Language of document : ECLI:EU:T:2006:368

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

30 novembre 2006 (*)

« Rémunération – Indemnités de dépaysement et d’installation – Conditions prévues à l’article 4, paragraphe 1, sous a), et à l’article 5, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut – Notion de ‘services effectués pour un autre État’ – Récupération de l’indu »

Dans l’affaire T‑379/04,

J, agent temporaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles (Belgique), représentée par Me C. Forte, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. J. Currall et Mme M. Velardo, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision de la Commission du 10 juin 2004 rejetant explicitement les réclamations de la requérante, ainsi que de la décision de la Commission du 31 octobre 2003 qui lui refuse le bénéfice des indemnités de dépaysement et d’installation prévues, respectivement, aux articles 4 et 5 de l’annexe VII du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, et du 10 décembre 2003, qui ordonne le remboursement des sommes reçues à ce titre,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

composé de MM. M. Jaeger, président, Mme V. Tiili et M. O. Czúcz, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 2 février 2006,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

1        Le statut des fonctionnaires des Communautés européennes dans sa rédaction applicable à la présente espèce (ci-après le « statut ») prévoit à l’article 4, paragraphe 1, de l’annexe VII :

« L’indemnité de dépaysement égale à 16 % du montant total du traitement de base ainsi que de l’allocation de foyer et de l’allocation pour enfant à charge versées au fonctionnaire est accordée :

a)      au fonctionnaire :

–        qui n’a pas et n’a jamais eu la nationalité de l’État sur le territoire duquel est situé le lieu de son affectation,

et

–        qui n’a pas, de façon habituelle, pendant la période de cinq années expirant six mois avant son entrée en fonctions, habité ou exercé son activité professionnelle principale sur le territoire européen dudit État. Pour l’application de cette disposition, les situations résultant de services effectués pour un autre État ou une organisation internationale ne sont pas à prendre en considération.

[…] »

2        L’article 5, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut énonce :

« Une indemnité d’installation égale à deux mois de traitement de base, s’il s’agit d’un fonctionnaire qui a droit à l’allocation de foyer, ou égale à un mois de traitement de base, s’il s’agit d’un fonctionnaire n’ayant pas droit à cette allocation, est due au fonctionnaire titulaire qui remplit les conditions pour bénéficier de l’indemnité de dépaysement ou qui justifie avoir été tenu de changer de résidence pour satisfaire aux obligations de l’article 20 du statut [...] »

3        Quant à la répétition de l’indu, l’article 85 du statut précise :

« Toute somme indûment perçue donne lieu à répétition si le bénéficiaire a eu connaissance de l’irrégularité du versement ou si celle-ci était si évidente qu’il ne pouvait manquer d’en avoir connaissance [...] »

 Faits à l’origine du recours

4        En 1986, la requérante a été nommée chercheuse au Consiglio nazionale delle richerche (Conseil national de la recherche italien, ci-après le « CNR »).

5        En mars 1993, la requérante a été détachée à sa demande auprès du bureau de liaison du CNR à Bruxelles. Au cours des dix années suivantes, elle a résidé à Bruxelles sans interruption.

6        Le 1er septembre 2003, la requérante a été mise en disponibilité par son employeur pour une période de cinq ans (du 1er septembre 2003 au 31 août 2008) et a été simultanément engagée comme agent temporaire auprès de la direction générale (DG) « Recherche » de la Commission à Bruxelles.

7        Le 8 septembre 2003, la requérante a été convoquée par la Commission afin de déterminer ses droits statutaires. À cette occasion, elle a remis une copie de son curriculum vitae, de son passeport de service délivré par le ministère des Affaires étrangères italien et de sa carte d’identité spéciale délivrée par les autorités belges ainsi que les autres pièces demandées par la Commission pour la détermination de ses droits. Ce même jour, elle a reçu du bureau liquidateur une fiche contenant une liste de ses droits tels que provisoirement fixés sur la base des informations qu’elle avait communiquées. À la suite de cette réunion, la Commission lui a accordé, à titre provisoire, les indemnités de dépaysement et d’installation.

8        Le 31 octobre 2003, la Commission a informé la requérante qu’une vérification ultérieure de son dossier avait révélé qu’elle n’avait pas droit aux indemnités de dépaysement et d’installation, au motif que, respectivement, les conditions prévues à l’article 4, paragraphe 1, sous a), et à l’article 5, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut n’étaient pas remplies (ci-après la « décision du 31 octobre 2003 »).

9        Le 10 décembre 2003, la Commission a fait savoir à la requérante que, en application de l’article 85 du statut, une somme de 9 626,25 euros serait récupérée en quatorze retenues de 636,31 euros et une retenue de 717,91 euros (ci-après la « décision du 10 décembre 2003 »).

10      Le 28 janvier 2004, la requérante a introduit une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut, contre la décision du 31 octobre 2003. Le 2 février 2004, elle a présenté une réclamation contre la décision du 10 décembre 2003.

11      L’autorité habilitée à conclure des contrats d’engagement (ci-après l’« AHCC ») a rejeté les deux réclamations par décision du 10 juin 2004 (ci-après la « décision de rejet des réclamations ») dont la requérante a accusé réception le 18 juin 2004. Cette décision est, en substance, motivée comme suit.

12      S’agissant de l’indemnité de dépaysement, l’AHCC affirme que l’activité de la requérante auprès du CNR ne pouvait être qualifiée de « services effectués pour un autre État » et que sa période de travail pour le CNR à Bruxelles ne pouvait donc pas être « neutralisée » au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut pour les raisons suivantes :

« [...] le CNR, dans le cadre de l’ordre administratif italien, se caractérise plutôt comme une entité publique pourvue de personnalité juridique mais dotée d’un haut degré d’indépendance au vu de la poursuite de ses finalités statutaires (promotion de la recherche). Cela émerge d’ailleurs également du libellé de l’article 2, [paragraphe] 1, du [décret législatif] n° 127 du 4 juin 2003 […] où l’on définit le CNR comme ‘entité publique nationale ayant le but de développer, promouvoir et valoriser les activités de recherche dans les secteurs principaux de développement des sciences’. Le CNR – ainsi qu’il émerge dudit [décret législatif] – jouit par ailleurs d’un degré d’autonomie très élevé par rapport aux pouvoirs étatiques proprement dits, degré d’autonomie qui n’est que le reflet de la liberté et l’autonomie dont ‘l’art et la science’ doivent bénéficier selon la teneur de l’article 33 de la Constitution italienne.

Plus spécifiquement :

a)      la structure du CNR est totalement indépendante de l’État ;

b)      aucun organe ou haut représentant de l’État n’est présent dans les organes ou dans le processus décisionnel du CNR (articles 6-14 du [décret législatif] précité), de façon à pouvoir orienter son fonctionnement selon les intérêts ou la volonté de l’État ;

c)      nulle part l’on ne mentionne une forme quelconque de ‘subordination’ fonctionnelle du CNR ou de ‘pouvoir d’instruction’ de la part de l’État ;

d)      les revenus du CNR ne proviennent pas uniquement de fonds de l’État, mais aussi de fonds communautaires et privés, ainsi que de contributions d’entités locales (article 17 du [décret législatif] précité) ;

e)      le personnel du CNR, à l’instar de celui des universités, est recruté sur base de critères donnant priorité aux mérites et aux titres acquis dans la recherche. Par ailleurs, ledit personnel est souvent appelé à des activités de collaboration avec les universités.

Il s’ensuit que le CNR ne saurait nullement rentrer dans la structure de l’État –  dont il ne représente ni la volonté ni les intérêts directs. Nier ce fait reviendrait à mettre en cause à l’évidence non seulement les finalités du CNR mais également le principe de liberté et d’autonomie garanties à la recherche par rapport aux fonctions relevant plus directement de la ‘personne’ de l’État (fonctions normalement appelées ‘régaliennes’). »

13      En ce qui concerne l’indemnité d’installation, l’AHCC affirme que « au vu [du] fait que l’intéressée, résidante en Belgique, n’a pas dû changer sa résidence pour satisfaire aux obligations découlant de l’article 20 du statut […] la décision du service gestionnaire de refuser à l’intéressée l’indemnité de première installation liée à son entrée en service à Bruxelles trouve sa pleine justification. »

14      Quant à la récupération des indemnités entre-temps perçues, l’AHCC affirme que « selon une jurisprudence constante, un fonctionnaire est tenu à restitution en application de l’article 85 du statut dès qu’il s’agit d’une erreur qui n’échappe pas à un fonctionnaire normalement diligent, censé connaître les règles régissant son traitement […] En l’espèce, il y a lieu de constater que l’intéressée savait clairement que depuis mars 1993 son lieu de résidence était Bruxelles. Ce fait devrait donc nécessairement l’amener à s’interroger sur [l’octroi] des indemnités dont elle bénéficiait et, par voie de conséquence, à interroger sur ce point l’administration. Cette démarche s’imposait, d’ailleurs, d’autant plus que la réclamante avait travaillé pour le CNR de façon ininterrompue depuis 1986 et qu’elle était donc clairement informée du statut non étatique du CNR. En effet, l’intéressée cite elle-même le [décret législatif] visé ci-dessus. »

 Procédure et conclusions des parties

15      Par requête déposée au greffe le 17 septembre 2004, la requérante a introduit le présent recours. Elle a également présenté une demande d’anonymat à laquelle il a été fait droit.

16      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal a décidé d’ouvrir la procédure orale. Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure, le Tribunal a posé par écrit des questions et a fait une demande de production de documents aux parties, lesquelles y ont répondu dans le délai imparti.

17      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 2 février 2006. À l’audience, la requérante a introduit une demande de mesures d’organisation de la procédure visant à ce que le Tribunal ordonne à la Commission de produire certains documents. La Commission a été entendue sur cette demande.

18      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision de rejet des réclamations ;

–        annuler les décisions des 31 octobre et 10 décembre 2003 ;

–        ordonner toute mesure de nature à la réintégrer dans ses droits, y compris en ce qui concerne le paiement d’intérêts moratoires ;

–        condamner la Commission aux dépens.

19      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        statuer sur les dépens comme de droit.

 En droit

20      La requérante soulève deux moyens à l’appui de son recours. Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 4, paragraphe 1, sous a), et de l’article 5, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut. Le deuxième moyen, soulevé à titre subsidiaire, est tiré de la violation de l’article 85 du statut.

 Sur le premier moyen tiré de la violation de l’article 4, paragraphe 1, sous a), et de l’article 5, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut

21      Dans le cadre de ce moyen, la requérante invoque des erreurs d’appréciation dans l’application de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut quant à son statut avant son entrée en fonctions à la Commission et la qualification du CNR en tant qu’organe de l’État. Elle en déduit une violation de l’article 5, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut. En outre, elle invoque une violation de l’obligation de motivation et du principe d’égalité de traitement.

 Sur le statut de la requérante avant son entrée au service de la Commission et la qualification du CNR en tant qu’organe de l’État

–       Arguments des parties

22      Concernant son statut avant son entrée au service de la Commission, la requérante allègue qu’un chercheur auprès du CNR est un fonctionnaire de l’État italien qui fait partie de la structure organique de l’appareil de l’État et exécute les missions d’intérêt général qui lui sont confiées par la législation de l’État, ce qui aurait dû amener la Commission à lui accorder le bénéfice de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut. La requérante fait observer qu’elle a dû demander à être placée hors cadre (fuori ruolo) afin de prendre ses fonctions auprès de la Commission, conformément à la loi n° 145 du 15 juillet 2002 qui prévoit que « le personnel des administrations publiques […] peut, après autorisation de la présidence du Conseil des ministres Département de la fonction publique […] être placé hors cadre afin d’exercer un emploi ou une charge temporaire d’une durée au moins égale à [six] mois auprès d’organismes internationaux [...] », ce qui prouve sa soumission totale au pouvoir discrétionnaire de la présidence du Conseil des ministres italien.

23      En outre, la requérante aurait bénéficié d’une indemnité de service qui n’est accordée qu’aux fonctionnaires de l’État et se serait vu remettre un passeport de service délivré pour des périodes de deux ans renouvelables aux membres du personnel de direction et autre des autres administrations de l’État qui doivent se rendre à l’étranger pour des raisons de service. Il ressortirait de ce document qu’elle est un fonctionnaire de l’État en poste à l’étranger, ce qui aurait été confirmé par le ministère des Affaires étrangères belge qui lui a délivré une « Carte d’identité spéciale » portant la mention « Fonctionnaire italienne en mission officielle en Belgique ». En outre, le formulaire E 106 concernant l’assistance sociale lui aurait été délivré directement par le ministère de la Santé, procédure qui serait réservée aux fonctionnaires de l’État.

24      Le caractère précaire de l’affectation de la requérante à l’étranger serait illustré par le fait que son détachement, tout comme le formulaire E 106, était renouvelé chaque année. En vue de démontrer l’absence de lien fixe avec son lieu de travail, la requérante affirme, en outre, que, pendant tout le temps où elle a vécu à Bruxelles, elle n’a pas donné en location son domicile de Pise.

25      Quant à la qualification du CNR en tant qu’organe de l’État, la requérante fait remarquer que, d’après l’article 20 du décret législatif du 4 juin 2003, le CNR est défini comme une administration publique, ce qui confirme qu’il rentre dans le cadre de l’appareil de l’État italien. Le CNR serait une personne morale de droit public à laquelle la législation nationale attribue un ensemble de compétences, des moyens matériels et une structure organisationnelle. L’ordre juridique italien lui attribuerait les fonctions d’autres organes du pouvoir central, notamment du ministère de l’Éducation, de l’Université et de la Recherche, qui l’habiliteraient à prendre en toute autonomie des mesures réglementaires et administratives ayant la même force que des mesures étatiques.

26      Par ailleurs, le fait que le CNR soit autorisé à utiliser le logo de la République italienne sur son papier à en-tête constituerait aussi une preuve que le CNR est un organe qui relève directement de l’État, car les autorités territoriales ne seraient pas autorisées à utiliser ledit logo, à l’exception des préfectures et des juridictions.

27      En dépit de son caractère autonome, le CNR serait soumis au pouvoir politique. Tout d’abord, ses activités seraient décidées par le conseil d’administration après avis favorable du ministre compétent, ensuite, le président du CNR, ainsi que trois membres de son conseil d’administration, seraient nommés par le président du Conseil des ministres, et, enfin, l’activité du CNR s’inscrirait dans le cadre de la programmation nationale.

28      L’argument de l’AHCC en réponse aux réclamations selon lequel les revenus du CNR ne proviendraient pas uniquement de fonds de l’État, mais aussi de fonds communautaires et privés, ainsi que de contributions d’entités locales, serait sans pertinence, puisqu’il y aurait d’autres institutions nationales et internationales (dont les Communautés européennes elles-mêmes) qui ont des ressources ne provenant pas uniquement des États.

29      L’argument de l’AHCC selon lequel le personnel du CNR serait recruté sur la base de critères donnant priorité aux mérites et aux titres acquis dans la recherche et que ledit personnel serait souvent appelé à collaborer avec les universités ne serait pas non plus pertinent, car la requérante serait un fonctionnaire de l’État italien et, à compter de son entrée au CNR à Bruxelles, elle aurait effectué des tâches qui n’avaient plus de rapport avec une carrière scientifique ou universitaire.

30      Par ailleurs, la requérante allègue que la coopération avec d’autres organes de l’État italien rentrait dans ses attributions à Bruxelles. À ce sujet, elle se réfère à certaines activités effectuées auprès de l’ambassade et du consulat de la République italienne à Bruxelles relatives à la préparation de leur système informatique. En outre, il existerait aussi de multiples formes de collaboration avec la représentation permanente.

31      L’argument de l’AHCC selon lequel nier l’indépendance du CNR mettrait en cause le principe de liberté et d’autonomie garanti à la recherche qui devrait être préservé par rapport aux fonctions relevant plus directement de la personne de l’État (fonctions régaliennes) serait un argument neuf et qui poserait des problèmes d’interprétation, y compris pour l’application de la règle aux organisations internationales, dépourvues par définition de pouvoirs régaliens. Selon la requérante, il ne serait pas déraisonnable de soutenir que le CNR dispose de pouvoirs régaliens dans ses domaines de compétence.

32      La requérante affirme, en outre, que, si, dans l’exercice de ses fonctions, le CNR devait agir de manière contraire au droit communautaire, ce serait à la République italienne elle-même de se défendre dans la mesure où les fonctions exercées par le CNR sont des fonctions rattachées à l’État.

33      Quant à l’argument de la Commission selon lequel l’interprétation de la notion d’État doit être exclusivement fondée sur le droit communautaire, la requérante estime qu’il n’existe pas d’interprétation jurisprudentielle suffisante de la notion de « services effectués pour un autre État ou pour une organisation internationale » et qu’il est donc possible de recourir à des dispositions d’autres ordres juridiques, compatibles avec les principes fondamentaux du droit communautaire, pour éclairer l’application des dispositions en cause au cas d’espèce.

34      La Commission conteste que les activités professionnelles de la requérante au service du CNR à Bruxelles puissent être considérées comme des « services effectués pour un autre État » au sens de l’exception prévue à l’article 4 de l’annexe VII du statut.

–       Appréciation du Tribunal

35      Selon une jurisprudence constante, la raison d’être de l’indemnité de dépaysement est de compenser les charges et les désavantages particuliers résultant de l’exercice permanent de fonctions dans un pays avec lequel le fonctionnaire n’a pas établi de liens durables avant son entrée en fonctions (arrêts du Tribunal du 30 mars 1993, Vardakas/Commission, T‑4/92, Rec. p. II‑357, point 39 ; du 14 décembre 1995, Diamantaras/Commission, T‑72/94, RecFP p. I‑A‑285 et II‑865, point 48, et du 28 septembre 1999, J/Commission, T‑28/98, RecFP p. I‑A‑185 et II‑973, point 32). Pour que de tels liens durables puissent s’établir et ainsi faire perdre au fonctionnaire le bénéfice de l’indemnité de dépaysement, le législateur exige que le fonctionnaire ait eu sa résidence habituelle ou ait exercé son activité professionnelle principale pendant une période de cinq ans dans le pays de son lieu d’affectation (arrêt Diamantaras/Commission, précité, point 48).

36      Il y a également lieu de rappeler qu’une exception est prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), second tiret, de l’annexe VII du statut en faveur des personnes ayant effectué des services pour un autre État ou une organisation internationale pendant la période de référence de cinq années expirant six mois avant leur entrée en fonctions. Cette exception trouve sa raison d’être dans le fait que, dans de telles conditions, ces personnes ne peuvent pas être considérées comme ayant établi des liens durables avec le pays d’affectation en raison du caractère temporaire de leur détachement dans ce pays (arrêts de la Cour du 15 janvier 1981, Vutera/Commission, 1322/79, Rec. p. 127, point 8, et du 2 mai 1985, De Angelis/Commission, 246/83, Rec. p. 1253, point 13).

37      En l’espèce, la période de référence à prendre en considération pour l’application de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut se situe entre le 1er mars 1998 et le 28 février 2003, la requérante étant entrée en fonctions six mois après cette dernière date, soit le 1er septembre 2003. Il est constant entre les parties que la requérante a exercé son activité professionnelle au sein du bureau du CNR à Bruxelles pendant toute cette période.

38      Il convient, dès lors, de déterminer si le travail effectué par la requérante à Bruxelles pour le CNR doit être considéré comme des services effectués pour un « autre État », au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut.

39      Il y a lieu de rappeler qu’il découle des exigences de l’application uniforme du droit communautaire et du principe d’égalité que les termes d’une disposition de droit communautaire qui ne comporte aucun renvoi exprès au droit des États membres pour déterminer son sens et sa portée doivent normalement trouver dans toute la Communauté une interprétation autonome et uniforme, qui doit être recherchée en tenant compte du contexte de la disposition et de l’objectif poursuivi par la réglementation communautaire en cause. En l’absence d’un renvoi exprès, l’application du droit communautaire peut toutefois impliquer, le cas échéant, une référence au droit des États membres lorsque le juge communautaire ne peut déceler dans le droit communautaire ou dans les principes généraux du droit communautaire les éléments lui permettant d’en préciser le contenu et la portée par une interprétation autonome (arrêt de la Cour du 18 janvier 1984, Ekro, 327/82, Rec. p. 107, point 11 ; arrêts du Tribunal du 18 décembre 1992, Díaz García/Parlement, T‑43/90, Rec. p. II‑2619, point 36 ; du 28 janvier 1999, D/Conseil, T‑264/97, RecFP p. I‑A‑1 et II‑1, points 26 et 27, confirmé par l’arrêt de la Cour du 31 mai 2001, D et Suède/Conseil, C‑122/99 P et C‑125/99 P, Rec. p. I‑4319, et du 25 octobre 2005, Dedeu i Fontcuberta/Commission, T‑299/02, non encore publié au Recueil, point 36).

40      En l’occurrence, le Tribunal considère que le droit communautaire et, notamment, le statut fournissent des indications suffisantes permettant de préciser la portée de l’article 4 de l’annexe VII du statut et d’établir une interprétation autonome de la notion d’État par rapport aux différents droits nationaux (arrêt Dedeu i Fontcuberta/Commission, point 39 supra, point 37).

41      Le Tribunal rappelle également que les dispositions du statut, qui ont pour seule finalité de réglementer les relations juridiques entre les institutions et les fonctionnaires en établissant des droits et des obligations réciproques, comportent une terminologie précise dont l’extension par analogie à des cas non visés de façon explicite est exclue (arrêts de la Cour du 16 mars 1971, Bernardi/Parlement, 48/70, Rec. p. 175, points 11 et 12, et du 20 juin 1985, Klein/Commission, 123/84, Rec. p. 1907, point 23 ; arrêt du Tribunal du 19 juillet 1999, Mammarella/Commission, T‑74/98, RecFP p. I‑A‑151 et II‑797, point 38).

42      En outre, il ressort de la jurisprudence que, aux fins de l’application de l’article 4, paragraphe 1, sous a), second tiret, dernière phrase, de l’annexe VII du statut, la notion d’État ne vise que l’État en tant que personne juridique et sujet unitaire du droit international et ses organes de gouvernement (arrêts du Tribunal du 30 juin 2005, Olesen/Commission, T‑190/03, non encore publié au Recueil, points 40 et 51, et Dedeu i Fontcuberta/Commission, point 39 supra, point 41).

43      Le Tribunal en conclut qu’il y a lieu d’interpréter l’expression « services effectués pour un autre État », visée à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut, comme ne se référant pas aux services fournis pour un organisme public doté d’une personnalité juridique propre, tel que le CNR qui jouit, ainsi qu’il ressort de la législation applicable citée par la requérante, d’une autonomie scientifique, financière, organisationnelle, patrimoniale et comptable. L’exception prévue à ladite disposition ne s’applique donc pas au travail effectué par elle au sein du bureau du CNR à Bruxelles.

44      Aucun des arguments avancés par la requérante n’est de nature à mettre en cause cette conclusion.

45      S’agissant du fait que le CNR est assujetti à un pouvoir de tutelle de la part du ministère de l’Éducation, de l’Université et de la Recherche, que le Conseil des ministres italien nomme certains membres de ses organes de décision ou encore que son activité s’inscrit dans le cadre de la programmation nationale, il y a lieu de rappeler que le CNR bénéficie néanmoins d’une autonomie organisationnelle importante qui est notamment illustrée par l’ouverture de son propre bureau de représentation à Bruxelles, indépendant de la représentation permanente de la République italienne auprès des Communautés européennes, alors que ledit ministère dispose d’un représentant au sein de cette représentation permanente.

46      De surcroît, il ressort des pièces du dossier que les intérêts promus par le CNR sont ceux de la recherche scientifique et que, dans ce cadre, il tombe dans ses compétences d’entreprendre des activités de recherche et développement en collaboration avec ou pour le compte du secteur public et privé. De tels projets contribuent au financement des activités du CNR. Il en résulte que, même si le CNR représente certains intérêts publics ou se voit confier des missions d’intérêt public, le bureau du CNR à Bruxelles gère des intérêts à la fois publics et privés qui ne coïncident pas nécessairement avec les intérêts de la République italienne.

47      Par ailleurs, quant à l’argument de la requérante selon lequel ce serait à la République italienne elle-même de se défendre si, dans l’exercice de ses fonctions, le CNR devait violer le droit communautaire, il suffit de rappeler que le même raisonnement s’applique notamment aux autorités régionales des États membres et que le Tribunal a rejeté l’assimilation des autorités régionales à l’État dans le contexte de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut (arrêt Dedeu i Fontcuberta/Commission, point 39 supra, point 44).

48      Quant au fait que le CNR est autorisé à utiliser le logo de la République italienne, il suffit de relever que les conditions d’utilisation dudit logo telles que déterminées par le droit italien ne sauraient avoir une influence sur l’interprétation de la notion d’État en droit communautaire.

49      S’agissant du statut de fonctionnaire public de la requérante et de l’argument selon lequel ce serait la relation même d’emploi public qui indique que les missions confiées au fonctionnaire public, tel qu’un chercheur au CNR, sont exécutées pour l’État au sens de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut, il doit être relevé qu’une interprétation large de la notion de « services effectués pour un autre État » telle que proposée par la requérante reviendrait à accorder le bénéfice de ladite exception à toute personne bénéficiant d’un statut de fonctionnaire, même si elle travaillait pour une entité juridique distincte de l’État, ce qui est notamment le cas du personnel de certaines sociétés publiques dans les États membres. Une telle application de l’exception en cause serait contraire à la jurisprudence selon laquelle une interprétation stricte s’impose dès lors qu’il s’agit d’une disposition régissant l’octroi d’un avantage financier (voir arrêt Olesen/Commission, point 42 supra, point 48, et la jurisprudence citée). Par ailleurs, le statut des employés des sociétés publiques n’étant pas le même dans tous les États membres, une telle interprétation comporterait le risque d’une violation du principe de l’égalité de traitement.

50      À cet égard, il ressort des pièces du dossier que la collaboration et les relations fonctionnelles avec des organes de l’État comme l’ambassade, le consulat et la représentation permanente de la République italienne, invoquées par la requérante, ont eu, au plus, un caractère occasionnel et ne prouvent nullement un quelconque lien de subordination entre ces organes et le CNR ou entre ces organes et la requérante. La requérante ne conteste d’ailleurs pas qu’elle ne faisait pas partie du personnel desdits organismes.

51      En outre, s’agissant du fait que la requérante a été placée hors cadre pour pouvoir intégrer les services de la Commission, ainsi que du fait qu’elle a bénéficié d’une indemnité de service et s’est vu remettre un passeport de service, il convient de constater que ces circonstances constituent une conséquence logique de sa position de fonctionnaire public qui reste sans impact sur la qualification de la nature de l’organisme pour lequel elle a effectué son travail avant son entrée en fonctions.

52      Par ailleurs, en ce qui concerne la carte d’identité spéciale, il suffit de relever que les conditions d’octroi d’une carte d’identité spéciale belge ne sauraient avoir une influence sur l’interprétation de la notion d’État en droit communautaire.

53      De surcroît, en ce qui concerne le fait que, en matière d’assurance maladie, la requérante a reçu un formulaire E 106, il ressort de la jurisprudence que le formulaire E 106 ne fait qu’attester le droit de bénéficier de soins de santé dans un autre pays que celui où la personne en cause est normalement assurée et que ce document est délivré à de nombreuses catégories de personnes (arrêt Dedeu i Fontcuberta/Commission, point 39 supra, point 49).

54      S’agissant, enfin, du caractère prétendument précaire de l’affectation de la requérante et la circonstance qu’elle n’aurait, de ce fait, pas donné en location sa maison de Pise pendant la période de référence, ces éléments de fait, à les supposer établis, ne permettent pas non plus de tirer des conclusions quant au caractère étatique du CNR ou du lien entre la requérante et l’État italien au sens de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut.

55      Dans la mesure où la requérante entend ainsi prouver qu’elle n’a pas eu sa résidence habituelle à Bruxelles pendant la période de référence afin de pouvoir bénéficier de l’indemnité de dépaysement sur la base du cas général prévu à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut, selon lequel l’indemnité de dépaysement est accordée au fonctionnaire qui n’a pas et n’a jamais eu la nationalité de l’État sur le territoire duquel est situé le lieu de son affectation et qui n’a pas, de façon habituelle, pendant la période de cinq années expirant six mois avant son entrée en fonctions, habité ou exercé son activité professionnelle principale sur le territoire dudit État, il y a lieu de constater que les éléments de preuves fournis à cet égard, dont une déclaration de la requérante quant aux raisons pour lesquelles elle a gardé son logement de Pise, ne sauraient suffire pour établir qu’elle a eu, pendant la période de référence, sa résidence habituelle à un autre endroit que Bruxelles. Cela est d’autant plus vrai au vu du fait que c’est la requérante elle-même qui a indiqué sur la fiche du bureau liquidateur remise lors de la réunion du 8 septembre 2003 que sa résidence se trouvait à Bruxelles. En tout état de cause, il ressort de la jurisprudence du Tribunal que le fait de disposer d’intérêts et de biens patrimoniaux dans un autre État n’est pas de nature à démontrer, à lui seul, que le centre permanent des intérêts de l’intéressé se trouve dans ce pays (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 28 septembre 1993, Magdalena Fernández/Commission, T‑90/92, Rec. p. II‑971, point 30, et du 3 mai 2001, Liaskou/Conseil, T‑60/00, RecFP p. I‑A‑107 et II‑489, point 63).

56      Dans ces conditions, au regard de tout ce qui précède, il ne saurait être considéré que la requérante a fourni des services pour un autre État au sens de l’article 4 de l’annexe VII du statut. Le grief tiré d’une erreur d’appréciation quant au statut de la requérante avant son entrée au service de la Commission et la qualification du CNR en tant qu’organe de l’État doit donc être rejetée.

 Sur la violation de l’article 5, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut

–       Arguments des parties

57      La requérante allègue que l’indemnité d’installation lui est due dès lors que le droit à l’indemnité de dépaysement devait lui être reconnu, puisque son statut de fonctionnaire public détaché à Bruxelles était précaire et renouvelé chaque année. En outre, il découlerait de l’article 5, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut que l’indemnité d’installation est due au fonctionnaire titulaire qui remplit les conditions pour bénéficier de l’indemnité de dépaysement sans que l’intéressé soit tenu de prouver qu’il a encouru des dépenses effectives. Le fait qu’il garde son logement précédent ne serait pas pertinent (arrêt de la Cour du 28 mai 1998, Commission/Lozano Palacios, C‑62/97 P, Rec. p. I‑3273, points 20 à 22).

58      La Commission conteste ces arguments.

–       Appréciation du Tribunal

59      Il ressort de l’article 5, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut, dans sa version applicable à l’époque des faits en cause, qu’il y a deux conditions alternatives à remplir pour bénéficier de l’indemnité d’installation : elle est accordée au fonctionnaire qui remplit les conditions pour bénéficier de l’indemnité de dépaysement ou qui justifie avoir été tenu de changer de résidence pour satisfaire aux obligations de l’article 20 du statut (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 13 septembre 2005, Recalde Langarica/Commission, T‑283/03, non encore publié au Recueil, points 175 et 176).

60      En l’occurrence, la première condition alternative n’est pas remplie, puisqu’il ressort des conclusions du Tribunal ci-dessus que la requérante n’a pas droit à l’indemnité de dépaysement.

61      Quant à la seconde condition alternative, il ressort des pièces du dossier et de l’analyse qui précède que, à la date de son entrée en fonctions à la Commission, la requérante avait sa résidence habituelle à Bruxelles et qu’elle n’a donc pas dû changer de résidence pour satisfaire aux obligations de l’article 20 du statut.

62      Il s’ensuit que la Commission n’a pas violé l’article 5, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut en refusant à la requérante le bénéfice de l’indemnité d’installation et que le moyen tiré de la violation dudit article doit être rejeté.

 Sur le défaut de motivation

–       Arguments des parties

63      Selon la requérante, la décision de rejet des réclamations est lacunaire en ce qu’elle n’explique pas pourquoi le fonctionnaire d’un organe de la République italienne ne saurait prétendre à l’application de l’article 4, paragraphe 1, sous a), dernière phrase, de l’annexe VII du statut. En outre, la requérante allègue que, de manière générale, la Commission n’a pas tenu compte des informations et conclusions soumises par elle pour prouver le caractère précaire de son affectation à l’étranger. La Commission n’aurait pas non plus pris en compte que la requérante avait établi avoir collaboré avec l’ambassade et le consulat, ainsi qu’avec la représentation permanente de la République italienne auprès de l’Union européenne et avec le ministère de l’Éducation, de l’Université et de la Recherche.

64      Par ailleurs, la requérante relève que l’argumentation de la réponse aux réclamations est uniquement fondée sur le droit national et ce n’est qu’au stade de la défense que la Commission a invoqué le droit communautaire.

65      La Commission conteste que la motivation de la décision de rejet des réclamations soit insuffisante ou contradictoire.

–       Appréciation du Tribunal

66      Il doit être rappelé que l’obligation de motivation a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour apprécier le bien-fondé de la décision prise par l’administration et l’opportunité d’introduire un recours devant le Tribunal et, d’autre part, de permettre à ce dernier d’exercer son contrôle. Son étendue doit être appréciée en fonctions de circonstances concrètes, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que le destinataire peut avoir à recevoir des explications (arrêts du Tribunal du 26 janvier 1995, Pierrat/Cour de justice, T‑60/94, RecFP p. I‑A‑23 et II‑77, points 31 et 32 ; du 9 mars 2000, Vicente Nuñez/Commission, T‑10/99, RecFP p. I‑A‑47 et II‑203, point 41, et du 31 janvier 2002, Hult/Commission, T‑206/00, RecFP p. I‑A‑19 et II‑81, point 27).

67      Par ailleurs, l’obligation de motivation ne saurait impliquer que la Commission, dans la décision mettant fin à la procédure administrative, doive prendre position sur tous les arguments invoqués dans une réclamation si ladite décision expose les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 14 juillet 1972, Cassella Farbwerke Mainkur/Commission, 55/69, Rec. p. 887, point 22 ; arrêt du Tribunal du 24 janvier 1995, Tremblay e.a./Commission, T‑5/93, Rec. p. II‑185, point 29).

68      En l’espèce, il y a lieu de relever que la décision de rejet des réclamations expose sans équivoque que la requérante n’a pas droit au bénéfice de l’indemnité de dépaysement, puisque les activités professionnelles qu’elle a exercées pendant la période de référence ne sont pas couvertes par l’exception relative aux « services effectués pour un autre État ou pour une organisation internationale » visée à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut, en indiquant les raisons spécifiques d’une telle appréciation. Ces explications répondent largement aux exigences de motivation requises et la requérante a donc eu pleinement connaissance des raisons pour lesquelles l’AHCC lui a refusé le bénéfice de l’indemnité de dépaysement.

69      Il résulte des considérations qui précèdent que le moyen de la requérante tiré d’une violation de l’obligation de motivation doit être rejeté comme non fondé.

 Sur la violation du principe de l’égalité de traitement

–       Arguments des parties

70      Selon la requérante, sa situation à la date de son recrutement par la Commission ne saurait être considérée comme différente de celle d’un fonctionnaire d’une organisation internationale et, notamment, de celle d’un fonctionnaire de la DG « Recherche » ou d’un centre de recherche communautaire. Le refus des deux indemnités en l’espèce serait discriminatoire dès lors que la Commission aurait traité deux situations identiques de manière différente et, partant, aurait lésé injustement la requérante.

71      Dans l’arrêt du 15 juin 2000, Fantechi/Commission (T‑51/99, RecFP p. I‑A‑111 et II‑485), le Tribunal ainsi que la Commission elle-même auraient jugé que l’article 4, paragraphe l, sous a), dernière phrase, de l’annexe VII du statut était applicable à une fonctionnaire ayant effectué une période de stage et d’études auprès du Centre commun de recherche (CCR) de la Commission à Ispra en Italie et du joint European Torus (Tore commun européen) (JET) en Grande-Bretagne (arrêt Fantechi/Commission, précité, point 14).

72      Dans l’affaire Fantechi/Commission, la Commission aurait donc fait une interprétation extensive de la notion de « services effectués pour un autre État ou une organisation internationale » visée à l’article 4, paragraphe 1, sous a), dernière phrase, de l’annexe VII du statut, sans rechercher s’il existait un lien de subordination hiérarchique entre l’organisation internationale et les sociétés privées dans lesquelles travaillait Mme Fantechi ou sans examiner si la fonction de recherche exercée par celle-ci auprès du CCR à Ispra s’insérait dans un contexte organique et fonctionnel particulier. Cette interprétation extensive de la notion de « services effectués pour une organisation internationale » contrasterait avec l’interprétation restrictive retenue en l’espèce de la notion de « services effectués pour un autre État ».

73      Par ailleurs, à l’audience, la requérante a relevé avoir pris connaissance en janvier 2006 de l’existence d’un cas semblable au sien, à savoir celui d’un ancien agent de la représentation à Bruxelles d’un office national de la recherche d’un État membre, auquel la Commission aurait accordé l’indemnité de dépaysement. Dans la correspondance avec le fonctionnaire en cause, le bureau liquidateur aurait indiqué que la décision d’octroi de l’indemnité de dépaysement était fondée sur une jurisprudence récente du Tribunal. À cet égard, la requérante a introduit une demande visant à ce que le Tribunal ordonne à la Commission la production de certains documents, notamment de toutes les décisions prises entre juin 2005 et janvier 2006 présentant des similitudes avec son cas personnel, ainsi que de tout document qui, à la suite de l’arrêt du Tribunal du 13 septembre 2005, Hosman-Chevalier/Commission (T‑72/04, non encore publié au Recueil), déterminerait les principes régissant l’application correcte de la règle statutaire en cause.

74      La Commission conteste ces arguments et considère que la demande de production des documents en question n’est pas pertinente.

–       Appréciation du Tribunal

75      La requérante invoque, en substance, que la Commission aurait retenu une interprétation large de la notion de « services effectués pour une organisation internationale » dans le cadre de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut qui contrasterait avec l’interprétation restrictive retenue en l’espèce de la notion de « services effectués pour un autre État » au sens de la même disposition et que, de ce fait, elle fait l’objet d’une discrimination.

76      Il est de jurisprudence constante que le principe général d’égalité de traitement est un principe fondamental du droit communautaire qui veut que les situations comparables ne soient pas traitées de manière différente, à moins qu’une différenciation ne soit objectivement justifiée (arrêts de la Cour du 19 octobre 1977, Ruckdeschel e.a., 117/76 et 16/77, Rec. p. 1753, point 7, et du 16 octobre 1980, Hochstrass/Cour de justice, 147/79, Rec. p. 3005, point 7 ; arrêt du Tribunal du 26 septembre 1990, Beltrante e.a./Conseil, T‑48/89, Rec. p. II‑493, point 34). Ainsi, il y a violation du principe d’égalité de traitement lorsque deux catégories de personnes, dont les situations factuelle et juridique ne présentent pas de différences essentielles, se voient appliquer un traitement différent ou lorsque des situations différentes sont traitées de manière identique (arrêts du Tribunal du 15 mars 1994, La Pietra/Commission, T‑100/92, RecFP p. I‑A‑83 et II‑275, point 50, et du 16 avril 1997, Kuchlenz-Winter/Commission, T‑66/95, Rec. p. II‑637, point 55).

77      Quant à l’affaire Fantechi/Commission, invoquée par la requérante, il importe de constater que, contrairement à ce que prétend la requérante, le Tribunal ne s’est pas prononcé dans cet arrêt sur la question de savoir si un travail auprès du CCR à Ispra en Italie et auprès de JET en Grande-Bretagne devrait être considéré comme couvrant des « services effectués pour une organisation internationale », mais a simplement décidé que l’indemnité de dépaysement ne pouvait être refusée en raison de « services effectués pour une organisation internationale » établie sur le territoire d’un État membre autre que celui de l’affectation.

78      En outre, la comparaison de l’appréciation de la Commission dans l’affaire Fantechi/Commission avec celle faite en l’espèce n’est pas pertinente, car la situation factuelle à la base des deux affaires est différente. La requérante dans l’affaire Fantechi/Commission a travaillé au sein d’organisations internationales, tandis que la requérante dans le cas d’espèce a travaillé pour un organisme public dont le Tribunal a établi qu’il ne peut être assimilé à l’État italien.

79      Par ailleurs, il y a également lieu de rejeter les arguments de la requérante tirés du fait que la Commission aurait récemment reconnu que l’exception en cause s’applique au cas d’un ancien agent de la représentation à Bruxelles d’un office national de la recherche d’un État membre et cela prétendument sur le fondement d’une jurisprudence récente du Tribunal. Outre le fait que ces allégations ne sont pas corroborées par des éléments de preuve, il y a lieu de rappeler que le Tribunal a décidé, dans le cadre de l’examen du moyen tiré de la violation de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut, qu’il convient d’interpréter l’expression de « services effectués pour un autre État » figurant dans cette disposition comme ne se référant pas aux services fournis par des agents d’un centre national de recherche d’un État membre représentant ledit centre à Bruxelles pour autant que ledit centre ait une personnalité juridique propre. Dès lors, même dans l’hypothèse où la Commission aurait effectivement reconnu au fonctionnaire en question l’indemnité de dépaysement eu égard au fait que la période de travail à la représentation à Bruxelles d’un office national de la recherche d’un État membre était couverte par l’exception des « services effectués pour un autre État », et pour autant que ledit centre a un statut identique à celui du CNR, une telle irrégularité ne saurait être valablement invoquée par la requérante au soutien d’une allégation de violation du principe d’égalité de traitement, car il est de jurisprudence constante que nul ne peut invoquer à son profit une illégalité commise en faveur d’autrui (arrêt de la Cour du 9 octobre 1984, Witte/Parlement, 188/83, Rec. p. 3465, point 15, et arrêt du Tribunal du 22 février 2000, Rose/Commission, T‑22/99, RecFP p. I‑A‑27 et II‑115, point 39).

80      En ce qui concerne la demande visant à ce que la Commission produise tout document qui, à la suite de l’arrêt Hosman-Chevalier/Commission, point 73 supra, déterminerait les principes régissant l’application correcte de la règle statutaire en cause, il suffit de relever que le Tribunal ne saurait être lié par l’interprétation donnée à sa jurisprudence par la Commission pour décider de l’application d’un article du statut à un cas d’espèce.

81      Dans ces circonstances, il y a lieu de constater qu’aucune violation du principe de l’égalité de traitement n’a été établie et il suffit de relever, sans qu’il soit besoin de statuer sur sa recevabilité, qu’il n’est pas besoin de faire droit à la demande de mesures d’organisation de la procédure de la requérante faite au cours de l’audience tendant à ce que le Tribunal demande à la Commission de produire les documents auxquels il est fait référence dans ladite demande.

82      Il y a donc lieu de conclure au rejet du premier moyen dans son intégralité.

 Sur le deuxième moyen, tiré, à titre subsidiaire, de la violation de l’article 85 du statut

 Arguments des parties

83      La requérante allègue que la Commission n’a pas correctement appliqué l’article 85 du statut, car elle n’était pas en mesure de s’apercevoir de l’irrégularité éventuelle des versements effectués par cette dernière et leur irrégularité n’était pas si manifeste qu’elle ne pouvait manquer d’en avoir connaissance. Par ailleurs, la décision de récupération n’aurait livré aucune preuve ni aucun élément d’appréciation à cet égard et sa motivation serait donc déficiente et contradictoire.

84      Dans la décision de rejet des réclamations, l’AHCC se serait contentée de remarquer que la requérante était employée par le CNR, qu’elle vivait à Bruxelles et qu’elle avait connaissance des dispositions du décret législatif n° 127 du 4 juin 2003 comme preuve qu’elle savait que le paiement était irrégulier, mais n’aurait procédé à aucune vérification de sa capacité à détecter l’irrégularité compte tenu du niveau de ses responsabilités (chercheuse en informatique appliquée aux sciences de la Terre) et le faible degré de clarté des dispositions statutaires en cause. Selon la requérante, l’AHCC aurait dû considérer que la question de l’éligibilité de la requérante revêtait un caractère particulièrement complexe et qu’elle n’était pas juriste.

85      La requérante estime qu’elle a fait preuve de la prudence requise en considérant que le CNR était un organe de l’État étant donné que sur le papier à en-tête du CNR figure le logo de la République italienne qui ne peut être utilisé que par des organes qui relèvent directement de l’État.

86      Par ailleurs, la requérante estime avoir fourni à l’AHCC toutes les informations nécessaires pour déterminer ses droits en lui remettant, le 8 septembre 2003, son curriculum vitae, son passeport de service, sa carte d’identité spéciale délivrée par les autorités belges, son contrat de travail au CNR, ses derniers bulletins de salaire, son certificat de résidence ainsi que tout autre élément demandé par les services de la défenderesse pour déterminer ses droits. Elle aurait ainsi fait preuve de diligence et aurait clairement présenté sa situation. Elle aurait donc estimé à bon droit avoir prouvé à cette occasion ses droits aux indemnités en question. À l’audience, la requérante a encore fait remarquer que la Commission aurait pu se réserver le droit de ne pas verser les indemnités en cause au lieu de le faire à titre provisoire.

87      La Commission conteste ces arguments.

 Appréciation du Tribunal

88      L’article 85 du statut prévoit deux hypothèses dans lesquelles une somme indûment perçue donne lieu à répétition, à savoir celle où le bénéficiaire a eu connaissance de l’irrégularité du versement et celle où cette irrégularité était si évidente qu’il ne pouvait manquer d’en avoir connaissance. Pour justifier la répétition de l’indu, il suffit donc que l’une des deux conditions exigées par l’article 85 du statut soit remplie.

89      Selon une jurisprudence constante, en cas de contestation de la part du bénéficiaire et en l’absence de preuve d’une connaissance de l’irrégularité du versement, il y a lieu d’examiner les circonstances dans lesquelles le versement a été effectué afin d’établir si l’irrégularité du versement devait apparaître avec évidence (arrêt de la Cour du 27 juin 1973, Kuhl/Conseil, 71/72, Rec. p. 705, point 11, et arrêt du Tribunal du 5 novembre 2002, Ronsse/Commission, T‑205/01, RecFP p. I‑A‑211 et II‑1065, point 45).

90      En l’espèce, l’irrégularité est constituée par le fait que le versement à la requérante de l’indemnité de dépaysement au cours des mois de septembre, d’octobre et de novembre 2003 n’était pas fondé, en raison de l’inobservation d’une condition légale préalable, à savoir que le travail qu’elle avait exercé de façon habituelle, pendant la période de cinq années expirant six mois avant son entrée en fonctions, au sein du bureau du CNR à Bruxelles, ne correspondait pas à une situation résultant de « services effectués pour un autre État » au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut. De ce fait, les conditions pour le versement de l’indemnité d’installation, telles que prévues à l’article 5, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut, n’étaient pas non plus remplies. La requérante a perçu cette dernière indemnité au cours des mois de septembre et d’octobre 2003.

91      Étant donné que la Commission n’a pas établi et n’allègue pas que la requérante avait effectivement connaissance du caractère irrégulier de ces versements, la seconde condition posée pour procéder à la répétition de l’indu est la seule pertinente et il y a donc lieu d’examiner si, dans les circonstances du cas d’espèce, l’irrégularité des versements en cause était si évidente que la requérante ne pouvait manquer d’en avoir connaissance.

92      À cet égard, il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence bien établie, l’expression « si évidente » figurant dans l’article 85 du statut ne signifie pas que le fonctionnaire bénéficiant d’un paiement indu est dispensé de tout effort de réflexion ou de contrôle, mais signifie qu’une restitution est due dès qu’il s’agit d’une erreur qui n’échappe pas à un fonctionnaire normalement diligent (arrêt de la Cour du 17 janvier 1989, Stempels/Commission, 310/87, Rec. p. 43, point 10, et arrêt Ronsse/Commission, point 89 supra, point 46).

93      En l’espèce, la fiche du bureau liquidateur du 8 septembre 2003, remise à la requérante à cette date et signée par elle, qui contient une liste des droits de la requérante tels que provisoirement fixés à cette date, indique explicitement que les renseignements qu’elle contient « sont à considérer provisoirement et peuvent faire l’objet d’une modification ultérieure ». En outre, par sa signature, la requérante a confirmé l’affirmation suivante contenue dans ladite fiche : « [j]’ai pris connaissance que mon salaire ne sera versé dans son intégralité que si mon dossier personnel est complet ».

94      En indiquant ainsi que la fixation initiale des droits statutaires de la requérante était provisoire, la Commission lui a fait savoir qu’elle allait les examiner ultérieurement de manière plus approfondie.

95      Il est donc établi, et la requérante ne le conteste d’ailleurs pas, qu’elle avait connaissance du fait que les droits statutaires, tels que fixés le 8 septembre 2003 et qui sont à la base des versements en cause, pouvaient faire l’objet d’une modification ultérieure. En effet, c’est dans la décision du 31 octobre 2003 que la Commission a définitivement déterminé les droits statutaires de la requérante en ce qui concerne l’indemnité de dépaysement et d’installation.

96      Dans ces circonstances, la requérante ne saurait invoquer la bonne foi pour s’opposer à la récupération des versements en cause, car elle savait que ses droits à l’indemnité de dépaysement et d’installation tels qu’initialement fixés pouvaient être revus à la suite d’un examen plus approfondi. La Commission n’a donc fait naître en son chef aucune confiance légitime qui s’opposerait à la récupération des montants indûment versés sur le fondement de l’article 85 du statut.

97      Par ailleurs, la requérante ayant eu sa résidence principale et exercé ses activités professionnelles à Bruxelles depuis mars 1993, c’est-à-dire pendant une période de dix ans avant son entrée en fonctions à la Commission, il n’était pas du tout évident qu’elle aurait eu droit à l’indemnité de dépaysement, car elle ne remplissait pas a priori les critères de l’article 4 de l’annexe VII du statut qui supposent clairement une situation de dépaysement.

98      Ce n’est qu’en remplissant les critères de l’exception à la règle générale contenue dans la dernière phrase de ladite disposition, c’est-à-dire au cas où son travail pour le CNR à Bruxelles pouvait être qualifié de « services effectués pour un autre État », qu’elle aurait néanmoins pu bénéficier de l’indemnité de dépaysement, et, par conséquent, de l’indemnité d’installation. Or, la durée et le niveau de son emploi au sein du CNR, bien que de caractère non juridique, lui ont permis de bien connaître le statut et le fonctionnement de cet organisme. À cet égard, la requérante cite elle-même dans sa réclamation le décret législatif n° 127 du 4 juin 2003 dont il ressort que le CNR a une personnalité juridique indépendante et jouit d’un certain degré d’autonomie par rapport aux pouvoirs étatiques italiens.

99      Il s’ensuit que la requérante aurait au moins dû avoir des doutes quant à la question de savoir si son travail pour le CNR à Bruxelles pouvait être qualifié de « services effectués pour un autre État » au sens de l’annexe VII du statut. À cet égard, le fait que le logo de la République italienne figure sur le papier à en-tête du CNR ne saurait suffire pour écarter les doutes que la requérante était censée entretenir quant à l’applicabilité de l’article 4 de l’annexe VII du statut, compte tenu de la durée et du niveau de son emploi au sein du CNR.

100    Par ailleurs, le fait que la requérante ait estimé avoir fourni à l’AHCC toutes les informations nécessaires pour déterminer ses droits le 8 septembre 2003 en lui remettant certains documents administratifs et que la Commission aurait pu se réserver le droit de ne pas verser les indemnités en cause au lieu de le faire à titre provisoire n’est pas pertinent, car il ne s’agit pas de savoir si l’erreur était ou non évidente pour l’administration, mais si elle l’était pour l’intéressée (arrêts du Tribunal du 16 juillet 1998, Jensen/Commission, T‑156/96, RecFP p. I‑A‑411 et II‑1173, point 63, et du 17 janvier 2001, Kraus/Commission, T‑14/99, RecFP p. I‑A‑7 et II‑39, point 38). En effet, le fait que l’administration ait commis une négligence ou une erreur en hésitant sur l’interprétation à donner à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut est sans incidence sur l’application de l’article 85 du statut, qui présuppose précisément que l’administration ait commis une erreur en procédant au versement irrégulier (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 24 février 1994, Stahlschmidt/Parlement, T‑38/93, RecFP p. I‑A‑65 et II‑227, point 23).

101    Il en résulte que la condition relative au caractère évident de l’irrégularité des versements en cause est remplie en l’espèce de sorte que la Commission était en droit de procéder à la répétition des sommes indûment versées, en vertu de l’article 85 du statut.

102    Enfin, s’agissant de la motivation de la décision du 10 décembre 2003 relative à la récupération des sommes versées, il y a lieu de rappeler la jurisprudence constante selon laquelle l’obligation de motivation d’une décision faisant grief a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé les indications nécessaires pour savoir si la décision est fondée ou non et, d’autre part, d’en rendre possible le contrôle juridictionnel (arrêt de la Cour du 26 novembre 1981, Michel/Parlement, 195/80, Rec. p. 2861, point 22, et arrêt du Tribunal du 5 avril 2005, Hendrickx/Conseil, T‑376/03, non encore publié au Recueil, point 68).

103    Le Tribunal constate que la décision du 10 décembre 2003 invoque l’article 85 du statut comme base juridique, et, en outre, fait référence au changement intervenu dans la situation de la requérante comme justification de la décision de récupération. Ledit changement ressort de la décision du 31 octobre 2003 qui lui avait annoncé qu’elle n’avait pas droit à l’indemnité de dépaysement, ni, par conséquent, à l’indemnité d’installation. En outre, la décision de rejet des réclamations, dont la motivation est censée coïncider avec la motivation de la décision contre laquelle la réclamation était dirigée (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 15 septembre 2005, Casini/Commission, T‑132/03, non encore publié au Recueil, point 32), contient, outre un exposé clair de la jurisprudence applicable, les raisons pour lesquelles l’AHCC estime qu’en l’espèce l’irrégularité du versement était si évidente que la requérante ne pouvait manquer d’en avoir connaissance. Elle cite, à cet égard, le fait que la requérante résidait à Bruxelles depuis mars 1993, qu’elle avait travaillé pour le CNR de façon ininterrompue depuis 1986, et qu’elle avait connaissance des dispositions du décret législatif n° 127 du 4 juin 2003 comme circonstances qui auraient dû l’amener à s’interroger sur le bien-fondé de l’octroi des indemnités dont elle bénéficiait et à consulter la Commission sur ce point.

104    Ainsi, la décision du 31 octobre 2003 et la décision de rejet des réclamations ont permis à la requérante et au Tribunal d’apprécier le bien-fondé de la décision du 10 décembre 2003 concernant la récupération des versements en cause et cette dernière était donc motivée à suffisance de droit au vu de la jurisprudence précitée.

105    Dans ces conditions, le moyen tiré de la violation de l’article 85 du statut doit également être rejeté.

106    Il s’ensuit que le recours doit être rejeté dans son intégralité.

 Sur les dépens

107    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, en vertu de l’article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. La requérante ayant succombé, il y a lieu de décider que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Chaque partie supportera ses propres dépens.

Jaeger

Tiili

Czúcz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 30 novembre 2006.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Jaeger


* Langue de procédure : l’italien.