Language of document : ECLI:EU:T:2023:282

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

24 mai 2023 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Rémunération – Allocations familiales – Allocation pour enfant à charge – Article 2, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut – Personne assimilée à un enfant à charge – Conditions d’octroi – Retrait du bénéfice de l’allocation – Répétition de l’indu – Article 85 du statut »

Dans l’affaire T‑714/21,

AL, représenté par Me R. Rata, avocate,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. T. S. Bohr, L. Hohenecker et Mme D. Milanowska, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de M. R. da Silva Passos, président, Mmes N. Półtorak (rapporteure) et T. Pynnä, juges,

greffier : M. T. Henze, greffier faisant fonction,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 270 TFUE, le requérant, AL, demande l’annulation de la décision de l’Office de gestion et de liquidation des droits individuels (PMO) de la Commission européenne du 11 janvier 2021 (ci-après la « décision attaquée »), laquelle tendait en substance, d’une part, à rejeter sa demande d’allocation pour sa mère en tant que personne assimilée à un enfant à charge sur le fondement de l’article 2, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») pour la période courant du 1er novembre 2020 au 31 octobre 2021 et, d’autre part, à ordonner le recouvrement des sommes qu’il avait perçues au titre de cette allocation pour la période courant du 1er novembre 2019 au 31 octobre 2020.

 Antécédents du litige

2        Le requérant est fonctionnaire au secrétariat général du Conseil de l’Union européenne depuis le 1er décembre 2007.

3        Par décision du 21 novembre 2019, le PMO a accordé au requérant, à titre provisoire, le renouvellement d’une allocation pour sa mère en tant que personne assimilée à un enfant à charge au titre de l’article 2, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut pour la période comprise entre le 1er novembre 2019 et le 31 octobre 2020 (ci-après la « décision du 21 novembre 2019 »).

4        Le 22 juillet 2020, le requérant a été informé par l’Office de lutte antifraude (OLAF) qu’il faisait l’objet d’une enquête, ouverte à la fin de l’année 2016, concernant une possible fraude relative à sa déclaration de composition de famille et aux exigences liées à l’obtention d’allocations familiales dont il avait demandé à bénéficier (ci-après l’« enquête de l’OLAF »).

5        Par courriel du 6 octobre 2020, le requérant a contacté le PMO aux fins de l’informer qu’il résultait de l’enquête de l’OLAF que sa mère possédait peut-être un appartement à Bucarest (Roumanie). Il a confirmé cette information par courriel du 28 octobre 2020, en précisant que sa mère possédait ledit appartement depuis le mois de décembre 1996.

6        Par la décision attaquée, le PMO a informé le requérant qu’il avait décidé de réexaminer la décision du 21 novembre 2019. Le motif retenu était que, sur la base des informations nouvellement transmises par le requérant à propos de l’appartement dont sa mère était propriétaire à Bucarest et dans la mesure où il n’avait pas transmis de preuves suffisantes de ce que sa mère avait passé au moins 180 jours par an en Belgique, le lieu de résidence qui devait être pris en compte pour apprécier sa demande d’allocation était la Roumanie. Or, selon le PMO, il ressortait des calculs réalisés en prenant cette modification en compte que l’allocation pour sa mère en tant que personne assimilée à un enfant à charge n’aurait pas dû lui être attribuée pour la période courant du 1er novembre 2019 au 31 octobre 2020 et que les sommes qui lui avaient été versées à cet égard devaient, par conséquent, être recouvrées en application de l’article 85 du statut. En outre, le PMO a également considéré que ladite allocation ne devait pas être accordée au requérant pour la période comprise entre le 1er novembre 2020 et le 31 octobre 2021.

7        Le 9 avril 2021, en application de l’article 90, paragraphe 2, du statut, le requérant a introduit une réclamation tendant à l’annulation de la décision attaquée. L’autorité investie de pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») de la Commission a rejeté cette réclamation le 4 août 2021 (ci-après la « décision de rejet de la réclamation »).

 Conclusions des parties

8        Dans la requête, le requérant conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision de rejet de la réclamation ;

–        condamner la Commission à déterminer la charge d’entretien de sa mère, assimilée à un enfant à charge, pour la période allant du 1er novembre 2020 au 30 septembre 2021, sur la base de sa résidence en Belgique ;

–        condamner la Commission au paiement de l’allocation pour sa mère, assimilée à un enfant à charge, pour la période allant du 1er novembre 2020 au 30 septembre 2021 ;

–        ordonner à la Commission de produire, d’une part, les pièces sur lesquelles repose sa décision du 21 novembre 2019 et, d’autre part, l’intégralité du texte de la réponse à une réclamation citée dans un courriel du PMO du 8 décembre 2020 ;

–        condamner la Commission aux dépens.

9        La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

 Sur la demande en annulation

 Sur l’objet de la demande en annulation

10      Par son premier chef de conclusions, le requérant demande au Tribunal d’annuler la décision de rejet de la réclamation.

11      Selon une jurisprudence constante, la réclamation administrative, telle que visée à l’article 90, paragraphe 2, du statut, et son rejet, explicite ou implicite, font partie intégrante d’une procédure complexe et ne constituent qu’une condition préalable à la saisine du juge. Dans ces conditions, le recours, même formellement dirigé contre le rejet de la réclamation, a pour effet de saisir le juge de l’acte faisant grief contre lequel la réclamation a été présentée, sauf dans l’hypothèse où le rejet de la réclamation aurait une portée différente de celle de l’acte contre lequel cette réclamation a été formée (voir arrêt du 27 octobre 2016, CW/Parlement, T‑309/15 P, non publié, EU:T:2016:632, point 27 et jurisprudence citée).

12      En outre, compte tenu de ce que la procédure précontentieuse présente un caractère évolutif, une décision explicite de rejet de la réclamation qui ne contient que des précisions complémentaires et se borne ainsi à révéler, de manière détaillée, les motifs de la confirmation de l’acte antérieur ne constitue pas un acte faisant grief. Néanmoins, ce même caractère évolutif de la procédure précontentieuse implique que ces précisions complémentaires soient prises en considération pour apprécier la légalité de l’acte attaqué (voir arrêt du 14 juillet 2021, IN/Eismea, T‑119/20, non publié, EU:T:2021:427, point 39 et jurisprudence citée).

13      En l’espèce, il convient d’observer que la décision de rejet de la réclamation confirme la décision attaquée, en précisant les motifs venant au soutien de la position du PMO s’agissant de cette décision. Ainsi, les conclusions en annulation doivent être considérées comme étant dirigées contre la décision attaquée, dont la légalité sera examinée en prenant en considération la motivation figurant dans la décision de rejet de la réclamation.

 Sur le fond

14      À l’appui de son recours, le requérant invoque, en substance, quatre moyens, tirés, le premier, d’une violation des droits de la défense, le deuxième, d’une violation du principe de protection de la confiance légitime, le troisième, d’une erreur d’appréciation du lieu de résidence de sa mère et, le quatrième, d’une violation de l’article 85 du statut.

–       Sur le premier moyen, tiré d’une violation des droits de la défense

15      Par son premier moyen, d’une part, le requérant fait valoir, en substance, que, alors qu’il lui avait été signifié qu’il pouvait déposer des pièces justificatives pour étayer ses demandes jusqu’au 29 janvier 2021, le PMO a finalement adopté la décision attaquée avant l’expiration de ce délai. D’autre part, il soutient que, en indiquant dans la décision attaquée qu’il n’avait pas apporté la preuve que sa mère avait passé au moins 180 jours en Belgique, le PMO s’est appuyé sur un critère qui ne repose sur aucune base juridique et dont l’existence ne lui avait jamais été communiquée avant l’adoption de la décision attaquée. Il en conclut que ses droits de la défense ont été méconnus.

16      À titre liminaire, il convient de rappeler qu’il est de jurisprudence constante que le respect des droits de la défense dans toute procédure ouverte à l’encontre d’une personne et susceptible d’aboutir à un acte faisant grief à celle-ci constitue un principe fondamental du droit de l’Union européenne. Ce principe, qui répond aux exigences d’une bonne administration, exige que la personne visée soit mise en mesure de faire connaître utilement son point de vue au sujet des éléments retenus à sa charge pour fonder un tel acte (voir arrêt du 10 octobre 2006, Van der Spree/Commission, T‑182/04, EU:T:2006:298, point 70 et jurisprudence citée).

17      Cependant, pour qu’une violation des droits de la défense entraîne l’annulation de l’acte attaqué, il faut que, en l’absence de cette irrégularité, la procédure ait pu aboutir à un résultat différent (voir arrêt du 14 février 2017, Kerstens/Commission, T‑270/16 P, non publié, EU:T:2017:74, point 74 et jurisprudence citée).

18      En ce qui concerne le premier argument du requérant, tiré de ce que la décision attaquée n’aurait pas été adoptée à la date convenue, il est exact que, par courriel du 29 octobre 2020, le PMO a indiqué au requérant qu’il devait lui transmettre un certain nombre de documents et que la date limite pour s’acquitter de cette obligation était le 29 janvier 2021. En outre, il est constant que l’adoption de la décision attaquée est survenue avant cette date limite, le 11 janvier 2021.

19      Cependant, d’une part, il convient de constater que le requérant et le PMO ont entretenu de nombreux échanges entre le 29 octobre 2020 et le 11 janvier 2021, lesquels ont permis au requérant de transmettre au PMO de nombreux documents parmi ceux qui lui avaient été demandés et au PMO de lui faire part de ses doutes au regard des documents reçus. Dans le cadre de ces échanges, le requérant a, par courriel du 30 novembre 2020, transmis de nombreux documents en reprenant la classification opérée par le PMO dans le courriel qu’il lui avait transmis le 29 octobre 2020 et en indiquant pour chacun de ces documents de quelle catégorie il relevait au regard de cette classification, tout en joignant d’autres documents présentés comme des documents « additionnels ». Par la suite, le requérant a apporté des précisions et formulé des commentaires à propos desdits documents, mais il n’a jamais indiqué vouloir transmettre de nouveaux documents. Au contraire, il a enjoint, à plusieurs reprises, au PMO de procéder au plus vite au calcul de l’allocation litigieuse sur la base des informations qu’il lui avait transmises et il a même expressément signalé au PMO que celui-ci disposait de tous les éléments nécessaires pour le faire par courriel du 4 janvier 2021.

20      Dans ce contexte, le PMO pouvait légitiment considérer que l’ensemble de la documentation pertinente lui avait été transmise par le requérant. Cela d’autant plus que, par courriel du 6 janvier 2021, il avait été indiqué à ce dernier que le PMO préparait son dossier en vue de rendre une décision finale, mais qu’un document supplémentaire devait encore être transmis à cette fin. Or, le requérant a transmis ledit document, par courriel du même jour, sans indiquer d’aucune manière qu’il entendait de nouveau compléter son dossier par la suite.

21      D’autre part, il y a surtout lieu d’observer que le requérant n’allègue que de manière abstraite que la date d’adoption de la décision attaquée l’a empêché de joindre éventuellement d’autres preuves au dossier. Ainsi, il ne précise aucunement de quelles preuves il aurait pu s’agir, pas plus qu’il ne les verse au dossier dans le cadre de la présente affaire.

22      Dès lors, et quand bien même il serait considéré que le PMO était tenu de respecter le délai indiqué dans le courriel qu’il avait transmis au requérant le 29 octobre 2020, à savoir le 29 janvier 2021, force est de constater que ce dernier n’a précisé en aucune manière quels sont les arguments qu’il aurait entendu soulever ni les documents qu’il entendait produire à leur soutien entre la date d’adoption de la décision attaquée, à savoir le 11 janvier 2021, et le 29 janvier 2021.

23      Par conséquent, il n’est pas établi que la procédure aurait pu aboutir à un résultat différent si la décision attaquée avait été adoptée après la date limite du 29 janvier 2021. Partant, il convient d’écarter le premier argument soulevé par le requérant.

24      En ce qui concerne le second argument, tiré de ce que la décision attaquée serait fondée sur un critère dépourvu de base juridique et n’ayant jamais été communiqué au requérant auparavant, lequel aurait été l’unique fondement de cette dernière, il convient de constater ce qui suit.

25      Tout d’abord, il ressort du libellé de la décision attaquée que, si le PMO a, en effet, constaté que le requérant n’avait pas apporté la preuve que sa mère passait au moins 180 jours par an en Belgique, c’est parce qu’un faisceau d’indices, notamment constitué du bien dont elle était propriétaire en Roumanie et de sa double résidence dans ces deux États, l’avait conduit à douter de ce que son lieu de résidence effective se trouvait en Belgique et qu’une telle durée était pertinente, dans les circonstances de l’espèce, pour déterminer si elle y résidait ou non.

26      Dans la décision de rejet de la réclamation, l’AIPN a apporté des précisions à cet égard, en expliquant, en substance, au requérant que la mention de la durée de présence de 180 jours en Belgique était une référence seulement indicative, en ce qu’elle aurait, dans les circonstances particulières de l’espèce telles que décrites dans la décision attaquée, été susceptible de démontrer la présence prédominante de la mère du requérant dans ce pays malgré les doutes issus des différents éléments qui y étaient mentionnés.

27      Au regard de ce qui précède, et contrairement à ce qu’affirme le requérant, il ne saurait être considéré que la durée de présence en Belgique de 180 jours qui était mentionnée dans la décision attaquée était l’unique justification de cette décision.

28      Ensuite, il convient d’observer que la décision attaquée a été adoptée à l’issue de nombreux échanges dont il est constant qu’ils portaient sur la détermination du lieu de résidence effective de la mère du requérant. Au cours de ces échanges, il a été spécifié clairement au requérant qu’il était nécessaire qu’il démontre que cette dernière passait plus de temps en Belgique que seulement quelques jours ou quelques mois par an.

29      Enfin, le requérant n’explique en rien en quoi l’exigence, dans la décision attaquée, de démontrer que sa mère avait passé au moins 180 jours de l’année en Belgique serait constitutif d’une violation de ses droits de la défense.

30      Par conséquent, le PMO n’a pas méconnu les droits de la défense du requérant en indiquant que, dans le contexte décrit dans la décision attaquée, ce dernier n’avait pas apporté de preuve suffisante de ce que sa mère avait passé au moins 180 jours par an en Belgique.

31      Il s’ensuit que le premier moyen doit être écarté.

–       Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation du principe de protection de la confiance légitime

32      Par son deuxième moyen, le requérant fait valoir que la Commission a manqué au principe de protection de la confiance légitime, tout d’abord parce qu’elle ne lui a jamais indiqué la nature des documents qu’il convenait de lui transmettre pour démontrer que sa mère vivait en Belgique, ensuite parce qu’elle lui aurait laissé entendre que le document « Composition des ménages » suffisait à prouver qu’un membre de sa famille vivait sous son toit et, enfin, parce que l’AIPN n’avait jamais remis en cause le lieu de résidence de sa mère lors de l’examen des différentes demandes d’allocation d’assimilation qu’il avait soumises.

33      À cet égard, il convient de rappeler que le droit de se prévaloir du principe de protection de la confiance légitime suppose que des assurances précises, inconditionnelles et concordantes, émanant de sources autorisées et fiables, ont été fournies à l’intéressé par les autorités compétentes de l’Union (voir arrêt du 8 septembre 2020, Commission et Conseil/Carreras Sequeros e.a., C‑119/19 P et C‑126/19 P, EU:C:2020:676, point 144 et jurisprudence citée).

34      Premièrement, en ce que le requérant soutient que la Commission ne lui a pas indiqué quels documents il lui appartenait de produire pour démontrer que le lieu de résidence de sa mère se trouvait en Belgique, il convient de constater, ainsi que cela a été souligné au point 19 ci-dessus, qu’il ressort du dossier que le PMO a mentionné certains types de documents qui pouvaient lui être transmis pour démontrer le lieu de résidence effective de la mère du requérant, tels que, par exemple, des reçus médicaux qui seraient susceptibles de prouver qu’elle résidait à temps plein en Belgique et qu’elle n’y passait pas seulement quelques mois chaque année, tout en précisant que des documents de n’importe quel autre ordre seraient également bienvenus. Par conséquent, il convient d’écarter cet argument.

35      Deuxièmement, au sujet des assurances qui auraient prétendument été données au requérant, il convient d’observer que, s’il lui a bien été demandé de transmettre le document « Composition des ménages », il ne ressort en revanche pas du dossier qu’il lui ait été signalé que ledit document suffirait à établir que le lieu de résidence de sa mère se trouvait en Belgique.

36      Troisièmement, en ce que le requérant prétend que le lieu de résidence de sa mère n’avait jamais été remis en cause lorsque les précédentes décisions lui octroyant l’allocation pour sa mère en tant que personne assimilée à un enfant à charge avaient été rendues, il suffit de rappeler que c’est parce que le requérant a fait savoir au PMO que les déclarations qu’il avait faites lorsqu’il avait présenté une demande en vue d’obtenir cette allocation étaient erronées, ainsi que l’a révélé l’enquête de l’OLAF, que les calculs visant à déterminer s’il pouvait en bénéficier ont, en l’espèce, été de nouveau réalisés dans la décision attaquée.

37      En outre, il convient de préciser que les versements effectués au bénéfice du requérant par l’administration, même pendant plusieurs années, ne peuvent en eux-mêmes être considérés comme des assurances précises, inconditionnelles et concordantes donnant le droit de réclamer la protection de la confiance légitime. En effet, dans le cas contraire, toute décision de l’administration refusant pour l’avenir, et éventuellement avec un effet rétroactif, le paiement d’un droit pécuniaire versé indûment à l’intéressé pendant plusieurs années serait systématiquement annulée par le juge de l’Union sur la base de la violation du principe de confiance légitime (arrêt du 12 mai 2017, Costa/Parlement, T‑15/15 et T‑197/15, non publié, EU:T:2017:332, point 75) et aurait pour conséquence de faire perdre, en grande partie, notamment, l’effet utile de l’article 85 du statut relatif à la répétition de l’indu.

38      Au regard de l’ensemble de ce qui précède, le deuxième moyen doit être écarté.

–       Sur le troisième moyen, tiré d’une erreur d’appréciation

39      Par son troisième moyen, le requérant soutient, en substance, que l’administration a commis une erreur d’appréciation en estimant qu’il n’avait pas apporté la preuve de ce que sa mère résidait en Belgique de manière permanente.

40      À cet égard, il soumet un certain nombre d’éléments de preuve dont il considère qu’ils n’ont jamais été pris en compte, alors qu’ils étaient de nature à démontrer que le lieu de résidence de sa mère se trouvait bien en Belgique. De tels éléments de preuve seraient suffisants, dès lors qu’ils permettaient d’établir le lieu de résidence de sa mère conformément aux critères énoncés à l’article 11, paragraphes 1 et 2, du règlement (CE) no 987/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 16 septembre 2009, fixant les modalités d’application du règlement (CE) no 883/2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale (JO 2009, L 284, p. 1).

41      À titre liminaire, il convient de rappeler que l’article 2, paragraphes 1 à 3, de l’annexe VII du statut permet aux fonctionnaires ayant un ou plusieurs enfants à charge de bénéficier, sous certaines conditions, d’une allocation pour chacun d’entre eux. Il est précisé, au paragraphe 4 dudit article, que, par décision spéciale de l’AIPN prise sur la base de documents probants, toute personne à l’égard de laquelle le fonctionnaire a des obligations alimentaires légales et dont l’entretien lui impose de lourdes charges peut exceptionnellement être assimilée à un enfant à charge.

42      Cette dernière disposition a été mise en œuvre par la décision C(2004) 1364 de la Commission, du 15 avril 2004, relative aux dispositions générales d’exécution en matière de personne assimilée à l’enfant à charge (article 2, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut) (ci-après les « DGE »), dont l’article 4, premier et deuxième alinéas, est rédigé comme suit :

« Il appartient au fonctionnaire d’établir, sur la base de tout document probant, l’existence de l’obligation alimentaire légale considérée, la charge financière qui en découle et le montant de sa contribution financière versée effectivement.

L’assimilation ne peut être accordée que si la charge financière découlant de l’obligation alimentaire légale est au moins égale au montant qui résulte de l’octroi de l’assimilation. »

43      Par ailleurs, il ressort de l’article 8, premier alinéa, des DGE que le montant de la charge d’entretien d’une personne dont un fonctionnaire demande l’assimilation à un enfant à charge doit être affecté d’un coefficient correcteur en fonction du lieu de résidence de cette personne.

44      C’est sur la base de ces dispositions que, dans la décision attaquée, le PMO a estimé que, eu égard à la nouvelle information, qui n’avait pas été déclarée auparavant, selon laquelle la mère du requérant possédait un appartement à Bucarest, le requérant n’avait pas été en mesure de produire des preuves suffisantes de ce que le lieu de résidence effective de sa mère se trouvait en Belgique et que, par conséquent, c’était la résidence en Roumanie de la mère du requérant qui devait être prise en compte dans le calcul de la charge d’entretien de celle-ci. Après avoir procédé à un nouveau calcul de la charge d’entretien de la mère du requérant sur la base de sa résidence en Roumanie, en application de l’article 8 des DGE, le PMO a constaté que la charge financière découlant de l’obligation alimentaire du requérant envers sa mère était inférieure au montant minimum requis pour l’octroi de l’allocation selon l’article 4 des DGE, constat déclenchant le recouvrement des sommes déjà versées pour la période courant du 1er novembre 2019 au 31 octobre 2020 et le refus de l’octroi d’une nouvelle allocation pour la période courant du 1er novembre 2020 au 31 octobre 2021.

45      En effet, conformément à l’article 8 des DGE, la détermination du lieu de résidence de la mère du requérant a une incidence sur le calcul du montant de l’allocation pour celle-ci, en tant que personne assimilée à un enfant à charge, et peut même entraîner le refus de son octroi. C’est la fixation du lieu de résidence en Roumanie que le requérant conteste, en s’appuyant sur plusieurs documents qu’il a fournis au stade de la procédure administrative et dont il estime qu’ils sont de nature à démontrer que la résidence de sa mère se trouvait en Belgique.

46      Selon une jurisprudence constante, les dispositions du droit de l’Union qui donnent droit à des prestations financières doivent être interprétées strictement et une telle interprétation doit également être effectuée en ce qui concerne l’assimilation d’une personne à un « enfant à charge » au sens du statut (voir arrêt du 19 décembre 2019, Zotkov/Commission, T‑457/18, non publié, EU:T:2019:875, point 28 et jurisprudence citée). À cet égard, il y a lieu de tenir compte de la circonstance selon laquelle ce n’est qu’à titre exceptionnel et sur décision motivée de l’AIPN de l’institution, de l’organe ou de l’organisme de l’Union concerné qu’une personne majeure et membre de la famille du fonctionnaire, autre que ses enfants légitimes, naturels ou adoptifs ou ceux de son conjoint, peut être considérée, au titre de l’article 2, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut, comme un « enfant à charge » lorsque le fonctionnaire a des « obligations alimentaires légales » à l’égard de cette personne et que « l’entretien [de celle-ci] lui impose de lourdes charges » (arrêt du 16 janvier 2018, SE/Conseil, T‑231/17, non publié, EU:T:2018:3, point 38).

47      En outre, il incombe au fonctionnaire de prouver que sont réunies les conditions à satisfaire pour obtenir le paiement d’une allocation (voir ordonnance du 17 juin 2019, BS/Parlement, T‑593/18, non publiée, EU:T:2019:425, point 39 et jurisprudence citée).

48      En premier lieu, le requérant s’appuie sur les dispositions de l’article 11, paragraphes 1 et 2, du règlement no 987/2009 pour soutenir que les éléments de preuve qu’il a produits au cours de ses échanges avec le PMO suffisaient à démontrer que la résidence permanente effective de sa mère se trouvait en Roumanie.

49      À cet égard, il convient d’observer, d’une part, que le règlement no 987/2009 ne vise pas les fonctionnaires de l’Union et, d’autre part, que l’article 11 dudit règlement mentionné par le requérant porte sur les divergences de vues entre les institutions de deux États membres au sujet de la détermination de la résidence d’une personne, dans le contexte de la coordination des systèmes de sécurité sociale. Or, ces questions ne relèvent pas du cas d’espèce et l’argument du requérant sur ce point doit donc être écarté pour ce motif.

50      En second lieu, il convient d’examiner si la décision attaquée est entachée d’une erreur d’appréciation, en ce que l’AIPN a considéré que, le requérant n’ayant pas apporté la preuve de ce que sa mère résidait en Belgique, il devait tenir compte de la résidence de celle-ci en Roumanie pour le calcul de sa charge d’entretien.

51      À titre liminaire, il convient d’observer que la Commission n’est pas fondée à soutenir, en substance, que le renvoi général du requérant à six annexes dans la requête rend les allégations qu’il tire desdites annexes irrecevables. En effet, le requérant explique expressément dans la requête les arguments qu’il tire de chacune de ces annexes.

52      En outre, il convient de constater que ni l’article 2, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut ni les DGE ne prévoient les critères applicables aux fins de déterminer le lieu de résidence effectif d’une personne faisant l’objet d’une demande pour bénéficier de l’allocation pour un enfant à charge.

53      Toutefois, la notion de « résidence » est interprétée de manière constante par la jurisprudence comme étant le lieu où l’intéressé a fixé, avec la volonté de lui conférer un caractère stable, le centre permanent ou habituel de ses intérêts. Par ailleurs, la notion de « résidence » implique, indépendamment de la donnée purement quantitative du temps passé par la personne sur le territoire de l’un ou de l’autre pays, outre le fait physique de demeurer en un certain lieu, l’intention de conférer à ce fait la continuité résultant d’une habitude de vie et du déroulement de rapports sociaux normaux (voir arrêt du 4 juin 2003, Del Vaglio/Commission, T‑124/01 et T‑320/01, EU:T:2003:153, point 71 et jurisprudence citée).

54      Au soutien de sa position, le requérant s’appuie sur plusieurs documents dont il estime qu’ils sont de nature à démontrer que la résidence effective de sa mère se trouvait en Belgique.

55      Premièrement, le requérant évoque le transfert de l’assurance médicale de sa mère en Belgique depuis le mois d’octobre 2013. Contrairement à ce qu’il affirme, ce simple transfert n’est pas de nature à démontrer que la résidence de sa mère se trouve dans ce pays. En effet, d’une part, il ressort des explications données par le requérant lui-même que ledit transfert résulte de la seule inscription de sa mère, à l’initiative de celle-ci, auprès de l’assurance médicale belge D’autre part, l’inscription auprès du régime d’assurance maladie d’un pays donné n’est pas de nature à démontrer que ledit pays doit être considéré comme le lieu de résidence de l’individu (voir, en ce sens, arrêt du 3 mai 2001, Liaskou/Conseil, T‑60/00, EU:T:2001:129, point 63). De plus, cette information doit être mise en balance avec le fait que l’administration a demandé au requérant à plusieurs reprises d’autres documents pour démontrer la résidence de sa mère en Belgique, tels que des justificatifs des frais médicaux couverts par cette assurance, ce que le requérant n’a pas été en mesure de produire.

56      Deuxièmement, le requérant produit la déclaration d’imposition de sa mère pour l’année 2020, relative aux revenus de l’année 2019. Toutefois, celle-ci a été établie par la mère du requérant elle-même afin de déclarer qu’elle n’exerçait aucune activité lucrative en Belgique et elle n’est donc pas de nature à démontrer que son lieu de résidence se trouvait en Belgique au cours de cette période.

57      Troisièmement, à propos des documents « Avertissement extraits de rôle » soumis par le requérant pour les années 2008, 2009 et 2019, il convient de relever que ces derniers ne sont pas non plus de nature à établir la présence continue de sa mère en Belgique, puisqu’il en ressort qu’elle ne percevait aucun revenu imposable dans ce pays au cours de ces années.

58      Quatrièmement, en ce qui concerne le certificat de résidence principale daté du 28 novembre 2020 et à propos duquel le requérant fait valoir, au stade de la réplique, qu’il a fait l’objet d’une enquête de police préalable, il y a lieu de noter que ce certificat indique que la mère du requérant a été inscrite à quatre adresses différentes dans le registre national de la Belgique depuis 2008. Néanmoins, il y a lieu de rappeler qu’il ressort d’une jurisprudence constante que l’inscription au registre d’une localité est un élément purement formel qui ne permet pas d’établir la résidence de l’intéressé dans ladite localité (voir, en ce sens, arrêt du 15 octobre 2020, Karpeta-Kovalyova/Commission, T‑249/19, non publié, EU:T:2020:490, point 84 et jurisprudence citée). De plus, il a été procédé à ladite inscription au registre des étrangers de la commune de Zaventem (Belgique) à une date antérieure aux deux périodes sur lesquelles porte la décision attaquée. Or, il doit être observé à ce sujet que, en admettant qu’une telle enquête ait alors été menée, celle-ci ne l’aurait été que ponctuellement avant la délivrance du certificat en cause, et elle n’aurait donc permis de démontrer la présence de la mère du requérant en Belgique que pour une période limitée.

59      Cinquièmement, le requérant mentionne plusieurs documents dont la valeur probante doit être considérée comme étant faible, puisqu’ils proviennent soit de sa mère elle-même, soit de sa propre famille. Il en va ainsi des différentes déclarations sur l’honneur dont la mère du requérant est la signataire comme de celle qui émane de l’ex-épouse du requérant. En effet, il ressort, notamment, de la jurisprudence que les seules déclarations de l’intéressé sont dénuées de valeur probante pour établir l’existence de sa résidence effective (voir, en ce sens, arrêt du 27 septembre 2006, Kontouli/Conseil, T‑416/04, EU:T:2006:281, points 90, 105 et 106).

60      Il en va de même pour la résidence en Belgique inscrite sur le passeport roumain de la mère du requérant, puisque cette inscription est également de nature à être fondée sur sa propre déclaration (voir, en ce sens, arrêt du 4 juin 2003, Del Vaglio/Commission, T‑124/01 et T‑320/01, EU:T:2003:153, point 87). Des considérations similaires s’appliquent en ce qui concerne la déclaration du consul roumain à Bruxelles (Belgique), datée du 20 novembre 2013, puisqu’il y est précisé que celle-ci a été établie à la demande de la mère du requérant, sans qu’il soit indiqué que des vérifications aient été menées par les services consulaires roumains lors de son établissement, et puisque cette déclaration est, en tout état de cause, antérieure à la période pertinente pour la résolution du présent litige. En outre, en l’absence de toute autre information, l’attestation du médecin roumain, qui contient des renseignements allant au-delà des simples constatations médicales et qui est donc susceptible de reprendre des informations données par la mère du requérant, suscite des doutes quant à l’indépendance réelle de son auteur, à l’instar de ce que fait valoir la Commission.

61      Sixièmement, en ce que le requérant renvoie vaguement à des billets d’avion et à des factures de carburant, d’une part, il suffit de constater que les billets d’avion établissent que sa mère a voyagé de Bruxelles à Bucarest le 13 juin 2019 et le 20 novembre 2020 et de Bucarest à Bruxelles le 8 janvier 2021 dans le cadre d’allers simples, ce qui n’est pas de nature à démontrer une quelconque permanence de ses séjours dans ces deux villes. D’autre part, les factures de carburant payées par le requérant n’établissent en rien que sa mère était avec lui lorsqu’il a réalisé ces paiements.

62      De plus, il convient de rappeler que la décision attaquée a été adoptée après que le requérant a informé la Commission que, contrairement à ce qu’il avait déclaré lors des différentes demandes qu’il avait formulées pour obtenir l’allocation pour sa mère en tant que personne assimilée à un enfant à charge, cette dernière semblait être propriétaire d’un appartement à Bucarest. C’est dans ce contexte que le PMO a considéré que, au regard, notamment, de cette nouvelle information, le lieu de résidence de la mère du requérant se trouvait en Roumanie. Dans la décision de rejet de la réclamation, l’AIPN a précisé que ce nouvel élément avait été apprécié conjointement avec d’autres éléments, tels que, par exemple, la nationalité de la mère du requérant, le fait qu’une pension était encore versée en Roumanie à cette dernière, ou encore le fait que la mère du requérant avait enregistré sa résidence dans un appartement situé en Roumanie, et au regard de l’absence d’éléments de preuve qui auraient attesté d’une vie quotidienne en Belgique.

63      Ainsi, contrairement à ce que semble prétendre le requérant, la décision attaquée n’est pas fondée sur le seul motif que sa mère possédait un appartement à Bucarest, mais repose sur la constatation que, dans le contexte décrit au point 62 ci-dessus, le requérant n’est pas parvenu à transmettre au PMO un faisceau de preuves de nature à démontrer que sa mère avait fixé sa résidence en Belgique.

64      Au regard de ce qui précède, il convient de constater que les éléments de preuve produits par le requérant, même pris conjointement, sont certes de nature à indiquer la présence ponctuelle de sa mère en Belgique à différentes reprises lors de la période pertinente ainsi que l’existence de liens avec ce pays, mais ne suffisent toutefois pas à démontrer qu’elle y demeurait de manière effective, avec l’intention de conférer à cette présence la continuité résultant d’une habitude de vie et du déroulement de rapports sociaux normaux, au sens de la jurisprudence citée au point 53 ci-dessus.

65      Par conséquent, il ne saurait être considéré que le PMO a commis une erreur d’appréciation en estimant que le requérant n’avait pas établi que le lieu de résidence de sa mère se situait en Belgique et qu’un tel lieu devait être regardé comme se trouvant en Roumanie.

66      Au regard de ce qui précède, le troisième moyen doit être écarté.

–       Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation de l’article 85 du statut

67      Le requérant fait valoir qu’il n’a pas omis intentionnellement de communiquer en temps utile au PMO les informations relatives au titre de propriété dont jouissait sa mère pour un appartement à Bucarest, puisqu’il n’en était pas au courant lorsqu’il a rempli la demande de renouvellement de l’allocation litigieuse en 2019 et qu’il y a remédié aussitôt ces faits portés à sa connaissance par l’OLAF. Par ailleurs, le requérant affirme qu’il ressort de la jurisprudence que le fait que sa mère possède un appartement en Roumanie n’était pas de nature à démontrer que le centre permanent des intérêts de celle-ci se situait dans ce pays. Par conséquent, il soutient que l’irrégularité qui en a résulté pour la période courant du 1er novembre 2019 au 31 octobre 2020 n’était pas suffisamment évidente pour qu’il puisse lui être reproché de ne pas l’avoir remarquée. En substance, il considère donc que les conditions prévues par l’article 85 du statut n’étaient pas remplies.

68      La Commission conteste l’argumentation du requérant. Elle rappelle que l’article 85 du statut permet de récupérer les sommes indûment perçues dans deux hypothèses : lorsque le bénéficiaire a eu connaissance de l’irrégularité du versement et lorsque cette irrégularité était si évidente qu’il ne pouvait manquer d’en avoir connaissance. En l’espèce, elle se fonde sur la seconde de ces hypothèses, en soulignant, d’une part, que les dispositions applicables étaient claires et, d’autre part, que le requérant était un fonctionnaire de grade AST 4 ayant déjà près de treize ans d’expérience lorsqu’il a transmis la demande d’allocation portant sur la période litigieuse. Elle estime qu’il aurait donc dû faire preuve d’un degré élevé de diligence.

69      Ainsi qu’il a été relevé au point 6 ci-dessus, il ressort de la décision attaquée que c’est au titre de l’article 85 du statut que l’ordre de recouvrement portant sur l’allocation versée au requérant au titre de l’allocation pour sa mère en tant que personne assimilée à un enfant à charge pour la période courant du 1er novembre 2019 au 31 octobre 2020 a été émis. En outre, dans la décision de rejet de la réclamation, d’une part, il était précisé qu’il ressortait clairement de la réglementation pertinente que le demandeur de l’allocation pour personne à charge était tenu de produire tous les documents pertinents et de les présenter à la Commission en ce qui concernait le statut de propriété de la personne pour laquelle l’allocation était demandée et que le formulaire qui était transmis à chaque demandeur par le PMO comprenait une question portant justement sur ce statut. À cet égard, les explications par lesquelles le requérant a cherché à faire valoir qu’il n’était pas au courant de ce que sa mère possédait un appartement à Bucarest n’ont pas été jugées convaincantes. D’autre part, il était observé que le requérant était un fonctionnaire très expérimenté et que son grade était relativement élevé lorsqu’il avait formé la demande litigieuse. Par ailleurs, il était également relevé, notamment, que, dans les nombreux échanges qu’il avait entretenus avec le PMO, le requérant s’était fréquemment appuyé sur les dispositions des DGE, prouvant ainsi qu’il connaissait les exigences qu’elles comportaient, notamment celles relatives à l’établissement du lieu de résidence de sa mère.

70      À cet égard, il convient de rappeler, à titre liminaire, qu’il ressort de l’article 85, premier alinéa, du statut que « [t]oute somme indûment perçue donne lieu à répétition si le bénéficiaire a eu connaissance de l’irrégularité du versement ou si celle-ci était si évidente qu’il ne pouvait manquer d’en avoir connaissance ».

71      La jurisprudence précise qu’un fonctionnaire bénéficiant d’une allocation, loin d’être dispensé de tout effort de réflexion ou de contrôle à l’égard du versement dont il bénéficie, est au contraire tenu à restitution dès qu’il s’agit d’un versement effectué à la suite d’une erreur qui n’échappe pas à un agent normalement diligent. À cet égard, il convient de tenir compte, dans chaque espèce, de la capacité de l’agent concerné à procéder aux vérifications nécessaires. Il doit également être rappelé que la diligence requise des agents de l’Union sur le fondement de l’article 85 du statut découle de ce que la situation dans laquelle se trouve une administration chargée d’assurer le paiement de milliers de traitements et d’allocations de tout genre ne saurait être comparée à celle de l’agent qui a un intérêt personnel à vérifier les paiements qui lui sont mensuellement versés et que, dès lors, il ne s’agit pas de savoir si l’erreur était ou non évidente pour l’administration, mais si elle l’était pour la partie requérante (voir arrêt du 23 mars 2022, ON/Commission, T‑730/20, non publié, EU:T:2022:155, point 21 et jurisprudence citée).

72      En l’espèce, il est constant que la Commission s’est fondée sur la seconde hypothèse prévue par l’article 85 du statut en considérant que le requérant s’était montré négligent lorsqu’il avait formé la demande visant à obtenir l’allocation pour sa mère en tant que personne assimilée à un enfant à charge, puisqu’il avait indiqué que celle-ci n’était propriétaire d’aucun bien immobilier, alors qu’elle possédait un appartement à Bucarest.

73      À ce sujet, il ressort de la jurisprudence que, parmi les éléments pris en considération par le juge de l’Union pour apprécier le caractère évident, ou non, pour l’intéressé, de l’erreur commise par l’administration, outre son niveau de responsabilité, son grade et son ancienneté, il y a lieu de prendre en compte le degré de clarté des dispositions statutaires définissant les conditions d’octroi des émoluments dus à l’intéressé ainsi que, le cas échéant, l’importance des évolutions intervenues dans sa situation personnelle ou familiale, lorsque le versement de la somme litigieuse est lié à l’appréciation, par l’administration, d’une telle situation (voir arrêt du 23 mars 2022, ON/Commission, T‑730/20, non publié, EU:T:2022:155, point 23 et jurisprudence citée).

74      Il ne saurait être déduit de la jurisprudence l’existence d’une prééminence générale d’un critère sur les autres. Il en ressort, au contraire, l’exigence d’une prise en considération de l’ensemble des éléments, les circonstances de chacune des espèces pouvant justifier une prise en considération plus importante de certains critères au regard d’autres (voir arrêt du 23 mars 2022, ON/Commission, T‑730/20, non publié, EU:T:2022:155, point 24 et jurisprudence citée).

75      En premier lieu, en ce qui concerne la clarté des dispositions applicables, il convient d’observer, tout d’abord, qu’il ressort de l’article 7 des DGE qu’il est tenu compte, dans l’évaluation des revenus de la personne pour laquelle l’assimilation à un enfant à charge est demandée, de la valeur locative de l’habitation dont cette dernière est propriétaire. Par ailleurs, ainsi que l’AIPN l’a indiqué à bon droit dans la décision de rejet de la réclamation, le formulaire que le demandeur de l’allocation pour enfant à charge est tenu de remettre au PMO comporte expressément une question portant sur le statut en matière de propriété de la personne qui fait l’objet de la demande.

76      Par conséquent, à supposer même que les allégations par lesquelles le requérant fait valoir qu’il n’avait pas connaissance du bien immobilier que sa mère possédait en Roumanie aient été exactes, il lui appartenait néanmoins de s’assurer que les informations qu’il communiquait au PMO à cet égard étaient correctes.

77      À cet égard, en ce qui concerne les allégations soulevées par le requérant pour la première fois au stade de la réplique, selon lesquelles sa mère souffrirait de troubles de la mémoire diagnostiqués le 26 février 2021, ce qui, selon lui, pourrait peut-être expliquer qu’elle ne lui ait pas spécifiquement indiqué qu’elle était propriétaire d’un appartement à Bucarest, il suffit de constater, d’une part, que ledit appartement avait été acquis par cette dernière en 1996 et, d’autre part, que la demande litigieuse a été présentée en 2019, de sorte qu’il convient d’écarter ces allégations sans qu’il soit même nécessaire de se prononcer sur leur recevabilité.

78      En second lieu, en ce qui concerne les éléments relatifs à l’appréciation de la capacité du fonctionnaire de procéder aux vérifications nécessaires concernant l’erreur en cause, il convient de rappeler, d’une part, que le requérant était un fonctionnaire de grade AST 4 lorsqu’il a formulé la demande litigieuse en 2019 et, d’autre part, qu’il travaillait au Conseil depuis le 1er décembre 2007.

79      Ainsi, le requérant disposait déjà de douze ans d’expérience au moment de la demande litigieuse.

80      Dès lors, étant donné que le requérant était un fonctionnaire très expérimenté, au sein du secrétariat général du Conseil, et compte tenu de la clarté des dispositions en cause en l’espèce, il y a lieu de conclure que l’erreur en cause n’échapperait pas à un fonctionnaire normalement diligent dans une situation similaire.

81      Dans ces conditions, le requérant n’a pas fait preuve de la diligence requise de la part des agents de l’Union, au sens de la jurisprudence citée au point 71 ci-dessus.

82      Au regard de ce qui précède, il convient de rejeter le quatrième moyen du recours et, dès lors, la demande en annulation dans son intégralité.

 Sur la demande tendant à la condamnation de la Commission au versement de l’allocation pour la mère du requérant en tant que personne assimilée à un enfant à charge

83      Par le troisième chef de conclusions, le requérant demande au Tribunal de condamner la Commission à verser l’allocation relative à l’assimilation de sa mère à un enfant à charge.

84      Certes, dans le cadre de la compétence de pleine juridiction qui lui est conférée à l’article 91, paragraphe 1, du statut, le juge de l’Union peut prononcer, le cas échéant, à l’encontre d’une institution une condamnation au versement d’une somme à laquelle la partie requérante a droit en vertu du statut ou d’un autre acte juridique (voir, en ce sens, arrêts du 18 décembre 2007, Weißenfels/Parlement, C‑135/06 P, EU:C:2007:812, point 68, et du 10 septembre 2015, Réexamen Missir Mamachi di Lusignano/Commission, C‑417/14 RX‑II, EU:C:2015:588, point 40).

85      Toutefois, en l’espèce, les conclusions en annulation de la décision attaquée ont été rejetées. Ainsi, le requérant n’a pas établi avoir droit à l’allocation relative à l’assimilation de sa mère à un enfant à charge, de sorte que ses conclusions tendant à obtenir le versement par la Commission d’une telle allocation doivent également être rejetées.

 Sur les demandes de production de documents

 Sur la demande de production des documents sur lesquels le PMO s’est appuyé pour rendre la décision du 21 novembre 2019

86      Le requérant demande que le Tribunal sollicite auprès de la Commission les documents sur lesquels le PMO s’est appuyé pour rendre la décision du 21 novembre 2019, par laquelle il a accordé au requérant, à titre provisoire, le renouvellement de l’allocation pour sa mère en tant que personne assimilée à un enfant à charge, sur la base des informations que ce dernier avait fournies et pour la période comprise entre le 1er novembre 2019 et le 31 octobre 2020.

87      À cet égard, il convient de rappeler que, ainsi qu’il ressort de l’article 90 et de l’article 92, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, c’est au Tribunal qu’il appartient d’apprécier l’utilité de mesures d’organisation de la procédure et de mesures d’instruction (voir arrêt du 28 novembre 2018, Le Pen/Parlement, T‑161/17, non publié, EU:T:2018:848, point 179 et jurisprudence citée).

88      En l’espèce, le Tribunal estime que les mesures sollicitées n’apparaissent ni pertinentes ni utiles pour la solution du litige. En effet, il est constant que la décision du 21 novembre 2019, par laquelle le PMO a considéré que la résidence de la mère du requérant se trouvait en Belgique, a été adoptée sur le fondement d’informations erronées transmises par le requérant. Ainsi que cela ressort du point 5 ci-dessus, c’est donc en se fondant, notamment, sur de nouvelles informations que la décision attaquée, qui réforme la décision du 21 novembre 2019, a été adoptée.

89      Il résulte de ce qui précède que les documents sur lesquels le PMO s’est fondé pour adopter la décision du 21 novembre 2019 ne sont pas pertinents dans le cadre du présent litige.

 Sur la demande de production de l’intégralité du texte de la réponse à la réclamation citée dans le courriel du PMO du 8 décembre 2020

90      Le requérant souligne que, dans un courriel du 8 décembre 2020, le PMO a expressément cité la réponse apportée à une réclamation dans une autre affaire dans laquelle se posait également la question de la détermination du lieu de résidence habituelle d’un individu. Par conséquent, il demande à ce que, par souci de clarté, le Tribunal sollicite auprès de la Commission la production de ladite réponse à cette réclamation.

91      À cet égard, et au regard de la jurisprudence citée au point 87 ci-dessus, le Tribunal considère que la transmission du document réclamé par le requérant n’est ni pertinente ni utile pour la solution du litige. En effet, le passage de la réclamation cité dans le courriel mentionné au point 90 consiste seulement en un rappel de jurisprudence visant à exposer, de manière abstraite, les principes applicables aux fins de déterminer le lieu de résidence d’un individu, sans qu’aucune analogie entre le cas d’espèce qui faisait l’objet de ladite réponse à une réclamation et la situation du requérant soit établie par le PMO.

 Sur la demande d’autorisation de compléter le dossier de l’affaire

92      Au stade de la réplique, le requérant fait valoir que, après avoir été révoqué de ses fonctions le 30 septembre 2021, il a perdu l’accès à ses anciens courriels professionnels et qu’il n’a pas été en mesure de présenter l’ensemble des éléments de preuve qu’il aurait voulu présenter avec la requête introduite le 4 novembre 2021 dans le cadre de la présente affaire. Par conséquent, il soutient avoir demandé à récupérer cet accès auprès du secrétariat général du Conseil et être dans l’attente de la prise d’une décision à cet égard. Celle-ci devait, selon lui, être rendue au plus tard le 7 août 2022. Il demande donc à pouvoir compléter le dossier de l’affaire, au titre de l’article 83, paragraphe 2, du règlement de procédure, après qu’un tel accès complet à son compte de messagerie électronique professionnelle lui aura été rendu, ainsi qu’à pouvoir utiliser les preuves ainsi obtenues de manière exhaustive.

93      En premier lieu, il convient de rappeler que l’article 83, paragraphe 2, du règlement de procédure prévoit, en substance, que les parties principales peuvent compléter le dossier de l’affaire sous certaines conditions lorsque le Tribunal a estimé qu’un second tour de mémoires n’était pas nécessaire.

94      Or, force est de constater que, en l’espèce, un tel second tour de mémoires s’est tenu et que l’article 83, paragraphe 2, du règlement de procédure n’a donc pas vocation à s’appliquer.

95      En second lieu, il convient de souligner que, en vertu de l’article 85, paragraphes 2 et 3, du règlement de procédure, les parties principales peuvent encore produire des preuves ou faire des offres de preuve soit dans la réplique et dans la duplique à l’appui de leur argumentation, soit, à titre exceptionnel, avant la clôture de la phase orale de la procédure ou avant la décision du Tribunal de statuer sans phase orale de la procédure, à condition que le retard dans la présentation de celles-ci soit justifié.

96      En l’espèce, force est toutefois de constater que le requérant n’indique pas sur quels documents en particulier porte sa demande ni quels sont les arguments qu’il entendrait en tirer.

97      Par conséquent, il y a lieu d’écarter la demande d’autorisation de compléter le dossier de l’affaire formulée par le requérant.

 Sur la demande d’injonction

98      Par son deuxième chef de conclusions, le requérant demande au Tribunal de condamner la Commission à déterminer la charge présumée d’entretien pour la période allant du 1er novembre 2020 au 30 septembre 2021 sur la base de la résidence de sa mère en Belgique.

99      Or, à cet égard, il suffit de rappeler que, dans le cadre du contrôle de légalité fondé sur l’article 91 du statut et l’article 270 TFUE, le Tribunal n’a pas compétence pour prononcer des injonctions à l’encontre des institutions, des organes et des organismes de l’Union (voir, en ce sens, ordonnance du 4 avril 2011, Marcuccio/Commission, T‑239/09 P, EU:T:2011:138, point 31 et jurisprudence citée).

100    Il s’ensuit qu’il y a lieu de rejeter le deuxième chef de conclusions pour cause d’incompétence du Tribunal à en connaître.

101    Au regard de l’ensemble de ce qui précède, il convient de rejeter le recours.

 Sur les dépens

102    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

103    Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      AL est condamné aux dépens.

da Silva Passos

Półtorak

Pynnä

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 mai 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.