Language of document : ECLI:EU:T:2022:223

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

6 avril 2022 (*)

« Fonction publique – Agents temporaires – Poste occupé nécessitant une habilitation de sécurité – Habilitation refusée par l’autorité nationale de sécurité – Résiliation du contrat – Absence de demande d’audition – Droit d’être entendu au sens de l’article 11, paragraphe 5, sous b), de la décision 2015/444 »

Dans l’affaire T‑568/20,

MF, représenté par Me L. Levi, avocate,

partie requérante,

contre

Agence de l’Union européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice (eu-LISA), représentée par M. M. Chiodi, en qualité d’agent, assisté de Mes A. Duron et D. Waelbroeck, avocats,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de MM. R. da Silva Passos, président, L. Truchot (rapporteur) et M. Sampol Pucurull, juges,

greffier : M. I. Pollalis, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 2 décembre 2021,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Par son recours fondé sur l’article 270 TFUE, déposé au greffe du Tribunal le 4 septembre 2020, le requérant, MF, demande l’annulation, d’une part, de la décision de l’Agence de l’Union européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice (eu‑LISA) du 29 octobre 2019 résiliant son contrat de travail (ci-après la « décision attaquée ») et, d’autre part, dans la mesure nécessaire, de la décision de l’eu‑LISA du 26 mai 2020 rejetant sa réclamation du 29 janvier 2020.

2        Le requérant, ressortissant roumain, a été recruté, en février 2018, par l’eu‑LISA en qualité d’agent temporaire, de grade AD 5, au sein de l’unité « Gestion et maintenance applicatives », pour une période de cinq ans.

3        Conformément à l’avis de vacance du poste occupé par le requérant (ci-après l’« avis de vacance »), les candidats retenus devaient posséder, ou être en mesure d’obtenir, un certificat d’habilitation de sécurité du personnel de niveau Secret UE/EU Secret en cours de validité délivré par une autorité compétente. L’avis de vacance prévoyait que le défaut d’obtention de ce certificat d’habilitation auprès de l’autorité nationale de sécurité du candidat retenu, pendant ou après l’expiration de la période d’essai, conférait à l’eu‑LISA le droit de résilier tout contrat de travail en cours.

4        Le 22 février 2018, conformément à un accord de niveau de service conclu entre l’eu‑LISA et la Commission européenne, la direction de la sécurité de la Commission a, à la suite d’une requête introduite par l’eu‑LISA, demandé à l’autorité nationale de sécurité roumaine compétente, l’Oficiul Registrului Naţional al Informaţiilor Secrete de Stat (office du registre national des informations classifiées de l’État, Roumanie, ci‑après l’« ANS roumaine »), d’ouvrir une enquête de sécurité concernant le requérant.

5        Le 8 novembre 2018, la direction de la sécurité de la Commission a informé le chef de l’unité « Sécurité » de l’eu‑LISA que l’ANS roumaine avait délivré un avis négatif sur l’habilitation de sécurité du requérant (ci-après l’« habilitation de sécurité »).

6        Le 30 novembre 2018, au cours d’une réunion informelle à laquelle participaient son chef d’unité et le chef de l’unité « Sécurité » de l’eu‑LISA, le requérant a été informé de l’avis négatif délivré par l’ANS roumaine. Par lettre du chef de l’unité « Sécurité » de l’eu‑LISA du 14 janvier 2019, le requérant a été officiellement informé de cet avis.

7        Par courriels des 24 et 29 janvier 2019, l’eu‑LISA a demandé au requérant de la tenir informée, sans délai, de sa décision de déposer un recours en Roumanie contre l’avis négatif de l’ANS roumaine.

8        Le 8 février 2019, le requérant a déposé un recours contre cet avis devant la même autorité. Il a adressé tous les documents pertinents à l’eu‑LISA. Ce recours a été rejeté par l’ANS roumaine par décision du 15 avril 2019.

9        Le 18 mars 2019, le requérant a également informé l’eu‑LISA qu’un recours était pendant devant la Curtea de Apel București (cour d’appel de Bucarest, Roumanie).

10      Après consultation du chef de l’unité « Sécurité » de l’eu‑LISA et du supérieur hiérarchique du requérant, le chef de l’unité « Services généraux », le chef de l’unité « Ressources humaines » et le responsable des ressources humaines ont conclu, au cours d’une réunion qui s’est tenue le 15 mai 2019, que l’eu‑LISA ne disposait d’aucun autre poste équivalant à celui occupé par le requérant, aux fins d’une éventuelle mutation de celui-ci, dès lors que tous les postes de l’eu‑LISA nécessitaient une habilitation de sécurité.

11      Le 17 juillet 2019, le directeur exécutif de l’eu‑LISA a informé le requérant de son intention de résilier son contrat aux motifs que l’ANS roumaine avait délivré un avis négatif et qu’il était impossible, d’une part, de le muter au sein de l’eu‑LISA et, d’autre part, d’attendre l’issue de la procédure nationale d’appel. Le directeur exécutif a également proposé au requérant d’exercer son droit d’être entendu avant qu’une décision de résiliation du contrat ne soit prise.

12      En conséquence, un entretien avec le directeur exécutif de l’eu‑LISA a eu lieu le 12 septembre 2019 (ci-après l’« entretien du 12 septembre 2019 »). Le 30 septembre 2019, le requérant a reçu le procès-verbal de l’entretien.

13      À la suite de cet entretien, le requérant, par courriel du 12 septembre 2019 adressé à l’unité de sécurité de la Commission, et, en copie, à l’unité « Sécurité » de l’eu‑LISA et à son directeur exécutif, a fait valoir que l’autorité de sécurité de la Commission ne lui avait pas notifié le résultat de l’enquête de sécurité de l’ANS roumaine. Il indiquait que, dès qu’il recevrait ce résultat, il souhaiterait être entendu par l’autorité de sécurité de la Commission conformément à l’article 11, paragraphe 5, sous b), de la décision (UE, Euratom) 2015/444 de la Commission, du 13 mars 2015, concernant les règles de sécurité aux fins de la protection des informations classifiées de l’Union européenne (JO 2015, L 72, p. 53). Dans le même courriel, il a ajouté que des éclaircissements complémentaires pourraient ensuite être demandés à l’ANS roumaine.

14      Le 23 septembre 2019, l’autorité de sécurité de la Commission a indiqué au requérant qu’elle n’était pas l’autorité de sécurité dont il relevait, puisque son contrat n’avait pas été conclu avec elle. Elle a également précisé qu’elle avait reçu de l’ANS roumaine une lettre déclarant que les critères d’incompatibilité pour l’accès du requérant aux informations classifiées étaient prévus par l’article 160, sous b), de la décision du gouvernement no 585/2002 approuvant les standards nationaux sur la protection des informations classifiées en Roumanie.

15      Le 2 octobre 2019, le requérant a communiqué au directeur exécutif de l’eu‑LISA ses commentaires sur le procès-verbal de l’entretien du 12 septembre 2019.

16      Le 29 octobre 2019, le requérant a été informé, d’une part, de la résiliation de son contrat, assortie d’un préavis de trois mois, sur le fondement de l’article 47, sous b), ii), du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne, pour défaut d’obtention de l’habilitation de sécurité, et, d’autre part, du fait que son dernier jour de travail était fixé au 31 janvier 2020.

17      Le 29 janvier 2020, le requérant a déposé une réclamation contre la décision attaquée.

18      L’eu‑LISA a rejeté la réclamation par décision du 26 mai 2020 (ci-après la « décision de rejet de la réclamation »).

 Conclusions des parties

19      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        annuler, dans la mesure nécessaire, la décision de rejet de la réclamation ;

–        condamner l’eu‑LISA aux dépens.

20      L’eu‑LISA conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

 Sur l’objet du litige

21      Par ses premier et deuxième chefs de conclusions, le requérant demande l’annulation, respectivement, de la décision attaquée et de la décision de rejet de la réclamation.

22      Il est de jurisprudence constante que des conclusions dirigées contre le rejet d’une réclamation ont pour effet de saisir le juge de l’acte contre lequel la réclamation a été présentée dans la mesure où elles sont, comme telles, dépourvues de contenu autonome. En effet, la réclamation administrative et son rejet, explicite ou implicite, font partie intégrante d’une procédure complexe et ne constituent qu’une condition préalable à la saisine du juge. Dans ces conditions, le recours, même formellement dirigé uniquement contre le rejet de la réclamation, a pour effet de saisir le juge de l’acte faisant grief contre lequel la réclamation a été présentée, dans la mesure où le rejet de la réclamation n’aurait pas une portée différente de celle de l’acte contre lequel cette réclamation a été formée (arrêt du 17 janvier 1989, Vainker/Parlement, 293/87, EU:C:1989:8, point 8 ; voir également arrêts du 16 mai 2019, Nerantzaki/Commission, T‑813/17, non publié, EU:T:2019:335, point 26 et jurisprudence citée, et du 27 octobre 2021, WM/Commission, T‑411/18, non publié, EU:T:2021:742, point 29). Il peut, notamment, en être ainsi lorsque la décision portant rejet de la réclamation est purement confirmative de la décision objet de la réclamation et que, partant, l’annulation du rejet de la réclamation ne produirait sur la situation juridique de la personne intéressée aucun effet distinct de celui découlant de l’acte faisant grief contre lequel la réclamation a été présentée (arrêts du 21 septembre 2011, Adjemian e.a./Commission, T‑325/09 P, EU:T:2011:506, point 33, et du 16 octobre 2018, OY/Commission, T‑605/16, non publié, EU:T:2018:687, point 37).

23      En outre, compte tenu de ce que la procédure précontentieuse présente un caractère évolutif, une décision explicite de rejet de la réclamation qui ne contient que des précisions complémentaires et se borne ainsi à révéler, de manière détaillée, les motifs de la confirmation de la décision antérieure ne constitue pas un acte faisant grief. Néanmoins, ce même caractère évolutif de la procédure précontentieuse implique que ces précisions complémentaires soient prises en considération pour apprécier la légalité de l’acte attaqué (arrêt du 12 décembre 2018, Colin/Commission, T‑614/16, non publié, EU:T:2018:914, point 29 ; voir également, en ce sens, arrêt du 27 octobre 2021, WM/Commission, T‑411/18, non publié, EU:T:2021:742, point 30).

24      Il a également été jugé qu’une décision explicite de rejet d’une réclamation pouvait, eu égard à son contenu, ne pas avoir un caractère confirmatif de l’acte contesté par le requérant. Tel est le cas lorsque la décision de rejet de la réclamation contient un réexamen de la situation du requérant, en fonction d’éléments de droit et de fait nouveaux, ou lorsqu’elle modifie ou complète la décision initiale. Dans ces hypothèses, le rejet de la réclamation constitue un acte soumis au contrôle du juge, qui le prend en considération dans l’appréciation de la légalité de l’acte contesté, voire le considère comme un acte faisant grief se substituant à ce dernier (voir arrêts du 21 septembre 2011, Adjemian e.a./Commission, T‑325/09 P, EU:T:2011:506, point 32, et du 21 mai 2014, Mocová/Commission, T‑347/12 P, EU:T:2014:268, point 34).

25      En l’espèce, la décision de rejet de la réclamation a confirmé la décision attaquée en ce qui concerne la résiliation du contrat du requérant et, en particulier, l’absence d’irrégularités au cours de la procédure ayant conduit à cette décision. Toutefois, alors que, dans la décision attaquée, qui résilie le contrat de travail du requérant pour défaut d’obtention de l’habilitation de sécurité, l’eu‑LISA a conclu qu’elle n’avait commis aucune irrégularité procédurale, elle a apporté des précisions complémentaires dans la décision de rejet de la réclamation. Dans cette dernière décision, l’eu‑LISA a ajouté que son directeur exécutif remplissait les fonctions d’autorité de sécurité. Elle a indiqué que, compte tenu de sa taille réduite, elle possédait une structure beaucoup plus centralisée que celle des institutions européennes. Dans ces conditions, selon l’eu‑LISA, le directeur exécutif représentait l’autorité de sécurité. De plus, sur le fondement de l’article 7, paragraphe 4, des règles de sécurité adoptées par la décision 2019/273 du conseil d’administration de l’eu‑LISA concernant les règles de sécurité aux fins de la protection des informations classifiées de l’Union européenne au sein de l’eu‑LISA, le directeur exécutif aurait été nommé en qualité d’autorité de sécurité. Dans ce contexte, lors de l’entretien du 12 septembre 2019, l’occasion aurait été donnée au requérant d’être entendu par celui-ci, mais il ne l’aurait pas saisie. L’eu‑LISA a ajouté qu’elle n’avait pas privé le requérant d’informations communiquées à la Commission par l’ANS roumaine et que la reprise de la procédure d’habilitation aurait été dépourvue d’utilité, d’autant qu’il n’était pas certain que l’ANS roumaine aurait modifié sa position, que celle-ci avait d’ailleurs confirmée. Enfin, l’eu‑LISA a indiqué que l’absence d’obtention de l’habilitation de sécurité par le requérant était un motif suffisant, conformément à l’avis de vacance, pour résilier son contrat de travail et que son casier judiciaire vierge ne pouvait influencer l’issue de l’enquête de sécurité. En effet, la possession d’un casier judiciaire vierge ne garantirait pas l’obtention de l’habilitation de sécurité selon les règles nationales de sécurité.

26      Il ne résulte pas de la décision de rejet de la réclamation que celle-ci contient un réexamen de la situation du requérant, tenant compte d’éléments de droit et de fait nouveaux, ou qu’elle modifie ou complète la décision attaquée. Au contraire, tout en se limitant à apporter des précisions complémentaires, la décision de rejet de la réclamation a confirmé la décision attaquée.

27      Compte tenu de la jurisprudence citée aux points 22 et 23 ci-dessus, les précisions apportées dans la décision de rejet de la réclamation ne constituent que des motifs confirmant la décision attaquée et ne sauraient faire de la décision de rejet de la réclamation un acte faisant grief. Le deuxième chef de conclusions dirigé contre la décision de rejet de la réclamation est donc dépourvu de contenu autonome et, par suite, doit être regardé comme formellement dirigé contre la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt du 12 décembre 2018, Colin/Commission, T‑614/16, non publié, EU:T:2018:914, point 30). Néanmoins, conformément à la jurisprudence citée au point 23 ci-dessus, la légalité de cette décision doit être examinée en prenant en considération la motivation figurant dans la décision de rejet de la réclamation.

28      À la lumière de ce qui précède, il n’y a pas lieu de statuer séparément sur le deuxième chef de conclusions, tendant à l’annulation de la décision de rejet de la réclamation.

 Sur le moyen unique, tiré de la violation de l’article 11, paragraphe 5, sous b), de la décision 2015/444 et de l’article 11, paragraphe 5, sous b), des règles de sécurité de l’euLISA

29      Le requérant fait valoir, à titre liminaire, qu’il ne conteste pas, d’une part, que, sur le fondement des conditions de l’avis de vacance, le défaut d’obtention de l’habilitation de sécurité puisse conduire à la résiliation de son contrat de travail et, d’autre part, que l’eu‑LISA était liée par l’évaluation et par la recommandation de l’ANS roumaine relative à cette habilitation.

30      En revanche, le requérant soutient que, en vertu de l’article 11, paragraphe 5, sous b), de la décision 2015/444 et de l’article 11, paragraphe 5, sous b), des règles de sécurité de l’eu‑LISA, il aurait dû être entendu, sur demande de sa part, par le responsable de la sécurité de l’eu‑LISA, qui pouvait à son tour demander à l’ANS roumaine tout éclaircissement complémentaire, ce qui aurait pu conduire à ce que l’habilitation de sécurité soit octroyée. Dans cette hypothèse, aucune raison valable n’aurait justifié de résilier le contrat du requérant.

31      Or, le requérant indique avoir effectivement demandé, les 12 septembre et 2 octobre 2019, à être entendu par le responsable de la sécurité de l’eu‑LISA et que, en dépit de sa demande, ce droit ne lui a pas été accordé, alors qu’une réponse favorable aurait pu influencer la décision relative à la résiliation de son contrat.

32      Le requérant précise que le cadre juridique pertinent est celui fixé par la décision 2015/444, à laquelle il est fait référence dans l’avis de vacance, telle que mise en œuvre par l’eu‑LISA en application de la version provisoire de ses règles de sécurité, qui ont été modifiées postérieurement à l’entretien du 12 septembre 2019 par la décision 2019/273. En dépit du fait que le document produit par le requérant et exposant les règles de sécurité de l’eu-LISA comporterait la mention « version provisoire » et n’aurait jamais été formellement adopté, il reflèterait la pratique constante applicable au sein de l’eu‑LISA avant l’adoption de la décision 2019/273. De plus, avant l’adoption de cette décision, il n’aurait pas existé de règles de sécurité aux fins de la protection des informations classifiées de l’Union européenne spécifiques à l’eu‑LISA, alors que cette dernière aurait été tenue d’adopter ses propres règles de sécurité. Ainsi, la décision attaquée aurait été prise sans base légale, puisque l’eu‑LISA aurait omis d’adopter lesdites règles.

33      Selon le requérant, il existe deux raisons pour lesquelles son entretien avec le directeur exécutif de l’eu‑LISA du 12 septembre 2019 ne peut pas être considéré comme une audition réalisée en application de l’article 11, paragraphe 5, sous b), des règles de sécurité de l’eu‑LISA.

34      D’une part, lors de l’entretien du 12 septembre 2019, le directeur exécutif n’aurait eu ni la compétence ni l’intention d’agir en tant qu’autorité de sécurité de l’eu‑LISA. Le requérant ajoute que, lors dudit entretien, l’eu‑LISA lui a erronément suggéré que l’autorité de sécurité de la Commission était compétente pour assurer le respect de ses droits procéduraux.

35      D’autre part, le requérant souligne que, à l’instar de ce que le directeur exécutif de l’eu‑LISA avait également indiqué en introduction à l’entretien du 12 septembre 2019, celui-ci n’avait pas pour objectif d’influencer le résultat de la procédure d’habilitation, mais simplement de décider des conséquences qui devaient en résulter.

36      Le requérant ajoute que, s’il est exact que le responsable de la sécurité de l’eu‑LISA n’avait pas l’obligation de demander des éclaircissements complémentaires à l’ANS roumaine, une telle décision n’aurait pu être prise que sur le fondement de son audition préalable. Il en déduit qu’il ne saurait être exclu que, à l’issue de celle-ci et en raison de son casier judiciaire vierge, le responsable de la sécurité compétent aurait pu juger nécessaire de demander de tels éclaircissements. L’eu‑LISA ne pourrait substituer sa propre appréciation à celle de l’ANS roumaine et considérer que celle-ci ne modifierait pas sa décision. Qui plus est, conformément à l’article 11, paragraphe 4, de la décision 2015/444 et aux règles de sécurité de l’eu‑LISA applicables, celle-ci aurait eu en réalité l’obligation d’informer l’ANS roumaine des incohérences qui existeraient entre le casier judiciaire vierge du requérant et l’avis négatif délivré par cette dernière et fondé sur une infraction pénale qui ne serait plus censée officiellement avoir existé.

37      En effet, le casier judiciaire vierge du requérant, résultant d’une réhabilitation légale intervenue en octobre 2004, contredirait l’avis négatif de l’ANS roumaine, de sorte que celle-ci aurait pu réexaminer sa décision si l’eu‑LISA avait attiré son attention sur ce sujet en demandant des éclaircissements. De plus, l’ANS roumaine aurait recommandé à l’autorité de sécurité compétente de reprendre la procédure d’habilitation, ce que l’eu‑LISA aurait refusé de faire.

38      L’eu‑LISA conteste cette argumentation.

39      Dans la mesure où le moyen unique est fondé sur la violation de deux règles de droit incompatibles entre elles, il convient, tout d’abord, de déterminer le régime juridique applicable au présent litige pour, ensuite, examiner, à la lumière du régime ainsi déterminé, les prétentions du requérant.

 Sur le régime juridique applicable

40      Le requérant invoque la violation de l’article 11, paragraphe 5, sous b), de la décision 2015/444 et de l’article 11, paragraphe 5, sous b), de la version provisoire des règles de sécurité de l’eu‑LISA.

41      En réponse à une question posée par le Tribunal dans le cadre de mesures d’organisation de la procédure et lors de l’audience, le requérant a précisé les actes susceptibles, selon lui, d’être appliqués au présent litige.

42      Premièrement, après avoir fait mention de la décision 2019/273, le requérant relève que, cette décision ayant été adoptée après la décision attaquée, elle n’est pas applicable.

43      Deuxièmement, le requérant se réfère à la décision 2015/444, qui serait applicable au présent litige mutatis mutandis, à savoir en tenant compte de la version provisoire des règles de sécurité de l’eu‑LISA, produite par le requérant et qui, selon ce dernier, formalise la pratique de l’eu‑LISA à la date des faits, même si elle n’est pas entrée en vigueur.

44      Troisièmement, le requérant mentionne la décision 2016/133 REV 3 du conseil d’administration de l’eu‑LISA concernant les règles de sécurité de cette dernière, précisant qu’il entend ainsi démontrer que le document produit par l’eu-LISA, intitulé « Politique générale de sécurité de l’information de l’Agence », n’était plus en vigueur à la date des faits et que, en conséquence, l’eu-LISA n’avait pas d’autorité de sécurité habilitée par son conseil d’administration à cette date.

45      Selon l’eu‑LISA, jusqu’à l’entrée en vigueur de la décision 2019/273, la décision 2015/444 était applicable mutatis mutandis.

46      À cet égard, en premier lieu, il convient de constater que, ainsi qu’en conviennent les parties, la version provisoire des règles de sécurité de l’eu‑LISA n’a jamais été adoptée. Il en résulte qu’elle n’est pas entrée en vigueur et n’est donc pas applicable au présent litige.

47      En deuxième lieu, il y a lieu de relever que la décision 2019/273, qui n’a pas fait l’objet d’une publication officielle et dont la date d’adoption et d’entrée en vigueur ne résulte pas des pièces du dossier, aurait été adoptée et serait entrée en vigueur, selon l’eu‑LISA, sans que le requérant le conteste, au mois de novembre 2019, soit postérieurement à l’adoption de la décision attaquée, de sorte que la décision 2019/273 n’est pas applicable au présent litige.

48      En troisième lieu, s’agissant de la décision 2016/133 REV 3, d’une part, il convient de constater que, dans son moyen unique, le requérant ne soutient pas que l’une des dispositions de cette décision a été méconnue. D’autre part, le requérant invoque ladite décision aux fins de contester la pertinence, dans le cadre du présent litige, du document produit par l’eu-LISA. Il s’ensuit que la décision 2016/133 REV 3 ne relève pas du régime juridique susceptible de caractériser le droit d’être entendu sur lequel se fonde le moyen unique invoqué par le requérant.

49      En quatrième lieu, en ce qui concerne la décision 2015/444, il convient d’examiner si, ainsi que le soutiennent les parties, cet acte est applicable mutatis mutandis à l’eu‑LISA. En effet, cette décision, qui, selon son article 2, paragraphe 1, définit les principes de base et les normes de sécurité minimales pour la protection des informations classifiées de l’Union européenne, s’applique, selon les termes de son article 2, paragraphe 2, à tous les services de la Commission, sans faire référence à d’autres institutions, organes ou organismes de l’Union.

50      Aux fins de déterminer le caractère applicable à l’eu‑LISA de la décision 2015/444, il convient, au préalable, de rappeler que le règlement (UE) 2018/1726 du Parlement européen et du Conseil, du 14 novembre 2018, relatif à l’eu‑LISA, modifiant le règlement (CE) no 1987/2006 et la décision 2007/533/JAI du Conseil et abrogeant le règlement (UE) no 1077/2011 (JO 2018, L 295, p. 99), a substitué l’eu-LISA à l’ancienne agence créée par le règlement (UE) no 1077/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2011, portant création d’une agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice (JO 2011, L 286, p. 1).

51      L’article 19, paragraphe 1, sous z) et aa), du règlement 2018/1726 prévoit que le conseil d’administration de l’eu‑LISA adopte les mesures de sécurité nécessaires et « les règles de sécurité en matière de protection des informations classifiées et des informations sensibles non classifiées après approbation de la Commission ».

52      Aux termes de l’article 37, paragraphe 1, du même règlement, l’eu-LISA adopte « ses propres règles de sécurité sur la base des principes et règles établis dans les règles de sécurité de la Commission visant à protéger les informations classifiées de l’Union européenne (ICUE) et les informations sensibles non classifiées ».

53      Toutefois, en dépit de l’obligation dans laquelle elle se trouvait, en application des dispositions citées aux points 51 et 52 ci-dessus, d’adopter ses propres règles en matière de protection des informations classifiées, l’eu‑LISA ne conteste pas ne pas avoir exécuté cette obligation avant l’adoption de la décision 2019/273.

54      En raison de ce défaut d’exécution, l’article 55 du règlement 2018/1726, aux termes duquel « les règles internes et les mesures adoptées par le conseil d’administration sur la base du règlement […] no 1077/2011 demeurent en vigueur après le 11 décembre 2018, sans préjudice des modifications éventuelles apportées à celles-ci requises par le présent règlement », a reçu application.

55      Il résulte en effet de cette disposition que les règles internes, qui comprennent les règles de sécurité aux fins de la protection des informations classifiées applicables à l’agence créée par le règlement no 1077/2011, étaient également applicables à l’eu‑LISA dès sa création par le règlement 2018/1726.

56      Dès lors, en l’absence d’exercice par l’eu‑LISA de sa compétence pour adopter des règles de sécurité destinées à la protection des informations classifiées à la date des faits à l’origine du présent litige, il y a lieu de déterminer les règles applicables à l’agence créée par le règlement no 1077/2011 en la matière et qui, en vertu de l’article 55 du règlement 2018/1726, s’appliquaient à l’eu‑LISA entre la date de sa création et celle de l’adoption de ses propres règles de sécurité aux fins de la protection des informations classifiées par la décision 2019/273.

57      À cet égard, s’agissant de l’agence créée par le règlement no 1077/2011, l’article 29 de celui-ci, relatif aux règles de sécurité en matière de protection des informations classifiées et des informations sensibles non classifiées, dispose :

« 1.      L’agence applique les principes de sécurité fixés dans la décision 2001/844/CE, CECA, Euratom de la Commission du 29 novembre 2001 modifiant son règlement intérieur, y compris les dispositions relatives à l’échange, au traitement et à l’archivage des informations classifiées, et les mesures concernant la sécurité physique.

2.      L’agence applique également les principes de sécurité relatifs au traitement des informations sensibles non classifiées adoptés et mis en œuvre par la Commission.

[…] »

58      Il résulte de cette disposition que les principes de sécurité fixés par la décision 2001/844/CE, CECA, Euratom de la Commission, du 29 novembre 2001, modifiant son règlement intérieur (JO 2001, L 317, p. 1) en matière de protection des informations classifiées étaient applicables à l’agence créée par le règlement no 1077/2011 à compter de la date d’entrée en vigueur de ce dernier.

59      Cependant, la décision 2001/844, citée à l’article 29 du règlement no 1077/2011, a été abrogée par l’article 58 de la décision 2015/444, lequel prévoit que cette dernière décision remplace la décision 2001/844. En application de l’article 61 de la décision 2015/444, les dispositions prévoyant l’abrogation de la décision 2001/844 et son remplacement par la décision 2015/444 sont entrées en vigueur le 18 mars 2015.

60      Il en résulte que, en application de l’article 55 du règlement 2018/1726, qui maintient en vigueur après le 11 décembre 2018 les règles internes et les mesures adoptées par le conseil d’administration de l’agence créée par le règlement no 1077/2011 sur la base dudit règlement, l’article 29 du règlement no 1077/2011, qui se référait aux principes de sécurité fixés dans la décision 2001/844, doit être interprété en ce sens que, dès l’abrogation de celle-ci et son remplacement par la décision 2015/444, il visait cette dernière décision.

61      Il s’ensuit que, la décision 2015/444 s’étant substituée à la décision 2001/844 à compter du 18 mars 2015, l’agence créée par le règlement no 1077/2011 était soumise aux principes de sécurité fixés par la décision 2015/444, en ce qui concerne les règles de sécurité en matière de protection des informations classifiées, à compter de la même date.

62      Cette conclusion est confirmée par le considérant 3 de la décision 2016/133 REV 3, dont il résulte que, en application de l’article 29, paragraphes 1 et 2, du règlement no 1077/2011, l’agence créée par ce règlement appliquait les principes de sécurité aux fins de la protection des informations classifiées énoncés dans la décision 2015/444.

63      Par conséquent, eu égard aux considérations exposées au point 55 ci-dessus, l’eu‑LISA devait appliquer, depuis sa création par le règlement 2018/1726 jusqu’à l’adoption de ses propres règles de sécurité en matière de protection des informations classifiées par la décision 2019/273, en application de l’article 55 du règlement 2018/1726, en tant que règles applicables à l’agence créée par le règlement no 1077/2011, les principes de sécurité aux fins de la protection des informations classifiées fixés dans la décision 2015/444.

64      Il résulte de tout ce qui précède que la décision 2015/444, en particulier, son article 11, paragraphe 5, sous b), sur lequel est fondé le moyen unique invoqué par le requérant, était applicable à l’eu‑LISA à la date des faits à l’origine du présent litige, ce que l’eu‑LISA, au demeurant, ne conteste pas.

 Sur la violation de l’article 11, paragraphe 5, sous b), de la décision 2015/444

65      À titre liminaire, il convient de préciser qu’il est constant que le requérant a été entendu, le 12 septembre 2019, préalablement à l’adoption de la décision attaquée, au sujet de la résiliation de son contrat de travail.

66      Le requérant soutient cependant qu’il n’a pas été entendu par l’autorité de sécurité de l’eu‑LISA sur le résultat de l’enquête de sécurité, en violation, notamment, de l’article 11, paragraphe 5, sous b), de la décision 2015/444.

67      De son côté, l’eu‑LISA indique que le requérant n’a pas été entendu sur l’issue de la procédure de vérification étant donné qu’il n’avait pas formulé de demande à cet égard avant l’entretien du 12 septembre 2019. Dans ses réponses aux questions posées par le Tribunal, l’eu‑LISA précise qu’aucune demande d’audition n’a été formulée par le requérant conformément à l’article 11, paragraphe 5, sous b), de la décision 2015/444.

68      Il convient dès lors de déterminer si l’absence de l’audition prévue par l’article 11, paragraphe 5, sous b), de la décision 2015/444 est de nature à entacher la décision attaquée d’illégalité.

69      L’article 11, paragraphe 5, sous b), de la décision 2015/444 dispose :

« 5.      À l’issue de l’enquête de sécurité, et dès que possible après avoir été informée par l’ANS compétente de son évaluation générale des conclusions de l’enquête en question, l’autorité de sécurité de [l’eu‑LISA] :

[…]

b)      lorsque le résultat de l’enquête de sécurité ne permet pas d’obtenir [l’]assurance [qu’il n’existe pas de renseignements défavorables de nature à mettre en doute la loyauté, l’intégrité et la fiabilité de l’intéressé], conformément à la réglementation applicable, informe l’intéressé, qui peut demander à être entendu par l’autorité de sécurité de [l’eu‑LISA] ; celle-ci peut à son tour demander à l’ANS compétente tout éclaircissement complémentaire qu’elle est en mesure de donner conformément à ses dispositions législatives et réglementaires nationales. En cas de confirmation des résultats de l’enquête, il n’est pas accordé d’autorisation aux fins de l’accès à des ICUE. »

70      Il résulte de cette disposition que l’audition par l’autorité de sécurité compétente dont relève la personne intéressée est subordonnée à la présentation par cette dernière d’une demande en ce sens.

71      Le requérant soutient qu’il a demandé à être entendu, sur le fondement de l’article 11, paragraphe 5, sous b), de la décision 2015/444, au cours de l’entretien du 12 septembre 2019 et dans un courriel du même jour adressé à l’autorité de sécurité de la Commission, ainsi que le 2 octobre 2019, dans ses commentaires sur le procès-verbal de l’entretien du 12 septembre 2019.

72      S’agissant de l’entretien du 12 septembre 2019, il ne ressort pas du procès-verbal qui en a été dressé et dont le contenu n’est pas contesté devant le Tribunal que le requérant a demandé à être entendu par l’autorité de sécurité de l’eu‑LISA le jour même de cet entretien. Le requérant s’est borné à déplorer l’existence de défaillances procédurales de la part de la Commission et à demander à l’eu‑LISA, d’une part, de l’informer des mesures prises par l’autorité de sécurité de cette institution et, d’autre part, de confirmer si celle-ci avait respecté la procédure prévue à l’article 11 de la décision 2015/444.

73      Dès lors, il n’apparaît pas que, au cours de l’entretien du 12 septembre 2019, le requérant a demandé à l’eu‑LISA à être entendu conformément à l’article 11, paragraphe 5, sous b), de la décision 2015/444.

74      S’agissant du courriel adressé par le requérant le 12 septembre 2019 à la Commission, il convient de constater que l’eu‑LISA était seulement destinataire en copie de ce courriel. N’étant donc pas son destinataire principal, il ne pouvait être exigé de l’eu‑LISA qu’elle interprète ledit courriel comme une demande qui lui était destinée à ce titre et qu’elle le traite en cette qualité. Par ailleurs, dans le même courriel, le requérant faisait valoir que l’autorité de sécurité de la Commission ne lui avait pas notifié le résultat de l’enquête de sécurité de l’ANS roumaine. Il indiquait que, dès qu’il recevrait ce résultat, il souhaiterait être entendu par l’autorité de sécurité de la Commission conformément à l’article 11, paragraphe 5, sous b), de la décision 2015/444. Dans son courriel du 23 septembre 2019, la Commission a répondu au requérant qu’il dépendait de l’autorité de sécurité de l’eu‑LISA, cette dernière étant son employeur, et non de celle de la Commission.

75      Il s’ensuit qu’il ne peut être considéré que, dans son courriel du 12 septembre 2019, le requérant a demandé à l’eu‑LISA à être entendu au sens de l’article 11, paragraphe 5, sous b), de la décision 2015/444.

76      Le requérant expose cependant que l’eu‑LISA lui a suggéré, lors de l’entretien du 12 septembre 2019, que l’autorité de sécurité de la Commission était compétente pour assurer le respect de ses droits procéduraux.

77      Or, il ressort du procès-verbal de l’entretien du 12 septembre 2019 que, en réponse aux arguments du requérant relatifs aux omissions procédurales de la Commission, l’eu‑LISA a indiqué que, si le requérant considérait que la Commission n’avait pas respecté ses droits procéduraux, il devait s’adresser à celle-ci. L’eu‑LISA a ajouté qu’elle avait respecté toutes les étapes procédurales dans sa relation avec le requérant. L’argument invoqué par le requérant doit donc être écarté comme manquant en fait.

78      S’agissant du courriel du 2 octobre 2019, il convient d’observer que, dans ce courriel, le requérant a déploré une violation de ses droits procéduraux résultant de ce que l’eu‑LISA ne lui aurait pas notifié les motifs de l’avis négatif de l’ANS roumaine, qu’il n’aurait pas été entendu et que l’eu‑LISA n’aurait pas demandé d’éclaircissements complémentaires auprès de l’ANS roumaine.

79      Il ne résulte donc pas du courriel du 2 octobre 2019 que l’un ou l’autre des griefs adressés par le requérant à l’eu‑LISA puisse être assimilé à une demande d’audition fondée sur l’article 11, paragraphe 5, sous b), de la décision 2015/444.

80      En conséquence, il n’est pas démontré que le requérant a présenté à l’eu‑LISA une demande d’être entendu par l’autorité de sécurité au sens de l’article 11, paragraphe 5, sous b), de la décision 2015/444, de sorte que celui-ci ne saurait invoquer une violation du droit d’être entendu fixé par cette disposition.

81      En tout état de cause, à supposer même qu’il puisse être considéré qu’une demande d’être entendu au sens de l’article 11, paragraphe 5, sous b), de la décision 2015/444 a été présentée par le requérant à l’eu‑LISA, mais n’a pas été suivie d’une audition par l’autorité de sécurité de celle-ci, il y a lieu d’examiner s’il est établi que cette irrégularité procédurale aurait pu influer sur le contenu de la décision attaquée, dès lors que, selon la jurisprudence, à défaut d’une telle incidence, une irrégularité procédurale ne saurait être sanctionnée par l’annulation de la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt du 22 mars 2018, HJ/EMA, T‑579/16, non publié, EU:T:2018:168, point 55).

82      À cet égard, le requérant se fonde sur l’existence d’un casier judiciaire vierge le concernant et soutient que, sur ce fondement, l’eu‑LISA aurait pu demander des éclaircissements à l’ANS roumaine et attirer l’attention de celle-ci sur la contradiction qui aurait existé entre ce document et l’avis négatif qu’elle a rendu, fondé sur les infractions commises par le requérant à la fin des années 90.

83      Il suffit de constater qu’il résulte des termes de l’article 11, paragraphe 5, sous b), de la décision 2015/444, selon lesquels l’autorité de sécurité peut demander à l’ANS compétente tout éclaircissement complémentaire, que l’autorité de sécurité de l’eu‑LISA dispose d’une simple faculté de présenter une telle demande et qu’elle n’est donc soumise à aucune obligation à cet égard. Dès lors, si une audition fondée sur cette disposition avait été organisée, l’eu‑LISA n’aurait pas été tenue de demander des éclaircissements complémentaires à l’ANS roumaine.

84      En outre, à supposer que l’eu‑LISA ait demandé des éclaircissements complémentaires à cette autorité nationale, il n’est pas établi que cette démarche aurait pu avoir une quelconque influence sur le contenu de la décision attaquée.

85      En effet, il résulte de la requête introduite par le requérant dans le cadre de son recours administratif formé auprès de l’ANS roumaine contre l’avis négatif de cette institution, produite par le requérant, que celui-ci avait déjà invoqué devant cette autorité l’absence de mention des infractions commises à la fin des années 90 sur son casier judiciaire à la suite d’une réhabilitation légale. Or, ce recours a été rejeté par l’ANS roumaine dans sa décision du 15 avril 2019, produite par l’eu-LISA en annexe à son mémoire en défense.

86      Le requérant n’expose pas les raisons pour lesquelles il estime que l’ANS roumaine aurait modifié le sens de son avis en se fondant sur l’existence de son casier judiciaire vierge, alors qu’elle ne l’avait pas fait à la suite de son recours administratif, dans lequel il avait invoqué ce même élément.

87      S’agissant de l’allégation du requérant selon laquelle l’ANS roumaine aurait recommandé à l’autorité de sécurité de la Commission de reprendre la procédure d’habilitation, ce que l’eu‑LISA aurait refusé de faire lorsqu’elle a ensuite été saisie par le requérant, il y a lieu d’observer que cette allégation n’est pas démontrée.

88      En effet, dans sa lettre du 15 janvier 2020, l’ANS roumaine s’est bornée à informer le requérant qu’elle considérait que l’opportunité de décider de reprendre la procédure d’habilitation au nom de ce dernier appartenait à la Commission. Il en découle qu’aucune recommandation de reprise de la procédure d’habilitation n’a été adressée à l’autorité de sécurité de la Commission par l’ANS roumaine.

89      Il résulte de ce qui précède que le requérant n’a pas démontré que s’il avait été entendu conformément à l’article 11, paragraphe 5, sous b), de la décision 2015/444, cette audition aurait pu influer sur le contenu de la décision attaquée. En effet, il n’est pas établi que ses arguments auraient été de nature à modifier le résultat de l’enquête de sécurité de l’ANS roumaine.

90      Or, le requérant admet, d’une part, que l’eu‑LISA était liée par l’évaluation générale, prévue à l’article 11, paragraphe 5, de la décision 2015/444, de l’ANS roumaine pour décider de l’habilitation de sécurité et, d’autre part, que, sur le fondement des conditions fixées dans l’avis de vacance, citées au point 3 ci-dessus, le défaut d’obtention de l’habilitation de sécurité conférait à l’eu‑LISA le droit de résilier son contrat de travail.

91      À la lumière de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le moyen unique et, partant, le recours.

 Sur les dépens

92      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

93      Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’eu‑LISA.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      MF est condamné aux dépens.

da Silva Passos

Truchot

Sampol Pucurull

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 6 avril 2022.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.