Language of document : ECLI:EU:F:2015:53

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (première chambre)

9 juin 2015 (*)

« Fonction publique – Personnel du SEAE – Fonctionnaires – Exercice de promotion 2013 – Décision de ne pas promouvoir le requérant au grade AD 13 – Objection du requérant à la liste des fonctionnaires proposés à la promotion – Article 45 du statut – Minimum de deux ans d’ancienneté dans le grade – Calcul du délai de deux ans – Date de la décision de promotion »

Dans l’affaire F‑65/14,

ayant pour objet un recours introduit au titre de l’article 270 TFUE, applicable au traité CEEA en vertu de son article 106 bis,

EF, fonctionnaire du Service européen pour l’action extérieure, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par Mes L. Levi et N. Flandin, avocats,

partie requérante,

contre

Service européen pour l’action extérieure (SEAE), représenté par M. S. Marquardt et Mme M. Silva, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(première chambre),

composé de MM. R. Barents (rapporteur), président, E. Perillo et J. Svenningsen, juges,

greffier : M. P. Cullen, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 20 janvier 2015,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 14 juillet 2014, EF a introduit le présent recours tendant à l’annulation des décisions de l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci‑après l’« AIPN ») du Service européen pour l’action extérieure (SEAE), des 9 et 14 octobre 2013, de ne pas le promouvoir au grade AD 13 au titre de l’exercice de promotion pour l’année 2013 (ci‑après l’« exercice de promotion 2013 »).

 Cadre juridique

2        Le cadre juridique de la présente affaire est constitué de l’article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, de l’article 296, paragraphe 2, TFUE, de l’article 25, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur du règlement (UE, Euratom) no 1023/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2013, modifiant le statut des fonctionnaires de l’Union européenne et le régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (ci‑après le « statut ») et de l’article 45 du statut.

3        La décision HR DEC(2012) 011 du haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité du 18 octobre 2012, adoptant une procédure de promotion aux fins de l’application de l’article 45 du statut (ci‑après la « décision du 18 octobre 2012 »), prévoit en son article 2 :

« Pour être promouvables, les fonctionnaires doivent :

–        avoir un minimum de deux ans d’ancienneté dans leur grade, acquis au plus tard le 30 [n]ovembre de l’année de l’exercice de promotion ;

[…] »

4        L’article 4, paragraphe 1, de la décision du 18 octobre 2012 prévoit :

« L’exercice de promotion de l’année N sera lancé dès que l’exercice d’évaluation de l’année N‑1 aura été clôturé. »

5        L’article 4, paragraphe 10, de la décision du 18 octobre 2012 prévoit :

« La promotion sera effective le 1er [j]anvier de l’année de l’exercice de promotion ou, en accord avec l’[a]rticle 2, […] premier tiret, [de la décision du 18 octobre 2012,] à la date à laquelle les fonctionnaires auront atteint le minimum [de deux ans] d’ancienneté dans leur grade. »

6        La décision du directeur de la direction « Ressources humaines » du SEAE du 10 juin 2013, lançant l’exercice de promotion 2013 (ci‑après la « décision du 10 juin 2013 »), prévoit :

« […] La [c]ommission de [p]romotion appliquera les trois critères tels que définis à l’art[icle] 45 du [s]tatut : les rapports de notation, l’utilisation des langues et le niveau des responsabilités exercées par le fonctionnaire. La délégation des représentants du personnel sera impliquée dans la procédure et consultée quant aux propositions de promotion de la [c]ommission de [p]romotion avant l’adoption de la décision définitive par l’[AIPN].

Cet exercice de promotion 2013 inclut tous les fonctionnaires en activité au sein du SEAE au 1er [j]anvier 2013 et qui ont atteint ou atteindront l’ancienneté minimum de 24 mois dans le[ur] grade au plus tard le 30 [n]ovembre 2013.

[…] »

 Faits à l’origine du litige

7        Le requérant est entré au service de la Commission des Communautés européennes en tant que fonctionnaire en 1995 et est affecté au SEAE depuis le 1er janvier 2011. Il est fonctionnaire de grade AD 12 depuis le 1er janvier 2009.

8        Jusqu’au 31 août 2010, le requérant a été l’assistant du directeur général adjoint de la direction générale (DG) « Relations extérieures » de la Commission. Ensuite, il a été chef adjoint de la division « Politiques régionales pour la Méditerranée du Sud » du SEAE, et ce jusqu’au 15 septembre 2011. Depuis cette date, il occupe le poste de responsable du bureau « Argentine ». Depuis le départ à la retraite du responsable du bureau « Venezuela », le 31 octobre 2012, le requérant en est aussi devenu le responsable.

9        Dans le mois qui a suivi la décision du 10 juin 2013, la liste des fonctionnaires promouvables, sur laquelle figurait le nom du requérant, a été publiée au sein du SEAE.

10      Le 19 juillet 2013, la commission de promotion a établi à l’attention de l’AIPN la liste des fonctionnaires proposés à la promotion. Le nom du requérant n’était plus repris sur cette liste.

11      Le 5 septembre 2013, conformément à l’article 4, paragraphe 7, de la décision du 18 octobre 2012, le requérant a introduit auprès du comité paritaire de promotion une objection contre la liste des fonctionnaires proposés à la promotion par la commission de promotion.

12      À l’appui de son objection, le requérant a fait référence aux trois seuls critères définis à l’article 45 du statut et mis en exergue les commentaires élogieux qui figuraient dans ses rapports d’évaluation, l’utilisation dans ses fonctions de quatre langues, le niveau des responsabilités qu’il avait exercées et notamment le fait qu’il assumait simultanément les responsabilités du bureau « Argentine » et du bureau « Venezuela » et, pour finir, le fait qu’au 30 novembre 2013 il aurait 59 mois d’ancienneté dans le grade AD 12, ce qui est supérieur à la moyenne constatée au sein du SEAE.

13      Le 9 octobre 2013, l’AIPN a publié la liste des fonctionnaires promus au titre de l’exercice de promotion 2013, sur laquelle le nom du requérant ne figurait pas.

14      Le 14 octobre 2013, le requérant a reçu un courrier électronique l’informant que le comité paritaire de promotion n’avait pas donné suite à son objection.

15      Le 23 décembre 2013, le requérant a introduit une réclamation, en vertu de l’article 90, paragraphe 2, du statut, à l’encontre des décisions des 9 et 14 octobre 2013. Le 16 avril 2014, cette réclamation a été rejetée par l’AIPN (ci‑après la « décision de rejet de la réclamation »).

16      Le 19 mai 2014, le requérant a demandé à l’AIPN de lui donner des explications sur le rejet de sa réclamation et a réitéré la demande qu’il avait faite dans sa réclamation, demande restée sans réponse, de lui fournir une copie anonymisée du procès‑verbal des travaux de la commission de promotion pour le groupe de fonctions des administrateurs (AD) et notamment de l’avis dans lequel ladite commission avait proposé à l’AIPN de ne le pas promouvoir au grade AD 13 au titre de l’exercice de promotion 2013. Par lettre du 25 juin 2014, l’AIPN a refusé de faire droit à ces demandes.

 Conclusions des parties

17      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les décisions des 9 et 14 octobre 2013 de ne pas le promouvoir au grade AD 13 au titre de l’exercice de promotion 2013 ;

–        pour autant que de besoin, annuler la décision de rejet de la réclamation ;

–        réparer son préjudice matériel ;

–        au titre de mesures d’organisation de la procédure, inviter le SEAE : i) à produire une copie anonymisée du procès‑verbal des travaux de la commission de promotion pour le groupe de fonctions AD et notamment l’avis dans lequel il a été proposé de ne pas le promouvoir au grade AD 13 au titre de l’exercice de promotion 2013, et ii) à répondre aux questions suivantes :

« Les [20] extraits de rapports d’évaluation cités dans la décision de rejet de la réclamation concernent‑ils [20] personnes différentes ? Dans l’hypothèse où ces [20] extraits concerneraient [20] rapports de notation différents, et sachant que 49 fonctionnaires [de grade] AD 12 ont été promus [au grade] AD 13, quelle a été l’évaluation des au moins [29] autres fonctionnaires ? » ;

–        condamner le SEAE aux dépens.

18      Le SEAE conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme partiellement irrecevable et partiellement non fondé ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

 Sur les conclusions en annulation des décisions des 9 et 14 octobre 2013 de ne pas promouvoir le requérant au grade AD 13 au titre de l’exercice de promotion 2013

19      À l’appui de son recours, le requérant invoque trois moyens : un premier moyen, tiré, à titre principal, de l’exception d’illégalité de l’article 2, premier tiret, de la décision du 18 octobre 2012, de l’article 4, paragraphe 10, de la décision du 18 octobre 2012 et de l’exception d’illégalité de la décision du 10 juin 2013 et, à titre subsidiaire, de l’illégalité de la décision du 9 octobre 2013 établissant la liste des fonctionnaires promus au titre de l’exercice de promotion 2013 et sur laquelle le nom du requérant ne figurait pas, en ce qu’elle promeut des fonctionnaires ayant deux ans d’ancienneté dans le grade au 30 novembre 2013 ; un deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 45 du statut, de l’erreur manifeste d’appréciation dans l’examen comparatif des mérites et de la violation des principes de bonne administration et de sollicitude ; et un troisième moyen, tiré de la violation de l’article 296, paragraphe 2, TFUE, de l’article 25, paragraphe 2, du statut et de l’article 41 de la Charte.

 Sur le premier moyen soulevé à titre principal, tiré de l’exception d’illégalité de l’article 2, premier tiret, de la décision du 18 octobre 2012, de l’article 4, paragraphe 10, de la décision du 18 octobre 2012 et de l’exception d’illégalité de la décision du 10 juin 2013

–       Arguments des parties

20      Selon le requérant, le minimum de deux ans d’ancienneté dans le grade, tel que prescrit par l’article 45 du statut, s’entendrait comme le minimum d’ancienneté dans le grade acquis à la fin de l’année précédant celle durant laquelle est lancé l’exercice de promotion, à savoir, en l’espèce, deux ans d’ancienneté dans le grade acquis au 31 décembre 2012 et non au 30 novembre 2013, comme le prévoient l’article 2, premier tiret, de la décision du 18 octobre 2012 ainsi que la décision du 10 juin 2013. L’âge des candidats à la promotion et leur ancienneté dans le grade ne pourraient être considérés que sur des périodes révolues et non sur des périodes durant lesquelles l’exercice de promotion est lui‑même en cours ou sur des périodes postérieures à la clôture de l’exercice de promotion. Selon lui, toute autre interprétation viderait l’exercice de promotion de son effet utile. Le requérant note, en outre, que la date du 30 novembre 2013 ne serait pas autrement justifiée et, a fortiori, pas de façon objective.

21      Le requérant souligne que la question de la computation du délai d’ancienneté dans le grade n’aurait pas, jusqu’à présent, été clarifiée par la jurisprudence. Dans l’ordonnance Brüggemann/CES (248/86, EU:C:1987:429), la Cour de justice de l’Union européenne aurait considéré que le délai de deux ans commençait à courir à compter de la titularisation de l’intéressé. Dans les arrêts Casini/Commission (T‑132/03, EU:T:2005:324) et Balabanis et Le Dour/Commission (F‑77/05, EU:F:2006:127), le Tribunal de première instance des Communautés européennes et le Tribunal auraient considéré, en faisant référence à l’ordonnance Brüggemann/CES (EU:C:1987:429), que l’ancienneté minimum de deux ans dans un grade devait être calculée à partir de la date de la décision de promotion. Toutefois, toujours selon le requérant, la référence dans ces deux derniers arrêts à l’ordonnance Brüggemann/CES (EU:C:1987:429) serait erronée parce que, dans cette ordonnance, la Cour se serait prononcée, afin de calculer le délai, en faveur de la date de titularisation et non de la date de la décision de promotion. Dès lors, demeurerait la question de savoir si la computation du délai de deux ans peut se faire en prenant en compte l’année de l’exercice de promotion en cours ou bien si elle ne peut dépasser l’année N‑1 de l’exercice de promotion ou bien encore si elle peut se faire avant ou après la clôture de l’exercice de promotion. Selon le requérant, il ressortirait de l’esprit même de l’article 45 du statut que l’ancienneté dans le grade ne peut dépasser l’année N‑1 de l’exercice de promotion en cours. En outre, en fixant la limite de la période utile pour satisfaire à la condition de deux ans d’ancienneté au 30 novembre 2013, soit au‑delà de la dernière période d’évaluation, le SEAE porterait atteinte au principe de non‑discrimination en permettant à des fonctionnaires qui n’avaient pas l’ancienneté requise au 31 décembre 2012 d’être inclus dans l’exercice de promotion 2013.

22      Selon le SEAE, les exceptions d’illégalité soulevées sont irrecevables, le requérant n’ayant pas d’intérêt à l’annulation des deux décisions attaquées. Même si le SEAE avait pris une autre date que le 30 novembre 2013 comme date de référence, ce n’est pas pour autant que le requérant aurait nécessairement été promu. Le SEAE conclut, à titre subsidiaire, au rejet du premier moyen soulevé à titre principal.

23      Le SEAE fait également valoir que le recours contre la décision du 14 octobre 2013 est irrecevable, dès lors que l’acte faisant grief au requérant serait la décision du 9 octobre 2013, par laquelle l’AIPN a adopté la liste finale des fonctionnaires promus.

–       Appréciation du Tribunal

24      En vertu d’une jurisprudence constante, le juge de l’Union est en droit d’apprécier, suivant les circonstances de l’espèce, si une bonne administration de la justice justifie de rejeter au fond le recours, sans statuer préalablement sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par la partie défenderesse (voir, en ce sens, arrêts Conseil/Boehringer, C‑23/00 P, EU:C:2002:118, points 51 et 52 ; France/Commission, C‑233/02, EU:C:2004:173, point 26 ; Regione autonoma della Sardegna/Commission, T‑171/02, EU:T:2005:219, point 155 ; Bordini/Commission, F‑134/06, EU:F:2008:40, point 56 ; AZ/Commission, F‑26/10, EU:F:2011:163, point 34, et AM/Parlement, F‑100/10, EU:F:2012:24, points 47 et 48).

25      Dans les circonstances de l’espèce et dans un souci d’économie de la procédure, il y a lieu d’examiner d’emblée les moyens de fond invoqués par le requérant dans le cadre du présent recours, sans statuer préalablement sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par le SEAE, le recours étant, en tout état de cause et pour les motifs exposés ci‑après, dépourvu de fondement.

26      En effet, il ressort clairement de l’article 45 du statut que seuls les fonctionnaires justifiant d’un minimum d’ancienneté de deux ans dans leur grade ont vocation à la promotion. Cette disposition ne prévoit pas, comme condition supplémentaire, le fait que les deux ans d’ancienneté exigés doivent aussi coïncider exactement avec la période de deux ans couverte par deux rapports d’évaluation annuels, rapports d’évaluation annuels dont chaque fonctionnaire fait en principe l’objet pour la période correspondant à l’année civile.

27      Or, il est constant que, selon la jurisprudence, la date de la décision de promotion constitue la date pertinente pour apprécier si le fonctionnaire justifie du minimum d’ancienneté requis pour être éligible à une promotion (arrêts Casini/Commission, EU:T:2005:324, point 84, et Balabanis et Le Dour/Commission, EU:F:2006:127, point 35).

28      S’agissant ensuite de l’argument du requérant tiré de l’ordonnance Brüggemann/CES (EU:C:1987:429), il convient de relever que celui‑ci repose sur une lecture manifestement erronée de celle‑ci. Il ressort en effet du point 8 de cette ordonnance que, pour calculer l’ancienneté requise de deux ans dans le grade, la Cour s’est placée à la date de la décision de promotion, pour constater ensuite que, deux ans avant cette décision, le requérant n’avait pas encore été titularisé et que, par conséquent, il ne disposait pas encore, à la date de la décision de promotion, du minimum d’ancienneté requis et donc qu’une telle décision ne pouvait pas lui faire grief.

29      Par ailleurs, l’article 45 du statut n’exige pas que la date à laquelle doit être satisfaite la condition d’ancienneté coïncide nécessairement avec la fin de la période d’évaluation couverte par le rapport d’évaluation annuel. L’article 4, paragraphe 1, de la décision du 18 octobre 2012 prévoit que l’exercice de promotion est lancé une fois que l’exercice d’évaluation qui concerne l’année N‑1, donc en l’espèce l’année 2012, est terminé. Or, le choix de la date du 30 novembre 2013 comme date à laquelle la condition d’ancienneté doit ou devra être satisfaite n’a aucune influence sur l’évaluation des fonctionnaires promouvables, laquelle repose sur leurs prestations sur la ou les années civiles précédentes.

30      Ensuite, l’argument du requérant selon lequel le choix de la date du 30 novembre 2013 porte atteinte au principe de non‑discrimination en permettant à des fonctionnaires qui n’avaient pas l’ancienneté requise au 31 décembre 2012 de figurer sur la liste des fonctionnaires promouvables dans le cadre de l’exercice de promotion 2013 doit être écarté comme inopérant. En effet, le requérant n’a pas été exclu de l’exercice de promotion en cause puisqu’il figurait sur ladite liste. Par conséquent, la participation à l’exercice de promotion 2013 d’autres fonctionnaires ayant comme lui au moins deux ans d’ancienneté dans le grade à la date du 30 novembre 2013, fixée par la décision du 10 juin 2013, ne saurait l’avoir placé dans une situation moins favorable ou différente par rapport à ces autres fonctionnaires.

31      À titre surabondant, il y a lieu d’observer que, dans la décision de rejet de la réclamation, l’AIPN a affirmé que toutes les personnes promues au 9 octobre 2013 avaient déjà deux ans d’ancienneté dans le grade à cette date.

32      Il s’ensuit que le premier moyen soulevé à titre principal doit être rejeté.

  Sur le premier moyen soulevé à titre subsidiaire, tiré de l’illégalité de la décision du 9 octobre 2013 établissant la liste des fonctionnaires promus

–       Arguments des parties

33      Selon le requérant, la décision du 9 octobre 2013 serait de toute façon illégale dans la mesure où elle aurait refusé la promotion du requérant et où elle aurait promu des fonctionnaires qui pouvaient ne remplir la condition de deux ans d’ancienneté dans le grade que le 30 novembre 2013 et non le 9 octobre 2013. Le requérant note que la décision de rejet de la réclamation confirmerait qu’au moment du lancement de la procédure de promotion, soit le 10 juin 2013, voire même à la date à laquelle la commission de promotion a établi la liste de ses propositions de promotions, soit le 19 juillet 2013, il y avait au moins un fonctionnaire qui n’avait pas deux ans d’ancienneté dans le grade et que, partant, la commission de promotion aurait évalué et proposé à la promotion au moins un fonctionnaire qu’elle n’aurait pas été, en principe, en mesure d’évaluer.

34      Le SEAE conclut au rejet du premier moyen soulevé à titre subsidiaire.

–       Appréciation du Tribunal

35      Le premier moyen soulevé à titre subsidiaire est fondé sur la prémisse que la date à laquelle la condition d’ancienneté devait être satisfaite était soit le 10 juin soit le 19 juillet 2013.

36      Ainsi qu’il a été observé au point 27 du présent arrêt, une telle prémisse est erronée étant donné que la date de la décision de promotion constitue la date pertinente pour apprécier si le fonctionnaire justifie du minimum d’ancienneté requis pour être éligible à une promotion.

37      Il y a également lieu d’observer que, dans la décision de rejet de la réclamation, l’AIPN a affirmé que toutes les personnes promues au 9 octobre 2013 avaient déjà deux ans d’ancienneté à cette date.

38      Il s’ensuit que le premier moyen soulevé à titre subsidiaire doit lui aussi être écarté.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 45 du statut, de l’erreur manifeste d’appréciation lors de l’examen comparatif des mérites et de la violation des principes de bonne administration et de sollicitude

–       Arguments des parties

39      Le requérant soutient que l’AIPN, en se fondant sur la décision du 18 octobre 2012, elle‑même entachée d’illégalité, a commis une erreur manifeste d’appréciation dans la mesure où elle aurait procédé à un examen des mérites sur une base non égalitaire et à partir de renseignements non comparables, puisque les fonctionnaires examinés n’avaient pas tous nécessairement le minimum d’ancienneté de deux ans dans le grade. L’erreur d’appréciation de l’AIPN, qui serait aisément perceptible eu égard au critère du minimum d’ancienneté de deux ans dans le grade établi par l’article 45 du statut, serait d’autant plus manifeste au vu des rapports d’évaluation dont il a fait l’objet, de l’utilisation par le requérant de langues autres que l’anglais et du niveau des responsabilités exercées dans ses fonctions. Dans sa requête, le requérant développe ces trois éléments de façon détaillée par référence à la motivation de la décision de rejet de la réclamation. Enfin, le requérant estime que l’AIPN aurait manqué à ses devoirs de bonne administration et de sollicitude en prenant en compte dans son exercice d’évaluation un critère illégal, celui des deux ans d’ancienneté calculés jusqu’au 30 novembre 2013.

40      Le SEAE conclut au rejet du deuxième moyen.

–       Appréciation du Tribunal

41      Au vu des considérations qui précèdent concernant le premier moyen soulevé à titre principal et le premier moyen soulevé à titre subsidiaire, l’argument du requérant selon lequel l’AIPN aurait commis une erreur manifeste d’appréciation puisque les fonctionnaires examinés n’avaient pas tous nécessairement le minimum de deux ans d’ancienneté dans le grade doit être écarté. La même conclusion s’impose en ce qui concerne l’argument selon lequel l’AIPN aurait violé ses devoirs de bonne administration et de sollicitude en prenant en compte dans son exercice d’évaluation le critère des deux ans d’ancienneté calculés jusqu’au 30 novembre 2013.

42      En ce qui concerne la prétendue erreur d’appréciation des mérites du requérant, il y a lieu d’observer que l’AIPN reconnaît que les commentaires de son évaluateur et de son validateur font état de la qualité de son travail tant au niveau de son rendement que de ses compétences et de sa conduite dans le service.

43      Toutefois, le fait qu’un fonctionnaire ait des mérites évidents et reconnus n’exclut pas, dans le cadre de l’examen comparatif des mérites des candidats à la promotion, que d’autres fonctionnaires aient des mérites égaux ou supérieurs (arrêts Cubero Vermurie/Commission, C‑446/00 P, EU:C:2001:703, point 21 ; Morello/Commission, T‑164/00, EU:T:2002:312, point 100, et Trentea/FRA, F‑112/10, EU:F:2012:179, point 104).

44      Or, le Tribunal estime qu’il ressort des passages des rapports d’évaluation de fonctionnaires promus qui sont cités dans la décision de rejet de la réclamation et dans le mémoire en défense que le SEAE, en estimant que les mérites de ces fonctionnaires étaient supérieurs à ceux du requérant, n’a pas commis une erreur manifeste d’appréciation, c’est‑à‑dire une erreur aisément perceptible pouvant être détectée à l’évidence.

45      La même conclusion s’impose concernant la considération relative au critère de l’utilisation des langues selon laquelle la maîtrise des langues anglaise et française est, en règle générale, suffisante pour les besoins fonctionnels du SEAE et que, partant, l’utilité de la maîtrise d’autres langues est secondaire.

46      En ce qui concerne les responsabilités du requérant dans ses fonctions tant d’assistant du directeur général adjoint de la DG « Relations extérieures » de la Commission que de chef adjoint de la division « Politiques régionales pour la Méditerranée du Sud » du SEAE, celui‑ci n’a pas démontré que la considération du SEAE selon laquelle ces responsabilités sont du niveau de celles qui sont exercées habituellement par un fonctionnaire de grade AD 12 et que, partant, elles ne sauraient être appréciées comme particulièrement méritoires pour une promotion est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.

47      Il s’ensuit que le deuxième moyen doit être rejeté.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 296, paragraphe 2, TFUE, de l’article 25, paragraphe 2, du statut et de l’article 41 de la Charte

–       Arguments des parties

48      Le requérant observe que la liste des fonctionnaires promus ne contient aucune motivation. Sur base du principe général de bonne administration, le requérant estime que la transmission de la motivation de la décision rejetant l’objection qu’il avait formée et confirmant la non‑promotion serait, en l’espèce, tout à fait justifiée. Premièrement, la décision du 14 octobre 2013 aurait une formulation générale et stéréotypée, ce qui serait contraire à la jurisprudence. Deuxièmement, la décision de non‑promotion constituerait une décision lui faisant grief. Troisièmement, si un fonctionnaire non promu veut pouvoir exercer son droit de vérification du bien‑fondé de la décision de non‑promotion, il serait obligé de déposer une réclamation. Quatrièmement, le requérant observe que, selon la jurisprudence, l’obligation de motivation s’imposerait dès la première décision dans des situations présentant un contexte factuel particulier dans lequel la personne avait un intérêt légitime. À cet égard, le requérant fait état des questions soulevées dans sa réclamation auxquelles l’AIPN n’aurait pas répondu ou à propos desquelles elle se serait contentée d’émettre des considérations générales, ce qui équivaudrait à une absence de motivation. Partant, même en prenant en considération la décision de rejet de la réclamation, l’obligation de motivation aurait été méconnue. Enfin, le requérant fait valoir qu’au vu du contexte particulier que représente le statut tel que modifié par le règlement no 1023/2013, sur base duquel une prochaine promotion dépendrait désormais d’une procédure tout à fait spécifique, il aurait un intérêt légitime à recevoir la motivation de la décision de ne pas le promouvoir.

49      Le SEAE conclut au rejet du troisième moyen.

–       Appréciation du Tribunal

50      Il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’AIPN n’est pas tenue de motiver les décisions de promotion à l’égard des candidats évincés. Néanmoins, l’AIPN doit motiver sa décision portant rejet d’une réclamation déposée, en vertu de l’article 90, paragraphe 2, du statut, par un candidat non promu, la motivation de cette décision de rejet étant censée coïncider avec la motivation de la décision contre laquelle la réclamation était dirigée (arrêts Contargyris/Conseil, T‑6/96, EU:T:1997:76, point 147, et Merhzaoui/Conseil, F‑18/09, EU:F:2011:180, point 71, et la jurisprudence citée).

51      II est aussi de jurisprudence constante que, les promotions se faisant, aux termes de l’article 45 du statut, « au choix », la motivation ne saurait concerner que l’existence des conditions légales auxquelles le statut subordonne la régularité de la promotion. En particulier, l’AIPN n’est pas tenue de révéler au candidat écarté l’appréciation comparative qu’elle a portée sur lui et sur les candidats retenus pour la promotion (arrêt Contargyris/Conseil, EU:T:1997:76, point 148).

52      Or, en l’espèce, la décision de rejet de la réclamation contenait, en réponse aux différentes questions soulevées dans la réclamation, des précisions suffisantes pour permettre au requérant de comprendre le raisonnement du SEAE quant à la décision de non‑promotion et, par suite, d’apprécier l’opportunité d’introduire un recours devant le Tribunal. En effet, la décision de rejet de la réclamation mentionnait bien, premièrement, que l’AIPN considérait que les mérites de chacun des fonctionnaires promus étaient supérieurs à ceux du requérant tout en citant également des passages des rapports d’évaluation de certains fonctionnaires promus, deuxièmement, concernant le critère de l’utilisation des langues, que les fonctionnaires au sein du SEAE et de même grade que le requérant utilisaient fréquemment deux ou trois langues autres que leur langue maternelle et, troisièmement, que le niveau des responsabilités et les tâches accomplies par le requérant correspondaient pleinement au niveau des responsabilités d’un fonctionnaire de grade AD 12 et ne sauraient être considérés comme particulièrement méritoires.

53      Il s’ensuit qu’en l’espèce les exigences concernant la motivation ont été respectées. Partant, l’argument tiré du statut tel que modifié par le règlement no 1023/2013 est également inopérant.

54      Il convient donc de rejeter le troisième moyen comme étant non fondé.

55      Par conséquent, les conclusions en annulation doivent être rejetées dans leur ensemble.

 Sur la demande de mesures d’organisation de la procédure

56      Les conclusions en annulation étant rejetées, il n’y a plus lieu de statuer sur la demande de mesures d’organisation de la procédure.

 Sur les conclusions en annulation de la décision de rejet de la réclamation

57      Selon une jurisprudence constante, des conclusions en annulation formellement dirigées contre la décision de rejet d’une réclamation ont, dans le cas où cette décision est dépourvue de contenu autonome, pour effet de saisir le Tribunal de l’acte contre lequel la réclamation a été présentée (arrêt Vainker/Parlement, 293/87, EU:C:1989:8, point 8 ; voir également arrêt Hoppenbrouwers/Commission, F‑104/07, EU:F:2009:93, point 31).

 Sur les conclusions en indemnité

 Arguments des parties

58      Le requérant soutient avoir subi un préjudice matériel causé par la décision de ne pas le promouvoir puisqu’il n’a pas bénéficié d’une augmentation de salaire. Il évalue son préjudice matériel au montant des arriérés de la rémunération qu’il aurait perçue depuis le 1er janvier 2013, augmenté des intérêts de retard calculés par rapport au taux fixé par la Banque centrale européenne, augmenté de deux points.

59      Le SEAE conclut au rejet des conclusions en indemnité.

 Appréciation du Tribunal

60      Conformément à une jurisprudence constante en matière de fonction publique, si une demande en indemnité présente un lien étroit avec une demande en annulation, le rejet de cette dernière, soit comme irrecevable, soit comme non fondée, entraîne également le rejet de la demande indemnitaire (arrêts Martínez Valls/Parlement, T‑214/02, EU:T:2003:254, point 43 ; Fries Guggenheim/Cedefop, F‑47/09, EU:F:2010:36, point 119, et Časta/Commission, F‑40/09, EU:F:2010:74, point 94).

61      En l’espèce, les conclusions en annulation ont été rejetées.

62      Par conséquent, les conclusions en indemnité doivent aussi être rejetées.

63      Il résulte de tout ce qui précède que le recours doit être rejeté dans son ensemble.

 Sur les dépens

64      Aux termes de l’article 101 du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe supporte ses propres dépens et est condamnée aux dépens exposés par l’autre partie, s’il est conclu en ce sens. En vertu de l’article 102, paragraphe 1, du même règlement, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe supporte ses propres dépens, mais n’est condamnée que partiellement aux dépens exposés par l’autre partie, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.

65      Il résulte des motifs énoncés dans le présent arrêt que le requérant a succombé en son recours. En outre, le SEAE a, dans ses conclusions, expressément demandé que le requérant soit condamné aux dépens. Les circonstances de l’espèce ne justifiant pas l’application des dispositions de l’article 102, paragraphe 1, du règlement de procédure, le requérant doit supporter ses propres dépens et est condamné à supporter les dépens exposés par le SEAE.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      EF supporte ses propres dépens et est condamné à supporter les dépens exposés par le Service européen pour l’action extérieure.

Barents

Perillo

Svenningsen

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 juin 2015.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

       R. Barents


* Langue de procédure : le français.