Language of document : ECLI:EU:T:2007:230

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (chambre des pourvois)

12 juillet 2007 (*)

« Pourvoi – Fonction publique – Fonctionnaires – Maladie professionnelle – Pourvoi manifestement irrecevable – Pourvoi manifestement non fondé »

Dans l’affaire T-252/06 P,

ayant pour objet un pourvoi formé contre l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (troisième chambre), du 28 juin 2006, Beau/Commission (F-39/05, non encore publié au Recueil), et tendant à l’annulation de cet arrêt,

Marie-Yolande Beau, ancienne fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Paris (France), représentée par Mes S. Rodrigues et C. Bernard-Glanz, avocats,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant

Commission des Communautés européennes, représentée par M. J. Currall et Mme K. Herrmann, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (chambre des pourvois),

composé de MM. B. Vesterdorf, président, M. Jaeger, J. Pirrung, V. Vilaras et H. Legal, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, introduit au titre de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice, Mme Beau demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (troisième chambre) du 28 juin 2006, Beau/Commission (F-39/05, non encore publié au Recueil, ci-après l’« arrêt attaqué »), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la Commission du 3 août 2004 refusant de faire droit à la demande de reconnaissance de l’origine professionnelle de sa maladie et mettant à sa charge une partie des frais des travaux de la commission médicale, les honoraires et frais accessoires du médecin désigné par elle ainsi que la moitié des honoraires et frais accessoires du troisième médecin.

 Cadre juridique du litige

2        L’article 73, paragraphe 1, premier alinéa, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut ») prévoit que, dans les conditions fixées par une réglementation établie d’un commun accord par les institutions des Communautés, le fonctionnaire est couvert, dès le jour de son entrée en service, contre les risques de maladie professionnelle et les risques d’accident.

3        La réglementation commune relative à la couverture des risques d’accident et de maladie professionnelle des fonctionnaires des Communautés européennes (ci‑après la « réglementation ») fixe, en exécution de l’article 73 du statut, les conditions dans lesquelles le fonctionnaire est couvert contre les risques d’accident et de maladie professionnelle.

4        L’article 3 de cette réglementation dispose :

« 1. Sont considérées comme maladies professionnelles les maladies qui figurent à la ‘liste européenne des maladies professionnelles’ annexée à la recommandation de la Commission du 22 mai 1990 et à ses compléments éventuels, dans la mesure où le fonctionnaire a été exposé, dans son activité professionnelle auprès des Communautés européennes, aux risques de contracter ces maladies.

2. Est également considérée comme maladie professionnelle toute maladie ou aggravation d’une maladie préexistante ne figurant pas à la liste visée au paragraphe 1, lorsqu’il est suffisamment établi qu’elle trouve son origine dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice des fonctions au service des Communautés. »

5        La réglementation prévoit que les décisions relatives à la reconnaissance de l’origine professionnelle de la maladie sont prises par l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») sur la base des conclusions émises par le ou les médecins désignés par les institutions et, si le fonctionnaire le requiert, après consultation de la commission médicale.

 Faits à l’origine du litige

6        Ainsi qu’il ressort des points 12 à 26 de l’arrêt sous pourvoi, les faits à l’origine du litige sont les suivants.

7        Entrée au service de la Commission en 1988 en qualité d’informaticienne, Mme Beau a été reconnue atteinte d’une invalidité permanente totale et bénéficie à ce titre, depuis le 1er février 1998, d’une pension d’invalidité.

8        La requérante a, en outre, demandé, par lettre du 10 novembre 1997, indiquant qu’elle était atteinte d’asthme et de troubles respiratoires invalidants, la reconnaissance de l’origine professionnelle de ces affections, en application de l’article 73 du statut. Puis, le 8 décembre 1997, elle a introduit une seconde demande au titre du même article, en invoquant cette fois des troubles psychologiques.

9        Ces deux demandes ont fait l’objet d’une procédure unique.

10      Le docteur Dalem, spécialiste en chirurgie, désigné par la Commission pour conduire l’enquête, a élaboré quatre rapports, les 8 avril, 21 juin, 23 juillet et 20 août 1999. Dans son rapport du 23 juillet 1999, confirmé par le rapport du 20 août 1999, établi sur la base d’une fibroscopie réalisée par le docteur Villette, le docteur Dalem a relevé que la requérante présentait un « syndrome asthmatiforme allergique pour lequel elle était du reste régulièrement soignée », un « syndrome d’hyperventilation », considéré comme « une affection essentiellement neuropsychique dans l’anxiété » et que la bronchoscopie était négative. Il a conclu ce qui suit :

« Rien dans la symptomatologie présentée par [Mme Beau] ne peut être rattaché à une maladie professionnelle et par ailleurs différents symptômes s’inscrivent dans le syndrome anxieux. Il n’y a donc pas lieu de considérer que la pathologie dont souffre cette dame soit d’origine professionnelle. »

11      Le 7 septembre 1999, la Commission a, sur la base de ces conclusions, adopté un projet de décision refusant de faire droit à la demande de la requérante.

12      Par lettre du 2 novembre 1999, l’intéressée a demandé la consultation de la commission médicale, en précisant que ses troubles respiratoires étaient répertoriés dans la liste européenne des maladies professionnelles.

13      Le 28 novembre 2000, la Commission a donné mandat à la commission médicale, composée du docteur Dalem, désigné par ses soins, du docteur Château-Waquet, désigné par la requérante, et du professeur De Vuyst, choisi d’un commun accord par ces deux médecins, de déterminer les affections dont est atteinte l’intéressée et, dans l’hypothèse où elles ne figureraient pas sur la liste européenne des maladies professionnelles, de déterminer si, sur le plan médical, il est suffisamment établi que lesdites affections ou l’aggravation de ces affections préexistantes présentent un rapport direct avec les fonctions de la requérante au service des Communautés européennes.

14      À l’issue de sa première réunion, tenue le 15 janvier 2001, la commission médicale a décidé de faire réaliser un examen complémentaire – une « épreuve fonctionnelle respiratoire » – et de faire examiner la requérante par un spécialiste des problèmes psychosomatiques.

15      Les résultats de ces examens complémentaires ont été mis à la disposition des membres de la commission en janvier 2004. Le professeur De Vuyst a estimé que ceux-ci n’étaient pas « contributifs » et décidé qu’un nouveau contrôle fonctionnel respiratoire avec test de provocation à l’histamine devait être réalisé, de même qu’une nouvelle analyse par un psychiatre.

16      À la suite de ces examens, la commission médicale a tenu, le 29 mars 2004, une seconde réunion, à l’issue de laquelle elle a adopté à l’unanimité son rapport, qui concluait, en substance, que les affections de la requérante n’avaient pas un caractère professionnel.

17      Le 3 août 2004, la Commission a décidé de confirmer les termes de son projet de décision du 7 septembre 1999, de rejeter en conséquence la demande de la requérante et, conformément à la réglementation, de mettre à la charge de l’intéressée les honoraires et frais accessoires du médecin désigné par celle-ci ainsi que la moitié des honoraires et frais accessoires du troisième médecin.

18      Mme Beau a formé, le 2 novembre 2004, une réclamation à l’encontre de cette décision, laquelle a été rejetée par décision de la Commission du 11 février 2005.

 Procédure devant le Tribunal de la fonction publique et arrêt attaqué

19      Initialement enregistré au greffe du Tribunal de première instance sous la référence T-215/05, le recours de Mme Beau a été renvoyé devant le Tribunal de la fonction publique par ordonnance du 15 décembre 2005, en application de l’article 3, paragraphe 3, de la décision 2004/752/CE, Euratom du Conseil, du 2 novembre 2004, instituant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (JO L 333, p. 7), et enregistré au greffe dudit Tribunal sous la référence F-39/05.

20      Le requérante demandait au Tribunal de la fonction publique d’annuler la décision de la Commission du 3 août 2004 refusant de faire droit à la demande de reconnaissance de l’origine professionnelle de sa maladie et mettant à sa charge les honoraires et frais accessoires du médecin désigné par elle et la moitié des honoraires et frais accessoires du troisième médecin.

21      À l’appui de son recours, elle faisait valoir quatre moyens, le premier, tiré de l’erreur de droit qu’aurait commise la commission médicale dans l’appréciation de la notion de maladie professionnelle et, par voie de conséquence, la méconnaissance de son mandat par ladite commission, le deuxième, tiré de l’irrégularité de la motivation de l’avis de la commission médicale, le troisième, tiré de l’irrégularité dudit avis en ce qu’il aurait été fondé sur un rapport médical incomplet et sur un test de provocation à l’histamine non pertinent et, le quatrième, tiré de ce que la commission ne se serait pas prononcée sur l’application de l’article 14 de la réglementation.

22      Le Tribunal de la fonction publique a rejeté chacun des moyens du recours et le recours dans son ensemble. S’agissant du premier moyen, après avoir rappelé, d’un point de vue général, la mission qui incombe à la commission médicale et examiné, à l’aune de ces exigences, l’avis rendu par celle-ci en l’espèce, il a considéré que la commission médicale avait clairement déterminé les affections dont était atteinte la requérante et que, aucune de ces affections ne figurant sur la liste européenne des maladies professionnelles, elle avait ensuite examiné si lesdites affections ou leur aggravation avaient pour origine l’exercice des fonctions de la requérante auprès des Communautés, s’agissant, d’une part, du trouble psychique et, d’autre part, des troubles respiratoires.

23      Le Tribunal de la fonction publique a ensuite jugé que, dans l’analyse d’ensemble à laquelle elle s’était livrée, la commission médicale n’avait pas méconnu la notion de maladie professionnelle, sur la base des considérations suivantes :

« 48 En effet, en relevant que la difficulté d’entente de la requérante avec ses collègues pouvait ‘possiblement, mais non certainement’ avoir temporairement aggravé les affections, mais qu’elle avait terminé ses effets ‘sans laisser de séquelles propres’, la commission médicale a seulement entendu relever que l’ambiance de travail avait pu, pendant une période, aggraver les affections de la requérante, mais n’était pas, au-delà de ses effets temporaires, l’une des causes certaines de l’état de santé de la requérante tel qu’il devait être examiné à la suite de la demande de celle-ci. C’est dans la même perspective, pour dénier tout rapport direct entre un facteur professionnel et les affections dont la requérante était encore atteinte lors de l’examen de sa demande, que la commission médicale a indiqué que ‘la meilleure preuve [que l’atmosphère de tension nerveuse a terminé ses effets sans laisser de séquelles propres] en est que la patiente a cessé ses activités professionnelles en 1996 mais continue à se plaindre d’une série de troubles à intégrer dans son problème psychosomatique’. Même si cette formulation n’est pas des plus heureuses, elle n’est pas de nature à remettre en cause la conclusion d’ensemble à laquelle la commission médicale est parvenue ni à établir que cette conclusion serait fondée sur une conception erronée de la notion de maladie professionnelle au sens du statut.

49       Quant à l’argument de la requérante tiré de ce que la méconnaissance de la notion de maladie professionnelle se retrouverait dans le rapport du docteur Dalem du 23 juillet 1999, il ne permet pas davantage, en tout état de cause, d’établir qu’une erreur de droit aurait été commise par l’AIPN. Cette dernière s’est en effet fondée, comme elle le devait, sur les seules conclusions de la commission médicale pour adopter la décision attaquée et non sur ce rapport qui, ainsi que le soutient à juste titre la Commission, ne constituait qu’un élément parmi d’autres de la phase préparatoire d’examen de la demande que la requérante a adressée à l’AIPN.

50       Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la commission médicale aurait commis une erreur de droit dans l’appréciation de la notion de maladie professionnelle et de ce qu’elle aurait, par voie de conséquence, méconnu son mandat, doit être rejeté comme non fondé. »

24      S’agissant du deuxième moyen, le Tribunal de la fonction publique a jugé ce qui suit :

« 63 En tout état de cause, les rapports et éléments médicaux invoqués par la requérante ne permettent pas de soutenir, contrairement à ce qu’elle prétend, qu’un diagnostic d’asthme aurait dû être retenu par la commission médicale.

64       En effet, le rapport de bronchoscopie du 5 mars 2002 n’aboutit pas à un tel diagnostic. Il ne révèle pas de syndrome asthmatiforme mais seulement un ‘syndrome inflammatoire de l’apicale du LIG’. Selon le rapport de bronchoscopie postérieur, établi en décembre 2003 par le même praticien, la bronchoscopie était normale. Compte tenu de l’existence de deux autres rapports antérieurs à celui du 5 mars 2002, aboutissant aux mêmes résultats normaux, la commission médicale pouvait valablement motiver sa conclusion selon laquelle la requérante n’était pas atteinte d’asthme par la référence ‘notamment’ à ces trois bronchoscopies, sans avoir à justifier l’absence de mention du rapport du 5 mars 2002.

65       Les autres éléments qui, selon la requérante, auraient permis d’établir un diagnostic d’asthme n’avaient pas la même nature que les rapports médicaux détaillés sur lesquels la commission médicale s’est uniquement fondée. En particulier, le document signé par le docteur Villette et daté du 29 septembre 1997 comporte de nombreuses rubriques non remplies. Il est intitulé ‘Demande d’exploration fonctionnelle respiratoire’ et, s’il comporte dans la case diagnostic la mention ‘asthme’, il n’est assorti d’aucune précision permettant d’établir que son signataire s’est lui-même livré à un examen de la requérante et a conclu à ce diagnostic. En outre, ainsi que l’indique à juste titre la Commission dans son mémoire en duplique, le docteur Villette a, le même jour, produit un certificat dans lequel il n’a pas constaté d’asthme, mais des ‘symptômes respiratoires invalidants (toux-expectorations-hémoptysie)’. Quant aux pièces médicales invoquées par la requérante aux points 56 à 63 de la requête, si elles révèlent l’existence de troubles qui peuvent accompagner l’asthme, elles ne suffisent pas à établir qu’un tel diagnostic s’imposait.

66       La commission médicale n’avait donc pas, dans les circonstances de l’espèce, à justifier les raisons pour lesquelles elle n’a pas pris en compte ces données médicales ».

 Sur le pourvoi

 Procédure

25      Par mémoire enregistré au greffe du Tribunal le 7 septembre 2006, la requérante a formé le présent pourvoi.

 Conclusions des parties

26      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’arrêt attaqué ;

–        faire droit aux conclusions en annulation et en indemnité présentées par la requérante en première instance ;

–        condamner la Commission à l’entièreté des dépens.

27      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le pourvoi ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

28      Aux termes de l’article 145 du règlement de procédure du Tribunal, lorsque le pourvoi est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, le Tribunal peut, à tout moment, sur rapport du juge rapporteur, l’avocat général entendu, rejeter le pourvoi totalement ou partiellement, par voie d’ordonnance motivée.

29      À l’appui de son pourvoi, la requérante articule deux moyens, respectivement tirés de violations du droit communautaire et d’une irrégularité de procédure.

 Sur le premier moyen, tiré de violations du droit communautaire


 Arguments des parties

30      En premier lieu, la requérante reproche au Tribunal de la fonction publique d’avoir, au point 48 de l’arrêt attaqué, reproduit au point 23 ci-dessus, commis une erreur de droit en limitant la notion de maladie professionnelle au cas d’une affection ayant sa cause ou son origine dans l’activité professionnelle du fonctionnaire, en contradiction avec les dispositions applicables, lesquelles retiennent également la qualification de maladie professionnelle en cas d’aggravation d’une maladie préexistante.

31      En deuxième lieu, au même point de l’arrêt sous pourvoi, le Tribunal de la fonction publique se serait fondé à tort sur le caractère prétendument temporaire des effets de l’ambiance de travail auquel a été exposée la requérante pour exclure qu’ils aient pu contribuer à l’apparition de son état de santé, alors que le caractère temporaire ou non de l’affection serait sans pertinence dans la détermination de l’origine ou de l’aggravation professionnelle de l’affection. Le Tribunal de la fonction publique aurait en outre admis, à tort, que la persistance des troubles subis par la requérante après la cessation de son activité professionnelle devait être interprétée comme signifiant que ceux-ci ne pouvaient pas avoir un caractère professionnel.

32      En troisième lieu, au point 63 de l’arrêt, reproduit au point 24 ci-dessus, le Tribunal de la fonction publique aurait conclu à tort que « les rapports et éléments médicaux invoqués par la requérante ne permettent pas de soutenir […] qu’un diagnostic d’asthme aurait dû être retenu par la Commission médicale », alors que le rapport du 23 juillet 1999 du docteur Dalem, désigné par la Commission, tout en excluant l’origine professionnelle de la pathologie, constatait chez la requérante l’existence d’un syndrome asthmatiforme allergique. Le Tribunal de la fonction publique aurait dû examiner dans quelle mesure ledit syndrome avait pu être causé ou aggravé par le facteur professionnel.

33      La Commission soutient que le moyen relatif à l’erreur de droit qu’aurait commise le Tribunal de la fonction publique n’est pas fondé et que les arguments qui tendent à mettre en cause l’appréciation portée par celui-ci sur les rapports et les éléments médicaux figurant au dossier sont irrecevables dans le cadre d’un pourvoi.

Appréciation du Tribunal

34      Le premier volet de l’argumentation de la requérante, selon lequel le Tribunal de la fonction publique aurait exclu que l’aggravation d’une maladie préexistante soit propre à conférer un caractère professionnel à une affectation, doit être écarté d’emblée.

35      En effet, il ne saurait être contesté qu’une maladie, ou son aggravation, qui a son origine dans l’exercice des fonctions au service des Communautés, peut être considérée comme revêtant un caractère professionnel au titre de la réglementation communautaire (arrêt de la Cour du 4 octobre 1991, Commission/Gill, C-185/90 P, Rec. p. I-4779, point 15).

36      La notion de maladie professionnelle ne se limite pas aux cas où l’invalidité du fonctionnaire trouve son origine exclusive dans l’exercice des fonctions, mais peut s’appliquer quand l’invalidité résulte de l’aggravation d’une maladie préexistante dont l’origine se trouve ailleurs. En d’autres termes, si c’est l’aggravation d’une maladie préexistante entraînée par l’exercice de fonctions au service des Communautés qui a rendu un fonctionnaire incapable de continuer à exercer ces fonctions, l’invalidité doit être considérée comme ayant pour cause une maladie professionnelle (arrêt du Tribunal du 23 novembre 2004, O/Commission, T‑376/02, RecFP p. IA-349 et II-1595, point 68).

37      En l’espèce, et contrairement à ce que soutient la requérante, le Tribunal de la fonction publique n’a pas limité la notion de maladie professionnelle au cas d’une affection ayant sa cause ou son origine dans l’activité professionnelle du fonctionnaire et exclu une telle qualification dans l’hypothèse d’une aggravation d’une maladie préexistante.

38      Il ressort au contraire de l’arrêt attaqué que le Tribunal de la fonction publique a explicitement fait la différence entre ces deux circonstances, puisque, en reprenant l’analyse de la commission médicale, il a distingué l’origine puis l’aggravation temporaire du trouble psychique de la requérante (point 43 de l’arrêt attaqué) et fait de même s’agissant des troubles respiratoires de l’intéressée (point 44 de l’arrêt attaqué). Enfin, avant de conclure que la commission médicale n’avait pas méconnu la notion de maladie professionnelle, le Tribunal de la fonction publique a encore envisagé l’aggravation, jugée temporaire, des affections de la requérante.

39      L’argument selon lequel le Tribunal de la fonction publique aurait limité la notion de maladie professionnelle au cas où celle-ci trouve son origine dans les fonctions de l’agent à l’exclusion du cas d’aggravation d’une maladie préexistante n’est par conséquent manifestement pas fondé.

40      La deuxième erreur qu’aurait prétendument commise le Tribunal de la fonction publique, en tirant du caractère temporaire des effets de l’ambiance de travail sur les affections de la requérante la conclusion de l’absence de caractère professionnel desdites affections, ne saurait davantage être retenue.

41      En effet, pour que l’AIPN puisse faire droit à la demande du fonctionnaire tendant à la reconnaissance comme maladie professionnelle de l’aggravation de l’affection présentée par celui-ci, cette autorité doit nécessairement, le cas échéant, sur la base des conclusions de la commission médicale, si la saisine de celle-ci a été demandée, constater une telle aggravation lorsqu’elle apprécie le bien-fondé de la demande (voir, en ce sens, pour la constatation d’une telle aggravation, arrêt du Tribunal du 26 septembre 1990, F/Commission, T-122/89, Rec. p. II-517, point 14, et arrêt O/Commission, précité, points 72 et 73).

42      Le caractère temporaire de l’aggravation d’une maladie, du fait duquel cette aggravation a cessé et ne peut donc plus être constatée lorsque l’AIPN statue sur la demande de reconnaissance de maladie professionnelle, n’est, par conséquent, pas indifférent, contrairement à ce que soutient la requérante. En effet, faute de pouvoir constater l’aggravation en cause à la date à laquelle elle statue, l’AIPN ne peut reconnaître que le fonctionnaire concerné est atteint d’une maladie professionnelle.

43      Or, il ressort de l’arrêt attaqué (point 48) que le Tribunal de la fonction publique a relevé que la commission médicale avait constaté que l’aggravation momentanée en question « avait terminé ses effets sans laisser de séquelles propres » (voir point 23 ci-dessus) indiquant ainsi que, lors de l’examen de sa demande de reconnaissance de maladie professionnelle, la requérante ne présentait pas de symptômes d’aggravation d’une maladie préexistante.

44      Par conséquent, lorsqu’il a admis que la commission médicale avait pu, sans méconnaître la notion statutaire de maladie professionnelle, ne pas retenir comme cause professionnelle de la détérioration de l’état de santé de la requérante une ambiance de travail dont les effets aggravants n’avaient été que temporaires et qui n’avaient plus de conséquences propres au moment où elle se prononçait, le Tribunal de la fonction publique n’a commis ni erreur de droit ni erreur dans la qualification juridique des faits dans les conséquences qu’il a tirées du caractère temporaire de l’aggravation des affections de la requérante.

45      Pour autant que la requérante remette en cause le bien-fondé de l’appréciation de la commission médicale et du Tribunal de la fonction publique sur ce point, ce qui pourrait se déduire de ce qu’elle fait grief au Tribunal de la fonction publique d’avoir commis une « erreur manifeste d’appréciation », il convient de rappeler qu’il résulte d’une jurisprudence constante de la Cour, en tant que juge du pourvoi, que le juge de première instance est seul compétent, d’une part, pour constater les faits, sauf dans le cas où une inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d’autre part, pour apprécier ces faits.

46      L’appréciation des faits ne constitue donc pas, sous réserve du cas de la dénaturation des éléments de preuve produits devant ce juge, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle du Tribunal.

47      Une telle dénaturation doit apparaître de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves (arrêts de la Cour du 28 mai 1998, New Holland Ford/Commission, C‑8/95 P, Rec. p. I-3175, point 72 ; du 6 avril 2006, General Motors/Commission, C-551/03 P, Rec. p. I-3173, point 54, et du 21 septembre 2006, JCB Service/Commission, C-167/04 P, Rec. p. I-8935, point 108).

48      Une dénaturation n’étant en l’espèce ni établie ni même alléguée, la vérification du caractère durable ou temporaire des effets de l’ambiance de travail sur la santé de la requérante ne relève pas du contrôle du juge du pourvoi.

49      Il convient d’ajouter que le Tribunal de la fonction publique lui-même n’était pas chargé en l’espèce de contrôler l’exactitude scientifique des conclusions tirées par la commission médicale des éléments dont elle disposait. En effet, ainsi que le Tribunal de la fonction publique l’a justement rappelé au point 35 de l’arrêt attaqué, le juge est uniquement habilité à vérifier, d’une part, si ladite commission a été constituée et a fonctionné régulièrement et, d’autre part, si son avis est régulier, notamment s’il contient une motivation permettant d’apprécier les considérations sur lesquelles il est fondé et s’il établit un lien compréhensible entre les constatations médicales qu’il comporte et les conclusions auxquelles il parvient (arrêts du Tribunal du 15 décembre 1999, Nardone/Commission, T‑27/98, RecFP p. I-A-267 et II-1293, points 30, 68 et 87 ; Latino/Commission, T-300/97, RecFP p. I-A-259 et II-1263, point 41, et du 26 février 2003, Latino/Commission, T-145/01, RecFP p. I-A-59 et II-337, point 47).

50      Le troisième volet du moyen relatif aux erreurs de droit, tiré de la discordance alléguée entre les conclusions du rapport du 23 juillet 1999 du docteur Dalem et l’avis de la commission médicale, laquelle n’aurait pas permis au Tribunal de la fonction publique de valider cet avis, revient pour partie à remettre en cause l’appréciation portée par la commission médicale, sous le contrôle de régularité du Tribunal de la fonction publique, sur la valeur scientifique des conclusions dont elle était saisie, y compris celle contenue dans le rapport invoqué du docteur Dalem.

51      Comme telle, cette contestation est manifestement irrecevable devant le juge du pourvoi, aucune dénaturation des pièces du dossier n’étant établie, ni même alléguée.

52      Toutefois, en tant qu’il peut s’interpréter comme identifiant une contradiction dans les motifs de l’arrêt attaqué, entre les citations extraites du rapport du docteur Dalem et les conclusions qu’il en a tirées, l’argument est recevable. En effet, une contradiction entre les motifs d’un arrêt soumis au pourvoi en ce qui concerne les éléments de fait du dossier peut être de nature à révéler une erreur matérielle ou une erreur de droit.

53      Néanmoins, en l’espèce, c’est sans contradiction que le Tribunal de la fonction publique a pu, d’une part, noter, au point 16 de l’arrêt attaqué, que le docteur Dalem relevait que la requérante présentait un syndrome asthmatiforme allergique sans origine professionnelle dans deux rapports de 1999 et, d’autre part, au point 63 du même arrêt, considérer que la requérante n’établissait pas qu’un diagnostic d’asthme aurait dû être retenu en 2004 par la commission médicale sur la base des éléments dont elle disposait alors.

54      En effet, la commission médicale n’était pas tenue de confirmer le diagnostic figurant dans l’un quelconque des rapports dont elle disposait, et une discordance entre ses conclusions et celles d’un expert dont le rapport était soumis à son examen ne révèle aucune contradiction, mais, le cas échéant, une divergence d’appréciation médicale qui ne saurait être censurée par le juge sans remettre en cause la compétence propre des organes médicaux en matière de diagnostic.

55      Il en résulte que le premier moyen doit être rejeté, pour partie comme manifestement non fondé et pour partie comme manifestement irrecevable.

 Sur le second moyen, tiré d’une irrégularité de procédure

56      La requérante fait valoir que le Tribunal de la fonction publique a violé les droits de la défense et méconnu l’obligation de motiver ses arrêts, en affirmant, au point 63 de l’arrêt attaqué, (voir point 24 ci-dessus), que « les rapports et éléments médicaux invoqués par la requérante » ne permettaient pas de soutenir qu’un diagnostic d’asthme aurait dû être retenu, alors qu’elle avait fourni en annexe A 21 à sa requête « un rapport du docteur Libert de l’hôpital universitaire de Leuven du 11 avril 2005 » dont le Tribunal de la fonction publique n’aurait pas tenu compte, sans expliquer pourquoi il ne l’a pas fait.

57      Il suffit, pour répondre à ce moyen, de relever, d’une part, qu’en effet un rapport du docteur Libeer (selon l’orthographe figurant au dossier) daté du 11 avril 2005 figurait bien en annexe à la requête introductive d’instance devant le Tribunal de la fonction publique et, d’autre part, que le point critiqué de l’arrêt attaqué, qui ne fait pas mention de ce rapport, fait partie de la réponse dudit arrêt au moyen tiré de la motivation irrégulière de l’avis de la commission médicale et sert à soutenir la conclusion selon laquelle ladite commission n’avait pas à justifier les raisons pour lesquelles elle n’avait pas pris en compte certaines données médicales (point 66 de l’arrêt attaqué (voir point 24 ci-dessus).

58      L’avis de la commission médicale dont la motivation régulière était examinée par le Tribunal de la fonction publique ayant été adopté le 29 mars 2004, cette motivation ne pouvait en tout état de cause être appréciée par référence à un rapport postérieur de plus d’un an à son adoption et, d’ailleurs, postérieur également à la décision attaquée.

59      Il en résulte que l’argumentation élaborée par la requérante à son propos est inopérante et que le moyen doit être rejeté comme manifestement non fondé.

60      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le pourvoi doit être rejeté comme, pour partie, manifestement irrecevable et, pour partie, manifestement non fondé.

 Sur les dépens

61      Conformément à l’article 148, premier alinéa, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, le Tribunal statue sur les dépens.

62      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, premier alinéa, du même règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 144 de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

63      Mme Beau ayant succombé en ses conclusions et la Commission ayant conclu en ce sens, la requérante supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois)

ordonne :

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      Mme Beau supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission.

Fait à Luxembourg, le 12 juillet 2007.

Le greffier

 

      Le président

E. Coulon

 

      H. Legal


* Langue de procédure : le français.