Language of document : ECLI:EU:T:2004:245

Arrêt du Tribunal

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)
20 juillet 2004 (1)

« Marque communautaire – Demande de marque verbale LIMO – Motifs absolus de refus – Article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement (CE) nº 40/94 »

Dans l'affaire T-311/02,

Vitaly Lissotschenko, demeurant à Dortmund (Allemagne),

Joachim Hentze, demeurant à Werl (Allemagne),

représentés par Me B. Hein, avocat,

parties requérantes,

contre

Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par MM. J. Weberndörfer et G. Schneider, en qualité d'agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l'OHMI du 31 juillet 2002 (affaire R 363/2000-2), concernant l'enregistrement du signe verbal LIMO comme marque communautaire,



LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (première chambre),



composé de MM. B. Vesterdorf, président, P. Mengozzi et MmeM. E. Martins Ribeiro, juges,

greffier : Mme D. Christensen, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 10 octobre 2002,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 25 février 2003,

vu les mesures d'organisation de la procédure décidées le 10 mars 2004 et la réponse de l'OHMI déposée le 31 mars 2004,

à la suite de l'audience du 27 avril 2004,

rend le présent



Arrêt




Antécédents du litige

1
Le 26 août 1999, MM. Lissotschenko et Hentze (ci-après les « requérants ») ont présenté une demande de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) nº 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié.

2
La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal LIMO.

3
Les produits pour lesquels l’enregistrement de la marque a été demandé relèvent des classes 9, 10 et 11 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

classe 9 : « Lasers à usage non médical, en particulier lasers à diodes, lasers destinés aux techniques de mesurage, lasers destinés au travail des matériaux, lasers destinés aux techniques d’impression, lasers destinés au contrôle des matériaux ou de la qualité, lasers destinés au traitement et à la transmission des données ; appareils et instruments optiques et/ou électriques, en particulier systèmes de représentation, systèmes micro-optiques, composants électroniques de commande, systèmes optiques avec composants électroniques et/ou sources de lumière intégrées ; objectifs ; lentilles optiques, bonnettes, prismes, lentilles de correction ; appareils de diffraction (microscopie) » ;

classe 10 : « Lasers à usage médical » ;

classe 11 : « Appareils et installations d’éclairage, diodes électroluminescentes ».

4
Par décision du 14 mars 2000, l’examinateur a rejeté la demande au titre de l’article 38 du règlement nº 40/94 au motif que la marque demandée était descriptive des produits concernés et dépourvue de tout caractère distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement nº 40/94.

5
Le 4 avril 2000, les requérants ont formé un recours auprès de l’OHMI, au titre de l’article 59 du règlement nº 40/94, contre la décision de l’examinateur.

6
Par décision du 31 juillet 2002 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a, d’abord, fait droit à un moyen tiré de la violation du droit des requérants d’être entendus et a, par conséquent, annulé la décision de l’examinateur, en ordonnant le remboursement de la taxe de recours aux requérants. Elle a, ensuite, rejeté la demande de marque pour les produits compris dans les classes 9 et 10, en application de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement nº 40/94, au motif que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif et qu’elle était composée exclusivement d’éléments descriptifs de l’espèce et/ou de la destination de ces produits. Enfin, en réformant la décision de l’examinateur, la chambre de recours a autorisé la publication de la demande de marque communautaire LIMO pour les produits compris dans la classe 11.

7
En ce qui concerne, en particulier, le refus d’enregistrement de la marque demandée pour les produits compris dans les classes 9 et 10, la chambre de recours a, tout d’abord, constaté que, dans le domaine de l’électronique, la suite de lettres « LIMOS » est utilisée en tant qu’abréviation de « Laser Intensity Modulation System » (système de modulation de l’intensité du laser). À cet égard, la chambre de recours s’est appuyée sur l’ouvrage intitulé « Abkürzungen in der Elektronik » (Abréviations en électronique) de Schönborn (Berlin, 1993), déjà mentionné par l’examinateur, ainsi que sur le résultat de recherches effectuées sur Internet, en se référant, à titre d’exemple, à deux pages concernant des copieurs des entreprises Toshiba et Minolta.

8
Ensuite, la chambre de recours a relevé que les produits compris dans les classes 9 et 10 étaient susceptibles d’être utilisés comme composants d’un système de modulation de l’intensité du laser, de sorte que le signe LIMOS était descriptif de l’espèce et/ou de la destination de ces produits, qui s’adressent, selon elle, à un consommateur spécialisé ou à un client professionnel parfaitement susceptible de connaître ce signe dans le domaine des lasers.

9
La chambre de recours a ajouté que la suppression de la lettre « s » à la fin du signe LIMOS ne le rendait pas moins descriptif des produits en cause, en tant que marque, puisque « LIMO » est une abréviation éloquente de la majeure partie du syntagme « Laser Intensity Modulation System », c’est‑à-dire de « Laser Intensity Modulation » (modulation de l’intensité du laser). À cet égard, la chambre de recours a considéré que le consommateur spécialisé était en mesure d’établir un lien direct et univoque entre les produits compris dans les classes 9 et 10 et le signe LIMO, qu’il percevra comme l’abréviation du syntagme « Laser Intensity Modulation ».

10
Enfin, la chambre de recours a estimé que la marque demandée était également dépourvue de caractère distinctif par rapport aux produits compris dans les classes 9 et 10. Selon elle, le consommateur concerné, qui est un client professionnel, ne verra dans le signe LIMO aucune indication de l’origine commerciale de ces produits, mais plutôt l’abréviation du syntagme « Laser Intensity Modulation ».


Conclusions des parties

11
Les requérants concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

annuler la décision attaquée en ce qu’elle refuse l’enregistrement de la marque demandée pour les produits relevant des classes 9 et 10 ;

condamner l’OHMI aux dépens.

12
L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours ;

condamner les requérants aux dépens.


En droit

13
Les requérants soutiennent que c’est à tort que la chambre de recours a rejeté la demande d’enregistrement de la marque LIMO, en application de l’article 7 du règlement nº 40/94, pour les produits compris dans les classes 9 et 10. À l’appui de leur recours, ils invoquent, en substance, deux moyens, tirés respectivement d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 et d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement.

Sur le moyen tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94

Arguments des parties

14
Les requérants contestent que la marque demandée puisse être considérée comme étant descriptive de l’espèce ou de la destination des produits en cause.

15
En premier lieu, ils font observer que les signes LIMO et LIMOS ne sont pas connus par le public pertinent comme étant des abréviations des expressions « Laser Intensity Modulation » ou « Laser Intensity Modulation System ». Par conséquent, ils affirment qu’il n’existe pas d’impératif de disponibilité à l’égard desdits signes.

16
À cet égard, les requérants relèvent que l’« Internationale Enzyklopädie der Abkürzungen und Akronyme in Wissenschaft und Technik » (Encyclopédie internationale des abréviations et des acronymes dans les sciences et la technique), remaniée par M. Peschke (Munich, 1998), ne reprend pas « LIMOS » en tant qu’abréviation du syntagme « Laser Intensity Modulation System ».

17
Par ailleurs, ils font remarquer que le signe LIMOS est généralement utilisé sur Internet en tant qu’abréviation du mot « limousines » dans le domaine des véhicules automobiles, et seulement sporadiquement dans le sens de « Laser Intensity Modulation System » en rapport avec des copieurs ou des systèmes de reproduction. En effet, selon les requérants, le fait que les recherches effectuées sur Internet par l’OHMI n’aient donné que trois références comportant l’abréviation « LIMOS » dans le sens de « Laser Intensity Modulation System » établirait que la suite de lettres « LIMOS » n’est pas une abréviation généralement connue ni utilisée par les milieux spécialisés concernés.

18
À l’appui de leur argumentation, les requérants se réfèrent à une décision de la troisième chambre de recours de l’OHMI du 31 octobre 2000, rendue dans l’affaire R 294/2000‑3, concernant l’enregistrement en tant que marque communautaire du signe DS pour des produits et services relatifs au domaine des appareils photographiques électroniques et du développement des photos. Cette décision indiquerait que, dans le cadre de l’appréciation d’un signe aux fins de son enregistrement, la valeur des définitions contenues dans des lexiques est relative, notamment lorsque le résultat de l’analyse fondée sur ces lexiques n’est pas étayé par d’autres informations ou preuves. Les requérants soulignent que, dans ladite affaire, la décision de l’examinateur, refusant l’enregistrement de la marque DS en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 40/94, se fondait sur une liste d’abréviations qui faisait ressortir que « DS » était l’abréviation des termes « Digital Signal », et que la chambre de recours avait annulé cette décision en relevant qu’il n’était pas permis de conclure, sur cette seule base, que le public pertinent confondrait l’abréviation « DS » avec l’expression « Digital Signal » et l’associerait donc à une indication descriptive. Selon les requérants, des doutes analogues sont permis dans la présente affaire, étant donné que l’abréviation « LIMOS » dans le sens de « Laser Intensity Modulation System » ne figure que dans un seul ouvrage et sur deux pages Internet.

19
En ce qui concerne le signe LIMO, les requérants font observer que son utilisation comme abréviation de « Laser Intensity Modulation » n’est pas établie par les documents et les pages Internet produits par l’OHMI à l’appui de ses appréciations, dans lesquels figurerait uniquement le signe LIMOS. L’abréviation « LIMO » pour un système de modulation de l’intensité du laser n’existerait pas actuellement et elle ne pourrait donc être soumise à un impératif de disponibilité.

20
À cet égard, les requérants précisent que sur Internet le signe LIMO est utilisé comme abréviation des mots « limousine » ou « limonade » ou encore de l’expression empruntée aux sciences économiques « least input for the most output ». En conséquence, selon les requérants, étant donné que l’abréviation « LIMO » a une signification ambiguë, le public pertinent, composé de spécialistes, confronté à cette abréviation, n’établira absolument pas de lien avec les produits visés par la demande de marque et relevant des classes 9 et 10.

21
Les requérants citent également une décision du Deutsches Bundespatentgericht (Tribunal fédéral des brevets allemand), rendue le 2 juin 1998 et concernant une demande d’enregistrement du signe verbal CT en tant que marque nationale, dans laquelle l’existence d’un impératif de disponibilité à l’égard de ce signe aurait été exclue au motif que « l’abréviation ‘CT’ comportait une multitude de significations susceptibles d’être descriptives des produits et services y afférents ».

22
En second lieu, les requérants affirment que, même si les signes LIMOS et LIMO devaient être considérés comme des abréviations respectivement de « Laser Intensity Modulation System » et de « Laser Intensity Modulation », ils ne seraient pas descriptifs des produits visés par la demande de marque communautaire, puisque lesdits produits ne sont ni des systèmes de modulation de l’intensité du laser ni, contrairement à la « Laser Intensity Modulation », des procédés ou des méthodes, mais seulement des produits individuels, dont la combinaison ne constituerait pas non plus l’un de ces systèmes.

23
L’OHMI défend le bien-fondé des appréciations formulées par la chambre de recours en ce qui concerne le caractère descriptif de la marque demandée.

Appréciation du Tribunal

24
Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, sont refusées à l’enregistrement « les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ».

25
L’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 empêche que les signes ou indications qu’il vise soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque. Cette disposition poursuit ainsi un but d’intérêt général, lequel exige que de tels signes ou indications puissent être librement utilisés par tous [arrêt de la Cour du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C-191/01 P, Rec. p. I‑12447, point 31, et arrêts du Tribunal du 20 mars 2002, DaimlerChrysler/OHMI (CARCARD), T-356/00, Rec. p. II‑1963, point 24, et du 27 novembre 2003, Quick/OHMI (Quick), T‑348/02, Rec. p. II‑5071, point 27].

26
Dans cette perspective, les signes et les indications visés par l’article 7, paragraphe 1, sous c), dudit règlement sont ceux qui peuvent servir, dans un usage normal du point de vue du public pertinent, pour désigner soit directement, soit par la mention d’une de ses caractéristiques essentielles, un produit ou un service tel que celui pour lequel l’enregistrement est demandé [arrêt de la Cour du 20 septembre 2001, Procter & Gamble/OHMI, C‑383/99 P, Rec. p. I‑6251, point 39, et arrêts du Tribunal CARCARD, précité, point 25, et du 9 octobre 2002, Dart Industries/OHMI (UltraPlus), T‑360/00, Rec. p. II-3867, point 22].

27
Partant, l’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être opérée que, d’une part, par rapport aux produits ou aux services concernés et, d’autre part, par rapport à la compréhension qu’en a un public pertinent déterminé (arrêts CARCARD, précité, point 25, et UltraPlus, précité, point 22).

28
En l’espèce, la chambre de recours a constaté que le public pertinent était constitué par des consommateurs spécialisés (point 17 de la décision attaquée). Étant donné que les produits en cause sont destinés à des professionnels et non à des consommateurs moyens, cette analyse de la chambre de recours doit être approuvée. Elle n’a d’ailleurs pas été contestée par les requérants. Le public pertinent est donc censé être un public spécialisé, bien informé, attentif et avisé [voir arrêt du Tribunal du 27 février 2002, Eurocool Logistik/OHMI (EUROCOOL), T‑34/00, Rec. p. II-683, point 47].

29
À titre liminaire, en ce qui concerne l’argument des requérants selon lequel il n’existe pas d’impératif de disponibilité à l’égard des signes LIMOS et LIMO étant donné que ceux-ci ne sont pas utilisés couramment dans le langage spécialisé pour décrire les produits concernés, il y a lieu de relever que, au point 35 de son arrêt du 4 mai 1999, Windsurfing Chiemsee (C‑108/97 et C‑109/97, Rec. p. I‑2779), la Cour a considéré que l’application de l’article 3, paragraphe 1, sous c), de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1998, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 1989, L 40, p. 1), dont le libellé est identique à celui de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 40/94, ne dépend pas de l’existence d’un impératif de disponibilité concret, actuel et sérieux.

30
Dès lors, il convient uniquement, aux fins de l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, d’examiner, sur la base de la signification pertinente du signe verbal en cause, s’il existe, du point de vue du public ciblé, un rapport suffisamment direct et concret entre le signe et les produits ou services pour lesquels l’enregistrement est demandé [arrêt du Tribunal du 27 février 2002, Streamserve/OHMI (STREAMSERVE), T‑106/00, Rec. p. II‑723, point 40, confirmé sur pourvoi par ordonnance de la Cour du 5 février 2004, Streamserve/OHMI, C‑150/02 P, Rec. p. I‑1461, et arrêt CARCARD, précité, point 28].

31
Il y a lieu de relever que la chambre de recours n’a pas allégué que le signe LIMO faisait l’objet, dans le langage spécialisé, d’une utilisation courante en tant qu’abréviation du syntagme « Laser Intensity Modulation ». À cet égard, les requérants font remarquer que le signe LIMO ne figure ni dans les ouvrages spécialisés ni sur Internet, où il figure en revanche comme abréviation des mots « limousine » ou « limonade » ou de l’expression empruntée aux sciences économiques « least input for the most output ».

32
Néanmoins, le fait que le signe LIMO n’est pas habituellement utilisé dans les milieux spécialisés en tant qu’abréviation du syntagme « Laser Intensity Modulation » n’est pas un motif suffisant pour exclure a priori le caractère descriptif de celui‑ci. En effet, il y a lieu d’observer que, pour que l’OHMI oppose un refus d’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 40/94, il n’est pas nécessaire que les signes et indications composant la marque visés à cet article soient effectivement utilisés, au moment de la demande d’enregistrement, à des fins descriptives de produits ou de services pour lesquels la demande est présentée ou des caractéristiques de ces produits ou de ces services. Il suffit, comme l’indique la lettre même de cette disposition, que ces signes et indications puissent être utilisés à de telles fins [arrêt OHMI/Wrigley, précité, point 32, et ordonnance de la Cour du 5 février 2004, Telefon & Buch/OHMI, C-326/01 P, Rec. p. I‑1371, point 28].

33
Or, en l’espèce, dans son analyse visant à établir si le signe LIMO est susceptible d’être utilisé à des fins descriptives des produits relevant des classes 9 et 10 visés dans la demande de marque communautaire ou des caractéristiques de ces produits, la chambre de recours a tout d’abord constaté que « LIMOS », étant une abréviation connue du syntagme « Laser Intensity Modulation System » dans le domaine des produits en cause, était descriptif de l’espèce et/ou de la destination de ceux-ci. Ensuite, elle a estimé que la réduction de la suite de lettres « LIMOS » en « LIMO » par suppression de la lettre « s » n’était pas de nature à faire disparaître le caractère descriptif de la marque demandée.

34
En ce qui concerne le signe LIMOS, la chambre de recours a valablement pu conclure, au point 16 de la décision attaquée, qu’il était utilisé dans le domaine de l’électronique comme abréviation du syntagme « Laser Intensity Modulation System » en se fondant sur le fait qu’il figure avec cette signification aussi bien dans un ouvrage portant sur les abréviations utilisées dans le domaine de l’électronique que sur des pages Internet.

35
En effet, le recensement d’une telle abréviation dans un ouvrage consacré aux abréviations dans le domaine de l’électronique revêt une signification particulière, laquelle ne saurait être ignorée au seul motif que l’encyclopédie citée par les requérants (voir point 16 ci-dessus) ne reprend pas à son tour « LIMOS » en tant qu’abréviation.

36
En outre, la preuve de l’utilisation effective de « LIMOS » en tant qu’abréviation de « Laser Intensity Modulation System » ne résulte pas seulement de la définition contenue dans un lexique, mais également de documents de nature commerciale. Il ressort, en effet, des pages Internet citées, à titre d’exemple, par la chambre de recours que « LIMOS » constitue l’abréviation du syntagme « Laser Intensity Modulation System », lequel désigne, dans ces pages, un système de reproduction (« copying system ») utilisé dans les copieurs couleur de modèle FC 70 par Toshiba et de modèle CF 9001 par Minolta.

37
Dans ces conditions, le grief des requérants tiré de la prétendue méconnaissance des critères d’analyse suivis par la chambre de recours dans sa décision portant sur la demande de marque DS (voir point 18 ci‑dessus) manque manifestement en fait. Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que, en l’espèce, le public pertinent est un public spécialisé, contrairement à ce qui était le cas dans l’affaire ayant donné lieu à cette décision, dans laquelle la chambre de recours s’était précisément fondée sur le fait que le public pertinent était constitué par des consommateurs moyens, et non par des professionnels, pour conclure que l’examinateur ne pouvait pas déduire uniquement sur la base d’une mention figurant dans un dictionnaire d’acronymes et d’abréviations que les lettres « DS » pouvaient être perçues par un tel public comme signifiant « Digital Signal ». Dès lors, les requérants ne sauraient aucunement s’appuyer sur ladite décision afin d’étayer leur argumentation.

38
S’agissant du caractère descriptif du signe LIMOS, il y a lieu de constater, comme l’a fait la chambre de recours au point 17 de la décision attaquée, que les requérants, à la page 3 de leur mémoire du 7 juin 2000 exposant les motifs de leur recours auprès de l’OHMI, ont reconnu que « les produits désignés dans la demande […] sont des produits qui, en tout état de cause, peuvent être des composants de ‘Laser Intensity Modulation Systems’ », même s’ils ont ajouté qu’« [a]ucun de ces produits ne peut cependant être désigné directement comme étant un tel système ». C’est en prenant acte de cette reconnaissance, par ailleurs réitérée par les requérants devant le Tribunal lors de l’audience du 27 avril 2004, que la chambre de recours a affirmé que le signe LIMOS était descriptif « de l’espèce et/ou de la destination » desdits produits.

39
À cet égard, le Tribunal relève que ni la chambre de recours dans sa décision ni l’OHMI lors de la présente procédure contentieuse n’ont montré en quoi le signe LIMOS serait descriptif de l’espèce des produits revendiqués dans les classes 9 et 10.

40
Cependant, il est constant que ces produits peuvent être utilisés en tant que composants d’un système de modulation de l’intensité du laser. Or, les requérants n’ont formulé aucun argument sérieux tendant à infirmer la conclusion de la chambre de recours selon laquelle, au vu de cette caractéristique desdits produits, le signe LIMOS, en tant qu’abréviation du syntagme « Laser Intensity Modulation System », est descriptif, à tout le moins, de la destination de ceux-ci. En effet, ils se sont limités à faire remarquer, en substance, que l’on ne pourrait obtenir un « Laser Intensity Modulation System » par la seule combinaison de deux ou plus des produits en cause. Or, une telle précision, qui n’exclut pas que ces derniers, pris individuellement, puissent être utilisés pour composer un tel système en combinaison avec d’autres produits non revendiqués dans la demande de marque communautaire, est dépourvue de pertinence.

41
Étant donné que tous les produits revendiqués dans les classes 9 et 10 s’adressent à un consommateur spécialisé susceptible de connaître le signe LIMOS en tant qu’abréviation de « Laser Intensity Modulation System » dans le domaine de ces mêmes produits, pouvant être intégrés dans un tel système, il y a lieu de considérer, en l’absence d’éléments apportés par les requérants en sens contraire, que ce signe est descriptif de l’une des possibles destinations des produits en cause qui est susceptible d’entrer en ligne de compte lors du choix opéré par le public pertinent et qui, dès lors, en constitue une caractéristique essentielle [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 26 novembre 2003, HERON Robotunits/OHMI (ROBOTUNITS), T‑222/02, Rec. p. II‑4995, point 44].

42
Si, partant, le signe LIMOS présente, du point de vue du public pertinent, un rapport suffisamment direct et concret avec les produits des classes 9 et 10 pour lesquels l’enregistrement a été demandé, il reste encore à vérifier si la même conclusion s’impose en ce qui concerne le signe LIMO, qui est le signe faisant l’objet de la demande de marque communautaire.

43
À cet égard, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que la suppression de la lettre « s » à la fin du signe LIMOS ne rend pas moins descriptif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 40/94 et par rapport aux produits en cause, le signe qui en résulte.

44
En effet, la circonstance établie de l’utilisation de « LIMOS » en tant qu’abréviation du syntagme « Laser Intensity Modulation System » indique déjà que le signe LIMO est susceptible d’être utilisé, et perçu par le public pertinent, comme une abréviation du syntagme « Laser Intensity Modulation ». Le fait que le signe LIMO est susceptible de décrire le phénomène de la modulation de l’intensité du laser plutôt qu’un système qui réalise ce phénomène n’est pas suffisant pour écarter le caractère descriptif de ce même signe par rapport aux produits en cause. Si ces derniers peuvent être des composants d’un système qui réalise une modulation de l’intensité du laser, un signe désignant cette modulation reste toujours descriptif d’une destination possible de ces produits.

45
Ainsi, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que le consommateur spécialisé sera en mesure d’établir un lien suffisamment direct et concret entre les produits compris dans les classes 9 et 10 visés dans la demande de marque communautaire et le signe LIMO, et qu’il percevra ce signe comme l’abréviation de « Laser Intensity Modulation » et comme se référant, à tout le moins, à l’une des destinations possibles desdits produits, à savoir leur intégration dans un système de modulation de l’intensité du laser.

46
Enfin, doit également être écarté l’argument des requérants selon lequel – compte tenu de la signification prétendument ambiguë du signe LIMO, lequel serait utilisé comme abréviation des mots « limousine » et « limonade » ou encore de l’expression « least input for the most output », ou perceptible en tant que raison sociale d’une entreprise donnée – le public pertinent, confronté à ce signe, ne pensera pas aux produits revendiqués dans les classes 9 et 10.

47
À cet égard, il suffit de rappeler qu’un signe verbal doit se voir opposer un refus d’enregistrement, en application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou services concernés (arrêt OHMI/Wrigley, précité, point 32 ; ordonnance Telefon & Buch/OHMI, précitée, points 28 et 37 ; arrêts STREAMSERVE, précité, point 42, et CARCARD, précité, point 30). Or, il ressort des considérations qui précèdent que l’une des significations potentielles du signe LIMO est « Laser Intensity Modulation » et que le public pertinent est parfaitement en mesure de comprendre ce signe en cette signification.

48
Il s’ensuit que le moyen tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 doit être rejeté.

49
Dans ces conditions, il n’y a pas lieu d’examiner le moyen tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. En effet, selon une jurisprudence bien établie, il suffit qu’un des motifs absolus de refus s’applique pour qu’un signe ne puisse être enregistré comme marque communautaire [arrêt de la Cour du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C-104/00 P, Rec. p. I‑7561, point 29 ; arrêts du Tribunal du 26 octobre 2000, Community Concepts/OHMI (Investorworld), T‑360/99, Rec. p. II‑3545, point 26 ; du 31 janvier 2001, Mitsubishi HiTec Paper Bielefeld/OHMI (Giroform), T‑331/99, Rec. p. II‑433, point 30, et du 20 novembre 2002, Bosch/OHMI (Kit Pro et Kit Super Pro), T‑79/01 et T‑86/01, Rec. p. II‑4881, point 36].

50
Par conséquent, il convient de rejeter le recours.


Sur les dépens

51
Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Les requérants ayant succombé, il y a lieu de les condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.


Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)
Le recours est rejeté.

2)
Les requérants sont condamnés aux dépens.

Vesterdorf

Mengozzi

Martins Ribeiro

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 20 juillet 2004.

Le greffier

Le président

H. Jung

B. Vesterdorf


1
Langue de procédure : l'allemand.