Language of document : ECLI:EU:T:2015:595

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

4 septembre 2015 (*)

« FEOGA – Section ‘Garantie’ – FEAGA et Feader – Dépenses exclues du financement – Régime de paiement unique – Contrôles clés – Contrôles secondaires – Articles 51, 53, 73 et 73 bis du règlement (CE) no 796/2004 »

Dans l’affaire T‑245/13,

Royaume‑Uni de Grande‑Bretagne et d’Irlande du Nord, représenté initialement par Mme C. Murrell, M. M. Holt et Mme E. Jenkinson, puis par M. Holt, en qualité d’agents, assistés de M. D. Wyatt, QC, et de Mme V. Wakefield, barrister,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représenté par M. P. Rossi et Mme K. Skelly, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation partielle de la décision d’exécution 2013/123/UE de la Commission, du 26 février 2013, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), section « Garantie », du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) (JO L 67, p. 20), pour autant que cette décision concerne un poste figurant dans son annexe 1, relatif à une correction extrapolée de 5,19 % appliquée à des dépenses effectuées en Irlande du Nord (Royaume‑Uni) au cours de l’exercice financier 2010, s’élevant à 16 513 582,57 euros,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mme M. E. Martins Ribeiro (rapporteur), président, MM. S. Gervasoni et L. Madise, juges,

greffier : Mme C. Kristensen, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 3 décembre 2014,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

 Réglementation de l’Union régissant le financement de la politique agricole commune

 Règlement (CE) no 1290/2005

1        La réglementation de base relative au financement de la politique agricole commune est constituée, en ce qui concerne les dépenses effectuées par les États membres à partir du 16 octobre 2006 et en ce qui concerne celles effectuées par la Commission des Communautés européennes à partir du 1er janvier 2007, par le règlement (CE) no 1290/2005 du Conseil, du 21 juin 2005, relatif au financement de la politique agricole commune (JO L 209, p. 1).

2        En vertu de l’article 3, paragraphe 1, sous c), du règlement no 1290/2005, le Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) finance, en gestion partagée entre les États membres et l’Union européenne, les paiements directs aux agriculteurs prévus dans le cadre de la politique agricole commune, effectués conformément au droit de l’Union.

3        L’article 31 du règlement no 1290/2005, intitulé « Apurement de conformité », dispose en ses paragraphes 1 à 3 :

« 1.      La Commission décide des montants à écarter du financement [de l’Union] lorsqu’elle constate que des dépenses visées à l’article 3, paragraphe 1, et à l’article 4 n’ont pas été effectuées conformément aux règles [de l’Union], selon la procédure visée à l’article 41, paragraphe 3.

2.      La Commission évalue les montants à écarter au vu, notamment, de l’importance de la non‑conformité constatée. La Commission tient compte de la nature et de la gravité de l’infraction, ainsi que du préjudice financier causé à [l’Union].

3.      Préalablement à toute décision de refus de financement, les résultats des vérifications de la Commission ainsi que les réponses de l’État membre concerné font l’objet de notifications écrites, à l’issue desquelles les deux parties tentent de parvenir à un accord sur les mesures à prendre.

À défaut d’accord, l’État membre peut demander l’ouverture d’une procédure visant à concilier les positions respectives dans un délai de quatre mois, dont les résultats font l’objet d’un rapport communiqué à la Commission et examiné par elle avant qu’elle ne se prononce sur un éventuel refus de financement. »

 Règlement (CE) no 885/2006

4        Les modalités de la procédure d’apurement de conformité sont établies à l’article 11 du règlement (CE) no 885/2006 de la Commission, du 21 juin 2006, portant modalités d’application du règlement no 1290/2005 en ce qui concerne l’agrément des organismes payeurs et autres entités ainsi que l’apurement des comptes du FEAGA et du Feader (JO L 171, p. 90). En outre, l’article 16 de ce même règlement fixe les modalités de la procédure de conciliation.

 Règlements (CE) nos 1782/2003 et 73/2009

5        Dans le cadre de la réforme de la politique agricole commune, le Conseil a adopté le règlement (CE) no 1782/2003, du 29 septembre 2003, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs et modifiant les règlements (CEE) no 2019/93, (CE) no 1452/2001, (CE) no 1453/2001, (CE) no 1454/2001, (CE) no 1868/94, (CE) no 1251/1999, (CE) no 1254/1999, (CE) no 1673/2000, (CEE) no 2358/71 et (CE) no 2529/2001 (JO L 270, p. 1). Ce règlement a établi, notamment, un régime d’aide au revenu des agriculteurs découplé de la production. Ce régime, désigné à l’article 1er, deuxième tiret, de ce règlement comme le « régime de paiement unique », regroupe un certain nombre de paiements directs versés aux agriculteurs au titre de différents régimes de soutien ayant existé jusqu’alors.

6        Le régime de paiement unique fait l’objet du titre III du règlement no 1782/2003, regroupant, en cinq chapitres, les articles 33 à 71 quaterdecies de celui‑ci.

7        Le titre III, chapitre 2, du règlement no 1782/2003 établit les règles relatives à la fixation du montant de référence. Ce montant est calculé, conformément à l’article 37, paragraphe 1, dudit règlement, comme suit :

« Le montant de référence est la moyenne sur trois ans des montants totaux des paiements accordés à un agriculteur au titre des régimes de soutien visés à l’annexe VI, calculé et adapté conformément à l’annexe VII, au cours de chaque année civile de la période de référence visée à l’article 38. »

8        La période de référence est définie, à l’article 38 du règlement no 1782/2003, comme comprenant les années civiles 2000, 2001 et 2002.

9        Le titre III, chapitre 3, du règlement no 1782/2003 porte sur les droits au paiement. À ce titre, l’article 43 de ce règlement, intitulé « Détermination des droits au paiement », dispose notamment :

« 1.      […T]out agriculteur bénéficie d’un droit au paiement par hectare qui est calculé en divisant le montant de référence par le nombre moyen calculé sur trois ans de l’ensemble des hectares qui a donné droit, au cours de la période de référence, aux paiements directs dont la liste figure à l’annexe VI.

Le nombre total de droits au paiement est égal au nombre moyen d’hectares susmentionné.

[…] »

10      L’article 44, paragraphe 2, du règlement no 1782/2003 définit la notion d’« hectare admissible au bénéfice de l’aide », en sa version initiale, notamment comme « toute superficie agricole de l’exploitation occupée par des terres arables et des pâturages permanents, à l’exclusion des superficies occupées par des cultures permanentes et des forêts ou affectées à une activité non agricole ».

11      Le titre III, chapitre 5, section 1, du règlement no 1782/2003 permettait aux États membres, notamment, d’opter pour une mise en œuvre régionale du régime de paiement unique. À ce titre, l’article 58 de ce règlement dispose :

« 1.      Un État membre peut décider, au plus tard le 1er août 2004, de mettre en œuvre le régime de paiement unique prévu aux chapitres 1 à 4 à l’échelle régionale, selon les conditions prévues dans la présente section.

2.      Les États membres définissent les régions selon des critères objectifs.

Les États membres ayant moins de trois millions d’hectares admissibles au bénéfice de l’aide peuvent être considérés comme une seule région.

3.      L’État membre subdivise entre les régions le plafond visé à l’article 41 selon des critères objectifs. »

12      L’article 59 du règlement no 1782/2003 fixe les règles relatives à la régionalisation du régime de paiement unique comme suit :

« 1.      Dans des circonstances dûment justifiées et en appliquant des critères objectifs, l’État membre peut diviser le montant total du plafond régional établi conformément à l’article 58 ou d’une partie de ce plafond entre tous les agriculteurs dont les exploitations sont situées dans la région concernée, y compris ceux qui ne satisfont pas aux critères d’admissibilité visés à l’article 33.

2.      En cas de division du montant total du plafond régional, les agriculteurs bénéficient de droits dont la valeur unitaire est calculée en divisant le plafond régional établi conformément à l’article 58 par le nombre d’hectares admissibles au bénéfice de l’aide, au sens de l’article 44, paragraphe 2, fixé au niveau régional.

3.      En cas de division partielle du montant total du plafond régional, les agriculteurs bénéficient de droits dont la valeur unitaire est calculée en divisant la partie correspondante du plafond régional établi conformément à l’article 58 par le nombre d’hectares admissibles au bénéfice de l’aide, au sens de l’article 44, paragraphe 2, fixé au niveau régional.

Au cas où l’agriculteur peut aussi bénéficier de droits calculés sur la partie restante du plafond régional, la valeur unitaire régionale de chacun des droits de cet agriculteur, à l’exception des droits de mise en jachère, est augmentée d’un montant correspondant au montant de référence divisé par le nombre de droits de l’agriculteur établi conformément au paragraphe 4.

Les articles 48 et 49 s’appliquent mutatis mutandis.

4.      Le nombre de droits par agriculteur doit être égal au nombre d’hectares qu’il déclare conformément à l’article 44, paragraphe 2, pour la première année d’application du régime de paiement unique, sauf en cas de force majeure ou dans ces circonstances exceptionnelles telles que définies à l’article 40, paragraphe 4. »

13      Le règlement no 1782/2003 a été abrogé et remplacé par le règlement (CE) no 73/2009 du Conseil, du 19 janvier 2009, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs, modifiant les règlements no 1290/2005, (CE) no 247/2006 et (CE) no 378/2007 (JO L 30, p. 16), avec effet au 1er janvier 2009.

14      L’article 34, paragraphe 1, du règlement no 73/2009, intitulé « Activation des droits au paiement par hectare admissible », dispose :

« 1.      L’aide au titre du régime de paiement unique est octroyée aux agriculteurs après activation d’un droit au paiement par hectare admissible. Les droits au paiement activés donnent droit au paiement des montants qu’ils fixent. »

15      Aux termes de l’article 36, premier alinéa, du règlement no 73/2009, intitulé « Modification des droits au paiement » :

« Sauf disposition contraire du présent règlement, les droits au paiement par hectare ne sont pas modifiés. »

 Règlements (CE) nos 796/2004 et 1122/2009

16      Selon les considérants 29 et 55 du règlement (CE) no 796/2004 de la Commission, du 21 avril 2004, portant modalités d’application de la conditionnalité, de la modulation et du système intégré de gestion et de contrôle prévus par le règlement no 1782/2003 (JO L 141, p. 18), il est prévu ce qui suit :

« (29) Il importe d’assurer un suivi efficace du respect des dispositions relatives aux régimes d’aides gérés dans le cadre du système intégré. […]

(55)      Afin de protéger efficacement les intérêts financiers de [l’Union], il importe d’adopter des mesures adéquates pour lutter contre les irrégularités et les fraudes. Il convient de prévoir des dispositions distinctes pour les irrégularités relatives aux critères d’éligibilité à l’aide applicables aux différents régimes d’aide concernés. »

17      L’article 2, point 22, du règlement no 796/2004 définit la « superficie déterminée » comme étant :

« […] la superficie pour laquelle l’ensemble des conditions applicables à l’octroi d’une aide sont remplies. En ce qui concerne le régime de paiement unique, la superficie déclarée ne peut être considérée comme déterminée que si elle s’accompagne d’un nombre correspondant de droits au paiement. »

18      L’article 50, paragraphes 1 à 3, du règlement no 796/2004, intitulé « Base de calcul applicable aux surfaces déclarées », tel que modifié, prévoit :

« 1.      Dans le cas de demandes d’aide au titre de régimes d’aide ‘surfaces’, à l’exception des aides aux pommes de terre féculières, aux semences et au tabac, prévues, respectivement, au titre IV, chapitres 6, 9 et 10 quater, du règlement […] no 1782/2003, lorsqu’il est établi que la superficie déterminée d’un groupe de cultures est supérieure à la superficie déclarée dans la demande d’aide, c’est la superficie déclarée qui est prise en compte pour le calcul de l’aide.

2.      En cas d’écart entre les droits au paiement déclarés et la superficie déclarée, le calcul du paiement d’une demande d’aide au titre du régime de paiement unique est effectué sur la base la moins élevée.

3.      Sans préjudice des réductions et exclusions à appliquer conformément aux articles 51 et 53, en ce qui concerne les demandes d’aide au titre de régimes d’aide ‘surfaces’, à l’exception des aides aux pommes de terre féculières, aux semences et au tabac, prévues, respectivement, au titre IV, chapitres 6, 9 et 10 quater, du règlement […] no 1782/2003, si la superficie déclarée dans une demande unique est supérieure à la superficie déterminée pour ce groupe de cultures, l’aide est calculée sur la base de la superficie déterminée pour ce groupe de cultures.

Toutefois, sans préjudice de l’article 29 du règlement […] no 1782/2003, si la différence entre la superficie totale déterminée et la superficie totale déclarée pour le paiement au titre des régimes d’aide établis aux titres III, IV et IV bis du règlement […] no 1782/2003 est inférieure ou égale à 0,1 hectare, la superficie déterminée est considérée comme étant égale à la superficie déclarée. Pour ce calcul, seules les surdéclarations des superficies au niveau du groupe de culture sont prises en considération.

La disposition visée au deuxième alinéa ne s’applique pas lorsque cette différence représente plus de 20 % de la superficie totale déclarée pour les paiements. »

19      L’article 50, paragraphe 5, du règlement no 796/2004 comporte des règles relatives à la base de calcul applicable aux surfaces déclarées s’agissant des superficies déclarées en vue de la prime spéciale à la qualité pour le blé dur prévue à l’article 72 du règlement no 1782/2003 et en vue du supplément et de l’aide spéciale pour le blé dur prévus à l’article 105 dudit règlement.

20      L’article 51 du règlement no 796/2004, tel que modifié par le règlement (CE) no 380/2009 de la Commission, du 8 mai 2009 (JO L 116, p. 9), expose les « [r]éductions et exclusions applicables en cas de surdéclarations » comme suit :

« 1.      Si, pour un groupe de cultures, la superficie déclarée au titre de l’un ou l’autre régime d’aide ‘surfaces’, à l’exception des aides aux pommes de terre féculières, aux semences et au tabac, prévues au titre IV, chapitre 1, sections 2 et 5, du règlement […] no 73/2009 et au titre IV, chapitre 10 quater, du règlement […] no 1782/2003, est supérieure à la superficie déterminée conformément à l’article 50, paragraphes 3 et 5, du présent règlement, le montant de l’aide est calculé sur la base de la superficie déterminée, réduite du double de la différence constatée, si celle‑ci dépasse 3 % ou deux hectares et n’excède pas 20 % de la superficie déterminée.

Lorsque la différence constatée excède 20 % de la superficie déterminée, aucune aide ‘surfaces’ n’est accordée pour le groupe de cultures considéré.

Si la différence excède 50 %, l’agriculteur est également pénalisé à concurrence d’un montant égal au montant correspondant à la différence entre la superficie déclarée et la superficie déterminée conformément à l’article 50, paragraphes 3 et 5, du présent règlement. Ce montant est recouvré conformément à l’article 5 ter du règlement [no 885/2006] de la Commission. S’il ne peut être entièrement recouvré conformément audit article au cours des trois années civiles suivant celle de la constatation, le solde est annulé.

2 bis.          Si un agriculteur déclare une superficie supérieure aux droits au paiement et que la superficie déclarée satisfait à tous les autres critères d’admissibilité, les réductions ou exclusions prévues au paragraphe 1 ne s’appliquent pas.

Si un agriculteur déclare une superficie supérieure aux droits au paiement et que la superficie déclarée ne satisfait pas à tous les autres critères d’admissibilité, la différence visée au paragraphe 1 est la différence entre la superficie satisfaisant à tous les autres critères d’admissibilité et le montant des droits au paiement déclarés.

[…] »

21      L’article 51, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004 y a été inséré par le règlement (CE) no 659/2006 de la Commission, du 27 avril 2006, modifiant le règlement no 796/2004 (JO L 116, p. 20). Le considérant 12 du règlement no 659/2006 indique ce qui suit :

« Dans le cas où un agriculteur a déclaré une superficie supérieure au nombre de droits au paiement, l’article 50, paragraphe 2, du règlement […] no 796/2004 dispose que le nombre d’hectares accompagnés des droits au paiement correspondants constitue la base pour le calcul de l’aide. Dans les cas où la superficie déclarée satisfait à toutes les autres conditions d’admissibilité, il est inutile d’appliquer les réductions ou exclusions prévues aux articles 51 et 53 dudit règlement. Il convient dès lors de clarifier ces dispositions à cet effet. »

22      L’article 53 du règlement no 796/2004 porte sur la surdéclaration intentionnelle. Il prévoit, en son premier alinéa, que, lorsque les différences entre la superficie déclarée et la superficie déterminée conformément à l’article 50, paragraphes 3 et 5, du même règlement résultent d’irrégularités commises intentionnellement, l’agriculteur se voit refuser le bénéfice du régime d’aide auquel il aurait pu prétendre en application de l’article 50, paragraphes 3 et 5, dudit règlement, pour l’année civile considérée, si cette différence est supérieure à 0,5 % de la superficie déterminée ou supérieure à un hectare. En outre, selon l’article 53, deuxième alinéa, du règlement no 796/2004, si la différence est supérieure à 20 % de la superficie déterminée, l’exploitant est également pénalisé à concurrence d’un montant égal au montant correspondant à la différence entre la superficie déclarée et la superficie déterminée conformément à l’article 50, paragraphes 3 et 5, dudit règlement.

23      L’article 73 du règlement no 796/2004 établit les règles applicables à la récupération de l’indu. Cette disposition prévoit, en ses paragraphes 1 et 4 :

« 1.      En cas de paiement indu, l’agriculteur concerné a l’obligation de rembourser les montants en cause majorés d’intérêts calculés comme prescrit au paragraphe 3.

[…]

4.      L’obligation de remboursement visée au paragraphe 1 ne s’applique pas si le paiement a été effectué à la suite d’une erreur de l’autorité compétente ou d’une autre autorité, et si l’erreur ne pouvait raisonnablement être décelée par l’agriculteur.

Toutefois, lorsque l’erreur a trait à des éléments de fait pertinents pour le calcul de l’aide en question, le premier alinéa ne s’applique que si la décision de recouvrement n’a pas été communiquée dans les douze mois suivant le paiement. »

24      L’article 73 bis du règlement no 796/2004, intitulé « Récupération des droits indûment alloués », tel que modifié, prévoit notamment :

« 1.  Lorsque, après que des droits au paiement ont été alloués aux agriculteurs conformément au règlement (CE) no 795/2004, il est établi que certains droits au paiement ont été alloués indûment, l’agriculteur concerné cède les droits indûment alloués à la réserve nationale visée à l’article 42 du règlement […] no 1782/2003.

[…]

Les droits indûment alloués sont considérés comme n’ayant pas été attribués dès le départ.

2.       Lorsque, après que des droits au paiement ont été alloués aux agriculteurs conformément au règlement […] no 795/2004, il est établi que la valeur des droits au paiement est trop élevée, cette valeur est ajustée en conséquence […] La valeur de la réduction est allouée à la réserve nationale visée à l’article 42 du règlement […] no 1782/2003.

Les droits au paiement sont considérés comme ayant été alloués dès le départ à la valeur résultant de l’ajustement.

2 bis.          Lorsque, aux fins de l’application des paragraphes 1 et 2, il est établi que le nombre de droits alloués à un agriculteur conformément au règlement […] no 795/2004 est inexact, et lorsque l’allocation indue n’a aucune incidence sur la valeur totale des droits que l’agriculteur a reçus, l’État membre recalcule les droits au paiement et corrige, le cas échéant, le type de droits alloués à l’agriculteur. Cependant, cette disposition ne s’applique pas si les erreurs auraient pu raisonnablement être détectées par les agriculteurs.

[…]

4.      Les montants indûment versés sont récupérés conformément à l’article 73. »

25      L’article 73 bis du règlement no 796/2004 a été inséré par le règlement (CE) no 239/2005 de la Commission, du 11 février 2005, modifiant et rectifiant le règlement no 796/2004 (JO L 42, p. 3), dont le considérant 15 est libellé comme suit :

« Des règles doivent être fixées pour le cas où un agriculteur aurait indûment reçu une quantité de droits au paiement ou si la valeur de chacun des droits au paiement a été établie à un niveau incorrect selon les différents modèles dans le cadre du régime de paiement unique. […] »

26      L’article 73, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004 a été inséré par le règlement (CE) no 972/2007 de la Commission, du 20 août 2007, modifiant le règlement no 796/2004 (JO L 216, p. 3), entré en vigueur le 21 août 2007 et applicable aux demandes d’aides introduites au titre des années ou des périodes d’octroi de primes commençant à compter du 1er janvier 2008, et dont le considérant 19 est libellé comme suit :

« Dans certains cas des allocations indues de droits n’ont pas eu d’incidence sur la valeur totale, mais uniquement sur le nombre de droits de l’agriculteur. Dans ces cas, les États membres doivent corriger l’allocation ou, le cas échéant, le type de droits, sans réduire la valeur correspondante. La disposition ne doit s’appliquer que si l’agriculteur n’a pas pu déceler l’erreur. »

27      Le règlement no 796/2004 a été abrogé et remplacé par le règlement (CE) no 1122/2009 de la Commission, du 30 novembre 2009, fixant les modalités d’application du règlement no 73/2009 du Conseil en ce qui concerne la conditionnalité, la modulation et le système intégré de gestion et de contrôle dans le cadre des régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs prévus par ce règlement ainsi que les modalités d’application du règlement (CE) no 1234/2007 du Conseil en ce qui concerne la conditionnalité dans le cadre du régime d’aide prévu pour le secteur vitivinicole (JO L 316, p. 65), avec effet au 1er janvier 2010.

28      Aux termes du considérant 78 du règlement no 1122/2009 :

« Le paiement de l’aide au titre du régime de paiement unique nécessite un nombre égal de droits au paiement et d’hectares admissibles. Aux fins de ce régime, il est donc opportun de prévoir que le calcul du paiement en cas de divergences entre les droits au paiement déclarés et la superficie déclarée doit être basé sur la taille la plus faible. Pour éviter un calcul fondé sur des droits inexistants, il y a lieu de prévoir que le nombre de droits au paiement utilisés pour le calcul ne dépasse pas le nombre de droits au paiement dont disposent les agriculteurs. »

29      L’article 57 du règlement no 1122/2009, intitulé « Base de calcul applicable aux surfaces déclarées », prévoit, en son paragraphe 2 :

« En ce qui concerne une demande d’aide au titre du régime de paiement unique :

–        en cas d’écart entre les droits au paiement déclarés et la superficie déclarée, le calcul du paiement est effectué sur la base la moins élevée ;

–        si le nombre de droits au paiement déclarés dépasse le nombre de droits au paiement dont dispose l’agriculteur, les droits au paiement déclarés sont réduits au nombre de droits dont dispose l’agriculteur. »

30      L’article 58 du règlement no 1122/2009 énonce les « [r]éductions et exclusions applicables en cas de surdéclarations ». Il correspond, en substance, aux dispositions de l’article 51, paragraphe 1, du règlement no 796/2004.

31      Conformément à l’article 87, second alinéa, du règlement no 1122/2009, ce règlement s’applique aux demandes d’aides introduites au titre des campagnes de commercialisation ou des périodes de référence des primes commençant à compter du 1er janvier 2010.

 Document no VI/5330/97

32      Les orientations de la Commission pour l’application des corrections financières ont été définies dans le document no VI/5330/97 de la Commission, du 23 décembre 1997, intitulé « Orientations concernant le calcul des conséquences financières lors de la préparation de la décision d’apurement des comptes du FEOGA‑Garantie » (ci‑après le « document no VI/5330/97 »).

33      L’annexe 2 du document no VI/5330/97, relative aux conséquences financières, pour l’apurement des comptes de la section « Garantie » du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), des carences des contrôles effectués par les États membres, énonce, dans sa partie intitulée « Introduction », ce qui suit :

« Lorsque la Commission constate qu’une dépense spécifique concerne une demande qui ne satisfait pas aux règles communautaires, les conséquences financières sont claires : sauf si le paiement irrégulier a déjà été détecté par les organismes nationaux de contrôle et a donné lieu aux mesures de correction et de recouvrement appropriées (voir annexe 4), la Commission doit refuser son financement par le budget communautaire. Lorsque les conséquences financières découlent de l’examen des dépenses concernant un grand nombre de dossiers, le montant exclu du financement communautaire est calculé, dans la mesure du possible, sur la base d’une extrapolation des résultats tirés de l’étude d’un échantillon représentatif de dossiers. La même méthode d’extrapolation doit être appliquée pour tous les États membres, y compris en ce qui concerne le niveau de fiabilité et d’ampleur des inexactitudes, la stratification de la population, la taille de l’échantillon et l’évaluation des erreurs lors de l’échantillonnage compte tenu des conséquences financières globales.

Lorsqu’un État membre ne respecte pas les règles communautaires visant à vérifier l’éligibilité des demandes, ce seul manquement implique que les paiements contreviennent aux dispositions communautaires applicables à la mesure concernée et à l’obligation générale, pour les États membres, de détection et de prévention des irrégularités prévue par l’article 8 du règlement [no] 729/70. Cela ne signifie pas nécessairement que toutes les demandes satisfaites constituent des irrégularités, mais le risque de voir le [FEOGA] supporter des dépenses indues s’en trouve accru. S’il est vrai que, dans certains cas flagrants, la Commission pourrait être habilitée à refuser toutes les dépenses concernées lorsque les contrôles requis par un règlement ne sont pas effectués, dans un certain nombre de cas le montant des dépenses à écarter excéderait, selon toute probabilité, la perte financière subie par la Communauté. Il convient alors d’estimer la perte lors de l’évaluation des corrections financières.

[...] »

34      L’annexe 2 du document no VI/5330/97 précise, dans sa partie intitulée « Évaluation sur la base des erreurs figurant dans les dossiers individuels », ce qui suit :

« Sur la base des procédures déjà fixées en vertu des directives internes, les calculs relatifs à la correction financière sont effectués sur la base de l’une des techniques suivantes :

a)      refus d’une demande individuelle qui n’a pas été soumise au contrôle requis ;

b)      refus d’une somme calculée par extrapolation des résultats de vérifications effectuées sur un échantillon représentatif de dossiers à l’ensemble des dossiers dont un échantillon a été prélevé, mais qui est limitée au secteur administratif dans lequel la même carence risque raisonnablement de se produire. Il est accordé à l’État membre la possibilité de fournir la preuve que les résultats de l’extrapolation ne correspondent pas à ceux obtenus par suite de l’examen de l’ensemble des dossiers dont l’échantillon a été prélevé.

[…] »

35      L’annexe 2 du document no VI/5330/97 précise, dans sa partie intitulée « Évaluation basée sur les risques de perte financière : corrections forfaitaires », ce qui suit :

« Étant donné que le recours à l’audit des systèmes s’est largement répandu, les services de la Commission ont de plus en plus recouru à une évaluation du risque que présentent les carences des systèmes. Lorsque le niveau réel des dépenses irrégulières, et donc le montant des pertes financières subies par la Communauté, ne peut être déterminé, la Commission applique, depuis l’apurement des comptes de l’exercice 1990, des corrections forfaitaires s’élevant à 2 %, 5 % ou 10 % des dépenses déclarées, en fonction de l’ampleur du risque de perte. Des taux de correction supérieurs, jusqu’à 100 %, peuvent être décidés dans des cas exceptionnels. La prérogative de la Commission d’appliquer des corrections de ce type a été confirmée par la Cour de justice statuant sur des recours formés contre des décisions d’apurement annuel des comptes (arrêt C‑50/94, par exemple).

[…] »

36      L’annexe 2 du document no VI/5330/97 énonce, dans sa partie intitulée « Orientations pour l’application de corrections forfaitaires », ce qui suit :

« Des corrections forfaitaires peuvent être envisagées lorsque les informations fournies par l’enquête ne permettent pas au contrôleur d’évaluer la perte à partir d’une extrapolation des pertes déterminées, par des moyens statistiques, ou par référence à d’autres données vérifiables, mais qu’elles lui permettent néanmoins de conclure que l’État membre a manqué à son obligation de vérifier de manière appropriée l’éligibilité de certaines demandes satisfaites.

[…] Le manquement devient plus sérieux si un État membre omet d’améliorer ses contrôles alors que la Commission lui a déjà notifié les améliorations nécessaires.

[…]

Lorsque tous les contrôles clés sont effectués, mais sans respecter le nombre, la fréquence ou la rigueur préconisés par les règlements, il convient alors d’appliquer une correction à hauteur de 5 %, car il peut raisonnablement être conclu et que ces contrôles n’offrent pas le niveau attendu de garantie de régularité des demandes et que le risque de pertes pour le FEOGA était significatif.

[…] »

 Réglementation de l’Union relative à la protection des intérêts financiers de l’Union

37      Le règlement (CE, Euratom) no 2988/95 du Conseil, du 18 décembre 1995, relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes (JO L 312, p. 1), qui met en place un cadre juridique commun à tous les domaines couverts par les politiques de l’Union, énonce, en son neuvième considérant, ce qui suit :

« considérant que les mesures et les sanctions [de l’Union] prises dans le cadre de la réalisation des objectifs de la politique agricole commune font partie intégrante des régimes d’aides ; qu’elles ont une finalité propre qui laisse entière l’appréciation par les autorités compétentes des États membres, sur le plan du droit pénal, du comportement des opérateurs économiques concernés ; que leur efficacité doit être assurée par l’effet immédiat de la norme [de l’Union] et par la pleine application de l’ensemble des mesures [de l’Union], dès lors que l’adoption de mesures conservatoires n’a pas permis d’atteindre cet objectif […] »

38      L’article 1er du règlement no 2988/95 dispose :

« 1.      Aux fins de la protection des intérêts financiers [de l’Union européenne], est adoptée une réglementation générale relative à des contrôles homogènes et à des mesures et des sanctions administratives portant sur des irrégularités au regard du droit [de l’Union].

2.      Est constitutive d’une irrégularité toute violation d’une disposition du droit [de l’Union] résultant d’un acte ou d’une omission d’un opérateur économique qui a ou aurait pour effet de porter préjudice au budget général [de l’Union] ou à des budgets gérés par [celle]‑ci, soit par la diminution ou la suppression de recettes provenant des ressources propres perçues directement pour le compte [de l’Union], soit par une dépense indue. »

39      Aux termes de l’article 2, paragraphe 2, du règlement no 2988/95 :

« Aucune sanction administrative ne peut être prononcée tant qu’un acte [de l’Union] antérieur à l’irrégularité ne l’a pas instaurée. En cas de modification ultérieure des dispositions portant sanctions administratives et contenues dans une réglementation [de l’Union], les dispositions moins sévères s’appliquent rétroactivement. »

40      L’article 5 du règlement no 2988/95 prévoit, en son paragraphe 1, sous c) et d), ce qui suit :

« Les irrégularités intentionnelles ou causées par négligence peuvent conduire aux sanctions administratives suivantes :

[…]

c)      la privation totale ou partielle d’un avantage octroyé par la réglementation [de l’Union], même si l’opérateur a bénéficié indûment d’une partie seulement de cet avantage ;

d)      l’exclusion ou le retrait du bénéfice de l’avantage pour une période postérieure à celle de l’irrégularité ;

[…] »

 Antécédents du litige

41      Entre le 9 et le 13 novembre 2009, les services de la Commission ont effectué une enquête au Royaume‑Uni concernant la bonne application des règles relatives au financement des dépenses effectuées, dans le cadre du régime de paiement unique, en Irlande du Nord (Royaume‑Uni) en 2010, au titre de l’année de déclaration 2009 (enquête AA/2009/24).

42      Par lettre du 8 janvier 2010 (ci‑après la « première communication du 8 janvier 2010 »), envoyée en application de l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 885/2006, la Commission a informé les autorités du Royaume‑Uni de Grande‑Bretagne et d’Irlande du Nord du résultat de cette enquête. Une annexe, intitulée « Observations et demandes de renseignements », qui comprenait les conclusions de l’enquête, était jointe à cette lettre.

43      Il ressort de la première communication du 8 janvier 2010, notamment, que la Commission a considéré que les autorités du Royaume‑Uni n’avaient pas pleinement respecté les exigences de la réglementation de l’Union et que des mesures correctives étaient nécessaires pour assurer à l’avenir la conformité à ces exigences. La Commission a demandé à être informée des mesures correctives déjà adoptées et de celles envisagées ainsi que du calendrier prévu pour leur mise en œuvre. Par ailleurs, la Commission a indiqué qu’elle pourrait exclure du financement de l’Union une partie des dépenses financées par le FEAGA (ci‑après le « Fonds ») et le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader), conformément à l’article 31 du règlement no 1290/2005. En outre, il a été précisé que les défaillances relevées serviraient de base de calcul aux corrections financières relatives aux dépenses effectuées jusqu’à la mise en œuvre des mesures correctives appropriées.

44      Dans les observations et les recommandations figurant en annexe de la première communication du 8 janvier 2010, la Commission a, notamment, relevé, d’abord, des insuffisances du système d’identification des parcelles agricoles (SIPA) et du système d’information géographique (SIG) (ci‑après, pris ensemble, le « SIPA‑SIG »), en ce que les informations qui y étaient contenues n’étaient pas suffisamment précises pour permettre une réalisation concluante des contrôles administratifs et des contrôles sur place effectués en vue de contrôler l’éligibilité des superficies déclarées, ensuite, des insuffisances dans les contrôles sur place et, enfin, des insuffisances dans l’application des sanctions, dans la correction rétroactive des demandes inadmissibles au bénéfice de l’aide, dans la récupération des paiements indus et dans l’application des réductions pour non‑conformité intentionnelle. Il ressort par ailleurs de cette annexe que, si la Commission note des améliorations par rapport à des enquêtes antérieures (enquêtes AA/2006/07 et AA/2008/18), elle considère également que les insuffisances relevées lors desdites enquêtes perdurent toujours.

45      Par lettre du 20 mai 2010, les autorités du Royaume‑Uni ont été invitées par la Commission à fournir leurs observations sur les aspects litigieux en vue d’une réunion bilatérale prévue le 1er juillet 2010.

46      La réunion bilatérale entre les services de la Commission et les autorités du Royaume‑Uni s’est déroulée à Bruxelles (Belgique) le 1er juillet 2010. Le procès‑verbal de cette réunion a été envoyé auxdites autorités le 4 août 2010.

47      Il ressort du procès‑verbal de la réunion bilatérale du 1er juillet 2010 que, à la suite de cette réunion, la Commission a maintenu l’essentiel de ses conclusions figurant dans la première communication du 8 janvier 2010. Elle a ainsi confirmé ses conclusions tenant à la constatation d’insuffisances relatives, notamment, aux informations contenues dans le SIPA‑SIG, aux contrôles sur place, ainsi qu’à l’application de sanctions, à la correction rétroactive des demandes inadmissibles au bénéfice de l’aide, à la récupération des paiements indus et à l’application des réductions pour non‑conformité intentionnelle. Elle a en outre indiqué que ces insuffisances affectaient des contrôles clés et des contrôles secondaires au sens du document no VI/5330/97 et attiré l’attention des autorités du Royaume‑Uni sur le fait qu’elles avaient la possibilité de démontrer que le risque financier était moins important que les corrections forfaitaires susceptibles d’être appliquées conformément audit document. Par ailleurs, la Commission a précisé que la nature récurrente des insuffisances relevées devait être prise en considération, référence étant faite, à cet égard, au document de travail de la Commission AGRI/60637/2006, intitulé « Communication de la Commission – Sur le traitement par la Commission, dans le cadre de l’apurement des comptes de la section garantie du FEOGA, des cas de récurrence d’insuffisance de systèmes de contrôle ».

48      À la suite de la réunion bilatérale du 1er juillet 2010, les autorités du Royaume‑Uni ont entamé une enquête d’évaluation du risque. Par lettre du 25 octobre 2010, les autorités du Royaume‑Uni ont informé la Commission qu’elles n’étaient pas en mesure de finaliser cette enquête à la date prévue.

49      Par lettre du 29 mars 2011, les autorités du Royaume‑Uni ont transmis à la Commission un rapport d’évaluation du risque pour le régime de paiement unique en Irlande du Nord au titre de l’année de déclaration 2009 (ci‑après le « rapport d’évaluation du risque »), fondé sur un échantillon de 394 demandes introduites en 2009. Il ressort du rapport d’évaluation du risque, tout d’abord, que, en 2009, les superficies inadmissibles activées par les demandeurs correspondaient à 2,72 % des droits au paiement activés. Ensuite, le risque financier, entendu comme la différence entre la somme payée et un paiement révisé comprenant, le cas échéant, les sanctions applicables, correspondait, sur la moyenne de l’échantillon, à 2,05 % avant application des sanctions et à 5,19 % après application des sanctions. Enfin, s’agissant des sanctions, il ressort de ce rapport que les paiements et les sanctions ont été calculés sur la base des dispositions pertinentes du règlement no 796/2004, telles qu’interprétées par la Commission. En annexe 1 de ce rapport, à laquelle ce dernier fait explicitement référence, les autorités du Royaume‑Uni ont toutefois indiqué que, suivant leur propre interprétation des mêmes dispositions, le risque encouru par le Fonds serait de l’ordre de 0,59 % avant application des sanctions et de l’ordre de 0,86 % après application des sanctions.

50      Par lettre du 3 février 2012, la Commission a adressé aux autorités du Royaume‑Uni une communication formelle au titre de l’article 11, paragraphe 2, du règlement no 885/2006 dans laquelle elle a maintenu sa position quant aux insuffisances susmentionnées affectant les dépenses effectuées en 2010 au titre de l’année de déclaration 2009. S’agissant des conséquences financières, d’une part, la Commission a accepté l’évaluation du risque proposée par les autorités du Royaume‑Uni, estimant que le montant des pertes financières pouvait être raisonnablement déterminé sur la base de ladite évaluation. De ce fait, sur le fondement du document no VI/5330/97, la Commission a retenu, au titre des trois types d’insuffisances relevés, une correction ponctuelle de 5,19 % applicable aux dépenses effectuées en Irlande du Nord au titre du régime de paiement unique pour l’année de déclaration 2009. D’autre part, s’agissant des dépenses relatives au développement rural, la Commission, en l’absence d’évaluation proposée par les autorités du Royaume‑Uni, a fait application d’une correction forfaitaire de 5 % en raison des insuffisances d’un contrôle clé.

51      La Commission a donc proposé d’exclure du financement de l’Union la somme de 17 687 303,16 euros pour les dépenses effectuées en 2010, dont 16 513 582,57 euros au titre des dépenses relatives au régime de paiement unique et 1 173 720,59 euros au titre des dépenses relatives au développement rural.

52      Les autorités du Royaume‑Uni n’ont pas présenté de demande de conciliation à l’organe de conciliation au titre de l’article 16 du règlement no 885/2006.

53      Le 15 octobre 2012, la Commission a communiqué au Royaume‑Uni un rapport de synthèse quant aux résultats de l’enquête AA/2009/24.

54      C’est dans ces conditions que, le 26 février 2013, la Commission a adopté la décision d’exécution 2013/123/UE écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du FEOGA, section « Garantie », du FEAGA et du Feader (JO L 67, p. 20, ci‑après la « décision attaquée »), dont celles effectuées par le Royaume‑Uni en Irlande du Nord en 2010 et qui sont en cause dans la présente affaire.

 Procédure et conclusions des parties

55      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 2 mai 2013, le Royaume‑Uni a introduit le présent recours.

56      Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 19 juillet 2013, le Royaume‑Uni a demandé que la présente affaire soit jointe à l’affaire T‑503/12, Royaume‑Uni/Commission, aux fins de la phase orale de la procédure et de l’arrêt. La Commission a présenté ses observations sur cette demande par lettre déposée au greffe du Tribunal le 29 juillet 2013.

57      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la deuxième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

58      Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (deuxième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 de son règlement de procédure du 2 mai 1991, a posé par écrit une question à la Commission. Celle‑ci y a répondu dans le délai imparti.

59      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 3 décembre 2014.

60      Le Royaume‑Uni conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée, pour autant qu’elle concerne un poste figurant dans son annexe 1, relatif à une correction extrapolée de 5,19 % appliquée à des dépenses effectuées en Irlande du Nord au cours de l’exercice financier 2010 (s’élevant à 16 513 582,57 euros) ;

–        condamner la Commission aux dépens.

61      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme non fondé ;

–        condamner le Royaume‑Uni aux dépens.

 En droit

62      À l’appui de son recours en annulation, le Royaume‑Uni soulève deux moyens, qui sont tirés, en substance, le premier, d’erreurs de droit et de fait quant à la détermination de l’étendue des pertes réelles pour le Fonds et, le second, d’erreurs de droit et de fait affectant la conclusion de la Commission quant aux insuffisances des contrôles secondaires et, en particulier, aux méthodes de calcul des paiements indus et des sanctions applicables en cas de surdéclaration.

63      Ainsi qu’il ressort des écritures des parties et des débats conduits à l’audience, par les deux moyens soulevés à l’appui du présent recours, le Royaume‑Uni conteste, en substance, d’une part, la base de calcul, à savoir la totalité des dépenses, à laquelle la Commission a appliqué la correction financière de 5,19 % (premier moyen) et, d’autre part, notamment la méthode de calcul des paiements indus et des sanctions applicables, appliquée en vue de l’évaluation du risque et faisant l’objet des constats, par la Commission, d’insuffisances quant aux contrôles secondaires (second moyen).

 Considérations liminaires

64       À titre liminaire, en premier lieu, premièrement, il convient de rappeler que le Fonds ne finance que les interventions effectuées conformément aux dispositions du droit de l’Union dans le cadre de l’organisation commune des marchés agricoles (voir, en ce sens, arrêts du 9 janvier 2003, Grèce/Commission, C‑157/00, Rec, EU:C:2003:5, point 15 et jurisprudence citée ; du 24 février 2005, Grèce/Commission, C‑300/02, Rec, EU:C:2005:103, point 32 et jurisprudence citée, et du 4 septembre 2009, Autriche/Commission, T‑368/05, EU:T:2009:305, point 70).

65      Deuxièmement, selon une jurisprudence constante, il appartient à la Commission de prouver l’existence d’une violation des règles de l’organisation commune des marchés agricoles. Par conséquent, la Commission est obligée de justifier sa décision constatant l’absence ou les défaillances des contrôles mis en œuvre par l’État membre concerné. Toutefois, la Commission est tenue non de démontrer d’une façon exhaustive l’insuffisance des contrôles effectués par les administrations nationales ou l’irrégularité des chiffres transmis par celles‑ci, mais de présenter un élément de preuve du doute sérieux et raisonnable qu’elle éprouve à l’égard de ces contrôles ou de ces chiffres. L’État membre concerné, pour sa part, ne saurait infirmer les constatations de la Commission sans étayer ses propres allégations par des éléments établissant l’existence d’un système fiable et opérationnel de contrôle. Dès lors qu’il ne parvient pas à démontrer que les constatations de la Commission sont inexactes, celles‑ci constituent des éléments susceptibles de faire naître des doutes sérieux quant à la mise en place d’un ensemble adéquat et efficace de mesures de surveillance et de contrôle. Cet allégement de l’exigence de la preuve pour la Commission s’explique par le fait que c’est l’État membre qui est le mieux placé pour recueillir et vérifier les données nécessaires à l’apurement des comptes du Fonds et auquel il incombe, en conséquence, de présenter la preuve la plus détaillée et complète de la réalité de ses contrôles ou de ses chiffres et, le cas échéant, de l’inexactitude des affirmations de la Commission (voir, en ce sens, arrêts Grèce/Commission, point 64 supra, EU:C:2005:103, points 33 à 36 et jurisprudence citée ; du 6 mars 2001, Pays‑Bas/Commission, C‑278/98, Rec, EU:C:2001:124, points 39 à 41 et jurisprudence citée, et Autriche/Commission, point 64 supra, EU:T:2009:305, point 71 et jurisprudence citée).

66      Troisièmement, selon la jurisprudence, s’il appartient à la Commission de prouver l’existence d’une violation des règles de l’Union, une fois cette violation établie, il revient à l’État membre de démontrer, le cas échéant, que la Commission a commis une erreur quant aux conséquences financières à en tirer (voir, en ce sens, arrêts du 24 avril 2008, Belgique/Commission, C‑418/06 P, Rec, EU:C:2008:247, point 135, et Autriche/Commission, point 64 supra, EU:T:2009:305, point 181).

67      En effet, la gestion du financement du Fonds repose principalement sur les administrations nationales chargées de veiller à la stricte observation des règles de l’Union et est fondée sur la confiance entre les autorités nationales et les autorités de l’Union. Seul l’État membre est en mesure de connaître et de déterminer avec précision les données nécessaires à l’élaboration des comptes du Fonds, la Commission ne jouissant pas de la proximité nécessaire pour obtenir les renseignements dont elle a besoin auprès des agents économiques (voir, en ce sens, arrêts du 7 octobre 2004, Espagne/Commission, C‑153/01, Rec, EU:C:2004:589, point 133 et jurisprudence citée, et Autriche/Commission, point 64 supra, EU:T:2009:305, point 182 et jurisprudence citée).

68      En second lieu, il importe, eu égard aux arguments échangés par les parties dans le cadre des deux moyens soulevés par le Royaume‑Uni, de préciser le mode d’allocation des droits au paiement appliqué, en 2005, par le Royaume‑Uni en vue de la mise en œuvre du régime de paiement unique institué par le règlement no 1782/2003.

69      À cet égard, il ressort des éléments du dossier que le Royaume‑Uni a opté pour une mise en œuvre régionale du régime de paiement unique, conformément aux dispositions du titre III, chapitre 5, du règlement no 1782/2003.

70      Les droits au paiement ont été établis, en Irlande du Nord, sur la base du modèle dit « hybride statique ». Dans ce modèle, chaque droit au paiement est composé d’un élément « historique » (ci‑après l’« élément historique ») et d’un élément « forfaitaire » lié à la superficie (ci‑après l’« élément forfaitaire »), la somme de la valeur de ces éléments correspondant à la valeur unitaire du droit au paiement. D’une part, en vue d’établir la valeur de l’élément historique, un montant de référence, établi sur la base des paiements versés aux agriculteurs pendant la période de référence (années 2000 à 2002), est divisé par le nombre d’hectares admissibles déclarés par les agriculteurs, ce nombre constituant alors le nombre de droits au paiement alloués. Il s’ensuit que, si la somme des éléments historiques constitue un montant fixe établi sur la base des paiements versés au cours de la période de référence, la valeur unitaire de chaque élément historique de ces droits au paiement est tributaire du nombre de droits alloués en 2005 et, ainsi, du nombre d’hectares admissibles déclarés cette année‑là. D’autre part, l’élément forfaitaire est d’une valeur invariable, en l’occurrence de 78,33 euros.

71      C’est à la lumière de ces rappels et précisions qu’il convient d’examiner, à titre principal, le bien‑fondé du présent recours en commençant par l’examen du second moyen soulevé par le Royaume‑Uni.

 Sur le second moyen, tiré d’erreurs de droit et de fait quant aux insuffisances des contrôles secondaires et, en particulier, aux méthodes de calcul des paiements indus et des sanctions applicables en cas de surdéclaration

72      Par le second moyen d’annulation, tiré d’erreurs de droit et de fait quant à la constatation de déficiences des contrôles secondaires, le Royaume‑Uni met en cause, en particulier, la méthode de calcul des paiements indus et des sanctions applicables en cas de surdéclaration de superficie, méthode suivie par la Commission et utilisée dans le rapport d’évaluation du risque. Ce moyen est divisé en cinq griefs, qui ont trait, le premier, à la réévaluation rétrospective de la valeur des droits au paiement, le deuxième, à la prise en compte, lors du nouveau calcul des droits au paiement, des différences de superficies affectant les primes « animaux », le troisième, à la récupération de l’indu, le quatrième, aux réductions et exclusions applicables en cas de surdéclaration de superficie et, le cinquième, à la surdéclaration intentionnelle.

73      Étant donné que, à la différence des deuxième et cinquième griefs, les premier, troisième et quatrième griefs ont spécifiquement trait à la méthode de calcul des trop‑perçus et des sanctions sur le fondement de laquelle le risque financier encouru par le Fonds a été évalué en l’espèce dans le rapport d’évaluation du risque, il convient d’examiner d’abord ces trois griefs avant d’apprécier les deuxième et cinquième griefs.

 Sur les premier, troisième et quatrième griefs, relatifs à la méthode d’évaluation du risque financier encouru par le Fonds

74      Par les premier, troisième et quatrième griefs soulevés à l’appui du présent moyen, le Royaume‑Uni conteste à la fois des constats d’insuffisances, effectués par la Commission, affectant certains contrôles secondaires et la méthode de calcul, préconisée par cette dernière et utilisée dans le rapport d’évaluation du risque, des paiements indus devant être récupérés et des réductions et exclusions applicables en cas de surdéclaration.

75      Ces trois griefs ont trait à l’interprétation de plusieurs dispositions du règlement no 796/2004 dans une situation dans laquelle des paiements ont été effectués sur la base de certains droits au paiement indûment alloués accompagnés d’hectares inadmissibles. Plus particulièrement, la situation en cause dans le cadre de ces griefs tient au fait que, lors de l’allocation initiale des droits au paiement en vue du régime de paiement unique, des erreurs ont été commises quant à la superficie éligible. De ce fait, certains agriculteurs se sont vu allouer un nombre trop élevé de droits au paiement. Eu égard à la méthode d’allocation des droits au paiement choisie par le Royaume‑Uni (voir point 70 ci‑dessus), d’une part, cette allocation indue a eu pour effet une sous‑évaluation de la valeur unitaire de chaque droit au paiement des agriculteurs concernés et, plus précisément, de leur élément historique. D’autre part, elle a eu pour effet une surévaluation de la valeur totale de la somme de ces droits au paiement en raison de l’élément forfaitaire. Les erreurs quant aux superficies éligibles ont été réitérées pendant les années suivantes jusqu’à leur découverte lors des contrôles, en sorte que des paiements ont été octroyés sur la base d’hectares inadmissibles.

76      C’est dans ces conditions que le Royaume‑Uni allègue, en substance, que, dans une telle situation, la valeur unitaire des droits au paiement doit, concomitamment à la réduction de leur nombre, être réévaluée rétrospectivement à la hausse en vertu de l’article 73 bis du règlement no 796/2004 (premier grief) préalablement à l’application des dispositions de l’article 73 du même règlement, relatif à la récupération de l’indu (troisième grief), et à l’application de celles de l’article 51 dudit règlement, relatif aux réductions et exclusions applicables en cas de surdéclaration (quatrième grief).

–       Sur le premier grief, relatif à la réévaluation rétrospective de la valeur des droits au paiement

77      Le Royaume‑Uni soutient que, contrairement à ce que la Commission a considéré lors de la procédure d’apurement, l’article 73 bis, paragraphes 1 et 2, du règlement no 796/2004 impose, sans qu’il soit tenu compte de la connaissance de l’agriculteur, l’ajustement de la valeur des droits au paiement en cas d’allocation initiale d’un nombre trop élevé de droits au paiement. La connaissance de l’agriculteur n’aurait d’incidence que dans le contexte du paragraphe 2 bis de cette disposition, lequel serait, toutefois, inapplicable en l’espèce. En outre, relevant que la Commission ajuste elle‑même systématiquement, sur le fondement de l’article 73 bis, paragraphes 1 et 2, du règlement no 796/2004, la valeur des droits au paiement pour l’avenir, le Royaume‑Uni observe que l’article 73 bis dudit règlement n’opère aucune distinction entre la réévaluation rétrospective et la réévaluation prospective et qu’un nouveau calcul prospectif systématique est même contraire à ces dispositions. En réponse aux arguments de la Commission, le Royaume‑Uni allègue que le renvoi, par l’article 73 bis, paragraphe 4, du règlement no 796/2004, à l’article 73 de ce même règlement ne remet pas en cause son interprétation de l’article 73 bis dudit règlement.

78      La Commission conteste le bien‑fondé de ces arguments.

79      Dans le cadre du présent grief, les parties s’opposent, en substance, sur la question de savoir si, en cas d’allocation, en raison d’erreurs quant à la superficie éligible commises en 2005 et réitérées par la suite, d’un nombre trop élevé de droits au paiement ayant entraîné une sous‑évaluation de leur valeur unitaire et une surévaluation de leur valeur totale, l’article 73 bis du règlement no 796/2004 impose, préalablement à l’application des dispositions relatives à la récupération de l’indu et aux sanctions applicables en cas de surdéclaration en cause dans les troisième et quatrième griefs du présent moyen, de procéder à la réévaluation rétrospective de la valeur unitaire des droits au paiement.

80      À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’article 36 du règlement no 73/2009 prévoit que les droits au paiement par hectare ne sont pas modifiés, sauf disposition contraire de ce règlement (arrêt du 5 juin 2014, Vonk Noordegraaf, C‑105/13, Rec, EU:C:2014:1126, point 37).

81      En effet, dans la mesure où, conformément à l’article 34, paragraphe 1, du règlement no 73/2009, tout droit au paiement activé donne droit au paiement du montant qu’il fixe, une modification de ce montant aurait pour conséquence une diminution, ou une augmentation, du montant de l’aide versée à l’agriculteur concerné. Or, ainsi qu’il ressort du considérant 29 du règlement no 1782/2003, l’un des objectifs du régime de paiement unique est de permettre à chaque agriculteur de continuer à bénéficier d’un niveau d’aide équivalant aux montants qui lui ont été accordés au cours de la période de référence (arrêt Vonk Noordegraaf, point 80 supra, EU:C:2014:1126, point 38).

82      Force est, cependant, de constater qu’aucune disposition du règlement no 73/2009 ne prévoit expressément la possibilité de modifier les droits au paiement d’un agriculteur qui aurait reçu un nombre trop élevé de droits au paiement lors de l’allocation initiale (voir, en ce sens, arrêt Vonk Noordegraaf, point 80 supra, EU:C:2014:1126, point 40).

83      En revanche, l’article 73 bis du règlement no 796/2004 prévoit des règles relatives à la récupération des droits indûment alloués desquelles il ressort que, dans les circonstances qu’elles visent, les droits au paiement peuvent faire l’objet d’un nouveau calcul. Cette disposition procède, ainsi que cela ressort du considérant 15 du règlement no 239/2005, par lequel elle a été insérée dans le règlement no 796/2004, de la volonté de fixer des règles pour le cas où un agriculteur aurait indûment reçu une certaine quantité de droits au paiement ou pour le cas où la valeur de chacun des droits au paiement aurait été établie à un niveau incorrect.

84      Le Royaume‑Uni fondant sur l’article 73 bis, paragraphe 1, du règlement no 796/2004, le cas échéant lu en combinaison avec le paragraphe 2 de cette même disposition, l’allégation selon laquelle il convient, en cas d’allocation indue de certains droits au paiement, de procéder à leurs réduction et réévaluation rétrospectives, il y a lieu de procéder à l’interprétation de l’article 73 bis dudit règlement.

85      À cette fin, il convient de rappeler que, pour l’interprétation d’une disposition de droit de l’Union, il y a lieu de tenir compte non seulement des termes de celle‑ci, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie (arrêt du 17 novembre 1983, Merck, 292/82, Rec, EU:C:1983:335, point 12).

86      Premièrement, il convient de rappeler les dispositions pertinentes de l’article 73 bis du règlement no 796/2004. À cet égard, tout d’abord, l’article 73 bis du règlement no 796/2004 prévoit, en son paragraphe 1, que, lorsque certains droits au paiement ont été alloués indûment, l’agriculteur les cède à la réserve nationale et que ces droits sont considérés comme n’ayant pas été attribués dès le départ. Ensuite, il ressort de l’article 73 bis, paragraphe 2, du règlement no 796/2004 que, lorsque la valeur des droits au paiement est trop élevée, cette valeur est ajustée en conséquence, étant entendu que les droits sont considérés comme ayant été alloués dès le départ à la valeur résultant de l’ajustement. Enfin, l’article 73 bis, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004, inséré par le règlement no 972/2007, prévoit que, lorsque, aux fins de l’application des paragraphes 1 et 2 de ce même article, il est établi qu’un agriculteur s’est vu allouer indûment certains droits au paiement, mais qu’une telle allocation est sans incidence sur la valeur totale des droits qui lui ont été octroyés, ces derniers doivent faire l’objet d’un nouveau calcul, sous réserve que les erreurs n’aient pu raisonnablement être décelées par l’agriculteur (voir, en ce sens, arrêt Vonk Noordegraaf, point 80 supra, EU:C:2014:1126, point 41). Par ailleurs, conformément à l’article 73 bis, paragraphe 4, du règlement no 796/2004, les montants indûment versés sont récupérés conformément à l’article 73 du même règlement, qui a trait à la récupération de l’indu.

87      Deuxièmement, il convient de relever que, en l’espèce, les parties s’accordent quant à l’inapplicabilité des dispositions de l’article 73 bis, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004, dès lors que l’allocation indue, si elle a entraîné une sous‑évaluation de la valeur unitaire des droits au paiement, a également affecté, en raison de l’élément forfaitaire, la valeur totale des droits au paiement.

88      Troisièmement, s’agissant de l’interprétation de l’article 73 bis, paragraphe 1, du règlement no 796/2004, il convient de relever que la lettre de cette disposition ne prévoit ni n’exclut explicitement de réévaluation rétrospective de la valeur unitaire des droits au paiement à la suite de la récupération des droits indûment alloués.

89      Les parties font cependant observer que la précision, figurant à l’article 73 bis, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement no 796/2004, selon laquelle les droits indûment alloués sont considérés comme n’ayant pas été attribués dès le départ pourrait être comprise en ce sens qu’il convient, lorsqu’une allocation indue de droits au paiement a affecté la valeur unitaire des droits alloués, de procéder à une réévaluation de la valeur unitaire des droits subsistants.

90      Toutefois, cette lecture de l’article 73 bis, paragraphe 1, du règlement no 796/2004 ne résiste pas à une analyse contextuelle de cette disposition.

91      En effet, il convient de relever qu’une telle lecture de l’article 73 bis, paragraphe 1, du règlement no 796/2004 priverait, à tout le moins partiellement, de sens l’ajout, par le règlement no 972/2007, du paragraphe 2 bis de cette disposition. Dans le cadre de l’article 73 bis, paragraphe 2 bis, dudit règlement, aux fins de l’application des paragraphes 1 et 2 du même article, la réévaluation de la valeur unitaire des droits au paiement, en cas d’allocation indue, est limitée à l’hypothèse, différente, comme en conviennent les parties, de celle en cause dans la présente affaire, dans laquelle ladite allocation indue n’a eu aucune incidence sur la valeur totale des droits au paiement, pour autant que l’agriculteur ne pouvait raisonnablement avoir détecté les erreurs commises. Or, si l’article 73 bis, paragraphe 1, du règlement no 796/2004 devait être interprété en ce sens qu’il comporte en lui‑même l’obligation de procéder à une réévaluation rétrospective de la valeur unitaire des droits au paiement – sans considération pour l’incidence d’une telle réévaluation sur la valeur totale des droits au paiement, et ce, le cas échéant, quand bien même l’agriculteur pouvait raisonnablement avoir détecté les erreurs commises –, cette précision figurant à l’article 73 bis, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004 serait dépourvue de toute utilité et de toute pertinence.

92      Cette lecture est par ailleurs confirmée au regard des motifs ayant justifié l’insertion, par le règlement no 972/2007, du paragraphe 2 bis à l’article 73 bis du règlement no 796/2004. En effet, ainsi qu’il ressort du considérant 19 du règlement no 972/2007, ce n’est que dans les cas où les allocations indues de droits n’ont pas eu d’incidence sur la valeur totale des droits au paiement, mais uniquement sur le nombre de droits de l’agriculteur, que les États membres corrigent, lorsque l’agriculteur ne pouvait raisonnablement détecter les erreurs, l’allocation ou, le cas échéant, le type de droits, sans réduire la valeur correspondante, conformément à cette dernière disposition.

93      Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que la précision, à l’article 73 bis, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement no 796/2004, selon laquelle « [l]es droits indûment alloués sont considérés comme n’ayant pas été attribués dès le départ » ne saurait être interprétée en ce sens qu’elle impose de procéder à la réévaluation rétrospective de la valeur unitaire des droits au paiement. En revanche, il y a lieu de lire cette précision en combinaison avec l’article 73 bis, paragraphe 4, dudit règlement, aux termes duquel « [l]es montants indûment versés sont récupérés conformément à l’article 73 [du même règlement] ». Il s’ensuit que la précision susmentionnée figurant à l’article 73 bis, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement no 796/2004 doit être interprétée en ce sens qu’elle a pour seul objet d’indiquer que les aides, le cas échéant, octroyées sur la base de droits indûment alloués sont elles‑mêmes indues, en sorte qu’elles doivent, conformément aux dispositions de l’article 73 du règlement no 796/2004, être restituées.

94      Au demeurant, il y a lieu de considérer que cette interprétation n’est pas contraire aux objectifs du régime de paiement unique. Ainsi que cela a été rappelé au point 81 ci‑dessus, il ressort, selon la jurisprudence, du considérant 29 du règlement no 1782/2003 que l’un des objectifs du régime de paiement unique est de permettre à chaque agriculteur de continuer à bénéficier d’un niveau d’aide équivalant aux montants qui lui ont été accordés au cours de la période de référence (arrêt Vonk Noordegraaf, point 80 supra, EU:C:2014:1126, point 38). En effet, ainsi que cela ressort de l’emploi de l’adjectif « équivalent », ce régime ne garantit pas une stricte identité du niveau d’aide.

95      Quatrièmement, s’agissant des arguments du Royaume‑Uni tirés de l’article 73 bis, paragraphe 2, du règlement no 796/2004, il convient de relever que cette disposition ne prévoit de réévaluation des droits au paiement qu’à la baisse. En revanche, il ne ressort aucunement du libellé de cette disposition qu’elle permette une réévaluation à la hausse lorsque, en raison d’une allocation initiale d’un nombre trop élevé de droits au paiement, la valeur de ces derniers a été évaluée à un niveau trop faible.

96      Par ailleurs, il y a lieu de considérer que, contrairement à ce que le Royaume‑Uni a envisagé à l’audience, l’article 73 bis, paragraphe 2, du règlement no 796/2004 ne saurait être interprété en ce sens qu’il impose une réévaluation rétrospective à la hausse de la valeur unitaire des droits au paiement lorsque, en cas d’allocation indue de certains droits au paiement et de sous‑évaluation de la valeur unitaire des droits alloués, la valeur totale des droits alloués à un agriculteur a été surévaluée. En effet, outre le fait que, lu dans le contexte de l’article 73 bis, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004, l’emploi, au paragraphe 2 de cette même disposition, du terme « valeur » doit être compris, à défaut de précision qu’il s’agit de la valeur totale, comme la valeur unitaire des droits au paiement individuels, la lecture suggérée par le Royaume‑Uni doit en tout état de cause être écartée pour des motifs analogues à ceux figurant aux points 91 et 92 ci‑dessus.

97      Il s’ensuit que, contrairement aux allégations du Royaume‑Uni, une lecture combinée des paragraphes 1 et 2 de l’article 73 bis du règlement no 796/2004 ne permet pas de considérer que, en cas d’allocation initiale d’un nombre trop élevé de droits au paiement ayant entraîné une sous‑évaluation de la valeur unitaire des droits au paiement tout en affectant la valeur totale desdits droits, il convient, lors de la détection de l’erreur, de procéder à une réévaluation rétrospective de la valeur unitaire des droits au paiement après réduction de leur nombre.

98      Par ailleurs, pour autant que le Royaume‑Uni fait observer, dans sa réplique, que la Commission aurait reconnu le caractère erroné de son analyse, en ce qu’elle aurait admis que l’article 73 bis, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004, lequel fait seul référence à la connaissance de l’agriculteur, était inapplicable, il suffit d’observer qu’il ne ressort nullement des pièces du dossier que la Commission a entendu fonder son reproche tiré de la réévaluation systématique des droits au paiement sur l’article 73 bis, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004.

99      Partant, et sans qu’il soit besoin d’examiner les arguments de la Commission tirés de l’article 73, paragraphe 4, du règlement no 796/2004 et relatifs à la récupération des paiements indus, question relevant du troisième grief du présent moyen, il y a lieu de conclure que le présent grief doit être écarté.

–       Sur le troisième grief, relatif à la récupération de l’indu

100    Le Royaume‑Uni conteste les considérations émises par la Commission quant à la récupération de l’indu au titre de l’article 73 du règlement no 796/2004. Il estime, en substance, qu’il convient, en cas d’allocation initiale d’un nombre trop élevé de droits au paiement, de recalculer les droits au paiement, conformément à l’article 73 bis du même règlement, avant d’établir les montants indûment perçus devant être récupérés. Il s’ensuivrait que, dans un tel cas, les montants relatifs à l’élément historique de l’aide ne devraient pas être restitués. L’approche de la Commission, qui établirait les montants devant être récupérés sur la base de la valeur initiale des droits au paiement inexistants, serait incompatible avec les articles 73 et 73 bis du règlement no 796/2004 en ce que la Commission, d’une part, ne procéderait pas à l’ajustement rétroactif de la valeur des droits et, d’autre part, obligerait les agriculteurs à rembourser des montants supérieurs à la perte réelle pour le Fonds et aux paiements indus. En cela, l’approche de la Commission aboutirait à une sanction des agriculteurs.

101    La Commission conteste le bien‑fondé de ces arguments.

102    En premier lieu, il importe de rappeler que, aux termes de l’article 34, paragraphe 1, du règlement no 73/2009 :

« L’aide au titre du régime de paiement unique est octroyée aux agriculteurs après activation d’un droit au paiement par hectare admissible. Les droits au paiement activés donnent droit au paiement des montants qu’ils fixent. »

103    En deuxième lieu, il convient de relever que, aux termes de l’article 73, paragraphe 1, du règlement no 796/2004, en cas de paiement indu, l’agriculteur concerné a l’obligation de rembourser les montants en cause majorés d’intérêts calculés comme prescrit au paragraphe 3 de cette disposition.

104    En vertu de l’article 73, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement no 796/2004, l’obligation de remboursement visée à l’article 73, paragraphe 1, dudit règlement ne s’applique pas si le paiement a été effectué à la suite d’une erreur de l’autorité compétente ou d’une autre autorité et si l’erreur ne pouvait raisonnablement être décelée par l’agriculteur. Il ressort en outre de l’article 73, paragraphe 4, second alinéa, du règlement no 796/2004 que, toutefois, lorsque l’erreur a trait à des éléments de fait pertinents pour le calcul de l’aide en question, le premier alinéa de cette disposition ne s’applique que si la décision de recouvrement n’a pas été communiquée dans les douze mois suivant le paiement.

105    En troisième lieu, il ressort de la jurisprudence que, lorsque le législateur de l’Union fixe des conditions d’éligibilité pour l’octroi d’une aide, l’exclusion qu’entraîne l’inobservation de l’une de ces conditions ne constitue pas une sanction, mais la simple conséquence du non‑respect desdites conditions prévues par la loi (arrêts du 24 mai 2007, Maatschap Schonewille‑Prins, C‑45/05, Rec, EU:C:2007:296, point 47, et du 24 mai 2012, Hehenberger, C‑188/11, Rec, EU:C:2012:312, point 37).

106    En l’espèce, il convient de relever que l’argumentation du Royaume‑Uni est fondée sur la prémisse que, en cas d’allocation indue de droits au paiement ayant affecté à la fois la valeur unitaire et la valeur totale des droits, il convient, conformément à l’article 73 bis du règlement no 796/2004, de procéder à la réévaluation rétrospective de la valeur des droits au paiement après réduction de leur nombre, avant même d’appliquer les dispositions de l’article 73 du même règlement quant à la récupération de l’indu.

107    Or, cette prémisse ne saurait être retenue.

108    En effet, eu égard aux considérations figurant au point 97 ci‑dessus, une telle réévaluation ne saurait se fonder, contrairement à ce qui apparaît dans les arguments du Royaume‑Uni, sur les dispositions de l’article 73 bis du règlement no 796/2004, lorsque, en cas d’erreurs quant à la superficie éligible remontant à l’année d’allocation des droits au paiement, la valeur totale de ceux‑ci a été affectée par lesdites erreurs.

109    Il s’ensuit que l’argumentation du Royaume‑Uni tirée de ce qu’il convient de procéder à la réévaluation rétrospective des droits au paiement préalablement à l’application de l’article 73 du règlement no 796/2004 ne saurait prospérer.

110    Cette conclusion n’est pas remise en cause par les autres arguments du Royaume‑Uni, tirés de ce que l’application de l’article 73, paragraphe 1, du règlement no 796/2004 sans que soit opérée une réévaluation préalable des droits au paiement entraîne des récupérations de montants supérieurs au risque réel pour le Fonds et constitue, de ce fait, une sanction pour l’agriculteur.

111    À cet égard, d’une part, il convient de rappeler que, conformément à l’article 34, paragraphe 1, du règlement no 73/2009, l’aide est accordée pour les droits au paiement activés, soit pour les droits au paiement accompagnés d’un nombre correspondant d’hectares éligibles. Partant, une erreur quant à la surface éligible affecte en tout état de cause, comme le fait observer à juste titre la Commission, le montant de l’aide versée en son intégralité.

112    D’autre part, il ressort des considérations figurant au point 93 ci‑dessus qu’une aide octroyée sur la base de droits au paiement indûment alloués constitue, eu égard aux dispositions combinées de l’article 73 bis, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement no 796/2004 et de l’article 73 bis, paragraphe 4, du même règlement, une aide indue devant être récupérée conformément à l’article 73 dudit règlement.

113    Or, tout d’abord, l’approche du Royaume‑Uni consistant à procéder, préalablement à l’application des dispositions de l’article 73 du règlement no 796/2004, à la réévaluation rétrospective de la valeur unitaire de chaque droit au paiement et à recalculer, sur la base d’un nombre correct de droits au paiement ainsi réévalués, le montant total de l’aide qui aurait dû être versée à l’agriculteur en l’absence de l’erreur commise en 2005 fait échec, ainsi que le fait observer la Commission à juste titre en réponse tant au premier qu’au troisième grief du présent moyen, à la récupération correcte et effective des aides indues.

114    Ainsi, plutôt que de tenir pour indue l’aide octroyée sur la base d’un droit au paiement indûment alloué et accompagnée d’une superficie non éligible en son intégralité, l’approche du Royaume‑Uni a pour effet de réduire la part indue à la différence entre le paiement octroyé et un paiement révisé sur la base des droits au paiement réévalués à la hausse et du nombre d’hectares déterminés comme admissibles, correspondant au montant de l’élément forfaitaire du droit au paiement indûment alloué.

115    Or, il y a lieu de considérer que, en l’absence de toute disposition prévoyant, en cas d’allocation indue de certains droits au paiement ayant affecté la valeur totale des droits au paiement, la réévaluation rétrospective de leur valeur unitaire à la hausse, une telle interprétation est incompatible avec l’exigence d’une interprétation stricte des conditions de prise en charge des dépenses que la Cour a dégagée dans le cadre du règlement (CEE) no 729/70 du Conseil, du 21 avril 1970, relatif au financement de la politique agricole commune (JO L 94, p. 13), remplacé par le règlement (CE) no 1258/1999 du Conseil, du 17 mai 1999, relatif au financement de la politique agricole commune (JO L 160, p. 103), lequel a, à son tour, été remplacé par le règlement no 1290/2005 (voir, en ce sens, arrêt du 6 novembre 2014, Pays‑Bas/Commission, C‑610/13 P, EU:C:2014:2349, point 41 et jurisprudence citée).

116    Ensuite, dans la mesure où, dans la réplique, le Royaume‑Uni fait observer qu’une approche en vertu de laquelle le trop‑perçu serait évalué sur la base des droits au paiement initialement alloués fait obstacle à la récupération correcte de l’indu en ce que, selon le cas, elle aboutit à ce que des trop‑perçus ne soient jamais récupérés ou donne lieu à des récupérations excessives, d’une part, s’agissant des récupérations excessives, il y a lieu de relever que cette argumentation ne peut, eu égard aux considérations exposées aux points 113 et 114 ci‑dessus, qu’être écartée.

117    D’autre part, s’agissant de l’argument tiré de ce que ladite approche, qui serait celle de la Commission, pourrait avoir pour effet d’empêcher la récupération de trop‑perçus en raison d’un calcul de l’aide sur la base de droits au paiement inexistants, il y a lieu de relever que cet argument, qui a été soulevé dans la requête dans le seul contexte du quatrième grief et exposé au regard des dispositions de l’article 51 du règlement no 796/2004, est invoqué dans le contexte de la détermination du trop‑perçu pour la première fois dans la réplique et qu’il n’y est aucunement étayé si ce n’est par renvoi aux explications figurant dans la requête au titre du quatrième grief. En tout état de cause, il y a lieu de relever que, comme cela ressort du point 93 ci‑dessus, une aide octroyée sur la base d’un droit au paiement indûment alloué est elle‑même indue. Si le Royaume‑Uni allègue que l’approche de la Commission aurait, dans certaines circonstances, pour effet de ne pas tenir pour indu un tel paiement dès lors qu’elle calculerait le trop‑perçu sur le fondement des droits au paiement tels que déclarés, il convient cependant d’observer que, dans ses écritures, la Commission observe explicitement, en réponse au premier moyen soulevé par le Royaume‑Uni, qu’un agriculteur ne saurait obtenir un paiement sur la base d’un droit au paiement indûment alloué. De surcroît, il ne ressort pas des éléments du dossier que, dans le cadre du rapport d’évaluation du risque, le Royaume‑Uni ait été amené à exclure du calcul des trop‑perçus certains montants octroyés sur la base de droits au paiement indûment alloués.

118    Enfin, il y a lieu de préciser que, eu égard à la jurisprudence citée au point 105 ci‑dessus, la récupération ne constitue pas, contrairement aux allégations du Royaume‑Uni, une sanction, mais la simple conséquence du non‑respect des conditions d’éligibilité.

119    Par ailleurs, il importe d’ajouter que, en tout état de cause, l’article 73, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement no 796/2004 prévoit que l’obligation de remboursement visée au paragraphe 1 de cette disposition ne s’applique pas si le paiement a été effectué à la suite d’une erreur de l’autorité compétente ou d’une autre autorité et si l’erreur ne pouvait raisonnablement être décelée par l’agriculteur. Il s’ensuit que l’agriculteur de bonne foi est protégé de la récupération de l’aide indue lorsque l’erreur ayant affecté la superficie éligible voire l’octroi des droits au paiement est imputable aux autorités et qu’il ne pouvait raisonnablement l’avoir décelée.

120    Il s’ensuit que le présent grief doit être écarté.

–       Sur le quatrième grief, relatif aux réductions et exclusions applicables en cas de surdéclaration de superficie

121    Le Royaume‑Uni conteste la considération selon laquelle il aurait erronément appliqué les dispositions de l’article 51 du règlement no 796/2004. Premièrement, il estime que, lorsque des erreurs ont été commises lors de l’allocation initiale des droits, les sanctions visées audit article ne peuvent être appliquées qu’après qu’a été recalculée la valeur des droits au paiement conformément à l’article 73 bis du même règlement. Deuxièmement, tout en reconnaissant que des sanctions doivent pouvoir être infligées au titre de toute année de déclaration lorsque l’agriculteur déclare une superficie non admissible pour activer un droit au paiement dont il dispose réellement, le Royaume‑Uni fait néanmoins observer que la Commission estime à tort que, en cas d’erreurs commises lors de l’allocation initiale des droits au paiement et réitérées lors des années de déclaration suivantes, des sanctions devraient être appliquées non seulement au titre de l’année 2005, mais également au titre des années ultérieures, alors même que l’agriculteur déclare suffisamment d’hectares admissibles pour activer les droits au paiement dont il dispose effectivement. Les dispositions de l’article 51 du règlement no 796/2004 opéreraient ainsi une distinction entre des surdéclarations de superficie donnant lieu à l’activation de droits au paiement à la disposition effective d’un agriculteur et des surdéclarations induisant une erreur commise dans l’allocation initiale des droits au paiement. En effet, il résulterait tant de l’économie de l’article 51, paragraphes 1 et 2 bis, du règlement no 796/2004, confirmée par l’article 57, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement no 1122/2009, que, à titre subsidiaire, du principe d’application rétroactive de la sanction moins sévère, en l’occurrence ledit article 57, paragraphe 2, deuxième alinéa, de ce dernier règlement, qu’aucune sanction n’est due au titre des années ultérieures.

122    La Commission conteste le bien‑fondé des arguments du Royaume‑Uni.

123    Dans un premier temps, il y a lieu de relever que l’argumentation soulevée par le Royaume‑Uni à l’appui du présent grief est fondée sur la prémisse selon laquelle, préalablement à l’application des réductions et exclusions conformément à l’article 51 du règlement no 796/2004, il y a lieu de faire application de l’article 73 bis du même règlement, tel qu’interprété par le Royaume‑Uni.

124    À cet égard, il suffit de rappeler que, ainsi que cela ressort des points 97 et 108 ci‑dessus, cette prémisse est erronée.

125    En effet, il a déjà été relevé, aux points 97 et 108 ci‑dessus, que l’article 73 bis du règlement no 796/2004 ne saurait être interprété en ce sens qu’il prévoirait, dans des circonstances telles que celles en cause dans la présente affaire, une réévaluation rétroactive de la valeur des droits au paiement.

126    Il s’ensuit également que, dans la mesure où l’article 73 bis du règlement no 796/2004 ne permet pas, dans les circonstances telles que celles de la présente affaire, le nouveau calcul rétrospectif des droits au paiement, le Royaume‑Uni ne saurait reprocher à la Commission de traiter différemment la superficie déclarée et les droits au paiement déclarés en ce qu’elle ajuste la première sans pour autant ajuster les seconds.

127    Dans un deuxième temps, d’une part, le Royaume‑Uni considère que, s’agissant de l’année de déclaration 2005, il convient, conformément à l’article 51, paragraphe 1, du règlement no 796/2004, d’appliquer une sanction pour surdéclaration, étant précisé que cette sanction doit être calculée sur la base des droits au paiement, tels que corrigés rétrospectivement. D’autre part, s’agissant des années de déclaration ultérieures pendant lesquelles la même erreur a été réitérée, le Royaume‑Uni estime que l’application combinée des paragraphes 1 et 2 bis de l’article 51 du règlement no 796/2004 a pour effet d’exclure toute sanction au titre de ces années. Cette considération est fondée sur l’économie desdites dispositions en ce sens que, selon le Royaume‑Uni, lorsque l’agriculteur déclare une superficie admissible suffisante pour activer les droits au paiement dont il dispose réellement (c’est‑à‑dire le cas échéant après réduction de leur nombre et réévaluation de leur valeur), il n’est pas utile, conformément à l’article 51, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004, de lui infliger de sanction.

128    En vue d’examiner le bien‑fondé de ces arguments, il convient de vérifier, d’une part, si l’article 51, paragraphe 1, du règlement no 796/2004 impose, en dépit de la lettre de l’article 73 bis du même règlement, de procéder à la réévaluation rétrospective de la valeur des droits au paiement et, d’autre part, s’il ressort de l’article 51, paragraphe 2 bis, dudit règlement que, ainsi que l’affirme le Royaume‑Uni, aucune sanction ne doit être appliquée pour autant que l’agriculteur déclare une superficie suffisante pour activer le nombre de droits au paiement dont il dispose réellement.

129    À titre liminaire, d’abord, il convient de relever que les objectifs du règlement no 796/2004 et, notamment, de son article 51 sont, conformément aux considérants 29 et 55 de ce règlement, respectivement, d’assurer un suivi efficace du respect des dispositions relatives aux régimes d’aides gérés dans le cadre du système intégré et, afin de protéger efficacement les intérêts financiers de l’Union, d’adopter des mesures adéquates pour lutter contre les irrégularités et les fraudes (voir, par analogie, arrêt du 28 novembre 2002, Agrargenossenschaft Pretzsch, C‑417/00, Rec, EU:C:2002:715, point 33).

130    Ensuite, l’article 51, paragraphe 1, du règlement no 796/2004 prévoit, au cas où la superficie déclarée dans la demande d’aides dépasse celle déterminée lors d’un contrôle, des sanctions échelonnées selon la gravité de l’irrégularité commise (voir, par analogie, arrêt Agrargenossenschaft Pretzsch, point 129 supra, EU:C:2002:715, point 35). Premièrement, lorsque la différence entre la superficie déclarée et celle déterminée conformément à l’article 50, paragraphes 3 et 5, du même règlement dépasse 3 % ou deux hectares et n’excède pas 20 % de la superficie déterminée, le montant de l’aide est calculé sur la base de la superficie déterminée, réduite du double de la différence constatée. Deuxièmement, lorsque ladite différence excède 20 % de la superficie déterminée, aucune aide n’est accordée. Troisièmement, lorsque cette différence excède 50 %, l’agriculteur est également pénalisé à concurrence d’un montant égal au montant correspondant à la différence entre la superficie déclarée et la superficie déterminée conformément à l’article 50, paragraphes 3 et 5, du règlement no 796/2004.

131    En revanche, d’une part, l’article 51, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004 prévoit, en son premier alinéa, que ces réductions et exclusions ne s’appliquent pas si un agriculteur déclare une superficie supérieure aux droits au paiement et que la superficie déclarée satisfait à tous les autres critères d’admissibilité. D’autre part, conformément au second alinéa de cette disposition, si un agriculteur déclare une superficie supérieure aux droits au paiement et que la superficie déclarée ne satisfait pas à tous les autres critères d’admissibilité, la différence visée à l’article 51, paragraphe 1, du même règlement est la différence entre la superficie satisfaisant à tous les autres critères d’admissibilité et le montant des droits au paiement déclarés.

132    Enfin, il importe d’ajouter qu’il ressort de la jurisprudence que, si l’autorité compétente découvre qu’un demandeur d’aides a présenté une déclaration erronée, qui n’est pas intentionnelle, laquelle a entraîné une surévaluation de la surface éligible à l’aide, et que la même erreur a été commise au cours des années précédant celle au cours de laquelle une telle erreur a été relevée, ce qui a entraîné pour chacune de ces années une surévaluation de la surface éligible à l’aide, cette autorité est tenue, sous réserve du respect des délais de prescription prévus à l’article 3, paragraphe 1, du règlement no 2988/95, de diminuer la surface effectivement déterminée aux fins de calculer l’aide due pour l’ensemble des années concernées (voir, en ce sens, arrêts du 19 novembre 2002, Strawson et Gagg & Sons, C‑304/00, Rec, EU:C:2002:695, point 64, et du 25 juillet 2006, Belgique/Commission, T‑221/04, EU:T:2006:223, point 88).

133    C’est à la lumière de ces rappels qu’il convient d’examiner successivement les deux questions soulevées au point 128 ci‑dessus.

134    En premier lieu, s’agissant de la question de savoir si les réductions et exclusions prévues à l’article 51, paragraphe 1, du règlement no 796/2004 doivent être déterminées sur la base d’une valeur unitaire des droits au paiement recalculée, il y a lieu de relever que, contrairement aux allégations du Royaume‑Uni, il ne ressort ni du libellé de cet article, qui serait, selon cet État membre, « exprimé[…] en termes de droits », ni de sa lecture à la lumière de la définition, à l’article 2, point 22, de ce règlement, de la notion de « superficie déterminée » que la sanction prévue audit article 51, paragraphe 1, du règlement no 796/2004 doit être déterminée sur la base des droits au paiement recalculés rétrospectivement.

135    En effet, il ressort du libellé de l’article 51, paragraphe 1, du règlement no 796/2004 que les réductions et exclusions qui y sont prévues s’appliquent dès lors que la superficie déclarée par l’agriculteur est supérieure à la superficie déterminée conformément, notamment, à l’article 50, paragraphe 3, du même règlement et que la différence entre les deux superficies dépasse les marges indiquées par cette disposition.

136    Or, s’il ressort de cette disposition qu’une surdéclaration est sanctionnée par la réduction, dans les conditions qui y sont énoncées, de la superficie déterminée sur la base de laquelle le montant de l’aide est calculé, force est néanmoins de constater que, eu égard aux termes mêmes de cette disposition, son application n’est aucunement subordonnée à une réévaluation préalable de la valeur unitaire des droits au paiement en cas d’allocation indue de tels droits.

137    Au demeurant, pour autant que le Royaume‑Uni se réfère à l’article 2, point 22, du règlement no 796/2004, il y a lieu d’observer que, au sens de cette dernière disposition, une superficie n’est déterminée que pour autant qu’elle soit conforme à toutes les conditions applicables à l’octroi d’une aide, étant précisé que, en ce qui concerne le régime de paiement unique, la superficie déclarée ne peut être considérée comme déterminée que si elle s’accompagne d’un nombre correspondant de droits au paiement.

138    Or, même à supposer, ainsi que le fait valoir le Royaume‑Uni, que ledit article 2, point 22, du règlement no 796/2004 définisse ainsi la superficie déterminée par rapport à la superficie s’accompagnant d’un nombre de droits au paiement dont l’agriculteur dispose réellement et que cette définition soit pertinente dans le contexte de l’article 51 dudit règlement, cette définition n’est pas de nature à imposer le calcul de la sanction applicable en vertu de l’article 51, paragraphe 1, du règlement no 796/2004 sur la base d’une valeur recalculée des droits au paiement. En effet, l’article 2, point 22, dudit règlement ne contient aucune indication quant à la valeur des droits au paiement dont il conviendrait, le cas échéant, de tenir compte.

139    Cette lecture de l’article 51, paragraphe 1, du règlement no 796/2004 s’impose d’autant plus, d’une part, au regard des dispositions de l’article 50 du même règlement et, en particulier du paragraphe 2 de ce dernier. Il ressort de l’article 50, paragraphe 2, du règlement no 796/2004, qui définit la base de calcul de l’aide, que, en cas d’écart entre les droits au paiement déclarés et la superficie déclarée, le calcul de l’aide est effectué sur la base la moins élevée. Autrement dit, il ressort de cette disposition que le calcul de l’aide s’opère, en l’absence de toute indication contraire, sur le fondement des droits au paiement déclarés par l’agriculteur, sans qu’il y ait lieu de prendre en compte une éventuelle réévaluation à la hausse de leur valeur unitaire.

140    D’autre part, cette lecture des dispositions de l’article 51, paragraphe 1, du règlement no 796/2004 est cohérente avec celle, effectuée dans le cadre du premier grief soulevé à l’appui du présent moyen, de l’article 73 bis du même règlement en ce sens que, comme cela a été rappelé au point 125 ci‑dessus, ce dernier ne prévoit, dans des circonstances telles que celles en cause dans la présente affaire, aucune réévaluation rétroactive de la valeur des droits au paiement.

141    Partant, les arguments du Royaume‑Uni, tirés de l’article 51, paragraphe 1, du règlement no 796/2004, lu à la lumière de l’article 2, point 22, dudit règlement, ne sont pas de nature établir que les réductions et exclusions doivent être déterminées sur la base de droits au paiement réévalués rétrospectivement.

142    En deuxième lieu, s’agissant de la question de savoir si, en cas de réitération d’une erreur quant à la superficie éligible, telle que celle initialement commise en 2005, l’article 51, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004 exclut l’application d’une réduction ou d’une exclusion en vertu du paragraphe 1 de cette disposition pour autant que l’agriculteur déclare une superficie suffisante pour activer le nombre de droits au paiement dont il dispose réellement, il y a lieu de rappeler qu’il ressort de l’article 51, paragraphe 2 bis, dudit règlement que, lorsque l’agriculteur déclare une superficie supérieure aux droits au paiement et que la superficie déclarée satisfait à tous les autres critères d’admissibilité, les réductions ou exclusions prévues au paragraphe 1 de cette disposition ne s’appliquent pas, étant précisé que, lorsque, dans un tel cas, la superficie déclarée ne satisfait pas à tous les autres critères d’admissibilité, la différence visée au paragraphe 1 du même article 51 est la différence entre la superficie satisfaisant à tous les autres critères d’admissibilité et le montant des droits au paiement déclarés.

143    Premièrement, il ressort ainsi d’une lecture combinée des deux alinéas de l’article 51, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004 que, outre le fait que les termes de cette disposition ne prévoient aucune réserve quant à l’hypothèse de la répétition d’une surdéclaration qui avait initialement conduit à l’allocation d’un nombre trop élevé de droits au paiement et n’instituent aucune distinction entre une surdéclaration faite au moment de l’allocation initiale des droits et réitérée par la suite et une surdéclaration faite après ladite allocation, cette disposition s’applique, comme le fait observer par ailleurs la Commission, lorsque la superficie déclarée par l’agriculteur dépasse le nombre de droits au paiement déclarés par lui sans considération pour le nombre de droits qu’il détient effectivement. En effet, si, certes, le premier alinéa de cette disposition ne définit pas les droits au paiement qui y sont visés comme étant ceux qui sont déclarés, cette qualification est toutefois explicitement opérée aux termes du second alinéa de cette même disposition.

144    Ce n’est donc que dans l’hypothèse où la superficie déclarée est supérieure au nombre de droits au paiement déclarés et que ladite superficie satisfait à tous les autres critères d’admissibilité que, conformément à l’article 51, paragraphe 2 bis, premier alinéa, du règlement no 796/2004, les réductions et exclusions instituées au paragraphe 1 de cette disposition ne s’appliquent pas.

145    En revanche, contrairement aux arguments du Royaume‑Uni, la comparaison entre la superficie déclarée et les droits au paiement déclarés s’effectue, dans le cadre de l’article 51, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004, sans considération pour le nombre de droits au paiement dont l’agriculteur dispose réellement, le cas échéant après récupération des droits indûment alloués sur le fondement de l’article 73 bis du règlement no 796/2004.

146    Deuxièmement, il importe d’ajouter que cette interprétation littérale de l’article 51, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004 est également confirmée par une interprétation contextuelle et téléologique de cette disposition.

147    À cet égard, d’une part, il y a lieu de rappeler que l’article 50, paragraphe 2, du règlement no 796/2004 dispose que, en cas d’écart entre les droits au paiement déclarés et la superficie déclarée, le calcul de l’aide au titre du régime de paiement unique est effectué sur la base la moins élevée. Cette disposition définit ainsi la base de calcul du montant de l’aide.

148    D’autre part, ainsi que cela a déjà été relevé au point 129 ci‑dessus, l’article 51 du règlement no 796/2004 s’inscrit, en substance, dans l’objectif de protection efficace des intérêts financiers de l’Union à travers la lutte contre les irrégularités et les fraudes. À cette fin, lorsque la superficie déclarée dépasse la superficie déterminée, l’article 51, paragraphe 1, du règlement no 796/2004 prévoit des sanctions échelonnées (voir point 130 ci‑dessus).

149    En revanche, de telles sanctions sont, ainsi que cela ressort du considérant 12 du règlement no 659/2006, par lequel le paragraphe 2 bis a été inséré à l’article 51 du règlement no 796/2004, considérées comme inutiles dans les cas où, lorsque l’agriculteur déclare une superficie supérieure aux droits au paiement, la superficie déclarée satisfait à toutes les autres conditions d’admissibilité. En effet, dans un tel cas, ainsi que l’expose le même considérant, l’article 50, paragraphe 2, du règlement no 796/2004 dispose que le nombre d’hectares accompagnés des droits au paiement correspondants constitue la base pour le calcul de l’aide.

150    Ainsi, d’une part, le lien opéré, au considérant 12 du règlement no 659/2006, entre l’article 50, paragraphe 2, du règlement no 796/2004, disposition explicitement fondée sur une comparaison entre la superficie déclarée et les droits au paiement déclarés, et l’article 51, paragraphe 2 bis, de ce dernier règlement confirme la conclusion selon laquelle la comparaison devant être opérée au titre de cette dernière disposition doit se faire entre, d’un côté, la superficie déclarée et, de l’autre, les droits au paiement déclarés et non les droits au paiement effectivement détenus par l’agriculteur, le cas échéant après récupération des droits indûment alloués sur la base de l’article 73 bis du règlement no 796/2004.

151    D’autre part, eu égard à l’économie générale de l’article 51 du règlement no 796/2004, s’inscrivant dans la lutte contre les irrégularités et les fraudes, l’insertion du paragraphe 2 bis dans cette disposition se fonde sur la considération selon laquelle, en cas d’écart entre la superficie déclarée et les droits au paiement déclarés, il n’existe, en principe, aucun risque d’irrégularité ou de fraude à condition que la superficie déclarée réponde à tous les autres critères d’admissibilité. En effet, dans le cas d’un tel écart entre la superficie déclarée et le nombre de droits déclarés, le montant de l’aide est, en tout état de cause, déterminé, conformément à l’article 50, paragraphe 2, dudit règlement, sur la base la moins élevée, en sorte qu’il est, en toute hypothèse, exclu qu’une aide soit versée sur la base d’une superficie non déterminée. Il s’ensuit que, en principe, il n’y a, dans un tel cas, aucun risque de paiement indu octroyé sur la base d’une superficie non déterminée.

152    Troisièmement, il y a lieu de relever qu’il est vrai que, comme l’a fait observer le Royaume‑Uni, cette interprétation de l’article 51 du règlement no 796/2004, et en particulier de son paragraphe 2 bis, n’exclut pas que, exceptionnellement, une sanction soit calculée sur la base de droits au paiement inexistants lorsque l’agriculteur déclare un nombre de droits supérieur au nombre de droits au paiement dont il dispose réellement.

153    Toutefois, il y a lieu de considérer que, sans même qu’il soit besoin de déterminer si, comme le fait valoir le Royaume‑Uni, la référence à la superficie déterminée, à l’article 51, paragraphe 1, du règlement no 796/2004, doit être lue comme une référence à la superficie admissible accompagnée d’un nombre correspondant de droits au paiement déclarés ou de droits au paiement déclarés dont l’agriculteur dispose réellement, la circonstance relevée au point 152 ci‑dessus n’est pas, contrairement à ce que le Royaume‑Uni a fait valoir à l’audience, de nature à entacher d’illégalité la décision attaquée.

154    En effet, outre le fait que le Royaume‑Uni n’a pas mis en doute la légalité de l’article 51 du règlement no 796/2004, il y a lieu de considérer que cette circonstance, pour regrettable qu’elle soit, n’est pas de nature à renverser l’interprétation, formulée ci‑dessus, des dispositions de l’article 51, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004 et qui s’impose au regard d’une analyse littérale, contextuelle et téléologique de celles‑ci.

155    À cet égard, il convient par ailleurs d’ajouter que le règlement no 1122/2009, qui a abrogé et remplacé le règlement no 796/2004 avec effet au 1er janvier 2010, prévoit désormais explicitement, en son article 57, paragraphe 2, deuxième tiret, intitulé « Base de calcul applicable aux surfaces déclarées », que, « si le nombre de droits au paiement déclarés dépasse le nombre de droits au paiement dont dispose l’agriculteur, les droits au paiement déclarés sont réduits au nombre de droits dont dispose l’agriculteur ».

156    Cette nouvelle disposition est fondée, ainsi que cela ressort du considérant 78 du règlement no 1122/2009, sur la considération selon laquelle il est prévu ce qui suit :

« Le paiement de l’aide au titre du régime de paiement unique nécessite un nombre égal de droits au paiement et d’hectares admissibles. Aux fins de ce régime, il est donc opportun de prévoir que le calcul du paiement en cas de divergences entre les droits au paiement déclarés et la superficie déclarée doit être basé sur la taille la plus faible. Pour éviter un calcul fondé sur des droits inexistants, il y a lieu de prévoir que le nombre de droits au paiement utilisés pour le calcul ne dépasse pas le nombre de droits au paiement dont disposent les agriculteurs. »

157    Or, contrairement à l’argumentation du Royaume‑Uni tirée de ce que son interprétation de l’article 51, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004 serait confirmée par l’article 57, paragraphe 2, du règlement no 1122/2009, il y a lieu de relever que l’adoption de ce dernier règlement et les changements qu’il implique ne sauraient altérer l’interprétation de l’article 51, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004 telle que retenue ci‑dessus et justifier une interprétation de cette dernière disposition qui irait à l’encontre non seulement de sa lettre, mais encore des motifs ayant inspiré son insertion dans ledit règlement (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 16 septembre 2013, Pays‑Bas/Commission, T‑343/11, EU:T:2013:468, point 91).

158    En effet, outre le fait que, au regard de son intitulé, l’article 57, paragraphe 2, du règlement no 1122/2009 a un objet différent de celui de l’article 51, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004, ce dernier portant sur les réductions et exclusions applicables en cas de surdéclarations, il convient, sans même qu’il soit besoin d’interpréter l’article 57, paragraphe 2, du règlement no 1122/2009, de relever que ce dernier règlement n’était pas applicable au moment des contrôles lors desquels les erreurs dues aux surdéclarations ont été découvertes, ce règlement n’étant applicable, conformément à son article 87, second alinéa, qu’à partir des demandes introduites au titre des campagnes de commercialisation ou des périodes de référence des primes commençant à compter du 1er janvier 2010.

159    En troisième lieu, dans la mesure où le Royaume‑Uni entend étayer ses allégations relatives à l’interprétation des dispositions de l’article 51 du règlement no 796/2004 par la présentation d’exemples de calculs de sanctions en vertu desdites dispositions, il importe d’ajouter que de tels exemples, formulés à titre purement illustratif, ne sont pas de nature à établir que c’est à tort que la Commission a reproché au Royaume‑Uni d’avoir erronément calculé les sanctions en application desdites dispositions et que la méthode de calcul employée, s’agissant des sanctions applicables en cas de surdéclaration, dans l’évaluation du risque financier pour le Fonds est erronée.

160    Dans un troisième et dernier temps, le Royaume‑Uni se prévaut, à titre subsidiaire, du principe d’application rétroactive de la sanction plus légère. À cet égard, il estime, en substance, que l’article 57, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement no 1122/2009 constitue une nouvelle règle relative à l’application des réductions et exclusions et que, cette règle étant moins sévère que celle issue de l’article 51 du règlement no 796/2004 telle qu’interprétée par la Commission, elle doit s’appliquer rétroactivement. Cette nouvelle règle aurait pour effet d’écarter les réductions et exclusions applicables en cas de surdéclaration lorsque l’agriculteur déclare une superficie admissible au moins égale au nombre de droits au paiement déclarés, ce nombre ne pouvant dépasser le nombre de droits au paiement dont il dispose.

161    À cet égard, comme cela déjà été relevé au point 158 ci‑dessus, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 87, second alinéa, du règlement no 1122/2009, celui‑ci ne s’appliquait qu’à partir des demandes introduites au titre des campagnes de commercialisation ou des périodes de référence des primes commençant à compter du 1er janvier 2010, en sorte que le règlement no 796/2004 était, en principe, applicable aux demandes d’aides présentées pour l’année 2009. Cependant, il convient également de rappeler que, aux termes de l’article 2, paragraphe 2, du règlement no 2988/95, en cas de modification ultérieure des dispositions portant sanctions administratives et contenues dans une réglementation de l’Union, les dispositions moins sévères s’appliquent rétroactivement.

162    Selon la jurisprudence, les réductions et exclusions des aides, telles que celles prévues à l’article 51 du règlement no 796/2004, constituent une sanction administrative au sens de l’article 2, paragraphe 2, du règlement no 2988/95 (voir, en ce sens, arrêts du 17 juillet 1997, National Farmers’ Union e.a., C‑354/95, Rec, EU:C:1997:379, points 40 et 41 ; Strawson et Gagg & Sons, point 132 supra, EU:C:2002:695, point 46, et du 4 mai 2006, Haug, C‑286/05, Rec, EU:C:2006:296, point 21).

163    En revanche, il ressort également de la jurisprudence que les dispositions relatives à la définition d’une base de calcul ne constituent pas une sanction administrative (voir, en ce sens, arrêt Haug, point 162 supra, EU:C:2006:296, point 24).

164    Or, tel est précisément le cas de l’article 57, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement no 1122/2009, invoqué par le Royaume‑Uni.

165    En effet, l’article 57, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement no 1122/2009, aux termes duquel « si le nombre de droits au paiement déclarés dépasse le nombre de droits au paiement dont dispose l’agriculteur, les droits au paiement déclarés sont réduits au nombre de droits dont dispose l’agriculteur », s’insère, ainsi que cela ressort de son intitulé et comme la Commission l’a fait observer à l’audience, dans la définition de la base de calcul applicable aux surfaces déclarées.

166    De surcroît, l’article 57, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement no 1122/2009 ne modifie aucunement les règles relatives aux réductions et exclusions, telles qu’elles ressortent de l’article 58 du règlement no 1122/2009. Ce dernier article reprend par ailleurs les règles figurant à l’article 51, paragraphe 1, du règlement no 796/2004, étant précisé toutefois que les dispositions de l’article 51, paragraphe 2 bis, du règlement no 796/2004, qui formaient une exception aux réductions et exclusions de l’article 51, paragraphe 1, du même règlement, ne sont pas reprises à l’article 58 du règlement no 1122/2009.

167    Il s’ensuit que les arguments du Royaume‑Uni relatifs à l’application rétroactive d’une sanction plus légère ne sauraient prospérer.

168    Partant, le quatrième grief doit être écarté en son intégralité.

 Sur le deuxième grief, relatif à la prise en compte, lors du nouveau calcul des droits au paiement, des différences de superficies affectant les primes « animaux »

169    Le Royaume‑Uni fait valoir, en substance, que la Commission a considéré à tort que l’élément historique pouvait être affecté par des erreurs commises quant à la détermination des superficies relatives aux primes « animaux ». En effet, il résulterait de la décision 2010/399/UE de la Commission, du 15 juillet 2010, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du FEOGA, section « Garantie », du FEAGA et du Feader (JO L 184, p. 6), que, s’agissant de l’année de déclaration 2004, la Commission n’a appliqué qu’une correction forfaitaire de 2 % aux dépenses effectuées dans le cadre du régime de la prime à l’extensification. Or, le même risque, extrêmement faible, serait encouru, eu égard à la grande similarité des régimes et des conditions associées, pendant la période de référence.

170    La Commission conteste le bien‑fondé de ces arguments.

171    En l’espèce, il ressort des éléments du dossier que, lors de la procédure d’apurement, la Commission a estimé que le nouveau calcul des droits au paiement, tel qu’effectué par le Royaume‑Uni, ne tenait compte que de l’élément forfaitaire, tandis qu’aucun contrôle n’avait été réalisé en vue de déterminer si les différences de superficies affectaient également les primes « animaux » versées durant la période de référence, comprise entre 2000 et 2002, et, partant, l’élément historique des droits au paiement.

172    Or, même à supposer que, ainsi que l’allègue le Royaume‑Uni, le risque dû à l’absence de vérification de l’incidence d’erreurs relatives à la détermination des superficies relatives aux primes « animaux » ait été très faible, force est néanmoins de constater que le Royaume‑Uni n’a nullement remis en cause le constat même selon lequel il n’a pas procédé à une telle vérification. En effet, le Royaume‑Uni ne conteste pas l’existence de différences de superficies susceptibles d’avoir affecté les primes « animaux ». De surcroît, cet État membre a confirmé à l’audience en réponse à une question posée par le Tribunal qu’il n’avait pas procédé à des vérifications de l’incidence éventuelle de telles différences sur l’élément historique des droits au paiement, ce dont il a été pris acte au procès‑verbal d’audience.

173    Il s’ensuit que, eu égard à la jurisprudence citée au point 65 ci‑dessus, selon laquelle, s’il appartient à la Commission de présenter un élément de preuve du doute sérieux et raisonnable qu’elle éprouve à l’égard des contrôles effectués par les administrations nationales ou des chiffres transmis par celles‑ci, il appartient à l’État membre concerné de démontrer que les constatations de la Commission sont inexactes, le Royaume‑Uni n’est pas parvenu à infirmer ces constatations de la Commission, telles que résumées, en substance, au point 171 ci‑dessus.

174    Par ailleurs, dans la mesure où le Royaume‑Uni fait valoir que le risque encouru par l’absence de vérifications s’agissant des primes « animaux » serait extrêmement faible, il convient de relever que le taux de la correction financière appliqué en l’espèce a été justifié par un ensemble d’insuffisances relevées par la Commission au titre des contrôles clés et secondaires et ressort d’une évaluation du risque effectuée par le Royaume‑Uni lui‑même. Or, outre le fait que ce dernier a omis d’expliquer en quoi le taux de 5,19 % était, le cas échéant, affecté par la prise en compte de l’absence desdites vérifications, il suffit d’observer que, quand bien même celle‑ci aurait créé un risque négligeable pour le Fonds, cette considération ne serait pas de nature à remettre en cause l’application, en l’espèce, du taux de correction ponctuelle de 5,19 %.

175    Partant, le présent grief doit être écarté.

 Sur le cinquième grief, relatif à la surdéclaration intentionnelle

176    Le Royaume‑Uni conteste la constatation d’insuffisances affectant les contrôles secondaires relatifs à la surdéclaration intentionnelle visée à l’article 53 du règlement no 796/2004. Il fait valoir, en substance, que la surdéclaration intentionnelle constitue une fraude susceptible de faire l’objet de sanctions pénales et, en droit d’Irlande du Nord, une infraction pénale. Dès lors, s’il est vrai que l’article 53 du règlement no 796/2004 institue une sanction de nature administrative et non pénale, il n’en demeurerait pas moins que le département de l’agriculture et du développement rural d’Irlande du Nord (Northern Ireland Department of Agriculture and Rural Development, DARD) ne peut conclure qu’un agriculteur a présenté une demande frauduleuse que lorsque cela a été établi par une procédure pénale ordinaire. De même, la Commission ne saurait reprocher au Royaume‑Uni le fait que le DARD n’a pas renvoyé à son service central d’enquête (Central Investigation Service, CIS) des cas qui, selon elle, auraient dû être renvoyés, et ce d’autant plus qu’aucune obligation de renvoi de la sorte n’existerait lorsque, en tout état de cause, les éléments de preuve sont insuffisants. Le Royaume‑Uni ajoute par ailleurs que les demandes frauduleuses sont extrêmement rares, en sorte que la proportion des dépenses exposées au risque en raison de la surdéclaration intentionnelle en Irlande du Nord est probablement extrêmement faible.

177    La Commission conteste le bien‑fondé des arguments du Royaume‑Uni.

178    En premier lieu, il convient de relever que, à l’audience, le Royaume‑Uni s’est, en réponse à une question posée par le Tribunal, désisté, à la suite de l’arrêt du 27 février 2013, Pologne/Commission (T‑241/10, EU:T:2013:96), de son argumentation tirée de ce que, en substance, la Commission lui aurait reproché à tort d’avoir subordonné la sanction de la surdéclaration intentionnelle en vertu de l’article 53 du règlement no 796/2004 au déroulement préalable d’une procédure pénale, ce dont il a été pris acte au procès‑verbal d’audience.

179    En deuxième lieu, dans la mesure où le Royaume‑Uni ne s’est pas explicitement désisté de son argumentation tirée de ce que la Commission ne saurait lui reprocher le fait que le DARD n’a pas renvoyé certains cas au CIS, il convient, sans même qu’il soit besoin de s’interroger sur le caractère opérant de cette argumentation, de relever que le seul fait, non contesté ainsi que cela ressort du point 178 ci‑dessus, que le Royaume‑Uni a subordonné l’application des sanctions administratives au déroulement préalable d’une procédure pénale est suffisant pour conclure à l’existence de déficiences affectant le système d’application, au Royaume‑Uni, des sanctions administratives instituées par l’article 53 du règlement no 796/2004. Partant, il n’est pas besoin d’examiner si, de surcroît, ce système était affecté d’insuffisances en ce que certains cas de surdéclaration qui auraient dû, selon la Commission, être transférés au CIS ne lui ont, toutefois, pas été soumis.

180    En tout état de cause, il convient d’observer que le Royaume‑Uni n’a pas établi le caractère erroné de la conclusion de la Commission tenant à l’absence de transmission de cas au CIS. En effet, le Royaume‑Uni s’est contenté d’affirmations générales selon lesquelles le renvoi à une autorité chargée des poursuites n’est pas obligatoire lorsqu’il est évident que les éléments de preuve ne sont pas suffisants pour permettre de conclure à l’existence d’une non‑conformité intentionnelle. Or, une telle allégation est, au regard de la jurisprudence citée au point 65 ci‑dessus, insuffisante pour invalider les doutes sérieux et raisonnables de la Commission.

181    En troisième lieu, s’agissant de l’argument du Royaume‑Uni tiré de ce que le risque financier pour le Fonds en raison de la surdéclaration intentionnelle en Irlande du Nord serait, en tout état de cause, « probablement extrêmement faible », il convient, sans même qu’il soit besoin de vérifier si cet argument est opérant alors même que, selon les indications fournies par le Royaume‑Uni à l’audience, l’évaluation du risque effectuée par lui ne tient pas compte des surdéclarations intentionnelles, d’observer qu’un tel argument est insuffisant pour mettre en cause le constat, par la Commission, d’une déficience dans l’application des sanctions administratives prévues à l’article 53 du règlement no 796/2004.

182    En outre, même à supposer que le Royaume‑Uni entende contester, par cet argument, le taux de correction financière appliqué par la Commission, il convient de relever que, comme cela a déjà été dit au point 174 ci‑dessus, ce taux a été justifié par un ensemble d’insuffisances relevées par la Commission au titre des contrôles clés et secondaires et ressort d’une évaluation du risque effectuée par le Royaume‑Uni. Il s’ensuit que, quand bien même les déficiences affectant la procédure de sanction administrative au titre de l’article 53 du règlement no 796/2004 auraient créé un risque négligeable pour le Fonds, cette considération ne serait pas de nature à remettre en cause l’application, en l’espèce, du taux de correction ponctuelle de 5,19 %.

183    En tout état de cause, il y a lieu de relever que, contrairement à la jurisprudence citée au point 66 ci‑dessus, selon laquelle il appartient à l’État membre d’établir que la Commission a commis une erreur quant aux conséquences financières à tirer d’une irrégularité qu’elle a constatée, le Royaume‑Uni s’est contenté de présenter des allégations hypothétiques et vagues, qui, si elles se fondent sur le rapport annuel de la Commission, de 2009, concernant la protection des intérêts financiers des Communautés et la lutte contre la fraude, ne sont pas pour autant étayées par des éléments circonstanciés permettant de démontrer que, en l’espèce, le taux de correction appliqué par la Commission était erroné.

184    Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient d’écarter le cinquième grief du second moyen.

185    Il s’ensuit que le second moyen doit être écarté dans son intégralité.

 Sur le premier moyen, tiré d’erreurs de droit et de fait quant à la détermination de l’étendue des pertes réelles pour le Fonds

186    Dans le cadre du premier moyen d’annulation, le Royaume‑Uni reproche à la Commission d’avoir, en appliquant la correction forfaitaire de 5,19 % à l’ensemble des dépenses effectuées, au titre de l’année de déclaration 2009, en Irlande du Nord, commis des erreurs de droit et de fait quant à l’étendue du risque de pertes pour le Fonds. La Commission aurait omis de tenir compte du fait que, d’une part, environ 80 % des erreurs commises au titre de l’année de déclaration 2009 quant aux superficies admissibles au soutien résultaient de surdéclarations de ces superficies en 2005, lors de l’allocation initiale des droits au paiement, et que, d’autre part, la valeur unitaire des droits au paiement, établie en 2005 sur la base du modèle hybride statique, est composée d’un élément historique, issu de la division du montant de référence par le nombre total de droits au paiement, et d’un élément forfaitaire, correspondant à 78,33 euros par droit au paiement. Or, s’agissant de 80 % des dépenses, le Fonds ne serait exposé à un risque que pour les seules dépenses concernant l’élément forfaitaire, correspondant à environ 22 % de la totalité des dépenses effectuées. Il s’ensuivrait que, en appliquant une correction ponctuelle de 5,19 % à la partie des dépenses exposée au risque, la correction financière n’aurait pu être supérieure à une correction de 1,95 %.

187    La Commission conteste le bien‑fondé des arguments du Royaume‑Uni.

188    À titre liminaire, il convient de relever que, s’agissant des corrections financières, le document no VI/5330/97 prévoit, en son annexe 2, que des corrections financières sont appliquées lorsque la Commission constate qu’une dépense n’a pas été effectuée dans le respect des règles de l’Union. Ce document prévoit également que, sauf si le paiement irrégulier a déjà été détecté par les organismes nationaux de contrôle et a donné lieu aux mesures de correction et de recouvrement appropriées, la Commission doit refuser son financement par le budget de l’Union. Dans le cas où les dépenses irrégulières peuvent être déterminées, et donc le montant des pertes financières subies par l’Union, il est prévu dans le document no VI/5330/97 qu’il est procédé, notamment, au rejet d’une somme calculée par extrapolation des résultats de vérifications effectuées sur un échantillon représentatif de dossiers à l’ensemble des dossiers dont un échantillon a été prélevé, mais qui est limité au secteur administratif dans lequel la même carence risque raisonnablement de se reproduire (voir, en ce sens, arrêt du 7 juin 2013, Portugal/Commission, T‑2/11, Rec, EU:T:2013:307, point 120). En revanche, lorsque le niveau réel des dépenses irrégulières ne peut être déterminé, des corrections financières forfaitaires sont appliquées (arrêts du 18 septembre 2003, Royaume‑Uni/Commission, C‑346/00, Rec, EU:C:2003:474, point 53, et du 24 avril 2008, Belgique/Commission, C‑418/06 P, Rec, EU:C:2008:247, point 136 ; voir également arrêt Portugal/Commission, précité, EU:T:2013:307, point 121 et jurisprudence citée).

189    À ce titre, il importe d’ajouter que si le document no VI/5330/97 a été adopté par la Commission dans le contexte du FEOGA et contient, ainsi que l’indique son titre, les orientations concernant le calcul des conséquences financières lors de la préparation de la décision d’apurement des comptes du FEOGA, section « Garantie », rien n’interdit à la Commission d’appliquer ce document également dans l’exercice des compétences que l’article 31, paragraphe 1, du règlement no 1290/2005 lui attribue en vue de l’apurement des comptes du Fonds (voir, en ce sens, arrêt du 17 mai 2013, Bulgarie/Commission, T‑335/11, EU:T:2013:262, point 86), ce que le Royaume‑Uni ne conteste par ailleurs pas.

190    C’est à la lumière de ces rappels qu’il convient d’examiner, à titre principal, le bien‑fondé du présent moyen.

191    En l’espèce, il ressort des éléments du dossier que la Commission a appliqué une correction ponctuelle de 5,19 % à l’ensemble des dépenses effectuées, au titre du régime de paiement unique pour l’année de déclaration 2009, en Irlande du Nord. Le taux de la correction ainsi appliqué est issu d’une évaluation du risque réalisée par les autorités du Royaume‑Uni et acceptée par la Commission en ce que ladite évaluation permettait, selon elle, de déterminer, de manière raisonnable, le montant des pertes financières subies par l’Union. En vue de cette évaluation effectuée par les autorités du Royaume‑Uni, le risque financier a été défini comme correspondant à la différence entre la somme payée et un paiement révisé comprenant, le cas échéant, les sanctions applicables, étant précisé que les paiements indus et les sanctions applicables ont été déterminés, par le Royaume‑Uni, en application de la méthode préconisée par la Commission. L’évaluation du risque a été fondée sur une extrapolation faite sur la base d’un échantillon de 394 demandes introduites en 2009 au titre du régime de paiement unique.

192    Il ressort ainsi des éléments du dossier que l’évaluation du risque financier effectuée par les autorités du Royaume‑Uni a consisté à déterminer, sur la base d’un échantillon et par extrapolation, les pertes financières réellement subies par l’Union. Ces pertes financières et, partant, le risque financier correspondent, ainsi que cela ressort tant du rapport d’évaluation du risque que des écritures du Royaume‑Uni, à la somme des paiements indus et des sanctions, déterminés sur la base de la méthode préconisée par la Commission. Le risque financier ainsi évalué a été exprimé, dans le rapport d’évaluation du risque, en pourcentage de la totalité des paiements concernés. Il découle, en effet, sans équivoque du rapport d’évaluation du risque que le risque financier correspond à 5,19 % de la totalité des dépenses effectuées en Irlande du Nord au titre du régime de paiement unique pour l’année de déclaration 2009, ce que le Royaume‑Uni a par ailleurs confirmé à l’audience en réponse à une question posée par le Tribunal.

193    Il s’ensuit que, la Commission ayant pu déterminer, sur la base d’une évaluation du risque proposée par les autorités du Royaume‑Uni et acceptée par elle, les dépenses irrégulières et donc le montant des pertes financières subies par l’Union, c’est à juste titre qu’elle a, conformément aux orientations figurant dans le document no VI/5330/97, telles que rappelées notamment au point 188 ci‑dessus, conclu au rejet de la somme correspondant au montant des pertes.

194    Il s’ensuit également que, dans la mesure où le montant des pertes ainsi évaluées a été, comme cela a été relevé au point 192 ci‑dessus, exprimé en pourcentage de la totalité des dépenses effectuées au titre du régime de paiement unique en Irlande du Nord pour l’année de déclaration 2009, c’est à juste titre que la Commission a appliqué la correction ponctuelle de 5,19 % à la totalité desdites dépenses.

195    Cette conclusion n’est pas remise en cause par les arguments soulevés par le Royaume‑Uni dans le cadre du présent moyen et tirés, en substance, de ce qu’il conviendrait d’appliquer la correction ponctuelle de 5,19 % à la seule part des dépenses effectuées au titre de l’année de déclaration 2009 en Irlande du Nord qui serait, selon cet État membre, affectée par les irrégularités, en sorte que le risque financier réel serait de 1,95 %. Le Royaume‑Uni allègue à cet égard que 80 % des erreurs commises en 2009 résultaient d’erreurs commises lors de l’allocation et du calcul initiaux des droits au paiement quant aux superficies admissibles. De ce fait, en substance, s’agissant de 80 % des dépenses effectuées en Irlande du Nord au cours de la période concernée, il conviendrait, en raison du mode de calcul de ces droits au paiement composés d’un élément historique et d’un élément forfaitaire (voir point 70 ci‑dessus), de tenir compte du fait que seul ce dernier élément et non le paiement en son entièreté est affecté par le risque pour le Fonds. Or, l’élément forfaitaire ne représenterait qu’environ 22 % de l’ensemble des paiements effectués en Irlande du Nord.

196    À cet égard, il importe de rappeler que, en l’espèce, la correction financière a été déterminée sur la base d’une évaluation du risque présentée, lors de la procédure d’apurement, par le Royaume‑Uni lui‑même.

197    D’abord, il convient d’observer que, en vue de cette évaluation du risque, le Royaume‑Uni a défini le risque financier comme correspondant à la différence entre la somme payée et un paiement révisé comprenant, le cas échéant, les sanctions applicables, étant précisé que les paiements indus et les sanctions applicables ont été déterminés, par le Royaume‑Uni, en application de la méthode préconisée par la Commission.

198    Or, en l’espèce, outre le fait que les arguments soulevés par le Royaume‑Uni, dans le contexte du second moyen, pour contester cette méthode de calcul ont été écartés ci‑dessus, il importe de constater que cet État membre ne conteste nullement le fait que le risque financier pour le Fonds est constitué par la somme des paiements indus et des sanctions.

199    Ensuite, c’est le Royaume‑Uni lui‑même qui, en vue de l’évaluation du risque financier proposée à la Commission, a utilisé comme base de calcul la totalité des dépenses effectuées, au titre de l’année de déclaration 2009, en Irlande du Nord, ainsi qu’il l’a confirmé à l’audience (voir point 192 ci‑dessus). Au demeurant, il ne ressort pas des pièces du dossier que, lorsqu’il a présenté, lors de la procédure d’apurement, son évaluation du risque, le Royaume‑Uni eût émis la moindre réserve à l’égard de cette base de calcul.

200    Or, en faisant valoir, dans la présente instance, que la correction financière de 5,19 %, déterminée dans le rapport d’évaluation du risque par rapport à la totalité desdites dépenses, doit être appliquée à la seule part, plus réduite, des paiements qui serait, selon cet État membre, réellement affectée par le risque, c’est en réalité la base de sa propre évaluation du risque financier que le Royaume‑Uni remet incidemment en cause.

201    Enfin, l’argumentation du Royaume‑Uni est de nature à remettre en cause les calculs ayant conduit, dans le rapport d’évaluation du risque, au taux de 5,19 %. Ainsi, dans la mesure où ce taux reflète la part de la totalité des dépenses correspondant à la somme des paiements indus et des sanctions applicables (donc au risque financier chiffré), ce taux perd sa signification lorsqu’il est appliqué à une autre base de calcul. En effet, la substitution, en vue de l’établissement du risque financier, d’une base de calcul réduite (la part des paiements qui serait, selon le Royaume‑Uni, réellement affectée par le risque) à la base de calcul initialement retenue (la totalité des paiements) et qui avait donné sa signification au taux de correction financière appliquée, rompt le rapport entre la base de calcul initiale et le taux déterminé.

202    Il s’ensuit que, en faisant valoir que la correction financière de 5,19 %, déterminée sur la base de la totalité des dépenses effectuées en 2010 en Irlande du Nord, doit être appliquée à une partie seulement de ces dépenses, le Royaume‑Uni remet fondamentalement en cause la base de l’évaluation effectuée lors de la procédure d’apurement. De surcroît, en voulant appliquer une correction financière correspondant au risque réel pour le Fonds et exprimée en pourcentage de la totalité desdites dépenses à une partie seulement de ces dépenses, c’est l’exactitude même de l’analyse du risque et du taux de 5,19 % qui est mise en cause par le Royaume‑Uni, alors que ce dernier a lui‑même effectué cette analyse et déterminé ce taux sur la base d’une définition du risque que cet État membre ne conteste pas.

203    Par ailleurs, dans la mesure où, en réponse à une question posée par le Tribunal à l’audience, le Royaume‑Uni a fait observer que le taux de 1,95 % avancé dans le cadre du présent moyen s’expliquait en raison de la méthode de calcul des paiements indus et des sanctions en cause dans le second moyen, il suffit de rappeler que les arguments présentés par cet État membre au sujet de ladite méthode ont été écartés dans l’analyse du second moyen ci‑dessus.

204    Partant, cette argumentation du Royaume‑Uni, à qui il appartenait, conformément aux exigences rappelées au point 66 ci‑dessus, de démontrer que la Commission avait commis une erreur quant aux conséquences financières à tirer de la violation des règles de l’Union relatives à l’organisation commune des marchés agricoles, ne saurait permettre d’établir que la Commission a commis une erreur quant aux conséquences financières à tirer des irrégularités qu’elle a constatées.

205    Dès lors, il y a lieu de conclure que la Commission n’a pas commis d’erreur en appliquant la correction ponctuelle de 5,19 % à la totalité des dépenses effectuées, au titre du régime de paiement unique, en Irlande du Nord pour l’année de déclaration 2009.

206    Il s’ensuit que le premier moyen doit être écarté.

207    À la lumière de l’ensemble des considérations qui précèdent, le présent recours doit être rejeté en son intégralité.

 Sur les dépens

208    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le Royaume‑Uni ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Le Royaume‑Uni de Grande‑Bretagne et d’Irlande du Nord supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission européenne.

Martins Ribeiro

Gervasoni

Madise

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 4 septembre 2015.

Signatures

Table des matières


Cadre juridique

Réglementation de l’Union régissant le financement de la politique agricole commune

Règlement (CE) no 1290/2005

Règlement (CE) no 885/2006

Règlements (CE) nos 1782/2003 et 73/2009

Règlements (CE) nos 796/2004 et 1122/2009

Document no VI/5330/97

Réglementation de l’Union relative à la protection des intérêts financiers de l’Union

Antécédents du litige

Procédure et conclusions des parties

En droit

Considérations liminaires

Sur le second moyen, tiré d’erreurs de droit et de fait quant aux insuffisances des contrôles secondaires et, en particulier, aux méthodes de calcul des paiements indus et des sanctions applicables en cas de surdéclaration

Sur les premier, troisième et quatrième griefs, relatifs à la méthode d’évaluation du risque financier encouru par le Fonds

– Sur le premier grief, relatif à la réévaluation rétrospective de la valeur des droits au paiement

– Sur le troisième grief, relatif à la récupération de l’indu

– Sur le quatrième grief, relatif aux réductions et exclusions applicables en cas de surdéclaration de superficie

Sur le deuxième grief, relatif à la prise en compte, lors du nouveau calcul des droits au paiement, des différences de superficies affectant les primes « animaux »

Sur le cinquième grief, relatif à la surdéclaration intentionnelle

Sur le premier moyen, tiré d’erreurs de droit et de fait quant à la détermination de l’étendue des pertes réelles pour le Fonds

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’anglais.