Language of document : ECLI:EU:F:2008:149

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE DE
L’UNION EUROPÉENNE (première chambre)

25 novembre 2008 (*)

« Fonction publique – Ancien agent contractuel – Pension d’ancienneté – Allocation de foyer – Article 109, paragraphe 3, du RAA »

Dans l’affaire F‑145/07,

ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

Pierre Bosman, ancien agent contractuel du Conseil de l’Union européenne, demeurant à Lebbeke (Belgique), représenté par Mes T. Bontinck et P. Gennari Curlo, avocats,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par M. M. Bauer et Mme I. Šulce, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de MM. H. Kreppel, président, H. Tagaras (rapporteur) et S. Gervasoni, juges,

greffier : M. R. Schiano, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 10 juin 2008,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 27 décembre 2007 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 31 décembre suivant), M. Bosman a introduit le présent recours tendant à l’annulation de la décision du 28 février 2007 par laquelle le Conseil de l’Union européenne a refusé, sur la base de l’article 109, paragraphe 3, du régime applicable aux autres agents des Communautés européennes (ci-après le « RAA »), de lui reconnaître le droit à l’allocation de foyer aux fins de calculer ses droits à la pension d’ancienneté (ci-après la « décision litigieuse »).

 Cadre juridique

2        L’article 67, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut ») prévoit :

« Les allocations familiales comprennent :

a)      l’allocation de foyer ;

[…] »

3        L’article 1er de l’annexe VII du statut, dans sa version en vigueur à la date de la décision litigieuse, énonce :

« 1. L’allocation de foyer est fixée à un montant de base de 157,29 euros, majoré de 2 % du traitement de base du fonctionnaire.

2. A droit à l’allocation de foyer :

a)      le fonctionnaire marié ;

[…] »

4        L’article 4, premier alinéa, du RAA, dans sa version en vigueur avant le 1er mai 2004, se lisait comme suit :

« Est considéré comme agent local, au sens du présent régime, l’agent engagé conformément aux usages locaux en vue d’exécuter des tâches manuelles ou de service dans un emploi non prévu au tableau des effectifs annexé à la section du budget afférente à chaque institution, et rémunéré sur les crédits globaux ouverts à cet effet à cette section du budget. [...] »

5        L’article 4 du RAA énonce :

« Est considéré comme ‘agent local’, aux fins du présent régime, l’agent engagé dans des lieux situés en dehors de l’Union européenne conformément aux usages locaux en vue d’exécuter des tâches manuelles ou de service, dans un emploi non prévu au tableau des effectifs annexé à la section du budget afférente à chaque institution, et rémunéré sur les crédits globaux ouverts à cet effet à cette section du budget. [...] »

6        Le règlement (CE, Euratom) n° 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004, modifiant le statut ainsi que le RAA (JO L 124, p. 1), a introduit une nouvelle catégorie de personnel dans le RAA, les agents contractuels.

7        L’article 3 bis, paragraphe 1, du RAA prévoit ce qui suit :

« Est considéré comme ‘agent contractuel’, aux fins du présent régime, l’agent non affecté à un emploi prévu dans le tableau des effectifs annexé à la section du budget afférente à l’institution concernée et engagé en vue d’exercer des fonctions, soit à temps partiel, soit à temps complet :

a)      dans une institution en vue d’exécuter des tâches manuelles ou d’appui administratif,

[...] »

8        L’article 19 du RAA, inclus dans le titre concernant les agents temporaires, est rédigé comme suit :

« La rémunération de l’agent temporaire comprend un traitement de base, des allocations familiales et des indemnités. »

9        Aux termes de l’article 20, paragraphe 2, du RAA :

« Les articles 66, 67, 69 et 70 du statut concernant les traitements de base, les allocations familiales, l’indemnité de dépaysement et l’allocation de décès sont applicables par analogie. »

10      L’article 21 du RAA, qui figure également sous le titre concernant les agents temporaires, prévoit :

« Les dispositions de l’article 1er […] de l’annexe VII du statut concernant les modalités d’attribution des allocations familiales […] sont applicables par analogie. »

11      Quant à l’article 92 du RAA, inclus dans le titre relatif aux agents contractuels, il énonce :

« Les articles 19 à 27 s’appliquent par analogie […] »

12      Selon l’article 109, paragraphe 3, du RAA :

« Le titulaire d’une pension d’ancienneté, s’il a été employé plus de trois ans en tant qu’agent contractuel, a droit, dans les conditions prévues à l’annexe VII du statut, aux allocations familiales visées à l’article 67 du statut ; l’allocation de foyer est calculée sur la base de la pension du bénéficiaire. »

13      L’article 2 de l’annexe du RAA dispose :

« 1. Conformément au [RAA], l’autorité [habilitée à conclure des contrats] propose un contrat d’agent contractuel à durée indéterminée à toute personne employée par les Communautés le 1er mai 2004 dans le cadre d’un contrat [à] durée indéterminée en tant qu’agent local dans l’Union européenne ou en vertu de la législation nationale dans l’un des agences et organismes visés à l’article 3 bis, paragraphe l, [sous] b) et c), du [RAA]. La proposition d’engagement est fondée sur une évaluation des tâches que l’agent contractuel devra exécuter. Ce contrat prend effet au plus tard le 1er mai 2005. L’article 84 du [RAA] ne s’applique pas à un tel contrat.

2. Dans le cas où le classement de l’agent qui accepte l’offre de contrat se traduirait par une baisse de sa rémunération, l’institution a la faculté de verser un montant supplémentaire tenant compte des différences existant entre la législation en matière de fiscalité, de sécurité sociale et de pensions de l’État membre d’affectation et les dispositions applicables à l’agent contractuel.

3. Chaque institution adopte, s’il y a lieu, des dispositions générales relatives à l’application des paragraphes 1 et 2 conformément à l’article 110 du statut.

4. L’agent qui n’accepte pas l’offre visée au paragraphe 1 peut conserver sa relation contractuelle avec l’institution. »

14      Aux termes de l’article 3 de l’annexe du RAA :

« Pendant une durée de cinq ans à compter du 1er mai 2004, les agents locaux et les agents contractuels du [S]ecrétariat général du Conseil qui avaient le statut d’agents locaux dudit [S]ecrétariat général du Conseil avant le 1er mai 2004 sont admis à se présenter aux concours internes du Conseil dans les mêmes conditions que les fonctionnaires et agents temporaires de l’institution. »

 Faits à l’origine du litige

15      Le 21 janvier 2002, le requérant, M. Bosman, a signé avec le secrétariat général du Conseil (ci-après le « SGC ») un contrat d’engagement, pour une durée indéterminée, en tant qu’agent local au sens des articles 79 à 81 du RAA, dans sa version en vigueur avant le 1er mai 2004. Le requérant a pris ses fonctions en qualité d’agent local le 1er février 2002.

16      Le 25 avril 2005, le SGC a proposé au requérant un contrat d’agent contractuel, conformément à l’article 2 de l’annexe du RAA. Le requérant a accepté la proposition du SGC.

17      Le 30 avril 2005, le requérant et le SGC ont adopté une convention de rupture de commun accord, dont l’objet était de mettre fin au contrat d’agent local signé le 21 janvier 2002.

18      Le contrat d’engagement d’agent contractuel du requérant, conclu à durée indéterminée et prenant effet le 1er mai 2005, stipulait à son article 4, paragraphe 3, que « l’agent a droit, le cas échéant, aux allocations et indemnités dans les conditions prévues au Titre IV du RAA […] » et à son article 6 que, « aux fins de participer à des concours internes […], l’agent est réputé posséder, au moment du recrutement, une ancienneté conventionnelle de trois ans » ; ce même article 6 ajoutait qu’« [i]l n’est tenu compte de cette ancienneté conventionnelle que pour les concours internes au SGC prévus par l’article 3 de l’annexe au RAA ».

19      Le requérant a cessé ses fonctions au sein du Conseil le 28 février 2007. Ce même jour, le Conseil, arrêtant la fixation des droits du requérant au titre de la pension d’ancienneté pour les 22 mois durant lesquels il avait travaillé au SGC en tant qu’agent contractuel, lui a refusé le bénéfice de l’allocation de foyer, tel que prévu à l’article 109, paragraphe 3, du RAA.

20      En date du 26 mai 2007, le requérant a introduit une réclamation contre la décision litigieuse. Cette réclamation a été rejetée par décision du Conseil du 24 septembre 2007.

 Conclusions des parties

21      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision litigieuse ;

–        condamner le Conseil au paiement de l’allocation de foyer demandée à compter du 1er mars 2007 ;

–        condamner le Conseil à l’ensemble des dépens.

22      Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter la demande en annulation comme non fondée ;

–        condamner le requérant à l’ensemble des dépens.

 En droit

 Arguments des parties

23      À titre liminaire, le requérant fait valoir qu’il remplit les conditions d’obtention de l’allocation de foyer, telles qu’elles sont prévues à l’article 1er, paragraphe 2, sous a), de l’annexe VII du statut.

24      À l’appui de ses conclusions en annulation, le requérant invoque quatre moyens.

25      Le premier moyen est tiré de la méconnaissance de l’intention du législateur communautaire. Le requérant fait valoir en particulier que la ratio legis de l’article 109, paragraphe 3, du RAA n’était pas d’exclure du bénéfice de l’allocation de foyer un agent dans sa situation qui, avant le 1er mai 2004, appartenait à une catégorie d’agents équivalente à celle des agents contractuels et pour lequel il est raisonnable de penser que, si cette dernière catégorie avait existé en 2002, le Conseil lui aurait proposé à cette date un contrat d’agent contractuel. L’application excessivement littérale et restrictive par le SGC de l’article susmentionné irait ainsi à l’encontre de la volonté du législateur communautaire et aurait pour résultat d’exclure du bénéfice de l’allocation de foyer tout agent qui, ayant été au service des Communautés européennes pendant une longue période, acquerrait la qualité d’agent contractuel dès le 1er mai 2004 et prendrait sa retraite avant le 1er mai 2007.

26      De plus, le requérant fait état d’une violation du principe d’égalité de traitement, sa position étant – selon lui – en tous points comparable à celle d’un agent contractuel engagé en 2004 pour une durée indéterminée. Il ajoute que la seule différence entre sa situation et celle de cet agent qui bénéficierait de l’allocation en question tiendrait au fait qu’il n’a reçu la qualification formelle d’« agent contractuel » que par la signature de son contrat le 1er mai 2005.

27      Ensuite, le requérant soulève un moyen tiré de la violation des principes de protection de la confiance légitime et de maintien des droits acquis. D’une part, s’agissant de la violation du principe de protection de la confiance légitime, le requérant se réfère, premièrement, à une attestation délivrée par le SGC en date du 5 mai 2004 indiquant qu’une ancienneté conventionnelle fixée au 1er février 1980 lui était reconnue, deuxièmement, à l’article 6 du contrat d’agent contractuel signé le 1er mai 2005 lui reconnaissant une ancienneté conventionnelle de trois ans aux fins de participer à des concours internes, troisièmement, à sa fiche personnelle datée du 13 mai 2005 lui reconnaissant explicitement le droit à l’octroi de l’allocation de foyer aux fins de calculer sa rémunération ; le requérant en déduit qu’il nourrissait ainsi des attentes raisonnables quant au bénéfice de l’allocation de foyer pour le calcul de ses droits à la pension d’ancienneté. D’autre part, le requérant invoque la violation du principe de maintien des droits acquis, en ce qu’il aurait souffert d’une « privation abrupte » de l’allocation de foyer dont il avait bénéficié pendant son activité.

28      Enfin, le requérant reproche au Conseil le défaut de motivation de la décision litigieuse dans la mesure où celui-ci, faisant une simple référence à l’article 109, paragraphe 3, du RAA dans ladite décision, n’aurait pas fourni au requérant les éléments nécessaires pour en apprécier le bien-fondé.

29      Le Conseil, après avoir fait remarquer, à titre liminaire, que le requérant ne conteste pas la légalité de l’article 109, paragraphe 3, du RAA, conclut au rejet de l’ensemble des moyens ; il n’existerait, en l’espèce, ni méconnaissance de l’intention du législateur communautaire au regard de l’article 109, paragraphe 3, du RAA, ni violation du principe d’égalité de traitement, ni violation des principes de protection de la confiance légitime et de maintien des droits acquis, ni insuffisance des motifs étayant la décision litigieuse.

 Appréciation du Tribunal

 Observations liminaires

30      Il convient de constater en premier lieu que, à l’appui de ses conclusions en annulation, le requérant ne soulève pas d’exception d’illégalité à l’encontre de l’article 109, paragraphe 3, du RAA, mais se limite à contester, par les quatre moyens susmentionnés, l’application de cette disposition dans le cas d’espèce.

31      Il échet de relever ensuite que le requérant admet ne pas avoir accompli les trois ans de service en qualité d’agent contractuel exigés par l’article 109, paragraphe 3, du RAA, aux fins de l’octroi de l’allocation litigieuse. Il se limite à soutenir, en se fondant à cet effet sur les moyens susmentionnés, que le droit à l’allocation de foyer aurait dû lui être reconnu quand bien même ladite condition n’était pas remplie dans le cas d’espèce.

32      En troisième lieu, le Tribunal rappelle la jurisprudence en vertu de laquelle les dispositions du droit communautaire qui ouvrent droit à des prestations financières doivent être interprétées strictement (arrêts du Tribunal de première instance du 30 novembre 1994, Dornonville de la Cour/Commission, T‑498/93, RecFP p. I‑A‑257 et II‑813, points 38 et 39 ; du 17 avril 2002, Sada/Commission, T‑325/00, RecFP p. I‑A‑47 et II‑209, point 37, et du 18 septembre 2003, Lebedef e.a./Commission, T‑221/02, RecFP p. I‑A‑211 et II‑1037, point 38 ; arrêt du Tribunal du 9 octobre 2007, Bellantone/Cour des comptes, F‑85/06, non encore publié au Recueil, point 65). Les dispositions de l’article 109, paragraphe 3, du RAA, ouvrant droit au bénéfice de l’allocation de foyer pour le calcul des droits à la pension d’ancienneté, doivent ainsi faire l’objet d’une interprétation et d’une application stricte et, au moins dans une situation comme celle de l’espèce, ne sauraient laisser à l’administration de l’institution concernée un quelconque pouvoir d’appréciation.

33      C’est en tenant compte de ces considérations qu’il convient d’examiner les moyens soulevés par le requérant.

 Sur la prétendue méconnaissance de l’intention du législateur communautaire

34      Le Tribunal constate d’emblée que ni les écrits ni la plaidoirie du requérant lors de l’audience n’offrent d’éléments concrets, ne seraient-ce que des indices, permettant d’étayer la thèse de la méconnaissance de l’intention du législateur communautaire.

35      S’agissant en particulier de l’allégation suivant laquelle, si la catégorie des agents contractuels avait existé en 2002, le Conseil aurait alors proposé au requérant, dès cette date, un contrat d’agent contractuel, le Tribunal observe qu’une telle allégation repose sur une pure supposition, qui ne saurait venir valablement au soutien d’une démonstration juridique.

36      De plus, le requérant n’apporte aucun élément concret au soutien des allégations selon lesquelles la volonté du législateur n’était pas d’exclure du bénéfice de l’allocation de foyer un agent dans sa situation, à savoir un agent qui, ayant été au service des Communautés européennes pendant une longue période dans une catégorie d’agents équivalente à celle des agents contractuels, acquerrait la qualité d’agent contractuel dès le 1er mai 2004 suite à une offre en ce sens de l’institution et prendrait sa retraite avant le 1er mai 2007. En outre, et dans la mesure où cette dernière allégation repose sur la prémisse que, en réalité, son statut d’agent local n’aurait fait l’objet que d’une simple « transposition » dans le cadre de la nouvelle catégorie des agents contractuels créée dans le nouveau RAA, force est de constater qu’une telle prémisse est dénuée de fondement ; en effet, à supposer même que la catégorie des agents contractuels soit effectivement destinée à remplacer à terme celles des agents locaux, comme elle est d’ailleurs également destinée à remplacer la catégorie des agents auxiliaires (voir arrêt du Tribunal du 24 avril 2008, Dalmasso/Commission, F‑61/05, non encore publié au Recueil, point 78), il n’en reste pas moins que le législateur communautaire, créant une nouvelle catégorie d’agents, les a également soumis à un régime juridique et pécuniaire différent de celui des agents locaux et que, dès lors, le requérant ne saurait considérer qu’il « appartenait à une catégorie d’agents équivalente à celle des agents contractuels ».

37      En revanche, rien ne permet de soutenir que la ratio legis de l’article 109, paragraphe 3, du RAA, quelles que soient les particularités des hypothèses dans lesquelles cet article pourrait s’appliquer, n’était pas de limiter le bénéfice de l’allocation de foyer (laquelle est octroyée, en vertu dudit article, mensuellement et pour toute la durée de la retraite de l’agent) aux seuls agents contractuels ayant travaillé pendant une période raisonnable. En effet, cette dernière exigence correspond à des considérations budgétaires et de bonne gestion évidentes, d’autant qu’une personne dans la situation du requérant peut prétendre à une pension communautaire après moins de deux années de service en qualité d’agent communautaire et, partant, après moins de deux années de cotisations. Le Tribunal relève en outre que l’allocation de foyer est fixée, en vertu de l’article 1er, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut, combiné avec les articles 19, 20, 21 et 92 du RAA, à un montant de base mensuel d’environ 150 euros, majoré de 2 % de la pension d’ancienneté, à savoir en l’espèce à un montant disproportionnellement élevé par rapport au montant de base mensuel de la pension du requérant, s’élevant – ainsi qu’indiqué dans la décision litigieuse – à 244, 57 euros.

38      Le Tribunal tient en outre à préciser, ainsi que le Conseil l’a d’ailleurs fait remarquer lors de l’audience, que les agents appartenant à la catégorie des agents locaux avant la modification du RAA le 1er mai 2004 étaient libres, en vertu de l’article 2, paragraphe 4, de l’annexe du RAA, d’accepter ou non la proposition d’engagement en qualité d’agent contractuel, prévue au paragraphe 1er dudit article, et partant, de bénéficier des dispositions de la nouvelle catégorie des agents contractuels ou de continuer à être soumis aux règles régissant leur contrat d’agent local, conclu dans le cas du requérant le 1er février 2002. Dans la mesure où le requérant a décidé le 1er mai 2005 d’être engagé en qualité d’agent contractuel, il ne saurait reprocher à l’administration du Conseil d’avoir fait application des dispositions régissant cette nouvelle catégorie ; ce d’autant que, comme le Conseil l’a précisé lors de l’audience, sans être contesté par le requérant sur ce point, celui-ci avait participé à diverses réunions générales et individuelles d’informations, organisées par l’administration du Conseil en 2004 et 2005, au cours desquelles les conséquences de son engagement en qualité d’agent contractuel lui avaient été expliquées.

39      Au vu des considérations qui précèdent et, notamment, en tenant particulièrement compte de la jurisprudence exposée au point 32 du présent arrêt, relative à l’interprétation stricte des dispositions du droit communautaire qui ouvrent droit à des prestations financières, il y a lieu de rejeter comme non fondé le premier moyen, tiré de la méconnaissance de l’intention du législateur communautaire.

 Sur la prétendue violation du principe d’égalité de traitement

40      Selon une jurisprudence constante, le principe d’égalité de traitement interdit notamment que des situations comparables soient traitées de manière différente ou que des situations différentes soient traitées de manière égale, à moins que de tels traitements, différents ou égaux selon le cas, ne soient objectivement justifiés (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 19 juin 2007, Davis e.a/Conseil, F‑54/06, non encore publié au Recueil, point 62, et la jurisprudence citée). Il en va de même du principe de non-discrimination, lequel n’est que l’expression spécifique du principe général d’égalité et constitue, conjointement avec ce dernier, un des droits fondamentaux du droit communautaire dont la Cour assure le respect (voir arrêt du Tribunal du 23 janvier 2007, Chassagne/Commission, F‑43/05, non encore publié au Recueil, point 59, et la jurisprudence citée).

41      De plus, il convient de rappeler que le législateur communautaire est libre d’apporter à tout moment aux règles du statut les modifications qu’il estime conformes à l’intérêt du service et d’adopter, pour l’avenir, des dispositions statutaires plus défavorables, pour les fonctionnaires ou agents concernés, à condition toutefois que les personnes spécifiquement concernées par la réglementation nouvelle soient traitées de manière identique (voir arrêt Dalmasso/Commission, précité, point 78).

42      En l’espèce, le requérant argue du fait qu’il se trouverait dans une situation comparable à celle d’un agent contractuel bénéficiant de l’allocation de foyer et que la seule différence avec ce dernier tiendrait au fait qu’il n’a reçu la qualification formelle d’« agent contractuel » que le 1er mai 2005. Le requérant a ajouté lors de l’audience que, alors même qu’il a été engagé au mois de février 2002 en tant qu’agent local, qu’il est devenu au mois de mai 2005 agent contractuel, entrant ainsi dans une catégorie qui, selon lui, ne serait qu’une « transposition » de la catégorie des agents locaux, et qu’il a été admis à la retraite à la fin du mois de février 2007, il n’aurait pas droit à l’allocation de foyer, tandis qu’un agent contractuel, engagé à partir du 1er mai 2004 et prenant sa retraite après le 1er mai 2007, y aurait droit ; or, cela constituerait une rupture de l’égalité de traitement.

43      À titre liminaire, le Tribunal tient à préciser que le requérant ne peut être regardé comme ayant reçu le 1er mai 2005 « la qualification formelle d’agent contractuel ». En effet, une telle affirmation conduirait implicitement à considérer que le régime des agents contractuels ne serait qu’une « transposition » dans le nouveau RAA du régime des agents locaux. Cette position, soutenue par le requérant lors de l’audience, a été réfutée par le Tribunal au point 36 du présent arrêt au motif que le requérant a simplement été engagé dans la nouvelle catégorie des agents contractuels le 1er mai 2005 tandis qu’il appartenait antérieurement à une catégorie différente, celle des agents locaux.

44      De plus, dès lors que le requérant est entré en service en tant qu’agent contractuel le 1er mai 2005 et qu’il a été admis à la retraite le 28 février 2007, il ne saurait arguer qu’il serait dans une situation comparable à celle d’un agent contractuel entré en service en tant qu’agent contractuel le 1er mai 2004 et admis à la retraite après le 1er mai 2007 ; en outre, le Tribunal considère que l’application des dispositions claires et précises de l’article 109, paragraphe 3, du RAA, dont la légalité, au surplus, n’a pas été contestée par le requérant, donne lieu à un traitement identique de tous les agents contractuels, en ce que ces dispositions reposent sur la condition essentielle et sine qua non, afin de bénéficier de l’allocation de foyer dans le calcul des droits à la pension d’ancienneté, d’avoir été employé plus de trois ans en tant qu’agent contractuel.

45      Certes, ainsi que le Conseil l’a précisé lors de l’audience, si les 29 agents locaux qui étaient en service au Conseil au mois de mai 2004 ont été engagés par la suite en tant qu’agents contractuels, le requérant est le seul à avoir subi les inconvénients résultant de l’article 109, paragraphe 3, du RAA, dans la mesure où il a été le seul à prendre sa retraite avant d’accomplir les trois années de service prévues par cette nouvelle disposition. Le Conseil a également ajouté lors de l’audience, en réponse à une question du Tribunal, que, à la date où il a pris sa retraite, le requérant avait pratiquement atteint l’âge de 65 ans, de telle sorte que son activité n’aurait pas pu être prolongée, même de quelques mois.

46      En dépit de telles circonstances, malencontreuses pour le requérant, et même si le Tribunal reconnaît que, concernant la situation personnelle et unique du requérant, les dispositions de l’article 109, paragraphe 3, du RAA, tenant notamment à la condition d’avoir travaillé pendant trois ans comme agent contractuel, ont entraîné des inconvénients casuels pour celui-ci, qui souffre de ne pouvoir bénéficier de l’allocation de foyer pour le calcul de sa pension d’ancienneté, le Tribunal ne saurait en déduire l’existence d’une inégalité de traitement dès lors que ladite disposition régit de manière objective et non discriminatoire, au regard de l’objectif qu’elle poursuit et tel qu’exposé au point 37 du présent arrêt, des catégories entières d’agents.

47      En tout état de cause, le juge communautaire a eu l’occasion de décider que même si, dans des situations marginales, des inconvénients casuels doivent résulter de l’instauration d’une réglementation générale et abstraite, il ne peut être reproché au législateur d’avoir eu recours à une catégorisation, dès lors qu’elle n’est pas discriminatoire par essence au regard de l’objectif qu’elle poursuit (voir arrêt de la Cour du 16 octobre 1980, Hochstrass/Cour de justice, 147/79, Rec. p. 3005, point 14).

48      Il s’ensuit que le moyen tiré de la violation du principe d’égalité de traitement doit être rejeté comme non fondé.

 Sur la prétendue violation des principes de protection de la confiance légitime et de maintien des droits acquis

49      En ce qui concerne le principe de protection de la confiance légitime, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie, le droit de réclamer la protection de la confiance légitime s’étend à tout particulier pouvant se prévaloir d’assurances précises, inconditionnelles et concordantes fournies par l’administration (arrêts du Tribunal de première instance du 27 février 1996, Galtieri/Parlement, T‑235/94, RecFP p. I‑A‑43 et II‑129, points 63 et 65, ainsi que du 16 mars 2005, Ricci/Commission, T‑329/03, RecFP p. I‑A‑69 et II‑315, point 79 ; arrêt du Tribunal du 21 février 2008, Skoulidi/Commission, F‑4/07, non encore publié au Recueil, point 79).

50      En l’espèce, le Tribunal constate que les divers documents produits par le requérant pour invoquer une violation du principe de protection de la confiance légitime ne sauraient être regardés, au sens de la jurisprudence, comme des assurances précises, inconditionnelles et concordantes que l’administration lui aurait fournies.

51      En effet, en premier lieu, concernant l’attestation délivrée par le SGC en date du 5 mai 2004, selon laquelle une ancienneté conventionnelle fixée au 1er février 1980 était reconnue au requérant, le Tribunal relève qu’il est expressément indiqué dans cette attestation que « [c]ette ancienneté est uniquement prise en compte dans le cas de la participation à des concours internes au sein du [SGC] ».

52      En deuxième lieu, le Tribunal observe que, dans l’article 6 du contrat d’agent contractuel du requérant ayant pris effet le 1er mai 2005, il est effectivement reconnu à celui-ci une ancienneté conventionnelle de trois ans, mais uniquement « aux fins de participer à des concours internes prévus à l’article 3 de l’annexe du RAA ».

53      En troisième lieu, s’agissant de la fiche personnelle du requérant datée du 13 mai 2005, lui reconnaissant explicitement le droit à l’octroi de l’allocation de foyer, il y a lieu de relever que cette fiche concerne la rémunération du requérant lors de son entrée en service en tant qu’agent contractuel le 1er mai 2005. Or, il n’est pas contesté que le requérant, en tant qu’agent contractuel, avait droit au bénéfice de l’allocation de foyer dans le calcul de sa rémunération, dans la mesure où il remplissait la condition prévue à l’article 1er, paragraphe 2, sous a), de l’annexe VII du statut, applicable en vertu des dispositions combinées des articles 19, 20 et 92 du RAA, ainsi que de l’article 67 du statut. Cependant, il découle de la lecture et de l’application des dispositions claires et précises de l’article 109, paragraphe 3, du RAA, qui régit le calcul de la pension d’ancienneté, que le requérant, lorsqu’il a été admis à la retraite, le 28 février 2007, ne remplissait pas les conditions prévues à cet article. Dès lors, au regard de la clarté et de la précision des dispositions susmentionnées, dispositions qui diffèrent selon qu’il s’agit de calculer la rémunération ou la pension d’ancienneté de l’intéressé, le requérant ne saurait arguer que, à partir du moment où il bénéficiait de l’allocation de foyer en tant qu’agent contractuel, ainsi que cela ressort de sa fiche personnelle du 13 mai 2005, il pouvait nourrir, ne seraient-ce que des « attentes raisonnables » quant au bénéfice de l’allocation de foyer pour le calcul de ses droits à la pension d’ancienneté.

54      Il en résulte que, même si les documents relatés aux points 51 et 52 du présent arrêt reflètent effectivement, comme le requérant l’a déclaré lors de l’audience, la longueur de sa relation avec l’institution, il ne saurait être soutenu que l’administration du Conseil aurait fourni au requérant des assurances – et, a fortiori, des assurances précises, inconditionnelles et concordantes – quant au bénéfice de l’allocation de foyer, en vertu de l’article 109, paragraphe 3, du RAA, pour le calcul de ses droits à la pension d’ancienneté.

55      Le grief tiré du principe de maintien des droits acquis ne saurait davantage prospérer. En effet, le requérant dénonce une violation de ses droits acquis en termes de droits à pension, en ce qu’il aurait souffert d’une « privation abrupte » de l’allocation de foyer dont il avait bénéficié pendant son activité. Or, la reconnaissance du droit à l’allocation de foyer pour le calcul de la rémunération du requérant ne lui confère nullement un droit acquis à cette allocation pour le calcul de ses droits à pension, la rémunération et la pension se rapportant à des situations administratives différentes, soumises à des règles différentes.

56      À titre surabondant, le Tribunal fait remarquer que le requérant a acquis ses droits à pension après l’entrée en vigueur de la nouvelle version du statut, le 1er mai 2004. Ainsi, le fait générateur de ses droits est-il intervenu sous l’empire du nouveau régime statutaire et donc de dispositions (celles de l’article 109, paragraphe 3, du nouveau RAA) qui, dès cette date, soumettaient le bénéfice de l’allocation de foyer à la condition que l’agent ait été employé plus de trois ans en tant qu’agent contractuel.

57      En conséquence, le moyen tiré de la violation des principes de protection de la confiance légitime et de maintien des droits acquis ne saurait prospérer et doit donc être rejeté.

 Sur le prétendu défaut de motivation de la décision litigieuse

58      Il résulte de l’article 253 CE et de l’article 25, deuxième alinéa, du statut que toute décision individuelle prise en application du statut et faisant grief doit être motivée. Selon une jurisprudence constante, l’obligation de motivation constitue tant un principe essentiel du droit communautaire qu’une formalité substantielle des actes des institutions et a pour objet, d’une part, de permettre au juge d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision et, d’autre part, de fournir à l’intéressé les indications nécessaires pour savoir si la décision est ou non fondée et lui permettre d’apprécier l’opportunité de l’introduction d’un recours (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 7 mars 2002, Italie/Commission, C‑310/99, Rec. p. I‑2289, point 48, et du 19 septembre 2002, Espagne/Commission, C‑113/00, Rec. p. I‑7601, point 47 ; arrêts du Tribunal de première instance du 20 mars 1991, Pérez-Mínguez Casariego/Commission, T‑1/90, Rec. p. II‑143, point 73 ; du 8 juin 1995, P/Commission, T‑583/93, RecFP p. I‑A‑137 et II‑433, point 24, et du 29 février 1996, Lopes/Cour de justice, T‑280/94, RecFP p. I‑A‑77 et II‑239, point 148).

59      En l’espèce, le Tribunal constate que la décision litigieuse de l’administration du Conseil, émise d’office et non sur demande du requérant, dispose que « [l]’allocation de foyer n’est pas attribuée » et comporte la mention de l’article 109, paragraphe 3, du RAA, lequel ne contient en substance qu’une seule condition, d’avoir été employé plus de trois ans en tant qu’agent contractuel, pour reconnaître le droit à l’allocation de foyer aux fins de calculer les droits à la pension d’ancienneté.

60      Dans ces conditions, à supposer que la décision litigieuse devait, en dépit de la clarté et de la précision de l’article 109, paragraphe 3, du RAA, comporter une motivation allant au-delà de la mention de cette disposition, il n’en demeure pas moins que, dans sa décision du 24 septembre 2007 portant rejet de la réclamation du requérant, le Conseil reprend un à un les griefs soulevés dans la réclamation et fournit de manière explicite et précise les motifs pour lesquels l’allocation de foyer ne saurait être prise en considération aux fins de calculer ses droits à la pension d’ancienneté, ainsi que les raisons pour lesquelles ses griefs ne sauraient être fondés.

61      Dès lors, le Tribunal constate que, suite au rejet de la réclamation, le requérant disposait des indications nécessaires pour savoir si la décision litigieuse était ou non fondée et lui permettre d’apprécier l’opportunité de l’introduction du présent recours, une telle motivation permettant au surplus au Tribunal d’exercer son contrôle sur la légalité de ladite décision.

62      Il s’ensuit que le moyen tiré du défaut de motivation de la décision litigieuse n’est pas fondé.

63      Il résulte de tout ce qui précède que le recours doit être rejeté dans son ensemble, à savoir qu’il y a lieu de rejeter les conclusions visant à l’annulation de la décision litigieuse, ainsi que celles visant à la condamnation du Conseil au paiement de l’allocation de foyer demandée à compter du 1er mars 2007.

 Sur les dépens

64      Aux termes de l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En vertu du paragraphe 2 du même article, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe n’est condamnée que partiellement aux dépens, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.

65      Il résulte des motifs énoncés ci-dessus que le requérant est la partie qui succombe. En outre, le Conseil a, dans ses conclusions, expressément conclu à ce qu’il soit condamné aux dépens. Les circonstances de l’espèce ne justifiant pas l’application des dispositions de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, il y a donc lieu de condamner le requérant aux dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. Bosman supporte l’ensemble des dépens, à savoir ses propres dépens ainsi que ceux du Conseil de l’Union européenne.

Kreppel

Tagaras

Gervasoni

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 25 novembre 2008.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

       S. Gervasoni

Les textes de la présente décision ainsi que des décisions des juridictions communautaires citées dans celle-ci et non encore publiées au Recueil sont disponibles sur le site internet de la Cour de justice : www.curia.europa.eu


* Langue de procédure : le français.