Language of document : ECLI:EU:T:2013:249

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

16 mai 2013(*)

« Marque communautaire – Procédure de nullité – Marque communautaire figurative SEBA TRADITION – Marque nationale figurative antérieure JOHANN WILHELM VON EICKEN TRADITION – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑508/10,

Seba Diş Tįcaret ve Naklįyat AŞ, établie à Maltepe (Turquie), représentée par Me H. Wilde, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. G. Schneider, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Joh. Wilh. von Eicken GmbH, établie à Lübeck (Allemagne), représentée par Mes C. Rohnke et F. Thiering, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 18 août 2010 (affaire R 559/2009-4), relative à une procédure de nullité entre Joh. Wilh. von Eicken GmbH et Seba Diş Tįcaret ve Naklįyat AŞ,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. S. Papasavvas (rapporteur), président, V. Vadapalas et K. O’Higgins, juges,

greffier : T. Weiler

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 19 octobre 2010,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 9 février 2011,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 1er février 2011,

à la suite de l’audience du 18 avril 2013,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 18 juillet 2000, la requérante, Seba Diş Tįcaret ve Naklįyat AŞ, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 34 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Produits du tabac, en particulier cigarettes, cigarillos, cigares, tabac à pipe et articles pour fumeurs, briquets ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 24/2001, du 12 mars 2001.

5        La marque a été enregistrée le 22 août 2001.

6        Le 23 novembre 2007, l’intervenante, Joh. Wilh. von Eicken GmbH, a formé une demande de nullité, au titre de l’article 52 du règlement n° 40/94 (devenu article 53 du règlement n° 207/2009), à l’encontre de ladite marque pour l’ensemble des produits visés au point 3 ci-dessus.

7        La demande de nullité était fondée sur la marque nationale figurative, enregistrée en Allemagne le 29 mai 2000 sous le n° 30025616, désignant, en partie, les mêmes produits relevant de la classe 34 et correspondant au signe représenté ci-après :

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8        Les causes de nullité invoquées à l’appui de la demande étaient celles visées à l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 40/94 [devenu article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009], lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009].

9        Le 30 mars 2009, la division d’annulation a fait droit à la demande de nullité et déclaré nulle la marque communautaire pour tous les produits désignés par celle-ci, en raison de l’existence d’un risque de confusion [arrêt du Tribunal du 7 février 2013, AMC-Representações Têxteis/OHMI–MIP Metro (METRO KIDS COMPANY), T‑50/12, non encore publié au Recueil].

10      Le 15 mai 2009, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’annulation.

11      Par décision du 18 août 2010 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours de la requérante. En particulier, elle a considéré que, eu égard à l’identité ou à la similitude des produits respectifs, au caractère distinctif moyen de la marque antérieure et à l’identité phonétique des signes ainsi qu’à leur similitude visuelle et conceptuelle, il existait un risque de confusion entre les marques en cause pour le public allemand.

 Procédure et conclusions des parties

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

13      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

14      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal, rejeter le recours ;

–        à titre subsidiaire, annuler la décision attaquée en tant qu’elle rejette comme irrecevable la demande de nullité fondée, d’une part, sur les causes de nullité relative prévues à l’article 53, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, lu en combinaison avec l’article 8, paragraphe 3, dudit règlement, et, d’autre part, sur la mauvaise foi du demandeur lors du dépôt de la marque communautaire visée à l’article 52, paragraphe 1, sous b), de ce règlement.

–        condamner la requérante aux dépens, y compris à ceux de l’intervenante ;

 En droit

15      La requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Elle fait valoir que, en dépit de la relative similitude voire de l’identité des produits pour lesquels les deux marques ont été déposées, il n’y a aucun risque de confusion entre les marques en cause.

16      L’OHMI et l’intervenante soutiennent que c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé que, au regard de la similitude entre les signes et du caractère identique ou très similaire des produits en cause, il y avait un risque de confusion entre les marques en conflit.

17      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement n° 207/2009, il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

18      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

19      Il convient de rappeler que, aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, point 42, et la jurisprudence citée].

20      Lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de l’Union européenne, il y a lieu de prendre en compte la perception des marques en conflit par le consommateur des produits en cause sur ce territoire. Toutefois, il y a lieu de noter que, pour refuser l’enregistrement d’une marque communautaire, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 existe dans une partie de l’Union [voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec. p. II‑5409, point 76, et la jurisprudence citée].

21      C’est à la lumière des principes susmentionnés qu’il convient d’examiner le présent recours.

22      En premier lieu, s’agissant du public pertinent, il doit être relevé que la requérante ne conteste ni l’appréciation effectuée par la chambre de recours, selon laquelle le public pertinent est composé du consommateur moyen, qui est normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, ni l’appréciation selon laquelle, dès lors que la marque antérieure est enregistrée en Allemagne, il convient de se référer au public allemand pour apprécier le risque de confusion. Au regard des produits en cause et de la marque antérieure, cette appréciation doit, en tout état de cause, être validée.

23      En deuxième lieu, s’agissant de la comparaison des produits, il y a lieu de constater que la requérante ne conteste pas davantage les appréciations de la division d’annulation et de la chambre de recours selon lesquelles les produits en cause sont soit identiques soit similaires. Au demeurant, force est de constater que cette appréciation est exempte d’erreur.

24      En troisième lieu, s’agissant de la comparaison des signes, il convient de rappeler que l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt de la Cour du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, point 35, et la jurisprudence citée).

25      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt OHMI/Shaker, précité, point 41, et la jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts de la Cour OHMI/Shaker, précité, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié au Recueil, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt Nestlé/OHMI, précité, point 43).

26      Conformément à la jurisprudence, lors de l’appréciation du caractère dominant d’un ou de plusieurs composants déterminés d’une marque complexe, il convient de prendre en compte, notamment, les qualités intrinsèques de chacun de ces composants en les comparant à celles des autres composants. En outre et de manière accessoire, peut être prise en compte la position relative des différents composants dans la configuration de la marque complexe [arrêts du Tribunal du 13 décembre 2007, Cabrera Sánchez/OHMI – Industrias Cárnicas Valle (el charcutero artesano), T‑242/06, non publié au Recueil, point 47, et du 24 mars 2011, XXXLutz Marken/OHMI – Natura Selection (Linea Natura Natur hat immer Stil), T‑54/09, non publié au Recueil, point 41].

27      Il y a lieu de relever que les marques qu’il convient de comparer sont les suivantes :

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28      S’agissant de la comparaison visuelle, la chambre de recours a estimé que les deux marques en cause mettaient en valeur l’élément « tradition », lequel dominait l’impression visuelle d’ensemble. Elle en a conclu que les signes en cause étaient visuellement hautement similaires malgré des différences au niveau des autres éléments et des couleurs.

29      La requérante fait valoir que, dans le contexte qui est celui des produits en cause, l’élément « tradition » est purement descriptif. Elle ajoute que, s’agissant de sa marque, l’élément verbal « seba » et l’élément figuratif représentant le visage d’un homme mûr sont au moins aussi importants, sur le plan visuel, que l’élément « tradition ». Elle estime que la circonstance qu’un seul élément soit commun aux deux marques en cause ne suffit pas à créer un risque de confusion.

30      L’OHMI et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

31      En l’espèce, il y a lieu de relever que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que l’impression visuelle des deux signes en cause était dominée par l’élément « tradition », commun aux deux marques.

32      En effet, l’analyse de la marque communautaire permet de constater que l’élément « tradition » domine l’impression visuelle par ses caractères de grande taille et de couleur rouge, particulièrement visibles sur le fond doré de la marque communautaire. Pour autant, les autres éléments de la marque ne sauraient être qualifiés de négligeables. En effet, d’une part, l’élément figuratif représentant le visage d’un homme, par sa taille importante, sa position en haut de la marque, ses couleurs et la simplicité de son dessin, et, d’autre part, l’élément verbal « seba », lequel occupe une position centrale dans le signe accentuée par une police d’écriture de couleur noire et par un trait noir le mettant en valeur, détiennent une place secondaire dans l’impression visuelle créée par la marque communautaire.

33      S’agissant de la marque allemande, il y a lieu de constater, comme l’a relevé à juste titre la chambre de recours, que l’élément verbal « tradition », composé de caractères gras, de grande taille et de couleur noire sur fond blanc, domine l’impression d’ensemble. Sur ce signe, l’élément figuratif, plus petit et comportant davantage de détails que celui de la marque communautaire, ne sera pas gardé en mémoire par le public pertinent. En outre, comme dans la marque communautaire, des éléments verbaux surplombent l’élément « tradition » et ont un caractère secondaire. En effet, l’expression « johann wilhelm », composée de caractères de petite taille par rapport à l’élément « tradition », et l’expression « von eicken », de taille légèrement supérieure à l’expression « johann wilhelm », mais composée de caractères non gras, attirent moins le regard que l’élément dominant « tradition ».

34      Il résulte de l’ensemble de ces considérations, et notamment de la présence, dans les deux signes, de l’élément dominant « tradition » et du fait que les deux marques sont composées de façon semblable, que, selon une impression d’ensemble, les deux marques en conflit sont similaires sur le plan visuel.

35      Il y a lieu d’ajouter, qu’à supposer même que le terme « tradition » ne soit pas considéré comme dominant dans la marque communautaire, les marques en conflit devraient, compte tenu du nombre important de leurs similitudes, être qualifiées de similaires sur le plan visuel.

36      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument de la requérante, selon lequel le terme « tradition » n’a pas de caractère distinctif. En effet, un éventuel caractère distinctif faible d’un élément d’une marque complexe n’implique pas nécessairement que celui-ci ne saurait constituer un élément dominant, dès lors que, en raison, notamment, de sa position dans le signe ou de sa dimension, il est susceptible de s’imposer à la perception du consommateur et d’être gardé en mémoire par celui-ci [voir arrêt du Tribunal du 13 décembre 2007, Xentral/OHMI – Pages jaunes (PAGESJAUNES.COM), T‑134/06, Rec. p. II‑5213, point 54, et la jurisprudence citée].

37      S’agissant de la comparaison phonétique, la chambre de recours a estimé que les marques en conflit étaient identiques. Elle a considéré que les cigarettes étaient des biens de consommation nécessaires au quotidien dont le consommateur n’était pas disposé à retenir pendant longtemps les caractéristiques. Elle a ajouté que, à l’oral, les consommateurs s’orienteraient en fonction de l’élément dominant « tradition » dès lors que les autres éléments verbaux distinctifs étaient plus difficiles à lire en raison de la plus petite taille de la police d’écriture, si bien que le consommateur n’avait aucune raison de se servir d’eux pour nommer les marques en cause. Enfin, elle a estimé que, en raison de l’élément « tradition », commun aux deux marques en cause, la similitude phonétique demeurait la même si on fondait la comparaison phonétique sur les éléments verbaux « seba tradition » et « johann wilhelm von eicken tradition ».

38      La requérante fait valoir que le terme « tradition » a un caractère purement descriptif. Elle affirme que le consommateur réclamera la marque communautaire en l’appelant non « tradition », mais « seba » ou « seba tradition ». Or, selon la requérante, même dans cette dernière combinaison, c’est le terme « seba » qui est l’élément dominant.

39      L’OHMI soutient que les signes en cause sont phonétiquement similaires.

40      L’intervenante affirme que la chambre de recours a considéré à juste titre que les marques en cause étaient phonétiquement identiques.

41      Il y a lieu de relever que, eu égard à l’analyse effectuée aux points 32 et 33 ci-dessus concernant la similitude visuelle, les marques en conflit seront, le plus souvent, prononcées « tradition ». Pour autant, il ne saurait être exclu que lesdites marques soient, parfois, prononcées « seba tradition » s’agissant de la marque communautaire et « von eicken tradition » s’agissant de la marque antérieure. En ce qui concerne les autres éléments composant les marques, à savoir, pour la marque communautaire, les expressions « established 1932 » et « 20 filter cigarettes », et, pour la marque antérieure, les expressions « established 1770 » et « premium virginia blend filter king size cigarettes », il est constant que, compte tenu de leur emplacement aux extrémités des signes et de leur taille réduite, ils ne sauraient être dominants d’un point de vue phonétique et ne seront, par conséquent, pas utilisés pour désigner les marques en cause. De même, s’agissant de la marque antérieure, l’expression « johann wilhelm », compte tenu de sa taille réduite et de son peu de visibilité sur la marque, ne sera pas utilisée pour la désigner.

42      Il résulte de l’ensemble de ces considérations que les signes en conflit sont, sur le plan phonétique, identiques si lesdites marques sont prononcées « tradition », ou au moins similaires, si elles sont nommées « seba tradition » et « von eicken tradition ».

43      Enfin, s’agissant de la comparaison conceptuelle, la chambre de recours a considéré que les signes en cause étaient similaires dès lors que le public pertinent reconnaîtrait le terme « tradition », lequel était commun aux deux marques.

44      Force est de constater que la requérante reconnaît que la comparaison conceptuelle révèle une certaine similitude dans la mesure où l’élément commun aux deux marques évoque une tradition ancienne de l’entreprise. Pour autant, elle affirme que cette similitude est compensée par le fait que le terme « tradition » a un caractère purement descriptif.

45      L’OHMI et l’intervenante contestent ce dernier argument.

46      En l’espèce, au regard des marques en conflit et dès lors que la requérante ne la remet pas en cause, l’appréciation de la chambre de recours, selon laquelle lesdites marques sont similaires sur le plan conceptuel, doit être validée.

47      Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel le terme « tradition » aurait un caractère purement descriptif. En effet, cette circonstance, à la supposer établie, ne permet pas de conclure à l’absence de similitude conceptuelle entre les marques en cause.

48      Il s’ensuit que, selon une impression d’ensemble, les signes en cause doivent être considérés comme étant similaires nonobstant l’appréciation différente du Tribunal et de la chambre de recours sur le niveau d’intensité des similitudes visuelle et phonétique.

49      En dernier lieu, s’agissant du risque de confusion, il y a lieu de rappeler que l’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêt de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, point 17, et arrêt VENADO avec cadre e.a., précité, point 74).

50      La chambre de recours a considéré que, eu égard à l’identité ou à la similitude des produits respectifs, au caractère distinctif moyen du signe antérieur ainsi qu’à l’identité phonétique entre les signes et à leur similitude visuelle et conceptuelle, il y avait un risque de confusion pour le public allemand.

51      La requérante soutient qu’une comparaison d’ensemble ne permettra pas de conclure que l’usage de l’élément identique « tradition » dans les deux marques en cause pourra faire naître un risque de confusion.

52      L’OHMI et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

53      En l’espèce, il résulte de l’examen des produits en cause qu’ils sont soit identiques soit similaires et de celui des signes litigieux qu’ils sont similaires sur les plans visuel, conceptuel et phonétique.

54      En conséquence, il y a lieu de constater que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré qu’il existait un risque de confusion dans la perception du public pertinent, à savoir du consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.

55      Cette conclusion n’est pas remise en cause par les arguments de la requérante.

56      En premier lieu, la requérante ne saurait utilement soutenir que reconnaître l’existence d’un risque de confusion reviendrait à conférer à l’intervenante le monopole de l’usage du terme « tradition » sur les paquets de cigarettes alors que ce terme relève du langage courant et est dépourvu de sens figuré. En effet, la présente décision ne saurait, en elle-même, avoir pour conséquence d’interdire l’utilisation du mot « tradition », notamment dans les marques intervenant dans la commercialisation des produits en cause.

57      En second lieu, la requérante fait valoir qu’il n’y a aucun risque de confusion dès lors que le terme « tradition » n’a qu’une faible force distinctive. À cet égard, il convient de rappeler que, si le caractère distinctif de la marque antérieure doit être pris en compte pour apprécier le risque de confusion, il n’est qu’un élément parmi d’autres intervenant lors de cette appréciation. Ainsi, même en présence d’une marque antérieure à caractère distinctif faible, il peut exister un risque de confusion, notamment, en raison d’une similitude des signes et des produits ou des services concernés [arrêts du Tribunal du 22 septembre 2005, Alcon/OHMI – Biofarma (TRAVATAN), T‑130/03, Rec. p. II‑3859, point 78, du 13 juillet 2011, Inter IKEA Systems/OHMI – Meteor Controls (GLÄNSA), T‑88/10, non publié au Recueil, point 52, et arrêt METRO KIDS COMPANY, précité, point 54 ]. Or, en l’espèce, le prétendu caractère faiblement distinctif, ou descriptif, de l’élément « tradition » n’est pas de nature à exclure l’existence d’un risque de confusion dès lors que, d’une part, les produits couverts par les deux signes en conflit sont identiques ou présentent différents degrés de similitude et, d’autre part, les signes en cause sont similaires sur les plans visuel, phonétique et conceptuel (voir en ce sens, ordonnance de la Cour du 29 novembre 2012, Hrbek/OHMI, C‑42/12 P, non encore publiée au Recueil, point 63).

58      Dès lors, il convient de rejeter l’unique moyen soulevé par la requérante ainsi que le recours dans son ensemble, sans qu’il y ait lieu d’examiner le deuxième chef de conclusions de l’intervenante, présenté à titre subsidiaire.

 Sur les dépens

59      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Seba Diş Tįcaret ve Naklįyat AŞ est condamnée aux dépens.

Papasavvas

Vadapalas

O’Higgins

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 mai 2013.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.