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Demande de décision préjudicielle présentée par le Juzgado de Primera Instancia nº 4 de Castellón de la Plana (Espagne) le 12 mai 2021 – Casilda/Banco Cetelem SA

(Affaire C-302/21)

Langue de procédure : l’espagnol

Juridiction de renvoi

Juzgado de Primera Instancia nº 4 de Castellón de la Plana

Parties dans la procédure au principal

Partie requérante : Casilda

Partie défenderesse : Banco Cetelem SA

Questions préjudicielles

Première question préjudicielle :

a)    Compte tenu du principe de primauté du droit de l’Union dans les domaines de compétence de l’Union européenne et, en particulier, du cadre réglementaire du crédit à la consommation et des contrats de crédit conclus avec des consommateurs, la juridiction nationale est-elle tenue de vérifier d’office la conformité au droit de l’Union de la jurisprudence du Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne) relative à la Ley de 23 de julio de 1908, sobre nulidad de los contratos de préstamos usurarios (loi du 23 juillet 1908 relative à la nullité des contrats de prêt usuraires), en tant que disposition du droit national (dans la mesure où la portée de cette jurisprudence s’étend non seulement à l’invalidité du contrat conclu, mais également à la définition de l’« objet principal » du contrat de crédit à la consommation, dans sa modalité de crédit renouvelable, ainsi qu’à l’adéquation du rapport « qualité/prix » du service fourni), ou faut-il adopter la position du Tribunal Supremo (Cour suprême), qui estime que cette obligation de vérification de la conformité au droit de l’Union et à ses directives est subordonnée à la demande de la partie requérante et conditionnée par celle-ci (principe du dispositif), de sorte qu’il y a lieu de considérer que la primauté du droit de l’Union et sa portée harmonisatrice n’« entrent pas en jeu » si l’action exercée en vertu du droit national est « uniquement ou principalement » fondée sur la nullité du crédit à la consommation « en raison de son caractère usuraire », et ce, même si la portée de la jurisprudence de cette juridiction suprême relative à l’interprétation et à l’application de ladite loi sur l’usure s’étend à la définition de l’objet principal et à l’adéquation du rapport qualité/prix du crédit à la consommation sur lequel la juridiction nationale est appelée à statuer ?

b)    En tout état de cause, compte tenu : du principe de primauté et de la portée harmonisatrice du droit de l’Union en matière de réglementation du crédit à la consommation et des contrats de crédit conclus avec des consommateurs ; du fait que le Tribunal Supremo (Cour suprême) a itérativement déclaré dans de multiples arrêts que l’« exclusion » prévue par la règle harmonisée de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13/CEE du Conseil 1 , a été pleinement transposée dans le droit espagnol et que le juge national ne saurait dès lors procéder à un contrôle juridictionnel des prix ; du fait qu’aucune disposition du droit espagnol, pas même la loi du 23 juillet 1908 relative à la nullité des contrats de prêt usuraires, ne permet ou ne couvre, de manière générale, un tel contrôle juridictionnel des prix ; et du fait que l’éventuel manque de transparence de la clause déterminant le prix du crédit à la consommation n’a, en outre, fait l’objet d’aucune appréciation, l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13, s’oppose-t-il à ce que la juridiction nationale applique ladite loi sur l’usure en étendant sa portée hors de son cadre naturel de constatation de la nullité du contrat et exerce, en vertu d’un pouvoir « ex novo », un « contrôle juridictionnel » sur l’objet principal du contrat de nature à déterminer, de manière générale, le prix du crédit à la consommation (par référence à son taux d’intérêt rémunératoire, ou taux d’intérêt nominal) ou le coût de ce crédit (par référence à son taux annuel effectif global) ?

c)    Enfin, conformément à ce qui précède et compte tenu du cadre réglementaire et harmonisateur établi par le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, en particulier dans le domaine de compétences de l’Union européenne relatif au fonctionnement du marché intérieur, l’article 120 TFUE, combiné à une économie de marché ouverte et au principe de liberté contractuelle, s’oppose-t-il à ce que la juridiction nationale exerce un contrôle permettant de fixer de manière générale le prix ou le coût d’un crédit à la consommation sans que ledit contrôle soit expressément couvert par une disposition du droit national ?

Seconde question préjudicielle :

Compte tenu du principe de primauté du droit de l’Union dans le champ d’harmonisation relevant de la compétence de l’Union européenne, en particulier dans le cadre des directives régissant le crédit à la consommation et les contrats de crédit conclus avec des consommateurs, et dès lors que le principe de sécurité juridique constitue une condition nécessaire au bon fonctionnement et à l’efficacité du marché intérieur du crédit à la consommation, ce principe de sécurité juridique s’oppose-t-il à une limitation du taux annuel effectif global dans les contrats de crédit à la consommation, susceptible d’être imposée de manière générale au consommateur afin de lutter contre l’usure, telle que celle établie par le Tribunal Supremo (Cour suprême) non sur la base de critères objectifs et précis, mais par simple approximation à une référence, de sorte que chaque juridiction nationale reste libre de déterminer concrètement cette limite afin de statuer sur les litiges dont elle est saisie ?

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1     Directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO 1993, L 95, p. 29)