Language of document : ECLI:EU:T:2008:8

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

15 janvier 2008(*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale AMPLITUDE – Marque nationale figurative antérieure AMPLY – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94 »

Dans l’affaire T-9/05,

Hoya Kabushiki Kaisha, établie à Tokyo (Japon), représentée par Mes A. Nordemann, C.-R. Haarmann, F. Schwab et M. Nentwig, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par MM. A. Folliard-Monguiral et G. Schneider, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Indo Internacional, SA, établie à Hospitalet de Llobregat (Espagne), représentée par MM. Currel Aguilà, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 3 novembre 2004 (affaire R 433/2004-1), relative à une procédure d’opposition entre Indo Internacional, SA et Hoya Kabushiki Kaisha,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

composé de MM. M. Jaeger, président, J. Azizi et Mme E. Cremona, juges,

greffier : Mme C. Kristensen, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 12 janvier 2005,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 3 mai 2005,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 12 mai 2005,

à la suite de l’audience du 15 mars 2007,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 26 juin 2000, la requérante a déposé une demande de marque communautaire auprès de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié.

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est la marque verbale AMPLITUDE.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 9 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié (ci-après l’« arrangement de Nice ») et correspondent à la description suivante : « Lunettes ; verres de lunettes ; montures de lunettes ; lunettes de soleil ; lentilles de contact. »

4        La demande a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 12/2001, du 29 janvier 2001.

5        Le 25 avril 2001, l’intervenante a formé une opposition à l’enregistrement de la marque demandée, en vertu de l’article 42, paragraphe 1, du règlement n° 40/94.

6        L’opposition était fondée sur l’enregistrement de la marque figurative, de couleur turquoise, suivante :

Amply

7        Cette marque a été enregistrée en Espagne sous le n° 2291576 le 20 juillet 2000 pour les produits relevant de la classe 9 au sens de l’arrangement de Nice et correspondant à la description suivante : « Appareils et instruments optiques, plus particulièrement lunettes et lunettes de soleil, verres de soleil et verres ophtalmiques ».

8        L’opposition avait trait à l’ensemble des produits couverts par cet enregistrement antérieur et était fondée sur l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

9        Par décision n° 1135/2004, du 2 avril 2004, la division d’opposition de l’OHMI a refusé l’opposition au motif qu’il n’existait aucun risque de confusion entre les deux marques en conflit.

10      Le 28 mai 2004, l’intervenante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94, contre la décision de la division d’opposition.

11      Par décision du 3 novembre 2004, adoptée dans l’affaire R 433/2004‑1, (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours a fait droit à l’opposition de l’intervenante et annulé la décision de la division d’opposition au motif qu’il existait un risque de confusion entre les deux marques en conflit.

 Conclusions des parties

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

13      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

14      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        confirmer la décision attaquée et rejeter la demande d’enregistrement de la marque communautaire AMPLITUDE ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

15      La requérante soulève un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n°40/94.

 Arguments des parties

16      La requérante prétend que la chambre de recours a, en l’espèce, erronément conclu à l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

17      S’agissant, d’abord, de la comparaison visuelle, la requérante souligne que l’apparence des deux marques est différente. Elle explique que les lettres de la marque antérieure sont écrites dans une police de caractères différente de celle utilisée pour la marque demandée. La marque antérieure est ainsi écrite de façon plus fine. De plus, il y aurait un espace entre chaque lettre de la marque antérieure plus important que celui séparant les lettres composant la marque demandée. La requérante ajoute que la chambre de recours n’a pas suffisamment pris en compte le fait que la marque antérieure était de couleur turquoise.

18      La requérante fait également valoir que la marque demandée est deux fois plus longue que la marque antérieure. La jurisprudence quant à l’importance des lettres initiales serait principalement fondée sur le fait que les consommateurs ne portent pas leur attention sur des différences mineures apparaissant dans la fin des marques, comme des lettres singulières ou des suffixes plus ou moins négligeables. Toutefois, la terminaison de la marque demandée (« itude ») ne saurait être considérée comme négligeable.

19      Sur le plan phonétique, la requérante soutient que, même si la voyelle « y » contenue dans la marque antérieure est prononcée en espagnol comme le « i » contenu dans la marque demandée, il ne faut pas négliger le fait que ladite marque est deux fois plus longue que la marque antérieure, ce qui implique un rythme de prononciation différent. Elle ajoute que le consommateur moyen n’abrégerait pas le mot « amplitude » en « ampli » de même qu’il n’aurait pas tendance à modifier le nom des marques, sauf si celui-ci était trop long ou trop difficile à retenir.

20      La requérante estime que les deux syllabes additionnelles de la marque demandée créent une spécificité phonétique, du fait que, en espagnol, c’est la troisième syllabe « tu » du terme « amplitude » qui serait accentuée. Elle affirme que ladite accentuation phonétique ne peut pas être considérée comme négligeable ou passer inaperçue pour le public pertinent.

21      Enfin, la requérante fait valoir que le mot « amplitude » n’existe pas dans la langue espagnole. Le mot espagnol correspondant serait « amplitud ». Elle estime que, en raison du « e » présent à la fin du mot, il est possible qu’une bonne partie du public pertinent essaye de prononcer ce mot dans sa version anglaise, donc très différemment de la prononciation de la marque antérieure.

22      Quant à la comparaison conceptuelle, la requérante est d’avis que la chambre de recours n’a pas tenu compte de la jurisprudence constante (arrêt de la Cour du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec. p. I‑3819, point 25), selon laquelle l’appréciation globale du risque de confusion doit être fondée sur l’impression d’ensemble et le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails.

23      La requérante estime que le consommateur moyen espagnol n’appréhende ni l’élément verbal « amply » comme équivalant au terme espagnol « amplio » ni le mot « amplitude » comme correspondant au terme espagnol « amplitud ». Même s’il le faisait, cela ne serait pas significatif dès lors que lesdits éléments verbaux espagnols ne sont pas enregistrés en tant que marque.

24      Quant aux éléments verbaux composant les deux marques en cause, la requérante estime que, s’il est vrai que les consommateurs concernés comprendront qu’il s’agit de deux mots dérivés de la même racine, il s’agit toutefois de termes anglais qui n’existent pas dans la langue espagnole. Elle en conclut que les deux termes ne peuvent, en principe, pas être compris par le consommateur moyen espagnol comme ayant une connotation particulière. Seule la marque AMPLITUDE pourrait peut‑être revêtir un sens, du fait qu’il s’agirait d’un terme largement utilisé dans le monde de la technique, mais il n’y aurait pas de terme équivalent à « amply » en espagnol.

25      L’OHMI et l’intervenante considèrent, en substance, que c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé qu’il y avait un risque de confusion entre les marques en cause et, partant, que la demande de la requérante doit être rejetée comme non fondée.

 Appréciation du Tribunal

 Généralités

26      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée.

27      En vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement n° 40/94, il convient d’entendre par marques antérieures, notamment, les marques enregistrées dans un État membre dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

28      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance entre la similitude des signes et celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence y citée].

29      Il convient également de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [arrêt du Tribunal du 17 janvier 2006, Henkel/OHMI (Tablette rectangulaire rouge et blanc avec un noyau ovale bleu), T‑398/04, non publié au Recueil, point 28 ; voir, par analogie, arrêt Lloyd Schuhfabrik Meyer, point 22 supra, point 26].

30      En particulier, le consommateur de biens de consommation courante est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé [arrêt du Tribunal du 17 janvier 2007, Georgia-Pacific/OHMI (Motif gaufré), T‑283/04, non publié au Recueil, point 41].

 Sur le public pertinent et sur la similitude entre les produits concernés

31      La chambre de recours a considéré que l’Espagne constituait le territoire pertinent et que le public visé était composé des consommateurs moyens espagnols. Elle a constaté que, étant donné qu’il s’agit de biens de consommation courante, le public pertinent était normalement informé et raisonnablement attentif et avisé (points 18 et 19 de la décision attaquée).

32      S’agissant de la comparaison entre les produits concernés, la chambre de recours a considéré que les produits couverts par la marque antérieure et ceux couverts par la marque demandée étaient identiques et qu’ils relevaient de la classe 9 au sens de l’arrangement de Nice (point 20 de la décision attaquée).

33      Les constatations opérées par la chambre de recours ne sont pas contestées. Le Tribunal estime qu’il n’y a en outre pas de raisons apparentes pour mettre en doute cette appréciation.

34      Par conséquent, il convient de tenir compte, aux fins de l’appréciation du risque de confusion en l’espèce, de l’identité des produits couverts par les marques en conflit ainsi que du point de vue du consommateur moyen espagnol, dont le niveau d’attention est moyen.

 Sur la similitude des signes

35      S’agissant de la comparaison entre les signes en question, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants [voir arrêts du Tribunal du 14 octobre 2003, Phillips-Van Heusen/OHMI – Pash Textilvertrieb und Einzelhandel (BASS), T‑292/01, Rec. p. II‑4335, point 47, et la jurisprudence y citée].

–       Comparaison visuelle

36      S’agissant de la comparaison visuelle entre les signes en cause, la chambre de recours a relevé, dans la décision attaquée, une similitude évidente. Elle a précisé que la partie initiale des deux marques en conflit était pratiquement identique et que l’attention du consommateur portait particulièrement sur celle-ci. Elle a estimé que les différences résultant des caractères, de la couleur de la marque antérieure ainsi que de la longueur de la marque demandée (la terminaison supplémentaire « tude »), n’étaient donc pas en mesure d’amoindrir la similitude visuelle d’ensemble des marques en conflit (voir point 22 de la décision attaquée).

37      À cet égard, premièrement, force est de constater que la marque antérieure est, à l’exception d’une seule lettre (« y » au lieu de « i »), entièrement incluse dans la marque demandée. Deuxièmement, il y a lieu de noter que la partie de la marque demandée correspondant à la marque antérieure se trouve en position initiale, ce qui, comme cela a été reconnu par la jurisprudence, capte davantage l’attention du consommateur [arrêt du Tribunal du 17 mars 2004, El Corte Inglés/OHMI – González Cabello et Iberia Líneas Aéreas de España (MUNDICOR), T‑183/02 et T‑184/02, Rec. p. II‑965, point 81], ainsi que le reconnaît la requérante.

38      Quant aux différences visuelles entre la marque demandée et la marque antérieure, relevées par la requérante, premièrement, le Tribunal constate que la marque antérieure est principalement constituée d’un élément verbal, à savoir l’élément « amply», mais qu’elle comporte également des éléments figuratifs, en l’occurrence des lettres d’imprimerie ordinaires de couleur turquoise. En revanche, la marque demandée est une marque verbale consistant dans le mot « amplitude ».

39      À cet égard, il y a lieu de considérer, comme l’a estimé à juste titre la chambre de recours, que les éléments figuratifs de la marque antérieure sont marginaux. En effet, la seule représentation graphique de la marque antérieure, qui consiste en des caractères d’imprimerie, plutôt banals et ordinaires, même s’ils sont de couleur turquoise, ne saurait détourner l’attention du consommateur moyen vers des éléments figuratifs autres que les lettres qui la constituent [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 30 juin 2004, BMI Bertollo/OHMI – Diesel (DIESELIT), T‑186/02, Rec. p. II‑1887, point 47].

40      Deuxièmement, le Tribunal observe que, mis à part la différence entre les lettres « y » et « i » dans la partie commune aux deux marques (voir point 37 ci-dessus), la marque demandée se distingue de la marque antérieure par les quatre lettres supplémentaires formant la terminaison « tude ». Ainsi, la marque demandée, d’une longueur de neuf lettres, est de quatre lettres plus longue que la marque antérieure. Pourtant, le Tribunal estime, contrairement aux affirmations de la requérante, que les quatre lettres supplémentaires de la marque demandée qui forment la terminaison « tude » n’ont, par rapport à la partie initiale pratiquement identique à la marque antérieure, que le caractère d’un suffixe non significatif. En effet, la terminaison « tude » est très apparentée à la terminaison « tud », fort courante en espagnol.

41      Étant donné, notamment, le rôle décisif que revêt la position initiale de l’élément commun aux deux marques dans la perception de la marque par le consommateur (voir point 37 ci-dessus), c’est donc à juste titre que la chambre de recours a pu conclure à la similitude visuelle d’ensemble des marques en conflit.

–       Comparaison phonétique

42      S’agissant de la comparaison phonétique entre les signes en cause, la chambre de recours a également relevé, dans la décision attaquée, une similitude. Elle a précisé que, malgré l’impression similaire que produisaient les deux premières syllabes, fondée sur le fait que la lettre « y » dans la marque antérieure était prononcée, en espagnol, comme la lettre « i » dans la marque demandée, la similitude phonétique était atténuée par la longueur nettement plus importante de la marque demandée (voir point 23 de la décision attaquée).

43      À cet égard, il y a lieu de confirmer l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle les deux premières syllabes, qui forment l’élément commun aux deux marques, donnent une impression extrêmement similaire compte tenu du fait que, en espagnol, les lettres « y » et « i » sont toutes deux prononcées comme la voyelle « i ». Cette similitude est susceptible d’être renforcée dans l’attention des consommateurs par la position initiale de ces deux syllabes dans la marque demandée et dans la marque antérieure.

44      Premièrement, quant aux différences phonétiques entre les marques en cause, force est de constater que la chambre de recours n’a pas affirmé que le public ciblé avait tendance à abréger ou à modifier le nom de la marque demandée. La chambre de recours s’est fondée, au contraire, sur la longueur différente des signes en conflit. Ainsi, c’est à juste titre qu’elle a estimé que l’adjonction de deux syllabes doublait la longueur de la marque demandée, affaiblissant la similitude phonétique.

45      Deuxièmement, quant à l’affirmation de la requérante, selon laquelle une bonne partie du public pertinent prononcera le mot « amplitude » dans sa version anglaise, donc très différemment de la prononciation de la marque antérieure, il convient de constater que la requérante a avancé cet argument pour la première fois devant le Tribunal, lors de l’audience. Elle ne l’avait pas présenté auparavant au cours de la procédure devant l’OHMI. À ce titre, il convient de rappeler que des éléments factuels ou juridiques invoqués devant le Tribunal sans qu’ils aient été soulevés auparavant devant les instances de l’OHMI, et pour autant qu’un examen de ces éléments par ces instances n’était pas obligatoire pour résoudre le litige porté devant elles, sont irrecevables [arrêts du Tribunal du 22 octobre 2003, Éditions Albert René/OHMI – Trucco (Starix), T‑311/01, Rec. p. II‑4625, point 72 ; du 1er février 2005, SPAG/OHMI – Dann et Becker (HOOLIGAN), T‑57/03, Rec. p. II‑287, point 22, et du 17 octobre 2006, Hammarplast/OHMI – Steninge Slott (STENINGE SLOTT), T‑499/04, non publié au Recueil, point 20]. Ainsi, cet élément factuel invoqué par la requérante est irrecevable.

46      Troisièmement, il convient d’estimer que cette dissemblance est accentuée par la circonstance que, en espagnol, l’accent tonique repose, pour les deux marques en cause, sur l’avant-dernière syllabe. Ainsi, pour la marque antérieure, l’accent tonique est placé sur la syllabe « am » et pour la marque demandée sur la syllabe « tu ». Il a été illustré, au cours de l’audience, que, en espagnol, la syllabe accentuée « tu » contenue dans la marque demandée est plus longue que la syllabe accentuée « am » figurant dans la marque antérieure. Or, dans la marque demandée, à cause de ladite prononciation, c’est une des syllabes ajoutées à la racine commune des deux marques en conflit qui est accentuée, de manière à renforcer la différence phonétique entre les deux marques.

47      Partant, le Tribunal estime que, en espagnol, il existe, sur le plan phonétique, nonobstant une très forte similitude des deux syllabes initiales des marques en conflit, des différences entre ces marques.

48      Par conséquent, le Tribunal considère que l’appréciation de la chambre de recours doit être nuancée en ce que la différence phonétique entre les marques en cause est assez prononcée.

–       Comparaison conceptuelle

49      S’agissant de la comparaison conceptuelle, la chambre de recours a considéré, dans la décision attaquée, qu’il existait une similitude entre les deux marques en conflit. Elle a affirmé que, bien que les deux signes, en tant que tels, n’aient pas de sens dans la langue espagnole, le public concerné comprenait vraisemblablement le terme anglais « amplitude » comme équivalent au terme espagnol « amplitud », signifiant, notamment, la largeur, l’étendue ou le vaste espace.

50      De plus, la chambre de recours a estimé que le même lien conceptuel pouvait être établi entre la marque antérieure AMPLY et le mot espagnol « amplio ». Elle en a conclu que le consommateur concerné, comprenant la marque AMPLITUDE comme signifiant « amplitud » et la marque AMPLY comme signifiant « amplio », percevrait sans doute que les deux mots font partie de la même famille sémantique (voir points 24 et 25 de la décision attaquée).

51      Le Tribunal estime que cette appréciation doit être approuvée en substance.

52      En effet, même s’il n’est pas contesté qu’aucun des éléments verbaux constituant les deux marques en conflit ne fait partie, en tant que tel, du vocabulaire de la langue espagnole, le lien conceptuel existant entre la racine commune des marques concernées (« amply/ampli- ») et la famille sémantique des mots espagnols comme « ampliar » et « amplificar » (amplifier), « amplificación » (amplification), « amplitud » (amplitude), « amplio » (étendu, vaste), etc. est indéniable.

53      À cet égard, il convient de rejeter l’affirmation de la requérante, selon laquelle, d’une part, du fait de l’absence de signification des signes en question dans la langue espagnole, le consommateur pertinent ne comprend pas l’élément verbal « amply » et, d’autre part, seul le terme « amplitude », grâce à sa similitude avec le mot espagnol « amplitud », peut être compris.

54      Le Tribunal estime qu’il n’est pas nécessaire, comme le soutient la requérante, que le consommateur concerné comprenne, transforme ou abrège les marques en conflit. En effet, le lien conceptuel entre le sens des mots mentionnés ci-dessus, d’une part, et la racine commune des éléments verbaux constituant les marques en conflit, d’autre part, suffit pour établir leur similitude conceptuelle.

55      Finalement, il existe une relation très forte entre les produits concernés et la signification des marques qui les désignent pour le consommateur moyen espagnol. Tous les mots associés à la racine commune des deux marques en conflit font allusion de façon évocatrice à l’intensification, au grossissement, à l’englobement de certains objets ou de certaines qualités, à l’amplitude, à l’espace ou à l’étendue, c’est-à-dire à des impressions très pertinentes à l’égard des produits concernés (lunettes, lentilles, lunettes de soleil, etc.).

56      Partant, le Tribunal estime que c’est à juste titre que la chambre de recours a constaté qu’il existait une similitude conceptuelle entre les marques en cause.

–       Appréciation globale de la similitude des signes en conflit

57      Tout d’abord, sont en cause, en l’espèce, comme la chambre de recours l’a constaté à juste titre, deux marques présentant une similitude visuelle, phonétique et conceptuelle quant à leur racine commune (« amply/ampli- »), placée en position initiale.

58      En effet, sur le plan visuel, il existe, nonobstant certaines différences, une similitude visuelle d’ensemble entre les deux marques en cause (voir points 36 à 41 ci-dessus). En revanche, la similitude phonétique des premières syllabes des deux marques en conflit est atténuée par la prononciation espagnole assez différente des deux marques (voir points 42 à 48 ci-dessus). En outre, il existe une très grande similitude conceptuelle en raison de la forte connexité entre les produits concernés et le sens perçu par les consommateurs pertinents des signes en cause (voir points 49 à 56 ci-dessus).

59      En prenant en compte l’ensemble de ces circonstances, le Tribunal estime que la similitude visuelle d’ensemble indéniable et surtout la très forte similitude conceptuelle, ainsi que, dans une moindre mesure, la similitude phonétique, quoique plus réduite, conduisent à une appréciation générale positive de la similitude des signes en question.

60      Partant, l’appréciation globale de la chambre de recours, selon laquelle les signes en conflit étaient similaires, est correcte.

 Sur le risque de confusion

61      Lors de l’appréciation globale du risque de confusion dans son ensemble, la chambre de recours a estimé, dans la décision attaquée, que le poids des similitudes entre les deux marques était supérieur à leurs différences mineures. Elle a expliqué que la partie initiale des marques en conflit était pratiquement identique et que le consommateur moyen percevrait normalement une marque comme un tout sans en analyser les détails, puisqu’il n’était pas en mesure de comparer directement les marques en conflit (voir point 26 de la décision attaquée).

62      Comme cela a été exposé (voir points 57 à 60 ci-dessus), le Tribunal partage, quant au résultat, l’appréciation de la chambre de recours concernant la similitude globale des signes en question. Il y a lieu, en effet, de constater une similitude globale entre les deux marques en cause, compte tenu, en particulier, du placement en position initiale de leur élément commun « amply/ampli‑ », et de son aspect conceptuel.

63      Considérant en outre que les produits en cause sont identiques et que le consommateur moyen espagnol, en tant que public visé, n’est que moyennement attentif par rapport aux produits de consommation courante concernés, il est concevable, comme il est indiqué dans la décision attaquée (point 28), que le consommateur concerné considère les produits désignés comme provenant de la même entreprise.

64      Partant, le Tribunal conclut que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en estimant qu’il existait, dans l’esprit du public pertinent, un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

65      Pour les motifs qui précèdent, il y a donc lieu de rejeter le recours en annulation comme non fondé.

 Sur les dépens

66      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

67      En l’espèce, la requérante a succombé et l’OHMI ainsi que l’intervenante ont conclu à ce que la requérante soit condamnée aux dépens. Il y a donc lieu de condamner la requérante aux dépens exposés par l’OHMI et par l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Hoya Kabushiki Kaisha est condamnée aux dépens.

Jaeger

Azizi

Cremona

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 janvier 2008.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Jaeger


* Langue de procédure : l’anglais.