Language of document : ECLI:EU:C:2014:2041

Affaires jointes C‑129/13 et C‑130/13

Kamino International Logistics BV
et

Datema Hellmann Worldwide Logistics BV

contre

Staatssecretaris van Financiën

(demandes de décision préjudicielle,
introduites par le Hoge Raad der Nederlanden)

«Recouvrement d’une dette douanière – Principe du respect des droits de la défense – Droit d’être entendu – Destinataire de la décision de recouvrement n’ayant pas été entendu par les autorités douanières avant l’adoption de ladite décision, mais dans la phase subséquente de réclamation – Violation des droits de la défense – Détermination des conséquences juridiques du non-respect des droits de la défense»

Sommaire – Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 3 juillet 2014

1.        Droit de l’Union européenne – Principes – Droits de la défense – Droit d’être entendu – Obligation de respect desdits principes par les administrations nationales dans le cadre d’une procédure de recouvrement des droits de douane – Invocabilité du non-respect desdits principes devant les juridictions nationales

(Règlement du Conseil nº 2913/92, tel que modifié par le règlement nº 2700/2000)

2.        Union douanière – Application de la réglementation douanière – Droit de recours – Interprétation à la lumière des droits fondamentaux

(Règlement du Conseil nº 2913/92, tel que modifié par le règlement nº 2700/2000)

3.        Ressources propres de l’Union européenne – Recouvrement a posteriori des droits à l’importation ou à l’exportation – Droits de la défense – Réglementation nationale ne permettant pas l’audition préalable du destinataire d’un avis de paiement – Admissibilité – Conditions – Droit du destinataire d’obtenir la suspension de l’exécution de l’avis

(Règlement du Conseil nº 2913/92, tel que modifié par le règlement nº 2700/2000, art. 244, al. 2)

4.        Droit de l’Union européenne – Principes – Droits de la défense – Méconnaissance desdits droits par une décision administrative – Conséquences – Adoption de mesures de droit national – Conditions – Respect des principes d’équivalence et d’effectivité

(Règlement du Conseil nº 2913/92, tel que modifié par le règlement nº 2700/2000, art. 245)

1.        Le principe du respect par l’administration des droits de la défense et le droit qui en découle, pour toute personne, d’être entendue avant l’adoption de toute décision susceptible d’affecter de manière défavorable ses intérêts, tels qu’ils s’appliquent dans le cadre de l’application du règlement nº 2913/92, établissant le code des douanes communautaire, tel que modifié par le règlement nº 2700/2000, peuvent être invoqués directement, par les particuliers, devant les juridictions nationales.

L’obligation de respect dudit principe pèse sur les administrations des États membres lorsqu’elles prennent des décisions entrant dans le champ d’application du droit de l’Union, alors même que la réglementation applicable ne prévoit pas expressément une telle formalité.

(cf. points 31, 35, disp. 1)

2.        Les dispositions du droit de l’Union, telles que celles du code des douanes, doivent être interprétées à la lumière des droits fondamentaux qui font partie intégrante des principes généraux du droit dont la Cour assure le respect.

(cf. point 69)

3.        Le principe du respect des droits de la défense et, en particulier, le droit de toute personne d’être entendue avant l’adoption d’une mesure individuelle défavorable doivent être interprétés en ce sens que, lorsque le destinataire d’un avis de paiement adopté au titre d’une procédure de recouvrement a posteriori de droits de douane à l’importation, en application du règlement nº 2913/92, établissant le code des douanes communautaire, tel que modifié par le règlement nº 2700/2000, n’a pas été entendu par l’administration préalablement à l’adoption de cette décision, ses droits de la défense sont violés alors même qu’il a la possibilité de faire valoir sa position lors d’une phase de réclamation administrative ultérieure, si la réglementation nationale ne permet pas aux destinataires de tels avis, en l’absence d’une audition préalable, d’obtenir la suspension de leur exécution jusqu’à leur éventuelle réformation. Tel est le cas, en tout état de cause, si la procédure administrative nationale mettant en œuvre l’article 244, deuxième alinéa, du règlement nº 2913/92, restreint l’octroi d’un tel sursis lorsqu’il existe des raisons de douter de la conformité de la décision contestée à la réglementation douanière ou qu’un dommage irréparable est à craindre pour l’intéressé.

(cf. point 73, disp. 2)

4.        Les conditions dans lesquelles doit être assuré le respect des droits de la défense et les conséquences de la méconnaissance de ces droits relèvent du droit national, pour autant que les mesures arrêtées en ce sens soient du même ordre que celles dont bénéficient les particuliers dans des situations de droit national comparables (principe de l’équivalence) et qu’elles ne rendent pas en pratique impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par l’ordre juridique de l’Union (principe d’effectivité).

Le juge national, ayant l’obligation de garantir le plein effet du droit de l’Union, peut, lorsqu’il évalue les conséquences d’une violation des droits de la défense, en particulier du droit d’être entendu, tenir compte de ce qu’une telle violation n’entraîne l’annulation de la décision prise au terme de la procédure administrative en cause que si, en l’absence de cette irrégularité, cette procédure pouvait aboutir à un résultat différent.

Cette solution est applicable à la matière douanière dans la mesure où l’article 245 du code des douanes renvoie expressément au droit national.

(cf. points 76, 82, disp. 3)