Language of document : ECLI:EU:T:2022:143

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

16 mars 2022 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Notation – Rapport de notation 2019 – Fixation d’objectifs – Règles internes relatives à la notation – Erreur manifeste d’appréciation »

Dans l’affaire T‑314/21,

TA, représentée par Me M. Casado García-Hirschfeld, avocate,

partie requérante,

contre

Parlement européen, représenté par Mme C. González Argüelles et M. R. Schiano, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de MM. J. Svenningsen (rapporteur), président, R. Barents et Mme T. Pynnä, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 270 TFUE, la requérante, TA, demande l’annulation de son rapport de notation établi pour la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2019, tel que modifié par la décision du 29 mars 2021 rejetant partiellement la réclamation.

 Antécédents du litige

2        La requérante est une fonctionnaire du Parlement européen depuis le 1er janvier 2016. Elle est affectée dans son unité actuelle depuis le 16 juin 2018.

3        Le 2 juin 2020, elle a eu un entretien avec son supérieur hiérarchique direct, en sa qualité de premier notateur, en vue de l’établissement du projet de rapport de notation pour la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2019.

4        Le 7 juin 2020, le premier notateur a établi le projet de rapport de notation, à l’égard duquel la requérante a présenté des observations. Elle a ensuite demandé un entretien avec le notateur final avant que ce dernier ne valide le rapport de notation. Cet entretien a eu lieu le 19 juin 2020.

5        Le 6 juillet 2020, le notateur final a validé le rapport de notation, lequel a été notifié à la requérante le même jour (ci-après le « rapport de notation initial »).

6        Le 9 juillet 2020, la requérante a saisi le comité des rapports d’un recours contre le rapport de notation initial.

7        Par avis du 1er octobre 2020, le comité des rapports a conclu qu’il convenait d’adapter, de supprimer ou de reformuler certains commentaires négatifs figurant au point 4.1, intitulé « Appréciations analytiques », du rapport initial au motif qu’ils n’étaient pas justifiés par des éléments factuels ou par des exemples concrets. Le comité des rapports a rejeté le recours pour le surplus.

8        Le 8 octobre 2020, le notateur final a modifié le rapport de notation initial en supprimant les commentaires négatifs identifiés par le comité des rapports (ci-après le « rapport de notation définitif »).

9        Par courriel du 16 octobre 2020, la requérante a, conformément à l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »), saisi l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») d’une réclamation contre le rapport de notation définitif.

10      Par décision du 29 mars 2021 notifiée à la requérante par lettre recommandée avec accusé de réception, l’AIPN a partiellement fait droit à cette réclamation en décidant qu’il convenait de supprimer, tout ou partie, de onze commentaires factuels figurant au point 4.1 du rapport de notation définitif. L’AIPN a rejeté la réclamation pour le surplus après avoir fourni un complément de motivation, par la référence à trois courriels, afin de justifier les commentaires négatifs des notateurs concernant les manques de proactivité, d’autonomie, d’anticipation du travail et de respect des délais reprochés à la requérante (ci-après la « décision de rejet de la réclamation »).

11      Le 20 avril 2021, la lettre recommandée a été retournée au Parlement à l’expiration du délai de conservation de celle-ci par les services postaux belges, sans avoir été retirée par la requérante.

12      Par courriel du 21 avril 2021, le rapport de notation définitif, tel quel modifié par la décision de rejet de la réclamation, a été notifié à la requérante. La requérante n’ayant, à cette date, pas encore pris connaissance de la décision de rejet de la réclamation, elle a répondu à ce courriel en demandant à un membre de la direction générale du personnel que ladite décision lui soit communiquée, ce qui a été fait par courriel du même jour.

 Conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler le rapport de notation établi pour la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2019 et, en tant que de besoin, la décision de rejet de la réclamation ;

–        condamner le Parlement aux dépens.

14      Le Parlement conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme étant partiellement irrecevable et, en tout état de cause, comme étant non fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur l’objet du litige

15      Selon une jurisprudence constante, des conclusions en annulation formellement dirigées contre le rejet d’une réclamation sont, en principe, dépourvues de contenu autonome et ont pour effet de saisir le Tribunal de l’acte faisant grief contre lequel la réclamation a été présentée (voir, en ce sens, arrêts du 17 janvier 1989, Vainker/Parlement, 293/87, EU:C:1989:8, point 8 et du 25 octobre 2018, KF/CSUE, T‑286/15, EU:T:2018:718, point 115 et jurisprudence citée).

16      Néanmoins, une décision explicite de rejet d’une réclamation peut, eu égard à son contenu, ne pas avoir un caractère confirmatif de l’acte contesté. Tel est le cas lorsque la décision de rejet de la réclamation contient un réexamen de la situation de l’intéressé, en fonction d’éléments de droit et de faits nouveaux, ou lorsqu’elle modifie ou complète la décision initiale. Dans ces hypothèses, le rejet de la réclamation constitue un acte soumis au contrôle du juge, qui le prend en considération dans l’appréciation de la légalité de l’acte contesté, voire le considère comme un acte faisant grief se substituant à ce dernier (voir arrêt du 24 avril 2017, HF/Parlement, T‑584/16, EU:T:2017:282, point 71 et jurisprudence citée).

17      En l’espèce, la décision de rejet de la réclamation procède d’un réexamen de la situation de la requérante au terme duquel le rapport de notation définitif a été partiellement modifié. Dès lors, la décision de rejet de la réclamation, en tant qu’elle modifie le rapport de notation définitif, ne constitue pas un acte confirmatif dudit rapport de notation et doit être prise en considération dans le contrôle de la légalité qu’il revient au Tribunal d’exercer (arrêt du 10 novembre 2009, N/Parlement, F‑93/08, EU:F:2009:151, point 42).

18      Il s’ensuit que le présent recours a pour effet de saisir le Tribunal de conclusions aux fins d’annulation du rapport de notation définitif, tel que modifié par la décision de rejet de la réclamation (ci-après le « rapport de notation litigieux »).

 Sur le fond

19      La requérante invoque deux moyens à l’appui de son recours. Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 43 du statut et de l’article 5, paragraphe 2, sous d),  et de l’article 6, paragraphe 11, des règles internes relatives à l’application des dispositions générales d’exécution concernant la mise en œuvre de l’article 43 du statut, de l’article 15, paragraphe 2, et de l’article 87, paragraphe 1, du régime applicable aux autres agents (rapports de notation), adoptées par le secrétaire général du Parlement le 21 octobre 2014 (ci‑après les « règles internes »). Le second moyen est tiré d’une inexactitude matérielle des faits conduisant à une erreur manifeste d’appréciation.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 43 du statut, de l’article 5, paragraphe 2, sous d), et de l’article 6, paragraphe 11, des règles internes

20      La requérante soutient que le Parlement a méconnu la règle imposant aux notateurs de fixer des objectifs au fonctionnaire évalué au début de chaque période d’évaluation tant dans le rapport de notation litigieux que dans le rapport de notation précédent portant sur la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2018. Ce faisant, le Parlement aurait méconnu une règle présentant un caractère substantiel qui justifierait la censure du rapport de notation litigieux.

21      À cet égard, la requérante fait valoir que les objectifs fixés dans le rapport de notation litigieux seraient rédigés de façon tellement génériques que cela reviendrait à ne fixer aucun objectif. De surcroît, la requérante soutient que les objectifs fixés dans le rapport de notation portant sur la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2018, en vue de l’exercice d’évaluation 2019, seraient également lacunaires, ce dont les notateurs n’auraient pas tenu compte au moment de rédiger son évaluation.

22      Le Parlement conteste cette argumentation. Il soutient que le premier moyen est irrecevable en raison de la violation de la règle de concordance entre la réclamation et la requête et, en toute hypothèse, qu’il n’est pas fondé.

23      À titre liminaire, il importe de relever que, même si le premier moyen est formellement tiré de la violation de trois dispositions distinctes, la requérante a indiqué, en réponse à une question du Tribunal, que ce moyen ne comporte en réalité qu’un seul grief, tiré de la violation de la règle imposant aux notateurs de fixer des objectifs au début de chaque exercice d’évaluation.

24      Dans ce contexte, sans qu’il soit nécessaire de s’interroger quant à la présence, dans la réclamation, d’un tel grief pouvant être rattaché au présent moyen en conformité avec la règle de concordance, il y a lieu de constater, en tout état de cause et pour les motifs exposés ci-après, que le premier moyen n’est pas fondé.

25      Aux termes de l’article 5, paragraphe 3, des règles internes, relatif à la préparation des projets de rapport de notation, « [l]a rubrique “Objectifs pour le prochain exercice” est remplie au niveau des objectifs opérationnels et de formation lors de l’entretien avec le noté ».

26      En l’espèce, il convient de constater que tant le rapport de notation litigieux que le rapport de notation précédent, établi pour l’année 2018, énoncent des objectifs opérationnels et de formation définis à l’issue d’un tel entretien en vue de l’exercice d’évaluation suivant. Il en résulte que les notateurs ont rempli leur obligation de fixer formellement des objectifs en vue de la période d’évaluation suivante.

27      Dans ce contexte, en premier lieu, s’agissant de la violation alléguée de l’article 5, paragraphe 2, sous d), des règles internes, il y a lieu de noter que cette disposition ne concerne pas la fixation d’objectifs.

28      En effet, l’article 5, paragraphe 2, sous d), des règles internes énonce l’obligation pour les premiers notateurs de rédiger des « commentaires factuels pour tous les critères, en faisant ressortir notamment soit l’excellence des prestations du noté soit leur insuffisance ». Compte tenu de sa terminologie précise, il en découle uniquement une obligation pour les premiers notateurs de rédiger des commentaires factuels pour tous les critères d’appréciations analytiques qui figurent au point 4.1 du rapport de notation litigieux et qui servent à évaluer, en conformité avec l’article 43 du statut, la compétence, le rendement et la conduite dans le service des fonctionnaires.

29      Par ailleurs, en dépit du fait qu’elle se prévaut d’une violation de l’article 5, paragraphe 2, sous d), des règles internes, il peut être relevé que la requérante n’a développé aucune argumentation visant à soutenir que la suppression de certains commentaires factuels et le remplacement de ceux-ci par des points de suspension à la suite du rejet de sa réclamation serait contraire à cette disposition. Un tel moyen, qui n’est pas d’ordre public, ne saurait dès lors être examiné d’office par le Tribunal dans la présente affaire.

30      En deuxième lieu, s’agissant de la violation alléguée de l’article 6, paragraphe 11, des règles internes, aux termes duquel, en substance, les objectifs doivent être fixés d’un commun accord entre le premier notateur et le fonctionnaire évalué, il y a lieu de constater que la requérante ne soutient pas qu’elle aurait marqué son désaccord sur les objectifs en cause.

31      En toute hypothèse, cette règle ne saurait être interprétée en ce sens que, à défaut d’accord de l’intéressée, le rapport de notation serait vicié. Si cette interprétation était retenue, ladite règle aurait pour effet de placer l’administration dans l’obligation de recueillir dans tous les cas l’assentiment des membres du personnel sur la nature des tâches qui leur sont confiées et mettrait ces derniers en position de choisir les objectifs qu’ils doivent poursuivre, ce qui irait manifestement à l’encontre des règles de bonne administration et du principe hiérarchique (voir arrêt du 8 septembre 2021, QB/BCE, T‑555/20, non publié, EU:T:2021:552, point 93 et jurisprudence citée).

32      En troisième lieu, dans la mesure où la requérante critique la nature prétendument imprécise des objectifs qui ont été fixés, il importe de rappeler, à l’instar du Parlement, que la nature éventuellement vague des objectifs à atteindre pour la période de référence suivante n’affecte pas l’évaluation des prestations de la requérante lors de la période de référence litigieuse et, partant, ne saurait engendrer l’annulation du rapport de notation litigieux, qui se réfère à cette période. La nature prétendument vague desdits objectifs ne saurait être prise en considération que lors de l’évaluation des prestations de la requérante durant la période de référence suivante, au cours de laquelle elle est appelée à les réaliser et pour autant qu’il lui soit reproché de ne pas les avoir atteints (arrêt du 5 décembre 2006, Angelidis/Parlement, T‑424/04, EU:T:2006:376, point 69).

33      Il s’ensuit que la nature éventuellement vague des objectifs fixés dans le rapport de notation litigieux ne saurait justifier l’annulation de celui-ci.

34      Quant au caractère prétendument lacunaire des objectifs fixés dans le rapport de notation précédent en vue de la période d’évaluation litigieuse, il y a lieu de constater que la requérante se limite à cet égard à citer l’arrêt du 9 mars 2010, N/Parlement (F‑26/09, EU:F:2010:17, point 95), dans lequel le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne a indiqué qu’un évaluateur commet une erreur manifeste d’appréciation et méconnaît le devoir de sollicitude lorsqu’il ne prend pas en considération la circonstance selon laquelle aucun objectif préalable n’avait été fixé pour la période d’évaluation.

35      Or, la présente affaire se distingue de celle ayant donné lieu à l’arrêt du 9 mars 2010, N/Parlement (F‑26/09, EU:F:2010:17), dans la mesure où, en l’espèce, il résulte de ce qui précède que des objectifs ont formellement été assignés à la requérante dans le rapport de notation pour l’année 2018. Dans ces conditions, il appartenait à la requérante de préciser dans la requête en quoi la nature éventuellement vague desdits objectifs aurait, selon elle, affecté le contenu de son évaluation dans le rapport de notation litigieux, ce qu’elle n’a pas fait.

36      Au demeurant, s’il est certes vrai que la formulation des objectifs pour la période d’évaluation 2019 est générale, en ce qu’il était attendu de la requérante qu’elle « contribue aux activités de l’unité » et qu’elle « évolue avec son travail », il y a toutefois lieu de rappeler que, dans le contexte d’une réaffectation, il est normal d’attendre d’un fonctionnaire qu’il s’intègre le plus rapidement possible dans sa nouvelle équipe et contribue aux activités de sa nouvelle unité de manière positive et proactive (voir, en ce sens, arrêt du 8 septembre 2021, QB/BCE, T‑555/20, non publié, EU:T:2021:552, points 51 et 60 à 62). Ainsi, dans la mesure où ses notateurs ont notamment estimé que, à la suite de sa réaffectation, le 16 juin 2018, la requérante n’avait pas démontré sa volonté d’apprendre et de s’améliorer dans son nouveau travail même si certaines améliorations avaient été relevées à cet égard et qu’elle devait persister dans cette voie, il était légitime de formuler de telles attentes en vue de l’exercice d’évaluation suivant.

37      Compte tenu de ce qui précède, le premier moyen doit être écarté comme étant non fondé.

 Sur le second moyen, tiré de l’inexactitude matérielle des faits conduisant à une erreur manifeste d’appréciation

38      La requérante fait valoir qu’il serait impossible de détecter, dans les trois courriels auxquels se réfère l’AIPN dans la décision de rejet de la réclamation, une quelconque faute professionnelle susceptible d’étayer la critique de ses notateurs concernant son manque de proactivité, d’autonomie, d’anticipation du travail et de respect des délais.

39      Le Parlement conteste cette argumentation.

40      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler qu’il n’appartient pas au Tribunal de substituer son appréciation à celle des personnes chargées d’évaluer le travail de la personne notée. En effet, les institutions de l’Union européenne disposent d’un large pouvoir d’appréciation pour évaluer le travail de leurs fonctionnaires. Les jugements de valeur portés sur les fonctionnaires dans les rapports de notation sont exclus du contrôle juridictionnel, lequel ne s’exerce que sur les éventuelles irrégularités de forme, les erreurs de fait manifestes entachant les appréciations portées par l’administration ainsi que sur un éventuel détournement de pouvoir (voir arrêt du 12 septembre 2007, Combescot/Commission, T‑249/04, EU:T:2007:261, point 78 et jurisprudence citée). De surcroît, sous réserve de l’obligation de motivation, et pour autant que l’évaluation soit clairement individualisée et non impersonnelle, le notateur n’est pas tenu de détailler les motifs de son évaluation en indiquant des exemples concrets pour étayer ses jugements de valeur (voir arrêt du 12 juillet 2018, PA/Parlement, T‑608/16, non publié, EU:T:2018:440, point 31 et jurisprudence citée).

41      Cependant, il convient de relever que l’AIPN a, en l’espèce, estimé qu’il était nécessaire d’étayer par des exemples concrets le jugement de valeur par lequel les notateurs ont reproché à la requérante d’avoir fait preuve d’un manque de proactivité, d’autonomie, d’anticipation du travail et de respect des délais, en faisant référence, dans la décision de rejet de la réclamation, à trois exemples concrets.

42      Dans ces circonstances, lorsque l’AIPN explicite les motifs à l’origine de l’évaluation d’un notateur par la référence à des faits matériels précis, le juge de l’Union doit vérifier que ces motifs reposent sur des faits matériellement exacts. Ce faisant, le juge ne substitue pas son appréciation à celle des notateurs, mais se limite à contrôler si les faits à l’origine de cette évaluation sont matériellement exacts (voir, par analogie, arrêt du 11 septembre 2013, L/Parlement, T‑317/10 P, EU:T:2013:413, point 70).

43      En l’espèce, en premier lieu, il ressort de l’échange de courriels du 17 janvier 2019 que, à la suite de la demande de la requérante, adressée à un collègue, visant à savoir qui était chargé de la rédaction d’une lettre, sa cheffe d’unité, qui était en copie du courriel, a répondu « [t]oi, je le crains… ». Selon le Parlement, ses notateurs ont considéré que ce courriel illustrait le fait que la requérante ne faisait pas preuve de proactivité et qu’elle tentait de se décharger de son travail lorsqu’une tâche lui était confiée.

44      La requérante n’a avancé aucun argument susceptible de remettre en cause l’exactitude matérielle de ce fait ou la plausibilité de cette appréciation des notateurs. En effet, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité des pièces produites après la clôture de la phase écrite de la procédure au regard de l’article 85, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, il suffit de constater que la circonstance que la requérante a ensuite accompli cette tâche rapidement ne remet nullement en cause la plausibilité de l’appréciation selon laquelle cet échange de courriels révèle néanmoins un certain manque de proactivité de sa part dès lors qu’elle ne s’est acquittée de cette tâche qu’après que sa cheffe d’unité lui a rappelé qu’elle était responsable de l’exécution de celle-ci.

45      En deuxième lieu, le courriel du 22 janvier 2019 est un courriel que la requérante a adressé à ses collègues en vue de la rédaction, pour le 31 janvier suivant, d’un projet de conclusion pour une conférence interparlementaire. Selon le Parlement, ses notateurs ont considéré que, en laissant un délai de sept jours ouvrables à ses collègues pour lui transmettre leurs contributions, alors que ce type de conférence n’a lieu que deux fois par an à des dates déterminées longtemps à l’avance et qu’il s’agissait d’une semaine pendant laquelle ils étaient tous très occupés, la requérante a mal anticipé son travail.

46      À cet égard, la requérante se limite à soutenir que cet exemple serait « incompréhensible », car le délai qu’elle a accordé à ses collègues aurait été suffisant pour leur permettre de lui faire parvenir leurs contributions. Cela ne suffit toutefois pas à remettre en cause la plausibilité de l’appréciation des notateurs qui ont considéré que la requérante aurait pu anticiper encore davantage son travail afin, notamment, de tenir compte de la charge de travail des collègues dont elle attendait les contributions.

47      En troisième lieu, s’agissant du courriel du 5 mars 2019, il en ressort que la requérante a transmis à sa cheffe d’unité un projet de discours d’ouverture d’une conférence se tenant le 7 mars suivant, en s’excusant pour l’envoi tardif de celui-ci. Selon le Parlement, les notateurs ont considéré que l’envoi tardif d’un projet de discours, moins de deux jours avant le début de la conférence, illustrait son manque d’anticipation du travail et de respect des délais.

48      Sur ce point, la requérante explique que le projet de discours en question portait sur une question d’actualité et qu’il était susceptible d’être actualisé jusqu’à la dernière minute. En outre, elle n’aurait reçu la dernière contribution de la part d’un collègue que la veille dans l’après-midi, ce qui justifierait le retard dans l’envoi du projet de discours en question.

49      Or, d’une part, la requérante ne saurait reprocher à l’AIPN de s’être fondée sur des faits inexacts dans la mesure où, dans ledit courriel, elle a elle-même reconnu le caractère tardif de l’envoi de ce projet de discours, ce qui peut donc permettre d’étayer le reproche de ses notateurs concernant le respect des délais. D’autre part, les explications avancées par la requérante ne sont pas susceptibles de priver de plausibilité l’appréciation de ses notateurs selon laquelle elle aurait pu faire preuve d’une meilleure anticipation de son travail pour éviter l’envoi tardif de ce projet.

50      Compte tenu de ce qui précède, il convient d’écarter le second moyen comme étant non fondé et, par conséquent, de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

51      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par le Parlement, conformément aux conclusions de celui-ci.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      TA est condamnée aux dépens.

Svenningsen

Barents

Pynnä

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 mars 2022.

Signatures


*      Langue de procédure : le français.