Language of document : ECLI:EU:T:2021:367

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

16 juin 2021 (*) (1)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Sécurité sociale – Article 73 du statut – Réglementation commune relative à la couverture des risques d’accident et de maladie professionnelle – Maladie professionnelle – Article 9 – Demande de remboursement de frais médicaux – Article 23 – Consultation d’un autre médecin – Refus de saisir la commission médicale sur le fondement de l’article 22 – Absence d’application, par analogie, de l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa – Règle de concordance entre la requête et la réclamation – Application de la loi dans le temps »

Dans l’affaire T‑316/19,

Arnaldo Lucaccioni, demeurant à San Benedetto del Tronto (Italie), représenté par Me E. Bonanni, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. T. Bohr et L. Vernier, en qualité d’agents, assistés de Me A. Dal Ferro, avocat,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 270 TFUE et tendant, d’une part, à l’annulation de la décision de la Commission du 2 août 2018 rejetant les demandes du requérant des 23 mars et 8 juin 2018 de saisine de la commission médicale conformément à l’article 22 de la réglementation commune relative à la couverture des risques d’accident et de maladie professionnelle des fonctionnaires des Communautés européennes et, d’autre part, à la réparation des préjudices que le requérant aurait prétendument subis du fait de cette décision,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de M. S. Gervasoni, président, Mme R. Frendo et M. J. Martín y Pérez de Nanclares (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique et antécédents du litige

 Cadre juridique

1        L’article 10, paragraphe 1, premier et deuxième alinéas, de la réglementation commune relative à la couverture des risques d’accident et de maladie professionnelle des fonctionnaires des Communautés européennes, établie par les institutions d’un commun accord, lequel a été constaté par le président de la Cour de justice des Communautés européennes le 22 décembre 1976, et modifiée en dernier lieu le 18 juillet 1997 (ci-après l’« ancienne réglementation de couverture »), précise :

« Le fonctionnaire victime d’un accident ou d’une maladie professionnelle a droit au remboursement de tous les frais nécessités pour le rétablissement aussi complet que possible de son intégrité physique ou psychique et pour tous les soins et traitements nécessités par les suites des lésions subies et leurs manifestations, et s’il y a lieu, des frais nécessités par la réadaptation fonctionnelle et professionnelle de la victime.

Toutefois, si l’autorité investie du pouvoir de nomination de l’institution dont relève le fonctionnaire considère certains frais comme excessifs ou non nécessaires, elle peut, sur avis du médecin désigné par elle, […] refuser le remboursement. »

2        Intitulé « Remboursement des frais », l’article 9, paragraphe 1, premier et deuxième alinéas, de la réglementation commune relative à la couverture des risques d’accident et de maladie professionnelle des fonctionnaires des Communautés européennes, établie par les institutions d’un commun accord, lequel a été constaté par le président de la Cour de justice des Communautés européennes le 13 décembre 2005 (ci-après la « réglementation de couverture »), reprend en des termes similaires le contenu de l’article 10 de l’ancienne réglementation de couverture, à l’exception du terme « fonctionnaire », qui est remplacé par le terme « assuré ».

3        L’article 18 de la réglementation de couverture, sous le titre « Décisions », prévoit :

« Les décisions relatives à la reconnaissance de l’origine accidentelle d’un événement, qu’il soit attribué aux risques résultant du travail ou de la vie privée, et les décisions qui y sont liées relatives à la reconnaissance de l’origine professionnelle de la maladie ainsi qu’à la fixation du degré d’invalidité permanente, sont prises par l’autorité investie du pouvoir de nomination suivant la procédure prévue à l’article 20 :

–        sur la base des conclusions émises par le ou les médecins désignés par les institutions et

–        si l’assuré le requiert, après consultation de la commission médicale visée à l’article 22. »

4        En ce qui concerne la composition et les travaux de la commission médicale, l’article 22, paragraphe 1, premier et deuxième alinéas, de la réglementation de couverture, intitulé « Commission médicale », prévoit ce qui suit :

« 1.      La commission médicale est composée de trois médecins désignés :

–        le premier, par l’assuré ou ses ayants droit,

–        le deuxième, par l’autorité investie du pouvoir de nomination,

–        le troisième, du commun accord des deux médecins ainsi désignés.

À défaut d’accord sur la désignation du troisième médecin, dans un délai de deux mois à compter de la désignation du deuxième médecin, le troisième médecin est commis d’office par le président de la Cour de justice [de l’Union européenne] à l’initiative d’une des parties. »

5        L’article 23, paragraphe 1, premier alinéa, de la réglementation de couverture, intitulé « Consultation d’un autre médecin », dispose :

« 1. Dans les cas non prévus à l’article 18, lorsqu’une décision est à prendre après avis du médecin désigné par l’autorité investie du pouvoir de nomination, celle-ci, préalablement à cette décision, en notifie le projet à l’assuré ou à ses ayants droit, accompagné des conclusions du médecin. L’assuré ou ses ayants droit peuvent, dans un délai de trente jours, demander la consultation d’un autre médecin, à choisir de commun accord par le médecin désigné par l’autorité investie du pouvoir de nomination et par celui désigné par l’assuré ou ses ayants droit. Si, à l’expiration de ce délai, aucune demande de consultation n’a été déposée, ladite autorité prend la décision telle que le projet en a été notifié. »

 Antécédents du litige

6        Le requérant, M. Arnaldo Lucaccioni, a travaillé en tant que fonctionnaire auprès de la Commission européenne à partir de 1962. Durant son affectation au bâtiment de la Commission, le Berlaymont, à Bruxelles (Belgique), il a été exposé aux poussières et fibres d’amiante.

7        Le 16 juillet 1991, à l’issue de la procédure visée à l’article 78 du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »), le requérant a été mis à la retraite, avec effet au 1er août 1991, et s’est vu accorder une pension d’invalidité égale à 70 % de son traitement de base.

8        Par décision du 15 avril 1994, la Commission a reconnu l’origine professionnelle de la maladie du requérant (lésions pulmonaires), conformément à l’article 73 du statut, et a constaté que « l’invalidité permanente totale [était] égale à 100 % [et qu’elle] remontait à l’époque du diagnostic (janvier 1990) ». En outre, compte tenu des signes permanents et des troubles psychologiques sévères du requérant, « une indemnité de 30 % » lui a été accordée, conformément à l’article 14 de l’ancienne réglementation de couverture.

9        Le 7 juin 2000, le requérant a introduit une demande visant, en substance, à la reconnaissance de l’aggravation de sa maladie professionnelle en application de l’article 22 de l’ancienne réglementation de couverture. À la date d’introduction du présent recours, la procédure de demande de reconnaissance de l’aggravation de la maladie professionnelle était en cours de traitement par les services de la Commission.

 Demandes introduites en vertu de l’article 72, paragraphe 1, du statut

10      En vertu de l’article 72, paragraphe 1, du statut, relatif à la couverture des risques de maladie, le requérant a transmis, le 9 février 2016, une demande d’autorisation préalable de traitement, à laquelle était joint un devis, daté du 7 janvier 2016 et rédigé par son médecin traitant (ci-après le « médecin désigné par l’assuré »), au bureau liquidateur d’Ispra (Italie) du régime commun d’assurance maladie.

11      Le 16 février 2016, le bureau liquidateur a émis un accord préalable sur le devis pour un montant de 7 754 euros.

12      Par deux demandes du 2 février et du 6 mars 2017, le requérant a transmis au bureau liquidateur, conformément à l’article 72, paragraphe 1, du statut, une demande de remboursement de frais liés à un traitement dentaire visant « à refermer une occlusion incomplète susceptible d’aggraver son état de santé ».

13      Par le décompte de remboursement portant le numéro 233, du 17 février 2017, le bureau liquidateur a invité le requérant à présenter une nouvelle demande de remboursement auprès de celui-ci comprenant une facture ou une note d’honoraires plus détaillée relative au traitement mentionné au point 12 ci-dessus. Par le décompte de remboursement portant le numéro 238, du 23 mars 2017 (ci-après le « décompte no 238 »), le bureau liquidateur a refusé le remboursement « normal » des frais, au motif que le montant maximal remboursable avait été atteint pour la période de référence.

 Demandes introduites en vertu de l’article 73, paragraphe 3, du statut

14      Conformément à l’article 73, paragraphe 3, du statut, relatif à la couverture des risques de maladie professionnelle et d’accident, le requérant, par lettre du 9 février 2016, a demandé la prise en charge des dépenses liées à une prestation médicale, visant à « refermer une occlusion incomplète susceptible d’aggraver son état de santé, conformément à l’article 10, paragraphe 1, de l’ancienne réglementation de couverture », auprès de l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN »). Cette demande était accompagnée, notamment, d’un devis de traitement dentaire établi par le médecin désigné par l’assuré et faisait état d’un montant de 21 440 euros. Par lettre du 24 janvier 2017, le requérant a déposé une demande complémentaire de remboursement de dépenses liées à ladite prestation.

15      Par le projet de décision du 29 mars 2017, notifié au requérant le même jour, l’AIPN a prévu de rejeter la demande de remboursement des dépenses relatives à la prestation médicale citée au point 14 ci-dessus, au motif, en substance, que les frais énumérés dans le devis joint par le médecin désigné par l’assuré n’étaient pas remboursables au titre de l’article 9 de la réglementation de couverture. Le projet de décision du 29 mars 2017 était accompagné des conclusions contenues, d’une part, dans un premier rapport du 12 avril 2016, modifié par un deuxième rapport du 23 mars 2017, du médecin-conseil de l’institution (ci-après le « médecin désigné par l’AIPN ») et, d’autre part, dans le rapport du 12 mars 2017 d’un médecin spécialisé consulté à l’initiative de l’AIPN (ci-après le « médecin spécialisé »). Dans son rapport, le médecin spécialisé a souligné que le traitement médical auquel se rapportait la demande de remboursement des dépenses n’aurait eu « aucune incidence positive sur les problèmes respiratoires » du requérant et que le fait que « la bouche reste ouverte » ne saurait être corrigé par le traitement dont le remboursement était sollicité (implants ou prothèses).

16      Par un courriel du 12 avril 2017, le requérant a sollicité le réexamen de sa demande de remboursement du 9 février 2016, au regard de documents scientifiques supplémentaires produits afin d’infirmer la position du médecin spécialisé.

17      Dans un nouveau projet de décision du 30 juin 2017, que le requérant déclare avoir reçu le 20 juillet 2017, l’AIPN a annulé et remplacé le projet de décision du 29 mars 2017 cité au point 15 ci-dessus en se fondant sur les conclusions contenues dans le nouveau rapport, du 27 juin 2017, du médecin spécialisé (ci-après le « projet de décision du 30 juin 2017 »). Par ce projet de décision, l’AIPN envisageait de rejeter la demande de remboursement des dépenses, conformément à l’article 9 de la réglementation de couverture, au motif que les frais médicaux ne pouvaient pas être pris en charge au titre de la maladie professionnelle du requérant.

18      Étant en désaccord avec le projet de décision du 30 juin 2017, le requérant a demandé, par lettre du 15 août 2017, la consultation d’un « autre médecin », conformément à l’article 23, paragraphe 1, premier alinéa, de la réglementation de couverture. Selon l’article susvisé, l’« autre médecin » doit être choisi d’un commun accord par le médecin désigné par l’AIPN et celui désigné par l’assuré.

19      Par courriel du 25 janvier 2018, le médecin désigné par l’AIPN a constaté que, malgré plusieurs propositions de candidats déposées par lui-même et par le médecin désigné par l’assuré afin de s’accorder sur la nomination d’un « autre médecin », ils n’étaient pas parvenus à un accord. Par lettre du 7 février 2018, devant l’impossibilité d’un accord sur la désignation de cet « autre médecin », le directeur de l’Office « Gestion et liquidation des droits individuels » (PMO) de la Commission s’est adressé au président de la Cour de justice de l’Union européenne (ci-après le « président de la Cour ») afin que celui-ci désigne d’office un médecin, en appliquant, par analogie, l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture.

20      Par lettre du 19 février 2018, le requérant s’est également adressé au président de la Cour afin de contester la procédure du recours, par analogie, à l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture sollicitée par le directeur du PMO dans la lettre du 7 février 2018. En outre, le requérant a conditionné son accord au fait, d’une part, que le médecin commis d’office réside à proximité de son lieu d’habitation et, d’autre part, qu’il lui soit transmis, préalablement à l’envoi à ce médecin commis d’office, le mandat de ce dernier et une liste des documents relatifs à son dossier médical incluant des documents qu’il aurait indiqués.

21      Par lettre du 5 juin 2018, le président de la Cour a répondu au requérant qu’il ne pouvait, dans « l’exercice de sa compétence de désignation d’office de médecins dans le cadre d’une procédure relative à la reconnaissance d’une maladie professionnelle, adresser des injonctions aux [i]nstitutions ni, de manière plus générale, accepter que la désignation soit soumise à des conditions imposées par l’une des parties ». Il a demandé au requérant de bien vouloir lui faire savoir si, à la lumière de ces explications, il pouvait marquer son accord inconditionnel afin de procéder à la désignation demandée par le PMO.

22      Par lettre du 22 juin 2018, le requérant a répondu au président de la Cour qu’il ne pouvait pas marquer son accord inconditionnel à la désignation d’office d’un « troisième médecin », conformément à l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture, appliqué par analogie.

23      En parallèle des échanges entre le président de la Cour, le requérant et la Commission, le requérant a envoyé à la Commission, par lettre du 23 mars 2018, une demande « préventive » d’application de la procédure prévue par l’article 22 de la réglementation de couverture, relatif à la saisine d’une commission médicale. Le requérant a réitéré cette demande par lettre du 8 juin 2018.

24      Par lettre du 13 juin 2018, le PMO a répondu au requérant que, d’une part, la demande de saisine de la commission médicale était mise en attente de la décision du président de la Cour et que, d’autre part, « les conclusions de la procédure [de consultation de l’autre médecin] devraient permettre à l’administration de transmettre [au requérant] une décision qui [serait] définitive et n’ouvr[irait] la voie à aucun autre recours prévu par la réglementation [de couverture] ».

25      Par lettre du 2 août 2018, la Commission a rejeté les demandes du requérant des 23 mars et 8 juin 2018 visant à appliquer la procédure inscrite à l’article 22 de la réglementation de couverture concernant la saisine d’une commission médicale. Selon la Commission, l’article 22 est lié à l’article 18 de la réglementation de couverture, qui ne vise pas une décision, telle que celle en cause, relative à un remboursement de frais. La Commission a confirmé que l’administration avait décidé, pour faire avancer le dossier, de s’inspirer de la règle prévue à l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture, afin de demander au président de la Cour de nommer un « autre médecin » en application de l’article 23 de ladite réglementation (ci-après la « décision litigieuse »).

26      Par la réclamation portant le numéro R/688/18, introduite le 31 octobre 2018 (ci-après la « réclamation »), conformément à l’article 90, paragraphe 2, du statut, le requérant a demandé l’annulation de la décision litigieuse refusant la saisine de la commission médicale, prévue par l’article 22 de la réglementation de couverture, et lui causant prétendument un préjudice, y compris patrimonial.

27      Par décision du 25 février 2019, l’AIPN a rejeté la réclamation, confirmant, en substance, le contenu de la décision litigieuse visant à rejeter la demande du requérant tendant à la saisine de la commission médicale (ci-après la « réponse à la réclamation »). Elle a considéré en effet que l’article 22 de la réglementation de couverture n’était pas applicable (ci-après le « premier motif »). De plus, l’AIPN a considéré que la saisine de la Cour, pour demander à son président de désigner, par analogie à la procédure prévue à l’article 22 de la réglementation de couverture, un « autre médecin » dans le cadre de l’application de l’article 23, paragraphe 1, premier alinéa, de ladite réglementation, était la seule voie possible pour sortir de l’impasse résultant de l’impossibilité pour les médecins désignés respectivement par l’institution et par l’assuré d’arriver, après plusieurs mois, à trouver un accord sur la désignation d’un « autre médecin » (ci-après le « second motif »).

 Procédure et conclusions des parties

28      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 23 mai 2019, le requérant a introduit le présent recours.

29      Le 6 août 2019, la Commission a déposé le mémoire en défense.

30      Le 3 octobre 2019, le requérant a déposé la réplique.

31      Par décision adoptée le 25 octobre 2019, en application de l’article 27, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, le président du Tribunal a réattribué l’affaire à un nouveau juge rapporteur, affecté à la quatrième chambre.

32      Le 18 novembre 2019, la Commission a déposé la duplique.

33      Par courrier du 19 novembre 2019, les parties ont été informées de la clôture de la phase écrite de la procédure et de la possibilité, pour elles, de demander la tenue d’une audience dans les conditions prévues à l’article 106 du règlement de procédure. Par lettre du 13 décembre 2019, le requérant a demandé la tenue d’une audience dans le délai prévu.

34      Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89, paragraphe 3, sous a) et d), du règlement de procédure, le Tribunal a, le 15 juin 2020, demandé aux parties de répondre à une série de questions et de produire une version lisible de certains documents. Les parties ont répondu aux questions et le requérant a déféré à la demande de production de documents dans le délai imparti.

35      Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure. Toutefois, le requérant ayant, à la suite d’une demande du Tribunal, en substance indiqué, par lettre du 16 juillet 2020, qu’il n’assisterait finalement pas à l’audience de plaidoiries, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé, en application de l’article 108, paragraphe 2, du règlement de procédure, de clore la phase orale de la procédure.

36      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 16 juillet 2020, le requérant a, sur le fondement de l’article 86 du règlement de procédure, adapté la requête de sorte que le recours vise, en substance, la prise en considération, après que le requérant en a eu connaissance, « d’un acte, constitutif d’un élément nouveau, ayant pour effet de réduire de façon automatique les prétentions initiales du recours, afin “de tenir compte de cet élément nouveau”, en vue de l’annulation de la décision du 2 août 2018 de la Commission ». Par acte déposé au greffe du Tribunal le 18 septembre 2020, la Commission a conclu au rejet du mémoire en adaptation du requérant comme étant irrecevable.

37      Le 14 septembre 2020, le requérant a déposé un mémoire contenant un moyen nouveau. La Commission a présenté ses observations sur ledit mémoire le 30 septembre 2020.

38      Dans la requête, le requérant conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        « [annuler] la décision de la Commission figurant dans le courriel, du 2 août 2018, à la deuxième page, premier paragraphe, par laquelle “pour faire avancer le dossier, [l’AIPN] a décidé de s’inspirer de la règle expressément prévue à l’article 22, [paragraphe 1, deuxième alinéa,] de la réglementation de couverture pour les cas où aucun accord n’est trouvé, en ce qui concerne la nomination du troisième médecin, entre le médecin qui représente l’assuré et celui qui représente l’institution et de l’appliquer, par analogie, aux fins de désigner un autre médecin dans [la présente] affaire” ;

–        condamner, si les pouvoirs du Tribunal le permettent, la Commission [à payer au requérant] la somme de 21 440 euros, qui correspond au remboursement des frais [...] pour les “traitements nécessités par les suites des lésions subies et leurs manifestations, et s’il y a lieu, des frais nécessités par la réadaptation fonctionnelle” et nécessaires pour “une remise en état d’urgence, puisque la béance était susceptible d’aggraver une situation clinique déjà compromise par la maladie avec des épisodes continus et répétés d’infections des voies respiratoires supérieures” ;

–        à titre subsidiaire, imposer[,] autoriser ou adopter toute autre mesure afin que la Commission reconnaisse que les circonstances de l’espèce, dans le cas spécifique du requérant et compte tenu de ses antécédents liés à la maladie professionnelle, relèvent manifestement du cas décrit à l’article 10 de [l’ancienne réglementation de couverture], et procède au remboursement de la somme demandée à titre principal ;

–        à titre plus subsidiaire, imposer à la Commission, conformément à l’approche indiquée dans la décision [litigieuse] qui consiste à “s’inspirer de la règle expressément prévue à l’article 22 de la règlementation [de couverture]” dans le cas spécifique du requérant et à “l’appliquer par analogie”, de demander à la commission médicale de donner son avis, conformément à l’article 20 de la réglementation [de couverture] ;

–        condamner la Commission au paiement des intérêts moratoires à compter du 23 janvier 2017, date du refus de remboursement des dépenses pour les traitements effectués, jusqu’au paiement, en suivant le calcul no 238 (annexe A.04) ;

–        condamner la Commission à indemniser [le requérant] du préjudice subi pour un montant de 500 000 euros ou tout autre montant [...] déterminé ex æquo et bono, en raison du caractère volontaire ou vexatoire des actes et omissions illégales de la Commission, notamment pour le comportement anormal des trois médecins consultés, qui ont entre autres nié les fonctions les plus élémentaires du nez, en prétendant en pratique que, dans le cas spécifique du requérant, respirer par la bouche est aussi sain que de respirer par le nez ;

–        condamner, en tout état de cause, la Commission aux dépens. »

39      Dans la défense, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

40      Dans la réplique, le requérant conclut, en outre, à ce qu’il plaise au Tribunal de « déclarer qu’[il] a droit, à titre provisoire, y compris par ordonnance séparée, à la somme de 7 754 euros, représentant le remboursement prévu par le [bureau liquidateur] et ayant été autorisé à l’époque, sur la base des documents produits à deux reprises, lesquels sont en possession de la Commission ».

41      Dans la duplique, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal de rejeter également la demande formulée par le requérant dans la réplique.

 En droit

 Considérations liminaires sur la détermination de la réglementation de couverture applicable

42      Le requérant et la Commission soutiennent que la réglementation de couverture applicable en l’espèce est l’ancienne réglementation de couverture, qui était en vigueur à l’époque de la demande de reconnaissance de l’origine professionnelle de la maladie du requérant, c’est-à-dire de 1990 à 1994, à l’exception du chapitre III, intitulé « Procédure », contenant les articles 16 à 25. Le requérant désigne également l’ancienne réglementation de couverture comme lui étant plus favorable. La Commission indique que l’article 10, paragraphe 1, de l’ancienne réglementation de couverture correspond, pour l’essentiel, à l’article 9, paragraphe 1, de la réglementation de couverture.

43      Dans la réponse à la réclamation et les projets de décision du 29 mars et du 30 juin 2017 rejetant la demande de remboursement des frais, l’AIPN se réfère à la réglementation de couverture entrée en vigueur le 1er janvier 2006.

44      Le 13 décembre 2005, les institutions de l’Union européenne ont arrêté d’un commun accord une réglementation de couverture, laquelle est entrée en vigueur le 1er janvier 2006. Jusqu’à cette dernière date, l’ancienne réglementation de couverture était applicable. Il convient de noter qu’il ressort de l’article 30, premier alinéa, de la réglementation de couverture que l’ancienne réglementation de couverture est abrogée. Toutefois, l’article 30, second alinéa, de la réglementation de couverture lu à la lumière de ses articles 18 et 20 dispose que l’ancienne réglementation de couverture demeure applicable pour tout projet de décision relatif à la reconnaissance de l’origine accidentelle d’un événement résultant du travail ou de la vie privée et relatif à la reconnaissance de l’origine professionnelle de la maladie ainsi qu’à la fixation du degré d’invalidité permanente adopté avant le 1er janvier 2006, sauf en cas de réouverture de dossier en application de l’article 21.

45      En l’espèce, la décision litigieuse ne saurait être qualifiée de projet de décision au sens de l’article 30, second alinéa, de la réglementation de couverture lu à la lumière de ses articles 18 et 20, dont le contenu est décrit au point 44 ci-dessus. En effet, par la décision litigieuse, la Commission refuse d’appliquer la procédure de saisine de la commission médicale prévue à l’article 22 de la réglementation de couverture aux fins de statuer sur le remboursement des frais médicaux. De même, le projet de décision du 30 juin 2017 vise une demande de remboursement des dépenses liées à une prestation médicale, consistant à « refermer une occlusion incomplète susceptible d’aggraver [l]’état de santé » du requérant. À ce titre, ledit projet de décision ne correspond à aucun des cas mentionnés à l’article 30, second alinéa, de la réglementation de couverture lu à la lumière de ses articles 18 et 20.

46      En tout état de cause, même dans l’hypothèse où le projet de décision du 30 juin 2017 devrait être considéré comme relevant de l’article 30, second alinéa, de la réglementation de couverture lu en combinaison avec ses articles 18 et 20, il a été adopté après le 1er janvier 2006, c’est-à-dire postérieurement à la date d’entrée en vigueur de la réglementation de couverture (voir, a contrario, arrêts du 25 octobre 2017, Lucaccioni/Commission, T‑551/16, non publié, EU:T:2017:751, point 55 et jurisprudence citée, et du 14 septembre 2011, Hecq/Commission, F‑47/10, EU:F:2011:137, point 5).

47      Ainsi, contrairement à ce que soutiennent le requérant et la Commission, la réglementation applicable au cas d’espèce ne peut pas être l’ancienne réglementation de couverture au motif qu’elle était « celle […] en vigueur à l’époque de la demande de reconnaissance de l’origine professionnelle de la maladie (de 1990 à 1994) ». En effet, cette circonstance est sans incidence sur la détermination du droit applicable, laquelle dépend, en vertu de l’article 30, second alinéa, de la réglementation de couverture, de la date et de l’objet de la décision en cause.

48      Dans l’hypothèse où il conviendrait de comprendre l’argument du requérant en ce sens qu’il soutient que, en raison de la date à laquelle sa maladie professionnelle a été reconnue, à savoir le 15 avril 1994, tous les frais liés à cette dernière devraient faire l’objet d’un remboursement en application de l’ancienne réglementation de couverture, y compris les frais examinés dans le projet de décision du 30 juin 2017, il importe de relever qu’aucune disposition transitoire en ce sens ne figure dans la réglementation de couverture.

49      Enfin, l’argument du requérant selon lequel l’ancienne réglementation de couverture lui serait plus favorable est, en tout état de cause, non fondé, eu égard au fait que les dispositions figurant à l’article 10, paragraphe 1, de l’ancienne réglementation de couverture sont reprises à l’article 9, paragraphe 1, de la réglementation de couverture.

50      Ainsi, la réglementation de couverture entrée en vigueur le 1er janvier 2006 est applicable au présent litige. Par suite, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites par les parties à l’article 10, paragraphe 1, de l’ancienne réglementation de couverture comme visant l’article 9, paragraphe 1, de la réglementation de couverture, d’une teneur identique.  

 Sur la compétence du Tribunal

51      Par son deuxième chef de conclusions, soulevé à titre principal, le requérant demande au Tribunal, « si les pouvoirs [de ce dernier] le permettent, de condamner la Commission au paiement de la somme de 21 440 euros, qui correspond aux frais […] pour les “traitements nécessités par les suites des lésions subies et leurs manifestations, et s’il y a lieu, des frais nécessités par la réadaptation fonctionnelle” […] et nécessaires pour “une remise en état d’urgence, puisque la béance était susceptible d’aggraver une situation clinique déjà compromise par la maladie avec des épisodes continus et répétés d’infections des voies respiratoires supérieures” ».

52      Par son troisième chef de conclusions, soulevé à titre subsidiaire, le requérant souhaite voir « imposer[,] autoriser ou adopter toute autre mesure afin que la Commission reconnaisse que les circonstances de l’espèce, dans [son cas spécifique] et compte tenu de ses antécédents liés à sa maladie professionnelle, relèvent manifestement de l’article 10 de l’[ancienne réglementation de couverture] et [que la Commission] procède au remboursement de la somme demandée à titre principal ».

53      La Commission fait valoir que les deuxième et troisième chefs de conclusions sont en partie irrecevables dans la mesure où ils viseraient à demander au Tribunal d’adresser des injonctions à l’institution. En outre, la demande de condamnation de la Commission contenue dans lesdits chefs de conclusions serait sans objet ou prématurée. En tout état de cause, lesdits chefs de conclusions seraient dénués de fondement en ce qu’ils reposent sur l’hypothèse selon laquelle la Commission aurait traité la demande de remboursement des frais en cause comme une simple demande de remboursement de frais médicaux.

54      Dans la mesure où l’administration ne s’est pas encore prononcée sur la demande de remboursement de la somme de 21 440 euros présentée par le requérant au titre de l’article 73, paragraphe 3, du statut, il convient d’interpréter les termes du deuxième chef de conclusions comme visant à demander au Tribunal d’enjoindre à la Commission de faire droit à cette demande pour les frais de « traitements nécessités par les suites des lésions subies et leurs manifestations, et s’il y a lieu, des frais nécessités par la réadaptation fonctionnelle ». Ainsi, par ce chef de conclusions, le requérant cherche à ce que le Tribunal oblige la Commission à lui verser la somme de 21 440 euros, éligible à un remboursement des dépenses, conformément à l’article 9 de la réglementation de couverture.

55      De manière similaire, le troisième chef de conclusions doit être compris comme une demande faite au Tribunal d’ordonner à la Commission de reconnaître que la demande de remboursement de la prestation médicale relève manifestement de l’article 9 de la réglementation de couverture et de procéder au remboursement de la somme de 21 440 euros.

56      Or, comme le soulève justement la Commission, il importe de rappeler que le Tribunal ne peut pas adresser des injonctions aux institutions. Selon l’article 73 du statut et en vertu de la réglementation applicable au cas d’espèce, il appartient uniquement à l’AIPN de statuer sur les demandes introduites au titre de ces dispositions. Les décisions de l’AIPN peuvent, par la suite, être contestées devant le Tribunal par la voie du recours prévu par l’article 91 du statut. Or, dans le cadre d’un tel recours, le Tribunal ne saurait, sans empiéter sur les prérogatives de l’autorité administrative, adresser des injonctions à cette institution (voir, en ce sens, concernant une demande visant à fixer le taux d’invalidité, arrêt du 15 décembre 1999, Latino/Commission, T‑300/97, EU:T:1999:328, point 28).

57      Dès lors, les deuxième et troisième chefs de conclusions présentés à fin d’injonction doivent être rejetés en raison de l’incompétence du Tribunal pour en connaître.

 Sur la recevabilité

58      Le Tribunal estime opportun d’examiner, tout d’abord, le nouveau chef de conclusions introduit au stade de la réplique, puis la demande d’adaptation des conclusions de la requête, puis le mémoire complémentaire contenant un moyen nouveau, ensuite, le cinquième chef de conclusions, relatif au paiement d’intérêts moratoires, avant d’examiner, enfin, le moyen tiré de l’erreur de droit dans l’application de l’article 22 de la réglementation de couverture invoqué au soutien des premier et quatrième chefs de conclusions pris ensemble.

 Sur la recevabilité du nouveau chef de conclusions introduit au stade de la réplique

59      Dans le cadre de la réplique, le requérant présente un nouveau chef de conclusions, visant à ce que le Tribunal « déclar[e] qu’[il] a droit, à titre provisoire, y compris par ordonnance séparée, à la somme de 7 754 euros, représentant le remboursement prévu par le [bureau liquidateur] et ayant été autorisé à l’époque, sur la base des documents produits à deux reprises, lesquels sont en possession de la Commission ».

60      Dans la duplique, la Commission conclut au rejet de ladite demande. Par ailleurs, la Commission fait valoir qu’elle a présenté ses excuses dans le cadre de la défense pour avoir affirmé à tort, dans la réponse à la réclamation, que la somme de 7 754 euros avait été versée au requérant. Cette affirmation n’équivaudrait cependant pas à une reconnaissance de dette ni à un engagement à payer cette somme.

61      Le nouveau chef de conclusions tendant à ce que le Tribunal déclare que le requérant a droit au remboursement des frais exposés relatifs à un traitement médical à hauteur de 7 754 euros doit être rejeté comme étant irrecevable.

62      Il ressort d’une jurisprudence constante que les articles 90 et 91 du statut subordonnent la recevabilité d’un recours devant le Tribunal, introduit par un fonctionnaire ou un ancien fonctionnaire contre l’institution à laquelle il appartient ou appartenait, à la condition du déroulement régulier de la procédure précontentieuse prévue par ces articles (ordonnances du 11 mai 1992, Whitehead/Commission, T‑34/91, EU:T:1992:64, point 18 ; du 25 mars 2015, Singou/Conseil, F‑143/14, EU:F:2015:27, point 10, et du 21 juillet 2016, Trampuz/Commission, F‑103/15, EU:F:2016:184, point 27).

63      Aux termes de l’article 90, paragraphe 2, du statut, toute personne visée audit statut peut saisir l’AIPN d’une réclamation dirigée contre un acte lui faisant grief, celle-ci devant être introduite dans un délai de trois mois.

64      Il importe de rappeler que constitue une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut une lettre par laquelle un fonctionnaire, sans demander expressément le retrait de la décision en cause, vise clairement à obtenir satisfaction de ses griefs à l’amiable ou encore une lettre qui manifeste clairement la volonté du requérant de contester la décision qui lui fait grief. À cet égard, le contenu de l’acte l’emporte sur la forme. En effet, une réclamation administrative introduite par un fonctionnaire ne doit pas revêtir une forme particulière. Il suffit qu’elle manifeste clairement et de façon précise la volonté de son auteur d’attaquer une décision prise à son égard (ordonnance du 21 juillet 2016, Trampuz/Commission, F‑103/15, EU:F:2016:184, point 35).

65      En l’espèce, ainsi que l’a relevé à juste titre la Commission, le requérant n’a pas contesté le décompte no 238, contenant le deuxième refus du bureau liquidateur relatif au remboursement « normal » de frais médicaux ayant fait l’objet d’un accord préalable à hauteur de 7 754 euros, dans les formes prévues qui y étaient indiquées. Plus particulièrement, le requérant doit soumettre des observations sur une copie dudit décompte au bureau liquidateur et, éventuellement, à la suite de ces échanges, introduire une réclamation, conformément à l’article 90, paragraphe 2, du statut. Or, d’une part, la réclamation n’a pas pour objet la décision contenue dans le décompte no 238 et, d’autre part, le requérant ne démontre pas avoir introduit une telle réclamation à l’encontre de la décision contenue dans ce décompte.

66      Par conséquent, le chef de conclusions introduit au stade de la réplique est irrecevable.

 Sur la recevabilité de la demande d’adaptation des conclusions de la requête

67      Le 16 juillet 2020, le requérant a déposé un mémoire en adaptation qui vise, en substance, la prise en considération, après qu’il en a eu connaissance, « d’un acte, constitutif d’un élément nouveau, ayant pour effet de réduire de façon automatique les prétentions initiales du recours, afin “de tenir compte de cet élément nouveau”, en vue de l’annulation de la décision du 2 août 2018 de la Commission ». Alors que, au titre des deuxième et troisième chefs de conclusions exposés dans la requête, le requérant demande que « la Commission soit condamnée à payer la somme de 21 440 euros » ou, « à titre subsidiaire, que le Tribunal [impose, autorise ou adopte] toute mesure afin que la Commission procède au remboursement de la somme demandée », il réduit ce montant, dans le cadre de la demande d’adaptation des conclusions, à 15 207 euros. En outre, dans cette demande, le requérant réduit la demande d’indemnisation relative à un préjudice moral tel qu’il résultait du sixième chef de conclusions de 500 000 euros à 354 640,86 euros. À l’appui de chaque réduction des montants sollicités, le requérant invoque, comme justification, le remboursement de frais médicaux effectué par la Commission le 3 juin 2020, d’un montant de 6 233 euros.

68      Dans les observations sur le mémoire en adaptation, la Commission soutient que la demande d’adaptation des conclusions est irrecevable, puisque la correspondance à laquelle le requérant fait référence dans sa demande ne relève pas de la présente procédure. La correspondance serait relative à une demande de remboursement introduite au titre de l’article 72, paragraphe 3, du statut. En tout état de cause, la demande d’adaptation des conclusions serait située en dehors du champ d’application de l’article 86 du règlement de procédure.

69      L’article 86, paragraphe 3, du règlement de procédure dispose que « l’adaptation de la requête doit être effectuée par acte séparé et, par dérogation au paragraphe 2, dans le délai prévu à l’article 91, paragraphe 3, du statut […] dans lequel l’annulation de l’acte justifiant l’adaptation de la requête peut être demandée. »

70      En outre, il convient de relever que l’adaptation de la requête par acte déposé au greffe du Tribunal en cours d’instance est un acte de procédure qui équivaut à l’introduction d’un recours en annulation par voie de requête. La jurisprudence constante fixant les conditions de forme et de fond d’un tel recours s’applique donc par analogie. Le mémoire en adaptation doit, en particulier, indiquer de manière non équivoque et suffisamment claire et précise l’objet du litige, les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels le recours est fondé ainsi que les conclusions de ce dernier afin d’éviter que le Tribunal ne statue ultra petita ou bien n’omette de statuer sur un grief (voir, en ce sens, arrêt du 20 septembre 2018, Espagne/Commission, C‑114/17 P, EU:C:2018:753, point 59, et conclusions de l’avocat général Sharpston dans l’affaire Espagne/Commission, C‑114/17 P, EU:C:2018:309, points 45 et 46 et jurisprudence citée).

71      En l’espèce, dans le mémoire en adaptation, le requérant omet de désigner de manière précise l’acte qui est visé dans le cadre dudit mémoire et ayant le même objet que la décision litigieuse. Il se réfère de manière vague à cet égard à « un acte, constitutif d’un élément nouveau », sans fournir plus de précision quant à la désignation de celui-ci.

72      En effet, le requérant se contente de mentionner deux événements nouveaux pour justifier le dépôt du mémoire en adaptation. D’une part, il invoque le décompte portant le numéro 376, du 25 mai 2020, par lequel le bureau liquidateur fait droit au paiement « normal » de ses frais médicaux mentionnés dans le décompte no 238. D’autre part, le requérant fait état d’un échange de correspondances avec le PMO au sujet d’une autre demande, du 27 mai 2020, visant à appliquer l’article 72, paragraphe 3, du statut concernant le remboursement « spécial » des frais médicaux. Cette dernière demande est distincte de l’objet du décompte no 238, relatif à une procédure de remboursement « normal ». Enfin, le requérant ne précise pas les illégalités alléguées.

73      Ainsi, la demande d’adaptation des conclusions de la requête n’expose pas, de manière non équivoque et suffisamment claire, l’acte visant à modifier l’objet du recours. Dès lors, la demande d’adaptation des conclusions de la requête ne répond pas aux conditions de forme et de fond telles que rappelées au point 70 ci-dessus et est, partant, irrecevable.

74      Dès lors, la demande d’adaptation des conclusions doit être rejetée comme étant irrecevable.

 Sur la recevabilité du mémoire complémentaire contenant un moyen nouveau

75      Dans le mémoire complémentaire contenant un moyen nouveau, le requérant présente, « en tant que moyen nouveau, un acte extrêmement grave commis par [l’AIPN], qui a confirmé ne pas vouloir appliquer, délibérément et sans la moindre justification, tant l’article 10 de [l’ancienne réglementation de couverture] que l’article 72 du statut, notamment le paragraphe 3 [dudit article] ». Bien que le requérant ait expressément demandé à l’AIPN une justification concernant le refus de les appliquer, l’AIPN n’aurait pas apporté de réponse. En outre, et « [e]n considération du nouveau moyen soulevé dans le présent mémoire », le requérant présente un nouveau chef de conclusions visant à « annuler l’acte du 20 juillet 2020 de [la Commission], qui refuse l’application de l’article 72 du statut aux termes de l’article 10 de [l’ancienne réglementation de couverture] ».

76      Dans les observations sur le mémoire complémentaire contenant un moyen nouveau, la Commission fait valoir que ledit mémoire serait irrecevable aux motifs qu’il porte sur une demande de remboursement introduite par le requérant le 27 mai 2020, c’est-à-dire postérieurement à l’introduction du présent recours. Ainsi, il ne s’agirait pas d’un élément de fait ou de droit qui concerne la présente espèce. Par ailleurs, la Commission ajoute que la demande d’annulation de l’acte du 20 juillet 2020 ne saurait être accueillie dans le cadre de la présente affaire, car elle n’aurait pas respecté la procédure précontentieuse prévue à l’article 90, paragraphe 2, du statut. Finalement, le requérant ne fournirait aucune explication sur la manière dont l’acte de la Commission du 20 juillet 2020 ayant pour origine la demande de remboursement du 27 mai 2020 pourrait constituer un moyen nouveau recevable dans le cadre de cette affaire.

77      Le requérant présente ainsi un nouveau chef de conclusions visant à « annuler l’acte du 20 juillet 2020 de [la Commission], qui refuse l’application de l’[article 72, paragraphe 3,] du statut aux termes de l’article 10 de [l’ancienne réglementation de couverture] ». Aussi, la demande qualifiée de moyen nouveau par le requérant dans le mémoire complémentaire constitue, en réalité, un nouveau chef de conclusions en annulation.

78      Or, conformément à la jurisprudence citée aux points 62 et 64 ci-dessus, les articles 90 et 91 du statut subordonnent la recevabilité d’un recours devant le Tribunal, introduit par un fonctionnaire ou un ancien fonctionnaire contre l’institution à laquelle il appartient ou appartenait, à la condition du déroulement régulier de la procédure précontentieuse prévue par ces articles. Il convient d’interpréter une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut en fonction de son contenu, et non de sa forme, puisqu’il suffit qu’elle manifeste clairement et de façon précise la volonté de son auteur d’attaquer une décision prise à son égard.

79      En l’espèce, il importe de souligner, à l’instar de la Commission, d’une part, que la réclamation, datée du 31 octobre 2018, n’a pas pour objet l’acte de la Commission du 20 juillet 2020 qui lui est postérieur et, d’autre part, que le requérant ne démontre pas avoir introduit une telle réclamation.

80      Par conséquent, le nouveau chef de conclusions en annulation contenu dans le mémoire complémentaire doit être rejeté comme étant irrecevable.

 Sur la recevabilité du cinquième chef de conclusions, relatif au paiement d’intérêts moratoires

81      Par le cinquième chef de conclusions, le requérant demande de « condamner la Commission au paiement des intérêts moratoires à compter du 23 janvier 2017, date du refus de remboursement des dépenses pour les traitements effectués, jusqu’au paiement, en suivant le calcul no 238 (annexe A.04) ».

82      La Commission rejette ce chef de conclusions comme étant irrecevable eu égard au fait que le décompte no 238 n’a pas, en soi, été contesté par le requérant.

83      L’annexe A.04 mentionnée dans le cinquième chef de conclusions ainsi que le « calcul no 238 » font référence au décompte par lequel le bureau liquidateur a rejeté la demande de remboursement « normal » introduite le 6 mars 2017 au titre de l’article 72, paragraphe 1, du statut, au motif que le montant de remboursement maximal avait été atteint pour la période. Néanmoins, il ne ressort pas des écritures du requérant qu’il existe une demande datée du 23 janvier 2017 ni que cette date, choisie comme point de départ pour le calcul des intérêts moratoires, corresponde à la survenance d’un événement concernant les demandes de remboursement au titre de l’article 72, paragraphe 1, du statut.

84      À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal conformément à l’article 53, premier alinéa, du même statut, ainsi que de l’article 76, sous d), du règlement de procédure, la requête doit contenir l’objet du litige, les moyens et les arguments invoqués ainsi qu’un exposé sommaire desdits moyens et les conclusions de la partie requérante. Ces éléments doivent être suffisamment clairs et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il est nécessaire, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent d’une façon cohérente et compréhensible du texte de la requête elle-même (voir, en ce sens, ordonnance du 28 avril 1993, De Hoe/Commission, T‑85/92, EU:T:1993:39, point 20, et arrêt du 26 janvier 2017, GGP Italy/Commission, T‑474/15, EU:T:2017:36, point 31).

85      Il s’ensuit que la partie requérante est tenue d’exposer d’une manière suffisamment systématique les développements relatifs à chaque moyen qu’elle présente, sans que le Tribunal puisse être contraint, du fait du manque de structure de la requête ou de rigueur de cette partie, de reconstituer l’articulation juridique censée soutenir un moyen en rassemblant divers éléments épars de la requête, au risque de reconstruire ce moyen en lui donnant une portée qu’il n’avait pas dans l’esprit de ladite partie. En décider autrement serait contraire, à la fois, à une bonne administration de la justice, au principe dispositif ainsi qu’aux droits de la défense de la partie défenderesse (arrêt du 12 novembre 2020, Fleig/SEAE, C‑446/19 P, non publié, EU:C:2020:918, points 60 et 61, et ordonnance du 9 juillet 2019, Scaloni et Figini/Commission, T‑158/18, non publiée, EU:T:2019:491, point 30).

86      En l’espèce, le requérant ne précise pas sa demande dans le corps de sa requête. De plus, il n’avance pas d’argument juridique au soutien de ce chef de conclusions. Aucun élément de droit et de fait pertinent se rattachant à ce chef de conclusions n’est présenté de façon claire et rigoureuse. Dans ces conditions, il est très difficile d’analyser l’argumentation juridique exposée au soutien de ce cinquième chef de conclusions.

87      Dès lors, le cinquième chef de conclusions ne respecte pas les exigences de forme énoncées à l’article 76, sous d), du règlement de procédure et doit être rejeté comme étant manifestement irrecevable.

 Sur la recevabilité du moyen tiré de l’erreur de droit dans l’application de l’article 22 de la réglementation de couverture, invoqué au soutien du premier chef de conclusions

88      La Commission soutient, en substance, que le moyen afférent à l’application irrégulière, par analogie, de la procédure de désignation du « troisième médecin » visée à l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture est irrecevable, dans la mesure où ce moyen n’aurait été soulevé ni dans la réclamation ni dans les communications ultérieures entre le requérant et la Commission. En effet, la réclamation aurait pour objet le prétendu refus de la Commission d’appliquer les articles 9 et 22 de la réglementation de couverture. Du reste, le requérant ne serait pas opposé à l’implication du président de la Cour. Il aurait fait part de son opposition à la désignation de l’« autre médecin » à partir du moment où ladite désignation n’aurait pas pu être soumise aux conditions exprimées dans ses demandes, comme, par exemple, celle que cet « autre médecin » soit installé près de son lieu de résidence. En outre, le requérant aurait demandé ultérieurement à la Commission l’application, par analogie, de l’ensemble de l’article 22 de la réglementation de couverture à son cas d’espèce. Dans la mesure où il s’agirait du seul moyen invoqué au soutien de l’illégalité de la décision litigieuse et où les autres conclusions du requérant viseraient à demander au Tribunal d’adresser à la Commission des injonctions qui sont irrecevables, l’irrecevabilité de ce moyen impliquerait celle du recours dans son intégralité.

89      Le  requérant conteste les arguments de la Commission.

90      Selon une jurisprudence constante, la règle de concordance entre la réclamation précontentieuse et la requête contentieuse subséquente exige, sous peine d’irrecevabilité, qu’un moyen ou grief soulevé devant le juge de l’Union l’ait déjà été dans le cadre de la procédure précontentieuse, afin que l’AIPN ait été en mesure de connaître les critiques que l’intéressé formule à l’encontre de la décision contestée. Cette règle se justifie par la finalité même de la procédure précontentieuse, celle-ci ayant pour objet de permettre un règlement amiable des différends surgis entre les fonctionnaires et l’administration. Il s’ensuit que, dans les recours de fonctionnaires, les conclusions présentées devant le juge de l’Union ne peuvent contenir que des chefs de contestation reposant sur la même cause que celle sur laquelle reposent les chefs de contestation invoqués dans la réclamation, étant précisé que ces chefs de contestation peuvent être développés, devant le juge de l’Union, par la présentation de moyens et d’arguments ne figurant pas nécessairement dans la réclamation, mais s’y rattachant étroitement (voir arrêt du 25 octobre 2013, Commission/Moschonaki, T‑476/11 P, EU:T:2013:557, points 71 à 73 et jurisprudence citée ; arrêt du 22 mai 2014, BG/Médiateur, T‑406/12 P, EU:T:2014:273, points 30 et 31).

91      En effet, il est de jurisprudence constante que les réclamations ne doivent pas être interprétées de façon restrictive, mais doivent, au contraire, être examinées dans un esprit d’ouverture. À cet égard, le contenu de l’acte l’emporte sur la forme. Par conséquent, dans le cadre de l’examen de la portée des chefs de conclusions contenus dans la réclamation, il ne suffit pas de s’en tenir exclusivement à la demande formelle avancée par le réclamant dans celle-ci (voir, en ce sens, arrêts du 25 octobre 2013, Commission/Moschonaki, T‑476/11 P, EU:T:2013:557, point 76, et du 15 juillet 2015, Rouffaud/SEAE, T‑457/14 P, EU:T:2015:495, point 28 et jurisprudence citée).

92      En l’espèce, dans la décision litigieuse, la Commission a rejeté les demandes du requérant des 23 mars et 8 juin 2018 visant à saisir la commission médicale au titre de l’article 22 de la réglementation de couverture. La Commission a également confirmé que l’« administration avait décidé, pour faire avancer le dossier, de s’inspirer de la règle prévue à l’article 22, [paragraphe 1, deuxième alinéa,] » de ladite réglementation, afin de demander au président de la Cour de nommer un « autre médecin » en application de l’article 23 de ladite réglementation.

93      Dans la réclamation, il convient de relever que le requérant conteste, en particulier, le refus de l’AIPN d’appliquer l’ensemble de l’article 22 de la réglementation de couverture à son cas d’espèce. En revanche, dans la requête, à l’appui de son premier chef de conclusions, le requérant soutient, en substance, que, dans la décision litigieuse, l’AIPN s’inspire illégalement, dans le cas d’espèce, de la règle expressément prévue à l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture pour les cas où aucun accord n’est trouvé en ce qui concerne la désignation du troisième médecin d’une commission médicale et visant à ce que le président de la Cour désigne d’office l’« autre médecin ».

94      S’il ne ressort pas de la réclamation que le requérant ait expressément contesté, dans le cadre d’un chef de contestation, le recours, par analogie, à l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture, il n’en demeure pas moins qu’il a clairement reproché à la Commission son refus d’appliquer, dans son intégralité, l’article 22 de ladite réglementation. Or, l’opposition du requérant au refus de l’AIPN d’appliquer l’ensemble dudit article 22 est étroitement liée à sa contestation relative au fait que l’AIPN a appliqué en partie et par analogie l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture, si bien que ces contestations ont le même objet. En effet, ces deux positions résultent de l’évolution du débat entre les parties. À cet égard, l’objet de la réponse à la réclamation, tel que rappelé dans l’un des paragraphes introductifs de celle-ci, confirme l’approche selon laquelle la réclamation porte sur « les modalités de désignation du médecin tiers appelé à se prononcer sur la possibilité que les frais médicaux encourus par [le requérant] puissent faire l’objet d’un remboursement au titre de l’article 73 du statut », et non exclusivement sur le rejet de l’application de la procédure de désignation de l’« autre médecin » selon la modalité prévue par l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de ladite réglementation.

95      Cette conclusion n’est pas infirmée par les arguments de la Commission visant à relever que l’opposition du requérant à l’implication du président de la Cour dans la désignation d’office de l’« autre médecin » ne se serait manifestée que lorsqu’il aurait appris, par la réponse du président de la Cour, que ladite désignation ne pourrait pas être assortie de ses conditions. En effet, il convient de noter que les circonstances ayant mené le requérant à changer d’avis ou la date exacte de ce changement d’avis, étant antérieures à la procédure précontentieuse, sont sans incidence sur la présente conclusion.

96      Il s’ensuit que la fin de non-recevoir soulevée par la Commission doit être rejetée comme étant non fondée.

97      En conséquence, il y a lieu de considérer que le moyen tiré de l’erreur de droit dans l’application de l’article 22 de la réglementation de couverture invoqué au soutien du premier chef de conclusions est recevable.

 Sur le fond

98      Le premier chef de conclusions vise à demander l’annulation de la décision litigieuse, par laquelle, selon le requérant, l’AIPN s’inspire, à tort, de la règle expressément visée à l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture, applicable aux cas où « aucun accord n’est trouvé entre le médecin qui représente l’assuré et celui qui représente l’institution pour nommer le troisième médecin », afin de l’appliquer, par analogie, aux fins de désigner un « autre médecin ».

99      Le quatrième chef de conclusions, soulevé à titre plus subsidiaire, vise, en substance, à imposer à la Commission de s’inspirer de la règle expressément prévue à l’article 22 de la réglementation de couverture, telle qu’indiquée dans la décision litigieuse, dans le cas spécifique du requérant et de l’appliquer par analogie, en demandant à la commission médicale de donner son avis, conformément à l’article 20 de la réglementation de couverture.

100    Ainsi, par les formulations des premier et quatrième chefs de conclusions, le requérant vise, d’une part, à contester la position de la Commission privilégiant une application sélective, en ne recourant qu’au paragraphe 1, deuxième alinéa, de l’article 22 de la réglementation de couverture dans le cas d’espèce, et, d’autre part, à contester la décision de la Commission de ne pas recourir à l’ensemble de la procédure prévue audit article. Il convient, dès lors, d’analyser ces deux chefs de conclusions ensemble.

101    Le requérant invoque, en substance, un moyen unique, tiré d’une erreur de droit dans l’application de l’article 22 de la réglementation de couverture. Il fait valoir que la décision litigieuse, établissant que, en l’espèce, il convient de recourir à la procédure, par analogie, de désignation d’office par le président de la Cour d’un troisième médecin afin de désigner l’« autre médecin », est illégale.

102    Premièrement, le requérant soutient que, compte tenu de la décision litigieuse de recourir à l’application de l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture, il devrait « a fortiori avoir la possibilité, voire le droit, [de saisir la commission médicale] pour bénéficier de plus amples garanties quant à la protection de ses droits ». En effet, l’avis d’un organe collégial offrirait plus de garanties que celui d’un seul médecin dans le cadre d’un dossier et d’un mandat pratiquement secrets. Ainsi, le requérant aurait connaissance du mandat donné par l’AIPN à l’« autre médecin » et pourrait s’assurer que ce mandat « mentionne spécifiquement son traitement relatif à l’occlusion incomplète conformément à l’[article 9], paragraphe 1, de la réglementation de couverture », et non pas de simples frais dentaires. Dans le cadre de la saisine de la commission médicale, le requérant, à la lecture du mandat de ladite commission, aurait connaissance des documents mis à la disposition de celle-ci. Il pourrait indiquer, par l’intermédiaire du médecin qu’il a désigné, d’autres documents de son dossier médical relatifs à ses antécédents médicaux (notamment sa maladie professionnelle, son invalidité, la reconnaissance d’une aggravation partielle et la demande de reconnaissance de l’aggravation de sa maladie professionnelle introduite le 7 juin 2000). De plus, le requérant pourrait également participer aux réunions même sans droit de parole et éviter la survenance d’éventuels faits illicites. Deuxièmement, le requérant considère qu’il aurait le droit de recourir à la procédure visant à saisir la commission médicale dans l’hypothèse où un médecin désigné par l’AIPN aurait refusé de faire droit à une demande de remboursement introduite au titre de l’article 9, paragraphe 1, de la réglementation de couverture.

103    La  Commission soutient que le moyen invoqué n’est pas fondé. Premièrement, la décision litigieuse serait légale en ce que l’AIPN aurait respecté la procédure prévue à l’article 23 de la réglementation de couverture et n’aurait ensuite décidé de s’adresser au président de la Cour, en demandant l’application, par analogie, de l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture, que pour « faire avancer le dossier » du requérant. En effet, selon la Commission, elle faisait face à la nécessité de trouver une solution à la situation d’impasse causée par l’impossibilité établie de désigner un « autre médecin ». Selon la Commission, l’article 23 de ladite réglementation, qui ne prévoit pas ce cas, ne comporte aucune disposition permettant de le résoudre. Ce choix serait équilibré et permettrait de concilier de manière équitable les intérêts des deux parties. Il serait fondé sur le devoir de sollicitude et le principe de bonne administration incombant à l’administration, qui, tel qu’en atteste le contenu de la décision litigieuse, « est déterminée à répondre le plus clairement possible aux demandes et aux questions […] des affiliés » et « s’en tient exclusivement aux procédures définies dans la réglementation et s’emploiera au mieux de ses possibilités à trouver des solutions dans les situations non prévues par cette réglementation ». Cette décision aurait été la seule envisageable, étant donné qu’il aurait été inadmissible de recourir à la consultation de la commission médicale visée aux articles 20 et 22 de la réglementation de couverture. Deuxièmement, la Commission estime que le grief selon lequel le recours à la procédure de la commission médicale visée à l’article 22 de la réglementation de couverture, en tant que formation collégiale, offrirait « certainement plus de garanties que l’avis rendu par un seul médecin » est dénué de fondement. À cet égard, la Commission rappelle que les droits de la défense du requérant sont garantis dans la procédure prévue par l’article 23 de ladite réglementation. En tout état de cause, ce grief serait dénué de fondement dans la mesure où le requérant entendrait dénaturer la procédure prévue par l’article 23 de la réglementation de couverture, qui prévoit l’avis d’un « autre médecin ».

104    Dans la réplique, le requérant rejette l’argument selon lequel le recours à cette procédure serait équilibré et concilierait les intérêts des parties, puisque le recours par analogie à la procédure de l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture n’était pas prévu par ladite réglementation. En substance, le requérant fait valoir qu’il ne pourrait formuler d’objections ni sur le médecin désigné selon cette procédure, ni sur le mandat définissant le cadre de sa mission, ni sur la documentation qui serait communiquée à ce dernier. En l’espèce, le mandat confié au médecin couvrirait les frais dentaires sans tenir compte de la prestation médicale effectuée. En outre, il existerait une contradiction dans la décision litigieuse dans la mesure où, d’un côté, elle prévoirait que la Commission peut « avoir le droit » de recourir à l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture et où, de l’autre, elle refuserait ce « même droit » au requérant.

105    La Commission rétorque, dans la duplique, que la légalité de la décision litigieuse ne serait pas remise en cause par le mandat qui concernerait exclusivement des « frais dentaires ». La Commission aurait examiné la demande du requérant au titre de l’article 9 de la réglementation de couverture au regard de la maladie professionnelle du requérant et en analysant tous les documents joints en annexe.

106    En premier lieu, il importe de relever que, contrairement à ce qui est soutenu par le requérant dans le cadre du quatrième chef de conclusions, consistant, en substance, à s’inspirer de la règle de procédure visant à saisir la commission médicale afin de réexaminer sa demande de remboursement des frais, la réglementation de couverture distingue clairement deux cas de figure concernant le réexamen d’un projet de décision.

107    Dans le premier cas de figure, si l’assuré le demande, la décision est adoptée après consultation de la commission médicale conformément à l’article 18, deuxième tiret, de la réglementation de couverture. Dans le second cas de figure, l’assuré peut demander la consultation pour avis d’un « autre médecin » dans les cas autres que ceux visés à l’article 18 de ladite réglementation. À la suite de la notification de ces projets de décision, les deux procédures instituent respectivement un délai de 60 jours et de 30 jours dans lesquels l’assuré peut demander le réexamen desdits projets. Si, à l’expiration du délai, aucune demande de consultation n’a été déposée, l’AIPN adopte la décision telle qu’elle en a été notifiée par le projet.

108    Il résulte de ces dispositions que les décisions adoptées, comme en l’espèce, dans le cadre d’une demande de remboursement des dépenses, conformément à l’article 9, paragraphe 1, de la réglementation de couverture, ne relèvent pas, comme le souligne justement la Commission, du champ d’application matériel de l’article 18 de la réglementation de couverture. En effet, cet article porte sur « les décisions relatives à la reconnaissance de l’origine accidentelle d’un événement, qu’il soit attribué aux risques résultant du travail ou de la vie privée, et les décisions qui y sont liées relatives à la reconnaissance de l’origine professionnelle de la maladie ainsi qu’à la fixation du degré d’invalidité permanente ». Ces termes étant clairs, ils ne peuvent être interprétés de sorte à y inclure les décisions relatives à des demandes de remboursement de frais au sens de l’article 9, paragraphe 1, de la réglementation de couverture.

109    En outre, contrairement à ce que suggère le requérant, il ne s’agit pas de déterminer un quelconque droit de recourir à l’ensemble de la procédure applicable à une demande de remboursement, mais bien de déterminer la procédure de désignation de l’« autre médecin » applicable en cas de désaccord entre les parties au sujet de ladite désignation. En effet, sur ce point, l’article 23 de la réglementation de couverture ne comporte aucune lacune qui justifierait l’application de l’ensemble de la procédure prévue à l’article 22 de ladite réglementation.

110    Dès lors, les décisions adoptées en vertu de l’article 9, paragraphe 1, de la réglementation de couverture concernent des hypothèses différentes de celles couvertes par son article 18 et sont régies par la procédure décrite à son article 23.

111    Il découle de la conclusion formulée au point 110 ci-dessus que le requérant ne saurait se prévaloir du fait que l’AIPN a, en l’espèce, décidé de recourir en partie et par analogie, pour ce qui concerne la désignation de l’« autre médecin » prévue par l’article 23 de la réglementation de couverture, à la procédure prévue par l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture pour en déduire que, a fortiori, l’ensemble de la procédure prévue audit article 22 devrait s’appliquer à sa demande de remboursement. De même, il ne saurait tirer du refus de remboursement de frais opposé par le médecin désigné par l’AIPN aucun droit de saisine de la commission médicale. Par conséquent, le premier motif de la décision litigieuse est fondé en ce que l’article 22 de la réglementation de couverture ne vise pas les décisions relatives à un remboursement de frais médicaux.

112    En deuxième lieu, compte tenu de la conclusion retenue au point 110 ci-dessus, il convient d’apprécier la légalité du recours, par analogie, à la procédure prévue par l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture, telle que contestée par le requérant et défendue par la Commission, afin de désigner l’« autre médecin » au sens de l’article 23 de ladite réglementation.

113    Il ressort des termes de l’article 9, paragraphe 1, de la réglementation de couverture, intitulé « Remboursement des dépenses », que cet article institue un droit au remboursement de « tous les frais nécessités […] pour tous les soins et traitements nécessités par les suites des lésions subies et leurs manifestations et, s’il y a lieu, des frais nécessités par la réadaptation fonctionnelle et professionnelle de la victime ». En revanche, il ne comporte aucune précision concernant la procédure applicable aux demandes de remboursement de frais médicaux.

114    À cet égard, il convient de se référer à l’article 23, paragraphe 1, de la réglementation de couverture, qui, conformément à son champ d’application matériel résiduel, définit la procédure applicable aux décisions relatives aux cas non prévus à l’article 18 de la réglementation de couverture, situation dont relève la décision litigieuse.

115    Il est vrai que, comme l’indiquent les parties, l’article 23, paragraphe 1, de la réglementation de couverture, intitulé « Consultation d’un autre médecin », ne précise pas explicitement la procédure à suivre pour désigner l’« autre médecin » afin de remédier, le cas échéant, à un désaccord entre le médecin désigné par l’AIPN et le médecin désigné par l’assuré.

116    Toutefois, le principe de sécurité juridique justifie une interprétation axée sur les dispositions du droit de l’Union afin de garantir un haut degré de prévisibilité (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 22 mai 2008, Glaxosmithkline et Laboratoires Glaxosmithkline, C‑462/06, EU:C:2008:299, points 32 et 33). Il importe, afin d’assurer une telle prévisibilité, de rester, dans la mesure du possible, fidèle à la lettre des dispositions interprétées.

117    Admettre que, à défaut d’accord entre le médecin désigné par l’AIPN et le médecin désigné par l’assuré pour la nomination de l’« autre médecin », il convient de recourir à la procédure prévue par l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture risquerait de modifier le champ d’application de la procédure de consultation telle qu’elle a initialement été envisagée par ses auteurs. En outre, ainsi qu’il résulte du préambule de la réglementation de couverture, il appartient aux institutions, et non au Tribunal, d’arrêter, d’un commun accord, la réglementation de couverture et, par conséquent, de prévoir, le cas échéant, une telle procédure ou d’opérer un renvoi explicite à l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture.

118    En outre, selon une jurisprudence bien établie, bien qu’une interprétation d’une disposition du droit de l’Union « à la lumière » du contexte juridique dans lequel elle s’insère ou de sa finalité soit en principe possible pour résoudre une ambiguïté de rédaction, une telle interprétation ne saurait avoir pour résultat de retirer tout effet utile au libellé clair et précis de cette disposition sous peine d’être incompatible avec les exigences du principe de sécurité juridique (voir, en ce sens, arrêts du 8 décembre 2005, BCE/Allemagne, C‑220/03, EU:C:2005:748, point 31 ; du 15 juillet 2010, Commission/Royaume‑Uni, C‑582/08, EU:C:2010:429, points 46, 49 et 51 et jurisprudence citée, et du 22 septembre 2016, Parlement/Conseil, C-14/15 et C-116/15, EU:C:2016:715, point 70).

119    Dès lors que les institutions n’ont pas explicitement prévu le recours à une désignation d’office par le président de la Cour de l’« autre médecin », ni n’ont marqué leur accord sur cette application par analogie, il n’appartient pas au Tribunal de l’imposer de manière prétorienne. À cet égard, le Tribunal ne saurait ignorer le libellé clair et précis d’une disposition qui prévoit seulement la possibilité de désigner un « autre médecin » choisi d’un commun accord par le médecin désigné par l’AIPN et celui désigné par l’assuré. Par conséquent, la Commission ne pouvait pas appliquer, par analogie à la situation d’espèce, l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture.

120    En troisième lieu, la conclusion retenue au point précédent ne saurait être remise en cause par les arguments de la Commission. Cette dernière justifie le recours à l’application par analogie de la règle de désignation du « troisième médecin » prévue par l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture en raison de la nécessité de trouver une solution à la situation d’impasse causée par l’impossibilité de nommer un « autre médecin » au sens de l’article 23 de la réglementation de couverture et de l’absence, dans l’article en question, d’une réglementation expresse applicable dans un tel cas. De plus, le choix de ce recours serait selon la Commission équilibré et permettrait de concilier équitablement les intérêts de l’ancien fonctionnaire et de l’administration. Ce choix serait fondé sur le devoir de sollicitude et le principe de bonne administration qui incombent à l’institution.

121    À cet égard, tout d’abord, l’argument de la Commission selon lequel, en raison de la nécessité de trouver une solution à la situation d’impasse caractérisant le cas d’espèce, la disposition de l’article 23 de la réglementation de couverture devrait, en présence d’un désaccord sur la désignation d’un « autre médecin », être lue comme prévoyant le recours par analogie à la procédure prévue à l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture est incompatible avec le libellé clair de ladite disposition et ne trouve, de surcroît, aucun appui dans d’autres éléments de la réglementation de couverture.

122    D’ailleurs, il convient de relever que l’allégation de la Commission selon laquelle le choix de recourir à la règle de désignation d’un troisième médecin prévue par l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture serait équilibré et permettrait de concilier équitablement les intérêts de l’ancien fonctionnaire et de l’administration est contestée par le requérant. En particulier, les arguments présentés relatifs au contenu incertain du mandat de cet « autre médecin » désigné par le président de la Cour, à la documentation qui serait envoyée à ce dernier sans droit de regard du requérant et au caractère définitif de la décision de cette procédure de réexamen ad hoc témoignent, à tout le moins, de ce que le requérant conteste que ce choix soit équilibré et concilie les intérêts des parties en présence. En effet, en présence d’une procédure ad hoc comme celle en cause, les arguments du requérant peuvent être interprétés comme faisant valoir que le principe de sécurité juridique ne serait pas respecté en raison du défaut de prévisibilité de cette procédure.

123    Par ailleurs, la circonstance que d’autres dispositions de la réglementation de couverture prévoient une procédure semblable, ou que celle-ci soit justifiée par le devoir de sollicitude et le principe de bonne administration qui incombent à l’institution, ne saurait justifier que l’interprétation de l’article 23, paragraphe 1, premier alinéa, de la réglementation de couverture figurant dans la décision litigieuse soit retenue.

124    Selon une jurisprudence constante, le devoir de sollicitude reflète l’équilibre des droits et des obligations réciproques que les conditions d’emploi et les règles applicables au personnel ont créés dans les relations entre l’autorité publique et les agents du service public, ce qui implique notamment que, lorsqu’elle statue à propos de la situation d’un fonctionnaire, l’autorité prenne en considération l’ensemble des éléments qui sont susceptibles de déterminer sa décision et que, ce faisant, elle tienne compte non seulement de l’intérêt du service, mais aussi de celui du fonctionnaire concerné. Cette dernière obligation est imposée à l’administration par le principe de bonne administration consacré à l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne [voir arrêts du 5 décembre 2006, Angelidis/Parlement, T‑416/03, EU:T:2006:375, point 117 et jurisprudence citée, et du 13 décembre 2017, Arango Jaramillo e.a./BEI, T‑482/16 RENV, EU:T:2017:901, point 131 (non publié) et jurisprudence citée].

125    En outre, les obligations découlant pour l’administration du devoir de sollicitude sont substantiellement renforcées lorsqu’est en cause la situation d’un fonctionnaire dont il est avéré que la santé, physique ou mentale, est affectée (voir arrêt du 18 novembre 2014, McCoy/Comité des régions, F‑156/12, EU:F:2014:247, point 106 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens et par analogie, arrêt du 7 novembre 2019, WN/Parlement, T‑431/18, non publié, EU:T:2019:781, point 106).

126    Toutefois, dans le cadre du devoir de sollicitude, la protection des droits et des intérêts des fonctionnaires doit toujours trouver sa limite dans le respect des normes en vigueur (voir arrêt du 5 décembre 2006, Angelidis/Parlement, T‑416/03, EU:T:2006:375, point 117 et jurisprudence citée). En particulier, ce dernier ne saurait conduire l’administration à donner à une disposition communautaire un effet qui irait à l’encontre des termes clairs et précis de cette disposition (arrêts du 27 juin 2000, K/Commission, T‑67/99, EU:T:2000:169, point 68, et du 26 mars 2020, Teeäär/BCE, T‑547/18, EU:T:2020:119, points 87 à 89).

127    En l’espèce, s’il est vrai que la décision litigieuse s’inscrit dans le cadre plus général d’une demande de remboursement de frais médicaux qui serait liée à la maladie professionnelle du requérant, le fait que les obligations de l’administration découlant du devoir de sollicitude soient substantiellement renforcées ne signifie pas que la Commission puisse aller à l’encontre des termes clairs et précis de l’article 23, paragraphe 1, premier alinéa, de la réglementation de couverture. Si, en vertu du devoir de sollicitude, la Commission est effectivement tenue de trouver une solution à la situation de blocage existante, cette solution doit être respectueuse du cadre réglementaire qui s’impose à elle.

128    Par conséquent, la Commission ne peut invoquer le devoir de sollicitude pour justifier l’application par analogie de la règle de désignation du troisième médecin prévue par l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture dès lors que la disposition de l’article 23, paragraphe 1, premier alinéa, de ladite réglementation s’oppose à une telle application et n’est d’ailleurs incompatible avec aucun principe général du droit (voir, en ce sens, arrêt du 15 février 2011, Marcuccio/Commission, F‑81/09, EU:F:2011:13, point 55).

129    En quatrième lieu, la conclusion retenue au point 119 ci-dessus ne saurait pas davantage être remise en cause par les arguments du requérant. Tout d’abord, ce dernier fait valoir, en substance, qu’il aurait le droit de se voir appliquer la procédure de consultation de la commission médicale prévue par l’article 22 de la réglementation de couverture dans la mesure où l’avis d’un organe collégial offrirait plus de garanties que celui d’un seul médecin dans le cadre d’un dossier et d’un mandat pratiquement secrets. À cet égard, il semble faire référence, notamment, au respect de ses droits de la défense, dans le cadre de l’article 23 de ladite réglementation, tant au cours de la procédure d’examen ayant conduit à l’adoption du projet de décision du 30 juin 2017 qu’au cours de la procédure de réexamen actuellement pendante. Plus particulièrement, il mentionne, d’une part, la prise en compte de son dossier médical personnel et de ses antécédents liés à la maladie professionnelle et, d’autre part, la mise à disposition auprès de l’« autre médecin », par le médecin de l’assuré, de documents adéquats au cas d’espèce.

130    À cet égard, il ressort de la jurisprudence que, dans le cadre de leur examen concret et circonstancié de la situation qui leur est soumise, les médecins désignés par l’AIPN doivent se prononcer sur la base de la littérature scientifique, mais ils ne sauraient faire abstraction de l’état de santé effectif et complet de la personne concernée. Au demeurant, cette obligation de tenir compte de la situation personnelle de l’assuré serait imposée par le devoir de sollicitude (voir, en ce sens, arrêts du 9 décembre 2009, Commission/Birkhoff, T‑377/08 P, EU:T:2009:485, point 88, et du 25 mai 2016, GW/Commission, F‑111/15, EU:F:2016:122, point 40).

131    Aussi, l’« autre médecin » chargé de réexaminer la pertinence du remboursement de la prestation médicale au regard de la maladie professionnelle du requérant doit avoir connaissance de l’étendue et des conséquences induites par celle-ci et avoir accès au contenu des décisions.

132    En outre, il ressort de la jurisprudence que, pour émettre valablement un avis médical, il faut que le médecin soit en mesure de prendre connaissance de la totalité des documents susceptibles d’être utiles pour son appréciation (voir, par analogie, arrêts du 15 juillet 1997, R/Commission, T‑187/95, EU:T:1997:119, point 49, et du 29 février 2012, AM/Parlement, F‑100/10, EU:F:2012:24, point 92). Ainsi, comme le rappelle justement la Commission, le médecin désigné par l’assuré a la possibilité de présenter et de défendre son point de vue en soumettant des documents complémentaires.

133    Ensuite, l’argument du requérant visant à démontrer que les médecins de la Commission ne seraient pas impartiaux, à la lumière de l’arrêt du 24 octobre 1996, Commission/Royale belge (C‑76/95, EU:C:1996:406), est dénué de fondement et ne remet pas en cause la conclusion retenue au point 119 ci-dessus. En effet, par cet argument formulé de manière générale et cette référence jurisprudentielle succincte, le requérant ne développe pas en quoi dans la situation d’espèce, et à l’égard de quelle entité précisément, les médecins désignés par l’institution auraient manqué d’impartialité dans l’adoption d’une décision relative au remboursement des frais demandés.

134    Par conséquent, la procédure d’examen et celle de réexamen, telles que régies par l’article 23 de la réglementation de couverture, offrent des garanties suffisantes concernant le respect des droits de la défense du requérant dans le cadre de l’examen de sa demande de remboursement de frais, de sorte qu’il ne saurait revendiquer la nomination d’une commission médicale pour assurer le respect de ces droits.

135    Dès lors, le second motif de la décision litigieuse, selon lequel l’administration a décidé de s’inspirer de la règle prévue à l’article 22, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la réglementation de couverture afin de demander au président de la Cour de désigner d’office un « autre médecin », est erroné en droit.

136    Toutefois, il ressort de la jurisprudence que, dans la mesure où certains motifs d’une décision sont, à eux seuls, de nature à justifier à suffisance de droit celle-ci, les vices dont pourraient être entachés d’autres motifs de l’acte sont, en tout état de cause, sans influence sur son dispositif. En outre, dès lors que le dispositif d’une décision de la Commission repose sur plusieurs piliers de raisonnement dont chacun suffirait à lui seul à fonder ce dispositif, il n’y a lieu d’annuler cet acte, en principe, que si chacun de ces piliers est entaché d’illégalité. Dans cette hypothèse, une erreur ou une autre illégalité qui n’affecterait qu’un seul des piliers du raisonnement ne saurait suffire à justifier l’annulation de la décision litigieuse, dès lors que cette erreur n’a pu avoir une influence déterminante quant au dispositif retenu par l’institution auteur de cette décision (voir arrêt du 10 novembre 2017, Icap e.a./Commission, T‑180/15, EU:T:2017:795, point 74 et jurisprudence citée).

137    En l’espèce, l’erreur de droit entachant le second motif de la décision litigieuse n’est pas de nature à entraîner l’annulation de cette décision, étant donné qu’elle n’a pas pu avoir d’incidence sur son résultat. En effet, conformément à la conclusion retenue par le Tribunal aux points 110 et 111 ci-dessus, le premier motif de la décision litigieuse, indiquant que la procédure prévue à l’article 22 de la réglementation de couverture ne vise pas les décisions relatives à un remboursement de frais médicaux, est fondé et suffit à justifier à suffisance de droit le refus de saisine de la commission médicale opposé dans la décision litigieuse.

138    Partant, les premier et quatrième chefs de conclusions doivent être rejetés comme étant non fondés.

 Sur le sixième chef de conclusions, relatif à la demande en indemnité

139    Le  requérant demande de condamner la Commission à l’indemniser du préjudice subi pour un montant de 500 000 euros ou tout autre montant déterminé ex æquo et bono, en raison du caractère volontaire ou vexatoire des actes et des omissions illégales de la Commission. En particulier, le requérant dénonce le comportement anormal des trois médecins consultés que sont le médecin désigné par l’AIPN, son successeur ainsi que le médecin spécialisé. Ces derniers auraient notamment nié les fonctions les plus élémentaires du nez, en prétendant en pratique que, dans le cas spécifique du requérant, « respirer par la bouche [était] aussi sain que de respirer par le nez ».

140    La Commission conteste les arguments du requérant.

141    Il ressort d’une jurisprudence constante que, dans le domaine de la fonction publique, l’engagement de la responsabilité de l’institution impliquée est subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché à l’institution, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué. Ces trois conditions sont cumulatives, ce qui implique que, dès lors que l’une d’elles n’est pas satisfaite, la responsabilité de l’Union ne peut être retenue (arrêt du 9 décembre 2010, Commission/Strack, T‑526/08 P, EU:T:2010:506, point 57).

142    Or, le requérant, sur qui repose la charge de la preuve, se contente d’affirmer qu’il a subi divers préjudices sans apporter le moindre élément au soutien de ses affirmations. À cet égard, il ne précise pas la réalité du dommage et ne démontre pas l’existence d’un lien de causalité entre les comportements allégués et les préjudices invoqués. Ainsi, deux des conditions d’engagement de la responsabilité de l’Union font défaut en l’espèce, ce qui suffit pour rejeter le chef de conclusions indemnitaire comme non fondé.

143    Il résulte de tout ce qui précède que le recours doit être rejeté dans son ensemble.

 Sur les dépens

144    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

145    En l’espèce, le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. Arnaldo Lucaccioni est condamné aux dépens.

Gervasoni

Frendo

Martín y Pérez de Nanclares

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 juin 2021.

Signatures



* Langue de procédure : l’italien.


1      Le présent arrêt fait l’objet d’une publication par extraits.