Language of document : ECLI:EU:T:2023:853

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

20 décembre 2023 (*)

« Marque de l’Union européenne – Enregistrement international désignant l’Union européenne – Marque figurative my mochi – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Slogan promotionnel – Article 7, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 2, du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑189/23,

The Mochi Ice Cream Company LLC, établie à Vernon, Californie (États-Unis), représentée par Me A. Zalewska-Orabona, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. J. Ivanauskas, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de M. F. Schalin, président, Mme G. Steinfatt (rapporteure) et M. D. Kukovec, juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, The Mochi Ice Cream Company LLC, demande l’annulation de la décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 30 janvier 2023 (affaire R 1684/2022-2) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 22 avril 2021, la requérante a obtenu auprès du bureau international de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) l’enregistrement international désignant l’Union européenne portant le numéro 1598762 pour la marque figurative suivante :

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3        Les produits pour lesquels la protection dans l’Union européenne a été demandée relèvent de la classe 30 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Crèmes glacées ; produits de confiserie congelés ; produits de confiserie glacés ne contenant pas de produits laitiers ; confiseries congelées végétaliennes ».

4        Le 24 juin 2021, l’EUIPO a reçu notification de l’enregistrement international en cause, en vertu de l’article 3, paragraphe 4, quatrième phrase, du protocole relatif à l’arrangement de Madrid concernant l’enregistrement international des marques, adopté à Madrid le 27 juin 1989 (JO 2003, L 296, p. 22), tel que modifié le 12 novembre 2007.

5        Le 22 juillet 2021, l’examinatrice a émis une décision de refus provisoire de protection dans l’Union de la marque enregistrée dans le registre international pour tous les produits visés au point 3 ci-dessus, sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 2, du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), en conformité avec l’article 193 dudit règlement.

6        Par décision du 30 juin 2022, à la suite des observations présentées par la requérante le 19 novembre 2021, l’examinatrice a confirmé le refus de protection de la marque en cause pour tous les produits visés.

7        Le 29 août 2022, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, lus en combinaison avec l’article 193, paragraphe 6, dudit règlement, contre la décision de l’examinatrice.

8        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours au motif que la marque en cause était dépourvue de caractère distinctif. L’expression « my mochi » serait une formule promotionnelle et les éléments stylisés du signe en cause seraient de nature négligeable et ne conféreraient aucun caractère distinctif à ladite marque.

 Conclusions des parties

9        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

10      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens en cas de convocation d’une audience.

 En droit

11      Au soutien de son recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, lu en combinaison avec l’article 7, paragraphe 2, dudit règlement, dans la mesure où la chambre de recours a conclu que la marque en cause était dépourvue de caractère distinctif pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

12      Ce moyen unique s’articule en deux branches, tirées, la première, de l’appréciation erronée de l’élément verbal composant la marque en cause au regard des produits visés et, la seconde, de l’appréciation erronée de la représentation graphique de cette même marque.

 Sur la première branche du moyen unique, tirée de l’appréciation erronée de l’élément verbal de la marque en cause au regard des produits visés

13      La requérante soutient que la chambre de recours a commis une erreur dans l’appréciation de l’élément verbal composant la marque en cause au regard des produits visés. Dans la mesure où ces produits ne seraient pas des gâteaux mochi, la marque en cause serait dotée d’une certaine originalité et ambiguïté, ce qui déclencherait un processus cognitif dans l’esprit du public pertinent. Le simple fait que la pâte à mochi puisse être utilisée par la requérante comme un ingrédient pour certains de ses produits ne rendrait pas la marque en cause non distinctive.

14      Elle reproche à la chambre de recours d’avoir erronément estimé, au point 23 de la décision attaquée, que l’expression « my mochi » constituait une déclaration purement promotionnelle. Étant donné que l’enregistrement international ne couvre pas les gâteaux mochi, l’expression « my mochi » ne contiendrait aucun élément de nature à véhiculer un message publicitaire et devrait alors être considérée comme étant fantaisiste.

15      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

16      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif. En vertu de l’article 7, paragraphe 2, du même règlement, l’article 7, paragraphe 1, est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de l’Union. Ces principes s’appliquent, selon l’article 189, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 et selon l’article 193, paragraphe 1, dudit règlement, mutatis mutandis aux enregistrements internationaux désignant l’Union européenne également.

17      Le caractère distinctif d’une marque, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent (voir arrêt du 29 avril 2004, Henkel/OHMI, C‑456/01 P et C‑457/01 P, EU:C:2004:258, point 35 et jurisprudence citée). Le caractère distinctif d’une marque, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, signifie que cette marque permet d’identifier le produit pour lequel l’enregistrement est demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit de ceux d’autres entreprises (voir arrêt du 21 janvier 2010, Audi/OHMI, C‑398/08 P, EU:C:2010:29, point 33 et jurisprudence citée).

18      La requérante ne conteste pas les conclusions de la chambre de recours selon lesquelles le public pertinent était le grand public faisant preuve d’un niveau d’attention moyen et selon lesquelles il convenait de limiter l’analyse au grand public en Irlande et à Malte, celui-ci étant anglophone, ainsi qu’au grand public au Danemark, en Suède, en Finlande, aux Pays-Bas et à Chypre, celui-ci ayant au moins une compréhension de base de la langue anglaise.

19      S’agissant de marques composées de signes ou d’indications qui sont par ailleurs utilisés en tant que slogans publicitaires, indications de qualité ou expressions incitant à acheter les produits ou les services visés par ces marques, leur enregistrement n’est pas exclu en raison d’une telle utilisation [arrêts du 21 janvier 2010, Audi/OHMI, C‑398/08 P, EU:C:2010:29, point 35 ; du 22 mars 2017, Hoffmann/EUIPO (Genius), T‑425/16, non publié, EU:T:2017:199, point 26, et du 1er février 2023, Groschopp/EUIPO (Sustainability through Quality), T‑253/22, non publié, EU:T:2023:29, point 22].

20      Quant à l’appréciation du caractère distinctif de telles marques, la Cour a jugé qu’il n’y avait pas lieu d’appliquer à celles-ci des critères plus stricts que ceux applicables à d’autres signes (arrêts du 21 janvier 2010, Audi/OHMI, C‑398/08 P, EU:C:2010:29, point 36, et du 22 mars 2017, Genius, T‑425/16, non publié, EU:T:2017:199, point 27). Ainsi, un minimum de caractère distinctif suffit pour que le motif absolu de refus figurant à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 ne soit pas applicable [voir arrêt du 6 octobre 2021, Kondyterska korporatsiia « Roshen »/EUIPO – Krasnyj Octyabr (Représentation d’un homard), T‑254/20, non publié, EU:T:2021:650, point 116 et jurisprudence citée ; arrêt du 1er février 2023, Sustainability through Quality, T‑253/22, non publié, EU:T:2023:29, point 23].

21      Il ressort cependant de la jurisprudence que si les critères relatifs à l’appréciation du caractère distinctif sont les mêmes pour les différentes catégories de marques, la perception du public pertinent n’est pas nécessairement la même pour chacune de ces catégories et que, dès lors, il pourrait s’avérer plus difficile d’établir le caractère distinctif des marques de certaines catégories que de celles d’autres catégories [voir arrêt du 21 janvier 2010, Audi/OHMI, C‑398/08 P, EU:C:2010:29, point 37 et jurisprudence citée ; arrêt du 25 mai 2016, U-R LAB/EUIPO (THE DINING EXPERIENCE), T‑422/15 et T‑423/15, non publié, EU:T:2016:314, point 47].

22      Une marque constituée d’un slogan publicitaire doit être considérée comme dépourvue de caractère distinctif si elle n’est susceptible d’être perçue par le public pertinent que comme une simple formule promotionnelle [arrêts du 6 juin 2013, Interroll/OHMI (Inspired by efficiency), T‑126/12, non publié, EU:T:2013:303, point 25, et du 22 mars 2017, Genius, T‑425/16, non publié, EU:T:2017:199, point 29]. En particulier, il en est ainsi lorsqu’un signe indique au consommateur une caractéristique des produits ou services visés par celui-ci qui, sans être précise, procède d’une information à caractère promotionnel ou publicitaire que le public pertinent percevra en tant que telle plutôt que comme une indication de l’origine commerciale des produits ou services [arrêts du 17 mars 2016, Mudhook Marketing/OHMI (IPVanish), T‑78/15, non publié, EU:T:2016:155, point 25 ; du 14 juillet 2016, Volkswagen/EUIPO (ConnectedWork), T‑491/15, non publié, EU:T:2016:407, point 32, et du 1er février 2023, Sustainability through Quality, T‑253/22, non publié, EU:T:2023:29, point 27]. Dans la mesure où le public pertinent est peu attentif à l’égard d’un signe qui ne lui donne pas d’emblée une indication sur la provenance ou la destination de ce qu’il souhaite acheter mais plutôt une information exclusivement promotionnelle et abstraite, il ne s’attardera ni à rechercher les différentes fonctions éventuelles de l’expression ni à la mémoriser en tant que marque [voir arrêt du 12 juillet 2023, Fibrecycle/EUIPO (BACK-2-NATURE), T‑772/22, non publié, EU:T:2023:394, point 54 et jurisprudence citée].

23      Au point 23 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que l’expression « my mochi » constituait une déclaration purement promotionnelle à l’attention du consommateur, indiquant que les produits faisant l’objet de la promotion pouvaient être personnalisés et qu’ils contenaient de la pâte à mochi. Selon elle, la combinaison d’un pronom possessif et du nom d’un produit est une formule usuelle dans la publicité qui indique que l’offre est adaptée aux goûts et aux préférences personnels du client.

24      À cet égard, c’est à juste titre que la requérante relève que, pour autant que le public pertinent perçoive la marque en cause comme une indication de l’origine commerciale des produits qu’elle désigne, le fait qu’elle soit simultanément, voire même en premier lieu, appréhendée comme une formule promotionnelle est sans incidence sur son caractère distinctif (voir, en ce sens, arrêts du 21 janvier 2010, Audi/OHMI, C‑398/08 P, EU:C:2010:29, point 45 ; du 12 juillet 2012, Smart Technologies/OHMI, C‑311/11 P, EU:C:2012:460, point 30, et du 1er février 2023, Sustainability through Quality, T‑253/22, non publié, EU:T:2023:29, point 26).

25      Toutefois, le consommateur moyen n’a pas pour habitude de présumer l’origine des produits et services en se fondant sur des slogans (voir arrêt du 25 mai 2016, THE DINING EXPERIENCE, T‑422/15 et T‑423/15, non publié, EU:T:2016:314, point 78 et jurisprudence citée ; arrêt du 1er février 2023, Sustainability through Quality, T‑253/22, non publié, EU:T:2023:29, point 24).

26      Pour le public pertinent en l’espèce, la marque en cause n’est pas susceptible, au regard des produits concernés, d’avoir plusieurs significations, elle ne constitue pas un jeu de mots et n’est pas non plus fantaisiste. Elle ne suscite pas de processus cognitif dans l’esprit du public pertinent et ne nécessitera aucun effort d’interprétation. En effet, comme l’EUIPO le relève à juste titre, le mochi doit être considéré comme un produit de confiserie pouvant également être vendu à l’état congelé, de sorte qu’il relève de l’ensemble des spécifications des produits visés par la marque en cause. Ainsi, en présence de ladite marque, le public pertinent comprendra que les produits en question contiennent ou peuvent contenir comme ingrédient de la pâte à mochi, et qu’il est invité à choisir son parfum préféré et à faire sien son produit préféré en l’achetant. Partant, le public pertinent comprendra le signe en cause dans le sens le plus évident et ne le percevra que comme une simple formule promotionnelle vantant les qualités des produits concernés et non pas comme une désignation de leur origine commerciale.

27      En ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel ce n’est pas la liste des ingrédients qui est déterminante pour conclure qu’un signe est distinctif ou non, mais la perception que les consommateurs pertinents ont de la marque, il y a lieu de préciser que, dans la mesure où les ingrédients d’un produit alimentaire jouent un rôle pour caractériser celui-ci, l’indication d’un tel ingrédient crée un lien direct avec les produits en cause dans l’esprit du public pertinent.

28      Par ailleurs, le fait qu’un signe soit dépourvu de caractère distinctif par rapport à une partie seulement des produits ou des services relevant d’une catégorie mentionnée en tant que telle dans la demande d’enregistrement n’empêche pas que cette demande soit rejetée, dès lors que, dans le cas contraire, rien n’empêcherait son titulaire de l’utiliser également pour les produits ou les services de la catégorie de produits visée par son enregistrement, pour lesquels il ne présente pas un caractère distinctif [voir arrêt du 14 décembre 2011, Vuitton Malletier/OHMI – Friis Group International (Représentation d’un dispositif de verrouillage), T‑237/10, non publié, EU:T:2011:741, point 32 et jurisprudence citée].

29      Ainsi, étant donné que les « crèmes glacées » incluent les crèmes glacées recouvertes de pâte à mochi, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que la protection de l’enregistrement international dans l’Union se heurtait au motif absolu d’absence de caractère distinctif pour l’ensemble des produits visés.

30      Partant, il y a lieu de rejeter la première branche du moyen unique.

 Sur la seconde branche du moyen unique, tirée de l’appréciation erronée de la représentation graphique de la marque en cause

31      La requérante soutient que les éléments figuratifs de la marque en cause, même si on les considère comme minimes ou purement décoratifs, suffisent pour que ladite marque serve d’indication d’origine.

32      La chambre de recours n’aurait pas correctement apprécié l’incidence de la stylisation et des éléments figuratifs de la marque en cause sur l’impression d’ensemble qu’elle produit. Ladite marque présenterait une stylisation qui aurait pour effet d’évoquer une marque antérieure détenue par la requérante, à savoir l’enregistrement international désignant l’Union européenne no 1371790 pour la marque MY/MO. Ainsi, le consommateur l’associerait instantanément à cette marque antérieure, à la requérante et aux produits en cause.

33      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

34      S’agissant de la représentation graphique du signe en cause et de sa typographie, force est de constater qu’elles ne sont pas inhabituelles et ne donnent pas au signe dans son ensemble un caractère distinctif. En effet, le signe en cause contient, comme la chambre de recours l’a constaté au point 27 de la décision attaquée, certains éléments stylisés, consistant en les mots « my » et « mochi » écrits sur des lignes différentes dans une police de caractères spécifique. Toutefois, cette stylisation n’a qu’un impact négligeable sur l’impression d’ensemble produite par la marque en cause.

35      Les spécificités visuelles invoquées par la requérante, telles que l’arrangement des lettres sur deux lignes et la division de la lettre « y » en deux parties pour évoquer une barre oblique, sont plutôt banales. En particulier, l’espace entre les deux lignes formant la lettre « y » est minime, de sorte qu’il n’empêche pas le consommateur de reconnaître immédiatement ladite lettre et qu’il n’y verra rien d’inhabituel. Ainsi, ces éléments ne sont pas de nature à conférer à la marque en cause un caractère distinctif.

36      Ne saurait non plus prospérer l’argument de la requérante selon lequel le consommateur établira le lien entre la requérante, sa marque antérieure et les produits visés par la marque en cause. En effet, la requérante n’a pas démontré que cette marque antérieure était effectivement connue du public pertinent. Or, cette connaissance est indispensable pour que le public pertinent puisse établir le lien invoqué par la requérante. Le seul fait que la marque antérieure ait été enregistrée dans l’Union en 2017 ne prouve pas que les consommateurs dans l’Union la connaissent.

37      Il s’ensuit que c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a estimé que la marque en cause était dépourvue de caractère distinctif.

38      Cette conclusion ne saurait être remise en question par l’argument de la requérante selon lequel l’enregistrement international a été enregistré dans certains pays anglophones situés en dehors de l’Union, comme l’Australie et les États-Unis, et selon lequel des marques similaires ont également été acceptées par l’EUIPO.

39      S’agissant de l’enregistrement du même signe dans des pays tiers, il suffit de rappeler, à l’instar de l’EUIPO, que celui-ci n’est pas lié par des décisions nationales émises notamment dans des pays ne faisant pas partie de l’Union et où les décisions sont, a priori, soumises à des règles différentes. En effet, il résulte de la jurisprudence que le régime des marques de l’Union européenne est un système autonome constitué d’un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont spécifiques, son application étant indépendante de tout système national. Par conséquent, le caractère enregistrable d’un signe en tant que marque de l’Union européenne ne doit être apprécié que sur le fondement de la réglementation de l’Union pertinente. Dès lors, l’EUIPO et le juge de l’Union ne sont pas liés par une décision intervenue au niveau d’un État membre, voire d’un pays tiers, admettant le caractère enregistrable de ce même signe en tant que marque nationale. Tel est le cas même si une telle décision a été prise en application d’une législation nationale dans un pays appartenant à la zone linguistique dans laquelle le signe verbal en cause trouve son origine [voir, par analogie, arrêt du 27 février 2002, Streamserve/OHMI (STREAMSERVE), T‑106/00, EU:T:2002:43, point 47 et jurisprudence citée].

40      Par ailleurs, en ce qui concerne l’enregistrement d’autres signes dans l’Union, il y a lieu de rappeler que, dans le cadre de son contrôle de légalité, le Tribunal n’est pas lié par la pratique décisionnelle de l’EUIPO [arrêts du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, EU:C:2007:252, point 65, et du 22 avril 2008, Casa Editorial el Tiempo/OHMI – Instituto Nacional de Meteorología (EL TIEMPO), T‑233/06, non publié, EU:T:2008:121, point 48].

41      L’EUIPO est certes tenu d’exercer ses compétences en conformité avec les principes d’égalité de traitement et de bonne administration (arrêt du 28 juin 2018, EUIPO/Puma, C‑564/16 P, EU:C:2018:509, point 60). Eu égard auxdits principes, l’EUIPO doit prendre en considération les décisions qu’il a déjà adoptées sur des demandes similaires et s’interroger avec une attention particulière sur la question de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens, l’application de ces principes devant être conciliée avec le respect du principe de légalité, ce qui implique que l’examen de toute demande d’enregistrement doit être strict et complet et avoir lieu dans chaque cas concret (arrêt du 28 juin 2018, EUIPO/Puma, C‑564/16 P, EU:C:2018:509, point 61).

42      Toutefois, en l’espèce, ainsi qu’il ressort des points 29 et 37 ci-dessus, la chambre de recours a considéré à bon droit que la protection de l’enregistrement international de la marque en cause dans l’Union se heurtait au motif absolu de refus visé à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, et a réalisé un examen complet à cet égard, de sorte que la requérante ne saurait utilement invoquer, aux fins d’infirmer cette conclusion, des décisions antérieures de l’EUIPO.

43      Par ailleurs, la chambre de recours a indiqué que les marques mentionnées par la requérante différaient de la marque en cause non seulement par leurs éléments figuratifs distinctifs, mais aussi par la combinaison de mots qui était plus vague, abstraite ou plus évocatrice. Elle a également fait remarquer que les produits désignés par ces marques n’étaient pas nécessairement similaires aux produits couverts par l’enregistrement international en cause.

44      Il s’ensuit que la chambre de recours s’est interrogée avec l’attention particulière requise sur la question de savoir s’il y avait lieu ou non de décider dans le même sens. À cet égard, il n’était pas nécessaire pour la chambre de recours d’analyser expressément les marques antérieures une par une et de fournir des arguments détaillés pour chacune d’entre elles. En effet, il ressort de la jurisprudence que la chambre de recours n’est pas obligée de prendre position sur tous les arguments avancés par les parties, mais qu’il lui suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision [voir, en ce sens, arrêt du 29 novembre 2016, Chic Investments/EUIPO (eSMOKING WORLD) T‑617/15, non publié, EU:T:2016:679, point 102].

45      Partant, il y a lieu de rejeter la seconde branche du moyen unique et, par voie de conséquence, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

46      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

47      Bien que la requérante ait succombé, l’EUIPO n’a conclu à la condamnation de celle-ci aux dépens qu’en cas de convocation d’une audience. En l’absence d’organisation d’une audience, il convient de décider que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Chaque partie supportera ses propres dépens.

Schalin

Steinfatt

Kukovec

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 20 décembre 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.