Language of document : ECLI:EU:T:1997:187

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

27 novembre 1997(1)

«Concurrence — Droits d'auteur — Rejet d'une plainte — Exécution d'un arrêt d'annulation — Cloisonnement du marché — Motivation — Détournement de pouvoir»

Dans l'affaire T-224/95,

Roger Tremblay, demeurant à Vernantes (France),
Harry Kestenberg, demeurant à Saint-André-Les-Vergers (France),
et
Syndicat des exploitants de lieux de loisirs (SELL), syndicat de droit français, ayant son siège à Paris, représentés par Me Jean-Claude Fourgoux, avocat au barreau de Paris, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de Me Pierrot Schiltz, 4, rue Béatrix de Bourbon,

parties requérantes,

soutenues par

Music User's Council of Europe (MUCE), association de droit anglais, établie à Uxbridge (Royaume-Uni), représentée par Me Jean-Louis Fourgoux, avocat au barreau de Paris, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de Me Pierrot Schiltz, 4, rue Béatrix de Bourbon,

Associazione italiana imprenditori locali da ballo (SILB),syndicat de droit italien, ayant son siège à Rome, représenté par Me Jean-Claude Fourgoux, avocat au barreau de Paris, ayant élu domicile Luxembourg en l'étude de Me Pierrot Schiltz, 4, rue Béatrix de Bourbon,

parties intervenantes,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. Giuliano Marenco, conseiller juridique, et Guy Charrier, fonctionnaire national détaché auprès de la Commission, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

soutenue par

République française,représentée par Mme Kareen Rispal-Bellanger, sous-directeur à la direction des affaires juridiques du ministère des Affaires étrangères, et M. Jean-Marc Belorgey, chargé de mission à la même direction, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de l'ambassade de France, 8 b, boulevard Joseph II,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision de la Commission du 13 octobre 1995 rejetant la partie des plaintes, introduites, le 4 février 1986, notamment par MM. Tremblay et Kestenberg, au titre de l'article 3, paragraphe 2 du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité (JO 1962, 13, p. 204), relative à l'existence d'un partage du marché, et au cloisonnement total du marché qui en résulterait, entre les sociétés de gestion de droits d'auteur des différents États membres, et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à la Commission de procéder aux investigations nécessaires à l'établissement de l'entente dénoncée,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (deuxième chambre),



composé de C. W. Bellamy, président, A. Kalogeropoulos et J. D. Cooke, juges,

greffier: M. A. Mair, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 29 mai 1997,

rend le présent

Arrêt

Faits et procédure

Faits à l'origine du litige

  1. Le 4 février 1986, la Commission a été saisie, en application de l'article 3, paragraphe 2, du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité (JO 1962, 13, p. 204, ci-après «règlement n° 17»), d'une demande de constatation d'infractions aux articles 85 et 86 du traité CEE, émanant d'un groupement d'exploitants de discothèques dénommé le BEMIM (Bureau européen des médias de l'industrie musicale) auquel adhéraient à l'époque MM. Tremblay et Kestenberg, exploitants individuels de discothèques. Cette demande mettait en cause la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (ci-après «SACEM»), qui est la société française de gestion des droits d'auteur en matière musicale. La Commission a été saisie, par ailleurs, de plaintes similaires, émanant d'autres plaignants, entre 1979 et 1988.

  2. La plainte susmentionnée du 4 février 1986 articulait, en substance, les griefs suivants. Le premier, tiré d'une violation de l'article 85, paragraphe 1, du traité, dénonçait un prétendu partage du marché — et le cloisonnement total du marché qui en résulterait — entre les sociétés de gestion de droits d'auteur des différents États membres par la conclusion de contrats de représentation réciproque, en vertu desquels il serait interdit aux sociétés de gestion de traiter directement avec les utilisateurs établis sur le territoire d'un autre État membre. Les deux autres griefs, tirés d'une violation de l'article 86 du traité, avaient trait, respectivement, au caractère excessif et discriminatoire du taux de redevances imposé par la SACEM, et au refus de cette dernière de concéder aux discothèques françaises l'utilisation du seul répertoire étranger.

  3. A la suite des plaintes dont elle avait été saisie, la Commission a procédé à des investigations, sous la forme de demandes de renseignements, en application de l'article 11 du règlement n° 17.

  4. L'instruction menée par la Commission a été suspendue à la suite de la saisine de la Cour de justice, entre décembre 1987 et août 1988, par demandes préjudicielles émanant des cours d'appel d'Aix-en-Provence et de Poitiers et du tribunal de grande instance de Poitiers, mettant notamment en cause, au regard des articles 85 et 86 du traité, le niveau des redevances perçues par la SACEM, la conclusion de conventions de représentation réciproque entre sociétés nationales de gestion de droits d'auteur et le caractère global, couvrant l'ensemble du répertoire, des contrats de représentation de la SACEM. Dans ses arrêts du 13 juillet 1989, Tournier (395/87, Rec. p. 2521, 2580), et Lucazeau e.a. (110/88, 241/88 et 242/88, Rec. p. 2811, 2834), la Cour a jugé, entre autres, que «l'article 85 du traité CEE doit être interprété en ce sens qu'il interdit toute pratique concertée entre sociétés nationales de gestion de droits d'auteur des États membres qui aurait pour objet ou pour effet que chaque société refuse l'accès direct à son répertoire aux utilisateurs établis dans un autre État membre. Il appartient aux juridictions nationales de déterminer si une concertation à cet effet a effectivement eu lieu entre ces sociétés de gestion».

  5. A la suite de ces arrêts, la Commission a repris ses investigations, plus particulièrement en ce qui concerne les différences entre les niveaux de redevances pratiqués par les diverses sociétés de droits d'auteur dans la Communauté. Les résultats de l'instruction menée par la Commission ont été consignés dans un rapport du 7 novembre 1991.

  6. Le 18 décembre 1991, une lettre de mise en demeure au titre de l'article 175 du traité a été adressée à la Commission, au nom, notamment, de MM. Tremblay et Kestenberg ainsi que du BEMIM, l'invitant à prendre position sur leurs plaintes.

  7. Le 20 janvier 1992, la Commission a adressé au BEMIM une communication au titre de l'article 6 du règlement n° 99/63/CEE de la Commission, du 25 juillet 1963, relatif aux auditions prévues à l'article 19, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 17 du Conseil (JO 1963, 127, p. 2268, ci-après «règlement n° 99/63»). Dans cette lettre, la Commission indiquait qu'en application des principes de subsidiarité et de décentralisation elle envisageait, compte tenu du défaut d'intérêt communautaire résultant de l'effet essentiellement national des pratiques dénoncées et du fait que plusieurs juridictions françaises en étaient déjà saisies, de considérer que les éléments contenus dans les plaintes ne lui permettaient pas de leur réserver une suite favorable.

  8. Le 20 mars 1992, le conseil des requérants a présenté des observations en réponse à la communication du 20 janvier 1992, dans lesquelles il a demandé la poursuite de l'enquête par la Commission et l'envoi d'une communication des griefs.

  9. Par une lettre du 12 novembre 1992 du membre de la Commission en charge des questions de concurrence, les plaignants ont été informés de ce que la demande de constatation d'infractions aux articles 85 et 86 du traité qu'ils avaient introduite était définitivement rejetée.

  10. La décision du 12 novembre 1992 a fait l'objet d'un recours en annulation introduit devant le Tribunal le 11 janvier 1993.

  11. Par arrêt du 24 janvier 1995, Tremblay e.a./Commission (T-5/93, Rec. p. II-188) (ci-après «arrêt Tremblay I»), le Tribunal (deuxième chambre) a annulé la décision du 12 novembre 1992 pour violation de l'article 190 du traité, pour autant qu'elle rejetait le grief pris du cloisonnement du marché résultant de l'existence d'une prétendue entente entre la SACEM et les sociétés de gestion de droits d'auteur des autres États membres, et rejeté le recours pour le surplus.

  12. Par requête déposée au greffe de la Cour le 24 mars 1995, MM. Tremblay et Kestenberg ainsi que le Syndicat des exploitants de lieux de loisirs (ci-après «SELL») ont formé un pourvoi visant à l'annulation dudit arrêt du Tribunal, pour autant que celui-ci rejetait le recours contre la partie de la décision de la Commission du 12 novembre 1992 relative au rejet des griefs tirés d'une violation de l'article 86 du traité.

  13. A la suite de l'arrêt Tremblay I, la Commission a adressé au conseil des requérants, le 23 juin 1995, une communication au titre de l'article 6 du règlement n° 99/63 (ci-après «lettre article 6»).

  14. Dans sa lettre, la Commission rappelait à titre liminaire que, par l'arrêt précité, le Tribunal avait estimé que la motivation de la décision du 12 novembre 1992 n'avait pas permis aux requérants de connaître les justifications du rejet de leur plainte, pour autant que celle-ci avait trait à un cloisonnement du marché résultant des contrats de représentation réciproque conclus entre les sociétés de gestion de droits d'auteur des différents États membres.

  15. Dans la partie «appréciation juridique» de sa lettre article 6, la Commission exposait, tout d'abord, les réponses données par la Cour dans ses arrêts Tournier et Lucazeau e.a., précités, en ce qui concerne les questions relatives à l'organisation par les sociétés nationales de gestion de droits d'auteur d'un réseau de conventions de représentation réciproque et à la pratique suivie par ces sociétés de refuser collectivement tout accès direct à leurs répertoires respectifs aux utilisateurs de musique enregistrée établis dans d'autres États membres.

  16. La Commission rappelait à cet égard que, dans ses arrêts, la Cour avait jugé que des contrats de représentation réciproque instituant une exclusivité, en ce sens que ces sociétés se seraient engagées à ne pas donner l'accès direct à leur répertoire aux utilisateurs de musique enregistrée établis à l'étranger, seraient susceptibles de relever de l'interdiction prévue à l'article 85, paragraphe 1, du traité. Elle ajoutait toutefois que, étant donné que les clauses d'exclusivité figurant dans les contrats de représentation réciproque avaient été supprimées sans que le comportement des sociétés de droits d'auteur, consistant à refuser de confier leur répertoire à une société autre que celle implantée sur le territoire en cause, ait été modifié, la Cour avait ensuite examiné si ces sociétés n'avaient pas, dans les faits, conservé leur exclusivité par une pratique concertée. A cet égard, elle exposait que, si la Cour avait estimé qu'une concertation entre sociétés nationales de gestion de droits d'auteur, qui aurait pour effet de refuser systématiquement l'accès direct à leur répertoire aux utilisateurs étrangers, devait être considérée comme constituant une pratique concertée restrictive de concurrence et susceptible d'affecter le commerce entre États membres, elle avait, toutefois, également souligné qu'une concertation de cette nature ne saurait être présumée lorsque le parallélisme de comportement peut s'expliquer par des raisons autres que l'existence d'une concertation. Or, la Commission faisait observer que, selon la Cour, «tel pourrait être le cas lorsque les sociétés de gestion de droits d'auteur des autres États membres seraient obligées, en cas d'accès direct à leur répertoire, d'organiser leur propre système de gestion et de contrôle sur un autre territoire».

  17. Sur la base de ces principes, la Commission indiquait ensuite, dans sa lettre, qu'ellecontinuait de considérer que, même s'il devait être constaté un certain parallélisme dans le refus opposé par les diverses sociétés de gestion de la Communauté aux demandes d'accès direct à leur répertoire formulées par les discothèques établies dans d'autres États membres, ce parallélisme ne devait être attribué qu'à la similitude des situations dans lesquelles se trouvent ces différentes sociétés de gestion de droits d'auteur. La Commission faisait référence, à cet égard, aux conclusions de l'avocat général M. Jacobs sous les arrêts Tournier et Lucazeau e.a., précités (Rec. 1989, p. 2536), dans lesquelles il soulignait le caractère particulier du marché des droits d'auteur dont la protection, pour être efficace, exige une surveillance et une gestion permanentes à l'intérieur des territoires nationaux. Elle faisait observer que, dans ce contexte, toute société de gestion de droits d'auteur souhaitant opérer dans un territoire autre que le sien devrait mettre en place un système de gestion lui permettant de négocier avec des clients, de vérifier les facteurs constituant l'assiette des redevances, de surveiller l'utilisation de son répertoire et de prendre les mesures nécessaires en ce qui concerne les contrefaçons dont elle pourrait être victime, alors que chaque société peut assurer la gestion de son répertoire, de manière moins onéreuse et plus efficace, en la confiant à la société établie dans cet autre territoire.

  18. Se référant en outre à l'arrêt de la Cour du 31 mars 1993, Ahlström Osakeyhtiö e.a., arrêt dit «pâtes de bois», (C-89/85, C-104/85, C-114/85, C-116/85, C-117/85, et C-125/85, C-126/85, C-127/85, C-128/85 et C-129/85, Rec. p. I-1307), la Commission indiquait que l'hypothèse d'une pratique concertée ne constituait pas la seule explication plausible du comportement des sociétés de droits d'auteur incriminé, dès lors que, selon elle, ces sociétés n'avaient aucun intérêt à utiliser une autre méthode que celle du mandat conféré à la société implantée sur le territoire concerné.

  19. Elle en déduisait:

    «[...] à défaut d'avoir reçu des autres plaignants ou de vous-mêmes des preuves ou des indices concrets de l'existence d'une telle pratique concertée, et n'ayant de son côté pu en recueillir aucun, (elle) ne peut attribuer ce parallélisme de comportement à l'existence d'une entente ou d'une pratique concertée entre les sociétés de gestion de droits d'auteur».

  20. La partie «conclusions» de la lettre du 23 juin 1995 indiquait:

    «Dans ces conditions, la Commission considère que la partie des plaintes de MM. Roger Tremblay, François Lucazeau et Harry Kestenberg relative à l'existence d'un cloisonnement des marchés nationaux en matière de droits d'auteur dans le domaine musical qui résulterait d'une entente ou d'une pratique concertée entre les sociétés de gestion de droits d'auteur des différents États membres n'est pas fondée.

    Elle vous informe dès lors, en application de l'article 6 du règlement n° 99/63/CEE de la Commission, du 25 juillet 1963, de son intention de rejeter officiellement cette partie des plaintes de MM. Roger Tremblay, François Lucazeau et Harry Kestenberg.»

  21. Le 24 juillet 1995, le conseil des requérants a, au nom de MM. Tremblay et Kestenberg, présenté des observations en réponse à la communication du 23 juin 1995, dans lesquelles il faisait valoir, en particulier, que la Commission, dans sa lettre article 6, «se bornait à indiquer qu'elle n'avait pu recueillir aucun indice concret de l'existence d'une pratique concertée sans justifier de la recherche de tels indices» et «ne démontrait pas avoir repris l'enquête comme l'arrêt du Tribunal de première instance aurait dû l'amener à le faire». Évoquant une concertation entre sociétés nationales de gestion de droits d'auteur visant au cloisonnement du marché par la conclusion de contrats de représentation réciproque, ainsi qu'une entente entre ces mêmes sociétés destinée à maintenir les prix à un niveau élevé, le conseil des requérants estimait que les moyens invoqués par la Commission pour rejeter la partie de la plainte relative à l'existence d'une entente étaient dès lors inopérants et demandait à la Commission soit de poursuivre l'enquête, soit de surseoir à statuer jusqu'à l'arrêt de la Cour dans le pourvoi formé contre l'arrêt Tremblay I.

  22. Par lettre du 13 octobre 1995, signée par le membre de la Commission en charge des questions de concurrence, MM. Tremblay et Kestenberg ont été informés du rejet définitif de leurs plaintes, introduites le 4 février 1986.

  23. Dans sa lettre du 13 octobre 1995, la Commission indique que, pour les raisons déjà exposées dans la lettre article 6 du 23 juin 1995, il n'y a pas de motifs suffisants pour donner suite aux plaintes et que les observations présentées par les plaignants dans la lettre du 24 juillet 1995 ne contiennent pas de nouveaux éléments de fait ou de droit de nature à modifier ces conclusions. La Commission relève notamment que, dans cette lettre, il lui a été demandé d'établir la preuve non pas seulement d'une entente consistant en un partage du marché entre les sociétés de gestion de droits d'auteur des différents États membres par la conclusion de contrats de représentation réciproque, mais également d'une seconde entente réunissant les mêmes sociétés et destinée à maintenir les prix de la musique à un niveau de prix élevé.

  24. S'agissant de la première entente alléguée, la Commission rappelle les motifs déjà exposés dans sa lettre article 6. En ce qui concerne la seconde entente alléguée, la Commission fait tout d'abord valoir, en se référant à l'arrêt Tremblay I, que ce grief n'avait pas été formulé dans la plainte, mais seulement dans les observations des plaignants du 20 mars 1992 en réponse à la précédente lettre article 6 du 20 janvier 1992. Elle en déduit qu'elle n'était pas tenue de répondre à ce grief et considère que le Tribunal n'a pas examiné, dans son arrêt, cette partie de la décision. Toutefois, elle souligne que les motifs qu'elle a déjà indiqués au point 12 de sa décision du 12 novembre 1992 restent toujours valables, à savoir que, si l'existence d'une entente ou d'une pratique concertée entre les sociétés de droits d'auteur, représentées au sein du Groupement européen des sociétés d'auteurs et de compositeurs (ci-après «GESAC»), même si elle n'a pu être démontrée, ne peut être exclue, il apparaît que, de toute façon, l'on ne peut lui attribuer des effets précis en matière de tarifs, dont certains ont baissé et d'autres monté depuis le prononcé des arrêts Tournier et Lucazeau e.a., précités, et qui surtout continuent à connaître des écarts sensibles les uns par rapport aux autres.

    Procédure

  25. Par requête déposée au greffe du Tribunal le 13 décembre 1995, les requérants ont introduit le présent recours.

  26. Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 28 mai 1996, la République française a demandé à intervenir à l'appui des conclusions de la partie défenderesse. Le président de la deuxième chambre élargie du Tribunal a fait droit à cette demande par ordonnance du 2 juillet 1996. A la suite du mémoire en intervention de la République française, les requérants n'ont pas présenté d'observations dans le délai imparti.

  27. Par demande déposée au greffe du Tribunal le 30 mai 1996, l'association Music User's Council of Europe (ci-après «MUCE») a demandé à être admise à intervenir au soutien des conclusions des parties requérantes. Par demande déposée au greffe du Tribunal le 3 juin 1996, l'Associazione italiana impreditori locali da ballo (ci-après «SILB») a également demandé à intervenir à l'appui des conclusions des parties requérantes. Par ordonnances du 9 octobre 1996, le président de la deuxième chambre élargie du Tribunal a accueilli ces demandes d'intervention.

  28. Par arrêt du 24 octobre 1996, la Cour a rejeté comme non fondé le pourvoi formé par MM. Tremblay et Kestenberg ainsi que par le SELL contre l'arrêt Tremblay I (arrêt Tremblay e.a./Commission, C-91/95 P, Rec. p. I-5547).

  29. Le 6 novembre 1996, conformément aux dispositions des articles 14 et 51 du règlement de procédure du Tribunal, la formation plénière du Tribunal a décidé de renvoyer l'affaire, initialement attribuée à la deuxième chambre élargie, devant la deuxième chambre.

  30. Les parties intervenantes MUCE et SILB n'ayant pas déposé de mémoires en intervention dans les délais impartis, la procédure écrite s'est terminée le 21 novembre 1996.

  31. Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (deuxième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale sans procéder à des mesures d'instruction préalables. Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales lors de l'audience publique du 29 mai 1997.

    Conclusions des parties

  32. Les requérants concluent à ce qu'il plaise au Tribunal:

    • annuler la décision de la Commission du 13 octobre 1995 en ce qu'elle rejette la plainte;

    • enjoindre en conséquence à la Commission de procéder aux investigations nécessaires à l'établissement de la preuve de l'entente;

    • condamner la Commission aux dépens de l'instance.



  33. La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

    • rejeter le recours comme n'étant fondé en aucun de ses moyens;

    • condamner les parties requérantes aux dépens.



  34. La République française conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

    • rejeter le recours présenté par MM. Tremblay et Kestenberg et le SELL.

    Sur les conclusions visant à faire adresser une injonction à la Commission

  35. Dans leurs conclusions, les requérants demandent au Tribunal d'enjoindre à la Commission de procéder aux investigations nécessaires à l'établissement de la preuve de l'entente alléguée.

  36. Le Tribunal rappelle que, selon une jurisprudence constante, il n'appartient pas au juge communautaire d'adresser des injonctions aux institutions dans le cadre du contrôle de légalité qu'il exerce. En effet, aux termes de l'article 176 du traité, c'est à l'institution dont émane l'acte annulé qu'il incombe de prendre les mesures que comporte l'exécution d'un arrêt rendu dans le cadre d'un recours en annulation (voir l'arrêt de la Cour du 24 juin 1986, Akzo Chemie/Commission, 53/85, Rec. p. 1965, point 23, et l'arrêt du Tribunal du 13 décembre 1995, Windpark Groothusen/Commission, T-109/94, Rec. p. II-3007, point 61).

  37. Il s'ensuit que les conclusions des requérants tendant à ce qu'une injonction soit adressée à la Commission doivent être rejetées comme irrecevables.

    Sur les conclusions en annulation

  38. Les requérants invoquent trois moyens à l'appui de leur recours. Le premier moyen est tiré d'une violation de l'article 176 du traité, le deuxième d'une insuffisance de motivation de la décision attaquée, et le troisième d'une violation du traité et d'un détournement de pouvoir.

  39. Le Tribunal estime qu'il convient d'examiner tout d'abord le deuxième moyen, tiré d'une insuffisance de motivation, avant de procéder à l'examen des premier et troisième moyens respectivement.

    Sur le moyen tiré d'une insuffisance de motivation de la décision attaquée

    Argumentation des parties

  40. Les requérants soutiennent, tout d'abord, que la motivation de la décision est insuffisante dès lors qu'elle n'est pas fondée sur une enquête que la Commission aurait dû mener. La Commission se serait contentée, dans la décision attaquée, d'une tentative de justification juridique d'ordre général du comportement des sociétés de gestion de droits d'auteur, fondée, d'une part, sur la distinction entre parallélisme de comportement et entente, et, d'autre part, sur un renvoi de l'appréciation de la concertation aux juridictions nationales. Les requérants reprochent à la Commission de s'être retranchée derrière l'absence de communication de preuves de l'existence d'une pratique concertée, et d'avoir ainsi imposé aux plaignants de collecter ces informations, alors qu'elle dispose de moyens plus efficaces à cet effet et qu'elle a le devoir d'examiner les plaintes avec soin, sérieux et diligence.

  41. Par ailleurs, les requérants estiment que la motivation de la décision est insuffisante en ce que l'analyse de la Commission serait limitée à la seule appréciation des clauses des contrats de représentation réciproque relatives à l'exclusivité dont bénéficieraient les sociétés de gestion de droits d'auteur en matière d'accès aux répertoires étrangers.

  42. Enfin, s'agissant du rejet du grief tiré de l'existence d'une entente destinée à maintenir les prix des redevances à un niveau élevé, les requérants reprochent à la Commission d'avoir, dans sa décision, reproduit de manière identique les motifsdéjà exposés au point 12 de sa décision initiale du 12 novembre 1992, malgré l'annulation prononcée par le Tribunal dans l'arrêt Tremblay I. Cette motivation serait d'autant plus insuffisante qu'elle n'était assortie d'aucune étude comparative des tarifs pratiqués par les différentes sociétés de gestion de droits d'auteur. Quant à l'argument de la Commission selon lequel ils ne seraient pas recevables à contester cette partie de la décision attaquée, au motif que l'arrêt Tremblay I n'aurait annulé la décision initiale de la Commission qu'en ce qui concerne le défaut de motivation ayant trait au rejet du grief tiré de l'existence d'une entente visant au cloisonnement du marché, les requérants rétorquent que l'arrêt en cause porte sur l'ensemble de la concertation dénoncée, sans qu'il y ait lieu de distinguer entre ce grief et celui concernant l'existence d'une entente sur les prix des redevances.

  43. La Commission fait valoir, en premier lieu, que le moyen des requérants n'est pas recevable en ce qui concerne la partie de la décision relative au rejet du grief tiré de l'existence d'une entente entre sociétés de droits d'auteur sur les prix des redevances. Selon la Commission, le Tribunal n'aurait annulé sa décision initiale qu'en ce qui concerne le rejet du grief tiré de l'existence d'une entente sur le partage et le cloisonnement du marché, dès lors qu'il était le seul à être formulé dans la plainte originelle, l'allégation d'une seconde entente sur les prix n'ayant, quant à elle, été mentionnée pour la première fois que dans les observations des plaignants en réponse à sa lettre article 6 du 20 janvier 1992. La Commission en déduit qu'elle n'était pas tenue de répondre à ce grief et que, à défaut de plainte, il n'y a pas eu de décision sur ce point.

  44. S'agissant, en second lieu, du rejet du grief ayant trait au cloisonnement du marché, la Commission fait observer que, dans la décision attaquée, elle a rejeté la plainte sur le fond, estimant que l'entente alléguée n'était pas démontrée, et non pas aussi, comme le soutiennent les requérants, au motif que l'appréciation de la concertation relèverait des juridictions nationales. Rappelant ensuite l'ensemble des éléments exposés dans sa lettre article 6 ainsi que dans sa décision, la Commission soutient que celle-ci est motivée à suffisance de droit et que, en l'absence d'indices sérieux de l'existence d'une entente, elle n'était pas tenue d'entreprendre d'investigations. A cet égard, la Commission fait valoir que les requérants n'avaient apporté aucun élément nouveau en ce sens, en particulier dans leurs observations du 24 juillet 1995 en réponse à la lettre article 6, et que ses propres conclusions étaient en outre corroborées par celles du conseil de la concurrence français.

  45. Quant à l'argument des requérants selon lequel la décision litigieuse se limiterait à l'appréciation des clauses des contrats de représentation réciproque relatives à l'exclusivité, la Commission rétorque qu'elle a, au contraire, analysé le fonctionnement du système de représentation réciproque dans son ensemble.

  46. La République française soutient, en premier lieu, que les requérants ne sont pas recevables à contester la partie de la décision attaquée concernant le rejet du grief pris d'une entente entre les sociétés de gestion de droits d'auteurs sur les prix des redevances. Le Tribunal n'ayant pas annulé la décision initiale de la Commission sur ce point, celle-ci n'aurait répondu qu'à titre superfétatoire aux plaignants, qui invoquaient de nouveau ce grief dans leurs observations en réponse à la lettre article 6, et ce à seule fin de leur confirmer les raisons pour lesquelles ce grief n'avait pas été retenu. En tout état de cause, les requérants ne contesteraient pas l'appréciation de la Commission au fond, mais se contenteraient d'invoquer, à tort, l'absence d'étude comparative des prix des redevances pratiqués par les sociétés d'auteurs.

  47. En ce qui concerne, en second lieu, le rejet du grief relatif au cloisonnement du marché, la République française estime que la Commission a dûment motivé sa décision. Elle fait valoir que la lettre article 6 et la décision définitive de rejet sont suffisamment circonstanciées et fondées sur une jurisprudence claire de la Cour. La conclusion à laquelle est parvenue la Commission aurait en outre été également retenue par le conseil de la concurrence français ainsi que par la Cour de cassation dans un arrêt du 14 mai 1991. Dans ces conditions, et compte tenu de ce qu'il n'existerait ni commencement de preuve ni indice concret permettant d'infirmer la position de la Commission, la République française estime que cette dernière ne devait pas engager d'investigations supplémentaires.

    Appréciation du Tribunal

  48. Le Tribunal relève que, dans le cadre de ce moyen, les requérants invoquent une insuffisance de motivation de la décision attaquée en ce qui concerne, d'une part, le rejet du grief tiré d'un cloisonnement du marché résultant des contrats de représentation réciproque conclus entre les sociétés de gestion de droits d'auteur, et, d'autre part, le rejet du grief relatif à l'existence d'une entente entre ces mêmes sociétés en vue de maintenir le taux des redevances à un niveau élevé. Compte tenu de ce que tant la Commission que la République française contestent la recevabilité du moyen, pour autant qu'il est dirigé contre la partie de la décision rejetant ce dernier grief, il convient d'examiner, en premier lieu, si, sur ce point, les requérants sont recevables à contester la décision attaquée.

  49. A cet égard, le Tribunal rappelle, à titre liminaire, que, selon une jurisprudence constante, les décisions purement confirmatives de décisions antérieures ne sont pas susceptibles de recours (arrêts de la Cour du 15 décembre 1988, Irish Cement/Commission, 166/86 et 220/86, Rec. p. 6473, point 16, et du 11 janvier 1996, Zunis Holding e.a./Commission, C-480/93 P, Rec. p. I-1, point 14). En effet, un acte qui se borne à confirmer un acte antérieur ne saurait accorder aux intéressés la possibilité de rouvrir les débats sur la légalité de l'acte confirmé (arrêt du 22 mars 1961, Snupat/Haute Autorité, 42/59 et 49/59, Rec. p. 99, p. 146).

  50. En l'espèce, il convient d'abord de souligner que la Commission avait déjà rejeté les plaintes en cause dans une décision du 12 novembre 1992 (voir ci-dessus point 9). Dans son arrêt Tremblay I, le Tribunal, statuant sur la question de savoir si la Commission avait suffisamment motivé cette décision pour autant qu'elle rejetait le grief tiré de l'existence d'une concertation contraire à l'article 85, paragraphe 1, du traité, entre les sociétés de gestion de droits d'auteur des différents États membres, a estimé que «les points 12 et 13 de la décision litigieuse [contenaient] les motifs du rejet de deux griefs formulés par les requérants dans leurs observations sur la lettre article 6, [qui avaient] trait à l'existence d'une prétendue entente, d'une part, entre les sociétés nationales de gestion de droits d'auteur représentées au sein du GESAC, en vue d'uniformiser leurs redevances au taux le plus élevé possible, et, d'autre part, entre la SACEM et certains syndicats français de discothécaires» (point 39 de l'arrêt).

  51. En revanche, constatant que la motivation de la décision litigieuse ne permettait pas aux requérants de connaître les justifications du rejet de leurs plaintes pour autant que celles-ci avaient trait à un cloisonnement du marché résultant des contrats de représentation réciproque conclus entre les sociétés de gestion de droits d'auteur des différents États membres, le Tribunal en a déduit que, «sur ce point, la Commission n'[avait] pas respecté l'obligation, que lui imposait l'article 190 du traité, de motiver sa décision» (point 40). En conséquence, le Tribunal a annulé la décision pour autant, seulement, qu'elle rejetait le grief pris d'un cloisonnement du marché résultant de l'existence d'une prétendue entente entre les sociétés de gestion de droits d'auteur, ayant pour effet d'empêcher les discothèques françaises d'avoir un accès direct au répertoire de ces sociétés (point 49 de l'arrêt). Le recours a été rejeté pour le surplus.

  52. A la suite de l'annulation partielle, par le Tribunal, de la décision du 12 novembre 1992, les plaignants ont, dans leurs observations du 24 juillet 1995 en réponse à la lettre article 6 de la Commission du 23 juin 1995, non seulement contesté l'intention de la Commission de rejeter le grief tiré d'un cloisonnement du marché résultant des contrats de représentation réciproque, mais également réitéré leur allégation de l'existence d'une seconde entente entre sociétés de gestion de droits d'auteur «destinée à maintenir le prix de la musique à un niveau élevé». Dans la décision attaquée, la Commission a fait valoir qu'elle n'était pas tenue de répondre à ce grief invoqué de nouveau par les plaignants, puis s'est référée expressément aux motifs exposés au point 12 de sa décision du 12 novembre 1992, en indiquant que, en tout état de cause, elle les considérait comme toujours valables. Le Tribunal constate, à cet égard, ainsi que les requérants l'admettent d'ailleurs, que la décision attaquée reproduit, en des termes identiques, les motifs déjà contenus dans la précédente décision.

  53. Au vu de ces éléments, il y a lieu de souligner que, dans la mesure où, dans son arrêt Tremblay I, le Tribunal n'a annulé la décision initiale de la Commission, pour défaut de motivation, que pour autant seulement que le grief pris d'un cloisonnement du marché résultant des contrats de représentation réciproque avait été rejeté, et a considéré, en revanche, que la décision contenait les motifs du rejet du grief tiré de l'existence d'une entente sur les taux des redevances, la Commission n'était pas tenue de réexaminer, dans sa nouvelle décision, les motifs pour lesquels elle avait estimé que ce dernier grief ne pouvait être retenu. En effet, si l'article 176 du traité impose à la Commission le devoir d'éviter que l'acte destiné à remplacer l'acte annulé ne soit entaché des mêmes irrégularités que celles identifiées dans l'arrêt d'annulation (arrêt du Tribunal du 2 février 1995, Frederiksen/Parlement, T-106/92, RecFP p. II-99, point 32), en revanche, il ne saurait être exigé de celle-ci qu'elle se prononce à nouveau sur des aspects de sa décision qui n'ont pas été mis en cause par l'arrêt d'annulation.

  54. Dans ces conditions, ainsi que le fait valoir la République française à juste titre, la réponse de la Commission contenue dans sa lettre du 13 octobre 1995, pour autant qu'elle a trait au rejet du grief tiré de l'existence d'une entente entre sociétés de gestion de droits d'auteur quant au taux des redevances, constitue une décision purement confirmative de sa précédente décision du 12 novembre 1992. Par cette lettre, elle se borne, en effet, à rappeler aux plaignants, et à maintenir de manière non équivoque, la motivation déjà exprimée dans sa première décision, dont la légalité n'avait pas été mise en cause, sur ce point, par l'arrêt Tremblay I.

  55. Cette appréciation est, en outre, confirmée par le fait que les circonstances et conditions dans lesquelles la Commission a rejeté le grief tiré de l'existence d'une entente sur le taux des redevances sont identiques à celles ayant prévalu pour l'adoption de la décision du 12 novembre 1992. En effet, le seul élément concret invoqué par les plaignants à l'appui de ce grief, dans leur lettre à la Commission du 24 juillet 1995, reposait sur des extraits de déclarations du président de la SACEM et du GESAC, lors d'une conférence sur le droit d'auteur, les 16 et 17 mars 1992, à laquelle participait un fonctionnaire de la Commission affecté à la direction générale Industrie (DG III). Or, ainsi que les requérants l'ont admis à l'audience en réponse à une question du Tribunal, il y a lieu de constater que la Commission avait déjà connaissance desdites déclarations, mentionnées au point 92 de l'arrêt Tremblay I, lorsqu'elle a pris sa décision du 12 novembre 1992, de sorte qu'il ne s'agissait pas, en tout état de cause, d'un fait nouveau par rapport à ceux dont avait connaissance la Commission lors de l'adoption de sa décision initiale (voir, à cet égard, l'arrêt Zunis holding e.a./Commission, précité, point 12).

  56. Une décision purement confirmative d'une précédente décision n'étant pas un acte susceptible de recours, il s'ensuit que les requérants ne sont pas recevables à contester, dans le cadre du présent recours, la partie de la décision attaquée concernant le rejet du grief tiré de l'existence d'une entente entre sociétés de gestion de droits d'auteur sur le taux des redevances et à invoquer, à cet égard, une violation de l'article 190 du traité.

  57. S'agissant, en second lieu, de la motivation de la décision litigieuse pour autant qu'elle rejette le grief tiré d'un cloisonnement du marché, le Tribunal rappelle que, selon une jurisprudence constante, l'obligation de motivation consiste à faire apparaître, d'une façon claire et non équivoque, le raisonnement de l'autoritécommunautaire, auteur de l'acte attaqué, de façon à permettre au requérant de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre ses droits et au juge communautaire d'exercer son contrôle (arrêt de la Cour du 17 janvier 1995, Publishers Association/Commission, C-360/92 P, Rec. p. I-23, point 39; arrêts du Tribunal du 29 juin 1993, Asia Motor France e.a./Commission, T-7/92, Rec. p. II-669, point 30, et du 9 janvier 1996, Koelman/Commission, T-575/93, Rec. p. II-1, point 83). A cet égard, la Commission n'est pas obligée, dans la motivation des décisions qu'elle est amenée à prendre pour assurer l'application des règles de concurrence, de prendre position sur tous les arguments que les intéressés invoquent à l'appui de leur demande, mais il suffit qu'elle expose les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l'économie de la décision (voir, notamment, arrêt Asia Motor France e.a./Commission, précité, point 31).

  58. Le Tribunal estime qu'en l'espèce les requérants procèdent à une présentation erronée de la décision attaquée, en soutenant, notamment, que la Commission aurait limité son analyse aux seules clauses d'exclusivité qui figureraient dans les contrats de représentation réciproque conclus entre les sociétés de gestion de droits d'auteur des différents États membres.

  59. En effet, la Commission a, en particulier dans sa lettre article 6 à laquelle la décision attaquée se réfère explicitement, repris de manière extensive les réponses données par la Cour dans ses arrêts Tournier et Lucazeau e.a., précités, quant à l'appréciation, au regard de l'article 85, paragraphe 1, du traité, des contrats de représentation réciproque conclus entre les sociétés de gestion de droits d'auteur. Or, ainsi que l'a exposé la Commission dans ladite lettre (voir ci-dessus point 16), l'appréciation portée par la Cour tenait compte du fait que les clauses d'exclusivité figurant dans les contrats de représentation réciproque avaient été supprimées, sans, toutefois, que le comportement des sociétés de gestion de droits d'auteur, consistant à refuser aux utilisateurs étrangers un accès direct à leur répertoire et à ne confier la gestion de leur répertoire à l'étranger qu'à la société implantée sur le territoire concerné, ait été modifié.

  60. La Commission a ensuite clairement rappelé que, dans ce contexte, selon la jurisprudence de la Cour précitée, le simple parallélisme de comportement des sociétés de gestion de droits d'auteur, évoqué par les plaignants, ne pouvait cependant permettre, à défaut de preuves en ce sens, de présumer de l'existence d'une entente ou d'une pratique concertée entre ces sociétés, dès lors qu'il existait une explication plausible à ce comportement, tenant en l'occurrence au fait que, dans l'état actuel du système de gestion des droits d'auteur, il ne serait pas dans l'intérêt de ces sociétés d'accorder aux utilisateurs situés dans d'autres États un accès direct à leur répertoire en raison des coûts de gestion et de contrôle qu'un tel accès entraînerait.

  61. Ayant enfin relevé, dans sa décision, que les plaignants n'avaient pas présenté, dans leurs observations en date du 24 juillet 1995, de nouveaux éléments de fait ou de droit de nature à modifier les considérations exposées dans sa lettre article 6, la Commission en a déduit que les pratiques des sociétés de gestions de droits d'auteur invoquées par les plaignants n'impliquaient pas l'existence entre elles d'un accord ou d'une pratique concertée contraire à l'article 85, paragraphe 1, du traité. Contrairement à ce que soutiennent par ailleurs les requérants, la Commission n'a donc pas renvoyé l'examen du dossier aux juridictions nationales, mais conclu à l'absence d'une entente contraire à l'article 85, paragraphe 1, du traité, et ce à défaut d'éléments de preuve en ce sens.

  62. Les requérants tentent, en outre, en vue de démontrer un défaut de motivation de la décision attaquée, de tirer prétexte du caractère prétendument insuffisant de l'enquête de la Commission. En particulier, les requérants lui reprochent de ne pas avoir utilisé les moyens dont elle dispose pour enquêter elle-même sur les comportements dénoncés, au seul motif que les plaignants ne lui avaient pas communiqué d'éléments de preuves, ou d'indices concrets, de l'existence d'une entente.

  63. Le Tribunal constate, toutefois, que le défaut de force probante des éléments transmis par les plaignants à la Commission n'est pas contesté par les requérants, qui ne font état, à cet égard, d'aucune erreur de droit ni d'aucune erreur d'appréciation et qui, par ailleurs, ont reconnu lors de l'audience que les éléments apportés n'étaient «pas suffisants [ni] déterminants». Or, à défaut d'éléments de preuves, ou d'indices sérieux suffisants, apportés par les plaignants en vue de démontrer l'existence d'une entente contraire à l'article 85, paragraphe 1, du traité, il ne saurait être reproché à la Commission un manque de diligence dans l'examen de la plainte, du seul fait qu'elle n'a pas ordonné de mesures d'instruction complémentaires. Le Tribunal rappelle à cet égard que, selon une jurisprudence constante, l'obligation qui pèse sur la Commission, lorsqu'elle est saisie au titre de l'article 3 du règlement n° 17, n'est pas de procéder à une instruction, mais d'examiner attentivement les éléments de fait et de droit portés à sa connaissance par la partie plaignante, en vue d'apprécier si lesdits éléments font apparaître un comportement de nature à fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun et à affecter le commerce entre États membres (arrêt de la Cour du 19 octobre 1995, Rendo e.a./Commission, C-19/93 P, Rec. p. I-3319, point 27, et arrêt du Tribunal du 18 septembre 1992, Automec/Commission, dit «Automec II», T-24/90, Rec. p. II-2223, point 79).

  64. Au regard de l'ensemble de ces éléments, le Tribunal estime que la Commission a satisfait à l'obligation qui lui incombe, en cas de rejet d'une plainte, d'indiquer clairement les raisons pour lesquelles l'examen attentif des éléments de fait et de droit portés à sa connaissance par les plaignants ne l'ont pas conduite à entamer une procédure de constatation d'infraction à l'article 85 du traité (voir l'ordonnance de la Cour du 16 septembre 1997, Koelman/Commission, C-59/96 P, non encore publiée au recueil, point 42, et l'arrêt du Tribunal Koelman/Commission, précité, point 40).

  65. Il résulte de tout ce qui précède que le moyen tiré d'une insuffisance de motivation de la décision attaquée doit être rejeté.

    Sur le moyen tiré d'une violation de l'article 176 du traité

    Exposé sommaire de l'argumentation des parties

  66. Les requérants soutiennent que, en adoptant la décision litigieuse, la Commission a violé les obligations qui lui incombaient en vertu de l'article 176 du traité.

  67. En premier lieu, la décision attaquée aurait été prise en méconnaissance de l'arrêt Tremblay I, en ce que, à la suite dudit arrêt, la Commission n'a pas procédé à une enquête, comme le Tribunal le lui aurait demandé. Dans cet arrêt, le Tribunal aurait en effet entendu sanctionner aussi bien l'insuffisance de l'enquête ayant précédé l'adoption de la décision que l'insuffisance de motivation de celle-ci. Les requérants en déduisent que, afin de répondre à cette injonction d'agir, à tout le moins implicite, du Tribunal, il appartenait à la Commission d'utiliser les moyens dont elle dispose pour entreprendre des investigations.

  68. En second lieu, les requérants font grief à la Commission d'avoir adopté la décision litigieuse sans attendre que la Cour ait statué sur le pourvoi formé à l'encontre de l'arrêt Tremblay I, alors que les procédures dans le cadre du pourvoi et du présent recours seraient dépendantes l'une de l'autre.

  69. La Commission rétorque que l'argumentation selon laquelle elle n'aurait pas respecté les demandes du Tribunal en ne procédant pas aux investigations actives qu'impliquerait l'arrêt Tremblay I est fondée sur des prémisses inexactes, dès lors que le Tribunal a annulé la partie de la décision litigieuse relative au grief pris d'un cloisonnement du marché pour violation de l'article 190 du traité, et non pas au titre de l'erreur de droit. Elle considère que la décision attaquée, concluant dans le même sens que celle qu'elle avait prise le 12 novembre 1992, mais motivée, cette fois, suivant les prescriptions de l'article 190 du traité, n'encourt aucun reproche.

  70. A l'argument des requérants tiré de ce que la Commission devait attendre que la Cour ait statué sur le pourvoi formé à l'encontre de l'arrêt Tremblay I, la Commission oppose que la procédure devant la Cour et la présente affaire ont un objet distinct, dans la mesure où le pourvoi formé par les requérants ne vise qu'à l'annulation partielle de l'arrêt Tremblay I, et ce pour autant seulement qu'il n'a pas annulé la partie de la décision rejetant les griefs autres que celui relatif à l'existence d'une entente. Elle considère, dès lors, qu'elle était tenue de reprendre l'examen de la partie de la plainte portant sur l'article 85 du traité, sans attendre l'arrêt de la Cour.

  71. La République française, partie intervenante, fait valoir que l'arrêt Tremblay I était devenu définitif dans sa partie annulant la décision initiale de la Commission, faute de pourvoi formé contre cette partie de l'arrêt, et que la Commission se trouvait donc dans l'obligation, en vertu de l'article 176 du traité, de répondre à la plainte sur ce point. Elle considère, en outre, que, à supposer même qu'un pourvoi ait été formé contre l'ensemble de l'arrêt Tremblay I, la Commission aurait été en droit d'adopter une nouvelle décision si elle estimait être en possession d'éléments suffisants pour le faire, dans la mesure où un pourvoi n'a pas d'effet suspensif, sauf cas particulier non pertinent en l'espèce.

    Appréciation du Tribunal

  72. Il y a lieu de relever, à titre liminaire, que, lorsque le Tribunal annule un acte d'une institution, l'article 176 impose à celle-ci de prendre les mesures que comporte l'exécution de l'arrêt. A cet égard, la Cour ainsi que le Tribunal ont jugé que, pour se conformer à l'arrêt et pour lui donner pleine exécution, l'institution est tenue de respecter non seulement le dispositif de l'arrêt, mais également les motifs qui ont amené à celui-ci et qui en constituent le soutien nécessaire, en ce sens qu'ils sont indispensables pour déterminer le sens exact de ce qui a été jugé dans le dispositif. Ce sont, en effet, ces motifs qui, d'une part, identifient la disposition exacte considérée comme illégale et, d'autre part, font apparaître les raisons exactes de l'illégalité constatée dans le dispositif et que l'institution concernée doit prendre en considération en remplaçant l'acte annulé (arrêt de la Cour du 26 avril 1988, Asteris e.a./Commission, 97/86, 99/86, 193/86 et 215/86, Rec. p. 2181, point 27, et arrêt du Tribunal Frederiksen/Parlement, précité, point 31).

  73. En l'espèce, les requérants invoquent, tout d'abord, une méconnaissance de l'arrêt Tremblay I, qui, selon eux, exigeait de la Commission qu'elle procède à une enquête. Il convient de rappeler, toutefois, qu'il résulte tant du dispositif que des motifs dudit arrêt que le Tribunal a partiellement annulé la précédente décision de la Commission, du 12 novembre 1992, pour violation de l'article 190 du traité, au motif qu'elle ne permettait pas aux requérants de connaître les justifications du rejet de leurs plaintes, pour autant que celles-ci avaient trait à un cloisonnement du marché. Cette conclusion n'impliquait donc nullement que le Tribunal invitait la Commission à procéder à des investigations, ni, à plus forte raison, qu'il lui adressait une quelconque injonction d'agir à cet égard, ce qu'il n'a pas compétence pour faire dans le cadre du contrôle de légalité qu'il exerce (voir ci-dessus point 36). Par ailleurs, le Tribunal ayant constaté, dans le cadre du présent recours (voir ci-dessus point 64), que la Commission a désormais satisfait à l'obligation qui lui incombait, en vertu de l'article 190 du traité, de motiver sa décision à l'égard du grief tiré d'un cloisonnement du marché, l'argument tiré d'une méconnaissance de l'arrêt Tremblay I, et, partant, d'une violation de l'article 176 du traité, est donc inopérant.

  74. Quant à l'argument selon lequel la Commission aurait dû attendre que la Cour ait statué sur le pourvoi formé par les requérants à l'encontre de l'arrêt Tremblay I, avant d'adopter la décision attaquée, le Tribunal l'estime dépourvu de pertinence en l'espèce. En effet, il convient de rappeler que ledit pourvoi ne visait qu'à l'annulation partielle de l'arrêt Tremblay I, pour autant que celui-ci rejetait le recours contre la partie de la décision initiale de la Commission concernant les griefs tirés d'une violation de l'article 86 du traité (voir ci-dessus point 12 et l'arrêt de la Cour du 24 octobre 1996, Tremblay e.a./Commission, précité). Le Tribunal relève qu'en revanche aucun pourvoi n'a été introduit à l'encontre de l'arrêtTremblay I pour autant que celui-ci annulait la partie de la décision de la Commission concernant le rejet du grief tiré d'un cloisonnement du marché résultant d'une prétendue entente entre sociétés de gestion de droits d'auteur, en violation de l'article 85 du traité. L'arrêt du Tribunal étant donc devenu définitif sur ce dernier point, il s'ensuit que la Commission n'était pas tenue d'attendre l'arrêt de la Cour pour prendre une nouvelle décision à cet égard.

  75. Il résulte de ces éléments que le moyen doit être rejeté.

    Sur le troisième moyen, tiré d'une violation du traité et d'un détournement de pouvoir

    Argumentation des parties

  76. Les requérants estiment que le comportement de la Commission est constitutif d'une violation du traité et d'un détournement de pouvoir. Selon eux, en s'abstenant volontairement, malgré leurs demandes, de procéder à l'instruction du dossier, ou, à tout le moins, en se limitant à des investigations «passives», la Commission aurait favorisé la pérennité de l'entente alléguée et, de ce fait, poursuivi des fins autres que celles en vue desquelles les pouvoirs prévus par le traité lui ont été attribués (arrêts de la Cour du 8 juillet 1965, Chambre syndicale de la sidérurgie française e.a./Haute autorité, 3/64 et 4/64, Rec. p. 567, du 8 juin 1988, Vlachou/Cour des comptes, 135/87, Rec. p. 2901, et du 17 janvier 1992, Hochbaum/Commission, C-107/90 P, Rec. p. I-157). A l'appui de ce moyen, les requérants se réfèrent à des extraits de déclarations du président de la SACEM et du GESAC lors d'une conférence sur le droit d'auteur qui a eu lieu à Madrid les 16 et 17 mars 1992.

  77. La Commission souligne qu'une allégation de détournement de pouvoir ne peut être prise en considération que s'il apparaît, sur la base d'indices objectifs, pertinents et concordants que l'acte en cause a été pris dans le but exclusif ou déterminant d'atteindre des fins autres que celles excipées ou d'éluder une procédure spécialement prévue par le traité pour parer aux circonstances de l'espèce (arrêt de la Cour du 5 octobre 1994, Crispoltoni e.a., C-133/93, C-300/93 et C-362/93, Rec. p. I-4863). Par ailleurs, le fait de ne pas avoir accueilli dans la décision litigieuse les arguments développés par les plaignants au cours de l'instruction ne saurait être, en soi, constitutif d'un détournement de pouvoir (arrêt de la Cour du 7 mai 1991, Nakajima/Conseil, C-69/89, Rec. p. I-2069). En l'espèce, la Commission estime qu'aucun élément n'a été avancé par les requérants pour démontrer leur affirmation d'une absence d'instruction ou d'investigations passives ayant comme but de protéger une entente sur les prix au bénéfice de la SACEM.

  78. La République française ne présente, quant à elle, aucune observation particulière.

    Appréciation du Tribunal

  79. En ce qui concerne, tout d'abord, le grief tiré d'une prétendue violation du traité par la Commission, le Tribunal rappelle que, selon l'article 19, premier alinéa, du protocole sur le statut (CE) de la Cour, applicable au Tribunal en vertu de l'article 46, premier alinéa, dudit statut, et l'article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, la requête introductive d'instance doit contenir un exposé sommaire des moyens invoqués. Cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant sans autres informations à l'appui. La requête doit, de ce fait, expliciter en quoi consiste le moyen sur lequel le recours est basé, de sorte que sa seule énonciation abstraite ne répond pas aux exigences du statut de la Cour et du règlement de procédure (arrêt du Tribunal du 12 janvier 1995, Viho/Commission, T-102/92, Rec. p. II-17, point 68).

  80. En l'espèce, il y a lieu de constater que les requérants évoquent une violation du traité par la Commission, sans faire aucune référence explicite aux dispositions qu'ils estiment violées. Dans leur requête, les requérants indiquent en effet, de manière générale, que «l'insuffisance de motivation, qui sert souvent à couvrir une violation du traité comme en l'espèce, peut provenir [...] d'une insuffisance de traitement d'un dossier», ou encore que «rejoignant une violation du traité, le comportement de la Commission constitue également un détournement de pouvoir».

  81. Le Tribunal estime que ces allégations, telles qu'elles ont été formulées par les requérants, ne lui permettent pas de déterminer avec suffisamment de précision la nature et l'objet du grief reproché à la Commission ni, à plus forte raison, d'identifier les dispositions du traité que la Commission aurait méconnues. Le Tribunal relève, en outre, que l'argumentation des requérants n'a pas permis à la Commission de présenter des observations spécifiques quant à une prétendue violation du traité et de défendre effectivement ses intérêts sur ce point.

  82. Dans ces conditions, le grief tiré d'une prétendue violation du traité par la Commission doit être rejeté comme irrecevable.

  83. Quant au grief tiré d'un détournement de pouvoir, le Tribunal constate que, à l'appui de leurs allégations, les requérants invoquent les extraits du compte rendu d'une conférence sur le droit d'auteur, ayant eu lieu à Madrid les 16 et 17 mars 1992 (voir ci-dessus point 55). Or, il convient de rappeler que, dans son arrêt Tremblay I, le Tribunal a déjà jugé qu'il ne pouvait trouver, dans ces extraits, les indices nécessaires permettant d'inférer l'existence d'un détournement de pouvoir (voir point 92 de l'arrêt). Il s'ensuit que le moyen doit être rejeté.

  84. Il résulte de l'ensemble des considérations qui précèdent que le recours doit être rejeté dans son intégralité.

    Sur les dépens

  85. Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Les requérants ayant succombé en leurs moyens et la Commission ayant conclu en ce sens, il y a lieu de les condamner aux dépens.

  86. Toutefois, la République française, qui est intervenue au litige, supportera ses propres dépens, en application de l'article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure.

    Par ces motifs,

    LE TRIBUNAL (deuxième chambre)



    déclare et arrête:

    1. Le recours est rejeté.

    2. Les requérants sont condamnés aux dépens de l'instance.

    3. La République française supportera ses propres dépens.

    BellamyKalogeropoulos
    Cooke

    Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 27 novembre 1997.

    Le greffier

    Le président

    H. Jung

    A. Kalogeropoulos


1: Langue de procédure: le français.