Language of document : ECLI:EU:T:2020:594

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

9 décembre 2020 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne tridimensionnelle JC JEAN CALL Champagne PRESTIGE – Marques de l’Union européenne tridimensionnelles antérieures – Motifs relatifs de refus – Similitude des signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] – Absence d’atteinte à la renommée – Article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 (devenu article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001) »

Dans l’affaire T‑622/19,

Ace of spades Holdings LLC, établie à New York, New York (États-Unis), représentée par Me A. Gómez López, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

les autres parties à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Gerhard Ernst Krupp, demeurant à Munich (Allemagne),

Elmar Borrmann, demeurant à Reith (Autriche),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO du 26 juin 2019 (affaire R 3/2019-5), relative à une procédure d’opposition entre Ace of spades Holdings et MM. Krupp et Borrmann,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de M. D. Spielmann, président, Mme O. Spineanu‑Matei (rapporteure) et M. R. Mastroianni, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 16 septembre 2019,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 19 décembre 2019,

vu la mesure d’organisation de la procédure du 14 mai 2020 et les réponses de la requérante et de l’EUIPO déposées au greffe du Tribunal, respectivement, le 25 et le 16 juin 2020,

vu les observations de l’EUIPO sur la réponse de la requérante déposées au greffe du Tribunal le 13 juillet 2020,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 16 janvier 2017, le prédécesseur en droit de MM. Gerhard Ernst Krupp et Elmar Borrmann, Munich Accessories GmbH, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé, et pour laquelle les couleurs or, noire et, après l’intervention des instances de l’EUIPO, blanche ont été revendiquées, est le signe tridimensionnel JC JEAN CALL Champagne PRESTIGE suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, après la limitation intervenue au cours de la procédure devant l’EUIPO, de la classe 33 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Vins de provenance française à savoir Champagne ; en conformité avec les spécifications du cahier des charges de l’indication géographique protégée “Champagne” ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 2017/74, du 19 avril 2017.

5        Le 6 juin 2017, la requérante, Ace of spades Holdings LLC, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001), tel que modifié, à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur les marques antérieures suivantes :

–        la marque de l’Union européenne tridimensionnelle, enregistrée le 21 novembre 2008 sous le numéro 6538987, pour laquelle les couleurs dorée et noire ont été revendiquées et désignant les « vins d’appellation d’origine contrôlée Champagne » relevant de la classe 33. Cette marque (ci-après la « marque antérieure no 1 ») est reproduite ci-après :

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–        la marque de l’Union européenne tridimensionnelle, enregistrée le 5 mars 2014 sous le numéro 12019683, pour laquelle les couleurs dorée et noire ont été revendiquées et désignant notamment les « boissons alcooliques (à l’exclusion des bières), en particulier vins, vins effervescents et champagnes » relevant de la classe 33. Cette marque (ci-après la « marque antérieure no 2 ») est reproduite ci-après :

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–        la marque de l’Union européenne de type « autre marque » (ci-après la « marque antérieure no 3 »), reproduite ci-après et enregistrée le 17 décembre 2013 sous le numéro 12013801, pour laquelle la couleur or a été revendiquée et désignant notamment les « boissons alcooliques (à l’exclusion des bières), en particulier vins, vins effervescents et champagnes » relevant de la classe 33, avec la description suivante :

« La marque est une marque de position. Elle est composée d’étiquettes dorées à l’avant, à l’arrière et au goulot, ainsi que du dessin d’un as de pique au centre de la bouteille. Les lignes en pointillé représentent le contour de la bouteille afin de montrer la position du signe, et elles ne font pas partie de la marque ».

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7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement 2017/1001].

8        En juin 2018, MM. Krupp et Borrmann ont été inscrits comme étant les nouveaux demandeurs de l’enregistrement de la marque demandée.

9        Par décision du 31 octobre 2018, la division d’opposition a rejeté l’opposition dans son intégralité. En premier lieu, en substance, elle a estimé qu’il n’existait pas de risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, car les signes étaient manifestement différents. En second lieu, elle a considéré que, la similitude entre les signes étant une condition nécessaire pour que l’opposition fût accueillie au titre de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, l’opposition devait également être rejetée en ce qu’elle était fondée sur cette disposition, sans qu’il fût nécessaire d’examiner les autres conditions établies par celle-ci.

10      Le 2 janvier 2019, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition.

11      Par décision du 26 juin 2019 (ci-après la « décision attaquée »), la cinquième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours. En particulier, en premier lieu, elle a considéré que les marques antérieures nos 1 à 3 et la marque demandée n’étaient pas similaires et que, dès lors, il n’existait pas de risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, étant donné que l’une des conditions requises par cette disposition n’était pas remplie. En second lieu, elle a estimé que la renommée desdites marques antérieures n’avait pas été démontrée et que, dès lors, une autre condition requise par l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, n’était pas remplie. Elle a dès lors rejeté l’opposition fondée sur les dispositions susmentionnées.

 Conclusions des parties

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler ou infirmer la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

13      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

14      À titre liminaire, il y a lieu de relever que, compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 16 janvier 2017, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009, tel que modifié par le règlement (UE) 2015/2424 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015 (JO 2015, L 341, p. 21) (voir, en ce sens, arrêts du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C‑591/12 P, EU:C:2014:305, point 12, et du 18 juin 2020, Primart/EUIPO, C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 2 et jurisprudence citée).

15      Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites par la chambre de recours dans la décision attaquée, par la requérante dans l’argumentation soulevée et par l’EUIPO à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement 2017/1001 comme visant l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement no 207/2009, tel que modifié, d’une teneur identique.

16      Par ailleurs, si la chambre de recours a à tort cité, en substance, les conditions prévues par l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 avant sa modification par le règlement 2015/2424, et non la version modifiée de cette disposition, il convient de relever que, dans ces deux versions de cette disposition, les conditions examinées par la chambre de recours, relatives aux signes et à la renommée de la marque antérieure, sont d’une teneur identique.

17      Au soutien du recours, la requérante invoque, en substance, deux moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 et, le second, de l’article 8, paragraphe 5, du même règlement.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009

18      La requérante invoque la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, car il existerait un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent.

19      L’EUIPO conteste l’argumentation de la requérante.

20      À titre liminaire, il convient relever que, dans le mémoire en réponse, l’EUIPO a invité le Tribunal à examiner la recevabilité du premier moyen. Toutefois, dans sa réponse à la mesure d’organisation de la procédure du 16 juin 2020, l’EUIPO a indiqué, en substance, qu’il considérait désormais le premier moyen comme étant recevable.

21      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

22      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

23      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

24      Il doit être relevé que, s’agissant du public pertinent, la chambre de recours a estimé que le public pertinent était celui de l’Union européenne et était composé du grand public, qui ferait preuve d’un niveau d’attention moyen. Ces appréciations de la chambre de recours ne sont pas contestées par la requérante. L’EUIPO fait en revanche valoir que la chambre de recours aurait dû limiter le public pertinent aux consommateurs de champagne, seul le public commun aux produits visés par les signes en conflit devant être pris en considération lors de la comparaison desdits signes. Selon lui, le niveau d’attention de tels consommateurs est, ne serait-ce que légèrement, supérieur à la moyenne, le champagne étant comparativement plus cher que d’autres types de vin et n’étant généralement pas consommé avec la même régularité. À cet égard, il y a lieu de considérer que, comme la chambre de recours l’a estimé en substance, le champagne peut s’avérer très onéreux et rare, mais peut aussi être vendu à un prix relativement faible, et, dès lors, le niveau d’attention du consommateur visé, qui appartient au grand public intéressé par le champagne, peut varier d’un consommateur à l’autre. Néanmoins, c’est la perception du consommateur moyen du public pertinent qui doit être retenue. Partant, il y a lieu de considérer que le public pertinent, qui doit être compris comme étant le grand public de l’Union intéressé par le champagne, fera preuve d’un niveau d’attention moyen.

25      En outre, la chambre de recours a considéré que les produits visés par la marque demandée étaient identiques aux produits couverts par les marques antérieures, car ils étaient inclus dans chacune des listes de ces derniers produits. Cette appréciation de la chambre de recours n’est pas contestée par les parties et il n’y a pas lieu de la remettre en cause.

 Sur la comparaison des signes

26      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

27      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

28      Enfin, il y a lieu de rappeler que le caractère distinctif plus ou moins élevé des éléments communs à une marque demandée et à une marque antérieure est un des éléments pertinents dans le cadre de l’appréciation de la similitude des signes [voir arrêt du 8 juin 2017, AWG/EUIPO – Takko (Southern Territory 23°48’25”S), T‑6/16, non publié, EU:T:2017:383, point 30 et jurisprudence citée]. En effet, les éléments descriptifs, non distinctifs ou faiblement distinctifs d’une marque complexe ont généralement un poids moindre dans l’analyse de la similitude entre les signes que les éléments revêtus d’un caractère distinctif plus important, qui ont également une faculté plus grande de dominer l’impression d’ensemble produite par cette marque (voir, en ce sens, arrêt du 12 juin 2019, Hansson, C‑705/17, EU:C:2019:481, point 53 et jurisprudence citée).

29      À cet égard, afin de déterminer le caractère distinctif d’un élément d’une marque, il y a lieu d’apprécier l’aptitude plus ou moins grande de cet élément à contribuer à identifier les produits ou les services pour lesquels la marque a été enregistrée comme provenant d’une entreprise déterminée et, donc, à distinguer ces produits ou ces services de ceux d’autres entreprises. Lors de cette appréciation, il convient de prendre en considération notamment les qualités intrinsèques de l’élément en cause au regard de la question de savoir si celui-ci est ou non dénué de tout caractère descriptif des produits ou des services pour lesquels la marque a été enregistrée [arrêts du 13 juin 2006, Inex/OHMI – Wiseman (Représentation d’une peau de vache), T‑153/03, EU:T:2006:157, point 35, et du 12 juillet 2012, Winzer Pharma/OHMI – Alcon (BAÑOFTAL), T‑346/09, non publié, EU:T:2012:368, point 78].

30      En l’espèce, dans la décision attaquée, après avoir décrit les signes en conflit, la chambre de recours a examiné les éléments les composant, puis a déterminé leurs éventuels caractères distinctif, non distinctif ou dominant, avant de comparer lesdits signes sur les plans visuel, phonétique et conceptuel. Elle a estimé que certains desdits signes ne pouvaient pas être comparés sur le plan phonétique et étaient différents sur les plans visuel et conceptuel. Pour les autres signes, elle a estimé qu’ils étaient différents sur les trois plans de perception. Elle a conclu que les signes en conflit étaient globalement différents.

31      La requérante fait valoir que la chambre de recours a procédé à la comparaison des signes en conflit en prenant en compte seulement des aspects verbaux, alors que chacun de ces signes devait être considéré dans son ensemble. Selon elle, en estimant que la forme et les couleurs des bouteilles n’étaient pas distinctives, la chambre de recours a ignoré la protection conférée à celles-ci par les marques tridimensionnelles. En outre, les marques antérieures ne représenteraient pas la forme et les couleurs habituelles des bouteilles de champagne.

32      L’EUIPO conteste l’argumentation de la requérante. Selon lui, une simple comparaison des signes en conflit fait apparaître qu’une similitude ne peut exister qu’entre la marque demandée et la marque antérieure no 1, les autres marques antérieures présentant des différences évidentes par rapport à la marque demandée, notamment au regard des couleurs. Or, la marque antérieure no 1 et la marque demandée seraient différentes. Il soutient que, en effet, la chambre de recours a estimé à juste titre que la forme d’une bouteille sans épaulement s’évasant vers le bas, le bouchon recouvert d’une coiffe noire, l’étiquette comportant un élément figuratif au niveau du goulot de la bouteille, le film doré couvrant la totalité de la bouteille étaient dépourvus de caractère distinctif et étaient relégués à un rôle secondaire dans l’examen des éléments dominants des signes. En réponse à l’argumentation de la requérante, il fait valoir que ces éléments ne sauraient être protégés indépendamment d’autres éléments distinctifs. Il allègue par ailleurs que la requérante n’a pas réussi à réfuter les conclusions de la chambre de recours concernant les éléments distinctifs et dominants dans la marque antérieure no 1 et dans la marque demandée, à savoir, respectivement, d’une part, l’étiquette et l’élément figuratif en forme d’as de pique ou de pique, contenant une représentation fantaisiste de la lettre « a », et, d’autre part, les éléments verbaux « jean call » et « jc ».

33      À titre liminaire, il doit être constaté que, dans la mesure où la requérante conteste l’absence de prise en considération de la forme des bouteilles et n’avance une argumentation qu’eu égard aux marques tridimensionnelles antérieures, il doit être considéré que les appréciations de la chambre de recours ne sont pas contestées en ce qu’elles visent la marque antérieure no 3, qui n’est pas une marque tridimensionnelle.

–       Sur les éléments composant les signes en conflit

34      Concernant la marque antérieure no 1, la chambre de recours a qualifié de descriptifs les éléments verbaux « champagne », « 750 ml », « 12 % alc vol » et « brut ».

35      S’agissant des marques antérieures nos 1 et 2, la chambre de recours a estimé que la forme de la bouteille, sa couleur, la coiffe noire, le fait que soit apposé un logo sur le goulot ou au centre de la bouteille et, le cas échéant, l’effet brillant ne se différencieraient pas substantiellement des éléments de présentation typiques du marché pour l’emballage des produits couverts par lesdites marques. Elle a conclu que ces éléments n’avaient qu’une incidence limitée, voire aucune, sur l’impression d’ensemble produite par lesdites marques. En revanche, les éléments les plus distinctifs de celles-ci seraient l’élément figuratif en forme de pique, contenant ou non la lettre fantaisiste « a », en caractère majuscule, ainsi que, dans la marque antérieure no 1, les termes « armand de brignac », même si, en raison de leur taille, ils attireraient moins l’attention que l’as de pique. Ces éléments confèreraient auxdites marques, tout au plus, un caractère distinctif intrinsèque moyen. La chambre de recours a ajouté que lesdites marques ne présentaient pas d’éléments se distinguant clairement sur le plan visuel, à l’exception, dans la marque antérieure no 1, de l’étiquette centrale contenant l’as de pique.

36      Concernant la marque demandée, la chambre de recours a estimé que la forme de la bouteille en tant que telle, les étiquettes inférieure et supérieure, la coiffe noire sur le bouchon ainsi que la couleur appliquée n’étaient pas distinctives eu égard aux produits visés par cette marque. En outre, les éléments verbaux « champagne », « brut » et « prestige » seraient descriptifs ou élogieux. De plus, l’étiquette en forme de feuille et l’élément similaire apparaissant sur le goulot de la bouteille, à l’exception des lettres « jc » placées à l’intérieur de ces éléments, sembleraient être principalement décoratifs. La chambre de recours a estimé que, en revanche, constituaient des éléments distinctifs les éléments verbaux « jean call » et « jc ».

37      À cet égard, en premier lieu, il n’est pas contesté que, d’une part, dans la marque antérieure no 1, les éléments verbaux « champagne », « 750 ml », « 12 % alc vol » et « brut » et, d’autre part, dans la marque demandée, les mots « champagne », « brut » et « prestige » sont descriptifs ou élogieux des caractéristiques des produits en cause et, partant, dépourvus de caractère distinctif. Il n’y a pas lieu de remettre en cause ces appréciations de la chambre de recours.

38      En outre, il doit être considéré, à l’instar de la chambre de recours, que, dans la marque demandée, l’élément figuratif composé d’une étiquette et d’un motif d’ornements reliés, en forme de feuille, est principalement décoratif, et non rare, comme l’EUIPO l’avance. Il en va de même s’agissant de l’élément similaire apparaissant sur l’étiquette sur le goulot de la bouteille.

39      En deuxième lieu, il n’est pas contesté que constituent des éléments distinctifs, dans les marques antérieures nos 1 et 2, l’élément figuratif en forme de pique, contenant ou non la lettre fantaisiste « a », sur l’étiquette placée sur le goulot de la bouteille, ainsi que, dans la marque antérieure no 1, le même élément se trouvant au centre de la bouteille et les termes « armand de brignac ». Il n’y a pas lieu de remettre en cause ces appréciations de la chambre de recours. De plus, dans la marque antérieure no 1, les étiquettes placées sur le goulot et sur la partie inférieure de la bouteille, doivent être considérées comme ayant un caractère distinctif moyen.

40      Par ailleurs, il n’est pas contesté que les éléments verbaux « jean call » et « jc », ce dernier étant répété deux fois, constituent des éléments distinctifs dans la marque demandée. Il n’y a pas lieu de remettre en cause ces appréciations de la chambre de recours.

41      En troisième lieu, il importe de constater que, contrairement à ce que sous-entend l’EUIPO, la chambre de recours n’a considéré aucun des éléments composant les marques antérieures et la marque demandée comme étant dominant. Elle a en revanche qualifié les éléments mentionnés au point 39 ci-dessus d’éléments les plus distinctifs, voire de seuls éléments distinctifs des marques antérieures nos 1 et 2 aux motifs que la forme des bouteille, la couleur de celles-ci et la coiffe noire recouvrant la fermeture des bouteilles étaient dépourvus de caractère distinctif et n’auraient qu’une incidence limitée, voire aucune, sur l’impression d’ensemble produite par lesdites marques. Elle n’a toutefois pas qualifié ceux-ci d’éléments négligeables.

42      Plus précisément, premièrement, eu égard à la couleur des bouteilles dans les marques antérieures nos 1 et 2, la chambre de recours a estimé que l’utilisation de couleurs pouvait servir à distinguer, par exemple, les vins effervescents, blancs et rosés. S’agissant de la marque antérieure no 1, elle a néanmoins négligé, lors de l’appréciation du caractère distinctif des différents éléments, de prendre en considération l’aspect opaque et brillant du film coloré, qu’elle a ensuite, lors de la comparaison visuelle, qualifié d’élément de présentation courant. Or, si l’utilisation d’un tel élément ne peut être qualifiée d’extrêmement rare, il ressort des éléments produits tant par la requérante que par le prédécesseur en droit des autres parties à la procédure devant la chambre de recours que, contrairement aux affirmations de l’EUIPO, elle n’est pas habituelle.

43      Deuxièmement, concernant la forme des bouteilles représentées dans les marques antérieures nos 1 et 2, la chambre de recours a tout d’abord observé que « les consommateurs moyens n’[avaie]nt pas pour habitude de présumer l’origine des produits en se fondant sur leur forme ou celle de l’emballage, en l’absence de tout élément graphique ou textuel, et [qu’]il pourrait donc s’avérer plus difficile d’établir le caractère distinctif […] d’une telle marque tridimensionnelle que s’[il s’était agi] d’une marque verbale ou figurative ». Elle a ensuite estimé que ladite forme était d’utilisation courante pour les bouteilles de champagne et qu’elle serait considérée comme étant dépourvue de caractère distinctif eu égard à des boissons alcooliques, y compris les vins effervescents et les champagnes. Elle a en outre considéré que les marques antérieures nos 1 et 2 « représent[ai]ent clairement une forme plutôt ordinaire, voire commune, des bouteilles de champagne ou de vin », que lesdites « marques revendiqu[ai]ent la protection exclusive pour ces formes plutôt ordinaires » et qu’il était « manifestement nécessaire […] d’apprécier le caractère distinctif de chaque élément des marques antérieures ainsi que celui [de celles-ci,] prises dans leur ensemble ». Elle a enfin estimé qu’il n’y avait « aucune raison de conclure que les formes de bouteille et d’emballage des produits revendiquées permettr[aie]nt au public pertinent de distinguer immédiatement et avec certitude les produits antérieurs de ceux ayant une autre origine commerciale ».

44      À cet égard, l’EUIPO fait valoir que la forme de la bouteille est visiblement plus trapue dans la marque antérieure no 1 que dans la marque demandée. De plus, cette forme serait celle d’une bouteille sans épaulement s’évasant vers le bas, ce qui constituerait, comme la chambre de recours l’aurait considéré à juste titre, une caractéristique banale et ignorée, dans une large mesure, par le public pertinent. Force est cependant de constater que la chambre de recours n’a nullement distingué deux aspects dans la forme de la bouteille et l’a considérée dans sa totalité comme étant dépourvue de caractère distinctif.

45      Troisièmement, il y a lieu de relever que la chambre de recours a estimé que la forme de la bouteille, la couleur de celle-ci et la coiffe noire auraient une incidence limitée, voire aucune, sur l’impression d’ensemble produite par les marques antérieures nos 1 et 2, sans toutefois qualifier ces éléments de négligeables. Or, d’une part, même à supposer que ces éléments soient dépourvus de caractère distinctif ou faiblement distinctifs, il y a lieu de rappeler que, conformément à la jurisprudence citée aux points 26 et 27 ci-dessus, les marques doivent être considérées comme un tout et la comparaison des marques en cause doit être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci, sous réserve des éléments négligeables, car le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails. Dès lors, la chambre de recours ne pouvait pas conclure que les éléments susmentionnés n’auraient aucune incidence sur l’impression d’ensemble produite par lesdites marques antérieures. En effet, lors de la comparaison des signes, le faible caractère distinctif, voire l’absence de caractère distinctif d’un élément commun, qui n’est pas négligeable, ne saurait impliquer que la similitude découlant de cet élément commun ne devra pas être prise en compte.

46      D’autre part, même à supposer que la forme de la bouteille, la couleur et la coiffe noire soient dépourvues de caractère distinctif ou faiblement distinctives, la chambre de recours a à tort omis de prendre en considération leur combinaison, laquelle était susceptible de revêtir un caractère distinctif en elle-même. Contrairement aux allégations de l’EUIPO, l’argumentation de la requérante ne revient pas à soutenir que les éléments non distinctifs, qui seraient constitués par la forme et la couleur de la bouteille, devraient être protégés indépendamment d’autres éléments distinctifs. C’est précisément en prenant en considération les divers éléments de manière indépendante, sans tenir compte de l’éventuel caractère distinctif de leur combinaison, que la chambre de recours a conclu, à tort, que ces éléments n’auraient qu’une incidence limitée, voire aucune, sur l’impression d’ensemble produite par les marques antérieures nos 1 et 2. La combinaison de la forme de la bouteille, de sa couleur et de la coiffe noire constitue une partie desdites marques, qui, en tant que marques enregistrées, bénéficient d’une présomption de caractère distinctif.

47      Il peut d’ailleurs être relevé que la chambre de recours a affirmé que les marques antérieures nos 1 et 2 ne présentaient pas d’éléments se distinguant clairement sur le plan visuel, à l’exception de l’étiquette centrale contenant l’as de pique, représenté au centre de la bouteille de la marque antérieure no 1. Or, cela reviendrait à considérer que la marque antérieure no 2 ne présente aucun élément se distinguant sur le plan visuel, alors qu’il s’agit d’une marque tridimensionnelle enregistrée.

48      De surcroît, la combinaison de la forme de la bouteille, de sa couleur et de la coiffe noire n’apparaît pas comme étant habituelle, en particulier lorsque la couleur est celle d’un film coloré brillant opaque, comme dans la marque antérieure no 1. À cet égard, l’EUIPO prétend que les conclusions de la chambre de recours selon lesquelles les marques antérieures représentent la forme et les couleurs habituelles des bouteilles de champagne sont fondées sur les éléments de preuve présentés par les parties. Toutefois, il ressort de ces éléments que la combinaison d’une bouteille recouverte d’un film coloré brillant opaque et d’une coiffe noire n’est aucunement habituelle et, que, si la couleur de la marque antérieure no 1 est prise en considération, un seul exemple, à l’exception de ceux pouvant renvoyer auxdites marques, correspond à une combinaison similaire, sans qu’il puisse d’ailleurs être affirmé qu’il ne s’agit pas de la représentation de la marque antérieure no 1.

49      Il en découle que les marques antérieures nos 1 et 2 doivent être considérées dans leur ensemble, sans que, ainsi que la chambre de recours l’a retenu à juste titre, certains éléments puissent être considérés comme étant dominants ou être qualifiés de négligeables. Il en va de même s’agissant de la marque demandée, dans la mesure où la chambre de recours a estimé que la forme de la bouteille, la couleur de celle-ci et la coiffe noire ne constituaient pas des éléments distinctifs, sans toutefois les qualifier de négligeables. En effet, ces éléments ne sauraient être exclus de la comparaison des signes en conflit ni n’avoir aucune incidence lors de cette comparaison, pour les motifs exposés aux points 45 et 46 ci-dessus et, comme indiqué au point 48 ci-dessus, en ce que la combinaison d’une bouteille recouverte d’un film coloré brillant opaque, en particulier de couleur dorée, et d’une coiffe noire n’est aucunement habituelle.

–       Sur la comparaison visuelle

50      Sur le plan visuel, après avoir relevé des similitudes quant aux éléments des signes en conflit considérés comme étant dépourvus de caractère distinctif, la chambre de recours a estimé que lesdits signes créaient une impression visuelle différente et n’étaient pas similaires, car leurs éléments distinctifs étaient totalement différents.

51      La requérante fait valoir que les signes en conflit ont en commun la forme, la couleur ainsi que le logo des bouteilles et qu’ils sont similaires sur le plan visuel.

52      L’EUIPO conteste l’argumentation de la requérante. Il fait valoir que la marque antérieure no 1 et la marque demandée ont en commun les éléments considérés par la chambre de recours comme étant dépourvus de caractère distinctif et diffèrent par plusieurs éléments, à savoir la forme de la bouteille, visiblement plus trapue dans la marque antérieure, la partie intermédiaire entre le corps de la bouteille et le bouchon ainsi que l’étiquette fortement décorée de la marque demandée. Il prétend que la requérante n’a pas avancé d’arguments afin de contester que les différences visuelles dans les éléments dominants des signes l’emportent sur les similitudes de ceux-ci, qui résultent de l’inclusion d’éléments dépourvus de caractère distinctif ou faiblement distinctifs.

53      À titre liminaire, il doit être rappelé que la chambre de recours n’a pas estimé, à juste titre, que certains éléments des signes en conflit étaient dominants.

54      Comme la chambre de recours l’a retenu, en substance, d’une part, la marque antérieure no 1 et la marque demandée se différencient par les éléments figurant sur le goulot des deux bouteilles ainsi qu’en raison de leurs éléments verbaux distinctifs respectifs et du pique placé au centre de la bouteille dans la marque antérieure. D’autre part, la marque antérieure no 2 et la marque demandée se différencient du fait de la présence d’éléments verbaux distinctifs dans la marque demandée. Il peut être ajouté que la marque antérieure no 1 et la marque demandée comportent des éléments verbaux descriptifs différents et que l’aspect brillant du film coloré opaque recouvrant la bouteille dans la marque demandée n’existe pas dans la marque antérieure no 2.

55      En revanche, il doit être considéré, comme l’a fait la chambre de recours, que les marques antérieures nos 1 et 2 et la marque demandée présentent des formes arrondies globalement similaires et que la marque antérieure no 1 et la marque demandée ont en commun une coiffe noire et, recouvrant la bouteille, un film coloré brillant opaque, dont la couleur est similaire, ainsi que la chambre de recours l’a mentionné.

56      Force est de constater que, aux fins de leur comparaison visuelle, la chambre de recours a, à bon droit, pris en considération les différents éléments des marques antérieures nos 1 et 2 et de la marque demandée et a relevé, en substance, sans commettre d’erreur, tant leurs différences que leurs similitudes.

57      Néanmoins, ce qui a conduit la chambre de recours à conclure que les marques antérieures nos 1 et 2, d’une part, et la marque demandée, d’autre part, étaient globalement différentes est qu’elle n’a retenu que leurs différences, en omettant de prendre en considération lesdites marques dans leur ensemble lors de l’appréciation globale de leur similitude. Sa conclusion est ainsi entachée d’une erreur d’appréciation, car elle est fondée sur la prémisse erronée que les éléments communs supposés dépourvus de caractère distinctif desdites marques n’auraient, quel que soit leur nombre et leur degré de similitude et bien qu’ils ne soient pas qualifiés de négligeables, aucune influence sur l’impression d’ensemble produite par ces marques. Or, même à supposer que ces éléments soient dépourvus de caractère distinctif, la chambre de recours ne pouvait pas écarter les points de similitude qu’ils peuvent engendrer et conclure à une différence visuelle globale des marques susmentionnées. Elle aurait dû conclure à leur similitude visuelle globale. La même conclusion s’imposait à supposer que la chambre de recours ait considéré, comme elle l’a évoqué, que lesdits éléments avaient une incidence limitée sur l’impression d’ensemble produite par lesdites marques. Elle aurait néanmoins pu moduler le degré de similitude visuelle globale de celles-ci, en prenant en considération le nombre de ces éléments communs, eu égard au nombre d’éléments composant les marques comparées, ainsi que le caractère plus ou moins inhabituel de leur combinaison.

58      Partant, il convient de conclure que la chambre de recours a conclu à tort à une impression visuelle globalement différente des marques antérieures nos 1 et 2 et de la marque demandée.

–       Sur la comparaison phonétique

59      Sur le plan phonétique, la chambre de recours a estimé que la marque antérieure no 1 et la marque demandée n’étaient pas similaires, du fait de la prononciation différente, d’une part, pour la marque antérieure no 1, de la lettre « a » ainsi que des mots « armand de brignac », et, d’autre part, pour la marque demandée, des éléments « jean call » et « jc ». Elle a considéré que, la marque antérieure no 2 ne comportant pas d’élément verbal, elle ne serait pas prononcée, ce qui impliquait qu’aucune comparaison phonétique n’était possible entre cette marque et la marque demandée. Ces appréciations de la chambre de recours ne sont pas contestées par les parties et il n’y a pas lieu de les remettre en cause.

–       Sur la comparaison conceptuelle

60      Sur le plan conceptuel, la chambre de recours a estimé que les éléments distinctifs des marques antérieures nos 1 et 2 et ceux de la marque demandée évoquaient des notions différentes, tandis que les éléments communs aux signes en conflit étaient des éléments descriptifs ou dépourvus de caractère distinctif qui ne permettaient pas dès lors d’attribuer auxdits signes une similitude sur le plan conceptuel. Il doit être constaté, à l’instar de l’EUIPO, que la requérante ne conteste pas ces appréciations de la chambre de recours. Il n’y a pas lieu de les remettre en cause.

 Sur le risque de confusion

61      La requérante estime que la chambre de recours a à tort exclu l’existence d’un risque de confusion.

62      L’EUIPO conteste l’argumentation de la requérante, en faisant valoir que les signes en conflit sont différents sur chacun des plans de perception et, partant, globalement différents.

63      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a estimé, en substance, que, les signes en conflit n’étant pas similaires, l’une des conditions nécessaires établies à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 n’était pas remplie et il n’existait pas de risque de confusion au sens de cette disposition.

64      À cet égard, il doit être constaté que, dans la mesure où la chambre de recours a considéré à tort que les marques antérieures nos 1 et 2 et la marque demandée étaient différentes sur le plan visuel et, dès lors, sur les trois plans de perception, à savoir visuel, phonétique et conceptuel, elle a conclu à tort qu’elles étaient globalement différentes et que l’une des conditions établies à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 n’était pas remplie. En effet, eu égard à la similitude, à tout le moins, desdites marques sur le plan visuel, la chambre de recours aurait dû procéder à une appréciation globale du risque de confusion, en prenant en considération l’ensemble des facteurs pertinents (voir, en ce sens, arrêt du 4 mars 2020, EUIPO/Equivalenza Manufactory, C‑328/18 P, EU:C:2020:156, points 75 et 76), ainsi que l’a admis l’EUIPO dans sa réponse du 16 juin 2020 à la suite de la mesure d’organisation de la procédure. Dans ce contexte, elle aurait également dû prendre en considération le degré de similitude visuelle des signes en cause (voir point 57 ci-dessus).

65      Partant, il convient de considérer que la chambre de recours a conclu à tort qu’une condition prévue à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 n’était pas remplie et a à tort exclu l’existence d’un risque de confusion au sens de cette disposition, sans procéder à une appréciation globale dudit risque, en violation de ladite disposition. Dès lors, le premier moyen doit être accueilli et la décision attaquée annulée dans la mesure où la chambre de recours a rejeté le recours de la requérante et l’opposition en ce qu’elle était fondée sur l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009

66      La requérante invoque la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, en ce que la chambre de recours n’aurait pas tenu compte des éléments de preuve d’usage qu’elle a produits.

67      L’EUIPO conteste l’argumentation de la requérante.

68      Aux termes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure enregistrée au sens du paragraphe 2, la marque demandée est refusée à l’enregistrement si elle est identique ou similaire à une marque antérieure, indépendamment du fait que les produits ou services pour lesquels elle est demandée sont identiques, similaires ou non similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque cette marque antérieure est une marque de l’Union européenne qui jouit d’une renommée dans l’Union ou une marque nationale qui jouit d’une renommée dans l’État membre concerné, et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de cette marque antérieure ou leur porterait préjudice.

69      La protection élargie accordée à la marque antérieure par l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 présuppose donc la réunion de plusieurs conditions. Premièrement, la marque antérieure prétendument renommée doit être enregistrée. Deuxièmement, cette dernière et celle dont l’enregistrement est demandé doivent être identiques ou similaires. Troisièmement, elle doit jouir d’une renommée dans l’Union, dans le cas d’une marque de l’Union européenne antérieure, ou dans l’État membre concerné, dans le cas d’une marque nationale antérieure. Quatrièmement, l’usage sans juste motif de la marque demandée doit conduire au risque qu’un profit puisse être indûment tiré du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’un préjudice puisse être porté au caractère distinctif ou à la renommée de la marque antérieure. Ces conditions étant cumulatives, l’absence de l’une d’entre elles suffit à rendre inapplicable ladite disposition [arrêt du 22 mars 2007, Sigla/OHMI – Elleni Holding (VIPS), T‑215/03, EU:T:2007:93, points 34 et 35].

70      L’existence des atteintes constituées par le préjudice porté au caractère distinctif ou à la renommée de la marque antérieure doit être appréciée eu égard au consommateur moyen des produits ou des services pour lesquels cette marque est enregistrée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. En revanche, l’existence de l’atteinte constituée par le profit indûment tiré du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure, dans la mesure où ce qui est prohibé est l’avantage tiré de cette marque par le titulaire de la marque postérieure, doit être appréciée eu égard au consommateur moyen des produits ou des services pour lesquels la marque postérieure est enregistrée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé (voir, par analogie, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, points 35 et 36).

71      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a tout d’abord indiqué, en substance, que la conclusion selon laquelle les signes en conflit étaient différents valait aussi pour l’opposition en ce qu’elle était fondée sur l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009. Elle a néanmoins ensuite examiné ladite opposition, dans la mesure où les signes en conflit présenteraient une similitude faible ou légère, fondée sur des éléments banals, tels que la forme commune des bouteilles de champagne ou de vin effervescents et les couleurs utilisées.

72      Ensuite, après avoir mentionné les éléments apportés par la requérante, regroupés dans des annexes numérotées de 1 à 8, afin de prouver la renommée des marques antérieures dans l’Union, la chambre de recours a estimé que les éléments de preuve présentés se limitaient, pour la plupart, au champagne et que le public concerné par les produits couverts par les marques antérieures était le grand public.

73      Enfin, la chambre de recours a indiqué que le degré de connaissance requis pour qu’une marque soit qualifiée de renommée devait être considéré comme atteint lorsque la marque en cause était connue d’une partie significative du public concerné par cette marque. Elle a précisé que, dans l’examen de cette condition, il convenait de prendre en considération tous les éléments pertinents en cause, à savoir, notamment, la part de marché détenue par ladite marque, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de son usage ainsi que l’importance des investissements réalisés par le titulaire pour la promouvoir, sans qu’il fût exigé que ladite marque fût connue d’un pourcentage déterminé du public ainsi défini ou que sa renommée s’étendît à la totalité du territoire concerné, dès lors que la renommée existait dans une partie substantielle de celui-ci. Elle a estimé que les éléments produits par la requérante ne permettaient pas de satisfaire à la condition susmentionnée.

74      En effet, premièrement, il ressortirait des éléments produits par la requérante que la marque Armand de Brignac « est reconnue et comprise par seulement 1 % de la population » et que cette affirmation de la requérante renvoie à la marque sous laquelle sont commercialisés ses produits, prise dans son ensemble.

75      Deuxièmement, la part de marché des marques antérieures serait inconnue en l’absence de données fournies par la requérante. Celle-ci n’aurait, par exemple, pas présenté de factures ou d’autres documents commerciaux susceptibles de fournir des indications relatives à l’endroit exact où elle aurait utilisé ses marques antérieures, aux produits sur lesquels elles auraient été apposées et aux quantités desdits produits. Il serait impossible de tirer des documents fournis des informations solides quant à l’étendue de l’usage des marques antérieures et aucun chiffre d’affaires ni aucune donnée publicitaire ne seraient indiqués eu égard à celles-ci. Or, la renommée ne pourrait pas être démontrée par des probabilités ou des présomptions.

76      Troisièmement, il ressortirait des éléments produits par la requérante qu’elle a indéniablement reçu des éloges et des critiques très positives, notamment eu égard aux champagnes, sans que ces éloges suffisent à donner une idée claire de l’étendue, de l’intensité et de la durée de l’usage des marques antérieures, ni à déterminer si, au fil du temps, l’usage de celles-ci au sein de l’Union avait été substantiel. Selon la chambre de recours, ces éloges peuvent provenir de professionnels du secteur du vin, alors que le public pertinent est le grand public. Les champagnes de la requérante sembleraient être renommés dans une petite partie très exclusive du marché du champagne, ce qui ne signifierait pas pour autant que les marques antérieures auraient été reconnues par une partie significative du public pertinent.

77      Quatrièmement, la requérante n’aurait pas fourni d’informations sur une étude de marché concernant la reconnaissance des marques antérieures par le public pertinent, les prétendues campagnes publicitaires, la stratégie de marketing ainsi que leur portée et leurs résultats. En outre, les représentations des marques antérieures feraient défaut dans plusieurs des éléments produits et le degré de connaissance du public pertinent à l’égard desdites marques serait probablement encore plus faible que celle indiquée pour la marque Armand de Brignac (voir point 74 ci-dessus). De plus, la reconnaissance d’un signe verbal comme Armand de Brignac ne saurait être automatiquement extrapolée aux marques antérieures et, bien que l’une de celles-ci contienne l’élément verbal « armand de brignac », la reconnaissance suffisante de celui-ci n’aurait pas non plus été prouvée par les éléments fournis.

78      La chambre de recours a conclu que, la preuve de la renommée des marques antérieures n’ayant pas été apportée, une condition nécessaire au titre de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 n’était pas remplie. Elle a rejeté l’opposition fondée sur cette disposition.

79      À cet égard, en premier lieu, la requérante relève que la chambre de recours a affirmé qu’il ne saurait être exigé que la marque dont la renommée était invoquée fût connue d’un pourcentage donné du public. Par conséquent, il ne serait pas possible d’exclure une renommée pour les marques Armand de Brignac pour la seule raison que seulement 1 % de la population reconnaît la marque. Il doit être relevé, à l’instar de l’EUIPO, que la chambre de recours n’a pas fixé un seuil minimal de connaissance des marques antérieures et n’a pas fondé sa conclusion de l’absence de preuve de leur renommée sur le seul pourcentage susmentionné, mais sur un ensemble d’éléments (voir points 73 à 77 ci-dessus). En outre, lorsqu’il s’agit d’apprécier la renommée dont jouit une marque dans l’Union, peut être pris en considération le pourcentage du public concerné connaissant ladite marque, mais non celui de la population en général.

80      En deuxième lieu, la requérante allègue que la chambre de recours n’a pas tenu compte de l’annexe 2, intitulée par la chambre de recours « Présentation de la marque », se contentant d’indiquer que les représentations des marques antérieures y faisaient défaut. Il suffit de constater à cet égard que les marques antérieures ne sont ni représentées ni même mentionnées dans ladite annexe et que la requérante n’allègue pas que l’affirmation de la chambre de recours est erronée.

81      En troisième lieu, la requérante fait valoir que la chambre de recours lui a à tort reproché de ne pas avoir fourni certains documents, en prétendant ensuite qu’aucune renommée n’avait été prouvée de ce fait. Elle aurait démontré, par l’annexe 2 (voir point 80 ci-dessus) et l’annexe 3, intitulée par la chambre de recours « Publicité pour le champagne dans un dossier de revues », que sa marque antérieure s’était vue attribuer une note de 98 points par un célèbre critique espagnol et qu’elle avait été classée en première place lors d’un test de dégustation à l’aveugle de 1 000 champagnes, réalisé par la seule publication internationale existant en matière de champagne. En outre, la chambre de recours aurait conclu que les champagnes de la requérante avaient reçu des éloges particulièrement positifs et étaient susceptibles de figurer parmi les champagnes de la plus grande qualité et les plus appréciés des professionnels du secteur du vin.

82      Si la chambre de recours a cité des exemples de documents et a indiqué le type de données pertinentes que la requérante aurait pu fournir afin de démontrer la renommée des marques antérieures alléguée, il était cependant loisible à la requérante d’apporter d’autres types de documents, à la condition qu’ils contiennent de telles données. Or, il ressort des éléments qu’elle a produits que les informations quant à une note attribuée à une marque, à savoir Armand de Brignac, qui de surcroît, contrairement à ce que sous-entend la requérante, n’est pas l’une des marques antérieures, et quant à un classement à la suite d’un test de dégustation ont trait à la qualité du produit commercialisé et ne sont pas de nature à démontrer que les marques antérieures jouissent d’une renommée dans l’Union. Il en est de même des éloges, mentionnés par la requérante comme ayant été soulignés par la chambre de recours. Le fait que le test de dégustation susmentionné a été réalisé à l’aveugle tend d’ailleurs à démontrer qu’aucune des marques antérieures n’a contribué au résultat du classement indiqué, lequel ne saurait dès lors permettre d’indiquer une reconnaissance d’une de ces marques par le public pertinent.

83      En quatrième lieu, la requérante soutient que la chambre de recours s’est abstenue à tort de prendre en compte l’annexe 6, intitulée par la chambre de recours « Informations sur le produit concernant “The World’s Most Admired Champagne Brands” (“Les marques de champagne les plus appréciées au monde”) ». Selon elle, l’article qu’elle contient comporte des images de bouteilles Armand de Brignac montrant leur forme distinctive ainsi que des références de couleurs de ces bouteilles. Il fournirait en outre des informations quant à la durée de l’usage, qui serait intensif depuis 2006, et à l’étendue de l’usage, en révélant un usage par « une grande partie de l’élite de l’industrie musicale, une partie des acteurs, des top-modèles et des stars du football ». Tout d’abord, il doit être considéré que le fait que l’article en question, daté de 2015, comporte des images de bouteilles et la mention de l’année de lancement de la marque Armand de Brignac ne permet pas de donner des indications quant à l’usage depuis 2006 de cette marque, qui, en tout état de cause, ne figure pas parmi les marques antérieures nos 1 à 3. Ensuite, l’image de bouteilles figurant dans l’article ne permet pas d’identifier l’une desdites marques antérieures. Enfin, il ne ressort du texte de l’article en question aucune information concernant la reconnaissance d’une desdites marques antérieures par le public pertinent, de surcroît depuis 2006.

84      En cinquième lieu, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir, après avoir confirmé la renommée du champagne Armand de Brignac, nié la renommée des marques antérieures, notamment tridimensionnelles, alors qu’il s’agirait du seul format permettant de vendre ce produit. À cet égard, il y a lieu de relever que la chambre de recours a précisé que le champagne de la requérante « sembl[ai]t être renommé dans une petite partie très exclusive du marché du champagne », mais n’a pas estimé que la reconnaissance de l’élément verbal « armand de brignac » avait été prouvée. De plus, comme la chambre de recours l’a relevé à juste titre, même à supposer qu’un produit soit renommé sous le nom Armand de Brignac, il ne saurait en être déduit la preuve de la renommée des marques antérieures.

85      En sixième lieu, la requérante prétend que, même si les marques sont renommées dans un segment très exclusif du marché, cela ne signifie pas qu’elles ne peuvent pas jouir d’une renommée au sein du public pertinent ou du grand public. Il convient de constater que la chambre de recours a mentionné une possible renommée du produit, et non des marques antérieures, dans une petite partie très exclusive du marché du champagne. De plus, un produit peut certes être acheté, notamment en raison d’un coût élevé, par une partie réduite du public pertinent, tout en étant commercialisé sous une marque ayant une renommée, au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, à l’égard d’une partie significative du public pertinent. Il n’en demeure pas moins qu’une telle renommée, qui correspond à un degré de connaissance de la marque antérieure par une partie significative du public concerné par les produits ou services couverts par cette marque, doit être prouvée (voir, par analogie, arrêt du 14 septembre 1999, General Motors, C‑375/97, EU:C:1999:408, points 21 à 26). Or, la renommée d’une marque dans une partie très exclusive du marché du champagne et une connaissance de cette marque par une partie significative du public concerné par le champagne constituent des affirmations antagonistes.

86      Il découle de tout ce qui précède que les arguments de la requérante ne sauraient remettre en cause la conclusion de la chambre de recours selon laquelle il n’a pas été établi que les marques antérieures jouissaient d’une renommée dans l’Union. Partant, le second moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, doit être rejeté.

 Conclusion sur l’issue du recours

87      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de faire partiellement droit au premier chef de conclusions en ce qu’il tend à l’annulation de la décision attaquée, dans la mesure où ladite décision est entachée d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 et doit être annulée en ce que la chambre de recours a rejeté le recours de la requérante et l’opposition fondée sur la disposition susmentionnée. En revanche, il y a lieu de rejeter pour le surplus ce chef de conclusions, en l’absence de violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009.

88      Par ailleurs, dans sa réponse à la mesure d’organisation de la procédure du 25 juin 2020, la requérante a précisé que, par son premier chef de conclusions, elle demandait également la réformation de la décision attaquée. À cet égard, il y a lieu de rappeler que le pouvoir de réformation, reconnu au Tribunal en vertu de l’article 72, paragraphe 3, du règlement 2017/1001, n’a pas pour effet de conférer à celui-ci le pouvoir de procéder à une appréciation sur laquelle la chambre de recours n’a pas encore pris position. L’exercice du pouvoir de réformation doit, par conséquent, en principe, être limité aux situations dans lesquelles le Tribunal, après avoir contrôlé l’appréciation portée par ladite chambre, est en mesure de déterminer, sur la base des éléments de fait et de droit tels qu’ils sont établis, la décision que la chambre de recours était tenue de prendre (arrêt du 5 juillet 2011, Edwin/OHMI, C‑263/09 P, EU:C:2011:452, point 72).

89      En l’espèce, force est de constater que les conditions pour l’exercice du pouvoir de réformation du Tribunal ne sont pas réunies. En effet, la chambre de recours ayant conclu à tort à l’absence de similitude des signes en conflit, elle n’a pas procédé à l’appréciation globale du risque de confusion. Le Tribunal n’a dès lors pas le pouvoir de procéder à une telle appréciation et de se prononcer sur l’existence ou l’absence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009. Partant, il y a lieu de rejeter le premier chef de conclusions de la requérante en ce qu’il tend à la réformation de la décision attaquée.

 Sur les dépens

90      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Par ailleurs, aux termes de l’article 134, paragraphe 2, du règlement de procédure, si plusieurs parties succombent, le Tribunal décide du partage des dépens.

91      En l’espèce, la requérante et l’EUIPO ont partiellement succombé. Partant, il y a lieu d’ordonner que chaque partie supporte ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 26 juin 2019 (affaire R 3/2019-5) est annulée, dans la mesure où elle a rejeté le recours d’Ace of spades Holdings LLC et l’opposition fondée sur l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.


3)      Chaque partie supportera ses propres dépens.

Spielmann

Spineanu-Matei

Mastroianni

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 décembre 2020.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.