Language of document : ECLI:EU:T:2010:237

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

16 juin 2010 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale KREMEZIN – Marque internationale verbale antérieure KRENOSIN – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Similitude des signes – Similitude des produits – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009] – Preuve de l’existence de la marque antérieure – Délais – Règles 19 et 20 du règlement (CE) nº 2868/95 – Preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure – Article 43, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 40/94 (devenu article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009) »

Dans l’affaire T‑487/08,

Kureha Corp., établie à Tokyo (Japon), représentée par Mes W. von der Osten-Sacken et O. Sude, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. J. Crespo Carrillo, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Sanofi-Aventis SA, établie à Paris (France), représentée par MR. Gilbey, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 15 septembre 2008 (affaire R 1631/2007‑4), relative à une procédure d’opposition entre Sanofi-Aventis SA et Kureha Corp.,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de Mme M. E. Martins Ribeiro, président, MM. N. Wahl (rapporteur) et A. Dittrich, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 17 novembre 2008,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 4 mars 2009,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 12 février 2009,

vu la décision du 6 mai 2009, refusant d’autoriser le dépôt d’un mémoire en réplique,

vu la lettre de la requérante déposée au greffe du Tribunal le 12 août 2009, indiquant qu’elle retirait sa demande initiale, faite par lettre du 17 juillet 2009, de fixation d’une audience,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les autres parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Le 22 octobre 2002, la requérante, Kureha Corp., a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal KREMEZIN.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, après la limitation intervenue au cours de la procédure devant l’OHMI, de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Produits pharmaceutiques, tous pour le traitement de maladies rénales, maladie du foie, diabète sucré et maladie de Crohn, tous sous forme de gélules, sachets ou pochettes, gelée, gelée sèche ou en bouteilles, tous à administration orale et aucun n’étant administré par intraveineuse ou utilisé dans le traitement de troubles cardiaques ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 74/2003, du 22 septembre 2003.

5        Le 19 décembre 2003, l’intervenante, Sanofi-Aventis SA, a formé opposition au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque internationale verbale antérieure KRENOSIN, enregistrée le 29 juin 1990 sous le numéro 529937, pour des « produits pharmaceutiques, vétérinaires et hygiéniques » relevant de la classe 5 et désignant notamment l’Allemagne, le Benelux, l’Espagne, la Hongrie, l’Italie et le Portugal. L’intervenante a joint à son acte d’opposition une copie de la publication officielle de cet enregistrement international établi par l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI).

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009].

8        Par télécopie du 29 janvier 2004, la division d’opposition, d’une part, a informé l’intervenante que son acte d’opposition avait été transmis à la requérante et, d’autre part, l’a invitée à fournir, dans un délai de quatre mois, les faits, preuves et observations étayant l’opposition. Sur demande des parties, ce délai a été prorogé jusqu’au 30 novembre 2005.

9        Par télécopie du 17 février 2004 adressée à l’OHMI, la requérante a soutenu que l’opposition de l’intervenante devait être déclarée irrecevable, dès lors que l’acte d’opposition n’indiquait pas clairement les pays dans lesquels la marque antérieure avait effectivement des effets. À cet égard, elle a souligné que l’intervenante n’avait fourni aucune preuve indiquant que la protection de sa marque antérieure n’avait pas été refusée dans un ou plusieurs des États désignés. Cette communication n’a pas été signifiée à l’époque par l’OHMI à l’intervenante.

10      Le 11 mars 2004, la requérante a demandé à l’OHMI que l’intervenante produise des éléments de preuve de l’usage de la marque antérieure.

11      Par télécopie du 17 mars 2004, l’OHMI a informé la requérante qu’il considérait recevable l’acte d’opposition, puisque celui-ci identifiait les pays désignés par l’enregistrement international de la marque antérieure, ce qui, selon l’OHMI, était suffisant aux fins de la recevabilité. Dans ladite télécopie, l’OHMI a précisé que les preuves étayant l’opposition sur le fond devraient être produites par l’intervenante dans une phase ultérieure.

12      Le 27 mai 2004, l’intervenante a transmis à l’OHMI des documents afin de démontrer l’usage sérieux de sa marque antérieure en Italie.

13      Dans ses observations du 9 juin 2006, la requérante a réitéré ses doutes concernant la recevabilité de l’acte d’opposition. Elle a également constaté que, malgré le fait que la division d’opposition ait indiqué dans sa communication du 17 mars 2004 adressée à la requérante, que l’intervenante devrait étayer son opposition quant au fond au cours de la procédure, cette dernière ne l’avait pas fait. En effet, l’intervenante n’aurait fourni aucun élément à cet égard à l’OHMI avant le 30 novembre 2005, date d’échéance du délai pour la production des données au titre de la règle 19, paragraphe 2, du règlement (CE) nº 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement nº 40/94 (JO L 303, p. 1). Partant, l’intervenante n’aurait pas produit de preuves indiquant que la protection de sa marque n’avait pas été refusée dans un ou plusieurs États membres désignés. La requérante en a conclu que l’opposition devait être rejetée. Pour la même raison, la requérante a considéré comme dénuées de pertinence les preuves fournies par l’intervenante afin de démontrer un usage sérieux de la marque antérieure, étant donné que, selon la requérante, l’intervenante n’avait pas même démontré l’existence de la marque antérieure.

14      Dans ses observations du 9 juin 2006, la requérante a également allégué que les éléments fournis par l’intervenante afin de démontrer un usage sérieux de la marque antérieure ne couvraient que l’Italie pour un produit constitué d’une solution stérile d’adénosine destinée au traitement d’un problème cardiaque, administré par intraveineuse dans les hôpitaux. D’après la requérante, cela impliquait qu’il existait une distinction entre les produits visés par la marque antérieure, d’une part, et les produits visés par la marque demandée, d’autre part.

15      Le 26 juin 2006, la division d’opposition a invité l’intervenante à se prononcer, dans un délai de deux mois, sur les observations émises par la requérante le 9 juin 2006.

16      Dans ses observations du 16 août 2006, l’intervenante a réfuté les arguments de la requérante relatifs à l’absence de preuve dans le dossier étayant l’existence de son droit antérieur. À cet égard, l’intervenante a considéré que la publication officielle de l’enregistrement de sa marque antérieure par l’OMPI avait apporté la preuve de l’existence de ladite marque, ce que la requérante ne contestait pas et ne pouvait pas contester.

17      Le 13 octobre 2006, la division d’opposition a signifié aux parties qu’elles ne pouvaient plus soumettre de nouvelles observations et que, sur la base des documents figurant au dossier, elle allait rendre une décision. Par télécopie du 4 juin 2007, la division d’opposition a néanmoins invité l’intervenante à fournir la preuve de ce qu’une protection de sa marque antérieure avait effectivement été accordée dans un ou plusieurs des pays désignés par l’enregistrement international. La division d’opposition a précisé que sa demande faisait suite à celle de la requérante, exposée dans ses observations du 9 juin 2006 (voir point 13 ci-dessus).

18      Le 20 juin 2007, l’intervenante a fourni à la division d’opposition un extrait de la base de données des marques internationales Romarin, obtenu sur le site Internet officiel de l’OMPI (ci-après l’« extrait Romarin »), attestant le fait que l’enregistrement avait été intégralement accordé, notamment, en Italie.

19      Dans sa décision du 20 août 2007, la division d’opposition a fait droit à l’opposition en rejetant la demande de marque communautaire. À l’appui de sa conclusion, elle a considéré que le niveau d’attention du public pertinent était normal et que tant les marques que les produits en cause étaient similaires.

20      Le 15 octobre 2007, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94 (devenu articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009), contre la décision de la division d’opposition.

21      Par décision du 15 septembre 2008 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours.

22      En particulier, elle a considéré que, d’une part, l’acte d’opposition était recevable et, d’autre part, que l’intervenante avait, en fournissant l’extrait Romarin en réponse à la demande du 4 juin 2007 de la division d’opposition, prouvé à suffisance de droit l’existence de son droit antérieur. En outre, la chambre de recours a considéré que, en raison du degré élevé de similitude entre les produits en cause et du degré moyen de similitude entre les marques en conflit, il existait un risque de confusion entre lesdites marques sur le territoire italien.

 Conclusions des parties

23      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’intervenante aux dépens.

24      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

25      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal de rejeter le recours.

 En droit

26      À l’appui de son recours, la requérante invoque, en substance, trois moyens, tirés, respectivement, de la présentation tardive de la preuve de l’existence de la marque antérieure, de la détermination erronée des produits couverts par la marque antérieure, et d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

 Sur la présentation tardive de la preuve de l’existence de la marque antérieure

 Arguments des parties

27      Par son premier moyen, la requérante fait valoir en substance que c’est à tort que la division d’opposition a conclu que l’existence du droit antérieur avait été suffisamment prouvée. Selon la requérante, l’intervenante n’avait pas prouvé l’existence de son droit antérieur avant le 30 novembre 2005, délai impératif imposé par l’OHMI en application de la règle 19, paragraphe 2, du règlement nº 2868/95.

28      La requérante allègue que la division d’opposition a commis des erreurs en droit, tant en invitant après le 30 novembre 2005 l’intervenante à fournir la preuve de l’existence de son droit antérieur qu’en fondant sa décision sur l’extrait Romarin produit par l’intervenante le 20 juin 2007. La requérante prétend en outre que le 13 octobre 2006, la division d’opposition a signifié aux parties qu’elles ne pouvaient plus soumettre de nouvelles observations et qu’elle allait rendre une décision sur la base des documents figurant au dossier. Cela signifierait que l’OHMI n’était pas autorisé à prendre en compte les preuves supplémentaires fournies le 20 juin 2007.

29      Procéder de la sorte enfreindrait les formes substantielles et constituerait un détournement de pouvoir ainsi qu’une violation de la règle 19, paragraphes 1 et 2, et de la règle 20, paragraphe 1, du règlement nº 2868/95.

30      Partant, la décision attaquée serait viciée, dès lors que la chambre de recours n’aurait pas sanctionné les erreurs commises par la division d’opposition.

31      L’OHMI et l’intervenante contestent les arguments de la requérante. De plus, l’OHMI excipe une fin de non-recevoir. À cet égard, il relève que la requérante n’a pas, au cours de la procédure devant la chambre de recours, reproché à la division d’opposition d’avoir violé des dispositions pertinentes relatives aux délais, mais s’est contentée de demander que l’opposition soit déclarée irrecevable. Partant, le moyen de la requérante modifierait l’objet du litige devant la chambre de recours, ce qui constituerait une violation de l’article 135, paragraphe 4, du règlement de procédure du Tribunal.

 Appréciation du Tribunal

32      À titre liminaire, il convient d’examiner la fin de non-recevoir soulevée par l’OHMI, selon laquelle le premier moyen modifierait l’objet du litige devant la chambre de recours.

33      Il ressort du dossier que la requérante se fonde devant le Tribunal sur les faits et les arguments qu’elle avait présentés devant la division d’opposition et la chambre de recours en ce qui concerne l’absence de preuve de l’existence de la marque antérieure. En effet, tant devant les deux instances de l’OHMI que devant le Tribunal, la requérante allègue que l’intervenante n’avait pas présenté avant le 30 novembre 2005, délai fixé par l’OHMI en application de la règle 19, paragraphe 2, du règlement nº 2868/95, de preuve de l’existence de sa marque antérieure et que, par conséquent, la division d’opposition n’était pas en droit de prendre en compte les pièces produites après l’expiration dudit délai.

34      Par ailleurs, au point 10 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que l’existence de la marque antérieure avait été dûment démontrée en temps utile.

35      Il s’ensuit que, en contestant que le droit antérieur de l’intervenante ait été prouvé à suffisance de droit en temps utile et que la division d’opposition ait été en droit de prendre en compte l’élément de preuve fourni par l’intervenante après le 30 novembre 2005, la requérante ne modifie pas l’objet du litige. Partant, il y a lieu de rejeter la fin de non-recevoir soulevée par l’OHMI.

36      Quant au fond, il y a lieu de rappeler qu’il ressort de la règle 19, paragraphes 1 et 2, et de la règle 20, paragraphe 1, du règlement n° 2868/95, qu’il appartient à l’opposant de fournir la preuve de l’existence, de la validité et de l’étendue de la protection de sa marque antérieure dans le délai fixé par l’OHMI. À défaut, l’OHMI est tenu de rejeter l’opposition comme non fondée.

37      Il y a également lieu de rappeler qu’il est constant entre les parties que, d’une part, le délai prévu par la règle 19, paragraphe 2, du règlement n° 2868/95 a expiré le 30 novembre 2005 et, d’autre part, l’OHMI n’a pas explicitement invité l’intervenante à produire des preuves relatives à l’existence de la protection de sa marque antérieure avant ladite date.

38      En ce qui concerne les marques internationales, il importe de souligner que leur protection peut être refusée postérieurement à leur enregistrement par une ou plusieurs autorités nationales des pays désignés par un tel enregistrement. À cet égard, la pratique courante de l’OHMI, telle qu’elle ressort de la partie C des directives relatives à la procédure d’opposition devant l’OHMI, telles qu’applicables à l’époque des faits, était d’admettre la publication de l’OMPI comme preuve suffisante de l’enregistrement. Ce n’était que si le demandeur contestait l’enregistrement de la marque en cause sur un territoire que l’opposant devait fournir la preuve que la marque n’avait pas été refusée.

39      Dans ce contexte, il convient de relever que les directives relatives à la procédure d’opposition ne constituent que la codification d’une ligne de conduite que l’OHMI se propose d’adopter, de sorte que, sous réserve de leur conformité aux dispositions de droit applicables, il en résulte une autolimitation, en ce qu’il lui appartient de se conformer aux règles de conduite qu’il s’est imposées [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 12 mai 2009, Jurado Hermanos/OHMI (JURADO), T‑410/07, non encore publié au Recueil, point 20].

40      Or, aucune disposition des règlements nos 40/94 et 2868/95 ne s’oppose à ce que les instances de l’OHMI considèrent que la publication par l’OMPI de l’enregistrement international satisfait aux exigences requises par la règle 19, paragraphe 2, du règlement nº 2868/95. La requérante n’a d’ailleurs pas contesté la conformité du passage des directives relatives à la procédure d’opposition mentionné au point 38 ci-dessus aux dispositions desdits règlements.

41      Par conséquent, la contestation éventuelle de la valeur probante d’une publication de l’OMPI de l’enregistrement international est régie par la règle 20, paragraphes 2 et 4, du règlement n° 2868/95, dès lors que ces deux dispositions règlent l’échange d’observations et de preuves entre les parties par l’intermédiaire de l’OHMI, tandis que la règle 19 de ce même règlement ne concerne que la communication entre l’OHMI et l’opposant.

42      Il convient également de rappeler qu’il ressort d’une lecture combinée de l’article 43, paragraphe 1, du règlement n° 40/94 (devenu article 42, paragraphe 1, du règlement nº 207/2009), de l’article 74, paragraphe 2, dudit règlement (devenu article 76, paragraphe 2, du règlement nº 207/2009) et des règles 19 et 20 du règlement n° 2868/95 que, dans le cadre de l’application de la règle 20 du règlement n° 2868/95, l’OHMI peut, d’une part, inviter les parties à produire des observations aussi souvent qu’il le juge nécessaire, et, d’autre part, prendre en compte, s’il le juge opportun, des éléments qui lui sont communiqués hors délais par les parties.

43      C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner le bien-fondé du premier moyen selon lequel l’existence de la marque antérieure de l’intervenante n’avait pas été prouvée en temps utile.

44      À cet égard, il convient de considérer que, au vu du libellé des directives relatives à la procédure d’opposition et de la communication du 17 février 2004 de la requérante à l’OHMI ainsi que de la réponse de l’OHMI le 17 mars 2004 (voir points 9 et 11 ci-dessus), l’OHMI était tenu, afin de trancher le litige, de solliciter auprès de l’intervenante la production d’éléments démontrant que l’enregistrement de la marque antérieure n’avait pas été refusé dans les États membres désignés.

45      Le fait que l’OHMI n’a pas explicitement invité l’intervenante à fournir lesdits éléments avant le 30 novembre 2005, date à laquelle le délai prévu par la règle 19, paragraphe 2, du règlement n° 2868/95 a expiré, ne saurait entraîner l’annulation de la décision attaquée.

46      En effet, à la suite de la contestation par la requérante de la valeur probante des preuves fournies par l’opposante, l’OHMI a agi conformément à la règle 20, paragraphe 4, du règlement n° 2868/95 et aux directives relatives à la procédure d’opposition en invitant l’intervenante à fournir des éléments de preuve supplémentaires démontrant que l’enregistrement de sa marque n’avait pas été refusé dans un ou plusieurs États membres désignés.

47      Il convient également de relever que, ainsi qu’il ressort du point 42 ci-dessus, même si la division d’opposition avait, déjà en 2004, demandé à l’intervenante, ce qu’elle n’a cependant pas fait, de fournir des éléments démontrant que l’enregistrement de la marque antérieure n’avait pas été refusé dans les États membres désignés, aucune disposition ne l’aurait empêchée de réitérer cette demande en 2007. Cette conclusion ne saurait être infirmée par le fait que la division d’opposition a, le 13 octobre 2006, signifié aux parties qu’elles ne pouvaient plus soumettre de nouvelles observations.

48      Il découle de tout ce qui précède que, bien que le traitement de la demande de la requérante du 17 février 2004 ait été d’une lenteur regrettable, puisque ce n’est que le 4 juin 2007 que la division d’opposition a explicitement invité l’intervenante à fournir des éléments démontrant que l’enregistrement de la marque antérieure n’avait pas été refusé dans les États membres désignés, la décision attaquée ne saurait être annulée.

49      Il s’ensuit que le premier moyen doit être rejeté comme non fondé.

 Sur la détermination erronée des produits couverts par la marque antérieure

 Arguments des parties

50      La requérante conteste l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle la marque antérieure a été utilisée pour des « produits pharmaceutiques destinés au traitement du cœur ».

51      D’après la requérante, la chambre de recours a méconnu l’article 43, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 40/94 (devenu article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement nº 207/2009) et la règle 22, paragraphe 3, du règlement n° 2868/95 en ayant retenu une catégorisation trop large, dès lors que la preuve transmise par l’intervenante pour attester l’usage de sa marque antérieure ne démontrait que l’utilisation de ladite marque pour un produit, à savoir une « solution stérile d’adénosine destinée au traitement d’un problème cardiaque particulier, et administrée par intraveineuse dans les hôpitaux ».

52      La requérante soutient également qu’il ressort de l’article 8, paragraphe 3, sous b), de la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 novembre 2001, instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain (JO L 311, p. 67), telle que modifiée par la directive 2004/27/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004 (JO L 136, p. 34), que la marque antérieure ne peut être utilisée que pour un seul produit et non pour une vaste gamme de produits.

53      L’OHMI et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

 Appréciation du Tribunal

54      Il convient d’emblée de relever que le renvoi par la requérante à l’article 8, paragraphe 3, sous b), de la directive 2001/83/CE est dénué de pertinence en l’espèce. Le fait que ladite disposition précise que le nom du médicament doit être fourni dans la demande d’autorisation de mise sur le marché dudit médicament n’a en effet aucune incidence sur l’application de l’article 43 du règlement n° 40/94 et de la règle 22 du règlement n° 2868/95.

55      En ce qui concerne le grief selon lequel la chambre de recours a méconnu l’article 43, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 40/94, il convient de rappeler qu’il ressort desdits paragraphes, lus à la lumière du considérant 9 dudit règlement (devenu considérant 10 du règlement n° 207/2009), et de la règle 22, paragraphe 3, du règlement n° 2868/95, que la ratio legis de l’exigence selon laquelle la marque antérieure doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux pour être opposable à une demande de marque communautaire consiste à limiter les conflits entre deux marques, pour autant qu’il n’existe pas de juste motif économique découlant d’une fonction effective de la marque sur le marché. En revanche, lesdites dispositions ne visent ni à évaluer la réussite commerciale, ni à contrôler la stratégie économique d’une entreprise, ni à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 8 juillet 2004, Sunrider/OHMI – Espadafor Caba (VITAFRUIT), T‑203/02, Rec. p. II‑2811, points 36 à 38, et la jurisprudence citée].

56      Par ailleurs, il résulte de l’article 43, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 40/94 que, si une marque a été enregistrée pour une catégorie de produits suffisamment large pour que puissent être distinguées, en son sein, plusieurs sous-catégories susceptibles d’être envisagées de manière autonome, la preuve de l’usage sérieux de la marque pour une partie de ces produits n’emporte protection, dans une procédure d’opposition, que pour la ou les sous-catégories dont relèvent les produits ou les services pour lesquels la marque a été effectivement utilisée [arrêts du Tribunal du 14 juillet 2005, Reckitt Benckiser (España)/OHMI – Aladin (ALADIN), T‑126/03, Rec. p. II‑2861, point 45, et du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec. p. II‑449, point 23].

57      En effet, si la notion d’usage partiel a pour fonction de ne pas rendre indisponibles des marques dont il n’a pas été fait usage pour une catégorie de produits donnée, elle ne doit néanmoins pas avoir pour effet de priver le titulaire de la marque antérieure de toute protection pour des produits qui, sans être rigoureusement identiques à ceux pour lesquels il a pu prouver un usage sérieux, ne sont pas essentiellement différents de ceux-ci et relèvent d’un même groupe qui ne peut être divisé autrement que de façon arbitraire. Il convient à cet égard d’observer qu’il est en pratique impossible au titulaire d’une marque d’apporter la preuve de l’usage de celle-ci pour toutes les variantes imaginables des produits concernés par l’enregistrement. Par conséquent, la notion de « partie des produits ou services » ne peut s’entendre de toutes les déclinaisons commerciales de produits ou de services analogues, mais seulement de produits ou de services suffisamment différenciés pour pouvoir constituer des catégories ou des sous-catégories cohérentes (arrêts ALADIN, point 56 supra, points 46 et 51, et RESPICUR, point 56 supra, point 24).

58      En l’espèce, il y a lieu de relever que la catégorie des produits pharmaceutiques constitue une catégorie suffisamment vaste pour que l’on puisse distinguer en son sein différentes sous-catégories susceptibles d’être envisagées de manière autonome [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 17 octobre 2006, Armour Pharmaceutical/OHMI – Teva Pharmaceutical Industries (GALZIN), T‑483/04, Rec. p. II‑4109, point 28, et RESPICUR, point 56 supra, point 26].

59      Dans ce contexte, il convient de souligner, d’une part, que le critère de la finalité ou de la destination du produit est un critère primordial dans la définition d’une sous-catégorie de produits et, d’autre part, que la finalité ainsi que la destination d’un produit thérapeutique sont exprimées par son indication thérapeutique. Il importe par ailleurs de rappeler qu’une affection médicale déterminée peut souvent être traitée par plusieurs médicaments prenant différentes formes pharmaceutiques, contenant différentes substances actives, dont certains sont susceptibles d’être disponibles en vente libre tandis que d’autres sont soumis à prescription médicale et doivent être administrés par du personnel médical (voir, en ce sens, arrêt RESPICUR, point 56 supra, points 29 à 31).

60      À la lumière des considérations exposées aux points 56 à 59 ci-dessus, il y a lieu de constater que la sous-catégorie de produits proposée par la requérante, à savoir une « solution stérile d’adénosine destinée au traitement d’un problème cardiaque particulier, et administrée par intraveineuse dans les hôpitaux » ne saurait être retenue. En effet, cette définition n’est pas compatible avec la jurisprudence citée ci-dessus dès lors que, en retenant non seulement l’indication thérapeutique, mais également la forme pharmaceutique (liquide), la substance active (adénosine) et le mode et le lieu de l’administration (intraveineuse dans un hôpital), cette définition englobe uniquement des produits qui sont presque identiques à ceux couverts par la marque de l’intervenante et ne correspond pas à une catégorie ou à une sous-catégorie de produits.

61      En revanche, la sous-catégorie de produits identifiée par la division d’opposition et confirmée par la chambre de recours, à savoir les « produits pharmaceutiques destinés au traitement du cœur », doit être approuvée dans la mesure où, d’une part, elle est fondée sur l’indication thérapeutique des produits en cause et, d’autre part, elle est suffisamment large pour ne pas se heurter à l’intérêt légitime de l’intervenante de pouvoir, à l’avenir, étendre sa gamme de produits ou de services en bénéficiant de la protection que l’enregistrement de ladite marque lui confère.

62      Il découle de tout ce qui précède qu’il convient de rejeter le deuxième moyen comme non fondé.

 Sur la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94

 Arguments des parties

63      La requérante soutient, en substance, que l’appréciation de la chambre de recours quant à la similitude des produits et des marques en cause est erronée et que c’est à tort que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion entre lesdites marques. En outre, la requérante allègue que les produits en cause visent des clients différents et que le public pertinent a un degré d’attention plus élevé que la moyenne.

64      L’OHMI et l’intervenante contestent les griefs de la requérante.

 Appréciation du Tribunal

65      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), iii), du règlement n° 40/94, [devenu article 8, paragraphe 2, sous a), iii), du règlement n° 207/2009], il convient notamment d’entendre par marques antérieures les marques qui ont fait l’objet d’un enregistrement international produisant des effets dans un État membre et dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

66      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance entre la similitude des signes et celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

67      S’agissant du public pertinent, il importe de rappeler que, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause (voir arrêt RESPICUR, point 56 supra, point 42, et la jurisprudence citée).

68      Il ressort de la jurisprudence que, dans la mesure où les produits en cause sont des produits pharmaceutiques, qui, comme en l’espèce, sont susceptibles d’être soumis à une prescription médicale, le public pertinent est constitué à la fois des consommateurs finaux et des professionnels de la santé, c’est-à-dire des médecins, qui prescrivent le médicament, ainsi que des pharmaciens, qui vendent le médicament prescrit (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, Rec. p. I‑3569, points 52 et 63).

69      Il y a lieu de relever, en outre, que le niveau d’attention du consommateur moyen de produits pharmaceutiques doit être déterminé au cas par cas, en fonction des circonstances de l’espèce et, notamment, des indications thérapeutiques des produits concernés. En l’occurrence, il convient de constater que le public pertinent manifestera un degré d’attention supérieur à la moyenne, étant donné que les pathologies que les produits en cause visent à soigner sont relativement graves (voir, en ce sens, arrêt RESPICUR, point 56 supra, point 46).

70      En ce qui concerne la similitude des produits en cause, la requérante soutient que c’est à tort que la chambre de recours n’a pas pris en compte, d’une part, le fait que la marque antérieure a uniquement été utilisée pour un produit consistant en une solution stérile d’adénosine destiné au traitement d’un problème cardiaque, administré par intraveineuse dans les hôpitaux, et, d’autre part, le fait que les produits pour lesquels l’enregistrement de la marque a été demandé sont destinés au traitement de maladies rénales, de maladies du foie, du diabète sucré et de la maladie de Crohn, aucun n’étant administré par intraveineuse ou utilisé dans le traitement de troubles cardiaques.

71      Il convient de souligner que, afin d’apprécier la similitude des produits en cause, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, il y a lieu de prendre en compte le groupe de produits protégé par les marques en conflit et non les produits effectivement commercialisés sous ces marques.

72      Partant, et au vu de la conclusion retenue au point 61 ci-dessus selon laquelle la chambre de recours a, à juste titre, identifié les produits protégés par la marque antérieure comme étant des produits pharmaceutiques destinés au traitement du cœur, il convient d’approuver l’analyse comparative des produits visés par les marques en conflit faite par la chambre de recours au point 20 de la décision attaquée.

73      En effet, ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits visés par les marques en conflit, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre ces produits, ces facteurs incluant, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire [voir arrêts de la Cour du 11 mai 2006, Sunrider/OHMI, C‑416/04 P, Rec. p. I‑4237, point 85, et du Tribunal du 12 novembre 2008, Scil proteins/OHMI – Indena (affilene), T‑87/07, non publié au Recueil, point 35, et la jurisprudence citée].

74      D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que, par exemple, les canaux de distribution des produits concernés [arrêt du Tribunal du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, Rec. p. II‑2579, point 37 ; voir également, en ce sens, arrêt du Tribunal du 21 avril 2005, Ampafrance/OHMI – Johnson & Johnson (monBeBé), T‑164/03, Rec. p. II‑1401, point 53].

75      Or, force est de constater que, en l’espèce les produits visés par les marques en conflit sont de même nature, à savoir des produits pharmaceutiques, s’adressent aux mêmes consommateurs, à savoir des professionnels de santé et des patients, et empruntent les mêmes canaux de distribution, à savoir des centres de santé et des pharmacies. Leurs seules différences tiennent à leurs indications thérapeutiques.

76      Dans ces circonstances, il y a lieu de considérer que les éléments de similitude l’emportent sur les éléments de différence et que les produits en cause sont dès lors similaires, l’exclusion par la requérante des médicaments « administré[s] par intraveineuse ou utilisé[s] dans le traitement de troubles cardiaques » de la liste des produits visés dans la demande de marque étant, à cet égard, sans incidence.

77      Le Tribunal ne juge cependant pas, contrairement à ce que la chambre de recours a indiqué au point 9 de la décision attaquée, que les produits en cause présentent un degré élevé de similitude, dès lors que leurs indications thérapeutiques sont très différentes.

78      Quant à la similitude des marques en conflit, il convient de rappeler, d’une part, que sont en cause la marque verbale antérieure KRENOSIN et la marque verbale KREMEZIN, dont l’enregistrement est demandé par la requérante, et, d’autre part, que l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants [voir arrêt du Tribunal du 17 novembre 2005, Biofarma/OHMI – Bausch & Lomb Pharmaceuticals (ALREX), T‑154/03, Rec. p. II‑4743, point 52, et la jurisprudence citée].

79      En l’espèce, la requérante affirme que la chambre de recours n’a pas accordé suffisamment d’attention aux éléments dominants et distinctifs des marques en conflit, à savoir le caractère visuel de la lettre « o », qui forme presque un cercle et constitue l’élément visuel dominant de la marque antérieure, séparant presque ladite marque en deux éléments (« kren » et « sin »). Dans la mesure où la demande de marque communautaire est dépourvue de ce fort impact visuel, il existerait des différences suffisantes entre les marques en conflit.

80      D’un point de vue phonétique, la requérante soutient que la chambre de recours a, dans la décision attaquée, omis de tenir compte de la particularité phonétique de la voyelle « o » et du fait que la tonalité des voyelles « e » et « o » est très différente. Selon la requérante, la similitude phonétique des marques est assez faible.

81      S’agissant de la comparaison visuelle des marques en conflit, il convient de rejeter l’argument de la requérante selon lequel la lettre « o » constitue l’élément visuel dominant et distinctif de la marque antérieure en ce qu’elle crée une séparation entre les quatre premières lettres et les trois dernières.

82      À cet égard, il y a lieu de relever que les marques en conflit sont toutes deux composées d’un seul mot de trois syllabes, à savoir « kre », « no » et « sin » pour la marque antérieure, et « kre », « me » et « zin » pour la marque demandée. En outre, lesdites marques sont composées d’un même nombre de lettres, à savoir huit, dont cinq sont identiques et apparaissent dans le même ordre. Dans ce contexte, il convient de souligner que le consommateur attache normalement plus d’importance à la partie initiale des mots [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 17 mars 2004, El Corte Inglés/OHMI – González Cabello et Iberia Líneas Aéreas de España (MUNDICOR), T‑183/02 et T‑184/02, Rec. p. II‑965, point 81, et du 16 mars 2005, L’Oréal/OHMI – Revlon (FLEXI AIR), T‑112/03, Rec. p. II‑949, points 64 et 65].

83      Il s’ensuit que les éléments initiaux des marques en conflit, à savoir « kre », sont susceptibles, dans une impression visuelle d’ensemble, de retenir davantage l’attention que les éléments « me » et « no ». Par ailleurs, le Tribunal estime que les lettres « m » et « n » présentent des ressemblances non négligeables sur le plan visuel.

84      Il en découle qu’il existe, en l’espèce, un degré élevé de similitude visuelle entre les marques en conflit.

85      S’agissant de la comparaison phonétique des marques en conflit, il y a lieu d’apprécier le risque de confusion dans l’esprit du public italien, dès lors que l’usage sérieux de la marque antérieure a été démontré uniquement pour l’Italie. À cet égard, force est de constater que la prononciation en italien de la première syllabe de chacune des marques en conflit est identique et que la prononciation de la dernière syllabe de chacune d’elles est presque identique. En raison de la différence phonétique entre les voyelles « e » et « o », la deuxième syllabe des marques en conflit, à savoir « me » et « no », sera prononcée de manière différente, bien qu’il y ait une certaine ressemblance phonétique entre les lettres « m » et « n ».

86      Au vu de ces considérations, les éléments de ressemblance entre les marques en conflit l’emportent largement, d’un point de vue phonétique, sur les éléments de dissemblance, de sorte que, au terme d’une appréciation d’ensemble, lesdites marques présentent un degré élevé de similitude phonétique.

87      Par ailleurs, il convient de constater que la requérante n’a pas contesté l’affirmation de la chambre de recours selon laquelle, d’un point de vue conceptuel, ni la marque antérieure ni la marque demandée n’ont de signification particulière en italien.

88      À la lumière des constatations qui précèdent, il convient de considérer que, compte tenu de l’impression d’ensemble produite par les marques en conflit, eu égard, d’une part, à leur degré élevé de similitude visuelle et phonétique et, d’autre part, au fait qu’aucune signification ne permettra aux consommateurs finaux de les distinguer sur le plan conceptuel, ces marques présentent un degré élevé de similitude.

89      En ce qui concerne la contestation par la requérante de l’appréciation par la chambre de recours du risque de confusion entre les marques en conflit, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, en tenant compte de tous les facteurs caractérisant le cas d’espèce, notamment de l’interdépendance entre la similitude des signes et celle des produits ou des services désignés (voir arrêts GIORGIO BEVERLY HILLS, point 66 supra, points 30 à 33, et affilene, point 73 supra, point 30, et la jurisprudence citée).

90      En l’espèce, il a été constaté ci-dessus que les produits en cause sont similaires et que les marques en conflit présentent un degré élevé de similitude. Dans ces circonstances, le Tribunal estime que le fait que le public pertinent est composé de personnes dont le degré d’attention peut être considéré comme élevé ne suffit pas à exclure qu’il puisse croire que ces produits proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement.

91      Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94 doit être rejeté comme non fondé.

92      Aucun des moyens invoqués par la requérante n’étant fondé, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

93      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé et l’OHMI ayant conclu à sa condamnation aux dépens, il y a lieu de condamner la requérante aux dépens.

94      L’intervenante n’ayant pas conclu à la condamnation de la requérante aux dépens, elle supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Kureha Corp. supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI).

3)      Sanofi-Aventis SA supportera ses propres dépens.

Martins Ribeiro

Wahl

Dittrich

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 juin 2010.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.