Language of document : ECLI:EU:F:2015:38

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)

29 avril 2015 (*)

« Fonction publique – Agents contractuels – Contrat à durée déterminée – Résiliation – Rupture du lien de confiance – Droit d’être entendu – Violation »

Dans les affaires jointes F‑159/12 et F‑161/12,

ayant pour objet deux recours introduits au titre de l’article 270 TFUE,

CJ, ancien agent contractuel du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies, demeurant à Agios Stefanos (Grèce), représenté par Me V. Kolias, avocat,

partie requérante,

contre

Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC), représenté initialement par Mme R. Trott, en qualité d’agent, assistée de Mes A. Duron et D. Waelbroeck, avocats, puis par Mmes J. Mannheim et A. Daume, en qualité d’agents, assistées de Mes A. Duron et D. Waelbroeck, avocats,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(deuxième chambre),

composé de Mme M. I. Rofes i Pujol, président, MM. K. Bradley (rapporteur) et J. Svenningsen, juges,

greffier : M. P. Cullen, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 4 septembre 2014,

rend le présent

Arrêt

1        Par requêtes parvenues au greffe du Tribunal les 26 et 28 décembre 2012, respectivement enregistrées sous les références F‑159/12 et F‑161/12, CJ a introduit deux recours tendant, le premier, à l’annulation de la décision du 24 février 2012 du directeur du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) de résilier son contrat d’agent contractuel, ainsi qu’à la réparation du préjudice matériel qu’il estime avoir subi en raison de cette décision et, le second, à la réparation du préjudice moral prétendument subi.

 Cadre juridique

2        Aux termes de l’article 21, premier alinéa, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne dans sa version applicable au litige (ci-après le « statut ») :

« Le fonctionnaire, quel que soit son rang dans la hiérarchie, est tenu d’assister et de conseiller ses supérieurs ; il est responsable de l’exécution des tâches qui lui sont confiées. »

3        L’article 21 bis du statut est rédigé ainsi :

« 1. Lorsqu’un ordre reçu lui paraît entaché d’irrégularité, ou s’il estime que son exécution peut entraîner de graves inconvénients, le fonctionnaire en avise son supérieur hiérarchique direct, qui, si l’information est transmise par écrit, répond également par écrit. Sous réserve du paragraphe 2, si ce dernier confirme l’ordre, mais que le fonctionnaire juge cette confirmation insuffisante au regard de ses motifs de préoccupation, il en réfère par écrit à l’autorité hiérarchique immédiatement supérieure. Si celle-ci confirme l’ordre par écrit, le fonctionnaire est tenu de l’exécuter, à moins qu’il ne soit manifestement illégal ou contraire aux normes de sécurité applicables.

2. Si son supérieur hiérarchique direct estime que l’ordre ne souffre aucun délai, le fonctionnaire est tenu de l’exécuter, à moins qu’il ne soit manifestement illégal ou contraire aux normes de sécurité applicables. Sur la demande du fonctionnaire, le supérieur hiérarchique direct est tenu de donner tout ordre de ce type par écrit. »

4        En vertu des articles 11 et 81 du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (ci-après le « RAA »), les articles 21 et 21 bis du statut sont applicables par analogie aux agents contractuels.

5        L’article 47 du RAA, applicable par analogie aux agents contractuels par effet de l’article 119 du RAA, dispose ainsi :

« Indépendamment du cas de décès de l’agent temporaire, l’engagement de ce dernier prend fin :

[…]

b) pour les contrats à durée déterminée :

[…]

ii)       à l’issue du préavis fixé dans le contrat et donnant à l’agent ou à l’institution la faculté de résilier celui-ci avant son échéance. Le préavis ne peut être inférieur à un mois par année de service, avec un minimum d’un mois et un maximum de trois mois. Pour l’agent temporaire dont l’engagement a été renouvelé, le maximum est de six mois. Toutefois, le préavis ne peut commencer à courir pendant la durée du congé de maternité ou d’un congé de maladie, pour autant que ce dernier ne dépasse pas une période de trois mois. Il est d’autre part suspendu dans la limite visée ci-dessus pendant la durée de ces congés. En cas de résiliation du contrat par l’institution, l’agent a droit à une indemnité égale au tiers de son traitement de base pour la période comprise entre la date de cessation de ses fonctions et la date à laquelle expirait son contrat ;

[…] »

 Faits à l’origine du litige

6        Le requérant a été recruté le 1er janvier 2010 en tant qu’agent contractuel dans le groupe de fonctions IV, grade 14, au sein de la section « Affaires juridiques et marchés publics » (ci-après le « service juridique ») de l’unité « Gestion des ressources et coordination » de l’ECDC, en tant qu’« assistant juridique », pour une durée de cinq ans.

7        Compte tenu de sa charge de travail, courant août 2011, le requérant a convenu avec Mme A, le chef de l’unité « Gestion des ressources et coordination » qui faisait à l’époque fonction de chef du service juridique, qu’il ne devait pas travailler sur plus de 30 dossiers simultanément.

8        Le 1er novembre 2011, Mme B a pris ses fonctions en tant que chef du service juridique, devenant ainsi le supérieur hiérarchique direct du requérant.

9        Au moment de la prise de fonctions de Mme B, le requérant bénéficiait d’un congé annuel qui devait prendre fin le 8 novembre 2011. Ce congé a été prolongé, à la demande du requérant, jusqu’au 18 novembre 2011.

10      Par courriel du 8 novembre 2011, Mme B a demandé au requérant de lui transmettre un « bref résumé écrit » des dossiers sur lesquels il travaillait, en précisant les questions qu’il estimait être les plus importantes. Mme B ajoutait qu’elle savait que le requérant était en congé annuel, mais qu’il était important pour elle d’avoir un aperçu complet des dossiers en cours de traitement par le service.

11      Le requérant a répondu par un courriel du 9 novembre 2011, à 10 h 29, en demandant à Mme B si Mme A ne lui avait « pas remis officiellement ce dont elle disposait en tant que chef [du service juridique] faisant fonction, y compris les résumés écrits qu[’il] lui a[vait] remis et dont [il] a[vait] discuté avec elle juste avant [s]on départ en vacances à la mi-octobre […] », et en se disant prêt à renvoyer lesdits résumés, si tel n’avait pas été le cas.

12      Après être revenu pour deux jours au bureau, le requérant a été en congé de maladie du 23 novembre au 12 décembre 2011.

13      Dans un courriel du 14 décembre 2011, envoyé au requérant à 12 h 07, Mme B, premièrement, a indiqué qu’elle avait reçu une liste des affaires attribuées au requérant, préparée par ce dernier en septembre 2011 pour Mme A. Deuxièmement, elle a affirmé avoir compris que, à l’époque, le requérant ne se sentait pas en mesure d’accepter des tâches supplémentaires en raison de sa charge de travail. Troisièmement, elle a indiqué qu’il était prioritaire d’examiner en détail l’état des affaires dont le requérant était en charge et lui a demandé de « mettre à jour [sa] liste de tâches en cours en proposant, pour chaque tâche, un classement dans une des catégories suivantes : dormant, urgent avec ‘gains rapidesʼ, urgent et important […], important mais pas urgent, en cours […] ».

14      Le jour même, à 14 h 40, le requérant a répondu à Mme B par courriel qu’il supposait qu’elle n’avait pas reçu une « note de passation des responsabilités » détaillée et formelle de la part de Mme A, en précisant qu’il avait convenu avec cette dernière « au mois d’août [2011] qu’[il] ne devrai[t] pas traiter plus de 30 dossiers […] ». En outre, il faisait part de ce qu’il avait près de 50 dossiers : une dizaine d’entre eux seulement requéraient, pour être clôturés, une discussion finale avec Mme B. Au vu de ces circonstances, il estimait ne pas pouvoir être chargé d’autres dossiers. Le requérant a joint à ce courriel une liste des dossiers en cours, mentionnant les dossiers actifs et ceux en suspens.

15      Par courriel envoyé le 15 décembre 2011 à 10 h 10, Mme B a assuré le requérant de ce que la question de sa charge de travail avait bien été abordée avec Mme A. En outre, après avoir observé que la liste des dossiers en cours avait été rédigée en « août/septembre [2011] », elle a fait valoir que ladite liste devait être revue et mise à jour. Elle lui a demandé de supprimer de cette liste les dossiers en suspens et de classer les autres selon les instructions précédemment données.

16      Ce même jour, à 10 h 46, le requérant a répondu en rappelant à nouveau les termes de l’accord conclu avec Mme A et en insistant sur sa demande de ne pas se voir confier d’autres tâches, puisque le maximum convenu avait été dépassé. En outre, il demandait les raisons pour lesquelles Mme B souhaitait que les dossiers en suspens soient retirés de la liste qu’il avait préparée, en affirmant que de toute façon ces dossiers n’affectaient pas le nombre maximal de dossiers qu’il pouvait traiter. En outre, il demandait des explications sur la présentation de la liste requise par Mme B, en affirmant que la présentation actuelle avait toujours satisfait sa hiérarchie.

17      Toujours le 15 décembre 2011, Mme B a répondu par un courriel envoyé à 15 h 06 que, afin d’apprécier la charge de travail du requérant, elle avait besoin d’une liste des dossiers qu’il était en train de traiter assortie de brefs commentaires concernant l’état dans lequel ils se trouvaient. Elle ajoutait que, bien que le « plafond de 30 dossiers » ait pu se justifier en août 2011, ce nombre devait être réévalué et établi en tenant compte des ressources disponibles.

18      Le 16 décembre 2011, le requérant a envoyé plusieurs courriels à Mme B lui demandant des renseignements concernant un agent intérimaire qui aurait été recruté par l’ECDC. Selon le requérant, ces renseignements lui auraient permis d’apprécier s’il y avait eu des irrégularités dans ce recrutement.

19      Ce même jour, Mme A a envoyé à Mme B un courriel lui confirmant que le plafond de 30 dossiers précédemment fixé n’était plus d’actualité et que, désormais, seule Mme B avait la tâche d’évaluer et de fixer la charge de travail du requérant.

20      Par courriel du 21 décembre 2011 à 12 h 39, Mme B a reproché au requérant d’avoir refusé, lors d’une brève rencontre qui avait eu lieu ce même jour, de prendre en charge le suivi de huit dossiers qui lui avaient été attribués, comportement qu’elle a qualifié de « violation des devoirs envers [elle] en tant que supérieur hiérarchique et [envers l’ECDC] dans son ensemble ». En outre, par un courriel envoyé à 12 h 46, elle a convoqué le requérant pour une réunion le même jour à 15 h 00, en présence de Mme C, chef de la section « Ressources humaines » de l’unité « Gestion des ressources et coordination ».

21      Par courriel envoyé à 14 h 19, le requérant a répondu à Mme B qu’il avait « réservé [s]on calendrier de 13 h 30 à 16 h 30 » pour rédiger un rapport, au sens de l’article 22 bis du statut, pour le directeur de l’ECDC (ci-après le « directeur »), concernant l’engagement d’un agent intérimaire, et que de ce fait il n’aurait pas le temps de participer à une réunion avant 16 h 45. Il lui demandait en tout état de cause de reporter la réunion au lendemain, vu que, en considération de sa récente maladie, il préférait ne pas rester trop tard au bureau. En outre, le requérant soulevait des objections à la participation de Mme C à cette réunion.

22      Ce même 21 décembre 2011, le requérant a participé à une réunion à 17 h 00 avec le directeur, Mme A, Mme B et Mme C. Il ressort du compte rendu de cette réunion que Mme A a confirmé que l’accord du mois d’août 2011 avec le requérant sur son plafond de dossiers n’avait plus de raison d’être depuis la nomination de Mme B comme chef du service juridique et que cette dernière était la seule responsable pour la délégation et l’assignation de tâches au requérant. Au cours de cette réunion, le directeur a confirmé les propos de Mme A.

23      Par courriel du 22 décembre 2011, le requérant a informé le directeur que, à son avis, des irrégularités avaient été commises dans le recrutement d’un agent intérimaire. Suite à cette information, le directeur a saisi l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) de la question.

24      Par courriel du 3 janvier 2012 adressé à Mme B, le requérant a demandé à être relevé de manière permanente du traitement des dossiers concernant la protection des données.

25      Le 8 janvier 2012, le requérant a adressé un courriel à Mme A en lui demandant, en application de l’article 21 bis, paragraphe 1, du statut, de lui confirmer si certaines tâches qui lui avaient été attribuées par Mme B étaient « compatibles avec sa position de juriste ». Le lendemain, Mme A a répondu que, lors de la réunion tenue le 21 décembre 2011, elle et le directeur avaient clairement affirmé qu’il revenait à Mme B, en tant que son supérieur hiérarchique, de lui attribuer les tâches à exécuter. En l’espèce, selon Mme A, il n’y avait aucune irrégularité dans l’attribution des tâches que le requérant contestait.

26      Le 10 janvier 2012, le requérant et Mme B ont eu une nouvelle réunion en présence de Mme D, agent en charge des politiques et du soutien au sein de la section « Ressources humaines », chargée d’établir le procès-verbal de cette réunion, et de M. E, membre du comité du personnel, en tant que témoin. Il ressort du procès-verbal de cette réunion que Mme B a reproché au requérant d’avoir systématiquement refusé d’exécuter les tâches qu’elle lui confiait, de ne pas suivre ses instructions et de se concentrer sur la rédaction d’innombrables courriels la critiquant constamment plutôt que sur la solution des problèmes liés à son travail. De son côté, le requérant a répondu que les instructions qui lui avaient été données par Mme B étaient inappropriées ou non adaptées pour un juriste.

27      Toujours le 10 janvier 2012, le requérant a adressé au directeur une demande tendant à faire « reconnaître, cesser et empêcher le harcèlement psychologique » dont il s’estimait victime de la part de Mme B.

28      Le 11 janvier 2012, le directeur a ouvert une enquête administrative au titre de l’article 2 de l’annexe IX du statut concernant les accusations de non-respect des obligations découlant des articles 21 et 21 bis du statut portées par Mme B à l’égard du requérant (ci-après l’« enquête sur des accusations d’insubordination ») et en a informé le requérant par courriel du 12 janvier 2012.

29      L’enquête sur des accusations d’insubordination a été confiée à M. F, chef de l’unité « Capacité d’action en santé publique et communication ». Elle a été diligentée du 12 au 24 janvier 2012. M. F a rencontré le requérant, dans le cadre de l’enquête, le 13 janvier 2012.

30      Le 17 janvier 2012, le directeur a informé le requérant de l’ouverture d’une enquête faisant suite à sa demande de faire « reconnaître, cesser et empêcher le harcèlement psychologique » dont il s’estimait victime de la part de Mme B (ci-après l’« enquête sur des allégations de harcèlement »).

31      Par courriel du 23 janvier 2012 à 23 h 39, M. F a transmis au requérant une première version du projet de rapport de l’enquête sur des accusations d’insubordination, en lui demandant de préciser s’il contestait les faits tels qu’exposés dans ledit projet. En outre, M. F indiquait au requérant qu’il pourrait faire à un stade ultérieur des observations sur la sélection des faits y présentée, à savoir après la finalisation du rapport.

32      Le 24 janvier 2012, par courriel envoyé à 17 h 39, M. F a transmis au requérant une version révisée du projet de rapport de l’enquête sur des accusations d’insubordination, en lui demandant de présenter ses observations pour le 26 janvier 2012 à midi. Le requérant a fait savoir à M. F, par courriel du même jour, qu’il était en mesure de présenter ses observations sur la partie « Faits » pour le 30 janvier 2012 à midi, mais qu’il avait besoin de plus de temps pour présenter des observations sur les parties « Résumé » et « Conclusions » du projet de rapport.

33      Par courriel du 25 janvier 2012, M. F a répondu au requérant que, comme le délai pour déposer son rapport d’enquête expirait le lendemain et que celui-ci n’était pas en mesure de lui transmettre « une réponse plus détaillée » pour cette date, il allait transmettre le rapport d’enquête au directeur. En outre, M. F invitait le requérant à présenter ses observations directement au directeur. Le requérant a répondu à M. F qu’il allait effectivement attendre que le directeur l’invite à présenter d’éventuelles observations concernant le rapport de l’enquête sur des accusations d’insubordination.

34      Ce même 25 janvier 2012, Mme B a envoyé un courriel au requérant dans lequel elle lui reprochait plusieurs agissements. En particulier, Mme B faisait observer qu’elle lui avait demandé d’imprimer certains documents en préparation d’une réunion, qui avait eu lieu le même jour, mais que le requérant n’avait pas donné suite à cette instruction et s’était présenté à la réunion sans les documents imprimés requis et en refusant de les imprimer.

35      Par courriel du 26 janvier 2012 à 7 h 29, le requérant s’est justifié en expliquant à Mme B qu’il lui avait déjà envoyé ces documents par courriels et qu’il estimait qu’« imprimer […] des documents qui [étaient] déjà à [sa] disposition [n’était pas] […] une tâche adaptée à un juriste, mais plutôt à [elle], à [sa] secrétaire ou [son] assistant […] », et qu’il considérait par conséquent cette instruction illégale.

36      Le 26 janvier 2012, M. F a remis au directeur la version définitive du rapport de l’enquête sur des accusations d’insubordination (ci-après le « rapport final sur l’insubordination »). Dans ses conclusions, l’enquêteur indiquait être d’avis que le requérant avait violé les articles 21 et 21 bis du statut et qu’il y avait des éléments suffisants pour diligenter une procédure disciplinaire sur le fondement de l’article 3 de l’annexe IX du statut. En particulier, M. F constatait, premièrement, l’existence d’une « méfiance profonde et mutuelle entre [le requérant] et [son supérieur hiérarchique] qui rend[ait], en pratique, impossible une relation de travail quotidienne normale entre eux [et que l]a vitesse à laquelle cette situation s’[était] installée [était] frappante ». Deuxièmement, il concluait qu’« en violation de l’article 21 du statut, des instructions claires et répétées de [Mme B] au [requérant] n’[avaient] pas été suivies et [que] les délais donnés n’[avaient] pas été respectés ». Troisièmement, il mettait en exergue que « [Mme B] a[vait] signifié clairement que le refus d’exécuter les tâches attribuées pourrait avoir des conséquences [et que le requérant] a[vait] argumenté longuement quant au fait que les tâches attribuées pourraient ne pas avoir été appropriées, adaptées ou raisonnables ». Quatrièmement, il concluait que « les deux intéressés [n’étaient pas d’accord] sur ce qui constitue une charge de travail raisonnable et des tâches adaptées à un juriste[ ; d]ans ce contexte, [le requérant] a[vait] mis en doute la compétence de [Mme B] pour les matières ayant trait à la protection des données, son expérience en matière de management et sa capacité à le superviser correctement ».

37      Par un courriel du 27 janvier 2012, Mme B a critiqué une liste préparée par le requérant concernant les tâches sur lesquelles il était en train de travailler, au motif que certaines des tâches ne demandaient plus aucune action de la part du requérant et n’auraient donc pas dû figurer sur cette liste. Dans le même courriel, elle demandait au requérant de tenir un journal de ses activités, en mentionnant dans le détail le temps passé pour s’acquitter de chaque tâche qui lui était confiée.

38      Par courriel du 31 janvier 2012, le requérant a contesté les observations de Mme B sur les tâches qu’il devait exécuter et a affirmé que la demande de tenir un journal de ses activités était « manifestement illégale » et qu’elle faisait suite à « une série d’ordres également illégaux ». Le requérant a écrit, le même jour, à Mme A pour lui demander si elle confirmait cette demande, ainsi que l’instruction d’« imprimer des documents […] déjà envoyés par courriel », en considérant que ces deux instructions étaient illégales et non adaptées à ses fonctions.

39      Par courriel adressé au requérant le 2 février 2012, Mme A a confirmé les instructions de Mme B en ces termes : « […] je ne vois rien d’‘illégal’ ou de ‘manifestement inadapté’ à vos fonctions dans sa demande ; au contraire, il est normal pour un supérieur hiérarchique d’attendre de ses subordonnés que ceux-ci viennent préparés aux réunions organisées avec lui, qu’ils tiennent un journal d’activités et apportent une contribution matérielle aux réunions. […] »

40      Le 2 février 2012, le requérant a été entendu par M. G, le responsable scientifique adjoint de l’ECDC qui avait été chargé de mener l’enquête sur des allégations de harcèlement, dans le cadre de cette enquête.

41      Le 10 février 2012, M. G a remis au directeur son rapport d’enquête sur des allégations de harcèlement (ci-après le « rapport final de l’enquête sur des allégations de harcèlement »). Dans ce rapport, M. G recommandait de ne pas considérer le cas comme du harcèlement psychologique, mais comme un grave différend entre un subordonné et son supérieur hiérarchique direct.

42      Par courriel du 17 février 2012 à 8 h 38, le directeur a convoqué le requérant à participer à une réunion dans son bureau le jour même à 9 h 15 (ci-après la « réunion du 17 février 2012 »).

43      Il ressort du compte rendu de la réunion du 17 février 2012, transmis au requérant ce même jour à 12 h 37, que le directeur, après avoir pris acte de ce que le requérant avait reçu le rapport final sur l’insubordination, l’a informé, d’une part, que l’enquête sur l’insubordination avait été clôturée et que les allégations à son égard étaient confirmées et, d’autre part, que l’enquête sur des allégations de harcèlement était clôturée sans suite. Ensuite, il a invité le requérant à présenter ses observations pour le 22 février 2012 à 17 h 00. Ce compte rendu était accompagné du rapport final sur l’insubordination et d’un résumé du rapport final de l’enquête sur des allégations de harcèlement incluant les conclusions et les recommandations de l’enquêteur.

44      Par courriel du 20 février 2012 adressé au directeur et à Mme D, le requérant a demandé plus de temps pour examiner les deux documents joints au compte rendu de la réunion du 17 février 2012. Le même jour, Mme D a confirmé au requérant le délai du 22 février 2012 fixé par le directeur.

45      Par courriel du 21 février 2012, le requérant a répété que le délai fixé par le directeur était trop court et qu’il n’allait pas pouvoir, de ce fait, présenter ses observations dans le délai imparti.

46      Le 24 février 2012, une réunion s’est tenue entre le directeur, le requérant et Mme D. Au cours de cette réunion, le directeur a notifié au requérant la décision de résiliation de son contrat, adoptée sur le fondement de l’article 47, sous b), ii), du RAA (ci-après la « décision litigieuse »), en lui expliquant les raisons de cette décision.

47      La décision litigieuse est rédigée en ces termes :

« […] 

Au cours de notre réunion du 17 février 2011 [sic], j’ai confirmé les conclusions [du rapport final sur l’insubordination] au sujet de votre non-respect allégué des obligations précisées aux articles 21 et 21 bis du statut […] comme [celles] du rapport [final de l’enquête sur des allégations de harcèlement]. Il vous a été donné la possibilité de présenter des observations soit oralement, au cours de la réunion, soit ultérieurement par écrit, mais aucune observation n’a été reçue de votre part endéans le délai imparti.

En ce qui concerne le premier point, je vous ai clairement précisé lors de notre réunion du 10 décembre 2011 [sic] que j’attendais de votre part que vous suiviez les instructions de votre supérieur hiérarchique. Il m’apparaît clairement, à partir du rapport [final sur l’insubordination] ainsi que de votre comportement ultérieur qui a été porté à mon attention, que vous avez constamment manqué à vos obligations envers [l’ECDC] à cet égard. S’agissant du second point, une enquête a été menée à la suite de vos allégations de harcèlement psychologique et aucun élément de preuve d’un harcèlement psychologique à votre égard n’a pu être constaté. Après avoir lu les deux rapports [d’enquête], il m’apparaît que vous avez d’importantes difficultés à accepter les décisions de la hiérarchie, [que vous] avez refusé à plusieurs reprises d’accomplir vos tâches et [que vous] vous êtes comporté de manière obstructionniste et provocatrice.

Je peux seulement conclure que ce grave différend a été initié et entretenu par vous au détriment de [l’ECDC]. Votre comportement n’est pas compatible avec [s]es valeurs et votre refus persistant de répondre aux attentes exigées s’oppose à la possibilité d’une relation de travail normale. J’en suis donc venu à la conclusion qu’il a été irrémédiablement porté atteinte à la relation nécessaire de confiance entre vous et moi, en tant que directeur […], et avec les autres membres du personnel. J’ai donc le regret de vous informer qu’il sera mis un terme à votre emploi à l’ECDC conformément à l’article 47 du [RAA]. Suite à la période de préavis de deux mois, votre dernier jour de travail sera le 30 avril 2012. Conformément à l’article 47, [sous] b), ii), du RAA, vous recevrez une compensation égale à un tiers de votre salaire de base pour la période comprise entre la date de cessation de vos fonctions et celle de l’expiration de votre contrat.

Aujourd’hui sera votre dernier jour de travail au bureau […]. Vous vous verrez assigner du travail à accomplir depuis chez vous par votre supérieur hiérarchique, ce qui comprendra la préparation d’un dossier de passation de fonctions.

[…] »

48      Par courriel du 5 mars 2012, le requérant a adressé au directeur et à Mme D des observations écrites concernant le rapport final sur l’insubordination. Par courriel de même date, Mme D a rappelé au requérant que le délai pour la présentation des observations avait expiré et que le directeur avait déjà rendu sa décision.

49      Par courriel du 16 avril 2012, le requérant a demandé au directeur à avoir accès à tous les documents ayant trait à l’enquête sur des accusations d’insubordination et à l’enquête sur des allégations de harcèlement qui ne lui avaient pas encore été transmis. En l’absence de réponse de l’ECDC, par courriel du 16 août 2012, mentionnant en objet « Réclamation […] », le requérant a demandé au directeur de revoir sa « décision de rejet implicite ». Lors de l’audience, le requérant a informé le Tribunal que cette « réclamation » avait été rejetée par décision du 18 décembre 2012, notifiée au requérant le 31 décembre suivant.

50      Il ressort du mémoire en défense de l’ECDC que, le 16 mai 2012, le requérant a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut contre la décision de clôturer sans suite l’enquête sur des allégations de harcèlement et que cette réclamation a été rejetée par décision du 16 septembre 2012.

51      Le 18 mai 2012, le requérant a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut contre la décision litigieuse.

52      Par lettre du 29 juin 2012, le directeur a informé le requérant de sa décision de considérer close l’affaire relative aux prétendues illégalités dans le recrutement d’un agent intérimaire, en raison de la décision du directeur général de l’OLAF de ne pas ouvrir une enquête suite aux allégations du requérant, compte tenu de la faiblesse des indices laissant présumer des irrégularités.

53      Le 28 août 2012, le requérant a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut, reprochant à l’ECDC de ne pas avoir pris de mesures à la suite de sa demande du 6 février 2012 de faire « reconnaître, cesser et empêcher le harcèlement psychologique ». Le 20 septembre 2012, il a présenté un addendum à cette réclamation.

54      Par lettre du 18 septembre 2012, le directeur, agissant en tant qu’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement (ci-après l’« AHCC »), a rejeté la réclamation du 18 mai 2012 contre la décision litigieuse (ci-après la « décision portant rejet de la réclamation »).

 Procédure et conclusions des parties

55      Par lettre du 26 décembre 2012, le requérant a demandé au Tribunal d’accepter la requête dans l’affaire F‑159/12, nonobstant le dépassement de la limite maximale de 30 pages établie au paragraphe 12 des instructions pratiques aux parties sur la procédure juridictionnelle devant le Tribunal […] du 11 juillet 2012 (JO L 260, p. 6), applicables au moment de l’introduction du recours, la requête comportant 52 pages et étant assortie de 175 annexes pour un total de 1 237 pages. Par lettre du 15 janvier 2013, le greffe du Tribunal a informé le requérant de la décision du Tribunal d’accéder à cette demande.

56      Par lettres du greffe du 31 janvier 2013, le Tribunal a informé les parties qu’il envisageait la jonction des affaires F‑159/12 et F‑161/12 aux fins de la procédure écrite, de la procédure orale et de la décision mettant fin à l’instance et les a invitées à présenter leurs observations sur cette jonction. Les parties n’ayant pas présenté d’observations à cet égard, par ordonnance du président de la deuxième chambre du Tribunal du 14 mars 2013, les affaires F‑159/12 et F‑161/12 ont été jointes aux fins de la procédure écrite, de la procédure orale et de la décision mettant fin à l’instance.

57      Par lettre du 30 mai 2013, le requérant a demandé au Tribunal d’autoriser un deuxième échange de mémoires.

58      Par lettres du greffe du 11 juin 2013, les parties ont été informées de ce que le Tribunal estimait nécessaire un deuxième échange de mémoires, limité aux observations éventuelles sur certaines annexes au mémoire en défense dont le requérant estimaient qu’elles pouvaient avoir un impact significatif sur la solution à donner au litige, à savoir les procès-verbaux de trois réunions entre le requérant et sa hiérarchie (annexes B.42, B.44 et B.48), un courriel adressé par Mme B au directeur concernant la possibilité de diligenter une procédure disciplinaire sur le fondement de l’article 86 du statut contre le requérant (annexe B.45), le rapport final de l’enquête sur des allégations de harcèlement (annexe B.63) et la décision du directeur du 18 septembre 2012 concernant la délégation de certains pouvoirs à un des agents de l’ECDC (annexe B.66) (ci-après les « instructions du 11 juin 2013 »). En outre, le Tribunal indiquait au requérant que son mémoire en réplique ne pourrait pas dépasser dix pages.

59      Le 22 juillet 2013, le requérant a déposé au greffe du Tribunal un mémoire en réplique de 75 pages accompagné d’annexes comportant 317 pages. Dans ce mémoire, le requérant ne limitait pas ses observations aux annexes indiquées dans les instructions du 11 juin 2013, mais répliquait sur l’ensemble du mémoire en défense.

60      Par lettre du greffe du 12 septembre 2013, les parties ont été informées de la décision du Tribunal de ne pas accepter le mémoire en réplique déposé le 22 juillet 2013 et de fixer un nouveau délai pour le dépôt d’un mémoire en réplique conforme aux instructions du 11 juin 2013.

61      Le 19 septembre 2013, le requérant a déposé au greffe du Tribunal un nouveau mémoire en réplique de 18 pages. Ce mémoire en réplique était assorti de 22 annexes, comportant 144 pages, parmi lesquelles le mémoire en réplique du 22 juillet 2013. Ce nouveau mémoire en réplique n’étant pas conforme aux instructions du 11 juin 2013, le Tribunal a décidé de ne pas le verser au dossier et a fixé un nouveau délai au 24 octobre 2013 pour le dépôt d’un mémoire en réplique conforme auxdites instructions, ce dont il a informé le requérant par lettre du greffe du 16 octobre 2013. Par la même lettre, le Tribunal a attiré l’attention du requérant sur les articles 32 et 94 du règlement de procédure alors en vigueur et sur les conséquences que le Tribunal de l’Union européenne avait tiré de la violation des dispositions équivalentes de son règlement de procédure, notamment dans son arrêt Strack/Commission (T‑199/11 P, EU:T:2012:691).

62      Le requérant a demandé au Tribunal, par lettre du 23 octobre 2013, d’admettre le mémoire en réplique du 22 juillet 2013 ou celui du 19 septembre 2013.

63      Par lettre du 12 novembre 2013, le greffe du Tribunal a informé les parties que, compte tenu de ce que le requérant n’avait pas déposé dans le délai imparti un mémoire en réplique conforme aux instructions du 11 juin 2013, le Tribunal avait décidé de clôturer la procédure écrite.

64      Par lettre du 26 juillet 2014, le représentant du requérant a demandé au Tribunal l’autorisation de s’exprimer en langue grecque à l’audience au lieu de la langue de procédure et d’organiser l’interprétation simultanée des débats en langue grecque. Cette demande était motivée par les difficultés qu’il craignait d’avoir en plaidant en langue anglaise. En outre, par une autre lettre du même jour, le requérant a demandé au Tribunal d’adopter certaines mesures d’organisation de la procédure, concernant des événements survenus plus d’un an après l’adoption de la décision litigieuse.

65      Par lettre du 14 août 2014, le greffe du Tribunal a informé les parties de la décision du Tribunal de rejeter ces deux demandes.

66      Par lettre du 28 septembre 2014, le requérant a demandé au Tribunal de bien vouloir modifier le procès-verbal d’audience. Par lettres du greffe du 4 décembre 2014, les parties ont été informées de la décision du Tribunal de ne pas modifier ledit procès-verbal.

67      Dans l’affaire F‑159/12, le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision litigieuse, en sorte qu’afin de se conformer à l’arrêt l’ECDC soit tenu, en vertu de l’article 266 TFUE, de le réintégrer dans le service et de lui verser l’ensemble des émoluments qu’il aurait perçus à partir de la date d’entrée en vigueur de la décision attaquée majorés des intérêts de retard au taux appliqué par la Banque centrale européenne à ses opérations principales de refinancement au cours de la période concernée, majorés de deux points de pourcentage et minorés de la compensation pécuniaire qu’il a reçue ainsi que des allocations chômage qu’il aura reçues d’ici sa réintégration ;

–        annuler la décision portant rejet de la réclamation, dans la mesure où elle est susceptible de produire des effets juridiques autonomes ;

–        condamner l’ECDC aux dépens.

68      Dans l’affaire F‑161/12, le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        condamner l’ECDC à verser lui une somme d’au moins 118 500 euros au titre de l’indemnisation du préjudice moral ;

–        condamner l’ECDC aux dépens.

69      Dans son mémoire en défense, l’ECDC conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter les recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

 Sur les conclusions en annulation de la décision portant rejet de la réclamation

70      Selon la jurisprudence, les conclusions en annulation formellement dirigées contre le rejet d’une réclamation ont pour effet de saisir le juge de l’acte contre lequel la réclamation a été présentée, lorsqu’elles sont, comme telles, dépourvues de contenu autonome (arrêt Balionyte-Merle/Commission, F‑113/12, EU:F:2013:191, point 24, et la jurisprudence citée).

71      En l’espèce, la décision portant rejet de la réclamation confirme la décision litigieuse en se limitant à apporter certaines précisions sur la motivation et sans que l’administration ait opéré un réexamen de la situation du requérant en fonction d’éléments de droit ou de fait nouveaux. En pareille hypothèse, c’est bien la légalité de l’acte initial faisant grief qui doit être examinée en prenant en considération la motivation figurant dans la décision de rejet de la réclamation, cette motivation étant censée coïncider avec cet acte (arrêt Buxton/Parlement, F‑50/11, EU:F:2012:51, point 21).

72      Par conséquent, les conclusions en annulation dirigées contre la décision portant rejet de la réclamation sont dépourvues de contenu autonome et le recours doit être regardé comme dirigé contre la décision litigieuse, dont la motivation est précisée par la décision portant rejet de la réclamation (voir, en ce sens, arrêt Eveillard/Commission, T‑258/01, EU:T:2004:177, points 31 et 32).

 Sur les conclusions en annulation de la décision litigieuse

73      Le requérant soulève au soutien de ses conclusions en annulation de la décision litigieuse quinze moyens, tirés respectivement :

1.      de la violation du droit d’être entendu ;

2.      de la violation de l’obligation de motivation ;

3.      de l’atteinte à la présomption d’innocence ;

4.      de la violation du devoir de diligence ;

5.      de la violation du droit du requérant à avoir accès aux dossiers des deux enquêtes ;

6.      de la prétendue inaptitude des deux enquêteurs ;

7.      du détournement de pouvoir ;

8.      de la violation de l’article 2, paragraphe 3, de l’annexe IX du statut ;

9.      de l’erreur manifeste dans l’appréciation des faits ;

10.      de l’erreur de droit dans le choix de la base juridique de la décision litigieuse ;

11.      de l’erreur de fait quant au « comportement ultérieur » reproché ;

12.      des erreurs manifestes dans l’appréciation de l’insubordination ;

13.      de la violation du principe de proportionnalité ;

14.      de l’absence de compétence de la personne ayant signé la décision portant rejet de la réclamation ;

15.      de l’absence de compétence de l’ECDC et du Tribunal pour statuer sur des accusations concernant des comportements pénalement répréhensibles.

74      En outre, dans l’affaire F‑159/12, dans la partie de la requête intitulée « Considérations préliminaires », le requérant soulève deux moyens préliminaires, tirés, le premier, de ce que la décision litigieuse serait en réalité une sanction disciplinaire déguisée (ci-après le « premier moyen préliminaire ») et, le second, du détournement de pouvoir (ci-après le « second moyen préliminaire »).

75      Par ailleurs, le Tribunal constate que dans les annexes à la requête dans l’affaire F‑159/12, libellées A.0a, A.0b, A.0c et A.0d, le requérant développe plusieurs griefs supplémentaires, en justifiant son choix par le souci de rendre les arguments ou griefs présentés dans la requête « aussi concis que possible ».

76      Toutefois, le Tribunal a déjà jugé que, si la requête peut être étayée et complétée, sur des points spécifiques, par des renvois à des extraits de pièces qui y sont annexées, les annexes ont une fonction purement probatoire et instrumentale et ne sauraient servir à développer un moyen sommairement exposé dans la requête en avançant des griefs ou des arguments ne figurant pas dans celle-ci. Il découle en effet de l’article 35, paragraphe 1, sous e), du règlement de procédure applicable au moment de l’introduction du recours, devenu, avec modifications, l’article 50, paragraphe 1, sous e), du règlement de procédure, que le requérant doit indiquer dans sa requête les griefs précis sur lesquels le Tribunal doit se prononcer ainsi que, de manière à tout le moins sommaire, les éléments de droit et de fait sur lesquels ces griefs sont fondés (arrêt Giannini/Commission, F‑49/08, EU:F:2009:76, point 86).

77      Il s’ensuit que les griefs développés uniquement dans les annexes à la requête libellées A.0a, A.0b, A.0c et A.0d sont irrecevables.

78      Le Tribunal procédera d’abord à l’examen du premier moyen préliminaire, ensemble avec le dixième moyen, puis à l’examen du second moyen préliminaire qui sera traité conjointement avec le septième moyen. Ensuite, le Tribunal se penchera sur les autres moyens dans l’ordre suivi par le requérant, en examinant ensemble les neuvième, onzième et douzième moyens qui sont tous trois tirés d’une erreur manifeste d’appréciation.

 Sur le premier moyen préliminaire et le dixième moyen, tirés de ce que la décision litigieuse serait en réalité une sanction disciplinaire déguisée et que sa base juridique serait entachée d’une erreur de droit

79      Le requérant considère que la décision litigieuse est en réalité une mesure disciplinaire qui aurait dû être adoptée, le cas échéant, en application de l’article 86 du statut ainsi que de l’annexe IX de celui-ci.

80      Le caractère disciplinaire de la décision litigieuse ressortirait, premièrement, de ce qu’elle est motivée essentiellement par le comportement du requérant et par le grave différend qui l’opposait à son supérieur hiérarchique et, deuxièmement, de ce que la décision litigieuse prend effet « immédiatement », puisque, en substance, l’accès à son bureau lui a été interdit à compter de la date de la décision litigieuse. Selon le requérant, en adoptant la décision litigieuse sur le fondement de l’article 47, sous b), ii), du RAA, l’ECDC l’aurait privé des garanties procédurales prévues par la procédure disciplinaire.

81      Le Tribunal rappelle que, selon une jurisprudence constante, relative aux agents temporaires, mais applicable par analogie aux agents contractuels, en raison du large pouvoir d’appréciation dont dispose l’AHCC, rien n’oblige celle-ci, en cas de faute susceptible de justifier le licenciement d’un agent temporaire ou contractuel, à engager une procédure disciplinaire à l’égard de ce dernier plutôt que de recourir à la faculté de résiliation unilatérale du contrat prévue à l’article 47, sous b), du RAA. Ce n’est que dans l’hypothèse où l’AHCC entend licencier un agent temporaire ou contractuel sans préavis, en cas de manquement grave à ses obligations, qu’il convient d’engager, conformément à l’article 49, paragraphe 1, du RAA, la procédure disciplinaire organisée à l’annexe IX du statut pour les fonctionnaires et applicable par analogie aux agents temporaires et contractuels (arrêts Longinidis/Cedefop, T‑283/08 P, EU:T:2011:338, point 100 ; Gomes Moreira/ECDC, F‑80/11, EU:F:2013:159, point 49, et CT/EACEA, F‑36/13, EU:F:2013:190, point 54).

82      Il s’ensuit qu’en décidant de résilier le contrat du requérant avant son échéance, avec préavis, sur le fondement de l’article 47, sous b), ii), du RAA, sans procéder à l’ouverture d’une procédure disciplinaire, l’AHCC n’a commis aucune illégalité.

83      Le premier moyen préliminaire et le dixième moyen doivent dès lors être écartés.

 Sur le second moyen préliminaire et le septième moyen, tirés d’un détournement de pouvoir

84      Le requérant considère que la décision litigieuse aurait été prise en représailles contre sa dénonciation d’éventuelles irrégularités dans l’engagement d’un agent intérimaire. Il reproche donc à l’ECDC d’avoir commis un détournement de pouvoir et d’avoir violé l’article 22 bis, paragraphe 3, du statut, ainsi que l’article 24, paragraphe 3, sous c), de l’annexe à la charte sociale européenne, signée à Turin le 18 octobre 1961.

85      En particulier, le requérant fait valoir que la décision litigieuse a été adoptée seulement deux mois après qu’il avait signalé les irrégularités en cause. En outre, il rappelle que ses allégations visaient, entre autres, « l’AHCC » ainsi que « certains de ses proches collaborateurs » et que, d’une part, elles avaient été fort mal prises par Mme B et, d’autre part, elles ont été rejetées par le directeur « en dépit du fait qu’elles étaient bien fondées ». Ensuite, le requérant affirme avoir subi « un harcèlement psychologique intense de la part de [Mme B] » peu après qu’il avait dénoncé les irrégularités susmentionnées. Il en conclut que l’ECDC a tenté de l’empêcher d’accomplir son devoir de rendre compte au conseil d’administration de l’ECDC des graves irrégularités « concernant son licenciement ». Par ailleurs, il fait valoir qu’« une étude anonyme menée peu avant qu[’il] ait soulevé les allégations susmentionnées a révélé que le personnel de l’ECDC était réticent à exprimer des critiques au travail par crainte de représailles de la part de sa direction, dont [le personnel] percevait en outre les pratiques essentiellement comme un détournement de pouvoir ». Enfin, il observe que l’ECDC ne dispose pas de règles internes protégeant les agents qui rendent compte d’une illégalité éventuelle dont ils auraient eu connaissance.

86      Au titre des mesures d’organisation de la procédure, le requérant demande au Tribunal d’inviter l’ECDC à produire toute la correspondance entre le directeur, Mme A, Mme B, Mme C et Mme D pendant la période allant du 15 décembre 2011 au 24 février 2012.

87      L’ECDC demande au Tribunal de rejeter le second moyen préliminaire et le septième moyen comme non fondés.

88      Le Tribunal constate, d’abord, que le grief tiré de la violation de l’article 22 bis, paragraphe 3, du statut et de l’article 24, paragraphe 3, sous c), de l’annexe à la charte sociale européenne n’est étayé par aucune argumentation, contrairement à la règle prévue à l’article 35, paragraphe 1, sous e), du règlement de procédure applicable au moment de l’introduction du recours, devenu, avec modifications, l’article 50, paragraphe 1, sous e), du règlement de procédure, de sorte que ledit grief doit être déclaré irrecevable.

89      Ensuite, le Tribunal rappelle que, selon la jurisprudence, une décision n’est entachée de détournement de pouvoir que si elle apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été prise pour atteindre des fins autres que celles excipées (arrêts Lux/Cour des comptes, 69/83, EU:C:1984:225, point 30 ; Pitrone/Commission, T‑46/89, EU:T:1990:62, point 70, et Angelidis/Parlement, F‑104/08, EU:F:2010:23, point 89).

90      En l’espèce, d’une part, le Tribunal constate qu’il ressort du texte de la décision litigieuse que celle-ci se fonde sans ambiguïté sur des manquements du requérant à ses obligations vis-à-vis de l’ECDC et sur la rupture irrémédiable du lien de confiance qui en a découlé.

91      D’autre part, le Tribunal estime que le requérant se limite à de pures spéculations sans apporter d’indices objectifs, pertinents et concordants de l’existence d’un détournement de pouvoir. En particulier, le Tribunal rappelle que l’OLAF a décidé de ne donner aucune suite aux dénonciations du requérant en raison de la faiblesse des indices d’illégalités dont il avait fait état. Le requérant ne saurait donc se prévaloir du fait que, à son avis, ses dénonciations « étaient bien fondées » et qu’elles auraient été écartées seulement parce qu’elles concernaient le directeur ou son entourage. Dans le même sens, il y a lieu de rejeter l’argument selon lequel la décision litigieuse était liée au prétendu harcèlement moral qu’il aurait subi de la part de Mme B. En effet, le rapport final de l’enquête sur des allégations de harcèlement exclut qu’il ait subi un tel harcèlement et cette enquête a été clôturée sans suite par décision du directeur, décision que le requérant n’a pas contestée devant le juge de l’Union et qui est, partant, devenue définitive.

92      Il y a lieu, en conséquence, de rejeter le second moyen préliminaire ainsi que le septième moyen, tirés du détournement de pouvoir, comme non fondés, sans qu’il soit nécessaire d’adopter les mesures d’organisation de la procédure demandées par le requérant.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation du droit d’être entendu

–       Arguments des parties

93      Le requérant considère que la décision litigieuse a été adoptée sans qu’il ait été entendu au préalable. Ce faisant, l’ECDC aurait violé l’article 1er, paragraphe 1, de l’annexe IX du statut et l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

94      Ce moyen est articulé en quatre griefs.

95      Par son premier grief, le requérant rappelle que, dans la décision litigieuse, le directeur soutient qu’il lui apparaît clairement, à partir du rapport final sur l’insubordination ainsi que du « comportement ultérieur qui a été porté à [s]on attention », que le requérant a constamment manqué à ses obligations envers l’ECDC. Or, dans la décision portant rejet de la réclamation, l’AHCC cite comme exemples de ce « comportement ultérieur » du requérant plusieurs violations des obligations de ce dernier vis-à-vis de l’ECDC, ainsi que de nombreux épisodes d’insubordination. Ces agissements sont décrits dans des courriels envoyés au requérant par Mme B entre le 23 janvier et le 7 février 2012, donc postérieurs à la clôture de l’enquête sur des accusations d’insubordination. Le requérant souligne qu’il n’a jamais été entendu sur ce comportement ultérieur.

96      Par son deuxième grief, le requérant considère avoir été informé du fait que l’AHCC lui imputait la responsabilité pour le « grave différend » avec son supérieur hiérarchique pour la première fois par la décision litigieuse. Il prétend qu’auparavant le seul document pertinent qui lui avait été transmis, à savoir le rapport final de l’enquête sur des allégations de harcèlement, faisait état de l’existence de ce différend, mais sans indiquer qui en était le responsable.

97      Selon le requérant, s’il avait eu la possibilité de s’exprimer sur cet aspect, il aurait pu démontrer que l’AHCC avait commis une erreur manifeste d’appréciation en le désignant comme responsable dudit différend et qu’elle avait violé l’article 1er, paragraphe 1, de l’annexe IX du statut en ce qu’il n’avait pas été informé de son « implication personnelle ».

98      Le troisième grief est tiré de ce que le requérant n’aurait jamais été informé ni entendu sur la gravité des conséquences que l’AHCC envisageait de tirer des constatations figurant dans le rapport final sur l’insubordination ni sur la base juridique sur le fondement de laquelle l’AHCC avait l’intention d’adopter la décision litigieuse.

99      Le requérant estime que, s’il avait eu la possibilité de prendre position sur ces questions, il aurait pu soutenir qu’« il s’était attendu à bénéficier de la possibilité de donner son avis de manière approfondie devant un conseil de discipline et qu’il aurait été illégal pour l’ECDC de renoncer à cette procédure disciplinaire ». Selon le requérant, en violation de l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte, l’ECDC ne lui a pas donné la possibilité de présenter son avis de manière à empêcher son licenciement en vertu de l’article 47, sous b), ii), du RAA.

100    Par son quatrième grief, le requérant observe qu’il a reçu l’invitation pour la réunion du 17 février 2012 le jour même, par une convocation qui ne précisait ni l’objet ni l’ordre du jour de ladite réunion. Lors de cette réunion, il s’est vu impartir un délai de trois jours ouvrés pour présenter ses observations sur les deux rapports d’enquête et l’AHCC a rejeté sa demande visant à obtenir un délai plus long. Ce délai est, à son avis, trop court pour pouvoir considérer qu’il a valablement été entendu au sens de l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte.

101    Il en va de même, selon le requérant, s’agissant de l’enquête sur des accusations d’insubordination. En effet, le 26 janvier 2012, l’enquêteur lui avait accordé deux jours ouvrables et demi pour présenter, sur le fondement de l’article 1er, paragraphe 1, ou de l’article 2, paragraphe 1, de l’annexe IX du statut, des observations écrites sur les faits ayant fait l’objet de l’enquête. Ce délai aussi serait insuffisant et violerait l’article 1er, paragraphe 1, de l’annexe IX du statut.

102    L’ECDC conteste les arguments du requérant.

103    Tout d’abord, l’ECDC observe que, avant l’adoption de la décision litigieuse, Mme B avait fait part au requérant à plusieurs reprises de griefs à son égard relevant de son refus constant d’exécuter les tâches qu’elle lui confiait et de la remise en question permanente de son autorité en tant que son supérieur hiérarchique direct. Par ailleurs, dans la mesure où ces griefs ne concernaient pas uniquement des événements isolés mais se rapportaient plutôt à une attitude générale et constante du requérant, l’ECDC considère que le fait que le requérant n’ait pas été entendu sur tel ou tel épisode spécifique serait sans importance.

104    En tout état de cause, l’ECDC observe que le requérant a été entendu à deux reprises lors de la procédure administrative d’enquête sur des accusations d’insubordination, à savoir le 13 janvier 2012 par l’enquêteur et le 17 février 2012 par le directeur. En outre, il a été mis en mesure, à plusieurs reprises, de formuler des observations sur le rapport final de cette enquête, à savoir les 23 et 24 janvier 2012 et le 17 février 2012. Toutefois, à l’issue de l’enquête sur des accusations d’insubordination, le requérant aurait toujours refusé de faire part de ses observations dans les délais impartis, en décidant ainsi de ne pas exercer son droit d’être entendu.

105    Ensuite, l’ECDC considère que le fait que le requérant n’aurait pas été informé « de la base juridique et de la [sanction] que l’AHCC envisageait de prendre sur cette base […] est dû à son ignorance du statut et de la législation applicable ». En tout état de cause, le requérant aurait admis dans son recours avoir été préalablement averti à plusieurs reprises par son supérieur hiérarchique des conséquences potentiellement graves que son comportement pouvait avoir.

106    Enfin, l’ECDC considère que les délais impartis au requérant pour présenter ses observations sur le rapport final sur l’insubordination et sur le rapport final de l’enquête sur des allégations de harcèlement étaient proportionnés à la portée desdites enquêtes et à la longueur de ces rapports.

–       Appréciation du Tribunal

107    Il y a lieu de rappeler d’emblée que, comme le Tribunal l’a constaté aux points 81 et 82 du présent arrêt, la décision litigieuse a été adoptée sur le fondement de l’article 47, sous b), ii), du RAA, de sorte que toute référence aux dispositions régissant la procédure disciplinaire faite par le requérant est sans pertinence dans l’analyse du présent moyen.

108    Ensuite, selon l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte, toute personne a le droit d’être entendue avant qu’une mesure individuelle qui l’affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre. En outre, le respect du droit d’être entendu s’impose même lorsque la réglementation applicable ne prévoit pas expressément une telle formalité (arrêt Kamino International Logistics et Datema Hellmann Worldwide Logistics, C‑129/13 et C‑130/13, EU:C:2014:2041, point 39).

109    Selon la jurisprudence, le droit d’être entendu garantit à toute personne la possibilité de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours de la procédure administrative et avant l’adoption d’une décision susceptible d’affecter de manière défavorable ses intérêts (voir arrêt Foshan Shunde Yongjian Housewares & Hardware/Conseil, C‑141/08 P, EU:C:2009:598, point 83).

110    Il n’est pas contesté que, dans le cas d’espèce, la décision de résilier le contrat du requérant sur le fondement de l’article 47, sous b), ii), du RAA est une mesure individuelle qui affecte défavorablement le requérant (voir, s’agissant de la résiliation anticipée du contrat d’un agent parlementaire accrédité, arrêt CH/Parlement, F‑129/12, EU:F:2013:203, point 34 ; voir également, s’agissant du non-renouvellement du contrat à durée déterminée d’un agent temporaire, arrêt Tzikas/AFE, F‑120/13, EU:F:2014:197, point 46). Le requérant avait donc le droit d’être entendu avant l’adoption de la décision litigieuse, même si l’article 47, sous b), ii), du RAA ne prévoit pas spécifiquement un tel droit.

111    En ce qui concerne les premier, deuxième et quatrième griefs, il ressort du libellé de la décision litigieuse que celle-ci est motivée par la constatation que le requérant avait manqué à ses obligations envers l’ECDC, en ne se conformant pas aux instructions de son supérieur hiérarchique direct et en se comportant de manière obstructionniste et provocatrice. Cette constatation se fonde sur le rapport final sur l’insubordination et sur un « comportement ultérieur » du requérant qui avait été porté à la connaissance du directeur.

112    Pour ce qui est de ce « comportement ultérieur », l’AHCC a fait référence, dans la décision portant rejet de la réclamation, à plusieurs courriels par lesquels Mme B a stigmatisé différents agissements du requérant. En particulier, Mme B a reproché au requérant de ne pas avoir participé à des réunions auxquelles il avait été convoqué (courriels des 3 et 7 février 2012), de ne pas avoir préparé des documents qui lui avaient été demandés (courriels du 25 janvier et du 6 février 2012), d’avoir eu un comportement inapproprié lors d’une réunion (courriel du 31 janvier 2012) et enfin d’avoir mis ses compétences en question, malgré le fait qu’elle lui avait déjà signalé qu’elle considérait ce comportement « impoli et agaçant » (courriel du 23 janvier 2012). Par ailleurs, dans les courriels des 25 janvier, 6 février et 7 février 2012, Mme B a informé le requérant que son comportement allait être porté à la connaissance du directeur, de sorte que le requérant était parfaitement conscient que les agissements qui lui étaient reprochés par Mme B seraient connus du directeur.

113    Force est donc de constater que les agissements dont les courriels cités au point précédent font état ne sont rien d’autre que des exemples du comportement déjà reproché au requérant dans les conclusions du rapport final sur l’insubordination, à savoir le fait de ne pas suivre les instructions claires et répétées de son supérieur hiérarchique direct, en violation de l’article 21 du statut.

114    Or, il ressort du dossier que, premièrement, le requérant a été effectivement invité à présenter ses observations d’abord sur le projet de rapport de l’enquête sur des accusations d’insubordination puis, lors de la réunion du 17 février 2012, sur le rapport final de cette enquête (voir point 43 du présent arrêt) et qu’il n’a pas présenté d’observations dans les délais qui lui avaient été impartis. Deuxièmement, le requérant aurait pu présenter des observations sur les agissements stigmatisés dans les courriels mentionnés au point 112 du présent arrêt, tant lors de la réunion du 17 février 2012 que dans le délai imparti pour présenter ses observations sur le rapport final sur l’insubordination et donné lors de cette réunion. Toutefois, il apparaît qu’en se limitant à ne transmettre des observations à l’ECDC que le 5 mars 2012, donc presque deux semaines après l’expiration du dernier délai qui lui avait été imparti, le requérant a en fait renoncé à exercer son droit d’être entendu à cet égard.

115    Le requérant ayant ainsi été mis en mesure de réagir et de présenter des observations sur les agissements qui lui étaient reprochés, le grief tiré de ce qu’il n’aurait pas été entendu sur le « comportement ultérieur » reproché ne saurait donc prospérer.

116    Sur le grief tiré de la présumée incertitude sur la responsabilité du différend entre le requérant et Mme B, il suffit de constater que, dans le rapport final sur l’insubordination, l’enquêteur affirme que, en violation de l’article 21 du statut, le requérant n’a pas suivi les instructions claires de son supérieur hiérarchique, et cela nonobstant la confirmation de ces instructions par l’autorité hiérarchique immédiatement supérieure, conformément à l’article 21 bis, paragraphe 1, du statut. L’enquêteur a donc émis l’avis que le requérant avait manqué à ses obligations envers l’ECDC et que cela justifiait l’ouverture d’une procédure disciplinaire.

117    Au vu du libellé de ce rapport, le requérant ne peut certainement pas prétendre avoir découvert pour la première fois à la lecture de la décision litigieuse que la responsabilité du différend avec son supérieur hiérarchique direct lui était imputée. Dans ces circonstances, il y a lieu de juger que le requérant a été mis en mesure de présenter ses observations sur la responsabilité du différend avec son supérieur hiérarchique direct qui, aux termes du rapport final sur l’insubordination, lui était clairement imputée. Par conséquent, le présent grief ne saurait être retenu.

118    Pour ce qui est enfin des différents délais impartis au requérant pour présenter ses observations, le Tribunal constate que l’enquêteur a donné au requérant un délai d’un jour et demi de travail pour présenter ses observations sur le rapport final sur l’insubordination et que, lors de la réunion du 17 février 2012, le directeur a laissé au requérant encore cinq jours pour présenter ses observations sur le rapport final sur l’insubordination et sur les conclusions et les recommandations figurant dans ledit rapport.

119    Le Tribunal estime que ces délais se justifient, d’une part, par le fait que le requérant connaissait parfaitement le contexte factuel dans lequel les deux enquêtes s’inscrivaient et, d’autre part, par la brièveté des documents qui lui avaient été communiqués. En effet, le rapport final sur l’insubordination se compose de sept pages, dont six sont consacrées à la description des faits et seulement une aux conclusions de l’enquêteur. Par ailleurs, le rapport final est identique au projet transmis au requérant la première fois le 23 janvier 2012 à 23 h 39 et la seconde fois le lendemain à 17 h 39. Par conséquent, lorsque le directeur a accordé au requérant, lors de la réunion du 17 février 2012, un délai de cinq jours pour présenter ses observations sur le rapport final sur l’insubordination, le requérant connaissait déjà le contenu dudit rapport depuis plus de trois semaines. Quant aux conclusions du rapport final de l’enquête sur des allégations de harcèlement, il s’agit d’un texte de sept lignes. Dans ces circonstances, le Tribunal estime que le délai imparti au requérant était largement suffisant pour présenter des observations.

120    Pour ce qui est enfin de la réunion du 17 février 2012, le Tribunal constate que le requérant était déjà au courant, depuis le 24 janvier 2012, de ce que le directeur avait reçu le rapport final sur l’insubordination. En effet, c’est le requérant lui-même qui, dans un courriel du 25 janvier 2012 adressé à M. F, a écrit qu’il attendait « un signe de la part du directeur » pour savoir s’il pouvait encore remettre des observations sur ledit rapport. Dans ces circonstances, le fait que la convocation à la réunion du 17 février 2012 soit intervenue avec un bref préavis et par un courriel qui ne précisait pas l’objet de la réunion ne peut pas avoir affecté la possibilité qu’avait le requérant de présenter ses observations sur le rapport final sur l’insubordination directement au directeur, comme le lui avait proposé M. F dès le 24 janvier 2012, lorsqu’il lui a soumis une copie du rapport. En tout état de cause, étant donné le contexte factuel et en particulier la teneur de la réunion du 21 décembre 2011 entre, notamment, le directeur et le requérant, et compte tenu également de leur relation hiérarchique, le requérant était en mesure de comprendre quel serait le sujet de la réunion du 17 février 2012 et de s’en informer, s’il avait des doutes à ce sujet, avant de s’y rendre.

121    Partant, il y a lieu de rejeter le grief tiré de ce que les délais impartis au requérant pour présenter ses observations ne seraient pas compatibles avec l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte.

122    En ce qui concerne le troisième grief, tiré de ce que le requérant n’aurait pas été informé des conséquences que l’AHCC envisageait de tirer des constatations figurant dans le rapport final sur l’insubordination, ni entendu sur la gravité desdites conséquences, ni informé ou entendu sur la base juridique sur le fondement de laquelle l’AHCC avait l’intention d’adopter la décision litigieuse, il ressort du dossier que l’AHCC n’a jamais évoqué, avant l’adoption de la décision litigieuse, la possibilité d’adopter à l’égard du requérant une décision de résiliation de son contrat sur le fondement de l’article 47, sous b), ii), du RAA. Il y a lieu de constater notamment que les différentes indications de la part de Mme B selon lesquelles le comportement du requérant pourrait avoir des conséquences sur son rapport de notation, voire « des conséquences plus sérieuses », ne le mettaient pas en mesure de comprendre avec certitude que l’AHCC envisageait de mettre fin prématurément à son contrat. Le requérant n’a donc pas eu la possibilité de présenter des observations sur les conséquences que l’AHCC envisageait de tirer de son comportement et, notamment, sur le fait qu’elle avait l’intention de résilier son contrat en faisant application de la disposition susmentionnée.

123    Il y a donc lieu de constater que, en ce qui concerne cet aspect de la décision litigieuse, le droit du requérant d’être entendu n’a pas été respecté par l’ECDC, en violation de l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte.

124    Toutefois, pour que la violation du droit d’être entendu puisse aboutir, en l’espèce, à l’annulation de la décision litigieuse, il est encore nécessaire d’examiner si, en l’absence de cette irrégularité, la procédure aurait pu aboutir à un résultat différent (arrêts Kamino International Logistics et Datema Hellmann Worldwide Logistics, EU:C:2014:2041, point 79 ; CH/Parlement, EU:F:2013:203, point 38, et Wahlström/Frontex, F‑117/13, EU:F:2014:215, point 28).

125    En effet, la règle selon laquelle le destinataire d’une décision faisant grief doit être en mesure de faire valoir ses observations avant que celle-ci ne soit prise a pour but de permettre à l’autorité concernée de tenir utilement compte de l’ensemble des éléments pertinents. Afin d’assurer une protection effective dudit destinataire, elle a notamment pour objet que celui-ci puisse corriger une erreur ou faire valoir tels éléments relatifs à sa situation personnelle qui militent dans le sens que la décision soit prise, ne soit pas prise ou qu’elle ait tel ou tel contenu (arrêt France/People’s Mojahedin Organization of Iran, C‑27/09 P, EU:C:2011:853, point 65, et la jurisprudence citée).

126    À cet égard, le requérant fait valoir que, s’il avait été entendu sur les conséquences que l’AHCC envisageait de tirer de son comportement, il aurait pu demander l’ouverture d’une procédure disciplinaire. En outre, interrogé lors de l’audience, le requérant a affirmé qu’il aurait pu proposer à l’AHCC d’adopter des solutions alternatives, telles que, par exemple, une mutation dans un autre service ou une suspension temporaire de ses fonctions pour lui « permettre de réfléchir ».

127    Or, le Tribunal constate que la décision litigieuse se fonde sur une rupture irrémédiable du lien de confiance avec le requérant due à une longue série d’agissements inappropriés de celui-ci et que le requérant a eu la possibilité de s’exprimer, à plusieurs reprises, sur le comportement qui lui était reproché.

128    Toutefois, il ressort du dossier, et notamment des faits tels qu’établis dans le rapport final sur l’insubordination, que le comportement reproché au requérant n’a commencé qu’à partir de la nomination de Mme B comme chef du service juridique et, partant, depuis que celle-ci était devenue son supérieur hiérarchique. L’ECDC ne prétend pas que le comportement du requérant ait donné lieu à des problèmes de nature disciplinaire ou autre avant la période visée par ce rapport ou que, par exemple, le requérant avait déjà manqué à ses obligations en vertu des articles 21 et 21 bis du statut avant cette période. Si l’ECDC a affirmé, lors de l’audience, que la mutation du requérant sur un autre poste n’était pas possible en l’occurrence, il s’est borné à l’affirmer sans apporter d’élément de preuve de ce prétendu état de fait qui, par ailleurs, ne ressort nullement du dossier, ce qui démontre que l’AHCC n’a pas envisagé d’autre solution à l’insubordination avérée du requérant que de mettre fin à son contrat.

129    Or, la décision de mettre fin avant son terme au contrat d’un agent contractuel, aussi justifiée qu’elle puisse l’être, constitue un acte d’une extrême gravité à la fois pour l’institution ou l’agence concernée, qui l’avait sélectionné et recruté, normalement à l’issue d’une procédure de sélection hautement compétitive, et plus encore pour l’agent, qui se retrouve subitement sans emploi et dont la carrière pourrait être affectée négativement pendant de nombreuses années. Outre le fait qu’il s’agit d’un droit fondamental de l’agent concerné, l’exercice par ce dernier du droit de s’exprimer utilement sur la décision de licenciement envisagée relève de la responsabilité de l’AHCC, responsabilité qu’elle doit assurer de manière scrupuleuse. Il n’incombe pas au Tribunal de prendre position, dans le cadre de ce grief, sur la faisabilité, ou non, d’autres solutions qui auraient pu être envisagées en l’espèce. En tout état de cause, retenir que l’AHCC aurait adopté une décision identique, même après avoir entendu le requérant, reviendrait à vider de sa substance le droit fondamental d’être entendu consacré à l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte, dès lors que le contenu même de ce droit implique que l’intéressé ait la possibilité d’influencer le processus décisionnel en cause (arrêt Wahlström/Frontex, EU:F:2014:215, point 33, et la jurisprudence citée).

130    Dans les circonstances de l’espèce, le Tribunal n’est pas en mesure d’exclure que, s’il avait été entendu avant que l’AHCC ne décide de résilier son contrat d’engagement sur le fondement de l’article 47, sous b), ii), du RAA, le requérant aurait pu convaincre l’AHCC d’adopter une décision différente.

131    Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu d’accueillir le troisième grief du premier moyen et d’annuler la décision litigieuse au motif qu’avant d’adopter la décision litigieuse l’AHCC n’a pas entendu le requérant sur les conséquences qu’elle entendait tirer du comportement de celui-ci.

132    Bien que la décision litigieuse doive être annulée, le Tribunal examinera, dans un souci de bonne administration de la justice, les autres moyens soulevés par le requérant.

 Sur le deuxième moyen, relatif à la violation de l’obligation de motivation

–       Arguments des parties

133    Le requérant considère que la décision litigieuse n’est pas suffisamment motivée à plusieurs égards, en violation de l’article 25 du statut et de l’article 41, paragraphe 2, sous c), de la Charte.

134    Premièrement, le requérant souligne que la décision litigieuse lui reproche un « comportement ultérieur » contraire à l’article 21 du statut, sans spécifier « les moments par rapport auxquels un tel comportement était prétendument ‘ultérieur’ ». Cette incertitude chronologique, ainsi que l’absence de toute précision factuelle ou élément de preuve dudit comportement, l’auraient empêché de comprendre en quoi consistait le « comportement ultérieur » qui lui était reproché. En outre, le requérant considère que, au vu du caractère essentiellement disciplinaire de la décision litigieuse et de sa sévérité, l’insuffisance de la motivation ne saurait valablement être palliée par la décision portant rejet de la réclamation sans enfreindre l’article 25 du statut.

135    Deuxièmement, le requérant observe que la décision litigieuse invoque l’existence d’une rupture irrémédiable de la relation de confiance avec le directeur et « avec [d’]autres membres du personnel », mais ne précise pas qui étaient ces « autres membres du personnel ». Le requérant admet pouvoir « facilement supposer » que Mme B serait un de ces membres du personnel, mais il estime être dans l’impossibilité de comprendre qui étaient les autres.

136    Troisièmement, le requérant considère que la décision litigieuse n’est pas suffisamment motivée pour ce qui concerne la responsabilité qui lui est imputée du « grave différend » qu’il avait avec son supérieur hiérarchique direct.

137    Quatrièmement, le requérant reproche à l’AHCC de ne pas avoir expliqué les raisons qui l’ont amenée à ne pas poursuivre la procédure disciplinaire et à adopter la décision litigieuse sur le fondement de l’article 47, sous b), ii), du RAA.

138    Cinquièmement, le requérant estime que les conclusions du rapport final sur l’insubordination sur lesquelles la décision litigieuse se fonde sont motivées de façon insuffisante.

139    L’ECDC considère que la décision litigieuse est suffisamment motivée et demande au Tribunal de rejeter le présent moyen comme manifestement non fondé.

–       Appréciation du Tribunal

140    Le Tribunal rappelle d’emblée que parmi les garanties conférées par le droit de l’Union dans les procédures administratives figure, notamment, le principe de bonne administration, consacré par l’article 41 de la Charte, lequel comporte, en particulier, « l’obligation pour l’administration de motiver ses décisions ».

141    En outre, l’obligation de motiver les décisions faisant grief constitue un principe essentiel du droit de l’Union auquel il ne saurait être dérogé qu’en raison de considérations impérieuses. Cette obligation, prévue à l’article 25, deuxième alinéa, du statut, a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour savoir si l’acte est bien fondé ou s’il est éventuellement entaché d’un vice permettant d’en contester la validité devant le juge de l’Union et, d’autre part, de permettre à ce dernier d’exercer son contrôle sur la légalité de cet acte. Partant, la motivation doit, en principe, être communiquée à l’intéressé en même temps que l’acte lui faisant grief (arrêts Tzirani/Commission, F‑46/11, EU:F:2013:115, points 137, 139 et 140, et Arguelles Arias/Conseil, F‑122/12, EU:F:2013:185, points 78 à 81, et la jurisprudence citée).

142    Pour décider s’il a été satisfait à l’exigence de motivation, il est nécessaire de tenir compte non seulement des documents par lesquels la décision est communiquée, mais également des circonstances dans lesquelles celle-ci a été prise et portée à la connaissance de l’intéressé. Il est ainsi possible de considérer qu’une décision est suffisamment motivée dès lors qu’elle est intervenue dans un contexte connu du fonctionnaire concerné lui permettant de comprendre sa portée (arrêt Guinet/BEI, F‑107/12, EU:F:2014:1, point 44, et la jurisprudence citée).

143    En l’espèce, le Tribunal rappelle d’abord que l’AHCC n’avait aucune obligation de diligenter une procédure disciplinaire et, dès lors, n’était pas obligée d’expliquer, dans la décision litigieuse, les raisons pour lesquelles elle fondait sa décision sur l’article 47, sous b), ii), du RAA et non sur les dispositions relatives au régime disciplinaire.

144    Ensuite, il ressort du libellé de la décision litigieuse (voir point 47 du présent arrêt) que, premièrement, le directeur constate que, lors d’une réunion tenue en décembre 2011 avec le requérant, il lui avait indiqué qu’il s’attendait à ce que celui-ci se conforme aux instructions de Mme B. Deuxièmement, le directeur indique qu’il lui apparaît clair que le requérant a constamment manqué à ses obligations à l’égard de l’ECDC et que cela ressort, d’une part, du rapport final sur l’insubordination et, d’autre part, de son « comportement ultérieur ». Troisièmement, il affirme, après avoir lu les rapports des deux enquêtes, être d’avis que le requérant a d’importantes difficultés à accepter les décisions de sa hiérarchie, qu’il a refusé à plusieurs reprises d’accomplir ses tâches et qu’il s’est comporté de manière obstructionniste et provocatrice. Quatrièmement, il constate que le requérant a engagé et poursuivi un grave conflit avec sa hiérarchie au détriment de l’ECDC, que son comportement n’est pas compatible avec les valeurs de l’ECDC et que son refus persistant de répondre aux attentes exigées s’oppose à la possibilité d’une relation de travail normale. Enfin, il conclut que le requérant a irrémédiablement porté atteinte à la relation de confiance qui devait exister entre eux.

145    Il y a donc lieu de constater que la décision litigieuse est motivée de manière à permettre au requérant d’apprécier, en parfaite connaissance de cause, le bien-fondé de celle-ci et l’opportunité d’introduire un recours, et au Tribunal d’exercer son contrôle sur la légalité de cet acte.

146    Par ailleurs, il est constant que le requérant avait une connaissance très précise du contexte dans lequel la décision litigieuse est intervenue.

147    En effet, tout d’abord, il avait reçu, le 17 février 2012, le rapport final sur l’insubordination d’où il ressortait que l’enquêteur était d’avis qu’il avait violé de façon répétée ses obligations à l’égard de l’ECDC.

148    Ensuite, à plusieurs reprises, Mme B avait reproché au requérant de ne pas se tenir à ses instructions et de refuser son autorité. À titre d’exemple, outre les courriels mentionnés au point 112 du présent arrêt qui, bien qu’envoyés après l’adoption du rapport final sur l’insubordination, sont pertinents pour apprécier la légalité de la décision litigieuse, par un courriel du 20 décembre 2011 à 11 h 51, Mme B avait prévenu le requérant que « [s’il] n’[était] pas disposé à suivre les demandes de [son] supérieur hiérarchique direct […], cela se reflétera[it] dans l’appréciation de [se]s capacités, efficacité et conduite » en indiquant qu’« une incapacité ou absence de volonté constante de suivre les instructions de [son] supérieur hiérarchique direct p[ourrait] avoir des conséquences plus sérieuses ».

149    En outre, dans un courriel du 5 janvier 2012 à 9 h 43, Mme B écrivait au requérant que « [l]e cœur du problème sembl[ait] être [son] refus d’accepter [s]on autorité en tant que supérieur hiérarchique direct [décidant] quelles tâches [lui] assigner. […] Puisque le directeur a[vait] déjà tranché cette question, [elle] consid[érait] qu’un échange de correspondance prolongé [était] un gaspillage de ressources précieuses et un manque de respect vis-à-vis d’[elle-même] et de l’[ECDC] en général […] ». Enfin, le même jour, Mme B a adressé au requérant un autre courriel rédigé ainsi : « […] Comme vous le savez, vous avez une obligation contractuelle d’accomplir les tâches qui vous sont assignées et le refus de le faire sera pris en considération à la lumière de cette obligation. […] »

150    Enfin, la conclusion selon laquelle il n’y a pas eu violation de l’obligation de motivation ne saurait être remise en cause par les imprécisions chronologiques de la décision litigieuse, qui indique comme dates des réunions entre le directeur et le requérant le « 10 décembre 2011 » et le « 17 février 2011 », alors que les réunions en question ont eu lieu le 21 décembre 2011 et le 17 février 2012. Ces erreurs matérielles ont en effet été détectées par le requérant, qui, dans sa requête, admet lui-même que « par ‘10 décembre 2011’, l’AIPN a sans doute voulu dire ‘21 décembre 2011’ » et que « par ‘17 février 2011’ l’AIPN a sans doute voulu dire ‘17 février 2012’». De surcroît, en cas de doute, rien n’empêchait le requérant, après avoir détecté une anomalie dans le libellé de la décision litigieuse, de demander une clarification à l’AHCC.

151    Il s’ensuit que le deuxième moyen doit être écarté.

 Sur le troisième moyen, tiré de l’atteinte à la présomption d’innocence

–       Arguments des parties

152    Le requérant observe que, dans la décision portant rejet de la réclamation, l’AHCC allègue qu’il avait menacé et légèrement agressé physiquement son supérieur hiérarchique direct lors, respectivement, de réunions ayant eu lieu les 25 et 31 janvier 2012. Or, puisque ces comportements seraient des comportements pénalement répréhensibles, dans la mesure où l’AHCC aurait retenu ces accusations avant que sa culpabilité ne soit démontrée devant une juridiction pénale, elle aurait violé la présomption d’innocence prévue par l’article 48, paragraphe 1, de la Charte.

153    L’ECDC demande au Tribunal de rejeter ce moyen en soutenant que l’article 48, paragraphe 1, de la Charte concerne les procédures pénales, et non les procédures administratives internes comme en l’espèce. Par ailleurs, selon l’ECDC, Mme D et M. E auraient été témoins des agissements du requérant, qui seraient donc établis. En tout état de cause, la décision litigieuse est fondée sur un faisceau d’éléments prouvant l’insubordination du requérant, au-delà des incidents à l’occasion desquels il aurait fait preuve d’un comportement agressif envers Mme B.

–       Appréciation du Tribunal

154    Le Tribunal rappelle que le droit à la présomption d’innocence constitue un droit fondamental dont les juridictions de l’Union doivent assurer le respect par les institutions. Ce droit est identifié par la jurisprudence comme un principe général applicable aux procédures administratives eu égard à la nature des manquements en cause ainsi qu’à la nature et au degré de sévérité des mesures qui s’y rattachent. Il s’ensuit que le droit à la présomption d’innocence s’applique, même en l’absence de poursuites pénales, au fonctionnaire accusé d’un manquement aux obligations statutaires suffisamment grave pour justifier une enquête de l’OLAF au vu de laquelle l’administration pourra adopter toute mesure, le cas échéant sévère, qui s’impose (arrêt BD/Commission, F‑36/11, EU:F:2012:49, point 51, et la jurisprudence citée).

155    En l’espèce, ce droit aurait pu être violé si l’ECDC avait décidé de résilier le contrat du requérant sur la base des seules accusations formulées à son égard par son supérieur hiérarchique, sans avoir jamais donné la possibilité au requérant de s’expliquer et sans avoir vérifié si les reproches qui lui étaient faits étaient justifiés (voir, en ce sens, arrêt Apostolidis/Cour de justice, T‑86/97, EU:T:1998:71, point 47). Toutefois, en l’espèce, la décision litigieuse est intervenue après qu’une enquête a été diligentée, enquête au cours de laquelle le requérant a eu la possibilité de s’exprimer. Dans de telles circonstances, il ne saurait être question d’une violation de la présomption d’innocence.

156    Le présent moyen doit donc être écarté comme dépourvu de tout fondement.

 Sur le quatrième moyen, relatif à la violation du devoir de diligence

–       Arguments des parties

157    Le requérant considère que, si les conclusions de l’enquête sur des allégations de harcèlement et celles de l’enquête sur des accusations d’insubordination justifiaient la résiliation de son contrat, il aurait dû bénéficier du statut d’agent « personnellement impliqué » au sens de l’article 1er, paragraphe 1, première phrase, et de l’article 2, paragraphe 1, de l’annexe IX du statut. Toutefois, l’ECDC ne l’a jamais informé de ses droits de la défense qui découleraient de ces dispositions statutaires et, ce faisant, aurait violé son devoir de diligence.

158    L’ECDC demande de rejeter ce moyen comme non fondé.

–       Appréciation du Tribunal

159    Le Tribunal constate, premièrement, que, en ce qui concerne l’enquête sur des allégations de harcèlement, l’agent « personnellement impliqué » n’était pas le requérant, mais son supérieur hiérarchique, qui avait été accusé de harcèlement moral par le requérant. Il s’ensuit que le requérant ne saurait prétendre bénéficier des droits liés au statut d’agent « personnellement impliqué » et ne saurait valablement reprocher à l’ECDC de ne pas l’avoir informé desdits droits.

160    Deuxièmement, en ce qui concerne l’enquête sur des accusations d’insubordination, le Tribunal rappelle que, selon l’article 2, paragraphe 1, de l’annexe IX du statut, l’agent concerné a le droit d’être entendu avant l’adoption des conclusions finales de l’enquête administrative, d’être informé de la conclusion de l’enquête et de recevoir le rapport d’enquête.

161    En l’espèce, par courriel du 24 janvier 2012, l’enquêteur a transmis au requérant le projet de rapport de l’enquête sur des accusations d’insubordination en lui demandant de présenter ses observations. En outre, par courriel du 25 janvier 2012, l’enquêteur a écrit au requérant qu’il allait transmettre ledit document au directeur, l’informant ainsi de la clôture de l’enquête.

162    Il s’ensuit que, le requérant n’ayant démontré l’existence d’aucune violation de ses droits de la défense dans les deux procédures d’enquête, le présent moyen doit être rejeté comme non fondé.

 Sur le cinquième moyen, tiré de l’absence d’accès aux dossiers des enquêtes

–       Arguments des parties

163    Le requérant se plaint de ne pas avoir reçu le rapport final de l’enquête sur des allégations de harcèlement ni les documents sur lesquels le rapport final sur l’insubordination se fonde, en violation de l’article 2, paragraphe 2, de l’annexe IX du statut, de l’article 26 du statut, « en particulier son deuxième alinéa relatif à l’utilisation de pièces contre un fonctionnaire et son avant-dernier alinéa en ce qui concerne l’accès à son dossier personnel », et de l’article 13 du règlement (CE) no 45/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 18 décembre 2000, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel par les institutions et organes communautaires et à la libre circulation de ces données (JO 2001, L 8, p. 1).

164    L’ECDC demande au Tribunal de rejeter ce moyen comme non fondé.

–       Appréciation du Tribunal

165    Tout d’abord, il y a lieu de constater qu’une éventuelle violation de l’article 2, paragraphe 2, de l’annexe IX du statut serait sans aucune pertinence pour l’appréciation de la décision litigieuse, celle-ci étant fondée sur l’article 47, sous b), ii), du RAA et non sur les dispositions relatives au régime disciplinaire.

166    Ensuite, quant à la violation de l’article 13 du règlement no 45/2001 alléguée par le requérant, celui-ci affirme, dans sa requête, avoir demandé l’accès au rapport final de l’enquête sur des allégations de harcèlement par courriel du 5 mars 2012 et à « tous les documents qui ne [lui avaient] pas encore été transmis » relatifs à l’enquête sur des accusations d’insubordination et à l’enquête sur des allégations de harcèlement par courriel du 16 avril 2012.

167    Or, ces deux demandes sont postérieures à la décision litigieuse, laquelle est intervenue le 24 février 2012. Par conséquent, le refus de l’ECDC de donner une réponse favorable à ces demandes ne saurait affecter la validité de la décision litigieuse.

168    En tout état de cause, il apparaît que, dans les deux courriels susmentionnés, le requérant ne fait aucune référence à ses données personnelles, ni pour demander confirmation que des données le concernant étaient traitées par l’ECDC, ni pour demander des informations quant aux finalités d’un éventuel traitement, ni pour avoir communication des données faisant l’objet d’un tel traitement, ni, enfin, pour connaître la logique qui sous-tend un éventuel traitement automatisé. Il s’ensuit que dans ce contexte la référence à l’article 13 du règlement no 45/2001 est dépourvue de toute pertinence.

169    Pour ce qui est enfin de la prétendue violation de l’article 26 du statut, le requérant n’a pas démontré avoir demandé l’accès à son dossier individuel, de sorte que ce grief doit être écarté.

170    Par ailleurs, en ce qui concerne le refus de l’ECDC de transmettre au requérant le rapport final de l’enquête sur des allégations de harcèlement, il y a lieu de rappeler que, s’agissant d’une décision clôturant sans suite une enquête ouverte en réponse à une demande d’assistance introduite au titre de l’article 24 du statut, le statut n’impose aucune obligation explicite de transmettre au plaignant ni le rapport final d’une enquête administrative ni les comptes rendus des auditions menées dans le cadre d’une telle enquête (arrêt Tzirani/Commission, EU:F:2013:115, point 132).

171    Il y a donc lieu d’écarter le cinquième moyen, tiré de la violation du droit d’accès aux dossiers des deux enquêtes, comme dépourvu de tout fondement.

 Sur le sixième moyen, tiré de la prétendue inaptitude des deux enquêteurs

–       Arguments des parties

172    Le requérant considère que les deux agents de l’ECDC ayant respectivement mené l’enquête sur des allégations de harcèlement et l’enquête sur des accusations d’insubordination étaient inexpérimentés et met en doute leur indépendance.

173    L’ECDC demande au Tribunal de rejeter ce moyen comme dénué de tout fondement.

–       Appréciation du Tribunal

174    Il est opportun de rappeler que les institutions jouissent d’un large pouvoir d’appréciation dans le choix des personnes auxquelles elles confient une enquête sur des accusations d’insubordination administrative, y compris une enquête pour des faits de harcèlement (arrêt Tzirani/Commission, EU:F:2013:115, point 121). Dans ce contexte, les institutions sont tenues de choisir des personnes adaptées aux tâches délicates qui leur sont confiées, sans toutefois que l’expérience de ces personnes en tant qu’enquêteurs soit un élément décisif dans ce choix.

175    Au vu de ce large pouvoir d’appréciation, le requérant ne saurait valablement contester le choix de l’ECDC en se fondant uniquement sur un prétendu manque d’expérience des enquêteurs et sans même avoir essayé de démontrer que l’AHCC aurait usé de son pouvoir d’appréciation de manière manifestement erronée.

176    En outre, le requérant s’est limité à observer que, avant le début des deux enquêtes, il avait signalé des faits laissant supposer qu’une illégalité avait été commise dans le cadre de l’utilisation des fonds de l’ECDC, illégalité qui aurait impliqué le directeur et le responsable scientifique de l’ECDC, et que les deux enquêteurs étaient le chef de l’unité « Capacité d’action en santé publique et communication », subordonné direct du directeur, et le responsable scientifique adjoint de l’ECDC.

177    Le requérant n’a toutefois fourni au Tribunal aucun élément de preuve ni aucun indice d’une éventuelle absence d’indépendance des deux enquêteurs.

178    Par conséquent, le sixième moyen doit être écarté.

 Sur le huitième moyen, tiré de la violation de l’article 2, paragraphe 3, de l’annexe IX du statut

179    Le requérant avance que l’ECDC n’a jamais adopté, en violation de l’article 2, paragraphe 3, de l’annexe IX du statut, de dispositions générales d’exécution dudit article.

180    Toutefois, pour écarter comme inopérant ce moyen, il suffit d’observer, comme le Tribunal l’a fait aux points 81 et 82 du présent arrêt, que la décision litigieuse n’a pas été adoptée sur le fondement de la procédure disciplinaire qui fait l’objet de l’annexe IX du statut, mais sur le fondement de l’article 47, sous b), ii), du RAA.

 Sur les neuvième, onzième et douzième moyens, tirés d’erreurs manifestes d’appréciation des faits

–       Arguments des parties

181    Les neuvième, onzième et douzième moyens sont tous tirés d’une erreur manifeste d’appréciation des faits et doivent dès lors être examinés ensemble.

182    Dans le cadre du neuvième moyen, le requérant observe que la décision litigieuse l’a désigné comme responsable du « grave différend » avec Mme B. Cependant, il estime que le rapport final sur l’insubordination ne lui avait pas attribué la responsabilité de ce différend et que l’ECDC n’a pas présenté de preuves suffisantes pour démontrer qu’il en serait le responsable.

183    Le onzième moyen est tiré de ce que la décision litigieuse évoque un « comportement ultérieur » porté à la connaissance du directeur qui serait constitué par des actes d’insubordination ayant eu lieu entre le 10 janvier et le 24 février 2012.

184    À cet égard, le requérant indique, en premier lieu, que ces prétendus actes d’insubordination ont été dénoncés par Mme B, qui ne serait pas crédible. En effet, Mme B avait des raisons d’être mal disposée à son égard, car il avait fait rapport à sa hiérarchie des faits de harcèlement moral dont il s’estimait victime de la part de celle-ci. En outre, selon lui, quand elle a dénoncé lesdits actes, Mme B était encore en période de stage, donc susceptible de subir des pressions de sa hiérarchie ; de plus, elle était inadaptée à sa fonction et elle aurait décidé ou, à tout le moins, accepté l’engagement illégal d’un agent, illégalité que le requérant avait signalée au directeur. Enfin, Mme B aurait, à plusieurs reprises, refusé d’enregistrer les propos tenus lors de ses rencontres avec le requérant. Le requérant demande au Tribunal d’ordonner plusieurs mesures d’organisation de la procédure afin de confirmer ses affirmations.

185    En second lieu, le requérant conteste la réalité de tous les comportements qui lui sont reprochés dans la décision portant rejet de la réclamation.

186    Le douzième moyen est tiré de l’existence de plusieurs erreurs manifestes d’appréciation qui, selon le requérant, entacheraient l’enquête sur des accusations d’insubordination. En particulier, l’enquêteur aurait systématiquement refusé de prendre en considération des documents qui pouvaient disculper le requérant ou à tout le moins constituer des circonstances atténuantes.

187    L’ECDC conclut au rejet de ces trois moyens.

–       Appréciation du Tribunal

188    Le Tribunal rappelle, d’une part, que la résiliation anticipée d’un contrat d’agent contractuel conformément à l’article 47, sous b), ii), du RAA peut être fondée sur un comportement de l’agent concerné entraînant la rupture du lien de confiance entre celui-ci et l’AHCC et, d’autre part, que l’autorité compétente dispose d’un large pouvoir d’appréciation, le contrôle du juge de l’Union se limitant à la vérification de l’absence d’erreur manifeste ou de détournement de pouvoir (voir, par analogie, s’agissant d’agents temporaires, arrêts ETF/Michel, T‑108/11 P, EU:T:2013:625, point 77, et CT/EACEA, EU:F:2013:190, point 43, et la jurisprudence citée).

189    Dans ce contexte, établir que l’administration a commis une erreur manifeste dans l’appréciation des faits de nature à justifier l’annulation de la décision prise sur la base de cette appréciation suppose que les éléments de preuve, qu’il incombe à la partie requérante d’apporter, soient suffisants pour priver de plausibilité les appréciations retenues par l’administration. En d’autres termes, le moyen tiré de l’erreur manifeste doit être rejeté si, en dépit des éléments avancés par la partie requérante, l’appréciation mise en cause peut toujours être admise comme justifiée et cohérente (voir, en ce sens, arrêt Mocová/Commission, F‑41/11, EU:F:2012:82, point 44, et la jurisprudence citée).

190    En l’espèce, la décision litigieuse est effectivement motivée par la rupture irrémédiable du lien de confiance entre le requérant et sa hiérarchie, rupture qui n’est pas due à tel ou tel épisode isolé, mais à un enchaînement de comportements du requérant entre novembre 2011 et février 2012. Dans la décision litigieuse, le directeur fait notamment état de ce que le requérant a « d’importantes difficultés à accepter les décisions de la hiérarchie, [a] refusé à plusieurs reprises d’accomplir [ses] tâches et [s’est] comporté de manière obstructionniste et provocatrice ».

191    Il suffit, premièrement, d’observer que, jusque dans la requête, le requérant essaie, sur le fondement d’allégations qui ne sont pas étayées par des éléments de preuve, de mettre en cause la compétence de son supérieur hiérarchique direct, dans le but de contester les reproches qui lui sont faits. En effet, dans le cadre du onzième moyen, il indique que, du fait que les membres du jury chargé du recrutement de Mme B « étaient simplement des professionnels médicaux », il existait « un risque accru que [Mme B] ait été plus ou moins inadaptée à sa fonction [de chef du service juridique] et ait donc commis des erreurs de jugement lorsqu’elle a évalué le caractère approprié [ou non] de la conduite de ses subordonnés ».

192    Deuxièmement, il ressort de manière très claire du dossier que le requérant, comme l’a relevé le directeur, avait effectivement des difficultés à accepter les décisions de sa hiérarchie.

193    À titre d’exemple, le Tribunal rappelle que, à la simple demande formulée par Mme B, le 8 novembre 2011, de lui transmettre un bref résumé des dossiers sur lesquels il travaillait, le requérant a répondu en lui demandant si elle n’avait pas reçu les résumés écrits qu’il avait transmis à son prédécesseur avant de partir en congé à la mi-octobre 2011 (voir points 10 et 11 du présent arrêt).

194    En outre, le 14 décembre 2011, Mme B a demandé au requérant de mettre à jour la liste des dossiers en cours qu’il avait préparée en septembre en les classant selon leur degré d’urgence. Le requérant a répondu le jour même en transmettant une liste qui n’était pas conforme aux instructions données. Ensuite, après plusieurs échanges de courriels avec Mme B, le 19 décembre 2011, le requérant, après avoir contesté sa charge de travail, lui a finalement transmis une nouvelle liste des dossiers en cours qui lui avaient été attribués, sans toutefois se conformer, encore une fois, aux instructions de Mme B.

195    Face au reproche de ne pas avoir établi de liste selon les instructions données, le requérant s’est limité à évoquer, dans un courriel du 20 décembre 2011 à 10 h 32, « un possible manque d’expérience/savoir-faire (significatif) en termes de management » de Mme B et à indiquer que les instructions données par Mme B n’étaient pas les mêmes que celles données par son prédécesseur et que préparer deux listes de dossiers – les dossiers actifs et les dossiers en suspens – serait une opération qui lui « causerait des difficultés pratiques considérables », tout en invitant son supérieur hiérarchique direct à avoir « une approche plus décontractée ».

196    Par ailleurs, dans sa requête, le requérant a cherché à justifier son attitude en affirmant que « cette liste est un document destiné en principe à l’usage personnel d’un juriste [du service juridique] ; […] un chef de [service juridique] conserve et met à jour, ou au moins le devrait, sa propre liste des affaires qu’[il] attribue aux subordonnés, notamment lorsque [le service juridique] qu’[il] dirige se compose seulement de trois subordonnés ; […] les souhaits particuliers [du chef du service juridique] quant au format et au classement du contenu de cette liste n’étaient pas constructifs, et en tout état de cause n’étaient pas substantiels ou importants ».

197    Comme le soutient à juste titre l’ECDC, la préparation d’une simple liste des dossiers en cours de traitement est une tâche que tout fonctionnaire ou agent doit être en mesure d’effectuer à bref délai à la demande de son supérieur hiérarchique, sans qu’une telle tâche n’entraîne de nombreux échanges de courriels et la mise en cause, par l’agent concerné, des capacités managériales de son supérieur hiérarchique. Par ailleurs, une telle liste ne saurait être un « document destiné […] à l’usage personnel d’un juriste [du service juridique] » comme le requérant le prétend. Il s’agit en effet d’un instrument élémentaire permettant à tout fonctionnaire ou agent ayant des responsabilités managériales d’avoir un aperçu rapide et complet de l’état des travaux confiés aux membres de son équipe. Il est donc loisible à tout fonctionnaire ou agent ayant des responsabilités managériales de demander à ses subordonnés la préparation d’une telle liste dans les formes qui lui paraissent les plus appropriées, sans qu’il soit lié aux modalités de présentation établies par son prédécesseur.

198    Par ailleurs, il ressort du dossier que, ainsi que le soutient l’ECDC, le requérant a mis en cause, à plusieurs reprises et de manière « obstructionniste et provocatrice », la compétence de son supérieur hiérarchique direct tant comme chef de service que comme juriste.

199    À titre d’exemple, il suffit de mentionner, premièrement, un courriel du 16 décembre 2011 à 14 h 35 dans lequel le requérant écrivait à Mme B dans les termes suivants : « […] Avec le temps, vous vous familiariserez probablement davantage avec le fonctionnement de la protection des données et serez à même de définir des délais plus adaptés (j’entends [par là] : vous n’avez jamais exercé la fonction de délégué à la protection des données et n’avez ni expérience ni formation formelle dans ce domaine, n’est-ce pas ?) […] »

200    Deuxièmement, toujours le 16 décembre 2011, à 16 h 17, le requérant envoyait à Mme B un courriel contenant les remarques suivantes : « […] puis-je demander encore une fois si vous avez déjà exercé la fonction de délégué à la protection des données ou si vous disposez d’une autre expérience pertinente ou d’une formation formelle ? Comme mentionné, [votre] manque d’expérience est peut-être la raison pour laquelle le délai en question a pu s’avérer impossible à respecter. […] »

201    Troisièmement, dans un courriel du 20 décembre 2011 à 11 h 51, le requérant s’adressait ainsi à Mme B : « […] votre approche de la ‘gestion active de dossiers’ peut être faussée du fait de votre possible manque d’expérience et de savoir-faire (significatif) en matière de management. Si vous pouviez me dire en quoi consistent ladite expérience et ledit savoir-faire (en tant que votre subordonné, je suppose que je suis en droit de le savoir, n’est-ce pas ?), ou ne serait-ce que me citer une référence en matière de gestion, comme une norme privée ou un universitaire reconnu, alors je serais davantage en mesure de savoir si votre approche repose sur une connaissance solide en matière de gestion ou non – dans ce dernier cas, j’essaierai d’être plus proactif et de vous faire savoir, parmi vos instructions, celles qui pourraient poser de graves difficultés pratiques pour le travail de notre service et nos relations avec d’autres services (même si je resterai, bien sûr, à votre disposition pour exécuter vos instructions si vous les confirmez). […] »

202    Quatrièmement, toujours le 20 décembre 2011, le requérant a adressé un autre courriel à Mme B, à 11 h 58, dans lequel figurait ce passage : « [J]e me demande simplement si vous disposez d’une expérience (significative) ou d’une formation officielle en tant que manager et expert en protection des données et je continue de me demander pourquoi vous refusez de me répondre. »

203    De tels courriels envoyés par le requérant à son supérieur hiérarchique direct démontrent à eux seuls que le directeur n’a pas commis une erreur manifeste d’appréciation des faits en considérant, dans la décision litigieuse, que le requérant avait « d’importantes difficultés à accepter les décisions de la hiérarchie » et s’était « comporté de manière […] provocatrice », avec pour conséquence la rupture irrémédiable du lien de confiance.

204    Il y a donc lieu de rejeter les neuvième, onzième et douzième moyens, sans qu’il soit nécessaire d’examiner un par un tous les échanges de courriels entre le requérant et Mme B ni d’ordonner les mesures d’organisation de la procédure demandées par le requérant dans sa requête.

 Sur le treizième moyen, tiré de la violation du principe de proportionnalité

–       Arguments des parties

205    Par son treizième moyen, le requérant soutient que, à supposer que les faits qui lui sont reprochés soient établis, en adoptant la décision litigieuse l’ECDC aurait violé le principe de proportionnalité, en ce qu’il aurait pu prendre une mesure différente et en tout état de cause moins sévère que le licenciement.

206    L’ECDC demande au Tribunal de rejeter ce moyen comme étant non fondé.

–       Appréciation du Tribunal

207    Le Tribunal constate que, dans le cadre du présent moyen, le requérant se limite à indiquer des mesures que l’ECDC aurait pu adopter au lieu de résilier son contrat, à savoir la modification des conditions de travail au sein de l’ECDC, une tentative de médiation, une mutation vers un autre service, la mutation de Mme B vers un autre service ou la prolongation du stage de celle-ci, ou enfin l’imposition d’une sanction disciplinaire moins grave.

208    Toutefois, pour démontrer une violation du principe de proportionnalité, il aurait appartenu au requérant d’avancer des éléments ou des arguments démontrant qu’il aurait été réellement possible que l’ECDC mette en œuvre les mesures proposées, en tenant compte de ce que la décision litigieuse se fonde sur une rupture irrémédiable du lien de confiance avec l’ECDC, ce qu’il a manqué de faire. En effet, les différentes mesures proposées par le requérant présupposent toutes, comme l’ECDC l’a fait remarquer, sinon l’existence d’un rapport de confiance entre l’ECDC et le requérant, à tout le moins la possibilité de rétablir un rapport de confiance qui a été rompu.

209    Dans ces circonstances, le treizième moyen doit être écarté.

 Sur le quatorzième moyen, tiré de l’incompétence du signataire de la décision portant rejet de la réclamation

210    Le requérant observe que la décision portant rejet de la réclamation a été signée par le responsable scientifique adjoint, par délégation de signature, au nom du directeur. Or, à son avis, le responsable scientifique adjoint était incompétent pour adopter une décision sur le fondement de l’article 90, paragraphe 2, du statut.

211    En l’espèce, le Tribunal a déjà constaté que la décision portant rejet de la réclamation est dépourvue de contenu autonome (voir points 70 à 72 du présent arrêt). Par suite, l’annulation éventuelle de la décision portant rejet de la réclamation n’est pas susceptible d’affecter la légalité de la décision litigieuse (voir arrêt Z/Cour de justice, F‑88/09 et F‑48/10, EU:F:2012:171, points 226 et 227, faisant l’objet d’un pourvoi pendant devant le Tribunal de l’Union européenne, T‑88/13 P).

212    Il y a lieu d’ajouter que, à supposer même que le Tribunal considère que la décision portant rejet de la réclamation soit entachée d’incompétence et doive, dès lors, être annulée, une telle annulation laisserait subsister la décision attaquée et ne donnerait au requérant aucun avantage (arrêt van Heuckelom/Europol, F‑43/09, EU:F:2010:121, point 88).

213    Il s’ensuit que le quatorzième moyen est inopérant et doit être rejeté.

 Sur le quinzième moyen, tiré de l’incompétence de l’ECDC et du Tribunal pour statuer sur des accusations concernant un comportement pénalement répréhensible

214    Le requérant observe que l’ECDC lui reproche, dans la décision portant rejet de la réclamation, un comportement pénalement répréhensible, à savoir des menaces et une « légère attaque physique » contre le chef du service juridique, lors, respectivement, de leurs réunions des 25 et 31 janvier 2012. Or, ni l’ECDC ni le Tribunal ne seraient compétents pour examiner un tel comportement et l’ECDC ne saurait valablement évoquer ces accusations pour motiver la décision litigieuse.

215    Le Tribunal rappelle que, dans les recours de fonctionnaires, les conclusions présentées devant le juge de l’Union ne peuvent contenir que des chefs de contestation reposant sur la même cause que celle sur laquelle reposent les chefs de contestation invoqués dans la réclamation, étant précisé que ces chefs de contestation peuvent être développés, devant le juge, par la présentation de moyens et arguments ne figurant pas nécessairement dans la réclamation, mais s’y rattachant étroitement (arrêt Commission/Moschonaki, T‑476/11 P, EU:T:2013:557, point 73, et la jurisprudence citée). Or, le présent moyen ne figure pas dans la réclamation et ne se rattache étroitement à aucun moyen exposé dans la réclamation, de sorte qu’il doit être déclaré irrecevable.

216    En tout état de cause, le Tribunal estime que, pour écarter sur le fond ce moyen, il suffit de rappeler que la décision litigieuse est motivée par la rupture du lien de confiance entre le requérant et sa hiérarchie due à un ensemble d’agissements du requérant. Or, premièrement, en appréciant l’existence du lien de confiance avec le requérant l’ECDC ne s’est prononcé sur aucune question de droit pénal. Deuxièmement, le Tribunal est saisi de la demande du requérant portant sur la légalité de la décision litigieuse et il lui appartient exclusivement de vérifier si cette décision souffre d’un des vices de légalité soulevés par le requérant. Le Tribunal ne doit donc trancher aucune question de droit pénal en se prononçant sur une accusation pénale.

217    Il s’ensuit que le quinzième moyen est voué au rejet.

218    Il résulte de l’ensemble de ce qui précède qu’il y a lieu d’accueillir le moyen tiré de ce que l’AHCC n’a pas entendu le requérant sur les conséquences qu’elle entendait tirer du comportement de celui-ci avant d’adopter la décision litigieuse, d’annuler ladite décision pour ce motif et de rejeter les autres moyens soulevés au soutien des conclusions en annulation.

 Sur les conclusions visant la réintégration dans le service et la réparation du préjudice matériel

219    Le requérant demande que, en conséquence de l’annulation de la décision litigieuse, l’ECDC soit tenu, en vertu de l’article 266 TFUE, de le réintégrer dans le service et de lui verser l’ensemble des émoluments qu’il aurait perçus à partir de la date d’entrée en vigueur de la décision litigieuse, majorés des intérêts de retard et diminués de la compensation pécuniaire reçue en application de l’article 47, sous b), ii), du RAA ainsi que de l’allocation de chômage.

220    Or, en premier lieu, le Tribunal rappelle que, selon une jurisprudence constante, il ne lui incombe pas, dans le cadre d’un recours introduit au titre de l’article 91 du statut, d’adresser des injonctions aux institutions de l’Union (arrêt De Bruin/Parlement, F‑15/14, EU:F:2014:236, point 37, et la jurisprudence citée). Par conséquent, les conclusions du requérant doivent en toute hypothèse être rejetées comme irrecevables pour autant qu’elles visent sa réintégration au sein de l’ECDC.

221    En second lieu, pour ce qui est des conclusions indemnitaires en réparation du préjudice matériel, conformément à l’article 266 TFUE, il incombe à l’institution dont émane l’acte annulé « de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt » dont elle est destinataire. Il s’ensuit que, à ce stade, lesdites conclusions indemnitaires sont prématurées et, partant, irrecevables (arrêt CU/CESE, F‑42/13, EU:F:2014:106, point 56).

 Sur les conclusions visant la réparation du préjudice moral

 Arguments des parties

222    Le requérant demande la réparation du préjudice moral résultant des effets psychologiques et des atteintes à sa réputation causés par son licenciement. Au soutien de cette demande, il soulève formellement sept chefs de conclusions indemnitaires. Puisque le sixième chef de conclusions indemnitaires contient trois chefs de conclusions autonomes, les écrits du requérant doivent être interprétés comme soulevant ensemble neuf chefs de conclusions indemnitaires.

223    Par son premier chef de conclusions indemnitaires, le requérant demande un montant « d’au moins » 80 000 euros en réparation du préjudice subi en relation avec le caractère prétendument injurieux des raisons alléguées par l’ECDC pour justifier la décision litigieuse et avec l’effet immédiat de la résiliation de son contrat ainsi qu’avec le fait que plusieurs personnes avaient été informées de ces deux circonstances.

224    Par son deuxième chef de conclusions indemnitaires, le requérant demande une somme d’« au moins » 10 000 euros pour compenser le sentiment d’injustice qui résulterait du fait qu’il considère « avoir été puni pour avoir consciencieusement respecté son devoir de communiquer [des] irrégularités ».

225    Par son troisième chef de conclusions indemnitaires, le requérant demande une somme d’« au moins » 2 000 euros en réparation du préjudice moral causé par le fait que, entre le 20 décembre 2011 et le 24 février 2012, il avait été « plus ou moins informé » du fait que son comportement pouvait avoir de « graves conséquences », mais que l’ECDC ne lui avait donné aucune information sur ces conséquences, ce qui l’avait laissé dans un état d’inquiétude.

226    Par son quatrième chef de conclusions indemnitaires, le requérant demande un montant « d’au moins » 5 000 euros pour le préjudice moral lié à la violation de son droit d’être entendu, notamment sur son prétendu « comportement ultérieur » et sur la responsabilité du « grave différend » avec sa hiérarchie.

227    Par son cinquième chef de conclusions indemnitaires, le requérant demande un montant « d’au moins » 3 000 euros en réparation du préjudice moral lié au fait que l’enquête sur des accusations d’insubordination et l’enquête sur des allégations de harcèlement ont été menées alors que l’ECDC n’avait pas arrêté de dispositions générales d’exécution en application de l’article 2, paragraphe 3, de l’annexe IX du statut.

228    Par son sixième chef de conclusions indemnitaires, le requérant demande un montant « d’au moins » 7 000 euros en réparation du préjudice moral causé par le refus de l’ECDC de lui donner un accès complet au dossier de l’enquête sur des accusations d’insubordination et de lui transmettre le dossier de l’enquête sur des allégations de harcèlement.

229    Par son septième chef de conclusions indemnitaires, le requérant prétend que, à partir du 30 avril 2012, soit à l’issue de son préavis, il n’a plus eu accès aux courriels qui se trouvaient sur un serveur de l’ECDC et que l’ECDC lui a refusé l’accès à ce serveur, en rejetant implicitement la demande qu’il avait introduite le 24 avril 2012 et en rejetant, toujours implicitement, sa réclamation du 30 juillet 2012. Il demande donc un montant « d’au moins » 5 000 euros en réparation du préjudice moral causé par ce refus d’accès à ses courriels.

230    Par son huitième chef de conclusions indemnitaires, le requérant demande une somme d’« au moins » 2 500 euros liée au préjudice moral qu’il prétend avoir subi du fait de la décision de l’ECDC de ne pas lui transmettre certaines informations qu’il avait demandées le 18 novembre 2012 dans la perspective d’un recours contentieux contre son licenciement.

231    Par son neuvième chef de conclusions indemnitaires, le requérant demande une somme d’« au moins » 2 000 euros en réparation du préjudice moral causé par le fait que l’ECDC n’aurait pas donné de réponse explicite à sa réclamation, ou que la réponse donnée par « lettre du 18 septembre 2012 » serait « manifestement si mal fondé[e] » qu’elle ne saurait être considérée comme une décision adoptée en réponse à sa réclamation.

232    L’ECDC conclut au rejet des conclusions indemnitaires en réparation du préjudice moral.

 Appréciation du Tribunal

233    Le Tribunal rappelle d’emblée que, conformément à la jurisprudence, la procédure précontentieuse diffère selon que le dommage dont la réparation est demandée résulte d’un acte décisionnel faisant grief, au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut, ou d’un comportement de l’administration dépourvu de caractère décisionnel. Dans le premier cas, il appartient à l’intéressé de saisir l’autorité investie du pouvoir de nomination ou l’AHCC, dans les délais impartis, d’une réclamation dirigée contre l’acte en cause, les conclusions indemnitaires pouvant être présentées soit dans cette réclamation soit pour la première fois dans la requête. Dans le second cas, la procédure administrative doit débuter par l’introduction d’une demande au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut visant à obtenir un dédommagement et se poursuivre, le cas échéant, par une réclamation dirigée contre la décision de rejet de la demande (arrêt Skoulidi/Commission, F‑4/07, EU:F:2008:22, point 56, et la jurisprudence citée).

234    En outre, il convient de rappeler que l’annulation d’un acte entaché d’illégalité constitue en elle-même la réparation adéquate et, en principe, suffisante de tout préjudice moral que cet acte peut avoir causé, à moins que la partie requérante ne démontre avoir subi un préjudice moral détachable de l’illégalité fondant l’annulation et insusceptible d’être intégralement réparé par cette annulation (arrêt CP/Parlement, F‑8/13, EU:F:2014:44, point 105).

235    Enfin, le Tribunal rappelle que la décision litigieuse a été annulée uniquement parce que le requérant n’a pas été entendu sur le fait que l’AHCC envisageait de faire application de l’article 47, sous b), ii), du RAA, tous les autres moyens ayant été rejetés.

236    En l’espèce, le Tribunal constate que les premier, deuxième, quatrième, cinquième et sixième chefs de conclusions indemnitaires sont étroitement liés à des moyens qui ont été rejetés.

237    En particulier, le premier chef de conclusions indemnitaires est étroitement lié aux neuvième, onzième et douzième moyens des conclusions en annulation par lesquels, en substance, le requérant reprochait à l’ECDC d’avoir commis plusieurs erreurs manifestes d’appréciation, moyens qui ont été rejetés comme dépourvus de tout fondement en droit.

238    Le deuxième chef de conclusions indemnitaires est étroitement lié au second moyen préliminaire des conclusions en annulation qui a été rejeté comme non fondé.

239    Le quatrième chef de conclusions indemnitaires est étroitement lié aux premier, deuxième et quatrième griefs du premier moyen des conclusions en annulation, lesquels ont été rejetés comme dépourvus de tout fondement.

240    Le cinquième chef de conclusions indemnitaires est étroitement lié au huitième moyen des conclusions en annulation qui a été rejeté comme inopérant.

241    Enfin, le sixième chef de conclusions indemnitaires est étroitement lié au cinquième moyen des conclusions en annulation qui a été rejeté comme dépourvu de tout fondement.

242    Or, le Tribunal n’ayant établi l’existence d’aucune des illégalités sur le fondement desquelles le requérant invoque ses premier, deuxième, quatrième, cinquième et sixième chefs de conclusions indemnitaires, il y a lieu de rejeter ces chefs de conclusions indemnitaires.

243    Pour ce qui est du troisième chef de conclusions indemnitaires, aux points 122 à 131 du présent arrêt le Tribunal a constaté que l’ECDC a violé le droit du requérant d’être entendu sur les conséquences qu’il envisageait de tirer du comportement reproché au requérant, à savoir qu’il envisageait de faire application de l’article 47, sous b), ii), du RAA. Force est toutefois de constater que la requête dans l’affaire F‑161/12 ne comporte pas la moindre démonstration que le préjudice ne serait pas intégralement réparé par l’annulation de la décision litigieuse dans laquelle il trouverait sa cause (arrêts Gomes Moreira/ECDC, EU:F:2013:159, points 130 et 131, et Hall/Commission et CEPOL, F‑22/12, EU:F:2013:202, point 53).

244    Par ailleurs, lors de l’audience, le requérant a affirmé qu’il se trouverait dans une situation similaire à celle de la requérante dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt CH/Parlement (EU:F:2013:203), qui s’est vu accorder une somme de 50 000 euros au titre de la réparation du préjudice moral subi suite à la résiliation de son contrat d’assistant parlementaire accrédité, sans qu’elle ait été entendue préalablement à cette décision. Toutefois, à supposer même que la situation de la partie requérante dans ladite affaire, dont le Tribunal a estimé que le licenciement était intervenu dans des « conditions hautement critiquables » (arrêt CH/Parlement, EU:F:2013:203, point 65), soit similaire à celle du requérant, il n’en demeure pas moins que ce dernier n’a développé dans sa requête aucun argument pour démontrer que, en l’espèce, le dommage moral subi ne pourrait être intégralement réparé par l’annulation de la décision litigieuse. Il s’ensuit que le troisième chef de conclusions indemnitaires doit être écarté.

245    Les septième et huitième chefs de conclusions indemnitaires ne sont pas liés à la décision litigieuse, mais à d’autres décisions de l’ECDC.

246    Par son septième chef de conclusions indemnitaires, le requérant conteste la décision implicite de rejet d’une demande qu’il avait présentée le 24 avril 2012 d’avoir accès au serveur où étaient sauvegardés les échanges de courriels avec Mme B. Toutefois, il ressort du dossier que, sans attendre que le délai de quatre mois prévu par l’article 90, paragraphe 1, du statut ait expiré, le requérant a introduit une réclamation le 30 juillet 2012. Par son huitième chef de conclusions indemnitaires, le requérant conteste le rejet d’une demande d’informations qu’il avait présentée le 18 novembre 2012 dans la perspective d’un recours contentieux contre son licenciement. Toutefois, il ne ressort pas du dossier que l’ECDC ait donné une réponse négative à cette demande d’informations, ni que le requérant ait introduit une réclamation contre une éventuelle décision négative, préalablement aux présentes conclusions indemnitaires. Ces deux chefs de conclusions doivent donc être rejetés comme irrecevables puisque le requérant n’a pas suivi correctement la procédure prévue par l’article 90, paragraphes 1 et 2, du statut.

247    En ce qui concerne le neuvième chef de conclusions indemnitaires, force est de constater que, premièrement, l’ECDC a répondu le 18 septembre 2012 à la réclamation du requérant par la décision portant rejet de la réclamation et, deuxièmement, que cette décision donne une réponse très complète à la réclamation du requérant. Le simple fait que le requérant ne soit pas d’accord avec la décision portant rejet de la réclamation ne saurait suffire pour reprocher à l’ECDC de ne pas avoir répondu à la réclamation, de sorte que le présent chef de conclusions doit être écarté.

248    Il découle de tout ce que précède que les conclusions visant la réparation du préjudice moral doivent être rejetées dans leur ensemble.

249    Il ressort de l’ensemble de ce qui précède qu’il y a lieu d’accueillir les conclusions en annulation et d’annuler la décision litigieuse au motif que le requérant n’a pas été entendu sur les conséquences que l’AHCC envisageait de tirer du comportement de celui-ci et de rejeter l’ensemble des autres conclusions des deux recours.

 Sur les dépens et frais de justice

250    Aux termes de l’article 101 du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En vertu de l’article 102, paragraphe 1, du règlement de procédure, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe n’est condamnée que partiellement aux dépens, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre. En outre, selon l’article 103, paragraphe 1, du règlement de procédure, si plusieurs parties succombent, le Tribunal décide du partage des dépens. Enfin, l’article 103, paragraphe 2, du règlement de procédure dispose que si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs chaque partie supporte ses propres dépens.

251    Il résulte des motifs énoncés dans le présent arrêt que l’ECDC a succombé en ses conclusions dans l’affaire F‑159/12, alors que le requérant a succombé en son recours dans l’affaire F‑161/12. En outre, les deux parties ont, dans leurs conclusions respectives, expressément demandé que l’autre partie soit condamnée aux dépens dans les deux affaires. Toutefois, dans l’affaire F‑159/12, si le Tribunal a accueilli les conclusions en annulation du requérant, il a néanmoins rejeté ses conclusions indemnitaires. Par conséquent, dans l’affaire F‑159/12, le requérant a partiellement succombé en son recours. Dans ces circonstances, le Tribunal décide que, dans l’affaire F‑159/12, en application de l’article 103, paragraphe 2, du règlement de procédure, chaque partie supporte ses propres dépens et que, dans l’affaire F‑161/12, en application de l’article 101 du règlement de procédure, le requérant doit supporter ses propres dépens et est condamné à supporter les dépens exposés par l’ECDC.

252    Par ailleurs, en vertu de l’article 108, sous a), du règlement de procédure, si le Tribunal a exposé des frais qui auraient pu être évités, il peut condamner la partie qui les a provoqués à les rembourser.

253    En l’espèce, dans l’affaire F‑159/12, le requérant a déposé deux fois des mémoires en réplique qui n’étaient pas conformes aux instructions données par le Tribunal quant au nombre de pages et aux questions à examiner. En outre, malgré les demandes du Tribunal en ce sens, le requérant a refusé à deux reprises de régulariser son mémoire en réplique.

254    Par ailleurs, par lettre du 16 octobre 2013, le Tribunal a attiré l’attention du requérant sur la possibilité pour le Tribunal de condamner une partie qui aurait causé des frais évitables à les rembourser en application de l’article 94, sous a), du règlement de procédure alors en vigueur, dont le contenu ne diffère pas substantiellement, en ce qui concerne les conditions pour condamner une partie à rembourser ces frais, de celui de l’article 108, sous a), du règlement de procédure. Par cette même lettre, le Tribunal a rappelé au requérant la jurisprudence du Tribunal de l’Union européenne sur les dispositions analogues de son règlement de procédure, notamment l’arrêt Strack/Commission (EU:T:2012:691). Enfin, le requérant a été entendu lors de l’audience sur la possibilité que le Tribunal décide de le condamner, au titre de l’article 94, sous a), du règlement de procédure alors en vigueur, à rembourser au Tribunal des frais que celui-ci aurait inutilement dû supporter du fait de son comportement.

255    Or, il ne fait pas de doute que la gestion administrative et l’analyse des deux mémoires en réplique non conformes aux instructions du Tribunal ont occasionné des frais qui auraient pu être évités (arrêt Strack/Commission, EU:T:2012:691, points 230 à 232).

256    Il convient donc, eu égard à l’importance des frais que le Tribunal a dû exposer et qui auraient pu être évités, de condamner le requérant à rembourser au Tribunal une partie de ces frais pour un montant de 2 000 euros.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision du 24 février 2012 du directeur du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies portant résiliation du contrat d’agent contractuel de CJ est annulée.

2)      Le recours dans l’affaire F‑159/12 est rejeté pour le surplus.

3)      Le recours dans l’affaire F‑161/12 est rejeté.

4)      Dans l’affaire F‑159/12, chaque partie supporte ses propres dépens.

5)      Dans l’affaire F‑161/12, CJ supporte ses propres dépens et est condamné à supporter les dépens exposés par le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies.

6)      Dans l’affaire F‑159/12, CJ est condamné à payer au Tribunal un montant de 2 000 euros afin de rembourser une partie des frais évitables que ce dernier a dû exposer.

Rofes i Pujol

Bradley

Svenningsen

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 29 avril 2015.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

       K. Bradley


* Langue de procédure : l’anglais.