Language of document : ECLI:EU:T:2002:30

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

7 février 2002 (1)

«Transparence - Décision 93/731/CE du Conseil relative à l'accès du public aux documents du Conseil - Rejet d'une demande d'accès - Protection de l'intérêt public - Relations internationales - Erreur manifeste - Accès partiel»

Dans l'affaire T-211/00,

Aldo Kuijer, demeurant à Utrecht (Pays-Bas), représenté par Mes O. W. Brouwer et T. Janssens, avocats, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Conseil de l'Union européenne, représenté par MM. M. Bauer et M. Bishop, en qualité d'agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation de la décision du Conseil, communiquée au requérant par lettre du 7 juin 2000, lui refusant l'accès à certains documents du centre d'information, de réflexion et d'échanges en matière d'asile (CIREA), demandés dans le cadre de la décision 93/731/CE du Conseil, du 20 décembre 1993, relative à l'accès du public aux documents du Conseil (JO L 340, p. 43),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

composé de M. P. Mengozzi, président, Mme V. Tiili et M. R. M. Moura Ramos, juges,

greffier: M. J. Plingers, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du 12 juillet 2001,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique

1.
    Le Conseil et la Commission ont approuvé, le 6 décembre 1993, un code de conduite concernant l'accès du public aux documents du Conseil et de la Commission (JO L 340, p. 41), visant à fixer les principes régissant l'accès aux documents qu'ils détiennent. Le code de conduite énonce, notamment, le principe suivant: «Le public aura le plus large accès possible aux documents détenus par la Commission et le Conseil.»

2.
    Il dispose également: «La Commission et le Conseil prendront, chacun pour ce qui le concerne, les mesures nécessaires à la mise en oeuvre des présents principes avant le 1er janvier 1994.»

3.
    Pour assurer la mise en oeuvre de cet engagement, le Conseil a adopté, le 20 décembre 1993, la décision 93/731/CE relative à l'accès du public aux documents du Conseil (JO L 340, p. 43).

4.
    L'article 1er, paragraphe 1, de la décision 93/731 prévoit: «Le public a accès aux documents du Conseil dans les conditions prévues par la présente décision.»

5.
    L'article 4 a la teneur suivante:

«1. L'accès à un document du Conseil ne peut être accordé lorsque sa divulgation pourrait porter atteinte à:

-    la protection de l'intérêt public (sécurité publique, relations internationales, stabilité monétaire, procédures juridictionnelles, activités d'inspection et d'enquête),

-    la protection de l'individu et de la vie privée,

-     la protection du secret en matière commerciale et industrielle,

-    la protection des intérêts financiers de la Communauté,

-     la protection de la confidentialité demandée par la personne physique ou morale qui a fourni l'une des informations contenues dans le document ou requise par la législation de l'État membre qui a fourni l'une de ces informations.

2. L'accès à un document du Conseil peut être refusé pour protéger le secret des délibérations du Conseil.»

6.
    L'article 5 de la même décision énonce ce qui suit:

«Le secrétaire général répond au nom du Conseil aux demandes d'accès aux documents du Conseil, sauf dans les cas visés à l'article 7, paragraphe 3, dans lesquels la réponse est donnée par le Conseil.»

7.
    L'article 7, paragraphes 1 et 3, a la teneur suivante:

«1.    Le demandeur est informé par écrit, dans un délai d'un mois, par les services compétents du secrétariat général, soit de la suite positive réservée à sa demande, soit de l'intention de lui donner une réponse négative. Dans ce dernier cas, l'intéressé est également informé des motifs de cette intention et qu'il dispose d'un délai d'un mois pour formuler une demande confirmative tendant à obtenir la révision de cette position, faute de quoi il sera considéré comme ayant renoncé à sa demande initiale.

[...]

3.    La décision de rejeter une demande confirmative, qui doit intervenir dans le mois suivant l'introduction de cette demande, est dûment motivée [...]»

8.
    L'article 1er du traité sur l'Union européenne, tel que modifié par le traité d'Amsterdam, dispose dans son deuxième alinéa:

«Le présent traité marque une nouvelle étape dans le processus créant une union sans cesse plus étroite entre les peuples de l'Europe, dans laquelle les décisions sont prises dans le plus grand respect possible du principe d'ouverture et le plus près possible des citoyens.»

Faits à l'origine du litige

9.
    Le requérant est un enseignant-chercheur universitaire dans le domaine du droit d'asile et de l'immigration. Par lettre du 3 juillet 1998, adressée au secrétaire général du Conseil, il a demandé à avoir accès à certains documents liés à l'activité du centre d'information, de réflexion et d'échanges en matière d'asile (CIREA). La demande visait certains rapports établis par le CIREA ou en collaboration avec celui-ci ainsi que les rapports d'éventuelles missions communes ou de missions effectuées par des États membres dans des pays tiers et transmis au CIREA. Le requérant demandait également la liste établie par le CIREA ou en collaboration avec ce dernier des personnes à contacter dans les États membres qui s'occupent des demandes d'asile (ci-après la «liste des personnes à contacter»), avec toute modification ultérieure.

10.
    Par lettre du 28 juillet 1998, le secrétaire général a répondu au requérant que des rapports du CIREA avaient été établis entre 1994 et 1998 sur la situation des demandeurs d'asile retournant dans leurs pays d'origine, pour les pays suivants: Albanie, Angola, Sri Lanka, Bulgarie, Turquie, Chine, Zaïre, Nigeria et Vietnam. Toutefois, il a rejeté la demande d'accès à ces documents ainsi qu'à la liste des personnes à contacter, en vertu de l'article 4, paragraphe 1, de la décision 93/731. Il a expliqué que la divulgation de cette liste serait susceptible de «menacer la protection des individus et leur vie privée en donnant lieu à des harcèlements et à des menaces personnelles». Concernant les rapports établis pour le compte du CIREA, le secrétaire général a informé le requérant qu'il n'existait aucun document de ce type.

11.
    Par lettre du 25 août 1998, le requérant a introduit une demande confirmative en application de l'article 7, paragraphe 1, de la décision 93/731. Concernant les rapports du CIREA, il s'est déclaré surpris que «le Conseil ait également l'intention de garder confidentiels, par exemple, les rapports sur des pays tels que le Nigeria, l'Iran et l'Irak, alors que l'on peut difficilement affirmer que les relations entre l'Union et ces pays sont bonnes». Quant aux rapports établis pour le compte du CIREA, il a, notamment, précisé les raisons pour lesquelles il était amené à croire que la réponse du secrétaire général quant à l'inexistence de ces documents était fausse. Il a également contesté la partie de la décision relative à la liste des personnes à contacter.

12.
    Par lettre du 28 septembre 1998, le secrétaire général a transmis au requérant la décision du Conseil portant rejet de la demande confirmative. La lettre était rédigée dans les termes suivants:

«Après examen minutieux, le Conseil a décidé de confirmer [la décision du secrétaire général], telle que formulée dans la lettre du 28 juillet 1998, concernant les demandes relatives aux [rapports du CIREA et à la liste des personnes àcontacter]. Après examen de chacun des documents suivants, le Conseil a décidé de ne pas les divulguer pour les motifs suivants:

a) [numéro du document]: Note d'accompagnement du secrétariat général du Conseil à l'adresse du CIREA: rapport des chefs de mission des douze sur la situation des demandeurs d'asile [d'un pays] retournant dans [le même pays]. Ce rapport contient des informations très sensibles sur la situation politique, économique et sociale [dans le pays concerné], qui ont été fournies par les chefs de mission des États membres de l'Union européenne dans ce pays. Le Conseil est d'avis que la divulgation de ces informations pourrait porter préjudice aux relations entre l'Union européenne et [ce pays]. Par conséquent, le Conseil a décidé qu'il y avait lieu de refuser l'accès à ce document en application de l'article 4, paragraphe 1, de la décision [93/731] (relations internationales).

[...]

b) Liste des personnes [à contacter] du CIREA s'occupant des questions d'asile: le secrétariat général n'a pas été en mesure de trouver un document spécifique du Conseil comportant une [telle] liste [...]

    En outre, le Conseil poursuivra ses recherches pour retrouver des documents (à partir de 1994) comportant les rapports établis pour le compte du CIREA [...] Le requérant sera informé des résultats de ces recherches en temps utile.»

13.
    Le 14 octobre 1998, le requérant a été avisé que, à la suite des recherches effectuées par les services compétents du secrétariat général, il avait été décidé de lui donner accès à dix rapports rédigés par les autorités danoises sur des missions d'enquête effectuées dans des pays tiers. Il était également informé que l'accès à quatre autres rapports établis pour le compte du CIREA par les autorités d'autres États membres (énumérés dans la lettre) lui était refusé, au motif suivant, répété pour chacun de ces documents:

«[L]e secrétariat général est d'avis que la divulgation des informations très détaillées et sensibles de ce rapport pourrait compromettre les relations de l'Union européenne avec [le pays concerné], ainsi que les relations bilatérales entre [l'État membre dont les services ont effectué la mission] et ce pays. Par conséquent, l'accès à ce document n'est pas accordé, en application de l'article 4, paragraphe 1, de la décision [93/731] (relations internationales).»

14.
    Le 4 décembre 1998, le requérant a formé un recours en annulation de la décision du Conseil du 28 septembre 1998 lui refusant l'accès aux documents indiqués.

15.
    Le secrétariat général, par lettre du 18 mai 1999, a communiqué au requérant une nouvelle réponse du Conseil à la demande confirmative du 25 août 1998. Dans cette réponse, le Conseil indiquait qu'une liste des personnes à contacter existait bien et figurait dans le document 5971/2/98 CIREA 18. Par conséquent, il admettaitque sa décision transmise par lettre du 28 septembre 1998, portant rejet de la demande confirmative, était erronée sur ce point.

16.
    Le Conseil refusait toutefois d'autoriser l'accès à ce document en vertu de l'article 4, paragraphe 1, de la décision 93/731. Il précisait dans sa réponse: «[L]e document [en question] contient une liste des personnes à contacter désignées par chaque État membre, qui peuvent échanger des informations relatives aux demandeurs d'asile [ainsi que] des informations concernant les pays d'origine dont elles sont responsables, leur adresse professionnelle et leurs numéros directs de téléphone et de télécopieur.» Le Conseil poursuivait en affirmant que c'était aux États membres qu'il appartenait de décider si ce genre d'informations pouvait être divulgué et dans quelle mesure. Il indiquait que certains d'entre eux s'y opposaient afin de préserver l'efficacité opérationnelle de leurs services administratifs. Si le Conseil divulguait ces informations, qui lui avaient été transmises dans le but spécifique de créer un réseau interne de personnes à contacter destiné à faciliter la coopération et la coordination en matière de droit d'asile, les États membres seraient réticents, dans le futur, à lui fournir des renseignements de cette nature. Dans ces circonstances, la divulgation de ce document pourrait porter atteinte à l'intérêt public relatif au fonctionnement de l'échange d'informations et à la coordination entre les États membres dans le domaine du droit d'asile et de l'immigration.

17.
    Par arrêt du 6 avril 2000, Kuijer/Conseil (T-188/98, Rec. p. II-1959, ci-après l'«arrêt Kuijer»), le Tribunal a annulé la décision du 28 septembre 1998, telle que modifiée par la décision du 18 mai 1999. Le Tribunal a considéré, en premier lieu, qu'elle ne répondait pas aux exigences de motivation de l'article 190 du traité CE (devenu article 253 CE) et, en deuxième lieu, que le Conseil, en refusant d'accorder l'accès aux passages des documents demandés non couverts par l'exception de l'intérêt public prévue à l'article 4, paragraphe 1, de la décision 93/731, avait appliqué ladite exception de manière disproportionnée.

18.
    À la suite de cet arrêt, le Conseil a adopté une nouvelle décision le 5 juin 2000 (ci-après la «décision attaquée»). Le Conseil, tout d'abord, a exposé que les rapports visés par la demande d'accès présentaient des caractéristiques communes justifiant qu'ils soient traités de la même manière au regard de la décision 93/731; qu'ils contenaient des informations détaillées sur la situation politique générale et la protection des droits de l'homme dans des pays tiers, pouvant être interprétées comme une critique de ces pays; que de tels rapports étaient, potentiellement, de nature à porter atteinte aux relations de l'Union avec ces pays et que l'appréciation des conséquences possibles de leur communication sur ces relations relevait de ses attributions politiques; qu'en l'espèce leur communication pouvait réellement porter préjudice aux relations avec les pays tiers concernés et qu'elle pouvait également compromettre l'amélioration de la situation des demandeurs d'asile originaires de ces pays et créer des problèmes avec des États se trouvant dans la même situation que les pays en cause. Ensuite, le Conseil a examiné brièvement le contenu de chacun des documents en question et a considéré que, à l'exception de la liste des personnes à contacter, qui a été adressée au requérant par lettre du 9 octobre2000, sans les noms et les numéros de téléphone et de fax de ces personnes, aucun d'eux ne pouvait lui être communiqué. Ces documents relèveraient de l'exception prévue à l'article 4, paragraphe 1, de la décision 93/731, dans la mesure où leur divulgation pourrait porter atteinte aux relations de l'Union avec le pays concerné et, dans certains cas, mettre en danger la situation des personnes ayant fourni certaines des informations qui y sont contenues.

Procédure et conclusions des parties

19.
    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 11 août 2000, le requérant a introduit le présent recours.

20.
    Le requérant ayant renoncé à déposer une réplique, la procédure écrite a été close le 5 janvier 2001. Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal a décidé d'ouvrir la procédure orale.

21.
    Par ordonnance du 20 mars 2001, conformément aux articles 65, sous b), 66, paragraphe 1, et 67, paragraphe 3, troisième alinéa, du règlement de procédure du Tribunal, le Tribunal a enjoint à la partie défenderesse de produire les documents litigieux, tout en prévoyant que ces documents ne seraient pas communiqués au requérant dans le cadre de la présente procédure. Il a été satisfait à cette demande.

22.
    Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l'audience du 12 juillet 2001.

23.
    Le requérant conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    annuler la décision attaquée;

-    demander au Conseil de produire l'ensemble des documents en cause;

-    condamner le Conseil aux dépens, y compris aux dépens supportés par d'éventuelles parties intervenantes.

24.
    Le Conseil conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    rejeter le recours;

-    condamner le requérant aux dépens.

En droit

25.
    Le requérant demande l'annulation de la décision attaquée en ce qu'elle porte rejet

de sa demande d'accès à certains documents du CIREA. Les documents demandés

sont les suivants:

a)    des rapports, analyses ou évaluations sur la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) rédigés au cours des années 1994 à 1998 par le CIREA ou en collaboration avec ce dernier, ayant pour objet la situation dans les pays tiers ou les régions dont sont originaires ou dans lesquelles résident un grand nombre de demandeurs d'asile;

b)    tout rapport de mission commune ou transmis au CIREA par un ou plusieurs États membres sur les missions effectuées dans des pays tiers par cet État membre ou ces États membres;

c)    la liste des personnes à contacter, sans les numéros de téléphone et de fax de ces personnes, ainsi que toute modification apportée ultérieurement à cette liste.

26.
    À l'appui de son recours, le requérant invoque trois moyens. Le premier est tiré d'une violation de la décision 93/731, notamment de son article 4, paragraphe 1, et du principe de proportionnalité. Le deuxième moyen est tiré d'une violation de l'obligation de motivation. Le troisième moyen est tiré d'une violation d'un principe fondamental de droit communautaire, selon lequel les citoyens européens doivent bénéficier de l'accès le plus large et le plus complet possible aux documents de l'Union.

27.
    Il convient d'examiner le moyen tiré d'une violation de la décision 93/731, notamment de son article 4, paragraphe 1, et du principe de proportionnalité.

Arguments des parties

Sur les rapports litigieux

28.
    Le requérant conteste que le contenu des rapports litigieux présente certaines caractéristiques communes qui permettraient de traiter ces rapports de la même manière au regard de la décision 93/731 et invoque, à cet égard, les points 39 et 40 de l'arrêt Kuijer.

29.
    Selon lui, ces rapports contiennent des informations factuelles, et non des critiques des pays tiers concernés sur des questions sensibles telles que leur situation politique générale et la protection des droits de l'homme.

30.
    La divulgation des rapports en cause ne risquerait donc pas de porter atteinte aux relations de l'Union avec ces pays. À cet égard, le requérant soutient, premièrement, que les relations de nombre de ces pays avec l'Union sont déjà difficiles, voire inexistantes en raison de l'action de celle-ci dans le domaine des droits de l'homme. Deuxièmement, la situation politique dans certains des pays enquestion, depuis la rédaction des rapports litigieux, aurait beaucoup changé. Troisièmement, le Conseil n'aurait pas caractérisé le risque allégué. Quatrièmement, le Conseil aurait omis d'indiquer, pour chacun des documents en cause, en quoi sa divulgation risquait concrètement et effectivement de porter atteinte aux relations politiques avec le pays tiers concerné.

31.
    Enfin, le requérant fait valoir que la décision attaquée est entachée d'une violation du principe de proportionnalité et que le Conseil a fait une mauvaise appréciation du danger que la communication des rapports en cause représenterait pour les relations internationales. En particulier, le Conseil n'aurait pas examiné la possibilité d'accorder un accès partiel à ces rapports.

32.
    Le Conseil conteste avoir violé l'article 4, paragraphe 1, de la décision 93/731 ou le principe de proportionnalité.

33.
    En premier lieu, à titre préliminaire, le Conseil souligne que, comme il l'a indiqué au troisième alinéa de la décision attaquée, les rapports sur les pays tiers concernés en l'espèce présentent des caractéristiques communes qui obligent à les traiter de la même manière au regard de la décision 93/731.

34.
    Le Conseil affirme être en désaccord sur ce point avec la manière dont le Tribunal a apprécié les faits dans son arrêt Kuijer. Il estime que le Tribunal a apprécié de manière erronée les faits de l'espèce en ce qui concerne la possibilité d'octroyer l'accès aux passages des rapports demandés qui pourraient ne pas être couverts par l'exception invoquée.

35.
    Il conteste également l'argument du Tribunal fondé sur l'examen des dix rapports établis pour le compte du CIREA par les autorités danoises (points 40 à 42 et 57 du même arrêt). Il expose que, au point 57 de l'arrêt Kuijer, le Tribunal semble déduire du contenu des dix rapports danois établis pour le compte du CIREA, auxquels l'accès a été accordé et dont une grande partie consiste en des descriptions et des constatations de fait qui ne relèvent pas de l'exception invoquée, que les rapports non communiqués avaient un contenu tout à fait analogue et qu'il aurait donc été possible d'en supprimer les passages sensibles. Le Conseil soutient que ce raisonnement pèche par défaut de logique et fait valoir que les documents communiqués ne contenaient rien qui aurait justifié de ne pas les divulguer entièrement ou en partie. Il ajoute que, si certains documents de type et de nature analogues ne sont pas entièrement ou partiellement divulgués, c'est parce qu'ils sont différents en substance et, par conséquent, n'ont pas la même incidence sur les relations internationales.

36.
    À cet égard, le Conseil rappelle qu'il est tenu, comme le Tribunal l'a lui-même reconnu au point 37 de son arrêt Kuijer, d'examiner chaque document auquel l'accès est sollicité en fonction de son contenu réel. Il allègue que le fait que, sur un groupe de documents ayant en commun certaines caractéristiques, les uns sontdivulgués et les autres non constitue précisément une preuve de ce qu'il a respecté cette obligation.

37.
    En outre, il fait valoir qu'un État membre n'apprécie pas nécessairement le préjudice que pourrait causer la divulgation d'un document qu'il a écrit lui-même de la même manière que s'il s'agissait d'un rapport commun. Le Conseil estime que, pour ce dernier type de rapport, il faudra peut-être rechercher un compromis entre les différents points de vue de ses quinze membres.

38.
    Enfin, il souligne que tous les rapports en question ont été établis dans le cadre des relations politiques de l'Union et des différents États membres avec des pays tiers. Pour ce qui est des rapports communs, ils auraient, en effet, tous été approuvés par le comité politique, conformément aux compétences que lui confère l'article 25 du traité sur l'Union européenne, dans le cadre du titre V de celui-ci.

39.
    En deuxième lieu, le Conseil, se fondant sur le point 71 de l'arrêt du Tribunal du 19 juillet 1999, Hautala/Conseil (T-14/98, Rec. p. II-2489, ci-après l'«arrêt Hautala»), soutient que la décision attaquée résulte d'une appréciation attentive de sa part des conséquences possibles de la divulgation des rapports concernés pour les relations internationales de l'Union, qui fait partie des responsabilités politiques que le titre V du traité sur l'Union européenne lui a conférées, et pour le bon fonctionnement de la politique de cette dernière en matière d'asile.

40.
    En troisième lieu, le Conseil fait valoir que, sur la base des critères du contrôle judiciaire fixés par le Tribunal au point 72 de l'arrêt Hautala, l'appréciation qui l'a amené à conclure que tous les rapports concernés relèvent de l'exception touchant à la protection de l'intérêt public, mentionnée à l'article 4, paragraphe 1, de la décision 93/731, est irréprochable.

41.
    Il allègue que tous les rapports en cause contiennent des informations factuelles très détaillées sur la situation qui règne dans certains pays tiers, notamment en ce qui concerne les droits de l'homme. Sur ce point, ces rapports seraient donc très semblables au document en question dans l'arrêt Hautala. En outre, de même que ce document, dans la présente affaire, les rapports litigieux auraient été rédigés en vue d'un usage interne et non dans le but d'être publiés. Le Conseil admet que ce fait, en soi, n'est pas une raison valable pour refuser l'accès à un document, mais il souligne que, dans des documents rédigés à des fins internes, l'expression est plus libre et de tels documents contiennent, dès lors, des formulations qui risqueraient de créer des tensions avec certains pays tiers.

42.
    Dans l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt Hautala, ces circonstances auraient suffi au Tribunal pour qu'il confirme que rien ne justifiait de censurer l'appréciation du Conseil (arrêt Hautala, point 74). Or, la décision attaquée serait motivée de manière beaucoup plus circonstanciée que la décision en question dans cette affaire.

43.
    Le Conseil fait observer également que les arguments avancés par le requérant aux points 21 à 42 de sa requête concernent, en substance, les éléments sur la base desquels ont été appréciées les conséquences que pourrait avoir la divulgation des rapports concernés, notamment le niveau de protection de l'intérêt public devant être préservé ou la gravité du préjudice que la divulgation des documents en question pourrait causer et la probabilité qu'un tel préjudice se produise effectivement. La pertinence de ces éléments n'étant pas contestée, le Conseil conclut que la décision attaquée n'est entachée d'aucun vice, pas plus de détournement de pouvoir que d'erreur manifeste d'appréciation.

44.
    Pour ce qui est de l'argument du requérant selon lequel il résulterait de la jurisprudence que la divulgation d'un document ne peut être refusée que si le Conseil prouve qu'elle est effectivement de nature à porter réellement et concrètement atteinte aux relations avec des pays tiers, le Conseil allègue que, dans le domaine des relations internationales en particulier, il serait excessif d'exiger qu'il produise des «preuves irréfutables» de la probabilité d'un préjudice réel et concret. Ces preuves ne pourraient exister que si des documents analogues aux documents en cause avaient déjà été effectivement divulgués auparavant par le Conseil et si leur divulgation avait causé un préjudice réel et concret aux relations de l'Union avec des pays tiers.

45.
    À l'audience, le Conseil a également contesté la pertinence du critère de l'écoulement du temps pour décider si un document peut être divulgué ou non. Il a fait valoir que la divulgation d'un document ne correspondant plus à la situation actuelle du pays en question pourrait créer des problèmes avec ce pays, parce que celui-ci pourrait considérer qu'une image fausse est ainsi donnée de sa situation présente.

46.
    En outre, le Conseil a souligné que l'accès du public aux rapports en question peut avoir une influence quant à l'existence même de ce type de rapport. Comme ils sont rédigés d'une manière claire et non diplomatique, leur divulgation peut, selon lui, mettre en cause les entités qui sont à la source des informations qu'ils contiennent.

47.
    Enfin, le Conseil conteste l'argument selon lequel il n'aurait pas pris en considération la possibilité d'octroyer un accès partiel aux documents litigieux. Il fait valoir que la communication partielle de la liste des personnes à contacter prouve le contraire et que la décision attaquée est conforme aux conclusions du Tribunal dans l'arrêt Kuijer.

Sur la liste des personnes à contacter

48.
    Le requérant fait observer que, en soutenant qu'il appartient aux États membres de décider si les noms des fonctionnaires nationaux sont accessibles au public, le Conseil semble vouloir se soustraire à ses obligations en matière de transparence et d'ouverture. Il conteste également l'argument selon lequel, si ces élémentsétaient divulgués, les États membres ne fourniraient plus ce type d'informations à l'avenir. Il souligne que, en tout état de cause, la coordination entre les États membres et entre ceux-ci et le Conseil ainsi que l'échange d'informations entre les administrations ne sauraient automatiquement prévaloir sur l'ouverture et la transparence, qui constituent un intérêt fondamental pour les citoyens.

49.
    Le Conseil fait valoir qu'il a en partie répondu au souhait du requérant, lequel a confirmé qu'il ne désirait pas avoir accès aux numéros de téléphone et de fax des personnes figurant sur la liste des personnes à contacter. S'agissant des noms de ces personnes, le Conseil estime qu'il ressort clairement du contexte de la décision attaquée que les arguments avancés dans la décision notifiée au requérant le 18 mai 1999 n'ont pas perdu leur validité.

50.
    Le Conseil affirme ne pas avoir été convaincu par les arguments du requérant dans la procédure ayant abouti à l'arrêt Kuijer, repris au point 77 de sa requête dans la présente affaire. Ainsi, le Conseil expose avoir décidé de maintenir sa position sur ce point, et de refuser l'accès à certaines parties de ce document au motif que leur divulgation pourrait porter préjudice à l'intérêt public que représente le fonctionnement de l'échange d'informations et de la coordination entre les États membres dans le domaine de l'asile, intérêt qu'il estime avoir le devoir de protéger en vertu de l'article 4, paragraphe 1, de la décision 93/731 (ordonnance du président du Tribunal du 3 mars 1998, Carlsen e. a./Conseil, T-610/97 R, Rec. p. II-485, point 48).

51.
    À l'audience, en réponse à une question posée par le Tribunal, le Conseil a expliqué qu'il n'a pas envisagé la possibilité d'octroyer l'accès aux noms des personnes et aux autres données qui sont déjà communiqués au public par certains États membres au motif que la différence des positions de ces derniers à cet égard apparaîtrait comme une sorte de dissension entre ses membres.

Appréciation du Tribunal

52.
    À titre préliminaire, il convient de rappeler, d'une part, que le principe de transparence vise à assurer une meilleure participation des citoyens au processus décisionnel, ainsi qu'à garantir une plus grande légitimité, efficacité et responsabilité de l'administration à l'égard des citoyens dans un système démocratique. Il contribue à renforcer le principe de la démocratie et le respect des droits fondamentaux (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 14 octobre 1999, Bavarian Lager/Commission, T-309/97, Rec. p. II-3217, point 36).

53.
    D'autre part, quand le Conseil décide si l'accès à un document peut porter atteinte à l'intérêt public, il exerce un pouvoir d'appréciation qui relève des responsabilités politiques que lui confèrent les dispositions des traités. Dans ces circonstances, le contrôle exercé par le Tribunal doit se limiter à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation de la décision en cause, de l'exactitude matérielledes faits, de l'absence d'erreur manifeste dans l'appréciation des faits et de détournement de pouvoir.

54.
    Il convient ensuite d'évoquer les conditions dans lesquelles l'accès du public à un document peut être refusé.

55.
    En premier lieu, l'accès du public aux documents des institutions constitue le principe juridique et la possibilité de refus est l'exception. Une décision de refus n'est valide que si elle se base sur une des exceptions prévues par l'article 4 de la décision 93/731. Conformément à une jurisprudence constante, ces exceptions doivent être interprétées et appliquées de façon restrictive, afin de ne pas tenir en échec l'application du principe général consacré dans cette décision [voir arrêt du Tribunal du 17 juin 1998, Svenska Journalistförbundet/Conseil, T-174/95, Rec. p. II-2289, point 110, et pour les dispositions correspondantes de la décision 94/90/CECA, CE, Euratom de la Commission, du 8 février 1994, relative à l'accès du public aux documents de la Commission (JO L 46, p. 58), arrêt du Tribunal du 5 mars 1997, WWF UK/Commission, T-105/95, Rec. p. II-313, point 56].

56.
    En deuxième lieu, il ressort encore de la jurisprudence que le Conseil est tenu d'examiner, pour chaque document auquel l'accès est sollicité, si, au regard des informations dont il dispose, la divulgation est effectivement susceptible de porter atteinte à l'un des aspects de l'intérêt public protégé par les exceptions prévues dans l'article 4, paragraphe 1, de la décision 93/731 (arrêt Svenska Journalistförbundet/Conseil, précité, point 112). Pour que ces exceptions soient applicables, le risque d'atteinte à l'intérêt public doit donc être raisonnablement prévisible et non purement hypothétique.

57.
    Enfin, l'interprétation de l'article 4, paragraphe 1, de la décision 93/731 doit se faire à la lumière du principe du droit à l'information et du principe de proportionnalité. Il en résulte que le Conseil est tenu d'examiner s'il convient d'accorder un accès partiel, limité aux données non couvertes par les exceptions. À titre exceptionnel, une dérogation à cette obligation d'accorder un accès partiel pourrait être admise lorsque la charge administrative provoquée par la dissimulation des éléments non communicables se révélerait particulièrement lourde, dépassant ainsi les limites de ce qui peut être raisonnablement exigé.

58.
    En l'espèce, le Tribunal doit, donc, examiner si la décision attaquée a été adoptée conformément aux principes qui viennent d'être exposés.

59.
    En ce qui concerne les rapports litigieux, le Conseil, dans la décision attaquée, a considéré, tout d'abord, qu'ils présentaient des caractéristiques communes justifiant qu'ils soient traités de la même manière pour ce qui concerne l'application de la décision 93/731. Ensuite, le Conseil a refusé l'accès aux rapports litigieux au motif que, comme leur contenu pouvait être interprété comme une critique des pays tiers en question, notamment en ce qui concerne leur situation politique et celle relative

aux droits de l'homme, leur divulgation pourrait porter préjudice aux relations de l'Union avec ces pays.

60.
    S'il est vrai que certains documents, comme des rapports contenant des informations militaires sensibles, peuvent avoir des caractéristiques communes suffisantes pour que leur divulgation soit refusée, les documents en cause ne sont pas de cette nature. Dans ces circonstances, le simple fait que certains documents contiennent des informations ou affirmations négatives sur la situation politique ou la protection des droits de l'homme dans un pays tiers ne signifie pas nécessairement que leur accès puisse être refusé en raison d'un danger d'atteinte à un intérêt public. Ce fait, en lui-même et d'une manière abstraite, ne suffit pas pour rejeter une demande d'accès.

61.
    En revanche, le refus d'accès aux rapports en question doit se fonder sur une analyse des éléments relatifs au contenu ou au contexte de chaque rapport, qui permette de conclure que, sur la base de certaines circonstances spécifiques, la divulgation d'un tel document entraînerait un danger pour un intérêt public.

62.
    À cet égard, en ce qui concerne leur contenu, il convient de constater que les rapports litigieux ne concernent pas directement ou principalement les relations de l'Union avec les pays concernés. Ils font une analyse de la situation politique et de la protection des droits de l'homme en général dans chacun de ces pays, y compris en ce qui concerne la ratification d'instruments internationaux en la matière. Ils contiennent également des informations plus spécifiques sur la protection des droits de l'homme, sur la possibilité de migration interne pour échapper à des persécutions, sur le retour des nationaux dans leur pays d'origine et sur la situation économique et sociale.

63.
    Ces informations se rapportent souvent à des faits déjà publics, comme l'évolution de la situation politique, économique ou sociale du pays concerné. De la même manière, normalement les données relatives à la protection des droits de l'homme correspondent à des faits notoires et leur exposé ne comporte pas d'appréciations politiquement sensibles de la part du Conseil.

64.
    Ainsi, les rapports litigieux ne correspondent ni par leur type ni par leur contenu aux motifs indiqués par le Conseil dans la décision attaquée pour justifier le rejet de la demande d'accès.

65.
    En outre, en ce qui concerne le contexte dans lequel s'insèrent les rapports en question, il y a lieu de souligner que l'existence de certains éléments peut dissiper tout danger de répercussions négatives qu'une éventuelle divulgation de ces rapports pourrait entraîner pour les relations de l'Union avec les pays tiers concernés.

66.
    Ainsi, par exemple, un document peut contenir une analyse de la situation telle qu'elle existait dans un pays à une certaine époque et ce pays a pu connaître deschangements politiques importants. Il peut se révéler également que l'Union elle-même, à travers ses institutions, en particulier le Conseil et sa présidence, se soit déjà exprimée officiellement d'une manière critique sur la situation interne des pays concernés. En outre, les relations de l'Union avec ces pays peuvent être telles que la divulgation d'une critique de celle-ci à l'égard de la situation interne de ces pays ou du respect par ceux-ci des droits de l'homme ne peut leur porter préjudice. Enfin, les observations contenues dans les rapports en question peuvent être positives pour le pays concerné.

67.
    Or, il s'avère que ces différentes situations se vérifient, séparément ou cumulativement, relativement à plusieurs des rapports litigieux et, en particulier, à titre d'exemple, en ce qui concerne les rapports concernant l'ancien Zaïre (documents n° 4987/95 et n° 12917/1/95 REV1) et le Sri Lanka (document n° 4623/95).

68.
    Par ailleurs, l'argument que le Conseil a tiré des points 73 et 74 de l'arrêt Hautala n'est pas pertinent. Dans l'affaire ayant donné lieu à cet arrêt, le Tribunal a considéré que rien ne justifiait de censurer l'appréciation du Conseil qui avait refusé l'accès à un rapport d'un groupe de travail du Conseil sur l'exportation d'armes conventionnelles, contenant notamment des échanges de vues entre les États membres sur la question du respect des droits de l'homme de la part des pays de destination finale des armes. Le Tribunal s'est limité à déclarer que le refus du Conseil de considérer la possibilité d'accorder un accès partiel violait l'article 4, paragraphe 1, de la décision 93/731, interprété à la lumière du principe du droit à l'information et du principe de proportionnalité.

69.
    Contrairement à l'affaire Hautala, où était en question un rapport différent de ceux de la présente affaire, en l'espèce, le Tribunal a ordonné la production des rapports litigieux et a pu constater que la divulgation d'une large partie de leur contenu ne saurait manifestement être considérée comme susceptible de créer des tensions avec les pays tiers concernés.

70.
    Dans ces conditions, le Conseil a donc commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que les motifs qu'il a invoqués pour refuser l'accès aux rapports litigieux se vérifiaient en ce qui concerne le contenu intégral de ces derniers.

71.
    Cependant, il convient d'admettre que, en ce qui concerne certains passages de plusieurs rapports litigieux, comme ceux dans lesquels sont citées les personnes à la source des informations, l'intérêt public peut justifier qu'ils soient maintenus confidentiels, le refus de leur divulgation étant, dans cette mesure, légitime. Il n'empêche que, dans ces cas, conformément à la jurisprudence précitée, le Conseil doit octroyer un accès partiel aux documents en question. L'octroi d'un accès partiel, limité aux passages non couverts par l'exception de l'article 4, paragraphe 1, de la décision 93/731, aurait permis au Conseil de protéger l'intérêt public qu'il a invoqué pour refuser l'accès à l'intégralité de chaque rapport litigieux, sans porteratteinte au principe de transparence et dans le respect du principe de proportionnalité.

72.
    Il n'appartient pas au Tribunal de se substituer au Conseil et d'indiquer les passages pour lesquels le rejet de la demande d'accès pour les motifs invoqués dans la décision attaquée constituerait une erreur manifeste d'appréciation. Toutefois, cette institution est tenue, lors de l'exécution du présent arrêt, de prendre en considération les observations exposées à cet égard par le Tribunal.

73.
    En outre, en ce qui concerne la liste des personnes à contacter, il convient de constater que le Conseil a refusé d'envisager la possibilité d'octroyer un accès aux informations mises à la disposition du public par certains États membres, notamment aux noms de ces personnes. Il a fondé sa position sur le fait que cet accès partiel révélerait la différence d'appréciation des États membres sur ce point et apparaîtrait en public comme un manque d'accord entre ses membres. Cependant, il n'a pas démontré dans quelle mesure cette considération peut entrer dans le cadre des exceptions prévues à l'article 4 de la décision 93/731.

74.
    Le Conseil a donc commis une erreur de droit en rejetant la demande du requérant en ce qui concerne les informations contenues dans la liste des personnes à contacter auxquelles l'accès est autorisé dans certains États membres. En refusant l'accès à ces informations, la décision attaquée a violé le principe de proportionnalité.

75.
    Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler la décision attaquée, sans qu'il soit nécessaire de se prononcer sur le bien-fondé des autres moyens avancés par le requérant.

Sur les dépens

76.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Le Conseil ayant succombé, il y a lieu, eu égard aux conclusions du requérant, de le condamner aux dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

déclare et arrête:

1)    La décision du Conseil du 5 juin 2000, refusant au requérant l'accès à certains rapports établis par le centre d'information, de réflexionet d'échanges en matière d'asile et à certains rapports de missions communes ou effectuées par des États membres et transmis à ce dernier, ainsi qu'aux informations contenues dans la liste des personnes chargées, dans les États membres, des demandes d'asile, auxquelles l'accès est autorisé dans certains États membres, à l'exception des numéros de téléphone et de fax de ces personnes, est annulée.

2)    Le Conseil supportera, outre ses propres dépens, les dépens du requérant.

Mengozzi Tiili Moura Ramos

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 février 2002.

Le greffier

Le président

H. Jung

P. Mengozzi


1: Langue de procédure: l'anglais.