Language of document : ECLI:EU:T:2023:310

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

7 juin 2023 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative Sanity Group – Marque de l’Union européenne figurative antérieure SANYTOL – Motif relatif de refus – Atteinte à la renommée – Article 8, paragraphe 5, du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑541/22,

Sanity Group GmbH, établie à Berlin (Allemagne), représentée par Mes B. Koch et V. Wolf, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. T. Klee, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

AC Marca Brands, SL, établie à Barcelone (Espagne), représentée par Mes D. Pellisé Urquiza et J. C. Quero Navarro, avocats,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mme A. Marcoulli, présidente, MM. S. Frimodt Nielsen (rapporteur) et R. Norkus, juges,

greffier : M. G. Mitrev, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 23 mars 2023,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Sanity Group GmbH, demande l’annulation de la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 22 juin 2022 (affaire R 2107/2021-1) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 20 août 2019, la requérante a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

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3        La marque demandée désignait des produits et services relevant des classes 3, 5, 35, 42 et 44 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, en substance, à des produits et services relatifs au domaine de la protection et de l’entretien de la santé humaine, animale ou végétale.

4        Le 10 janvier 2020, l’intervenante, AC Marca Brands, SL, a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour tous les produits et les services visés par la demande mentionnée au point 2 ci-dessus.

5        L’opposition était fondée notamment sur la marque de l’Union européenne figurative antérieure reproduite ci-après, enregistrée le 24 juillet 2008 sous le numéro 6383161 et renouvelée jusqu’au 22 octobre 2027, pour des produits relatifs au domaine de la désinfection et de l’hygiène, compris dans les classes 3 et 5 :

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6        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était notamment celui visé à l’article 8, paragraphe 5, du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

7        Le 15 octobre 2021, la division d’opposition a partiellement fait droit à l’opposition sur le fondement de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001. Elle a, en revanche, rejeté l’opposition en ce qui concerne certains services relevant de la classe 35.

8        Le 13 décembre 2021, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition en tant qu’elle a accueilli l’opposition pour certains produits et services visés par la marque demandée.

9        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours au motif que la division d’opposition avait conclu à bon droit que la demande de marque de l’Union européenne devait être rejetée sur le fondement de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

11      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens dans l’hypothèse d’une convocation à une audience.

12      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      La requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001.

14      Aux termes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure enregistrée au sens du paragraphe 2, la marque demandée est refusée à l’enregistrement si elle est identique ou similaire à une marque antérieure, indépendamment du fait que les produits ou services pour lesquels elle est demandée sont identiques, similaires ou non similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque cette marque antérieure est une marque de l’Union européenne qui jouit d’une renommée dans l’Union européenne ou une marque nationale qui jouit d’une renommée dans l’État membre concerné, et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de cette marque antérieure ou leur porterait préjudice.

15      S’agissant du risque visé par l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, il convient de relever que, si, certes, la fonction première d’une marque consiste en sa fonction d’origine, il n’en demeure pas moins qu’une marque agit également comme moyen de transmission d’autres messages concernant, notamment, les qualités ou caractéristiques particulières des produits ou des services qu’elle désigne, ou les images et sensations qu’elle projette. En ce sens, toute marque possède une valeur économique intrinsèque autonome et distincte par rapport à celle des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée. Les messages véhiculés notamment par une marque renommée ou qui lui sont associés confèrent à celle-ci une valeur importante et digne de protection, et ce d’autant plus que, dans la plupart des cas, la renommée d’une marque est le résultat d’efforts et d’investissements considérables de son titulaire. Ainsi, l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, assure la protection d’une marque renommée à l’égard de toute demande de marque identique ou similaire qui pourrait porter atteinte à son image, même si les produits visés par la marque demandée ne sont pas analogues à ceux pour lesquels la marque antérieure a été enregistrée [arrêt du 22 mars 2007, Sigla/OHMI – Elleni Holding (VIPS), T‑215/03, EU:T:2007:93, point 35].

16      Il ressort du libellé de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, que l’application de cette disposition est soumise aux conditions cumulatives tenant, premièrement, à l’identité ou à la similitude des marques en conflit, deuxièmement, à l’existence d’une renommée de la marque antérieure invoquée à l’appui de l’opposition et, troisièmement, à l’existence d’un risque de voir l’usage sans juste motif de la marque demandée tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou leur porter préjudice (voir arrêt du 28 juin 2018, EUIPO/Puma, C‑564/16 P, EU:C:2018:509, point 54 et jurisprudence citée).

17      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner les arguments invoqués par la requérante au soutien de son unique moyen.

18      En l’espèce, la requérante a divisé son moyen en deux branches, tirées, en ce qui concerne la première, des erreurs commises dans l’appréciation de la similitude des marques en conflit et, en ce qui concerne la seconde, des erreurs commises dans l’appréciation d’un lien entre ces marques et d’un profit indûment tiré par la marque demandée de la renommée acquise par la marque antérieure. Les arguments soulevés à l’appui de ces deux branches tendent à remettre en cause l’appréciation par la chambre de recours des première et troisième conditions d’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, visées au point 16 ci-dessus.

19      En revanche, la requérante ne conteste pas les appréciations portées par la chambre de recours quant aux autres conditions d’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001.

20      En particulier, la requérante ne remet pas en cause les appréciations de la chambre de recours relatives à la définition du public pertinent, laquelle constitue un préalable nécessaire aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001. En effet, c’est au regard de ce public que doit être appréciée l’existence d’une similitude entre les marques en conflit, d’une renommée éventuelle de la marque antérieure, d’un lien entre ces marques et, enfin, d’un préjudice porté à la renommée ou au caractère distinctif de la marque antérieure ou d’un profit indu tiré de la renommée ou du caractère distinctif de ladite marque [arrêt du 26 septembre 2018, Puma/EUIPO – Doosan Machine Tools (PUMA), T‑62/16, EU:T:2018:604, point 31].

21      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que les produits et les services en cause étaient destinés au grand public ainsi qu’au public professionnel dans le domaine pharmaceutique et médical, qui faisait preuve d’un niveau d’attention moyen à élevé. Il s’agissait, selon la chambre de recours, aussi bien du consommateur moyen des produits et des services visés par la marque demandée que du consommateur moyen des produits et des services couverts par la marque antérieure. En outre, la chambre de recours a considéré que, dans la mesure où la renommée dans une partie de l’Union, en particulier dans un État membre, était suffisante, elle était fondée mener son analyse du point de vue du public espagnol (voir décision attaquée, points 34 à 36).

22      De même, la requérante ne conteste pas les conclusions de la chambre de recours concernant la renommée de la marque antérieure en Espagne (voir décision attaquée, points 45 à 47). À cet égard, la chambre de recours a considéré que, pour les raisons exposées dans la décision de la division d’opposition, la marque antérieure jouissait d’une renommée substantielle dans cet État membre pour les produits « préparations pour nettoyer, dégraisser et abraser ; savons » et « désinfectants ; fongicides », compris respectivement dans les classes 3 et 5. En considération des éléments de preuve produits par l’intervenante, la chambre de recours a également relevé que la marque antérieure occupait « une position de premier plan sur le marché espagnol des désinfectants et des produits de nettoyage » et qu’elle jouissait « d’une renommée pour un produit de haute qualité ».

23      Il n’y a pas lieu de remettre en cause les appréciations de la chambre de recours relatives à la définition du public pertinent et à l’existence de la renommée de la marque antérieure, lesquelles reposent, à juste titre, sur les éléments évoqués à cet égard dans la décision attaquée et ne sont, au demeurant, pas contestées par les parties.

 Sur la similitude des signes en conflit

24      Il convient de rappeler que, afin de satisfaire à la condition tenant à l’existence d’une identité ou d’une similitude des marques en conflit, posée par l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, il n’est pas nécessaire de démontrer qu’il existe, dans l’esprit du public concerné, un risque de confusion entre la marque antérieure jouissant d’une prétendue renommée et la marque demandée. Il suffit que le degré de similitude entre ces deux marques ait pour effet que le public concerné établisse un lien entre elles [voir, en ce sens, arrêt du 9 mars 2012, Ella Valley Vineyards/OHMI – HFP (ELLA VALLEY VINEYARDS), T‑32/10, EU:T:2012:118, point 37].

25      Il convient également de relever que, de façon générale, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle sur un ou plusieurs aspects pertinents [arrêt du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, EU:T:2002:261, point 30]. L’appréciation globale d’un lien entre les marques en conflit doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle de ces marques, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale de ce lien. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails [voir arrêt du 28 avril 2021, Asolo/EUIPO – Red Bull (FLÜGEL), T‑509/19, non publié, EU:T:2021:225, point 88 et jurisprudence citée ; voir également, s’agissant de l’appréciation globale du risque de confusion, arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée].

26      En l’espèce, la requérante estime que les signes en conflit ne sont pas similaires. Elle conteste le résultat de l’examen de leur similitude, effectué par la chambre de recours, tant au regard de la comparaison visuelle que de la comparaison phonétique ou conceptuelle.

27      L’EUIPO et l’intervenante contestent l’argumentation de la requérante.

 Sur les éléments distinctifs et dominants

28      En l’espèce, avant de traiter la question de la similitude des signes en conflit sur les plans visuel, phonétique et conceptuel, il convient de rappeler le contenu de l’appréciation de leurs éléments distinctifs et dominants effectuée par la chambre de recours, à l’encontre de laquelle la requérante oppose des arguments.

29      En ce qui concerne la marque demandée, la chambre de recours a relevé que les éléments verbaux « sanity » et « group » étaient représentés dans une police de caractères standard de couleur noire, précédés d’un élément figuratif circulaire en noir et blanc, légèrement plus grand que la taille des lettres. La chambre de recours a également indiqué que le premier élément était dépourvu de signification pour une partie du public espagnol, même s’il pouvait aussi être perçu comme faisant allusion au mot « sanitario » signifiant en langue espagnole « relatif aux conditions qui affectent l’hygiène et la santé ». Quant au second élément, la chambre de recours a considéré qu’il était perçu comme l’équivalent anglais du mot espagnol « grupo ». Pour la chambre de recours, ce terme possédait un caractère distinctif intrinsèque faible, étant donné qu’il désignait généralement un conglomérat d’entreprises et qu’il était donc normalement compris comme un ajout descriptif à un élément distinctif. Selon la chambre de recours, le consommateur espagnol comprendrait donc le terme anglais « group » en raison de sa proximité avec l’équivalent espagnol « grupo ». En outre, la chambre de recours a relevé que l’élément figuratif de la marque demandée était perçu comme purement décoratif, plutôt simple et banal et, par conséquent, secondaire dans l’impression d’ensemble. En conséquence, la chambre de recours a considéré que l’élément verbal « sanity » était, pour le public espagnol pertinent, l’élément le plus distinctif et dominant de la marque demandée (voir décision attaquée, point 38).

30      En ce qui concerne la marque antérieure, la chambre de recours a relevé que l’élément verbal « sanytol », en lettres majuscules blanches, était représenté sur un fond rectangulaire vert souligné par un triangle rouge, avec un petit triangle rouge au-dessus de la lettre « y ». Selon la chambre de recours, cet élément n’avait aucune signification pour le public espagnol, il pouvait également être perçu par le même public comme faisant allusion au mot espagnol « sanitario » pour « sanitary » (sanitaire) et, dans cette mesure, sa partie initiale était affaiblie. En outre, la chambre de recours a considéré que les éléments figuratifs étaient perçus comme décoratifs et secondaires dans l’impression d’ensemble produite par la marque antérieure. En conséquence, la chambre de recours a conclu que l’élément verbal « sanytol » était l’élément le plus distinctif et dominant de la marque antérieure (voir décision attaquée, point 39).

 Sur la comparaison visuelle

31      La requérante fait valoir que les signes en conflit ne sont « pas du tout » similaires. Elle allègue que les différences visuelles évidentes de ces signes, à savoir leur longueur, leurs éléments figuratifs, leurs couleurs et leurs polices de caractère, l’emportent sur leurs ressemblances. En effet, l’attention du public pertinent est, selon la requérante, attirée non seulement par les éléments verbaux, mais aussi par les éléments figuratifs et les couleurs desdits signes. La requérante soutient également que la chambre de recours s’est concentrée à tort sur les chevauchements des parties initiales des éléments verbaux « sanytol » et « sanity » et sur la constatation selon laquelle l’élément verbal « group » de la marque demandée ne jouait pratiquement aucun rôle dans l’impression d’ensemble. Or, d’une part, le principe selon lequel le public prête davantage attention à la partie initiale d’un signe qu’aux éléments qui la suivent n’est pas, selon la requérante, pertinent et ne plaide d’ailleurs pas pour, mais plutôt contre, la similitude des signes en conflit. D’autre part, la requérante fait valoir que les constatations effectuées par la chambre de recours dans la décision attaquée sont contradictoires, dans la mesure où, pour apprécier la portée des chevauchements ci-dessus mentionnés, la chambre de recours utilise le raisonnement selon lequel un élément affaibli n’est pas nécessairement négligeable dans l’impression d’ensemble, qui peut parfaitement s’appliquer à l’élément verbal « group ». Selon la requérante, cet élément verbal n’aurait pas dû être ignoré ou considéré comme secondaire dans l’impression d’ensemble du signe au seul motif qu’il était doté d’un caractère distinctif faible ou qu’il était placé en seconde position.

32      À titre liminaire, il convient de relever que, au point 40 de la décision attaquée, la chambre de recours a procédé à la comparaison des signes en conflit sur le plan visuel et exposé les raisons pour lesquelles elle considérait que ceux-ci présentaient à cet égard un degré moyen de similitude. Premièrement, la chambre de recours a relevé que ces signes coïncidaient par la séquence de lettres « s » « a » « n » et « t » et qu’ils différaient par les lettres « i » « y » et « y » « o » et « l », par l’élément supplémentaire « group » de la marque demandée et par les éléments figuratifs des signes en conflit. Deuxièmement, la chambre de recours a indiqué que, même si la partie initiale des signes, à savoir « sanit » et « sanyt », pouvait être perçue comme faisant allusion à « sanitario » et donc comme affaiblie, cela ne signifiait pas nécessairement que cet élément était négligeable dans l’impression d’ensemble. Troisièmement, la chambre de recours a considéré que, dès lors que les éléments figuratifs étaient secondaires dans l’impression d’ensemble et que l’élément supplémentaire « group » de la marque demandée était dépourvu de caractère distinctif, les signes présentaient un degré moyen de similitude visuelle.

33      Les arguments de la requérante ne permettent pas de remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours sur le degré de similitude des signes en conflit sur le plan visuel.

34      En effet, pour apprécier l’impression d’ensemble produite par les signes en conflit, la chambre a dûment identifié les différents éléments verbaux et figuratifs qui les composaient (voir points 29 et 30 ci-dessus). Elle a, en outre, correctement exposé les raisons pour lesquelles l’élément le plus distinctif et dominant pour le public espagnol était, d’une part, l’élément verbal « sanity » pour la marque demandée et, d’autre part, l’élément verbal « sanytol » pour la marque antérieure.

35      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence aux produits en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de la marque. Certes, si, comme l’expose la requérante, ce principe ne signifie pas que les éléments verbaux d’une marque doivent toujours être considérés comme plus distinctifs que les éléments figuratifs, il n’en demeure pas moins que la forme, la taille, la couleur et la position du ou des éléments figuratifs des marques en conflit ne permettent pas, en l’espèce, de remettre en cause les constats effectués par la chambre de recours quant au caractère plus distinctif et dominant de l’élément verbal « sanity » ou de l’élément verbal « sanytol » dans respectivement la marque demandée et la marque antérieure [voir, en ce sens, arrêt du 3 juin 2015, Giovanni Cosmetics/OHMI – Vasconcelos & Gonçalves (GIOVANNI GALLI), T‑559/13, EU:T:2015:353, points 60 et 61 (non publiés) et jurisprudence citée].

36      Ainsi, au vu du raisonnement exposé à cet égard dans la décision attaquée, il ne saurait être reproché à la chambre de recours d’avoir considéré que les éléments figuratifs des marques en conflit étaient secondaires dans l’impression d’ensemble.

37      De même, il ne saurait être reproché à la chambre de recours d’avoir relevé que l’élément verbal « group », qui suit l’élément verbal « sanity » dans la marque demandée, était dépourvu de caractère distinctif. En effet, ainsi que l’a exposé à juste titre la chambre de recours, le terme « group » est couramment utilisé en Espagne, où il est perçu comme l’équivalent anglais du mot espagnol « grupo ». Dès lors, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré, en l’espèce, que ce terme faisait généralement référence à un conglomérat d’entreprises et était normalement perçu comme un complément descriptif de l’élément verbal qui le précédait [voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2011, Ergo Versicherungsgruppe/OHMI – Société de développement et de recherche industrielle (ERGO Group), T‑221/09, non publié, EU:T:2011:393, point 29].

38      En outre, la conclusion de la chambre de recours selon laquelle il existe un degré moyen de similitude entre les marques en conflit sur le plan visuel n’est pas remise en cause par la circonstance qu’elle considère que, même si les mots « sanity » et « sanytol » sont dépourvus de signification pour tout ou partie du public espagnol pertinent, il est néanmoins possible que ces mots puissent être perçus comme une allusion au mot espagnol « sanitario » signifiant « relatif aux conditions qui affectent l’hygiène et la santé ».

39      Ce faisant, la chambre de recours reconnaît, ainsi que la requérante l’expose et l’EUIPO l’admet, que les éléments verbaux « sanity » et « sanytol » pouvaient faire allusion à un terme potentiellement descriptif. Pour autant, ainsi que l’a relevé la chambre de recours dans la décision attaquée, « même si le début des signes “san(i)t” [pouvait] être perçu comme faisant allusion à “sanitario” et donc affaibli », cela ne signifiait pas nécessairement que cet élément était négligeable dans l’impression d’ensemble.

40      En effet, comme le rappellent à juste titre l’EUIPO et l’intervenante, s’il est vrai que, en règle générale, le public ne considérera pas un élément descriptif faisant partie d’une marque comme l’élément distinctif et dominant dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci, il n’en demeure pas moins que le faible caractère distinctif d’un élément d’une marque n’implique pas nécessairement, compte tenu notamment de sa dimension ou de sa position dans la marque, que ledit élément soit négligeable dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci [voir, en ce sens, arrêts du 8 février 2011, Lan Airlines/OHMI – Air Nostrum (LINEAS AEREAS DEL MEDITERRANEO LAM), T‑194/09, EU:T:2011:34, point 30, et du 27 janvier 2021, Olimp Laboratories/EUIPO – OmniVision (Hydrovision), T‑817/19, non publié, EU:T:2021:41, point 71]. Une telle solution ressort également de l’arrêt du 6 avril 2022, Moio/EUIPO – Paul Hartmann (moio.care), T‑276/21, non publié, EU:T:2022:221, points 67 et 68, qui est invoqué par la requérante à l’appui de son argumentation.

41      Par ailleurs, la différence entre le fait, d’une part, que l’élément verbal « sanity » soit écrit, dans la marque demandée, avec une lettre majuscule et des lettres minuscules et, d’autre part, que l’élément verbal « sanytol » soit écrit en lettres majuscules dans la marque antérieure, n’est pas très perceptible et n’est donc pas facilement détectable sur le plan visuel. De même, le fait que ces éléments verbaux soient écrits dans des polices de caractères différentes ne crée pas, en l’espèce, une différence visuelle frappante [voir, en ce sens, arrêt du 15 décembre 2010, Epcos/OHMI – Epco Sistemas (EPCOS), T‑132/09, non publié, EU:T:2010:518, point 76].

42      Dans ces conditions, la chambre de recours a conclu à juste titre à l’existence d’un degré moyen de similitude sur le plan visuel entre les signes en conflit.

 Sur la comparaison phonétique

43      La requérante fait valoir que la marque demandée se prononce en deux mots et que c’est donc à tort que la chambre de recours a considéré que l’élément verbal « group » n’allait pas être prononcé par le public pertinent, dans la mesure où il figurait dans la partie finale du signe en cause et qu’il possédait un caractère distinctif faible. Ensuite, selon la requérante, la chambre de recours a commis une erreur en ajoutant des syllabes supplémentaires aux signes en conflit au motif que les consommateurs espagnols les prononçaient avec un « e » au début. En outre, la requérante soutient que le principe selon lequel la partie initiale d’une marque revêt une plus grande importance que ses autres parties ne s’applique pas lorsque ladite partie initiale présente un caractère distinctif faible.

44      À cet égard, il convient de relever que, au point 41 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que la similitude phonétique entre les signes en conflit était supérieure à la moyenne, même en tenant compte d’un caractère distinctif affaibli de leurs parties initiales communes « san ». En effet, pour la chambre de recours, la similitude sur ce plan était plus élevée que la similitude sur le plan visuel, dès lors que les éléments figuratifs n’étaient pas prononcés. La chambre de recours a alors indiqué que les signes étaient prononcés par le public espagnol pertinent en fonction des syllabes « e », « sa », « ni », « ti » et « grup », pour la marque demandée, et « e », « sa », « ni » et « tol », pour la marque antérieure, et que, par conséquent, ils coïncidaient par les trois premières syllabes et par la première lettre de la quatrième syllabe. La chambre de recours a également relevé que l’élément supplémentaire « group » à la fin de la marque demandée était faible et qu’il était même possible qu’il ne soit pas prononcé.

45      En l’espèce, la requérante et l’EUIPO s’accordent pour reconnaître qu’il n’y a pas lieu de considérer que le public espagnol pertinent rajouterait la voyelle « e » au début des signes en conflit. L’EUIPO indique sur ce point que, s’il est vrai que dans la langue espagnole, les mots ne commencent pas par des groupes consonantiques, de sorte que les hispanophones ajoutent souvent la voyelle « e » au début des mots étrangers qui commencent par un groupe consonantique lorsqu’ils les prononcent, il n’en va pas de même pour les mots qui ne commencent pas par un tel groupe, comme le mot espagnol « sanitario » ou les mots « sanytol » et « sanity » dépourvus de signification. En l’espèce, il n’y a donc pas lieu de considérer que les hispanophones ajoutent la voyelle « e » au début des mots « sanity » et « sanytol » pour les prononcer.

46      Pour autant, ainsi que le fait valoir l’EUIPO, cette erreur n’a pas d’incidence significative sur le résultat de l’appréciation de la similitude sur le plan phonétique des signes en conflit, dès lors que la coïncidence du son des deux premières syllabes « sa » et « ni » desdits signes, dûment relevée dans la décision attaquée, suffit pour établir une similitude phonétique au moins moyenne.

47      Une telle conclusion n’est pas remise en cause par les autres arguments de la requérante.

48      En effet, à l’instar de ce qui a été exposé ci-dessus en ce qui concerne la similitude visuelle, s’il est vrai, ainsi que le fait valoir la requérante, que l’élément « group » figurant exclusivement dans la marque demandée introduit une différence d’un point de vue phonétique, cette différence n’est pas de nature à remettre en cause l’existence d’une similitude phonétique dans l’impression d’ensemble donnée par les deux signes en conflit. Ainsi, l’élément « group » est clairement détaché, dans la marque demandée, de son élément dominant « sanity » semblable à la marque antérieure, puisque sa prononciation est précédée d’une brève interruption. Cette prononciation n’a donc pas d’impact phonétique sensible et n’affecte pas la similitude phonétique entre les éléments les plus dominants des signes en conflit.

49      De même, contrairement à ce que fait valoir la requérante, en invoquant des arrêts du Tribunal relatifs à des affaires qui ne présentent pas les mêmes caractéristiques que celles ici en cause, il ressort du contenu même de la décision attaquée que la chambre de recours a tenu compte, dans son appréciation de la similitude phonétique, de la circonstance, également évoquée à l’occasion de l’appréciation de la similitude visuelle, tirée de ce que les éléments verbaux « sanity » et « sanytol » pouvaient avoir un caractère distinctif affaibli, dès lors qu’ils pouvaient être perçus comme faisant allusion au mot espagnol « sanitario ».

50      Partant, il y a donc lieu de considérer que la similitude phonétique entre les signes en conflit, alors même qu’elle ne s’aurait être regardée comme « supérieure à la moyenne » en raison de l’erreur commise par la chambre de recours en ce qui concerne la voyelle « e » rajoutée erronément dans leur prononciation, reste malgré tout au moins moyenne.

 Sur la comparaison conceptuelle

51      La requérante soutient que l’incidence réduite des parties initiales des signes en conflit n’est pas suffisante pour établir une similitude conceptuelle, a fortiori si l’élément verbal supplémentaire « group » de la marque demandée est pris en considération.

52      Il convient de relever que, au point 42 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué que, sur le plan conceptuel, ni le mot « sanity » ni le mot « sanytol » n’avaient de signification en langue espagnole. Elle a toutefois également indiqué qu’une certaine similitude conceptuelle pouvait résulter de la coïncidence au niveau de la partie initiale des signes « sanit » et « sanyt » s’ils étaient perçus comme faisant allusion au mot espagnol « sanitario », bien qu’ils fussent faiblement distinctifs. La chambre de recours a aussi considéré que l’élément « group » de la marque demandée était dépourvu de caractère distinctif pour le public espagnol pertinent.

53      Il ressort de ce qui précède que c’est dans une hypothèse bien déterminée et limitée que la chambre de recours a conclu à l’existence d’une certaine similitude conceptuelle.

54      En effet, ainsi qu’il ressort de la décision attaquée, une telle conclusion n’a été formulée que dans l’hypothèse où le public pertinent percevait les éléments communs aux signes en conflit en tant qu’allusion au mot espagnol « sanitario ». La chambre de recours a également évoqué une autre hypothèse, celle dans laquelle les éléments « sanity » et « sanytol » n’avaient pas de signification en langue espagnole et dans laquelle l’examen de la similitude sur le plan conceptuel ne pouvait donc pas être effectué.

55      En tout état de cause, la similitude conceptuelle évoquée par la chambre de recours dans l’hypothèse critiquée par la requérante doit être mise en perspective avec la circonstance selon laquelle, comme l’indique la chambre de recours dans la décision attaquée, les éléments communs des signes en conflit sont faiblement distinctifs dans la mesure où ils décrivent certaines caractéristiques des produits visés [voir, en ce sens, arrêt du 26 novembre 2015, Bionecs/OHMI – Fidia farmaceutici (BIONECS), T‑262/14, non publié, EU:T:2015:888, point 67 et jurisprudence citée].

56      Ce raisonnement n’est pas remis en cause par la prise en compte ou non de l’élément supplémentaire « group » de la marque demandée, dès lors que celui-ci reste dépourvu de caractère distinctif pour le public espagnol pertinent comme indiqué à juste titre dans la décision attaquée.

57      Il n’y a donc pas lieu de remettre en cause l’appréciation de la similitude conceptuelle des signes en conflit exposée par la chambre de recours dans la décision attaquée.

58      En conséquence, la première branche du moyen doit être rejetée comme non fondée.

 Sur l’existence d’un lien entre les marques et d’un profit indûment tiré de la renommée de la marque antérieure

59      S’agissant de la condition liée à l’existence d’un risque de voir l’usage sans juste motif de la marque demandée tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou leur porter préjudice (voir point 16 ci‑dessus), les atteintes qui sont visées à l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, lorsqu’elles se produisent, découlent d’un certain degré de similitude entre la marque antérieure et la marque demandée, en raison duquel le public concerné effectue un rapprochement entre ces deux marques. En d’autres termes, le public concerné établit un lien entre celles-ci, alors même qu’il ne les confond pas (voir arrêt du 26 juillet 2017, Staatliche Porzellan-Manufaktur Meissen/EUIPO, C‑471/16 P, non publié, EU:C:2017:602, point 50 et jurisprudence citée).

60      L’existence d’un tel lien dans l’esprit du public pertinent entre la marque demandée et la marque antérieure est, par conséquent, une condition essentielle pour l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 [voir arrêts du 11 décembre 2014, Coca-Cola/OHMI – Mitico (Master), T‑480/12, EU:T:2014:1062, point 26 et jurisprudence citée, et du 11 novembre 2020, Totalizator Sportowy/EUIPO – Lottoland Holdings (Lottoland), T‑820/19, non publié, EU:T:2020:538, point 26 et jurisprudence citée].

61      Le fait que la marque demandée évoque la marque antérieure dans l’esprit du consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, équivaut à l’existence d’un lien entre ces marques (voir, par analogie, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 60).

62      L’existence de ce lien doit être appréciée globalement, en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce, tels que le degré de similitude des marques en conflit, la nature des produits ou des services désignés par ces marques, y compris le degré de proximité ou de dissemblance de ces produits ou de ces services ainsi que le public concerné, l’intensité de la renommée de la marque antérieure, le degré de caractère distinctif, intrinsèque ou acquis par l’usage, de la marque antérieure et l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent (voir arrêt du 26 juillet 2017, Staatliche Porzellan-Manufaktur Meissen/EUIPO, C‑471/16 P, non publié, EU:C:2017:602, point 52 et jurisprudence citée). En particulier, si l’existence d’une similitude entre les produits et les services désignés par les marques en conflit ne constitue pas une condition d’application du motif relatif de refus prévu à l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, la nature et le degré de proximité des produits ou des services concernés constituent des facteurs pertinents aux fins d’apprécier l’existence d’un lien entre ces marques [voir, en ce sens, arrêt du 28 février 2019, Lotte/EUIPO – Générale Biscuit-Glico France (PEPERO original), T‑459/18, non publié, EU:T:2019:119, point 182].

63      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner les arguments invoqués par la requérante à l’encontre de l’existence d’un lien entre les marques et d’un profit indûment tiré de la renommée de la marque antérieure.

64      À cet égard, la requérante fait valoir que, dans la mesure où les marques en conflit ne sont « pas du tout » similaires, le public pertinent n’établira pas de lien entre elles. En conséquence, il serait exclu, selon elle, que la marque demandée tire indûment profit de la renommée de la marque antérieure. La requérante fait en outre observer que, dans des décisions antérieures, l’EUIPO a considéré que lorsque des signes ne coïncidaient que par des éléments présentant un faible caractère distinctif, il ne pouvait être conclu que le public pertinent établissait un lien entre les marques.

65      L’EUIPO et l’intervenante contestent l’argumentation de la requérante.

66      En l’espèce, force est de relever, comme le fait valoir l’EUIPO, que l’argumentation de la requérante n’est pas de nature à remettre en cause le bien-fondé du raisonnement exposé par la chambre de recours dans la décision attaquée pour établir l’existence d’un lien entre les marques en conflit et d’un profit indûment tiré de la renommée de la marque antérieure.

67      En effet, il ressort de ce qui précède qu’il existe au moins un degré moyen de similitude entre les marques sur les plans visuel et phonétique. Il n’est également pas contesté que la marque antérieure bénéficie d’une renommée substantielle dans le domaine de la désinfection et de l’hygiène.

68      En outre, la requérante ne conteste pas, ainsi qu’elle l’a confirmé lors de l’audience, les conclusions de la chambre de recours selon lesquelles, d’une part, le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure est normal et, d’autre part, les produits et les services visés par la demande d’enregistrement ainsi que les produits pour lesquels la marque antérieure est renommée ciblent des publics qui se recoupent. Ces conclusions ressortent à suffisance de droit des points 49 à 52 de la décision attaquée.

69      En particulier, ainsi que la chambre de recours l’a indiqué aux points 49 à 52 de la décision attaquée sans être contestée par la requérante, les produits ou les services concernés appartenaient en partie aux mêmes marchés ou à des marchés étroitement liés et un lien était également établi pour les autres produits ou les services qui n’étaient pas identiques ou étroitement liés aux produits antérieurs renommés, étant donné que tous ces produits ou ces services concernaient le domaine de la protection et de l’entretien de la santé humaine, animale ou végétale. En effet, comme cela a été relevé à juste titre par la chambre de recours, l’hygiène et la santé étaient étroitement liées et de nombreuses entreprises spécialisées dans le domaine de la désinfection et de l’hygiène fournissaient également des produits et des services liés aux soins de santé.

70      Dès lors, la chambre de recours était fondée à considérer que le public pertinent pouvait comprendre que l’intervenante avait étendu ses activités relevant du domaine des désinfectants et des produits de nettoyage renommés au domaine des produits et des services de soins de santé. Il ne peut être ainsi exclu que les consommateurs pertinents pensent à la marque antérieure renommée lorsqu’ils voient la marque demandée en relation avec les produits et les services visés par cette marque dans le domaine de la protection et de l’entretien de la santé humaine, animale ou végétale.

71      Dans ce contexte, la chambre de recours était en droit de relever, en ce qui concerne le profit indu, que, compte tenu de la proximité des produits et des services, du fait que le public pertinent des marques en conflit se recoupait et de la renommée substantielle de la marque antérieure, des consommateurs étaient susceptibles d’acheter les produits et les services visés par la marque demandée en pensant qu’ils étaient liés à la marque antérieure, entraînant donc un détournement de son pouvoir d’attraction et de sa valeur publicitaire. C’est donc à juste titre que la chambre de recours a conclu, au point 55 de la décision attaquée, à l’existence d’un risque de transfert de l’image de la marque antérieure renommée et de ses caractéristiques positives aux produits et aux services de la marque demandée.

72      En conséquence, il ne saurait être allégué, comme le fait la requérante, non seulement, que les marques en conflit ne sont « pas du tout » similaires, mais aussi que, de ce seul fait, au demeurant erroné, la chambre de recours n’a pas établi l’existence d’un lien entre lesdites marques et d’un profit indûment tiré de la renommée de la marque antérieure, conformément à ce qui est prescrit par l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001.

73      Par ailleurs, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la décision attaquée n’est pas conforme à la pratique décisionnelle de l’EUIPO, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les décisions concernant l’enregistrement d’un signe en tant que marque de l’Union européenne que les chambres de recours sont amenées à prendre, en vertu du règlement 2017/1001, relèvent d’une compétence liée et non d’un pouvoir discrétionnaire. Dès lors, le caractère enregistrable d’un signe en tant que marque ne doit être apprécié que sur la base de ce règlement, tel qu’interprété par le juge de l’Union, et non sur la base d’une pratique antérieure de l’EUIPO (voir arrêt du 6 avril 2022, moio.care, T‑276/21, non publié, EU:T:2022:221, point 65 et jurisprudence citée).

74      En outre, la requérante se prévaut d’une pratique décisionnelle de l’EUIPO, de laquelle il ressort que, dans d’autres affaires, la chambre de recours a considéré que, même si les « produits et services pertinents » étaient identiques, mais que les signes se recoupaient uniquement au niveau des éléments possédant un caractère distinctif faible, il ne pouvait pas être conclu que le public pertinent pouvait établir un lien entre les marques en cause.

75      Outre la circonstance, précisée au point 74 ci-dessus, que la légalité des décisions de l’EUIPO en matière d’enregistrement d’une marque de l’Union européenne doit être appréciée uniquement sur le fondement du règlement 2017/1001, tel qu’interprété par le juge de l’Union, et non sur celui d’une pratique décisionnelle antérieure à celles-ci (voir, en ce sens, arrêt du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, EU:C:2007:252, point 65), comme le fait valoir à juste titre l’EUIPO dans son mémoire en réponse, il s’avère que les affaires citées par la requérante comportent des circonstances différentes de celles de la présente affaire. En effet, dans la présente affaire, la marque antérieure se distingue de la marque antérieure en cause dans les décisions citées, dont le caractère distinctif avait été considéré comme ayant été à ce point dilué que les marques en cause pouvaient être utilisées en tant que mots génériques pour toutes les entreprises du secteur concerné.

76      La seconde branche du moyen doit donc être rejetée comme non fondée.

77      Il résulte de tout ce qui précède qu’il y a lieu d’écarter le moyen unique de la requérante et de rejeter le recours dans son ensemble, sans qu’il soit nécessaire d’examiner et de se prononcer sur la recevabilité de la décision du 6 décembre 2022 d’une autorité administrative italienne et du jugement du 23 décembre 2022 d’une juridiction espagnole, qui concernent d’autres procédures d’opposition et qui ont été produits par l’intervenante avant l’audience.

 Sur les dépens

78      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s’il est conclu en ce sens.

79      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Sanity Group GmbH est condamnée aux dépens.

Marcoulli

Frimodt Nielsen

Norkus

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 juin 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.