Language of document : ECLI:EU:T:2010:480

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

24 novembre 2010 (*)

« Clause compromissoire – Contrat conclu dans le cadre d’un programme spécifique de recherche, de développement technologique, y compris de démonstration, dans le domaine de l’énergie non nucléaire (1994-1998) – Inexécution du contrat – Remboursement des sommes avancées – Intérêts de retard – Procédure par défaut »

Dans l’affaire T‑323/09,

Commission européenne, représentée par Mmes A.-M. Rouchaud-Joët et F. Mirza, en qualité d’agents, assistés de Mmes U. O’Dwyer et A. Martin, solicitors,

partie requérante,

contre

Irish Electricity Generating Co. Ltd, établie à Waterford (Irlande),

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours fondé sur une clause compromissoire visant à obtenir la condamnation de Irish Electricity Generating Co. Ltd à rembourser la somme de 180 664,70 euros correspondant à une partie des avances que la Commission lui a versées dans le cadre du contrat WE/178/97/IE/GB, majorée des intérêts de retard,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé, lors du délibéré, de Mme M. E. Martins Ribeiro, président, MM. N. Wahl et A. Dittrich (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la procédure écrite,

rend le présent

Arrêt

 Cadre contractuel

1        Le 2 mars 1998, la Communauté européenne, représentée par la Commission des Communautés européennes, a conclu, avec Irish Electricity Generating Co. Ltd (ci-après le « coordonnateur »), représentée par son directeur, et avec Zond International Ltd, représentée également par son directeur (ci-après, prises ensemble, les « contractants »), le contrat WE/178/97/IE/GB portant sur la conception et la construction de deux turbines éoliennes de 750 kW sur des tours en béton armé coulé sur place (ci-après le « contrat »).

2        Le contrat s’inscrivait dans le cadre de la décision 94/806/CE du Conseil, du 23 novembre 1994, arrêtant un programme spécifique de recherche, de développement technologique, y compris de démonstration, dans le domaine de l’énergie non nucléaire (1994-1998) (JO L 334, p. 87).

3        L’article 5 de la décision 94/806 imposait à la Commission d’établir un programme de travail conformément aux objectifs définis à son annexe I et de lancer des appels de propositions pour les actions à réaliser sur la base du programme de travail. Le point 2.4 de l’annexe I de ladite décision portait sur des activités dans le domaine de l’énergie éolienne.

4        Le contrat était, en vertu de son article 10, régi par le droit irlandais. L’annexe I du contrat décrivait le programme de travail, alors que l’annexe II du contrat énonçait les conditions générales. Le programme de travail et les conditions générales faisaient partie intégrante de ce contrat, conformément à l’article 11 de celui-ci.

5        Selon l’article 1.1 du contrat, les contractants étaient tenus d’exécuter conjointement et solidairement les travaux énoncés dans le programme de travail portant sur la conception et la construction de deux turbines éoliennes de 750 kW sur des tours en béton armé coulé sur place (ci-après le « projet »).

6        L’article 2.1 du contrat stipulait que la durée du projet était de 36 mois à compter du 1er janvier 1998. En vertu de l’article 2.2 du contrat, le projet devait prendre fin le 31 décembre 2000 conformément au planning du projet prévu au tableau 1 du programme de travail. Selon ce planning, la phase « conception » devait se dérouler de janvier 1998 à avril 1998, la phase « fabrication » d’avril 1998 à juillet 1998, la phase « montage, installation et [construction] » de juillet 1998 à novembre 1998, la phase « mise en service » de novembre 1998 à décembre 1998 et la phase « contrôle » de janvier 1999 à décembre 2000.

7        L’article 3.1 du contrat estimait les coûts admissibles du projet à 1 531 697 écus. Selon l’article 3.2 du contrat, la Commission devait couvrir jusqu’à 40 % de ces coûts, à concurrence d’un montant maximal de 612 679 écus.

8        Conformément à l’article 4 du contrat, la Commission était tenue de verser une avance de 183 804 écus dans les deux mois suivant la dernière signature des contractants. Des versements partiels devaient être effectués dans les deux mois suivant l’approbation des rapports d’avancement périodiques respectifs et des relevés de coûts correspondants. La Commission était tenue de verser le solde de sa contribution totale due dans les deux mois suivant l’approbation du dernier rapport, document ou autre élément livrable du projet visé au programme de travail et du relevé de coûts pour la période finale visé à l’article 5.2 du contrat.

9        Conformément à l’article 5.1 du contrat, quatre relevés de coûts signés devaient être soumis par l’intermédiaire du coordonnateur. Selon l’article 5.2 du contrat, les relevés de coûts relatifs à la période finale, incorporant des ajustements relatifs aux périodes antérieures, devaient être soumis au plus tard trois mois après l’approbation du dernier rapport, document ou autre élément livrable du projet, aucun coût ne pouvant faire l’objet d’un remboursement après ladite approbation.

10      Selon l’article 6 du contrat, des rapports devaient être soumis par l’intermédiaire du coordonnateur. Cette obligation était précisée à l’article 10 des conditions générales. Selon ces dispositions, certains rapports devaient être soumis à la Commission, notamment :

–        des rapports d’avancement financiers et techniques (tous les six mois à compter du 1er janvier 1998) ;

–        un rapport final couvrant tous les travaux, les objectifs, les résultats et les conclusions.

11      Conformément à l’article 10.3, deuxième alinéa, des conditions générales, ce rapport final devait être soumis dans les deux mois suivant la période de 36 mois prévue à l’article 2.1 du contrat, ou à la fin des travaux si cette date était antérieure.

12      L’article 8 du contrat stipulait que le contrat ne pouvait être modifié que par voie d’accord écrit, dûment conclu entre les représentants autorisés des contractants.

13      Conformément à l’article 2.1 des conditions générales, le coordonnateur devait assurer la transmission de tous les documents et la liaison entre les contractants et la Commission. Le coordonnateur devait en outre recevoir et répartir immédiatement tous les paiements lui étant adressés en qualité de dépositaire pour les contractants.

14      Selon l’article 5.3, sous a), i), des conditions générales, la Commission pouvait immédiatement et par écrit résilier le contrat ou mettre un terme à la participation d’un contractant si, après avoir demandé une action visant à remédier, dans un délai raisonnable qui ne pouvait être inférieur à un mois et qui devait être indiqué par écrit, à la non-exécution du contrat, cette action n’avait pas été entreprise d’une manière satisfaisante. L’article 5.6 des conditions générales stipulait cependant que les dispositions relatives à la soumission des rapports et des relevés de coûts correspondant aux coûts relatifs aux travaux effectués jusqu’au moment de la résiliation ainsi que les articles 6, 11 et la partie C des conditions générales, à savoir ses articles 18 à 24, continuaient à s’appliquer en dépit de la résiliation.

15      L’article 7 des conditions générales prévoyait que le Tribunal de première instance des Communautés européennes et, en cas de pourvoi, la Cour de justice des Communautés européennes, étaient seuls compétents pour connaître des litiges entre la Commission et les contractants relatifs à la validité, à l’application et à l’interprétation du contrat.

16      En vertu de l’article 18.1, premier alinéa, des conditions générales, les coûts admissibles étaient les coûts réels, définis aux articles 19 et 20, qui étaient nécessaires au projet, qui pouvaient être prouvés et qui avaient été encourus durant la période visée à l’article 2.1 du contrat.

17      Les articles 23.2 et 23.3 des conditions générales stipulaient enfin que, sous réserve de l’article 24 desdites conditions générales, tous les paiements seraient considérés comme des avances jusqu’à l’acceptation des autres éléments livrables du projet ou, à défaut, jusqu’à l’acceptation du rapport final et que, si la contribution financière totale due au titre du projet, y compris le résultat de tout audit, était inférieure aux versements effectués au titre du projet, les contractants devaient rembourser immédiatement la différence en écus à la Commission.

 Antécédents du litige

18      Le 6 avril 1998, la Commission a versé au coordonnateur, conformément à l’article 4, premier tiret, du contrat, une avance d’un montant de 183 804 écus.

19      À la suite de la présentation des premiers rapports financier et technique, la Commission a effectué le 16 décembre 1998, conformément à l’article 4, deuxième tiret, du contrat, un deuxième versement au coordonnateur d’un montant de 4 628,16 écus pour la période allant du 1er janvier au 30 juin 1998.

20      Le 29 décembre 1999, à la suite de la soumission des deuxièmes et troisièmes rapports financiers et techniques, la Commission a, conformément à l’article 4, deuxième tiret, du contrat, effectué un troisième versement au coordonnateur d’un montant de 5 806,64 euros pour les périodes allant du 1er juillet au 31 décembre 1998 et du 1er janvier au 30 juin 1999.

21      Le 5 septembre 2000, à la suite de la soumission du quatrième rapport technique et financier, la Commission a, conformément à l’article 4, deuxième tiret, du contrat, effectué un quatrième versement au coordonnateur d’un montant de 3 169,27 euros pour la période allant du 1er juillet au 31 décembre 1999.

22      Le 23 juillet 2001, à la suite de la soumission des cinquièmes rapports technique et financier, la Commission a, conformément à l’article 4, deuxième tiret, du contrat, effectué un cinquième versement au coordonnateur d’un montant de 27 675,72 euros pour la période allant du 1er janvier au 30 juin 2000.

23      Par lettre du 17 décembre 2001, la Commission a rappelé au coordonnateur son obligation contractuelle de lui soumettre un rapport final technique dans les deux mois qui suivaient le 31 décembre 2000 ou à la date de la fin des travaux, si cette date était antérieure, ainsi que son obligation de soumettre un rapport final financier. La Commission lui a demandé de s’exécuter le 30 janvier 2002 au plus tard.

24      Le 1er mars 2002, la Commission a notifié par écrit au coordonnateur que le contrat serait résilié si elle ne recevait pas, dans un délai d’un mois, les rapports demandés dans sa lettre du 17 décembre 2001.

25      Le 12 juin 2002, la Commission a envoyé une lettre au coordonnateur lui indiquant, d’une part, que, si elle ne recevait pas les rapports finals en cause dans un délai d’un mois à compter de la date de réception de cette lettre, elle résilierait le contrat conformément à l’article 5.3 des conditions générales et, d’autre part, que, si ledit contrat était résilié, elle pouvait demander le remboursement total ou partiel des paiements effectués au titre de celui-ci.

26      N’ayant reçu aucune réponse de la part du coordonnateur, la Commission lui a notifié, par lettre du 13 décembre 2002, que, dans la mesure où celui-ci n’avait pas respecté ses obligations contractuelles, elle résiliait le contrat conformément à l’article 5.3, sous a), i), des conditions générales avec effet à compter de la date de ladite lettre. La Commission a également indiqué dans cette lettre qu’elle était en train d’examiner les rapports techniques et les relevés de coûts déjà reçus et qu’elle informerait rapidement le coordonnateur du montant exact à lui rembourser.

27      Par lettre du 28 mars 2003, la Commission a informé le coordonnateur qu’elle avait engagé une procédure de recouvrement d’une somme de 180 664,70 euros correspondant à l’excédent payé dans le cadre du contrat, ce montant devant encore être approuvé par le contrôle financier interne de sa direction générale (DG) « Transport et énergie ». Ladite lettre indiquait par ailleurs que tout désaccord quant à la procédure de recouvrement envisagée devait être notifié à la Commission par écrit, dans un délai de 15 jours à compter de sa réception. Un tableau exposant la situation financière du projet et la méthode utilisée pour calculer le montant à recouvrer était également joint à cette lettre. Selon ce tableau, le montant à rembourser résultait de l’engagement de la Commission à financer 40 % des coûts admissibles. Au total, 225 083,79 euros auraient été versés au coordonnateur en vertu du contrat. Sur la base des cinq relevés de coûts soumis par le coordonnateur, seuls certains coûts d’un montant total de 111 047,74 euros auraient été reconnus comme étant remboursables. Le montant de la contribution due par la Commission serait donc de 44 419,09 euros et le solde de 180 664,70 euros devrait être remboursé.

28      Le 25 juin 2003, le coordonnateur a soumis à la Commission un rapport final comprenant un relevé de coûts couvrant la période allant du début des travaux au 28 février 2001. Il ressort de ce rapport que la mise en œuvre du projet a été retardée en raison des difficultés rencontrées par la défenderesse pour trouver un site adéquat et obtenir l’autorisation de construire nécessaire pour l’installation des turbines éoliennes. Selon ce rapport, l’autorisation de construire pour le site initialement prévu et un autre site faisait défaut. Le permis de construire aurait été octroyé pour un troisième site le 20 juin 2000. Toutefois, en raison des coûts de connexion au réseau électrique sur ce site, au moins quatre turbines éoliennes auraient été nécessaires pour assurer la viabilité économique du projet. Selon le relevé de coûts, le coût total du projet s’élevait à 327 074 euros.

29      Par télécopie du 25 juin 2003, le coordonnateur a indiqué à la Commission que, au cours du projet, il n’avait transmis aucune des sommes versées par la Commission aux autres cocontractants.

30      Le 4 juillet 2003, le contrôle financier interne de la DG « Transport et énergie » de la Commission a confirmé que le montant à recouvrer s’élevait à 180 664,70 euros.

31      Le 11 juillet 2003, la Commission a adressé au coordonnateur une note de débit lui demandant le remboursement d’un montant de 180 664,70 euros, au plus tard le 24 août 2003, et lui précisant qu’à défaut des intérêts devraient être payés sur la base du taux appliqué par la Banque centrale européenne (BCE) à ses principales opérations de refinancement, tel que publié au Journal officiel des Communautés européennes, en vigueur le premier jour de calendrier du mois de l’échéance, à savoir août 2003, et majoré de trois points et demi.

32      Par lettre du 5 août 2003, le coordonnateur a répondu expliquant qu’il avait utilisé l’avance perçue pour des dépenses de trésorerie liées au projet et qu’il n’était pas en mesure de rembourser la Commission. Il proposait également un arrangement prévoyant que des capitaux supplémentaires soient injectés dans la société du coordonnateur afin de lui permettre d’achever le projet. Il soulignait qu’il lui serait toutefois impossible de réaliser le projet et de satisfaire tous ses créanciers en même temps, mais qu’il pourrait en revanche investir le capital nécessaire pour satisfaire 50 % d’entre eux, y inclus la Commission.

33      Le 23 septembre 2003, la Commission a adressé une première lettre de rappel au coordonnateur.

34      Par lettre du 14 octobre 2003, la Commission a rejeté l’arrangement proposé par le coordonnateur dans sa lettre du 5 août 2003.

35      Le 22 octobre 2003, la Commission a adressé une deuxième lettre de rappel au coordonnateur.

36      Par lettre du 5 novembre 2003, le coordonnateur a indiqué à la Commission que le rappel de la note de débit du 22 octobre 2003 était à l’étude et a demandé des précisions sur les intérêts réclamés. La Commission a répondu par courrier électronique du 14 novembre 2003 en faisant référence, pour ce qui est des intérêts réclamés, à l’article 71, paragraphe 4, du règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil, du 25 juin 2002, portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes (JO L 248, p. 1), et à l’article 86, paragraphe 4, du règlement (CE, Euratom) n° 2342/2002 de la Commission, du 23 décembre 2002, établissant les modalités d’exécution du règlement n° 1605/2002 (JO L 357, p. 1).

37      Le 5 décembre 2003, la Commission a envoyé un nouveau rappel au coordonnateur en l’avertissant notamment qu’elle engagerait une procédure d’exécution forcée si le paiement n’était pas effectué immédiatement.

38      Par lettre du 18 mars 2009, l’avocat de la Commission a écrit au coordonnateur en rappelant les termes de la note de débit du 11 juillet 2003 et en exigeant le paiement du montant en cause le 15 avril 2009 au plus tard.

 Procédure et conclusions de la Commission

39      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 18 août 2009, la Commission a introduit le présent recours au titre de l’article 238 CE.

40      Le coordonnateur n’ayant pas produit de mémoire en défense dans le délai qui lui était imparti, la Commission a, le 25 février 2010, demandé au Tribunal de lui adjuger ses conclusions, conformément à l’article 122, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal.

41      À cet égard, il convient effectivement de constater que, bien que la requête et la demande de la Commission de statuer par défaut lui aient été régulièrement notifiées, le coordonnateur n’a pas produit de mémoire en défense. Le Tribunal doit, dès lors, statuer par défaut. La recevabilité du recours ne faisant aucun doute et les formalités ayant été régulièrement accomplies, il lui appartient, conformément à l’article 122, paragraphe 2, du règlement de procédure, de vérifier si les conclusions de la Commission paraissent fondées.

42      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        condamner le coordonnateur à lui payer la somme de 237 384,31 euros, composée du montant en principal de 180 664,70 euros, majoré d’intérêts de retard d’un montant de 56 719,61 euros, calculés au taux de 5,56 % pour la période allant du 25 août 2003 au 15 avril 2009 ;

–        condamner le coordonnateur à lui payer 27,52 euros par jour à titre d’intérêts pour la période allant du 16 avril 2009 à la date du règlement intégral de la dette ;

–        condamner le coordonnateur aux dépens.

 En droit

 Sur le remboursement d’une partie de l’avance

 Arguments de la Commission

43      La Commission fait valoir qu’elle réclame en principal le montant de 180 664,70 euros, qui représente la différence entre l’avance qu’elle a versée (225 083,79 euros) et le montant, limité à 40 % des coûts admissibles approuvés, que la Commission s’était engagée à financer conformément à l’article 3.2 du contrat (44 419,09 euros).

44      La Commission soutient, d’une part, que, conformément à l’article 23.3 des conditions générales, si la contribution financière due au coordonnateur en vertu du contrat est inférieure au total des paiements effectivement effectués, le coordonnateur est tenu de rembourser la différence et, d’autre part, que cette obligation est maintenue après la résiliation du contrat en vertu de l’article 5.6 des conditions générales.

45      En faisant référence à l’article 71 du règlement n° 1605/2002 et à l’article 78 du règlement n° 2342/2002, la Commission précise qu’elle a respecté les étapes de la procédure fixée dans le contrat et par les règles budgétaires de la Communauté pour établir et notifier au coordonnateur le montant de la dette. Elle ajoute que, depuis que la dette est arrivée à échéance le 24 août 2003, elle a adressé de nombreux rappels au coordonnateur.

46      La Commission soutient que, le coordonnateur n’ayant pas réagi, elle a résilié le contrat par lettre du 13 décembre 2002 en vertu de l’article 5.3, sous a), i), des conditions générales.

47      La Commission fait valoir que le coordonnateur n’a jamais contesté le calcul de la dette, bien qu’elle l’ait invité à le faire dans sa lettre du 23 mars 2003. De la même façon, les observations formulées par le coordonnateur après l’émission de la note de débit ne remettent pas en cause l’exactitude du calcul.

48      Selon la Commission, son recours n’est pas prescrit au regard du droit irlandais. En effet, l’article 11, paragraphe 1, du Statute of Limitations, 1957 (loi sur la prescription), disposerait que les actions fondées sur un contrat peuvent être introduites jusqu’à six ans après la naissance de la cause de l’action. En l’espèce, la cause de l’action en recouvrement du trop-perçu serait née à la date d’échéance du paiement, à savoir le 24 août 2003, date avant laquelle la dette n’aurait pas été certaine et liquide.

 Appréciation du Tribunal

49      Aux termes de l’article 23.3 des conditions générales, les contractants se sont engagés, si la contribution financière totale due pour le projet, y compris le résultat de tout audit, était inférieure aux versements effectués au titre du projet, à rembourser immédiatement la différence à la Commission.

50      En l’espèce, il convient de relever que le contrat a été résilié par la Commission avec effet au 13 décembre 2002, en vertu de l’article 5.3, sous a), i), des conditions générales, puisque le coordonnateur n’avait pas soumis le rapport final du projet dans les délais impartis à cet égard, tel que prévu à l’article 10.3 des conditions générales et comme demandé par la Commission dans ses lettres des 17 décembre 2001, 1er mars et 12 juin 2002 (voir points 23 à 25 ci-dessus).

51      La résiliation du contrat n’entraîne cependant pas l’inapplicabilité de l’article 23.3 des conditions générales au cas d’espèce, dès lors que cette disposition, qui se trouve dans la partie C des conditions générales, continue à s’appliquer en dépit de la résiliation du contrat, en vertu de l’article 5.6 des conditions générales.

52      Dans sa note de débit du 11 juillet 2003, la Commission a demandé au coordonnateur le remboursement d’un montant de 180 664,07 euros. Cette somme correspond, selon la Commission, au trop-perçu par le coordonnateur dans le cadre du contrat.

53      À cet égard, il convient de relever que la Commission a versé au coordonnateur, conformément à l’article 4, premier tiret, du contrat, le montant de 183 804 écus à titre d’avance. À la suite de la présentation des premiers rapports financier et technique, elle lui a versé, conformément à l’article 4, deuxième tiret, du contrat, un montant de 4 628,16 écus. Eu égard à la soumission des rapports financiers et techniques suivants, la Commission lui a versé, conformément à l’article 4, deuxième tiret, du contrat, un montant de 36 651,63 euros (voir points 18 à 22 ci-dessus).

54      Par application de l’article 2, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1103/97 du Conseil, du 17 juin 1997, fixant certaines dispositions relatives à l’introduction de l’euro (JO L 162, p. 1), il convient de remplacer la référence à l’écu par une référence à l’euro au taux d’un euro pour un écu.

55      Le montant total des versements effectués par la Commission au coordonnateur s’élève donc à 225 083,79 euros.

56      Il ressort de la lettre de la Commission du 28 mars 2003 que, sur la base des cinq relevés de coûts soumis par le coordonnateur, la Commission a reconnu que certains coûts d’un montant de 111 047,74 euros étaient remboursables.

57      Eu égard à l’obligation de la Commission, en vertu de l’article 3.2 du contrat, de couvrir jusqu’à 40 % des coûts admissibles du projet, le montant de la contribution totale due par la Commission s’élevait, selon elle, à 44 419,09 euros et le solde de 180 664,70 euros devait être remboursé par le coordonnateur.

58      En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que le coordonnateur ait contesté devoir rembourser le montant réclamé dans la note de débit de la Commission et dans les multiples rappels subséquents que la Commission lui a adressés. En effet, dans sa lettre du 5 août 2003, le coordonnateur a indiqué qu’il avait utilisé l’avance perçue pour des dépenses de trésorerie liées au projet et qu’il n’était pas en mesure de rembourser la Commission. Il proposait, en outre, d’investir le capital nécessaire pour satisfaire 50 % de ses créanciers, y inclus la Commission (voir point 32 ci-dessus). Dans sa lettre du 5 novembre 2003, le coordonnateur a seulement indiqué que le rappel de la note de débit était à l’étude sans toutefois contester le calcul du montant demandé par la Commission (voir point 36 ci-dessus). À cet égard, il y a également lieu de relever que, par sa lettre du 28 mars 2003, la Commission avait déjà informé le coordonnateur du montant à rembourser ainsi que de la méthode de calcul utilisée. Elle lui avait demandé d’indiquer tout désaccord avec la procédure de recouvrement dans un délai de 15 jours à compter de la réception de cette lettre ce que le coordonnateur n’a cependant pas fait.

59      La constatation selon laquelle le coordonnateur n’a pas contesté la note de débit de la Commission ou les multiples rappels subséquents n’est pas remise en cause par le relevé de coûts couvrant la période allant de la date du début des travaux au 28 février 2001, soumis par le coordonnateur dans le cadre de son rapport final du 25 juin 2003. Certes, selon ce relevé de coûts, le coût total du projet s’élève à 327 074 euros (voir point 28 ci-dessus). Eu égard à l’obligation de la Commission de couvrir jusqu’à 40 % des coûts admissibles du projet, le montant de la contribution totale due par la Commission pourrait dès lors être fixé à 130 829,60 euros au lieu de 44 419,09 euros. À cet égard, il convient également de rappeler que, en vertu de l’article 5.6 des conditions générales, les dispositions concernant la soumission des rapports et des relevés de coûts correspondant aux coûts relatifs aux travaux effectués jusqu’à la résiliation du contrat continuaient à s’appliquer en dépit de celle-ci.

60      Toutefois, dans ce contexte, il convient de rappeler que l’article 18.1, premier alinéa, des conditions générales prévoit que les coûts remboursables sont les coûts réels qui sont nécessaires pour le projet, dont l’existence peut être prouvée et qui ont été encourus pendant la durée du projet. Dès lors, il incombe, dans le cadre d’un tel contrat, au coordonnateur d’apporter la preuve que les coûts qu’il a déclarés à la Commission étaient des coûts réels qui étaient effectivement nécessaires et avaient été encourus pour l’exécution du projet pendant la durée de celui-ci (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 23 octobre 2007, Commission/Impetus, T‑138/05, non publié au Recueil, point 97, et du 3 juin 2009, Commission/Burie Onderzoek en advies, T‑179/06, non publié au Recueil, point 100).

61      À cet égard, il convient de constater que le relevé de coûts présenté le 25 juin 2003 ne permet pas à lui seul d’établir que les coûts indiqués sont réels, qu’ils ont effectivement été nécessaires et qu’ils ont été encourus pour l’exécution du projet pendant la durée de celui-ci. En effet, le relevé de coûts en cause ne contient pas de données susceptibles de démontrer si les coûts indiqués ont effectivement été occasionnés par l’exécution du projet. En outre, la date à laquelle les coûts ont prétendument été effectués n’est pas indiquée. Enfin, le coordonnateur n’a pas fourni d’éléments de preuve susceptibles de démontrer la réalité de l’intégralité des coûts qu’il indique.

62      Il s’ensuit que, étant donné qu’aucun élément du dossier ne démontre que le coordonnateur a déjà remboursé le montant demandé dans la note de débit du 11 juillet 2003, il y a lieu de conclure que la Commission a le droit de lui demander le remboursement du trop-perçu de 180 664,70 euros.

63      S’agissant de la question de savoir si ce droit à restitution est prescrit en l’espèce selon le droit irlandais, il convient de relever que, en vertu de l’article 11, paragraphe 1, sous a), du Statute of Limitations, 1957, les actions fondées sur un contrat peuvent être introduites jusqu’à six ans après la naissance de la cause de l’action. Selon la jurisprudence irlandaise, la cause de l’action est née au moment de la violation du contrat et non quand le dommage est subi, puisque l’essence d’une action pour violation de contrat est la violation même et non les dommages qui en résultent. La détermination de la date de la violation du contrat dépend de la formulation de celui-ci (voir Brady, J. C., et Kerr, T., The Limitation of Actions, The Incorporated Law Society of Ireland, Dublin, 1994, p. 46 et 47, et la jurisprudence citée). Ceci vaut également si le demandeur n’est pas au courant qu’il a subi un dommage [arrêt de la Supreme Court of Ireland du 8 février 1990 dans l’affaire Hegarty/O’Loughran, (1990) IESC 2, point 32 ; arrêts de la High Court of Ireland du 4 mai 1999 dans l’affaire Irish Equine Foundation Ltd./Robinson, (1999) IEHC 150, point 6, et du 22 octobre 2008 dans l’affaire Murphy & Anor/Mc Inerney Construction Ltd & Ors, (2008) IEHC 323].

64      En l’espèce, la Commission a affirmé que la cause de l’action en recouvrement du trop-perçu était née à la date d’échéance du paiement prévue dans la note de débit du 11 juillet 2003, à savoir le 24 août 2003, date avant laquelle la dette n’aurait pas été certaine et liquide. À cet égard, il convient d’observer que, à supposer même que le droit à restitution soit prescrit parce que la cause de l’action serait née le 31 décembre 2000, date à laquelle le coordonnateur a manqué à son obligation de terminer le projet (voir point 6 ci-dessus), le 28 février 2001, date à laquelle il a manqué à son obligation de soumettre le rapport final (voir point 10 ci-dessus), le 13 décembre 2002, date à laquelle le contrat a pris fin, ou le 11 juillet 2003, date à laquelle la Commission a adressé au coordonnateur sa note de débit, le présent recours ne saurait être rejeté en raison de la prescription du droit à restitution.

65      En effet, les restrictions apportées par le Statute of Limitations, 1957, sont procédurales et ne concernent ni le fond ni la compétence. Selon le droit irlandais, un recours introduit après l’expiration du délai de prescription n’est rejeté que si la défenderesse invoque le Statute of Limitations, 1957, dans sa défense [arrêt de la Supreme Court of Ireland du 10 février 2009 dans l’affaire Murphy/Grealish, (2009) IESC 9 ; arrêt de la High Court of Ireland du 18 mars 2005 dans l’affaire Kinlon/Córas Iompair Éireann, (2005) IEHC 95 ; voir également Brady, J. C., et Kerr, T., The Limitation of Actions, The Incorporated Law Society of Ireland, Dublin, 1994, p. 5, et la jurisprudence citée].

66      En l’espèce, le coordonnateur n’ayant pas invoqué devant le Tribunal la prescription du droit à restitution, il y a lieu de faire droit aux conclusions de la Commission en ce qui concerne le remboursement du trop-perçu de 180 664,70 euros.

 Sur les intérêts

 Arguments de la Commission

67      La Commission fait valoir que, en l’absence d’une interdiction contractuelle des intérêts, le droit irlandais établit un taux légal pour les intérêts de retard sur les dettes monétaires. Elle affirme que, selon l’article 22, paragraphe 1, du Courts Act, 1981 (loi sur les juridictions), un tribunal peut imposer des intérêts sur une somme dont le paiement a été ordonné, aux taux spécifiés à l’article 26 du Debtors (Ireland) Act, 1840 (loi sur les débiteurs). Ces intérêts pourraient porter sur tout ou partie du principal et couvrir tout ou partie de la période courant de la naissance de la cause de l’action en justice à la date du jugement. Le taux fixé à l’article 26 du Debtors (Ireland) Act, 1840, tel que modifié, conformément à l’article 20 du Courts Act, 1981, par le point 3 du Courts Act, 1981 (Interest on Judgment Debts) Order 1989 (ordonnance sur les intérêts relatifs aux dettes entérinées par un tribunal), serait de 8 %. L’intérêt applicable aurait été dûment notifié au coordonnateur par la note de débit du 11 juillet 2003.

68      Selon la Commission, le taux qu’elle a appliqué (5,56 %) étant inférieur à 8 %, il est autorisé en vertu du droit irlandais, depuis la date d’échéance de la note de débit jusqu’à la date du jugement.

69      La Commission indique à cet effet qu’elle a calculé les intérêts sur le montant de 180 664,70 euros, conformément à sa note de débit du 11 juillet 2003, sur la base du taux appliqué par la BCE, majoré de trois points et demi, soit un taux de 5,56 %, pour la période allant de la date d’échéance fixée dans la note de débit, le 24 août 2003, au 15 avril 2009, échéance fixée pour le remboursement dans le dernier rappel envoyé le 18 mars 2009. Les intérêts sur cette somme, à ce taux et pour cette période, s’élèvent à 56 719,61 euros.

70      La Commission ajoute qu’elle demande également le paiement d’un montant de 27,52 euros par jour à titre d’intérêts pour la période allant du 16 avril 2009 à la date du règlement intégral de la dette.

 Appréciation du Tribunal

71      Dans la note de débit du 11 juillet 2003, la Commission a indiqué que la somme demandée était payable au plus tard le 24 août 2003 et que, après cette date, des intérêts de retard seraient dus sur la base du taux appliqué par la BCE à ses principales opérations de refinancement, tel que publié au Journal officiel des Communautés européennes, en vigueur le premier jour de calendrier du mois de l’échéance, à savoir août 2003, majoré de trois points et demi. Dès lors que le taux en cause s’élevait à 2,06 % le 1er août 2003 (JO 2003, C 183, p. 1), la Commission a demandé des intérêts de retard au taux de 5,56 %.

72      Toutefois, il convient de constater que l’article 23.3 des conditions générales ne prévoit pas que le remboursement à la Commission du trop-perçu par le coordonnateur soit majoré d’intérêts de retard.

73      À défaut d’intérêts conventionnels, et dans la mesure où le contrat est régi par le droit irlandais, il y a lieu d’appliquer l’article 22, paragraphe 1, du Courts Act, 1981, qui dispose que, lorsqu’une juridiction ordonne à une personne, dans le cadre d’une procédure, de payer une somme d’argent, le juge compétent peut également, s’il l’estime opportun, ordonner à cette personne de payer des intérêts au taux annuel en vigueur à l’époque considérée, fixé à l’article 26 du Debtors (Ireland) Act, 1840. Ces intérêts portent sur tout ou partie du principal et couvrent tout ou partie de la période courant de la naissance de la cause de l’action en justice jusqu’à la date du jugement (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 8 juillet 2004, Commission/Trendsoft, C‑127/03, non publié au Recueil, point 31). À cet égard, il convient de relever que, selon l’article 26 du Debtors (Ireland) Act, 1840, tel que modifié, conformément à l’article 20 du Courts Act, 1981, par le point 3 du Courts Act, 1981 (Interest on Judgment Debts) Order 1989, toute créance constatée par jugement et n’ayant pas été reconnue ou recouvrée, due à titre de clause pénale en garantie du principal et des intérêts, produira des intérêts au taux annuel de 8 % (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 17 décembre 2008, Commission/Cooperação e Desenvolvimento Regional, T‑174/08, non publié au Recueil, point 53).

74      En l’espèce, la Commission réclame le montant de 56 719,61 euros au titre d’intérêts de retard pour la période allant du 25 août 2003 au 15 avril 2009 et le montant de 27,52 euros au titre d’intérêts de retard par jour à partir du 16 avril 2009 jusqu’à la date du règlement intégral de la dette. Il convient de relever que ces montants correspondent respectivement à l’application d’un taux d’intérêts de 5,56 % relatif au montant en principal de 180 664,70 euros.

75      Dans la mesure où, pour toute la période comprise entre le 25 août 2003 et la date du présent arrêt, les taux d’intérêts réclamés par la Commission sont inférieurs à ceux calculés en vertu du Courts Act, 1981, il y a lieu de faire droit aux conclusions de la Commission sur ce point (voir, en ce sens, arrêts de la Cour Commission/Trendsoft, point 73 supra, point 35, et du 24 février 2005, Commission/Implants, C‑279/03, non publié au Recueil, point 34).

76      Enfin, pour la période allant de la date du présent arrêt à la date du complet paiement de la dette, le coordonnateur doit être condamné à payer à la Commission des intérêts calculés conformément à la loi irlandaise, soit actuellement l’article 26 du Debtors (Ireland) Act, 1840, tel que modifié, dans la limite d’un taux de 5,56 % l’an (voir, en ce sens, arrêt Commission/Trendsoft, point 73 supra, point 37 ; voir également, en ce sens, arrêt Commission/Cooperação e Desenvolvimento Regional, point 73 supra, point 58).

77      Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le coordonnateur doit être condamné à rembourser à la Commission la somme de 180 664,70 euros, majorée des intérêts de retard :

–        au taux de 5,56 % l’an à compter du 25 août 2003 jusqu’à la date du présent arrêt ;

–        au taux annuel appliqué en vertu de la loi irlandaise, soit actuellement l’article 26 du Debtors (Ireland) Act, 1840, modifié, dans la limite d’un taux de 5,56 % l’an, à compter du présent arrêt et jusqu’à l’apurement complet de la dette.

 Sur les dépens

78      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le coordonnateur ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Irish Electricity Generating Co. Ltd est condamnée à rembourser à la Commission européenne la somme de 180 664,70 euros, majorée des intérêts de retard :

–        au taux de 5,56 % l’an à compter du 25 août 2003 jusqu’à la date du présent arrêt ;

–        au taux annuel appliqué en vertu de la loi irlandaise, soit actuellement l’article 26 du Debtors (Ireland) Act, 1840 (loi sur les débiteurs), modifié, dans la limite d’un taux de 5,56 % l’an, à compter du présent arrêt et jusqu’à l’apurement complet de la dette.

2)      Irish Electricity Generating est condamnée aux dépens.

Martins Ribeiro

Wahl

Dittrich

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 novembre 2010.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.