Language of document : ECLI:EU:T:2023:516

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

6 septembre 2023 (*)

« Dessin ou modèle communautaire – Procédure de nullité – Dessin ou modèle communautaire enregistré représentant une boîte d’emballage et un assortiment de chaussettes – Motifs de nullité – Articles 5, 7 et article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 6/2002 »

Dans l’affaire T‑492/22,

Cyprian Iwuć, demeurant à Sliema (Malte), représenté par Me T. Kos, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. J. Ivanauskas, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Hangzhou XiangHui International Trading Co., Ltd, établie à Hangzhou (Chine),

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de Mme K. Kowalik‑Bańczyk, présidente, M. E. Buttigieg et Mme B. Ricziová (rapporteure), juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, le requérant, M. Cyprian Iwuć, demande l’annulation de la décision de la troisième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 20 mai 2022 (affaire R 1672/2021‑3) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 15 décembre 2020, IWUC sp. z o.o, le prédécesseur en droit du requérant, a présenté à l’EUIPO une demande en nullité du dessin ou modèle communautaire enregistré sous le numéro 8 043 228-0001 (ci-après le « dessin ou modèle contesté ») à la suite d’une demande déposée le 17 juillet 2020 qui est représenté dans les vues suivantes :

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3        Les produits auxquels le dessin ou modèle contesté est destiné à être appliqué relevaient des classes 02.04 et 09.03 au sens de l’arrangement de Locarno du 8 octobre 1968 instituant une classification internationale pour les dessins et modèles industriels, tel que modifié, et correspondaient, pour chacune de ces classes, à la description suivante : « Chaussettes (ensemble de -) » et « Boîtes pour l’emballage ».

4        Les motifs invoqués à l’appui de la demande en nullité étaient ceux visés, d’une part, à l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 6/2002 du Conseil, du 12 décembre 2001, sur les dessins ou modèles communautaires (JO 2002, L 3, p. 1), lu conjointement avec l’article 5 de ce règlement, et, d’autre part, à l’article 25, paragraphe 1, sous d), dudit règlement, tel que modifié.

5        La demande en nullité était fondée sur les dessins et modèles suivants :

–        le dessin ou modèle enregistré le 15 novembre 2017, sous le numéro 4 506 947‑0001, pour des « chaussette (emballage pour -), chaussettes (ensemble de -) », (ci-après le « dessin ou modèle antérieur enregistré »), publié le 15 janvier 2018 au Bulletin des dessins ou modèles communautaires, et représenté comme suit :

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–        douze captures d’écran d’une application mobile, datées de 2017, 2018 et 2019, portant la mention RAINBOWSOCKS, provenant, selon le prédécesseur en droit du requérant, de son compte sur des réseaux sociaux et présentant, entre autres, les images suivantes :

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–        six captures d’écran d’une application mobile, datées de 2018 et 2019, portant la mention SOCKS PLACE, provenant, selon le prédécesseur en droit du requérant, de son compte sur des réseaux sociaux et présentant, entre autres, les images suivantes :

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6        Le prédécesseur en droit du requérant a également mentionné l’apparition, en 2016, de PIZZA SOCKS sur la plateforme de vente en ligne Amazon et a fourni un hyperlien vers le site Internet « www.amazon.co.uk » ainsi qu’une capture d’écran du site de vente en ligne Amazon faisant apparaître la date de première disponibilité du 6 décembre 2016 et un numéro ASIN (Amazon Standard Identification Number).

7        Le 27 juillet 2021, la division d’annulation a rejeté la demande en nullité.

8        Le 27 septembre 2021, le requérant a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’annulation.

9        Dans son mémoire exposant les motifs du recours devant la chambre de recours ainsi qu’en annexe à celui-ci, le requérant a fourni les éléments de preuve suivants :

–        des liens Internet de la plateforme en ligne Amazon, spécifiquement pour le Royaume-Uni, la République tchèque, la Pologne et la France, ainsi que différents autres liens Internet et captures d’écran de la plateforme en ligne Amazon ;

–        des hyperliens renvoyant vers des sites de publication en ligne accompagnés de captures d’écran ;

–        des hyperliens renvoyant vers des publications sur un compte Instagram accompagnés de captures d’écran ;

–        des hyperliens renvoyant vers des publications sur un compte Facebook accompagnés de captures d’écran ;

–        et un tableau de résultat des ventes de PIZZA SOCKS BOX sur la plateforme en ligne Amazon intitulé « sales of the Pizza Socks Box brand product on European markets by Amazon (amount in Euro) ».

10      Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours comme non fondé. En premier lieu, la chambre de recours a relevé que le requérant n’a pas contesté la conclusion de la division d’annulation selon laquelle l’article 25, paragraphe 1, sous d), du règlement no 6/2002 ne s’appliquait pas en l’espèce. En deuxième lieu, s’agissant de la divulgation des dessins ou modèles invoqués au soutien de la demande en nullité, d’une part, elle a fait état des divers hyperliens renvoyant aux pages de la plateforme de vente en ligne Amazon et a conclu que la simple fourniture de tels hyperliens vers le contenu du site Internet était irrecevable. D’autre part, elle a considéré que le dessin ou modèle antérieur enregistré était réputé avoir été divulgué au public, au sens de l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 6/2002, avant la date de dépôt du dessin ou modèle contesté. En troisième lieu, s’agissant de la nouveauté du dessin ou modèle contesté, elle a considéré que le dessin ou modèle antérieur enregistré n’était pas identique au premier, car les caractéristiques qui les différenciaient ne pouvaient pas être considérées comme des détails « insignifiants », au sens de l’article 5, paragraphe 2, de ce règlement. En outre, la chambre de recours a considéré qu’il en était de même pour « toutes les chaussettes et [les] boîtes représentées sur d’autres images, déposées soit pour la première fois devant [elle], soit en tant qu’éléments de preuve supplémentaires devant la division d’annulation ».

 Conclusions des parties

11      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée et, partant, annuler le dessin ou modèle contesté ;

–        à titre subsidiaire, si l’absence de nouveauté du dessin ou modèle contesté dans son ensemble n’est pas reconnue, sur le fondement de l’article 25, paragraphe 6, du règlement no 6/2002, limiter l’enregistrement du dessin ou modèle contesté à la boîte en carton ;

–        condamner l’EUIPO et l’autre partie à la procédure devant celui-ci aux dépens relatifs à la procédure devant la chambre de recours et condamner l’EUIPO à l’ensemble des dépens relatifs à la présente procédure.

12      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens en cas de convocation à l’audience.

 En droit

 Sur le premier chef de conclusions

13      Par son premier chef de conclusions, le requérant demande au Tribunal d’annuler la décision attaquée ainsi que, par voie de conséquence, le dessin ou modèle contesté.

14      Le requérant soulève, en substance, deux moyens, tirés respectivement, le premier, de la violation de l’article 7, du règlement no 6/2002, lu en combinaison avec l’article 63 de ce règlement, et, le second, de la violation de l’article 5 du même règlement.

 Considérations générales

15      En vertu de l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 6/2002, la protection d’un dessin ou modèle par un dessin ou modèle communautaire est conditionnée par la nouveauté et par le caractère individuel dudit dessin ou modèle.

16      Selon l’article 5, paragraphe 1, sous b), du règlement no 6/2002, un dessin ou modèle enregistré est considéré comme nouveau si aucun dessin ou modèle identique n’a été divulgué au public avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement du dessin ou modèle pour lequel la protection est demandée. Il ressort de l’article 5, paragraphe 2, du même règlement que deux dessins ou modèles sont considérés comme identiques lorsque leurs caractéristiques ne diffèrent que par des détails insignifiants, c’est-à-dire des détails qui ne seront pas immédiatement perceptibles et qui ne produiront donc pas de différences, même faibles, entre lesdits dessins ou modèles. A contrario, afin d’apprécier la nouveauté d’un dessin ou modèle, il convient d’apprécier l’existence de différences qui ne sont pas insignifiantes entre les dessins ou modèles en conflit, même si celles-ci sont faibles [arrêt du 6 juin 2013, Kastenholz/OHMI – Qwatchme (Cadrans de montre), T‑68/11, EU:T:2013:298, point 37].

17      Lors de l’examen de l’absence de caractère nouveau d’un dessin ou modèle, il convient de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce [voir, en ce sens, arrêt du 9 mars 2012, Coverpla/OHMI – Heinz-Glas (Flacons) T‑450/08, non publié, EU:T:2012:117, point 24 et jurisprudence citée].

18      Selon l’article 6, paragraphe 1, sous b), du règlement no 6/2002, un dessin ou modèle enregistré est considéré comme présentant un caractère individuel si l’impression globale qu’il produit sur l’utilisateur averti diffère de celle que produit sur un tel utilisateur tout dessin ou modèle qui a été divulgué au public avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement. En outre, l’article 6, paragraphe 2, de ce règlement prévoit que, pour apprécier ce caractère individuel, il est tenu compte du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle.

19      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 6/2002, aux fins de l’application notamment de l’article 5, paragraphe 1, sous b), du même règlement, un dessin ou modèle est réputé avoir été divulgué au public s’il a été publié à la suite de l’enregistrement ou autrement, ou exposé, utilisé dans le commerce ou rendu public de toute autre manière, avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement du dessin ou modèle pour lequel la protection est demandée, sauf si ces faits, dans la pratique normale des affaires, ne pouvaient raisonnablement être connus des milieux spécialisés du secteur concerné, opérant dans l’Union européenne. Toutefois, le dessin ou modèle n’est pas réputé avoir été divulgué au public s’il a seulement été divulgué à un tiers sous des conditions explicites ou implicites de secret.

20      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner le recours du requérant. À cet égard, le Tribunal estime opportun d’examiner, d’abord, le second moyen et, ensuite, le premier moyen.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 5 du règlement no 6/2002

21      Par son second moyen, le requérant fait valoir, en substance, que la chambre de recours n’a pas examiné la demande en nullité à la lumière de l’ensemble des éléments de preuve qu’il a produits et que, par conséquent, elle a conclu, à tort, que le dessin ou modèle contesté répondait au critère de nouveauté au sens de l’article 5 du règlement no 6/2002.

22      L’EUIPO conteste les arguments du requérant.

23      Il y a lieu de constater que le second moyen est fondé sur la violation de l’article 5 du règlement no 6/2002.

24      À cet égard, le requérant soutient, premièrement, que, du fait que la chambre de recours n’a pas pris en compte les « éléments de preuve en ligne » qu’il a présentés, la nouveauté du dessin ou modèle contesté n’a été examinée que sur le fondement du certificat d’enregistrement du dessin ou modèle antérieur enregistré, qui ne fait état que d’une seule des variantes de chaussettes à motifs inspirés de la pizza. En effet, selon le requérant, si tous les éléments de preuve, qu’il a produits, avaient été pris en considération, l’appréciation de la chambre de recours aurait été complètement différente.

25      Or, il y a lieu de constater que, après la description du dessin ou modèle contesté, la chambre de recours a considéré, au point 26 de la décision attaquée, en ce qui concerne la comparaison du dessin ou modèle contesté par rapport au dessin ou modèle antérieur enregistré, que, bien que les ensembles de chaussettes soient disposés de manière similaire dans les deux dessins ou modèles, ils différaient par leurs motifs et leurs couleurs ainsi que par l’agencement des « tranches » de chaussettes dans les dessins ou modèles, à savoir que les « tranches » de chaussettes identiques étaient placées l’une à côté de l’autre dans le dessin ou modèle antérieur enregistré, tandis que dans le dessin ou modèle contesté, elles étaient placées l’une en face de l’autre. En outre, selon la chambre de recours, les chaussettes dont les deux ensembles étaient composés n’étaient pas identiques, mais présentaient des différences notables au niveau de leurs motifs et de leurs couleurs. De plus, le dessin ou modèle contesté différait du dessin ou modèle antérieur enregistré par la forme de la boîte, le dessin ou modèle contesté et le dessin ou modèle antérieur enregistré possédant, respectivement, une boîte octogonale et une boîte carrée avec deux coins incurvés.

26      Au point 26 de la décision attaquée, la chambre de recours a ajouté que, bien que les mots « pizza » et « sock box » figuraient sur la partie avant des deux boîtes en cause, ces mots se trouvaient à des endroits différents et le dessin ou modèle contesté contenait une image différente de celle du dessin ou modèle antérieur enregistré. La chambre de recours a considéré, au point 27 de la décision attaquée, que ces caractéristiques qui différenciaient les dessins ou modèles comparés ne sauraient être considérées comme des détails « insignifiants », au sens de l’article 5, paragraphe 2, du règlement no 6/2002, étant donné qu’elles sont perçues immédiatement. Selon elle, il en était de même pour « toutes les chaussettes et boîtes représentées sur d’autres images, déposées soit pour la première fois devant [elle], soit en tant qu’éléments de preuve supplémentaires devant la division d’annulation ».

27      Il est vrai que la chambre de recours n’a pas spécifiquement pris en compte les éléments de preuve consistant uniquement en des liens Internet de la plateforme en ligne Amazon lors de son appréciation de la nouveauté au sens de l’article 5 du règlement no 6/2002. Toutefois, le requérant n’allègue pas clairement, dans la requête, que ces éléments de preuve auraient montré des dessins ou modèles antérieurs spécifiques autres que ceux apparaissant déjà soit dans le dessin ou modèle antérieur enregistré soit dans les captures d’écran examinées par la chambre de recours. Le requérant ne précise pas quelles sont les « variantes » prétendument non prises en compte par la chambre de recours et en quoi ces « variantes » se distinguent du dessin ou modèle antérieur enregistré et des dessins ou modèles apparaissant sur les images qu’il a déposées et qui ont été prises en compte par la chambre de recours au point 27 de la décision attaquée.

28      Deuxièmement, le requérant soutient que « hormis la boîte, chaque chaussette et sa disposition sont des copies fidèles des chaussettes […] présentées […] dans les captures d’écran produites ». Il fait valoir également que « la disposition des chaussettes en triangle, le nombre de pièces, le fait que la paire de chaussettes supplémentaire forme la “pâte” entourant la chaussette de pizza, sont les mêmes que dans les projets produits par [lui]. Les chaussettes représentent également les mêmes “extras” : pepperoni, champignons, olives… ».

29      Or, ces arguments consistent en de simples affirmations générales et peu circonstanciées ne permettant pas de remettre en cause les constatations précises de la chambre de recours relatives à l’existence de différences entre les dessins ou modèles en conflit. En outre, dans la mesure où le requérant ne précise pas quels sont les dessins ou modèles antérieurs qu’il compare avec le dessin ou modèle contesté, le Tribunal ne peut que déduire que ses arguments concernent le dessin ou modèle antérieur enregistré. De plus, le requérant a même admis que le dessin ou modèle contesté n’était pas, en ce qui concerne l’élément en carton, similaire aux dessins ou modèles précédemment divulgués. Ainsi, les arguments du requérant sont insusceptibles d’établir que la motivation détaillée de la décision attaquée, résumée aux points 25 et 26 ci-dessus, serait entachée d’une quelconque erreur d’appréciation qu’aurait commise la chambre de recours.

30      Troisièmement, le requérant estime que, compte tenu du degré de liberté de création dans la conception des chaussettes et de leur emballage, le recours même, dans le dessin ou modèle contesté, à l’idée de chaussettes disposées sous la forme d’une pizza dans un emballage à pizza « est déjà symptomatique, alors qu’il est possible d’emballer les chaussettes de nombreuses manières différentes », outre leur présentation normale pour la vente. Il soutient que les couleurs et les motifs utilisés ne diffèrent pas non plus au point de donner l’impression d’être différents aux yeux des consommateurs. En outre, selon le requérant, il ne saurait être ignoré que « l’emballage de l’ensemble sous la forme d’une ‘pizza chaussette’ porte un message similaire » et son contenu, à savoir les dessins ou modèles de chaussettes, peut induire en erreur les consommateurs qui voient le même contenu dans deux produits conditionnés différemment.

31      Or, force est de constater que par ces arguments, le requérant conteste, en réalité, le caractère individuel du dessin ou modèle contesté, au sens de l’article 6 du règlement no 6/2002, dans la mesure où ils portent sur l’impression globale produite par les dessins ou modèles en conflit et le degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle [voir, en ce sens, arrêt du 14 mars 2018, Gifi Diffusion/EUIPO – Crocs (Chaussures), T‑424/16, non publié, EU:T:2018:136, point 48].

32      À cet égard, il ressort d’une jurisprudence constante que la nouveauté d’un dessin ou modèle, au sens de l’article 5 du règlement no 6/2002, et le caractère individuel d’un dessin ou modèle, au sens de l’article 6 de ce règlement, impliquent la mise en œuvre de critères juridiques différents et relèvent de deux motifs de nullité distincts [voir, en ce sens, arrêt du 10 juin 2020, L. Oliva Torras/EUIPO – Mecánica del Frío (Attelages pour véhicules), T‑100/19, EU:T:2020:255, point 59 et jurisprudence citée].

33      Partant, l’argumentation du requérant relative à l’application de l’article 6, paragraphe 1, sous b), du règlement no 6/2002 ne saurait être transposée aux fins de l’appréciation des exigences figurant à l’article 5, paragraphe 1, dudit règlement.

34      Dans la mesure où le requérant peut, tout au plus, chercher, par les arguments résumés au point 30 ci-dessus, à remettre en cause la constatation de la chambre de recours au point 29 de la décision attaquée, selon laquelle les différences entre le dessin ou modèle contesté et le dessin ou modèle antérieur enregistré sont également suffisantes pour conclure que le dessin ou modèle contesté « ne produit pas la même impression globale sur l’utilisateur averti que les dessins ou modèles antérieurs », il convient de relever qu’il s’agit d’une constatation surabondante, effectuée par la chambre de recours après avoir conclu que seul le motif de nullité visé à l’article 5 du règlement no 6/2002 avait été valablement invoqué dans le mémoire exposant les motifs du recours, tandis que le motif de nullité visé à l’article 6 de ce règlement n’avait jamais été mentionné ni dans ce mémoire ni dans le formulaire de demande, et que la demande en nullité devait être rejetée comme non fondée, dans la mesure où elle était fondée sur l’article 5 dudit règlement.

35      Au vu de ce qui précède, il y a lieu d’écarter comme inopérants les arguments du requérant relevant du champ d’application de l’article 6 du règlement no 6/2002.

36      Il s’ensuit que l’argumentation du requérant n’est pas de nature à remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours au terme de laquelle elle a conclu à la nouveauté du dessin ou modèle contesté.

37      Partant, le second moyen doit être rejeté comme non fondé.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7 du règlement no 6/2002, lu en combinaison avec l’article 63 de ce règlement

38      Par son premier moyen, le requérant fait valoir, en substance, que la chambre de recours a refusé, à tort, d’accorder une valeur probante à certains éléments de preuve provenant de sites Internet, a ignoré d’autres éléments de preuve et que, par conséquent, elle a conclu, à tort, que le dessin ou modèle contesté n’avait pas fait l’objet d’une divulgation antérieure.

39      L’EUIPO considère que ce moyen est inopérant.

40      Il convient de relever tout d’abord que, dans la mesure où certains des motifs dont une décision fait état sont, à eux seuls, de nature à justifier celle-ci à suffisance de droit, les erreurs qui pourraient entacher d’autres motifs de l’acte sont, en tout état de cause, sans influence sur son dispositif. Il est, par ailleurs, de jurisprudence constante qu’un moyen qui, même s’il était fondé, serait inapte à entraîner l’annulation que poursuit la partie requérante, est inopérant (voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2005, Honeywell/Commission, T‑209/01, EU:T:2005:455, point 48 ; voir également, par analogie, arrêt du 12 juillet 2001, Commission et France/TF1, C‑302/99 P et C‑308/99 P, EU:C:2001:408, points 26 à 29 et jurisprudence citée, et ordonnance du 11 février 2015, Orange/Commission, C‑621/13 P, non publiée, EU:C:2015:114, point 45 et jurisprudence citée).

41      En outre, dès lors que le dispositif d’une décision repose sur plusieurs piliers de raisonnement dont chacun suffirait à lui seul à fonder ce dispositif, il n’y a lieu d’annuler cet acte, en principe, que si chacun de ces piliers est entaché d’illégalité. Dans cette hypothèse, une erreur ou une autre illégalité qui n’affecterait qu’un seul des piliers du raisonnement ne saurait suffire à justifier l’annulation de la décision litigieuse parce qu’elle n’aurait pu avoir une influence déterminante quant au dispositif retenu par l’auteur de cet acte (voir arrêts du 14 décembre 2005, Honeywell/Commission, T‑209/01, EU:T:2005:455, point 49 et jurisprudence citée, et du 15 septembre 2021, France/ECHA, T‑127/20, non publié, EU:T:2021:572, point 33 et jurisprudence citée).

42      Il convient de rappeler également à cet égard que, dans la mesure où un pilier du raisonnement suffisant à fonder le dispositif d’un acte n’est pas remis en cause par une partie requérante dans son recours en annulation, il y a lieu de considérer ce pilier ainsi que, partant, l’acte qui repose sur celui-ci comme licite et établi à son égard (arrêt du 14 décembre 2005, Honeywell/Commission, T‑209/01, EU:T:2005:455, point 50).

43      En l’espèce, il résulte de l’examen du second moyen que le requérant n’est pas parvenu à remettre en cause la conclusion de la chambre de recours selon laquelle le dessin ou modèle contesté satisfaisait à la condition de nouveauté prévue par l’article 5 du règlement no 6/2002. À cet égard, il convient de relever que l’argumentation du requérant, résumé au point 38 ci-dessus, est dénuée de caractère opérant, dans la mesure où, même à supposer que la chambre de recours ait commis des erreurs dans l’appréciation de la valeur probante des éléments de preuve soumis par lui, le requérant n’a pas démontré que ces éléments de preuve comportaient des dessins ou modèles distincts de ceux pris en compte par la chambre de recours dans le cadre de l’appréciation de la nouveauté du dessin ou modèle contesté.

44      Il s’ensuit que les éventuelles erreurs affectant d’autres motifs de la décision attaquée, et notamment ceux relatifs à la divulgation de certains des dessins ou modèles antérieurs invoqués par le requérant, demeurent sans incidence sur le dispositif de la décision attaquée.

45      Partant, le premier moyen doit être écarté comme inopérant.

46      Il résulte de ce qui précède que le premier chef de conclusions doit être rejeté.

 Sur le deuxième chef de conclusions

47      Par son deuxième chef de conclusions, le requérant demande au Tribunal, à titre subsidiaire, dans le cas où l’absence de nouveauté du dessin ou modèle contesté dans son ensemble ne serait pas reconnue, de limiter l’enregistrement dudit dessin ou modèle à la boîte en carton, sur le fondement de l’article 25, paragraphe 6, du règlement no 6/2002.

48      À cet égard, il convient de rappeler que, selon l’article 25, paragraphe 6, du règlement no 6/2002, un dessin ou modèle communautaire enregistré qui a été annulé, conformément à l’article 25, paragraphe 1, sous b), e), f) ou g), du même règlement, peut être maintenu sous une forme modifiée si, sous ladite forme, il répond aux critères d’octroi de la protection et que l’identité du dessin ou modèle est conservée. Par « maintien sous une forme modifiée », on entend l’enregistrement assorti d’une renonciation partielle de la part du titulaire du dessin ou modèle communautaire enregistré ou l’inscription au registre d’une décision judiciaire ou d’une décision de l’EUIPO prononçant la nullité partielle du dessin ou modèle communautaire enregistré.

49      Or, il ressort clairement de cette disposition qu’un tel maintien est conditionné à une renonciation partielle de la part du titulaire du dessin ou modèle communautaire enregistré ou, à défaut, au constat de la nullité de ce dessin ou modèle communautaire dans sa forme initiale. En effet, l’article 25, paragraphe 6, du règlement no 6/2002 permet de maintenir l’enregistrement d’un dessin ou modèle communautaire en supprimant l’élément entaché d’irrégularité [ordonnance du 25 octobre 2021, 4B Company/EUIPO – Deenz [Pendentif (bijou)], T‑329/20, EU:T:2021:732, point 40].

50      En l’espèce, d’une part, le titulaire du dessin ou modèle contesté n’a pas renoncé à l’enregistrement de ce dernier dans sa version initiale. D’autre part, il résulte du point 46 ci-dessus que le Tribunal a rejeté le premier chef de conclusions du requérant visant notamment à l’annulation dudit dessin ou modèle. Dès lors, la condition préalable requise aux fins de l’application de l’article 25, paragraphe 6, du règlement no 6/2002 fait défaut.

51      Partant, le deuxième chef de conclusions ne peut, en tout état de cause, qu’être rejeté comme non fondé, sans qu’il soit besoin d’examiner la fin de non-recevoir opposée par l’EUIPO, tirée de l’irrecevabilité de ce chef de conclusions.

52      Eu égard à tout ce qui précède, le recours doit être rejeté dans son intégralité.

 Sur les dépens

53      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En l’espèce, bien que le requérant ait succombé, l’EUIPO n’a conclu à la condamnation de celui-ci aux dépens qu’en cas de convocation à l’audience. En l’absence d’organisation d’une audience, il convient de décider que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Chaque partie supportera ses propres dépens.

Kowalik-Bańczyk

Buttigieg

Ricziová

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 6 septembre 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : le polonais.