Language of document : ECLI:EU:T:2007:274

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

12 septembre 2007 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire verbale BASICS – Motifs absolus de refus – Absence de caractère distinctif – Marque descriptive – Article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement (CE) n° 40/94 – Caractère distinctif acquis par l’usage – Article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94 »

Dans l’affaire T‑164/06,

ColArt/Americas, Inc., établie à Piscataway, New Jersey (États‑Unis), représentée par Mes E. Soler Borda et R. Zeineh, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 7 avril 2006 (affaire R 788/2005‑4), refusant l’enregistrement de la marque verbale BASICS comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

composé de M. H. Legal, président, Mme I. Wiszniewska-Białecka et M. E. Moavero Milanesi, juges,

greffier : Mme C. Kristensen, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 21 juin 2006,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 18 septembre 2006,

à la suite de l’audience du 2 mai 2007,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 31 octobre 2001, ColArt/Americas, Inc. a présenté à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) une demande d’enregistrement de la marque verbale BASICS, en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié.

2        Les produits pour lesquels l’enregistrement de la marque a été demandé relèvent de la classe 2 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Peintures à l’aquarelle, vernis autres que les vernis isolants, laques de revêtement, revêtements émaillés pour peinture, colorants pour peintures acryliques, apprêts acryliques, peintures à l’huile, aquarelles, vernis artistiques, couleurs à l’huile pastel, colorants liquides en feuilles, colorants alkydes artistiques, moyens artistiques, à savoir diluants et solvants pour peintures, encres et teintures utilisées par les artistes ou dans l’artisanat ».

3        Par décision du 12 mai 2005, l’examinateur a rejeté la demande d’enregistrement au titre de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 40/94, au motif que la marque BASICS n’était pas susceptible de distinguer les produits en cause, étant donné que sa signification pouvait servir, dans le commerce, à désigner des produits basiques, à savoir les produits fondamentaux, les plus importants ou les plus communément utilisés par les artistes ou les décorateurs.

4        Le 5 juillet 2005, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI contre cette décision, en soutenant que la marque, dont l’enregistrement avait été demandé, ayant un sens complexe et, en dernière analyse, vague et étant dotée d’un minimum de fantaisie, n’était pas descriptive mais avait un caractère distinctif. De plus, en invoquant l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, la requérante a soutenu que cette marque avait acquis un caractère distinctif en raison de son usage.

5        Par décision du 7 avril 2006 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. La chambre de recours a relevé que, le mot « basics » étant un mot anglais, le public pertinent était principalement composé de personnes, établies dans la Communauté, de langue maternelle anglaise ou maîtrisant suffisamment l’anglais. Pour ce public, le mot « basics » désignerait des produits basiques, c’est-à-dire les produits les plus importants, les produits élémentaires ou les plus communément utilisés par les artistes. Dès lors, la marque BASICS devrait être considérée comme descriptive, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 et, de ce fait, comme dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement. S’agissant du caractère distinctif que la marque BASICS aurait acquis conformément à l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, la chambre de recours a constaté que la requérante n’en avait pas prouvé son usage avant la date du dépôt de la demande d’enregistrement dans les zones de la Communauté où ladite marque avait été considérée comme dénuée de caractère distinctif.

 Conclusions des parties

6        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la totalité de la décision attaquée ;

–        subsidiairement, annuler la décision attaquée dans la mesure où elle concerne les matières colorantes se présentant sous la forme de peinture acrylique et les vernis pour artistes.

7        L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter comme irrecevables les documents joints à la requête en annexes 10, 11 et 12 ;

–        rejeter le recours comme non fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

8        Au cours de l’audience, l’OHMI a déclaré renoncer à présenter à titre de conclusion la demande tendant à ce que les annexes 10, 11 et 12 de la requête soient rejetées comme irrecevables, ce dont le Tribunal a pris acte.

 En droit

9        À l’appui de son recours, la requérante invoque trois moyens tirés de la violation, respectivement, de l’article 7, paragraphe 1, sous c), de l’article 7, paragraphe 1, sous b), et de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94

 Arguments des parties

10      En premier lieu, la requérante souligne que, selon la jurisprudence, pour qu’un signe soit considéré comme descriptif, il doit présenter, avec les produits et les services désignés un rapport suffisamment direct et concret qui permette au public ciblé de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description de la catégorie de produits et de services en cause ou d’une de leurs caractéristiques. Or, la requérante considère que le mot « basics » n’est pas utilisé en anglais pour décrire les produits concernés en l’espèce, mais constitue un mot au sens complexe et vague, pouvant avoir de multiples significations et étant dépourvu de tout lien direct et suffisamment précis avec ces produits. La chambre de recours n’aurait pas examiné le rapport existant entre le mot « basics » et les produits concernés, car, même en admettant que le mot « basics » puisse suggérer l’idée d’une facilité d’accès ou d’une facilité d’utilisation, ce mot n’évoquerait ni objectivement ni spécifiquement les caractéristiques des produits désignés par la marque dont l’enregistrement est demandé.

11      En deuxième lieu, la chambre de recours n’aurait pas démontré que le mot « basics » est utilisé ou susceptible d’être utilisé à l’avenir pour décrire les produits concernés sur le marché du matériel de peinture pour les beaux-arts.

12      En troisième lieu, la requérante soutient que la solution retenue par la chambre de recours dans la décision attaquée est contradictoire avec la pratique décisionnelle antérieure de l’OHMI. En effet, pour faire droit à la demande d’enregistrement de la marque communautaire BASICA, l’OHMI aurait considéré, d’une part, que le mot « basica » ne possédait aucun sens descriptif pour le public espagnol en ce qui concerne les produits cosmétiques, pharmaceutiques et diététiques désignés par cette marque, car, compte tenu du sens complexe et, en dernière analyse, vague de ce mot, il n’était pas de nature à véhiculer un sens clair susceptible d’être compris directement, sans ambiguïté et immédiatement par le consommateur espagnol. L’OHMI aurait estimé, d’autre part, que cette marque avait le degré minimal de fantaisie requis pour la rendre susceptible d’indiquer l’origine des produits. De même, les marques FORMULA BASIC et BASIC PRICE comportant des termes descriptifs tels que « formula » et « price » auraient été enregistrées comme marques communautaires, ce qui démontrerait que le mot « basic » n’est pas descriptif.

13      En quatrième lieu, la requérante souligne que la marque BASICS a été enregistrée par l’OHMI pour des produits relevant des classes 29, 30 et 31 et qu’elle a été enregistrée hors de la Communauté, notamment dans des pays majoritairement anglophones, tels que les États-Unis et le Canada. Par ailleurs, d’autres marques contenant le mot « basic » ou le mot « base » auraient été enregistrées comme marques nationales au sein de la Communauté. Ces éléments indiqueraient que le signe BASICS pourrait être enregistré comme marque communautaire.

14      L’OHMI souligne, tout d’abord, que le public visé est composé de consommateurs moyens normalement informés et raisonnablement attentifs, les produits en cause étant fréquemment remplacés et leur prix étant relativement bas. Le mot « basics » étant un mot anglais, ce public serait principalement composé des personnes de langue maternelle anglaise dans la Communauté et, dans une moindre mesure, des personnes de la Communauté qui maîtrisent suffisamment l’anglais.

15      L’OHMI relève, ensuite, que la marque dont l’enregistrement est demandé doit être considérée comme descriptive s’il existe un rapport suffisamment concret et direct entre elle et une des caractéristiques des produits concernés, c’est-à-dire si ce lien est probable et non pas purement accidentel ou spéculatif pour les consommateurs concernés et s’il peut être identifié par ceux-ci immédiatement et sans autre réflexion.

16      Au moins une des significations possibles du signe BASICS décrirait sans ambiguïté et immédiatement une qualité des produits que le public visé est susceptible de prendre en considération lors de sa décision d’achat, à savoir celle d’élémentaires et de particulièrement adaptés pour les amateurs. Cela serait corroboré par les copies d’emballages fournies par la requérante en annexe 13 à la requête, qui contiennent les indications « Pour l’artiste débutant − For the beginning artist » ou « Qualité étude ». Par ailleurs, il aurait été reconnu par la requérante que l’utilisation du mot « basics » a pour but de donner l’impression agréable que les produits concernés sont essentiels et d’un emploi facile. Le fait que le mot « basics » ne soit pas une expression couramment utilisée en anglais pour désigner les produits concernés serait sans conséquence, le caractère descriptif d’un signe devant être apprécié au regard de sa capacité abstraite à décrire les produits concernés.

17      L’OHMI affirme, enfin, qu’il n’est lié ni par des enregistrements de marques communautaires ayant prétendument des similitudes avec la marque BASICS, les signes et les produits visés par ces enregistrements étant différents, ni par aucun enregistrement national, particulièrement s’il est effectué hors de la Communauté. Par ailleurs, la perception du signe par les consommateurs non anglophones, dans des États membres comme l’Espagne ou la France, où ils sont majoritaires, serait dénuée de pertinence en l’occurrence.

 Appréciation du Tribunal

18      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci. En outre, le paragraphe 2 du même article énonce que le paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de la Communauté.

19      Ainsi, des signes et des indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner des caractéristiques du produit ou du service pour lequel l’enregistrement de la marque en cause est demandé sont, en vertu du règlement n° 40/94, réputés inaptes, de par leur nature même, à remplir la fonction d’origine de la marque [arrêts de la Cour du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, Rec. p. I‑12447, point 30, et du Tribunal du 19 janvier 2005, Proteome/OHMI (BIOKNOWLEDGE), T‑387/03, Rec. p. II‑191, point 23].

20      Il en résulte que, pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, il faut qu’il présente avec les produits ou les services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description d’une des caractéristiques des produits et des services en cause [arrêt du Tribunal du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, Rec. p. II‑2383, point 25].

21      Selon la jurisprudence, il est indifférent que les caractéristiques des produits ou des services susceptibles d’être décrites soient essentielles sur le plan commercial ou accessoires. En effet, le libellé de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 ne fait pas de distinction selon les caractéristiques que les signes ou indications composant la marque peuvent désigner et comprend non seulement les caractéristiques énumérées mais toute autre caractéristique des produits et des services désignés par la marque. De fait, à la lumière de l’intérêt général qui sous-tend ladite disposition, toute entreprise doit pouvoir utiliser librement de tels signes ou indications pour décrire n’importe quelle caractéristique de ses propres produits, quelle que soit son importance sur le plan commercial [voir, à propos de l’article 3, paragraphe 1, sous c), de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 1989, L 40, p. 1), dont le contenu normatif est, en substance, identique à celui de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, arrêt de la Cour du 12 février 2004, Koninklijke KPN Nederland, C‑363/99, Rec. p. I‑1619, point 102].

22      En l’espèce, les produits pour lesquels l’enregistrement de la marque BASICS est demandé sont des peintures, des vernis, des laques, des colorants, des diluants ainsi que d’autres articles similaires. Compte tenu de leur usage relativement courant et de leur prix relativement bas, ces produits peuvent être considérés comme étant destinés à la consommation générale et, dès lors, le public pertinent est censé être le grand public, comme l’a constaté la chambre de recours. De même, cette dernière a, à juste titre, considéré que, le signe verbal en cause étant un mot anglais, le public pertinent par rapport auquel il faut apprécier si ce signe présente un caractère descriptif est le public anglophone.

23      Ainsi que la chambre de recours l’a constaté et que la requérante l’a reconnu, le mot « basics » désigne en anglais des éléments essentiels, fondamentaux, élémentaires, constituant une base. À la lecture de ce mot courant en anglais, le public ciblé peut donc immédiatement, et sans autre réflexion, percevoir la description d’une des caractéristiques des produits concernés, à savoir le fait que ce sont des produits de base pour les beaux-arts et la décoration. Il a même été reconnu par la requérante (point 13 de la requête) que le mot « basics » est destiné à donner aux clients potentiels l’impression que les produits concernés sont des produits de base d’utilisation facile. De plus, il ressort des annexes 13 et 14 de la requête que la requérante met en valeur cette caractéristique pour la commercialisation des produits concernés, en les présentant comme étant destinés aux artistes débutants et aux étudiants.

24      Au vu de ces éléments, le public ciblé peut percevoir le mot « basics » comme indiquant que les produits commercialisés sous le signe BASICS sont les plus utiles et les plus importants des produits fondamentaux et élémentaires pour un artiste, ce qui évoque nécessairement une des caractéristiques des produits concernés. Cette considération vaut, avant tout, au Royaume-Uni et en Irlande, étant donné que l’anglais est la langue majoritaire dans ces deux États membres et que, de ce fait, la plupart des consommateurs peuvent y être considérés comme faisant partie du public ciblé.

25      Il résulte de ce qui précède que la chambre de recours a constaté, à juste titre, que la marque BASICS décrit, d’une manière directe, une des caractéristiques des produits concernés. Dès lors, et compte tenu des termes de l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 40/94, dont il découle qu’une marque doit être refusée à l’enregistrement même si elle n’est dépourvue de caractère distinctif que dans une partie de la Communauté, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur de droit en concluant que la demande d’enregistrement de la marque en cause devait être rejetée en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du même règlement.

26      Ces considérations ne sauraient être remises en cause par les arguments développés par la requérante.

27      Sont, tout d’abord, sans pertinence les arguments tirés du fait que le mot « basics » n’a pas été effectivement utilisé par d’autres opérateurs économiques pour désigner du matériel de peinture et ceux tirés de la prétendue absence de lien direct et suffisamment précis entre ce mot et de tels produits. Selon la jurisprudence, pour que l’OHMI oppose un refus d’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, il n’est pas nécessaire que les signes et indications composant la marque visés à cet article soient effectivement utilisés, au moment de la demande d’enregistrement, à des fins descriptives de produits ou de services tels que ceux pour lesquels la demande est présentée ou des caractéristiques de ces produits ou de ces services. Il suffit, comme l’indique le libellé même de cette disposition, que ces signes et indications puissent être utilisés à de telles fins. Un signe verbal doit ainsi être refusé à l’enregistrement, en application de ladite disposition, si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou des services concernés [arrêt OHMI/Wrigley, point 19 supra, point 32, et arrêt du Tribunal du 16 mars 2006, Telefon & Buch/OHMI – Herold Business Data (WEISSE SEITEN), T‑322/03, Rec. p. II‑835, point 92].

28      Ensuite, l’argument de la requérante tiré de ce que l’OHMI a enregistré par le passé des marques comprenant des mots analogues à celui composant la marque BASICS ne saurait être retenu. D’une part, les marques citées par la requérante se distinguent de la marque dont l’enregistrement est demandé en ce qu’elles désignent d’autres produits et services que ceux qui sont concernés en l’espèce. D’autre part, les décisions concernant l’enregistrement d’un signe en tant que marque communautaire que les chambres de recours sont amenées à prendre en vertu du règlement n° 40/94 relèvent d’une compétence liée et non pas d’un pouvoir discrétionnaire. Dès lors, le caractère enregistrable d’un signe en tant que marque communautaire ne doit être apprécié que sur la base de la réglementation communautaire pertinente telle qu’interprétée par le juge communautaire et non pas sur la base d’une prétendue pratique décisionnelle antérieure divergente des chambres de recours [arrêts du Tribunal PAPERLAB, point 20 supra, point 39, et du 30 novembre 2006, Camper/OHMI – JC (BROTHERS by CAMPER), T‑43/05, non publié au Recueil, point 93].

29      Enfin, les arguments de la requérante tirés de l’existence de décisions nationales d’enregistrement de la marque BASICS pour des produits identiques ou similaires ne sauraient être retenus. Le régime communautaire des marques est un système autonome, constitué d’un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont spécifiques, son application étant indépendante de tout système national [arrêts du Tribunal du 5 décembre 2000, Messe München/OHMI (electronica), T‑32/00, Rec. p. II‑3829, point 47, et du 31 mai 2006, De Waele/OHMI (Forme d’une saucisse), T‑15/05, Rec. p. II‑1511, point 44]. L’OHMI et, le cas échéant, le juge communautaire ne sont pas liés par une décision intervenue au niveau d’un État membre ou d’un pays tiers admettant le caractère enregistrable de ce même signe en tant que marque nationale. Tel est le cas même si une telle décision a été prise dans un pays appartenant à la zone linguistique dont le signe verbal en cause est originaire [arrêts du Tribunal du 27 février 2002, Streamserve/OHMI (STREAMSERVE), T‑106/00, Rec. p. II‑723, point 47, et PAPERLAB, point 20 supra, point 37].

30      Il résulte de ce qui précède que le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, doit être rejeté comme non fondé.

31      En outre, il ressort de l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 40/94 qu’il suffit qu’un des motifs absolus de refus qui y sont énumérés s’applique pour que le signe ne puisse être enregistré comme marque communautaire [arrêts du Tribunal du 12 janvier 2000, DKV/OHMI (COMPANYLINE), T‑19/99, Rec. p. II‑1, point 30, et du 8 septembre 2005, CeWe Color/OHMI (DigiFilm et DigiFilmMaker), T‑178/03 et T‑179/03, Rec. p. II‑3105, point 42].

32      Eu égard aux considérations qui précèdent, et dès lors que c’est à bon droit que la chambre de recours a refusé l’enregistrement de la marque BASICS en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, il n’y a pas lieu d’examiner le deuxième moyen invoqué par la requérante, tiré de la violation du paragraphe 1, sous b), du même article.

33      Cependant, aux termes de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, le paragraphe 1, sous b) à d), du même article n’est pas applicable si la marque a acquis, pour les produits ou services pour lesquels l’enregistrement est demandé, un caractère distinctif après l’usage qui en a été fait. Dès lors, il y a lieu d’examiner le troisième moyen invoqué par la requérante.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94

 Arguments des parties

34      La requérante soutient que la marque dont l’enregistrement est demandé a acquis un caractère distinctif par l’usage au sens de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, au moins en ce qui concerne les matières colorantes se présentant sous la forme de peinture acrylique et les vernis pour artistes.

35      Premièrement, la déclaration sous serment du directeur général du distributeur en Europe des produits désignés par la marque BASICS, produite par la requérante devant la chambre de recours et indiquant les chiffres d’affaires et les volumes unitaires de vente de peintures acryliques entre 1993 et 2004, établirait que cette marque a été utilisée en Europe avant le dépôt de la demande d’enregistrement. En particulier, cette déclaration attesterait de la croissance des ventes au Royaume-Uni entre 2000 et 2001 ainsi que dans d’autres pays non anglophones, dans lesquels le public ayant une connaissance suffisante de l’anglais devrait être également pris en compte, d’autant plus que le mot « basics » est proche de ses traductions dans d’autres langues européennes, telles que le français, l’espagnol ou le néerlandais.

36      Deuxièmement, la requérante affirme qu’elle est le leader mondial dans le domaine des produits destinés à l’artisanat, aux beaux-arts et aux artistes et qu’elle détient un tiers du marché mondial des peintures pour artistes, ses produits étant distribués dans plus de 120 pays. Plus particulièrement, la gamme de produits « basics » détiendrait la première place sur le marché mondial des peintures acryliques pour les beaux-arts, un marché où la marque BASICS ferait l’objet d’une promotion à travers des programmes de communication et d’éducation ainsi que des publications techniques et spécialisées.

37      Troisièmement, l’importance majeure du signe BASICS dans l’identification des produits concernés, en ce qu’il représente l’élément le plus visible figurant sur les tubes de peinture, attirerait l’attention du consommateur et constituerait, dès lors, une utilisation évidente de la marque dont l’enregistrement est demandé.

38      Quatrièmement, le fait qu’aucun autre usage du mot « basics » par des concurrents dans le domaine des beaux-arts n’ait été signalé jusqu’à présent établirait que la marque dont l’enregistrement est demandé est apte à identifier les produits vendus par la requérante.

39      L’OHMI conteste, à titre liminaire, la recevabilité des documents joints à la requête en annexes 10, 11 et 12, lesquels n’auraient pas été présentés devant la chambre de recours et devraient dès lors être écartés, en vertu de l’article 135, paragraphe 4, du règlement de procédure du Tribunal.

40      L’OHMI relève en outre que, pour établir le caractère distinctif acquis par l’usage d’une marque, il est nécessaire de démontrer qu’au moins une fraction significative du public ciblé dans les États membres concernés identifie, grâce à cette marque, les produits en cause comme provenant d’une entreprise déterminée. Il y aurait donc lieu d’examiner la perception qu’a de la marque dont l’enregistrement est demandé le public anglophone de la Communauté, notamment au Royaume-Uni et en Irlande où l’anglais est la langue officielle, la perception qu’en ont les consommateurs anglophones établis dans d’autres États membres n’ayant qu’un rôle secondaire et de simple confirmation.

41      À cet égard, l’OHMI souligne, premièrement, que le caractère distinctif acquis par l’usage de la marque doit être démontré par des documents établissant cet usage avant le dépôt de la demande, plutôt qu’avant la date d’enregistrement. Dès lors, les copies d’emballage et les extraits du site Internet Liquitex présentés par la requérante n’étant pas datés ou portant une date postérieure à la date du dépôt de la demande d’enregistrement, ceux-ci n’auraient pas pu être pris en considération par la chambre de recours. En tout état de cause, ces documents, qui n’auraient pas été dûment confirmés par d’autres éléments, n’auraient qu’une faible valeur probante, car ils ne contiendraient aucune indication relative à l’importance de la distribution des produits en cause auprès du grand public.

42      Deuxièmement, il ressortirait de la déclaration sous serment présentée par la requérante que les ventes des produits désignés par la marque dont l’enregistrement est demandé, effectuées dans les pays anglophones de la Communauté avant la date du dépôt de la demande d’enregistrement, étaient minimes.

43      Troisièmement, la requérante n’aurait pas apporté de preuves de la part de marché détenue par la marque dont l’enregistrement est demandé ni des montants investis pour sa promotion, éléments qui seraient pertinents pour apprécier le caractère distinctif d’une marque acquis par l’usage.

 Appréciation du Tribunal

44      En ce qui concerne les documents joints en annexes 10, 11 et 12 à la requête, qui n’ont pas été présentés au cours de la procédure administrative, il convient de relever que le recours devant le Tribunal a pour objet le contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’OHMI au sens de l’article 63 du règlement n° 40/94. En effet, la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des preuves présentées pour la première fois devant lui [arrêts du Tribunal du 6 mars 2003, DaimlerChrysler/OHMI (Calandre), T‑128/01, Rec. p. II‑701, point 18, et du 15 septembre 2005, Citicorp/OHMI (LIVE RICHLY), T‑320/03, Rec. p. II‑3411, point 14]. Dès lors, ces documents doivent être écartés sans qu’il soit nécessaire d’examiner leur valeur probante.

45      S’agissant du caractère distinctif acquis par l’usage de la marque en vertu de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, il y a lieu de rappeler la jurisprudence selon laquelle l’acquisition d’un tel caractère distinctif exige qu’au moins une fraction significative du public pertinent identifie, grâce à la marque, les produits ou les services concernés comme provenant d’une entreprise déterminée [arrêt du Tribunal du 29 avril 2004, Eurocermex/OHMI (Forme d’une bouteille de bière), T‑399/02, Rec. p. II‑1391, point 42].

46      À cet égard, il doit être démontré que le caractère distinctif de la marque a été acquis par son usage antérieur à la date du dépôt de la demande d’enregistrement [arrêts du Tribunal du 12 décembre 2002, eCopy/OHMI (ECOPY), T‑247/01, Rec. p. II‑5301, point 36, et du 15 décembre 2005, BIC/OHMI (Forme d’un briquet à pierre), T‑262/04, Rec. p. II‑5959, point 66]. Cet usage doit, en outre, être démontré dans la partie substantielle de la Communauté où elle était dépourvue de caractère distinctif au regard de l’article 7, paragraphe 1, sous b) à d), de ce même règlement [arrêts du Tribunal du 30 mars 2000, Ford Motor/OHMI (OPTIONS), T‑91/99, Rec. p. II‑1925, point 27, et du 15 décembre 2005, BIC/OHMI (Forme d’un briquet à pierre), T‑262/04, Rec. p. II‑5959, point 62]. Par ailleurs, les circonstances permettant de regarder comme satisfaite la condition de l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage ne sauraient être établies seulement sur la base de données générales et abstraites [voir arrêt Forme d’une bouteille de bière, point 45 supra, point 42, et la jurisprudence citée].

47      Ainsi, il convient de prendre en considération, notamment, la part de marché détenue par la marque, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de l’usage de cette marque, l’importance des investissements réalisés par l’entreprise pour la promouvoir, la proportion des milieux intéressés qui identifie le produit comme provenant d’une entreprise déterminée grâce à la marque, les déclarations de chambres de commerce et d’industrie ou d’autres associations professionnelles ainsi que les sondages d’opinion (voir arrêt Forme d’une bouteille de bière, point 45 supra, point 44, et la jurisprudence citée).

48      En l’espèce, il incombait à la requérante de prouver, devant la chambre de recours, l’usage de la marque BASICS avant la date du dépôt de la demande d’enregistrement, intervenue le 31 octobre 2001, dans les parties de la Communauté où la marque a été considérée comme descriptive, à savoir le Royaume-Uni et l’Irlande.

49      À cette fin, la requérante a produit devant la chambre de recours, d’une part, des documents sur lesquels figuraient des tubes de peinture acrylique portant la marque BASICS, d’autre part, des extraits d’un site Internet lui appartenant et contenant du matériel de promotion, ainsi que, enfin, une déclaration sous serment du directeur général du distributeur en Europe des produits désignés par la marque BASICS concernant les ventes de peinture acrylique entre 1993 et 2004. La requérante a également allégué que la gamme de produits « basics » était leader sur le marché mondial des peintures acryliques pour les beaux-arts grâce aux efforts qu’elle avait réalisés en matière d’innovation.

50      Aucun des documents sur lesquels figurent des tubes de peinture acrylique portant la marque BASICS et aucun des extraits du site Internet contenant le matériel de promotion ne fait une quelconque référence aux dates et aux lieux où ces produits ont été commercialisés et où ce matériel a été utilisé. Ainsi, c’est à juste titre que la chambre de recours a constaté que ces documents n’étaient pas aptes à démontrer que le public ciblé percevait la marque dont l’enregistrement est demandé comme une indication de l’origine commerciale de ces produits.

51      La déclaration sous serment précitée démontre, par ailleurs, qu’il n’y a pas eu en Irlande avant l’année 2002 de ventes de produits portant la marque dont l’enregistrement est demandé. En ce qui concerne le Royaume-Uni, il n’y a pas eu de commercialisation avant l’année 2000, au cours de laquelle 75 unités ont été vendues, sur un total de 443 329 unités vendues dans l’Union européenne, tandis que les ventes en 2001 ont été de 1 008 unités, sur un total de 513 003 unités vendues dans l’Union européenne. Au regard de ces données, la chambre de recours a légitimement pu considérer que, avant le 31 octobre 2001, l’usage de la marque BASICS au Royaume-Uni et en Irlande, avait été minime.

52      S’agissant des affirmations de la requérante relatives à la part de marché détenue par la marque BASICS et à l’importance de sa promotion, elles n’ont pas été prouvées, comme il a été relevé par la chambre de recours.

53      En l’absence de données complémentaires ou de preuves additionnelles, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur de droit en concluant que la requérante n’avait pas établi que la marque dont l’enregistrement est demandé avait acquis avant le dépôt de la demande d’enregistrement un caractère distinctif par son usage dans la Communauté pour les produits concernés, y compris les peintures acryliques et les vernis pour artistes.

54      Il découle de ce qui précède que le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, doit être rejeté comme non fondé.

55      Il s’ensuit que le recours doit être rejeté dans son ensemble.

 Sur les dépens

56      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      ColArt/Americas, Inc. est condamnée aux dépens.

Legal

Wiszniewska-Białecka

Moavero Milanesi

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 septembre 2007.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       H. Legal


* Langue de procédure : l’anglais.