obtenues à un stade avancé de la procédure, le 28 juin 2007.

109    En ce qui concerne le club Europe, la deuxième phase de l’infraction au niveau paneuropéen, la décision attaquée fait état de nombreuses sources pour les éléments de preuve, qui se corroborent très souvent les uns les autres. À cet égard, il peut être relevé que Redaelli est citée par la décision attaquée en tant qu’entreprise confirmant la participation d’autres entreprises à cet aspect de l’infraction.

110    En l’espèce également, et au vu de la distinction susmentionnée entre les différents aspects de l’infraction, il doit être tenu compte du fait que deux séries de documents présentés lors de la procédure administrative ont été examinés par le Tribunal : ceux communiqués par Redaelli, qui établissent, selon elle, la valeur ajoutée significative de sa contribution, et ceux présentés par la Commission pour attester qu’elle disposait déjà d’éléments de preuve suffisants pour conclure que la contribution de Redaelli était dépourvue de valeur ajoutée significative.

111    La contribution de Redaelli comporte quatre documents : premièrement, la réponse du 21 octobre 2002 à une demande de renseignements, deuxièmement, la demande de clémence du 20 mars 2003, troisièmement, la réponse du 6 septembre 2006 à une demande de renseignements et, quatrièmement, la réponse du 15 juin 2007 à une demande de renseignements.

112    Pour leur part, les éléments de preuve invoqués par la Commission pour attester l’absence de valeur ajoutée significative de la contribution de Redaelli proviennent, premièrement, de la demande d’immunité de DWK du 18 juin 2002, qui a précédé les inspections, et des déclarations faites par cette entreprise par la suite, deuxièmement, des documents saisis lors des inspections des 19 et 20 septembre 2002, notamment lors de l’inspection effectuée chez Redaelli, troisièmement, des demandes de clémence présentées à la suite des inspections, notamment par ITC, le 21 septembre 2002, Nedri, le 23 octobre 2002, Emesa, le 25 octobre 2002, et Tréfileurope, le 4 novembre 2002, ainsi que des notes d’Emesa remises à la Commission le 28 juin 2007, une date postérieure à la remise du dernier document évoqué par Redaelli pour établir le contenu de sa contribution.

113    C’est dans ce contexte et tout particulièrement en considération des données chronologiques exposées ci-dessus qu’il convient d’examiner les arguments invoqués par Redaelli pour établir la valeur ajoutée significative des éléments communiqués à la Commission lors de la procédure administrative.

114    Un tel examen nécessite effectivement de se placer au moment où les éléments de preuve en cause ont été communiqués à la Commission afin de tenir compte des autres éléments de preuve qui étaient alors disponibles.

 Analyse des documents pertinents

115    Il convient d’examiner tour à tour les différents arguments évoqués par Redaelli pour établir la valeur ajoutée significative de sa contribution.

–       Représentation de CB, Itas et ITC au club Zurich de 1993 à 1995

116    Redaelli fait valoir que sa contribution a permis à la Commission de considérer qu’ITC, Itas et CB ont participé au club Zurich pendant les années 1993-1995. Ainsi, Redaelli aurait été la première et la seule entreprise à exposer son rôle de représentant d’ITC, Itas et CB aux réunions du club Zurich lors de cette période. De même, s’agissant de la signification de l’expression « groupe Assider », ce serait Redaelli et non Nedri qui aurait permis de comprendre que cette expression identifiait un groupe limité de producteurs italiens impliqués dans l’entente et non l’ensemble des membres de l’association professionnelle dénommée ainsi.

117    A priori, il s’agit là de l’un des aspects les plus notables de la contribution de Redaelli, dès lors que, sur la base de telles informations, la requérante fait valoir que la Commission a renforcé sa capacité d’établir les faits en mettant en cause CB, Itas et ITC pour une période plus longue et pour un autre aspect de l’infraction que ceux qu’elle pouvait envisager auparavant.

118    Force est cependant de constater, au vu de la décision attaquée et des éléments de preuve qui y sont évoqués, que la requérante se méprend sur le rôle joué par sa contribution lors de la procédure administrative.

119    En effet, c’est de manière convaincante que la Commission démontre qu’elle connaissait, bien avant que Redaelli ne l’indique, le 15 juin 2007, à un stade avancé de la procédure et en réponse à une demande de renseignements de la Commission, l’identité des trois entreprises italiennes productrices d’APC, membres par le passé de l’association professionnelle Assider qui avait cessé d’exister en 1988, qui étaient susceptibles de participer au club Zurich par son intermédiaire.

120    Premièrement, dès le stade de la demande d’immunité de DWK du 18 juin 2002, la Commission était en mesure de savoir que Redaelli représentait trois autres producteurs italiens d’APC (voir décision attaquée, considérant 153).

121    Deuxièmement, au vu de la demande de clémence de Nedri du 23 octobre 2002, la Commission savait également que, pour cette entreprise, Redaelli représentait Assider lors des réunions de Zurich (voir décision attaquée, considérant 153).

122    Prises ensemble, ces informations donnaient une indication essentielle à la Commission, à savoir que, à l’occasion des réunions de Zurich, Redaelli représentait également Assider, c’est-à-dire trois autres producteurs italiens.

123    En parallèle, la Commission savait que Redaelli et trois producteurs italiens (CB, Itas et ITC) avaient au sein du club Italia des discussions relatives à un accord avec les membres du club Zurich. Cela ressort notamment du projet d’accord du 23 janvier 1995 découvert par la Commission lors de l’inspection menée dans les locaux de Redaelli les 19 et 20 septembre 2002, où il est indiqué qu’un mandat est donné à Redaelli de représenter CB, Itas et ITC auprès des producteurs paneuropéens (voir décision attaquée, considérant 166).

124    Troisièmement, la requérante fait elle-même état, dans sa réplique, du contenu de la déclaration faite par DWK le 8 mai 2007, dont il ressort que, pour cette entreprise, lors des réunions du club Zurich, Redaelli représentait, selon ses propres dires, trois producteurs italiens (voir décision attaquée, considérant 153). Cette déclaration précise également que, d’après les souvenirs de l’un des représentants de DWK à ces réunions, Redaelli n’avait pas précisé de quels producteurs il s’agissait et que ledit représentant ne s’en était pas préoccupé, tout en relevant que ses soupçons portaient sur les producteurs CB, Itas et ITC étant donné que les autres producteurs italiens étaient plus petits ou qu’ils n’existaient pas encore (par exemple SLM).

125    Il ressort de ce qui précède que, avant même les indications données par Redaelli le 15 juin 2007, la Commission savait que, à l’occasion de réunions du club Zurich, Redaelli avait indiqué représenter trois autres producteurs italiens. La Commission était également en mesure de savoir quels pouvaient être ces trois producteurs.

126    En toute hypothèse, il convient de relever que les indications données par Redaelli le 15 juin 2007 précèdent celles qui ressortent des notes d’Emesa déposées peu de temps après, le 28 juin 2007. En effet, c’est au vu des notes d’Emesa présentées par ArcelorMittal que la Commission est notamment à même de considérer que, lors de la réunion du club Zurich des 8 et 9 juin 1994, en présence de Tréfileurope, DWK, WDI, Tycsa, Nedri et Emesa, le représentant de Redaelli a indiqué représenter trois entreprises, à savoir CB, Itas et ITC (voir décision attaquée, considérant 159). Cependant, contrairement à ce que fait valoir la Commission, il n’y a pas ici lieu de tenir compte des notes d’Emesa mais seulement des éléments communiqués avant le 15 juin 2007 pour établir la valeur ajoutée significative de de la contribution de Redaelli.

127    Au demeurant, il doit être relevé que les indications qui précèdent n’ont pas eu l’effet allégué par Redaelli, qui fait valoir que sa contribution a permis à la Commission de considérer qu’ITC, Itas et CB ont participé au club Zurich pendant les années 1993-1995.

128    S’agissant de CB, il ressort de la décision attaquée que celle-ci a contesté avoir pris part au club Zurich ou à un arrangement paneuropéen. Selon elle, Redaelli se serait « autodésignée » représentante des autres producteurs italiens à cet égard. Au vu de cette contestation et même si elle a relevé, en considération d’informations fournies par ITC dans sa demande de clémence, que CB avait assisté, ainsi que Redaelli, Itas, ITC, Tréfileurope Italia, DWK et Tycsa, à une réunion du club Italia avec les producteurs du club Zurich, qui s’est tenue le 24 février 1993 et au cours de laquelle ont été discutés non seulement les prix et les ventes sur le marché italien, mais aussi la consommation d’APC sur les autres marchés européens, la Commission a préféré considérer que CB n’a commencé à participer à l’infraction que le 23 janvier 1995 en raison notamment du projet d’accord découvert par elle lors des inspections organisées les 19 et 20 septembre 2002 (voir point 123 ci-dessus).

129    Ce n’est donc qu’à partir du 23 janvier 1995, sur la base d’éléments de preuve autres que ceux invoqués par Redaelli au titre de sa demande de clémence, que la participation de CB à l’entente a été établie (voir décision attaquée, notamment considérants 155, 165, 166 et 849 à 855).

130    S’agissant d’Itas, la décision attaquée fait également état du fait que cette entreprise a contesté avoir participé au club Zurich au cours des années 1993-1994 parce qu’elle n’aurait obtenu les certifications nécessaires qu’en 1995 pour l’Allemagne et par la suite pour d’autres pays. À la différence de CB et pour les raisons exposées dans la décision attaquée, la Commission a considéré que la participation d’Itas à l’infraction était établie à compter de la participation de cette entreprise à la réunion du club Italia avec les producteurs du club Zurich du 24 février 1993. À cet égard, la Commission a également relevé la participation d’Itas, comme celle de Redaelli et d’ITC, à une réunion du club Italia du 7 mai 1993, pour laquelle ITC a fourni des informations dans sa demande de clémence. Cette réunion avait notamment porté sur quatre propositions à l’égard des producteurs paneuropéens. S’il s’avère que la décision attaquée indique par ailleurs qu’Itas était « représentée par Redaelli aux réunions du club Zurich » qui ont suivi la réunion du 24 février 1993, il ressort de ce qui précède qu’une telle indication peut parfaitement être déduite des éléments de preuve communiqués par DWK et Nedri avant la date de la contribution effectuée par Redaelli le 15 juin 2007 (voir décision attaquée, notamment considérants 155, 163, 164 et 856 à 861).

131    Dans une telle situation, compte tenu du fait qu’elle disposait de plusieurs éléments pour établir le début de la participation d’Itas à l’infraction, dont les informations fournies par ITC dans sa demande de clémence qui a fourni un compte rendu manuscrit de la réunion du club Italia avec les producteurs du club Zurich du 24 février 1993, qui sont essentielles, et les informations transmises par DWK et Nedri sur le rôle joué par Redaelli au sein du club Zurich, la Commission était en droit de considérer que la contribution effectuée par Redaelli le 15 juin 2007 n’apportait pas une valeur ajoutée significative par rapport aux éléments de preuve qui étaient déjà en sa possession.

132    S’agissant d’ITC, il ressort de la décision attaquée que cette entreprise a approuvé le contenu de la communication des griefs qui lui a été adressée en confirmant qu’elle était « en harmonie avec les déclarations et les récits fournis dans la demande de clémence et les déclarations subséquentes » et donc qu’elle avait participé directement à l’entente, en particulier au club Zurich, au club Italia et à l’intégration des producteurs italiens au sein du club Europe du 24 février 1993 au 19 septembre 2002 (voir décision attaquée, notamment considérants 841 et 843).

133    Ici aussi, et même si la décision attaquée relève aux considérants 153 et 155 qu’ITC n’a pas contesté être représentée par Redaelli au sein du club Zurich, la Commission disposait d’autres éléments, dont ceux communiqués par ITC elle-même, mais aussi ceux communiqués par DWK et Nedri, pour établir le début de la participation d’ITC à l’infraction. Devant une telle situation, la Commission était en droit de considérer que la contribution effectuée par Redaelli le 15 juin 2007 ne satisfaisait pas aux conditions définies par la communication sur la clémence pour apporter une valeur ajoutée significative par rapport aux éléments de preuve qui étaient déjà en sa possession.

134    Au vu des arguments des parties et des documents transmis, force est de constater que la Commission était bien en mesure de considérer que, pour cet aspect de l’infraction, elle disposait déjà tant sur le plan matériel que sur le plan chronologique, d’éléments de preuve suffisants pour établir les faits en question. Les éléments de preuve invoqués par Redaelli à cet égard ne présentaient donc pas la valeur ajoutée significative requise pour qu’elle puisse bénéficier d’une réduction du montant de l’amende au titre de la communication sur la clémence.

–       Autres aspects de l’infraction

135    Redaelli soutient que sa contribution a été l’une des premières à confirmer l’existence du système de contrôle de l’entente et à en fournir une description complète. Cela aurait été fait dès le 21 octobre 2002 dans sa réponse à une demande de renseignements et dans sa demande de clémence du 20 mars 2003.

136    Force est cependant de constater, au vu des raisons évoquées dans la décision attaquée et compte tenu des éléments fournis à cet égard par la Commission, que celle-ci disposait déjà de nombreux éléments de preuve à la suite des inspections réalisées les 19 et 20 septembre 2002, de la demande de clémence d’ITC du 21 septembre 2002 et de celle de Tréfileurope du 4 novembre 2002 (voir décision attaquée, considérants 450 à 455).

137    En particulier, sur le plan chronologique, il doit être rappelé que, dans sa réponse du 21 octobre 2002 à une demande de renseignements, Redaelli s’est limitée à faire référence à un commercial, M. Pr., qui était chargé de collecter des données sur l’évolution des ventes des différents producteurs. Or, à ce moment-là, la Commission disposait notamment de documents contemporains des faits préparés par cette personne, découverts lors des inspections réalisées les 19 et 20 septembre 2002, qui faisaient clairement état des informations mentionnées par Redaelli.

138    Dans la demande de clémence du 20 mars 2003, Redaelli donne plus de détails sur le rôle joué par M. Pr., en indiquant notamment qu’il pouvait déterminer les achats effectués par chacun des clients des producteurs concernés. Son rôle n’aurait plus été seulement de contrôler les quantités vendues, mais de déterminer le potentiel en matière de clientèle. S’il est vrai que cette seconde partie du rôle joué par M. Pr. est mentionnée dans la décision attaquée au considérant 452, où il est indiqué que les informations à cet égard proviennent de Redaelli, il n’en demeure pas moins que l’essentiel du rôle joué par cette personne était bien, comme l’affirme la Commission en évoquant les documents découverts lors des inspections, un rôle de surveillance et de contrôle.

139    Les éléments de preuve invoqués par Redaelli à cet égard ne présentaient donc pas la valeur ajoutée significative requise pour qu’elle puisse bénéficier d’une réduction du montant de l’amende au titre de la communication sur la clémence.

140    Par ailleurs, Redaelli fait valoir que sa contribution a été la première à confirmer l’existence et le contenu de plusieurs réunions, dont celles du club Italia du 1er février 2002, du 1er mars 2002 et du 26 août 2002, et celles du club Europe des 28 et 29 février 2000, des 8 et 9 mai 2000, du 15 mai 2001, du 4 septembre 2001 et du 24 juillet 2002.

141    À cet égard également, il ressort du dossier que la Commission disposait globalement de nombreuses informations sur la période concernée (2000-2002) tant au regard du club Italia qu’au regard du club Europe (voir décision attaquée, annexes 2 et 3 relatives aux descriptions des réunions mentionnées). En effet, la contribution évoquée par Redaelli sur ce point n’ajoute rien ou très peu à la capacité de la Commission d’établir les faits en question, qu’il s’agisse de la période concernée, des clubs visés ou même du contenu des réunions évoquées par Redaelli, pour lesquelles la Commission disposait déjà d’éléments de preuve découverts lors des inspections ou fournis en temps utile par d’autres entreprises, comme ITC, CB, Tréfileurope, Nedri ou DWK, ou était en mesure de considérer que les éléments fournis par Redaelli n’établissaient pas la nature anticoncurrentielle de la réunion évoquée [telle la réunion alléguée des 8 et 9 mai 2000, qui ne s’est avérée être qu’une réunion de l’Eurostress Information Service (ESIS), une des associations professionnelles de l’APC].

142    La contribution de Redaelli à propos des réunions susmentionnées ne saurait donc être considérée comme apportant une valeur ajoutée significative au sens de la communication sur la clémence.

143    Enfin, Redaelli invoque aussi le fait d’avoir été la première à confirmer ce qui est brièvement mentionné dans la demande de clémence à propos du lien entre l’accord de fixation de quotas au niveau européen (club Zurich) et l’accord au niveau italien (club Italia) ; d’avoir été la première à décrire la dynamique du club Italia au début des années 1990 en ce qui concerne, en particulier, l’abandon de la pratique de fixation de quotas à la suite du refus d’ITC de se joindre à cette initiative ; d’avoir eu une contribution significative en ce qui concerne la date du début de la participation de Tréfileurope au club Italia et d’être à l’origine de la distinction faite dans la décision attaquée entre clients exclusifs et clients communs pour ce qui est du club Italia ou en ce qui concerne les rencontres paneuropéennes faites « en marge des réunions de l’‘ESIS’ ».

144    Sur ces points, force est de constater, comme cela a été exposé à juste titre par la Commission en réponse aux mesures d’organisation de la procédure et aux mesures d’instruction décidées par le Tribunal, que les éléments de preuve invoqués à ce propos par Redaelli n’ont pas été déterminants ou portent sur des aspects mineurs de l’infraction qui ne sont pas pertinents en tant que tels au vu des éléments de preuve qui étaient déjà en la possession de la Commission, lesquels provenaient de plusieurs sources se corroborant les unes les autres.

145    Ainsi, en ce qui concerne le lien entre le club Zurich et le club Italia, si la partie de la décision attaquée citée par Redaelli, à savoir les considérants 401 et suivants, fait effectivement état de documents produits par Redaelli, il ressort également du dossier que d’autres documents ont été saisis lors des inspections ou bien ont été communiqués par ITC, notamment le document le plus pertinent à cet égard, à savoir l’accord du 5 décembre 1995 entre Redaelli, CB, Itas et ITC.

146    De même, s’agissant de la description de la dynamique du club Italia au début des années 1990, il y a lieu de rappeler que la Commission n’a fait débuter la participation de Redaelli, CB, Itas et ITC au club Italia qu’à compter du 23 janvier 1995, date du projet d’accord le plus ancien en possession de la Commission à la suite des inspections (voir décision attaquée, considérants 402 et 456). Les informations communiquées par Redaelli sur la situation antérieure n’ont donc pas eu d’incidence sur la capacité de la Commission d’établir les faits. Quant à la date du début de la participation de Tréfileurope au club Italia, il ressort clairement du considérant 460 de la décision attaquée que la Commission disposait déjà d’éléments de preuve suffisants pour fixer cette date au 3 avril 1995, les documents visés à cet égard ayant été fournis par ITC. En ce qui concerne la distinction faite dans la décision attaquée entre clients exclusifs et clients communs, il ressort tout aussi distinctement des considérants 445 et 447 de la décision attaquée que la Commission connaissait déjà cette distinction par le biais des documents découverts lors des inspections et des observations faites par Tréfileurope.

147    Enfin, pour ce qui concerne les références faites aux rencontres paneuropéennes faites « en marge des réunions de l’‘ESIS’ », une telle indication ressortait déjà des documents fournis par le Bundeskartellamt au stade initial de la procédure et de documents découverts lors des inspections.

c)     Conclusion

148    Il ressort de ce qui précède que la première branche du premier moyen doit être rejetée comme non fondée dans son ensemble.

3.     Sur la violation du principe de protection de la confiance légitime

149    En substance, Redaelli fait valoir que la Commission a violé le principe de protection de la confiance légitime, parce qu’elle n’aurait pas examiné sa demande de clémence au regard des critères définis dans la communication sur la clémence. Quand elle a rejeté cette demande, le 19 septembre 2008, la Commission aurait été en réalité influencée par sa nouvelle, et plus sévère, communication sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 2006, C 298, p. 17). Or, pendant la période d’application de la communication sur la clémence et comme cela ressortirait de décisions adoptées pour sanctionner d’autres cartels, la Commission aurait été plus disposée à accorder une réduction du montant de l’amende à des demandes principalement fondées sur des déclarations et le seuil de la « valeur ajoutée » aurait été plus bas que celui utilisé par la suite.

150    Toutefois, contrairement à ce que soutient Redaelli et ainsi que cela ressort des points 76 à 148 ci-dessus, la Commission, en statuant sur la demande de clémence de Redaelli, a fait une exacte application des critères définis dans la communication sur la clémence.

151    Par ailleurs, Redaelli ne peut également se contenter d’invoquer des solutions dégagées par la Commission dans d’autres affaires pour demander à en bénéficier sans, pour cela, exposer le moindre élément permettant d’établir la similitude des situations factuelles au regard tant des infractions en cause que des éléments présentés au titre des demandes de clémence par les entreprises concernées.

152    En tout état de cause, à supposer même qu’il en ait été tenu compte, les précisions apportées sur la notion de « valeur ajoutée » par la communication sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes adoptée en 2006 ne sont guère de nature à mettre en cause la prétendue confiance légitime invoquée par Redaelli. En matière de clémence, il ne saurait y avoir de droit de bénéficier d’une réduction du montant de l’amende au seul motif que des déclarations ou des éléments de preuve ont été fournis à la Commission.

153    Dans l’une et l’autre de ces communications, il importe en effet de déterminer la valeur ajoutée significative de tels éléments, au vu notamment des éléments déjà en la possession de la Commission, et c’est cette valeur ajoutée qui fonde la décision d’accorder ou non une réduction du montant de l’amende au titre de la clémence.

154    De même, dans l’une et l’autre de ces communications, il est expressément reconnu que les éléments de preuve qui datent de la période à laquelle les faits se rapportent ont une valeur qualitative plus élevée que les éléments de preuve établis ultérieurement.

155    Il ressort de ce qui précède que la deuxième branche du premier moyen doit être rejetée comme non fondée.

4.     Sur la violation du principe d’égalité de traitement

156    Redaelli fait valoir que la Commission a violé le principe d’égalité de traitement en accordant des réductions du montant des amendes de 5 % à des entreprises, Emesa/Galycas et WDI, dont les collaborations auraient été plus modestes.

157    En ce qui concerne Emesa et Galycas, Redaelli relève que la réduction a été accordée sur la base des informations fournies en réponse aux demandes d’informations de la Commission. Dans leur contribution, Emesa et Galycas n’auraient fait qu’admettre l’existence de rencontres anticoncurrentielles entre des producteurs européens et des producteurs espagnols et portugais en marge de réunions d’associations professionnelles, pour lesquelles elles ont également présenté deux listes de réunions répertoriant la date, le lieu et le nom des participants « sans fournir aucune description de leur contenu et sans être confortées par aucune preuve documentaire » (voir décision attaquée, considérant 1095). Tout en reconnaissant le caractère limité de cette contribution, trop vague pour constituer une preuve de l’infraction en tant que telle, la Commission a néanmoins considéré que celle-ci représentait une valeur ajoutée significative dans la mesure où elle accroissait sa capacité de démontrer certains faits constitutifs de l’entente si elle était confirmée par d’autres éléments de preuve.

158    En comparaison, la contribution fournie par Redaelli serait bien plus significative. Avant même de déposer une demande formelle de clémence avec d’autres éléments de preuve, Redaelli aurait, dès le 21 octobre 2002, soit avant Emesa et Galycas, admis que des réunions anticoncurrentielles avaient eu lieu entre producteurs européens et italiens. Redaelli aurait également fourni une description de ces réunions et une liste, indiquant la date, le lieu et les participants, plus détaillée que celle fournie par Emesa et Galycas. Enfin, les déclarations de Redaelli auraient été utilisées par la Commission en ce qui concerne CB, Itas et Tréfileurope pour leur imputer la responsabilité d’une partie de l’entente.

159    En ce qui concerne WDI, il ressortirait de la décision attaquée que la contribution de cette entreprise était très limitée et ne portait pas sur des questions décisives. La déclaration de WDI du 19 mai 2004 contiendrait les premières informations sur certains éléments d’organisation du club Zurich et sur le fait que ce club suivait l’exemple italien. WDI aurait également été la première à confirmer les déclarations de DWK sur l’existence d’une société responsable de la collecte de données pour le club Zurich et le club Europe et la première à confirmer les déclarations de Nedri sur le système de compensation du club Zurich. Il s’agirait de simples déclarations, qui ne seraient pas assorties d’éléments écrits probants.

160    En comparaison, la contribution de Redaelli ne paraîtrait en aucun cas inférieure à celle de WDI. Redaelli aurait été, elle aussi, la première à fournir des informations sur certains aspects de l’entente (notamment son rôle comme représentant de plusieurs entreprises italiennes et la situation du club Italia au début des années 1990) et la première à confirmer les déclarations ou les documents fournis par d’autres entreprises (notamment ceux relatifs au système de contrôle, au lien entre le club de Zurich et le club Italia, ainsi que ceux relatifs à des rencontres paneuropéennes et italiennes). En outre, Redaelli aurait contribué à l’enquête avec une série de renseignements, d’informations et d’explications, dont la demande de WDI serait dépourvue.

161    À cet égard, il convient de relever qu’il ressort d’une jurisprudence constante que le principe d’égalité de traitement est violé lorsque des situations comparables sont traitées de manière différente ou que des situations différentes sont traitées de manière identique, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (arrêts du 13 décembre 1984, Sermide, 106/83, Rec, EU:C:1984:394, point 28, et du 5 octobre 2011, Romana Tabacchi/Commission, T‑11/06, Rec, EU:T:2011:560, point 102).

162    En l’espèce, aucun élément présenté par Redaelli ne permet de conclure à l’existence d’une inégalité de traitement entre elle et Emesa/Galycas ou WDI.

163    D’une part, Redaelli n’expose pas d’arguments susceptibles de remettre en cause la valeur ajoutée significative reconnue par la Commission aux contributions faites par Emesa/Galycas et WDI lors de la procédure administrative.

164    En effet, c’est à la suite de l’appréciation de la valeur intrinsèque et relative des différentes déclarations ou documents présentés par Emesa/Galycas et WDI que la Commission a conclu, comme cela est expliqué dans la décision attaquée, qu’il était justifié de réduire de 5 % le montant de l’amende infligée à chacune de ces entreprises. Or, les arguments de Redaelli ne portent pas sur cette valeur ajoutée reconnue par la Commission mais sur la valeur ajoutée qui aurait dû être accordée à sa propre contribution, au motif que sa valeur ajoutée serait « bien plus significative » que celle reconnue à Emesa/Galycas ou ne paraîtrait « en aucun cas inférieure » à celle reconnue à WDI.

165    À cet égard, il ressort de la décision attaquée que la valeur ajoutée significative reconnue par la Commission aux contributions d’Emesa/Galycas et de WDI satisfait aux conditions énoncées aux points 21 à 23 de la communication sur la clémence. En particulier, les considérants 1094 et 1096 de la décision attaquée ainsi que son annexe 4 permettent de constater le rôle joué par la contribution faite par Emesa/Galycas, laquelle constituait le premier élément permettant d’établir le contenu infractionnel de plusieurs réunions du club España. De même, la Commission expose au considérant 1113 de la décision attaquée les raisons pour lesquelles elle a été amenée à considérer que la contribution de WDI avait permis de clarifier plusieurs questions relatives notamment à l’organisation du club Zurich.

166    D’autre part, force est de constater que les arguments présentés par Redaelli ne permettent également pas de comparer utilement la valeur ajoutée significative qu’elle allègue avec la valeur ajoutée significative reconnue par la Commission en ce qui concerne les contributions d’Emesa/Galycas et de WDI.

167    Si, sur le plan formel, les contributions sont similaires étant donné qu’elles ont essentiellement été faites sous la forme de déclarations, du fait des particularités de la participation de chacune de ces entreprises à l’entente, les raisons pour lesquelles la Commission est arrivée à la conclusion susmentionnée en ce qui concerne Emesa/Galycas et WDI diffèrent profondément d’une entreprise à l’autre. Emesa/Galycas est une entreprise espagnole qui a participé notamment au club Europe et au club España, WDI une entreprise allemande qui a participé au club Europe et Redaelli une entreprise italienne qui a participé au club Europe et au club Italia. Leurs activités et leur degré d’implication dans l’entente, tels qu’ils sont rapportés dans la décision attaquée au vu notamment des éléments qui étaient en la possession de la Commission à ce moment, divergent d’une manière telle qu’il n’est pas possible de comparer la situation de l’une à la situation d’une autre.

168    En conséquence, si Redaelli s’est vu refuser une réduction du montant de l’amende au titre de la clémence, ce n’est pas en raison de la valeur ajoutée significative reconnue par la Commission aux contributions faites par Emesa/Galycas et par WDI, mais parce que sa propre contribution était dépourvue de valeur ajoutée significative au sens des points 21 à 23 de la communication sur la clémence.

169    Il ressort de ce qui précède que la troisième branche du premier moyen doit être rejetée ainsi que, par voie de conséquence, l’intégralité de ce moyen.

B –  Sur le moyen relatif à la durée de la participation à l’entente

170    Dans le deuxième moyen, Redaelli fait valoir en substance que la Commission n’a pas prouvé l’existence de l’infraction pour la période allant de 1984 à 1992 et demande, en conséquence, au Tribunal d’annuler cette partie de la décision et de réduire le montant de l’amende en conséquence.

171    À cet égard, Redaelli rappelle que la procédure est née de la demande de clémence de DWK et que d’autres entreprises ont déposé de telles demandes par la suite. À son avis, ces déclarations et les aveux qu’elles contiennent ont conduit la Commission à perdre de vue la nécessité de rassembler des preuves suffisantes pour établir l’existence et la durée de l’entente au regard de chaque entreprise sanctionnée. En particulier, aucun demandeur de clémence n’aurait été en mesure de reconstituer avec précision les faits et les responsabilités pour la période antérieure aux années 1990. Les seuls éléments fournis sur ce point seraient des références sommaires et générales à l’existence de l’entente à partir des années 1980 sans la moindre preuve écrite correspondante. Pour étayer ces affirmations, Redaelli évoque notamment les passages pertinents de la demande d’immunité présentée par DWK et des demandes de clémence déposées par ITC, Nedri, Emesa, Tréfileurope, ArcelorMittal, WDI et CB.

172    En ce qui concerne ses propres déclarations, Redaelli précise toutefois qu’elle ne veut rien retirer à ce qui a été déclaré à la Commission au sujet de son implication dans l’entente et du fait que, vraisemblablement, cette entente existait dans les années 1980. Elle rappelle cependant qu’elle avait indiqué à la Commission ne pas être à même de reconstituer avec précision les événements survenus 25 ans plus tôt et, surtout, que, à cette époque, des phases de concertation avaient succédé à des phases d’interruption. En conséquence, Redaelli soutient qu’il n’est pas possible de savoir, pour la période allant de 1984 à 1992, quelles entreprises se sont rencontrées, à quelles dates et en quels lieux, ni quel était l’objet de la coordination et son fonctionnement. Il ne serait pas non plus possible de savoir si, pendant cette période, ce qui serait pourtant plus que plausible, les tentatives de concertation, qui ont certainement été déployées, ont échoué, laissant le champ libre à des phases d’interruption complète de l’entente.

173    Dès lors, Redaelli demande au Tribunal s’il suffit, aux fins de la démonstration de l’existence d’une entente, que la Commission se contente de déclarations certes convergentes mais dépourvues de toute précision, parfaitement générales, indéterminées et fragmentaires, avec pour conséquence que l’existence d’une pratique anticoncurrentielle finit par être connue, sans que soient connues ses modalités concrètes de fonctionnement, les rôles tenus par chacun, le moment où cette pratique a commencé et, surtout, si elle n’a pas été à un moment interrompue. La Commission devrait avoir l’obligation de prouver l’existence de l’entente sur la base d’un faisceau d’éléments probants graves, précis et concordants, tant en termes quantitatifs qu’en termes qualitatifs.

1.     Rappel du contenu de la décision attaquée

174    La participation de Redaelli à l’entente envisagée par l’article 1er de la décision attaquée a été retenue pour la période allant du 1er janvier 1984 au 19 septembre 2002, ladite décision attaquée indiquant ce qui suit :

« (845)      […] Redaelli […] a participé directement à l’entente du 1er janvier 1984 au 19 septembre 2002, et en particulier au club Zurich, y compris initialement à des réunions de crise du club Zurich et à l’accord du Sud, au club Italia et aux discussions au cours de la période d’expansion du club Europe. Redaelli reconnaît avoir participé au club Zurich, au club Italia et à certaines discussions durant la période d’expansion du club Europe. »

175    En ce qui concerne le club Zurich, la Commission a exposé ce qui suit aux considérants 136 à 138 de la décision attaquée, avant d’indiquer au considérant 139 que Redaelli avait participé à ce club depuis ses débuts en 1984 :

« (136)      La Commission dispose de preuves documentaires, confirmées par des déclarations de DWK, WDI, Nedri, Emesa, CB, Tréfileurope, ITC et Redaelli, que les concurrents se sont réunis trimestriellement, sur la période allant, au minimum, du 1er janvier 1984 jusqu’en janvier 1996, dans le but de coordonner leur comportement sur le marché, de fixer des quotas, d’échanger des informations professionnelles sensibles, de partager la clientèle et de discuter des prix à atteindre. Il est communément fait référence à ces arrangements sous la dénomination de ‘Club Zurich’, étant donné que les réunions se tenaient initialement à Zurich (du moins jusqu’à la fin des années 1980 ; à partir des années 1990, elles se sont tenues essentiellement à Düsseldorf). Les déclarations soumises contiennent des informations auto-incriminantes et ont été soumises indépendamment par les entreprises dans le contexte, pour la plupart d’entre elles, de la communication sur la clémence de 2002. Ces déclarations d’entreprise se corroborent en ce qui concerne les faits présentés par la Commission. Si elles ne corroborent pas tellement la période du club Zurich des accords paneuropéens, les preuves documentaires étayent en revanche bien les périodes ultérieures. La Commission considère dès lors que les déclarations sont fiables.

(137)  La date de début du 1er janvier 1984 découle en particulier de déclarations de plusieurs entreprises (DWK ‘vers 1980’, ITC ‘mai 1980’ et Redaelli ‘1981 ou 1982’, Nedri ‘1983’, CB ‘avant 1980’ et WDI ‘début des années 1980’ et ‘vers 1982’). Tandis que la Commission a pu conclure, sur la base de ces déclarations, que le club Zurich a débuté au plus tard en 1983, se fondant sur le compte rendu des réunions du 11 mai 1994 (‘club 84’) et des 8/9 juin 1994 (‘début ± 1983’), elle retient la date du 1er janvier 1984, telle qu’elle est mentionnée dans les notes Emesa […], comme date de début.

(138)       WDI déclare en outre qu’au moment de fixer leur accord, les membres du club Zurich ont été inspirés par ‘l’accord qui existait déjà à l’époque et avait été exécuté avec succès entre les producteurs italiens d’APC (concernant l’attribution de marchés et la fixation de quotas)’, révélant l’existence d’un lien étroit entre le club Zurich et le club Italia […] depuis le début. »

176    En ce qui concerne le club Italia, même si la Commission a retenu la date du 23 janvier 1995 comme date marquant le début de la participation de Redaelli à ce club (voir décision attaquée, considérants 456 à 459), elle a indiqué aussi, dans la décision attaquée, disposer d’éléments relatifs aux années 1980, en relevant ce qui suit :

« (385)      De nombreux documents contemporains et déclarations corroboratives d’ITC, Redaelli, Itas, CB, SLM, Tréfileurope et DWK montrent qu’entre au moins le début 1995 et les dates auxquelles la Commission a mené ses inspections, à savoir les 19 et 20 septembre 2002, parallèlement aux arrangements paneuropéens […], CB, ITC, Itas, Redaelli, Tréfileurope et Tréfileurope Italia, Tycsa, SLM, Trame et les producteurs paneuropéens DWK et Austria Draht ont participé à des réunions anticoncurrentielles […].

(386)       Les preuves documentaires et les déclarations corroboratives d’ITC et de Redaelli révèlent en outre l’existence d’arrangements antérieurs (datant de la période de 1979 à 1994) entre Redaelli, ITC, Falck (division reprise par Tréfileurope Italia), AFT (dénommée ultérieurement Tréfileurope Italia), CB et Itas […]. »

177    En particulier, s’agissant de ce que la Commission nomme les « arrangements antérieurs (datant de la période de 1979 à 1994) », la décision attaquée indique aux considérants 392 à 399 ce qui suit :

« (392)      À partir de 1983 au moins jusqu’en 1994, parallèlement aux arrangements du club Zurich au niveau paneuropéen (voir la section 9.1.1), Redaelli, ITC, Falck, AFT, CB et Itas se sont réunies à des points variables dans le temps concernant le marché italien de l’APC et ont discuté des ventes et ont convenu des prix, des quotas et du partage de la clientèle en Italie. Ceci est confirmé par WDI dans sa déclaration sur le club Zurich au considérant 138.

(393)      Redaelli a également confirmé que bien avant 1995, Redaelli, CB, Itas et Falck se réunissaient chaque mois dans le cadre de l’association Assider afin de discuter des volumes de vente. Un accord de coordination tacite, basé sur l’attribution de quotas de vente à chaque concurrent, existait.

(394)      Enfin, ITC a également confirmé l’existence de contacts anticoncurrentiels. À cet égard, la première réunion dont se souvient M. [V. A.] (ITC) a eu lieu le 15 septembre 1979 probablement dans les installations de Falck. Selon ITC, la réunion n’a pas eu de suivi immédiat, étant donné qu’ITC n’a pas accepté les propositions des autres entreprises.

(395)      Au cours de la période d’avril à octobre 1983, une série de réunions a eu lieu chez Falck afin de conclure un nouvel accord concernant le marché italien de façon à s’adapter aux développements du marché.

(396)      Dans ce cadre, ITC a fourni un document dactylographié daté du 27 avril 1983 (Milan), contenant un projet d’accord d’attribution de quotas entre ‘Deriver (par la suite Redaelli), Redaelli et Falck’. Ce document comprend trois annexes très détaillées, notamment : 1) arrangements en matière de contrôle des quotas en vertu desquels des vérifications mensuelles avaient lieu au sein des installations des entreprises concernées et étaient exécutées par un inspecteur externe qui devait par la suite envoyer un rapport et sa facture pour les contrôles fournis à toutes les entreprises concernées. Le nom de M. [Pr.], en tant qu’inspecteur, est écrit à la main sur le document […] ; 2) les prix et conditions de vente, y compris les prix minimums et les suppléments pour les ventes en Sicile et en Sardaigne ; 3) les règles à suivre au cas où les quotas seraient dépassés (un système de compensation trimestriel) : l’entreprise dépassant ses quotas était obligée d’acheter la ‘différence’ au prix convenu entre les entreprises qui n’avaient pas atteint leurs quotas respectifs. Toutes les pratiques anticoncurrentielles ci-dessus sont appliquées à partir, encore une fois, de 1995 […].

(397)      Au cours de la période de 1990-1994, plusieurs réunions ont eu lieu entre les producteurs italiens Redaelli, ITC, Falck – jusqu’en 1992 –, CB, Trame et SLM durant lesquelles les participants échangeaient les chiffres de vente, proposaient des quotas de vente, y compris des quotas d’exportation (par exemple, réunion du 24 avril 1991), négociaient l’attribution de clientèle et fixaient des prix minimums. Ceci est confirmé par des documents contemporains (voir l’annexe 3 de la décision). ITC mentionne des réunions qui se sont tenues au minimum les 12 décembre 1990, 19 décembre 1990, 15 février 1991, 24 avril 1991, 24 février 1993, 7 mai 1993, 12 octobre 1993, 14 mars 1994, 29 mars 1994, 11 avril 1994, 26 avril 1994 et septembre 1994. La discussion concernant les quotas d’exportation devait être interprétée à la lumière des discussions simultanées qui se tenaient sur les quotas (y compris en ce qui concerne l’Italie) au sein du club Zurich […].

(398)      Dans ce cadre, on peut mentionner spécifiquement la réunion du 24 février 1993 entre Redaelli, ITC, CB, Itas, AFT (plus tard Tréfileurope Italia), DWK et Tycsa. Au cours de cette réunion, les participants ont discuté des prix et des quotas sur les marchés italiens et échangé des informations sur les autres marchés européens (France, Espagne, Allemagne, Autriche, Belgique, Pays-Bas), ce qui révèle l’existence d’une interaction étroite entre les participants du club Zurich et les participants du club Italia. M. [Pr.] était également présent en tant qu’inspecteur.

(399)      Cette réunion était préparée dans la matinée par les producteurs italiens seuls. Selon Redaelli, au début des années 1990, les producteurs qui avaient fait partie d’Assider (Redaelli, CB, Itas, Falck) avaient abandonné la pratique de fixation de quotas, en particulier parce qu’ITC n’aurait pas accepté d’adhérer à cette initiative. »

2.      Rappel des principes

a)     Preuve de l’existence et de la durée de l’infraction

178    Il convient de rappeler qu’il résulte de la jurisprudence qu’il appartient à la Commission de prouver non seulement l’existence de l’entente, mais aussi sa durée. Plus particulièrement, en ce qui concerne l’administration de la preuve d’une infraction à l’article 101, paragraphe 1, TFUE, la Commission doit rapporter la preuve des infractions qu’elle constate et établir les éléments de preuve propres à démontrer, à suffisance de droit, l’existence des faits constitutifs d’une infraction. L’existence d’un doute dans l’esprit du juge doit profiter à l’entreprise destinataire de la décision constatant l’infraction. Le juge ne saurait donc conclure que la Commission a établi l’existence de l’infraction en cause à suffisance de droit si un doute subsiste encore dans son esprit sur cette question, notamment dans le cadre d’un recours tendant à l’annulation ou à la réformation d’une décision infligeant une amende. En effet, dans cette dernière situation, il est nécessaire de tenir compte du principe de présomption d’innocence, lequel fait partie des droits fondamentaux qui sont protégés dans l’ordre juridique de l’Union et a été consacré par l’article 48, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux. Eu égard à la nature des infractions en cause ainsi qu’à la nature et au degré de sévérité des sanctions qui s’y rattachent, le principe de présomption d’innocence s’applique notamment aux procédures relatives à des violations des règles de concurrence applicables aux entreprises susceptibles d’aboutir à la prononciation d’amendes ou d’astreintes. Ainsi, il est nécessaire que la Commission fasse état de preuves précises et concordantes pour fonder la ferme conviction que l’infraction alléguée a été commise (voir arrêt du 17 mai 2013, Trelleborg Industrie et Trelleborg/Commission, T‑147/09 et T‑148/09, Rec, EU:T:2013:259, point 50 et jurisprudence citée).

179    Il est également de jurisprudence constante que chacune des preuves apportées par la Commission ne doit pas nécessairement répondre à ces critères en ce qui concerne chaque élément de l’infraction. Il suffit que le faisceau d’indices invoqué par l’institution, apprécié globalement, réponde à cette exigence (voir arrêt Trelleborg Industrie et Trelleborg/Commission, point 178 supra, EU:T:2013:259, point 51 et jurisprudence citée).

180    Par ailleurs, il est usuel que les activités que les accords anticoncurrentiels comportent se déroulent de manière clandestine, que les réunions se tiennent secrètement et que la documentation qui y est afférente soit réduite au minimum. Il s’ensuit que, même si la Commission découvre des pièces attestant de manière explicite une prise de contact illégitime entre des opérateurs, telles que les comptes rendus de réunions, celles-ci ne seront normalement que fragmentaires et éparses, de sorte qu’il se révèle souvent nécessaire de reconstituer certains détails par des déductions. Dès lors, dans la plupart des cas, l’existence d’une pratique ou d’un accord anticoncurrentiel doit être inférée d’un certain nombre de coïncidences et d’indices qui, considérés ensemble, peuvent constituer, en l’absence d’une autre explication cohérente, la preuve d’une violation des règles de concurrence (voir arrêt Trelleborg Industrie et Trelleborg/Commission, point 178 supra, EU:T:2013:259, point 52 et jurisprudence citée).

181    En outre, la jurisprudence exige que, en l’absence d’éléments de preuve susceptibles d’établir directement la durée d’une infraction, la Commission se fonde, au moins, sur des éléments de preuve se rapportant à des faits suffisamment rapprochés dans le temps, de façon qu’il puisse être raisonnablement admis que cette infraction s’est poursuivie de façon ininterrompue entre deux dates précises (voir arrêt Trelleborg Industrie et Trelleborg/Commission, point 178 supra, EU:T:2013:259, point 53 et jurisprudence citée).

b)     Notion d’infraction unique

182    Dans la plupart des cas, l’existence d’une pratique ou d’un accord anticoncurrentiel doit être inférée d’un certain nombre de coïncidences et d’indices qui, considérés ensemble, peuvent constituer, en l’absence d’une autre explication cohérente, la preuve d’une violation des règles de concurrence. De tels indices et coïncidences permettent, lorsqu’ils sont évalués globalement, de révéler non seulement l’existence de comportements ou d’accords anticoncurrentiels, mais également la durée d’un comportement anticoncurrentiel continu et la période d’application d’un accord conclu en violation des règles de concurrence (voir arrêt Trelleborg Industrie et Trelleborg/Commission, point 178 supra, EU:T:2013:259, point 57 et jurisprudence citée).

183    Par ailleurs, une telle violation peut résulter non seulement d’un acte isolé, mais également d’une série d’actes ou bien encore d’un comportement continu. Cette interprétation ne saurait être remise en cause au motif qu’un ou plusieurs éléments de cette série d’actes ou de ce comportement continu pourraient également constituer en eux-mêmes et pris isolément une violation des règles de concurrence. Lorsque les différentes actions s’inscrivent dans un « plan d’ensemble », en raison de leur objet identique faussant le jeu de la concurrence à l’intérieur du marché commun, la Commission est en droit d’imputer la responsabilité de ces actions en fonction de la participation à l’infraction considérée dans son ensemble (voir arrêt Trelleborg Industrie et Trelleborg/Commission, point 178 supra, EU:T:2013:259, point 58 et jurisprudence citée).

184    S’agissant de l’absence de preuve quant à l’existence d’un accord au cours de certaines périodes déterminées ou, tout au moins, quant à sa mise en œuvre par une entreprise au cours d’une période donnée, il convient de rappeler que le fait que la preuve de l’infraction n’a pas été apportée pour certaines périodes déterminées ne fait pas obstacle à ce que l’infraction soit regardée comme constituée durant une période globale plus étendue que celles-ci, dès lors qu’une telle constatation repose sur des indices objectifs et concordants. Dans le cadre d’une infraction s’étendant sur plusieurs années, le fait que les manifestations de l’entente interviennent à des périodes différentes, pouvant être séparées par des laps de temps plus ou moins longs, demeure sans incidence sur l’existence de cette entente, pour autant que les différentes actions qui font partie de cette infraction poursuivent une seule finalité et s’inscrivent dans le cadre d’une infraction à caractère unique et continu (voir arrêt Trelleborg Industrie et Trelleborg/Commission, point 178 supra, EU:T:2013:259, point 59 et jurisprudence citée).

185    À cet égard, plusieurs critères ont été identifiés par la jurisprudence comme étant pertinents pour apprécier le caractère unique d’une infraction, à savoir l’identité des objectifs des pratiques en cause, l’identité des produits et des services concernés, l’identité des entreprises qui y ont pris part et l’identité des modalités de sa mise en œuvre. En outre, l’identité des personnes physiques impliquées pour le compte des entreprises et l’identité du champ d’application géographique des pratiques en cause sont également des éléments susceptibles d’être pris en considération aux fins de cet examen (voir arrêt Trelleborg Industrie et Trelleborg/Commission, point 178 supra, EU:T:2013:259, point 60 et jurisprudence citée).

186    La jurisprudence permet ainsi à la Commission de présumer que l’infraction – ou que la participation d’une entreprise à l’infraction – ne s’est pas interrompue, même si elle ne détient pas de preuves de l’infraction pour certaines périodes déterminées, pour autant que les différentes actions qui font partie de cette infraction poursuivent une seule finalité et sont susceptibles de s’inscrire dans le cadre d’une infraction à caractère unique et continu, une telle constatation devant reposer sur des indices objectifs et concordants démontrant l’existence d’un plan d’ensemble (arrêt Trelleborg Industrie et Trelleborg/Commission, point 178 supra, EU:T:2013:259, point 61).

187    Lorsque ces conditions sont réunies, la notion d’infraction continue permet ainsi à la Commission d’infliger une amende pour l’ensemble de la période infractionnelle prise en considération et détermine la date à laquelle commence à courir le délai de prescription, à savoir la date à laquelle l’infraction continue a pris fin (arrêt Trelleborg Industrie et Trelleborg/Commission, point 178 supra, EU:T:2013:259, point 62).

188    Toutefois, les entreprises accusées de collusion peuvent tenter de renverser cette présomption, en faisant valoir des indices ou des éléments de preuve établissant que, au contraire, l’infraction – ou leur participation à celle-ci – ne s’est pas poursuivie pendant ces mêmes périodes (arrêt Trelleborg Industrie et Trelleborg/Commission, point 178 supra, EU:T:2013:259, point 63).

c)     Notion de distanciation en cas de participation à une réunion

189    Il ressort également d’une jurisprudence constante qu’il suffit que la Commission démontre que l’entreprise concernée a participé à des réunions au cours desquelles des accords de nature anticoncurrentielle ont été conclus, sans s’y être manifestement opposée, pour prouver à suffisance la participation de ladite entreprise à l’entente. Lorsque la participation à de telles réunions a été établie, il incombe à cette entreprise d’avancer des indices de nature à établir que sa participation auxdites réunions était dépourvue de tout esprit anticoncurrentiel, en démontrant qu’elle avait indiqué à ses concurrents qu’elle participait à ces réunions dans une optique différente de la leur (voir arrêt du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, Rec, EU:C:2004:6, point 81 et jurisprudence citée).

190    La raison qui sous-tend ce principe de droit est que, ayant participé à ladite réunion sans se distancier publiquement de son contenu, l’entreprise a donné à penser aux autres participants qu’elle souscrivait à son résultat et qu’elle s’y conformerait. À cet égard, l’approbation tacite d’une initiative illicite, sans se distancier publiquement de son contenu ou la dénoncer aux entités administratives, a pour effet d’encourager la continuation de l’infraction et compromet sa découverte. Cette complicité constitue un mode passif de participation à l’infraction qui est donc de nature à engager la responsabilité de l’entreprise dans le cadre d’un accord unique (arrêt Aalborg Portland e.a./Commission, point 189 supra, EU:C:2004:6, points 82 et 84).

191    De plus, la circonstance qu’une entreprise ne donne pas suite aux résultats d’une réunion ayant un objet anticoncurrentiel n’est pas de nature à écarter sa responsabilité du fait de sa participation à une entente, à moins qu’elle ne se soit distanciée publiquement de son contenu. Le fait qu’une entreprise n’a pas participé à tous les éléments constitutifs d’une entente ou qu’elle a joué un rôle mineur dans les aspects auxquels elle a participé n’est pas pertinent pour établir l’existence d’une infraction en ce qui la concerne. Il n’y a lieu de prendre en considération ces éléments que lors de l’appréciation de la gravité de l’infraction et, le cas échéant, de la détermination de l’amende (arrêt Aalborg Portland e.a./Commission, point 189 supra, EU:C:2004:6, points 85 et 86).

192    Lorsque la responsabilité d’entreprises pour des comportements anticoncurrentiels résulte, selon la Commission, de leur participation à des réunions ayant de tels comportements pour objet, il incombe au Tribunal de vérifier que ces entreprises ont eu l’occasion, tant au cours de la procédure administrative que devant lui, de réfuter les conclusions qui avaient ainsi été tirées et, le cas échéant, d’établir des circonstances qui donnent un éclairage différent aux faits établis par la Commission et qui permettent de substituer une autre explication des faits à celle retenue par cette institution (arrêt Aalborg Portland e.a./Commission, point 189 supra, EU:C:2004:6, point 87).

193    C’est au vu du contenu de la décision attaquée et en considération des principes exposés ci-dessus qu’il convient d’apprécier les arguments des parties, lesquels ont été exposés en détail dans le rapport d’audience communiqué par le Tribunal.

3.     Appréciation du Tribunal

194    À titre liminaire, il y a lieu de relever que Redaelli ne conteste pas sa participation à une partie de l’infraction, à savoir la partie allant de 1993 à 2002, et notamment la période correspondant à sa participation au club Italia, du 23 janvier 1995 au 19 septembre 2002 (voir décision attaquée, considérant 459). En effet, Redaelli ne demande l’annulation de la décision attaquée qu’en tant qu’elle conclut à l’existence d’une infraction pour la période allant de 1984 à 1992.

195    À supposer même que le présent moyen soit fondé, cela ne saurait pour autant entraîner la réduction de l’amende infligée à Redaelli, dont le montant serait justifié au regard de la technique de calcul exposée par la Commission dans les lignes directrices de 2006 et compte tenu de l’intervention du seuil légal maximal de 10 % du chiffre d’affaires. En effet, en 2009, le chiffre d’affaires mondial consolidé de Redaelli était d’environ 63,41 millions d’euros (décision attaquée, considérant 82). Même si le montant de l’amende à infliger était de 89 millions d’euros, celui-ci a été ramené à la limite de 10 % du chiffre d’affaires de Redaelli, soit 6,341 millions d’euros (décision attaquée, considérant 1071).

196    La sanction encourue serait donc la même quelle que soit la durée de l’infraction retenue : celle retenue par la Commission dans la décision, ou celle proposée par Redaelli dans la requête. Interrogée sur ce point à l’occasion des mesures d’organisation de la procédure, Redaelli a indiqué que, indépendamment du montant effectif de la sanction, elle aurait toujours intérêt à ce qu’il soit statué sur la durée de l’infraction compte tenu des implications que cela pourrait avoir pour faire face à d’éventuelles actions en réparation introduites à son égard. Un tel intérêt ne peut effectivement être contesté.

197    Force est cependant de constater que les arguments avancés par Redaelli pour contester la durée de l’infraction qui lui a été reprochée par la Commission ne sont manifestement pas fondés au vu de la décision attaquée et des éléments de preuve qui y sont évoqués.

198    En premier lieu, il s’avère que, lors de la procédure administrative, Redaelli a déclaré ce qui suit à la Commission dans sa réponse du 15 juin 2007 à une demande de renseignements :

« Entre 1981 et 1982, certaines entreprises ayant participé aux réunions de la section précitée des ‘Trafilatori’ de l’Assider ont estimé que, étant donné l’évolution très négative du marché, il était nécessaire d’entreprendre des actions pour limiter les effets de la crise en cours. Ils ont donc commencé à se réunir en dehors de l’association, laquelle, aux dires de ces entreprises, n’avait pas été en mesure de fournir des solutions à la crise grave qui avait touché le secteur. Des réunions avaient lieu dans plusieurs endroits, généralement en dehors des locaux d’Assider et à un rythme mensuel. […] Il semblerait que pendant un an environ, les quatre entreprises se soient réunies à un rythme probablement mensuel pour s’échanger des informations sur des données de vente. […] Il est donc possible d’indiquer les années 1983-84 comme date de début des réunions du ‘groupe Assider’. […] Les premiers contacts aux fins de la création d’une société de commercialisation en commun […] remontent aux premières années 1980 (1981-1983). […] Selon Redaelli, lors de ces réunions, les discussions portaient sur les volumes de vente de chaque opérateur et il existait une sorte d’accord basé sur l’attribution de quotas de vente à chaque concurrent. »

199    En deuxième lieu, il ressort du dossier que la Commission disposait également de plusieurs éléments de preuve, en provenance de sources diverses et convergentes, pour être à même de considérer que l’infraction a débuté, au plus tard, le 1er janvier 1984 et que Redaelli en faisait partie dès cette date.

200    Ces éléments proviennent des déclarations et des documents fournis par DWK, WDI, Nedri, Emesa, CB, Tréfileurope et ITC (voir décision attaquée, considérant 136), notamment de la référence faite par un responsable d’ITC à une première réunion anticoncurrentielle le 15 septembre 1979 (voir décision attaquée, considérant 394), de la référence faite par Tréfileurope à des réunions organisées par un de ses agents commerciaux avec un responsable de Redaelli, dont l’objet portait sur les prix et les volumes, à compter de 1977 et par la suite dans les années 80 et 90, des références faites par ITC à une série de réunions au cours de la période d’avril à octobre 1983 chez Falck afin de conclure un « nouvel accord » concernant le marché italien (voir décision attaquée, considérant 395), d’un document dactylographié daté du 27 avril 1983 contenant un projet d’accord d’attribution de quotas entre Deriver, Redaelli et Falck (Tréfileurope) (voir décision attaquée, considérant 396), des indications données par WDI selon lesquelles les volumes vendus par plusieurs entreprises au cours de la période de référence de 1976 environ à 1980 ont servi de base pour le calcul des quotas au sein du club Zurich (voir décision attaquée, considérant 142) ou selon lesquelles le modèle pour l’accord atteint au début des années 1980 par un groupe de producteurs européens était « un arrangement qui avait déjà été appliqué avec succès entre les producteurs d’APC en Italie » (voir décision attaquée, considérant 138), et des notes d’Emesa relatives à la réunion du 11 mai 1994, qui définissent le club Zurich comme le « club 1984 », et à la réunion des 8 et 9 juin 1994, qui indiquent comme date de début de l’entente « +/– 1983 » (voir décision attaquée, considérant 137).

201    En troisième lieu, il convient de relever que, si, effectivement, comme le relève la requérante, il existe une différence dans le nombre et la qualité des éléments de preuve relatifs aux années 1990/2000 par rapport aux éléments disponibles pour ce qui concerne les années 1980, cela ne peut pour autant conduire à ignorer le nombre et le sens des différentes déclarations faites par les demandeurs de clémence, dont Redaelli.

202    Le fait pour la Commission de disposer d’un ensemble de preuves plus riche et détaillé pour les années les plus récentes de l’entente par rapport à sa première période tout comme le fait que certaines sources de preuve relatives à la période initiale de l’infraction sont plus fragmentées et moins précises que celles obtenues par la suite n’a rien d’anormal ni d’étrange lorsque, comme en l’espèce, il s’agit d’une infraction découverte vingt ans environ après son commencement.

203    Dans la présente affaire, la Commission disposait de suffisamment d’éléments de preuve pour être en mesure d’établir la date de début de l’entente au 1er janvier 1984. Il ne saurait lui être reproché d’avoir choisi cette date comme étant celle marquant le début du club Zurich étant donné qu’il s’agit de la date la plus favorable pour les différentes parties impliquées.

204    En conséquence, il ressort de ce qui précède que le deuxième moyen doit être rejeté comme non fondé dès lors qu’il ressort à suffisance de preuves de la décision attaquée et des éléments qui y sont cités que la Commission est en mesure de considérer que Redaelli a participé au club Zurich dès ses débuts en 1984 et, par la suite, au club Italia ainsi qu’aux réunions multilatérales pour l’intégration des entreprises italiennes dans le club Europe, cela jusqu’en septembre 2002, date à laquelle les locaux de Redaelli ont fait l’objet d’une inspection de la part de la Commission.

C –  Sur le moyen relatif à la violation du principe du délai raisonnable

205    Redaelli fait valoir que la durée de la procédure administrative a été trop longue. Elle considère que la Commission a pu disposer, dès le stade initial de l’enquête, de tous les éléments nécessaires pour démontrer l’existence de l’entente eu égard aux demandes de clémence qui lui ont été adressées et aux preuves jointes à ces demandes. En particulier, Redaelli considère que les éléments obtenus à la suite de ce stade initial, et notamment les notes d’Emesa communiquées en juin 2007, ne sont pas de nature à justifier le temps qui s’est écoulé. La longueur excessive de la procédure aurait nui à l’exercice effectif des droits de la défense de Redaelli. Ainsi, compte tenu du renouvellement de son personnel et des restructurations qu’elle a pu connaître, Redaelli considère avoir été empêchée d’élaborer une ligne de défense sur la base des témoignages des employés en place dans la société pendant les années concernées par l’enquête. Redaelli fait aussi valoir que, de bonne foi, elle pouvait penser qu’il n’était pas nécessaire de se munir de tels témoignages tant que la Commission n’avait pas fait connaître sa position sur sa demande de clémence. La durée excessive de la procédure aurait également eu une incidence sur l’appréciation de sa demande de clémence, introduite en 2003, dès lors que, en se prononçant sur cette demande en 2008, la Commission aurait été influencée par les critères d’interprétation plus stricts introduits par la communication sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes adoptée en 2006, en particulier en ce qui concerne la notion de valeur ajoutée significative.

206    L’observation d’un délai raisonnable dans la conduite des procédures administratives en matière de politique de la concurrence constitue un principe général de droit de l’Union dont les juridictions de l’Union assurent le respect (voir arrêt du 19 décembre 2012, Heineken Nederland et Heineken/Commission, C‑452/11 P, EU:C:2012:829, point 97 et jurisprudence citée).

207    Le principe de délai raisonnable d’une procédure administrative a été réaffirmé par l’article 41, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux, en vertu duquel « toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l’Union » (arrêt du 5 juin 2012, Imperial Chemical Industries/Commission, T‑214/06, Rec, EU:T:2012:275, point 284).

208    Le caractère raisonnable de la durée de la procédure doit s’apprécier en fonction des circonstances propres de chaque affaire et, notamment, du contexte de celle-ci, de la conduite des parties au cours de la procédure, de l’enjeu de l’affaire pour les différentes entreprises intéressées et de son degré de complexité (voir, en ce sens, arrêt du 20 avril 1999, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, T‑305/94 à T‑307/94, T‑313/94 à T‑316/94, T‑318/94, T‑325/94, T‑328/94, T‑329/94 et T‑335/94, Rec, EU:T:1999:80, point 126) ainsi que, le cas échéant, d’informations ou de justifications que la Commission est susceptible d’apporter quant aux actes d’enquête diligentés au cours de la procédure administrative.

209    La Cour a jugé que la procédure administrative peut donner lieu à l’examen de deux périodes successives, chacune de celles-ci répondant à une logique interne propre. La première période, qui s’étend jusqu’à la communication des griefs, a pour point de départ la date à laquelle la Commission, faisant usage des pouvoirs que lui a conférés le législateur de l’Union, prend des mesures impliquant le reproche d’avoir commis une infraction et doit permettre à celle-ci de prendre position sur l’orientation de la procédure. La seconde période, quant à elle, s’étend de la communication des griefs à l’adoption de la décision finale. Elle doit permettre à la Commission de se prononcer définitivement sur l’infraction reprochée (arrêt du 21 septembre 2006, Nederlandse Federatieve Vereniging voor de Groothandel op Elektrotechnisch Gebied/Commission, C‑105/04 P, Rec, EU:C:2006:592, point 38).

210    Il ressort de la jurisprudence que la violation du principe du délai raisonnable peut entraîner deux types de conséquences.

211    D’une part, lorsque la violation du délai raisonnable a eu une incidence sur l’issue de la procédure, une telle violation est de nature à entraîner l’annulation de la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt du 21 septembre 2006, Technische Unie/Commission, C‑113/04 P, Rec, EU:C:2006:593, point 48 et jurisprudence citée).

212    Il convient de préciser que, s’agissant de l’application des règles de concurrence, le dépassement du délai raisonnable ne peut constituer un motif d’annulation que de décisions constatant des infractions et à la condition qu’il ait été établi que la violation de ce principe a porté atteinte aux droits de la défense des entreprises concernées. En dehors de cette hypothèse spécifique, le non-respect de l’obligation de statuer dans un délai raisonnable est sans incidence sur la validité de la procédure administrative au titre du règlement n° 1/2003 (voir arrêt du 16 décembre 2003, Nederlandse Federatieve Vereniging voor de Groothandel op Elektrotechnisch Gebied et Technische Unie/Commission, T‑5/00 et T‑6/00, Rec, EU:T:2003:342, point 74 et jurisprudence citée, confirmé sur pourvoi sur ce point par arrêt Nederlandse Federatieve Vereniging voor de Groothandel op Elektrotechnisch Gebied/Commission, point 209 supra, EU:C:2006:592, points 42 et 43).

213    Toutefois, le respect des droits de la défense, principe dont le caractère fondamental a été souligné à maintes reprises par la jurisprudence de la Cour (arrêt du 9 novembre 1983, Nederlandsche Banden-Industrie-Michelin/Commission, 322/81, Rec, EU:C:1983:313, point 7), revêtant une importance capitale dans les procédures telles que celle en l’espèce, il importe d’éviter que ces droits puissent être irrémédiablement compromis en raison de la durée excessive de la phase d’instruction et que cette durée soit susceptible de faire obstacle à l’établissement de preuves visant à réfuter l’existence de comportements de nature à engager la responsabilité des entreprises concernées. Pour cette raison, l’examen de l’éventuelle entrave à l’exercice des droits de la défense ne doit pas être limité à la phase même dans laquelle ces droits produisent leur plein effet, à savoir la seconde phase de la procédure administrative. L’appréciation de la source de l’éventuel affaiblissement de l’efficacité des droits de la défense doit s’étendre à l’ensemble de cette procédure en se référant à la durée totale de celle-ci (arrêt Nederlandse Federatieve Vereniging voor de Groothandel op Elektrotechnisch Gebied/Commission, point 209 supra, EU:C:2006:592, point 50).

214    D’autre part, lorsque la violation du délai raisonnable est sans incidence sur l’issue de la procédure, une telle violation peut conduire le Tribunal, dans le cadre de l’exercice de sa compétence de pleine juridiction, à redresser de manière adéquate la violation résultant du dépassement du délai raisonnable de la procédure administrative en réduisant le cas échéant le montant de l’amende imposée (voir, en ce sens, arrêt Technische Unie/Commission, point 211 supra, EU:C:2006:593, points 202 à 204, et arrêt du 16 juin 2011, Heineken Nederland et Heineken/Commission, T‑240/07, Rec, EU:T:2011:284, points 429 et 434, confirmé sur pourvoi par arrêt Heineken Nederland et Heineken/Commission, point 206 supra, EU:C:2012:829, point 100).

215    Il ressort de ce qui précède que, pour qu’une procédure administrative de longue durée puisse être susceptible de constituer une violation du principe du délai raisonnable, la durée de cette procédure doit être qualifiée d’excessive.

216    En l’espèce, la procédure administrative a connu quatre phases successives, la première étant antérieure à la communication des griefs et les trois suivantes postérieures à ladite communication.

217    La première phase a débuté le 9 janvier 2002, avec la communication, par le Bundeskartellamt, des documents mentionnés au point 22 ci-dessus et s’est terminée le 30 septembre 2008 par l’adoption de la communication des griefs.

218    La deuxième phase s’est alors ouverte (voir points 33 à 38 ci-dessus) et s’est achevée par l’adoption de la décision initiale, le 30 juin 2010.

219    Après l’introduction d’une première série de recours (rappelés au point 10 ci-dessus), la Commission a adopté, le 30 septembre 2010, une première décision modificative (voir point 4 ci-dessus) en vue de corriger diverses erreurs qu’elle avait constatées dans la décision initiale, ce qui a clôturé la troisième phase de la procédure administrative.

220    Enfin, le 4 avril 2011, s’est achevée la quatrième phase de la procédure administrative, par l’adoption par la Commission de la seconde décision modificative, par laquelle elle a consenti une réduction du montant de l’amende infligée, d’une part, à ArcelorMittal, ArcelorMittal Verderio, ArcelorMittal Fontaine et ArcelorMittal Wire France, et d’autre part, à SLM et Ori Martin (voir point 6 ci-dessus).

221    Il convient de relever d’emblée que le présent moyen ne porte que sur les deux premières phases de la procédure administrative.

222    Le 17 décembre 2013, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure du 2 mai 1991, le Tribunal a adressé une question écrite à la Commission, afin d’obtenir une description détaillée des diligences qu’elle avait accomplies à la suite des inspections, qui ont eu lieu les 19 et 20 septembre 2002, et ce jusqu’à l’adoption de la décision initiale.

223    La Commission a déféré à cette demande par acte déposé au greffe le 28 février 2014.

224    Une copie de la réponse de la Commission a été communiquée à la requérante par le greffe du Tribunal.

225    La Commission expose dans sa réponse, de manière détaillée et convaincante, les diligences qu’elle a accomplies tout au long de la procédure administrative et les raisons pour lesquelles la procédure a duré de 2002 à 2010.

226    Plusieurs facteurs expliquent la durée de la procédure administrative en l’espèce.

227    Il convient à ce propos d’avoir égard à la durée de l’entente (plus de 18 ans), à sa dimension géographique particulièrement étendue (l’entente concernait la majorité des États membres), à l’organisation de l’entente au niveau géographique et dans le temps (les différents clubs décrits aux points 41 à 54), au nombre de réunions qui se sont tenues dans le cadre des différents clubs (plus de 500), au nombre d’entreprises concernées (17), au nombre de demandes de clémence (voir points 23 et 28 et suivants ci-dessus) et au volume particulièrement important de documents, fournis dans ce cadre ou obtenus au cours des inspections et établis dans diverses langues, qui ont dû être examinés par la Commission, aux diverses demandes de renseignements complémentaires qui ont dû être adressées par la Commission aux différentes sociétés concernées au fur et à mesure de l’évolution de la compréhension de l’entente (voir points 25 et suivants et points 37 et suivants ci-dessus), au nombre de destinataires de la communication des griefs (plus de 40), au nombre de langues de procédure (8) ainsi qu’aux diverses demandes relatives à la capacité contributive (14).

228    En outre, il doit également être relevé que Redaelli n’établit pas en quoi ses droits de la défense auraient été méconnus en raison de la durée de la procédure. Les indications fournies à cet égard restent dénuées de pertinence. Ainsi, l’allégation de la requérante selon laquelle elle a dû attendre la communication des griefs pour rassembler des éléments de preuve à décharge concernant les éléments dont elle entendait contester la matérialité n’est imputable qu’à elle-même, puisque, dès l’automne 2002, elle était avisée de l’enquête menée par la Commission concernant l’entente à laquelle il lui était reproché d’avoir participé. Quant aux restructurations sociales et au départ de personnes physiques impliquées dans l’entente à compter de l’automne 2002, il s’agit de circonstances qui auraient dû, contrairement à ce que soutient Redaelli, la conduire à agir avec célérité et non à attendre que les preuves et les personnes se dispersent.

229    Sur la base des informations fournies par la Commission, qui témoignent de la complexité particulière de l’affaire, le Tribunal estime que, en dépit de la longueur de la procédure, celle-ci ne doit pas être qualifiée d’excessive aussi bien pour ce qui concerne la période qui s’étend jusqu’à la communication des griefs que pour celle qui a suivi. Par conséquent, la Commission n’a pas méconnu le délai raisonnable et il convient dès lors de rejeter le troisième moyen.

D –  Conclusion

230    Il résulte de l’ensemble des considérations qui précédent qu’aucun des moyens soulevés par Redaelli ne peut être accueilli. Le recours doit, dès lors, être rejeté dans son intégralité, sans qu’il y ait lieu, dans les circonstances de l’espèce et compte tenu des considérations exposées aux points 226 à 229 ci-dessus, de procéder, au titre de la pleine juridiction, à la réformation de l’amende qui lui a été infligée.

 Sur les dépens

231    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Redaelli Tecna SpA supportera ses propres dépens ainsi que ceux de la Commission européenne.

Frimodt Nielsen

Dehousse

Collins

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 juillet 2015.

Signatures

Table des matières


Objet du litige

Antécédents du litige

A –  Secteur faisant l’objet de la procédure

1.  Produits

2.  Structure de l’offre

3.  Structure de la demande

4.  Échanges au sein de l’Union et de l’EEE

B –  Redaelli

C –  Procédure administrative

1.  Première demande de clémence et immunité accordée à DWK

2.  Inspections et demandes de renseignements

3.  Autres demandes de clémence et réponses apportées par la Commission

4.  Ouverture de la procédure et communication des griefs

5.  Accès au dossier, audition et capacité contributive

6.  Demandes complémentaires de renseignements

D –  Décision attaquée

1.  Club Zurich et accords régionaux

2.  Club Europe et accords régionaux

Procédure et conclusions des parties

En droit

A –  Sur le moyen relatif à l’application de la communication sur la clémence

1.  Rappel du contenu de la décision attaquée

2.  Sur l’appréciation erronée de la valeur ajoutée significative des éléments de preuve fournis par Redaelli lors de la procédure administrative

a)  Conditions énoncées pour obtenir une réduction du montant de l’amende

b)  Examen des arguments relatifs à la valeur ajoutée significative

Observations liminaires sur le contexte et la chronologie

Analyse des documents pertinents

–  Représentation de CB, Itas et ITC au club Zurich de 1993 à 1995

–  Autres aspects de l’infraction

c)  Conclusion

3.  Sur la violation du principe de protection de la confiance légitime

4.  Sur la violation du principe d’égalité de traitement

B –  Sur le moyen relatif à la durée de la participation à l’entente

1.  Rappel du contenu de la décision attaquée

2.  Rappel des principes

a)  Preuve de l’existence et de la durée de l’infraction

b)  Notion d’infraction unique

c)  Notion de distanciation en cas de participation à une réunion

3.  Appréciation du Tribunal

C –  Sur le moyen relatif à la violation du principe du délai raisonnable

D –  Conclusion

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’italien.


1 Le présent arrêt fait l’objet d’une publication par extraits.