Language of document : ECLI:EU:T:2000:216

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre élargie)

26 septembre 2000 (1)

«Extension d'un droit antidumping - Exemption - Recours en annulation - Recevabilité - Opération d'assemblage - Charge de la preuve - Motivation - Erreur manifeste d'appréciation»

Dans l'affaire T-80/97,

Starway SA, établie à Luynes (France), représentée par Mes J.-F. Bellis et P. De Baere, avocats au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de Me L. Lorang, 3, rue de la Chapelle,

partie requérante,

contre

Conseil de l'Union européenne, représenté par MM. R. Torrent, A. Tanca et S. Marquardt, membres du service juridique, en qualité d'agents, assistés de M. P. Bentley, barrister, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. E. Uhlmann, directeur général de la direction des affaires juridiques de la Banque européenne d'investissement, 100, boulevard Konrad Adenauer,

partie défenderesse,

soutenu par

Commission des Communautés européennes, représentée par M. N. Khan, membre du service juridique, en qualité d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. C. Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande d'annulation de l'article 2 du règlement (CE) n° 71/97 du Conseil, du 10 janvier 1997, portant extension du droit antidumping définitif institué par le règlement (CEE) n° 2474/93 sur les bicyclettes originaires de la république populaire de Chine aux importations de certaines parties de bicyclettes en provenance de la république populaire de Chine et portant prélèvement du droit étendu sur ces importations enregistrées conformément au règlement (CE) n° 703/96 (JO L 16, p. 55, rectificatif au JO L 95, p. 30),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre élargie),

composé de M. K. Lenaerts, président, Mme V. Tiili, MM. J. Azizi, M. Jaeger et P. Mengozzi, juges,

greffier: Mme B. Pastor, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du 12 octobre 1999,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique et factuel

1.
    En vertu de l'article 13, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 384/96 du Conseil, du 22 décembre 1995, relatif à la défense contre les importations qui font l'objet d'un dumping de la part de pays non membres de la Communauté européenne (JO 1996, L 56, p. 1, ci-après le «règlement de base»), les droits antidumping instituésen vertu de ce règlement peuvent être étendus aux importations en provenance de pays tiers de produits similaires ou de parties de ces produits lorsque les mesures en vigueur sont contournées. Conformément au paragraphe 2 du même article, une «opération d'assemblage dans la Communauté ou dans un pays tiers est considérée comme contournant les mesures en vigueur lorsque:

a) l'opération a commencé ou s'est sensiblement intensifiée depuis ou juste avant l'ouverture de l'enquête antidumping et que les pièces concernées proviennent de pays soumis aux mesures;

b) les pièces constituent 60 % ou plus de la valeur totale des pièces du produit assemblé; cependant, il ne sera en aucun cas considéré qu'il y a contournement lorsque la valeur ajoutée aux pièces incorporées au cours de l'opération d'assemblage ou d'achèvement de la fabrication est supérieure à 25 % du coût de fabrication

et

c) les effets correctifs du droit sont compromis en termes de prix et/ou de quantités de produit similaire assemblé et qu'il y a la preuve d'un dumping en liaison avec les valeurs normales précédemment établies pour les produits similaires».

2.
    Le paragraphe 4 dudit article est formulé comme suit:

«Les produits ne doivent pas être soumis à enregistrement conformément à l'article 14, paragraphe 5, ou faire l'objet de mesures lorsqu'ils sont accompagnés d'un certificat des autorités douanières établissant que l'importation des marchandises ne constitue pas un contournement. Ces certificats peuvent être délivrés aux importateurs, sur demande écrite, en vertu d'une autorisation donnée à cet effet par une décision de la Commission après consultation du comité consultatif ou par la décision du Conseil instituant les mesures. Ces certificats restent valides pendant la période et dans les conditions qui y sont mentionnées.»

3.
    Selon l'article 13, paragraphe 5, du règlement de base, «[a]ucune disposition du présent article ne fait obstacle à l'application normale des dispositions en vigueur en matière de droit de douane».

4.
    L'article 14, paragraphe 3, du même règlement prévoit que «[d]es dispositions spéciales, relatives en particulier à la définition commune de la notion d'origine figurant dans le règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil, peuvent être adoptées en vertu du présent règlement».

5.
    Aux termes de l'article 26, paragraphe 1, du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire (JO L 302, p. 1), «[l]a réglementation douanière ou d'autres réglementationscommunautaires spécifiques peuvent prévoir que l'origine des marchandises doit être justifiée par la production d'un document».

6.
    La requérante est une société dont l'objet est la fabrication et la vente de bicyclettes et qui est établie depuis 1985 à Luynes, en France. En 1992, la requérante a été reprise par des sociétés liées au groupe China Bicycles Company (ci-après «CBC»), qui a des unités de production en république populaire de Chine. Deux sociétés de CBC, établies à Hong-kong, Hong-kong (Link) Bicycles Ltd et Regal International Development Co. Ltd, interviennent dans la facturation des parties de bicyclettes achetées par la requérante.

7.
    Le 8 septembre 1993, le Conseil a adopté le règlement (CEE) n° 2474/93 instituant un droit antidumping définitif sur les importations dans la Communauté de bicyclettes originaires de la république populaire de Chine et portant perception définitive du droit antidumping provisoire (JO L 228, p. 1, ci-après le «règlement initial»).

8.
    À la suite d'une plainte de l'European Bicycle Manufacturers Association (association européenne des fabricants de bicyclettes), la Commission a adopté le règlement (CE) n° 703/96, du 18 avril 1996, ouvrant une enquête sur le contournement des mesures antidumping instituées par le règlement initial sur les importations de bicyclettes originaires de république populaire de Chine par des opérations d'assemblage dans la Communauté européenne (JO L 98, p. 3, ci-après le «règlement d'ouverture d'enquête»). Ce règlement est entré en vigueur le 20 avril 1996. L'enquête susvisée a couvert la période du 1er avril 1995 au 31 mars 1996.

9.
    Suivant l'article 1er du règlement d'ouverture d'enquête, cette enquête, ouverte conformément à l'article 13, paragraphe 3, du règlement de base, portait sur les importations des parties de bicyclettes relevant des codes NC 8714 91 10 à 8714 99 90 originaires de la république populaire de Chine et utilisées dans des opérations d'assemblage dans la Communauté européenne.

10.
    À l'article 2 du même règlement, il est mentionné que «les autorités douanières sont invitées à prendre les mesures requises pour enregistrer les importations de cadres, fourches, jantes et moyeux de bicyclettes, relevant dans l'ordre des codes NC 8714 91 10, 8714 91 30, 8714 92 10 et 8714 93 10, afin d'assurer que, en cas d'extension à ces importations des droits antidumping applicables aux importations des bicyclettes originaires de république populaire de Chine, ceux-ci puissent être perçus à compter de la date d'enregistrement». Il y est également indiqué que «les produits accompagnés d'un certificat douanier délivré conformément à l'article 13, paragraphe 4, du [règlement de base] ne sont pas enregistrés».

11.
    L'article 3 du règlement d'ouverture d'enquête prévoit: «Les parties intéressées peuvent se faire connaître, demander à être entendues par la Commission, présenter leur point de vue par écrit ainsi que soumettre des informations, qui pourêtre pris en considération au cours de l'enquête, seront présentés dans les 37 jours à compter de la date de transmission du présent règlement aux autorités de la république populaire de Chine. Le présent règlement est réputé transmis aux autorités de la république populaire de Chine trois jours après celui de sa publication au Journal officiel des Communautés européennes [...]» Ce règlement ayant été publié au Journal officiel le 19 avril 1996, le délai a expiré le 29 mai 1996.

12.
    Au considérant 8 de ce règlement, il est indiqué, sous le titre «Questionnaires», que, «[a]fin d'obtenir les informations qu'elle considère nécessaires à son enquête, la Commission enverra des questionnaires aux assembleurs de bicyclettes de la Communauté européenne» cités dans la plainte et que, le «cas échéant, des informations peuvent être demandées aux producteurs communautaires».

13.
    À la suite de l'ouverture de cette enquête, la Commission a adressé à certaines sociétés concernées, dont la requérante, un questionnaire que cette dernière a complété et renvoyé.

14.
    Par lettre du 8 juillet 1996, la Commission a informé le conseil de la requérante de son intention d'effectuer, dans le cadre de l'enquête précitée, une vérification au siège de la société à Luynes. Cette lettre énumérait une série de documents que la requérante était invitée à mettre à la disposition des agents de la Commission lors de cette vérification. Elle indiquait également que, au cours de celle-ci, il pourrait être posé d'autres questions et demandé d'autres documents.

15.
    La vérification a eu lieu du 10 au 12 juillet 1996.

16.
    Par lettre du 4 septembre 1996, la Commission a demandé à la requérante de clarifier certaines données indispensables à l'enquête.

17.
    Le 30 octobre 1996, la Commission a adressé à la requérante une lettre de divulgation («disclosure document») l'informant de son intention de proposer l'extension du droit antidumping sur les bicyclettes originaires de la république populaire de Chine aux importations de certaines pièces de bicyclettes ayant cette origine. En ce qui concerne la condition prévue à l'article 13, paragraphe 2, sous b), du règlement de base, selon laquelle il y a contournement d'un droit antidumping lorsque les pièces importées constituent 60 % ou plus de la valeur totale des pièces du produit assemblé, cette lettre contenait les passages suivants:

«- Pour Starway et un autre assembleur, qui avait le même fournisseur de pièces en Chine, il a été établi que toutes les pièces importées étaient expédiées de Chine. L'enquête a aussi établi que, dans la faible mesure dans laquelle ces assembleurs utilisaient des pièces non importées de Chine dans l'assemblage des bicyclettes, elles utilisaient des pièces d'origine européenne. Pour certaines des pièces importées, ces assembleurs ont présenté des certificats d'origine chinois (formulaireA) aux douanes de façon à bénéficier du traitement préférentiel pour les marchandises relevant du SPG, tandis que le reste des pièces ont été déclarées comme étant d'origine non chinoise et ont donc été soumises au droit normal pour les pays tiers.

Durant l'enquête sur place, les enquêteurs ont demandé à ces sociétés de fournir les preuves documentaires établissant l'origine chinoise, communautaire et autre des pièces utilisées. Alors que les sociétés ont été en mesure de démontrer l'origine communautaire des pièces achetées dans la Communauté, elles ont été incapables de prouver que toute pièce expédiée de Chine avait une origine autre que chinoise.

En conséquence, les services de la Commission sont arrivés à la conclusion que, en ce qui concerne Starway et un autre assembleur, toutes les pièces importées expédiées de Chine étaient d'origine chinoise et que, dans ces conditions, plus de 60 % de la valeur totale des pièces du produit assemblé étaient chinoises.

Cette conclusion est renforcée par les éléments de preuve qui ont été découverts pour les trois autres sociétés: elles importaient des bicyclettes complètes composées de pièces déclarées comme étant 100 % chinoises. Deux d'entre elles ont même produit lors de l'importation des formulaires A (certifiant l'origine chinoise des marchandises) pour toutes les pièces de bicyclettes destinées à l'assemblage. Tout cela crée une suspicion raisonnable quant à l'origine non chinoise des pièces déclarées par Starway et l'autre assembleur mentionné précédemment.»

18.
    La requérante a répondu par lettre du 7 novembre 1996. Elle a contesté que les fonctionnaires de la Commission aient réclamé, lors de la vérification sur place, des preuves quant à l'origine des parties de bicyclettes importées. Elle a également souligné qu'il ne ressortait pas de la lettre de la Commission du 8 juillet 1996 (voir ci-dessus au point 14) que celle-ci cherchait des preuves quant à l'origine des importations effectuées. Enfin, la requérante a soutenu que, si la thèse défendue dans la lettre de divulgation était exacte, la Commission, en application de l'article 18, paragraphe 4, du règlement de base, aurait dû l'informer du rejet de certains éléments de preuve ou de certains renseignements et motiver ce rejet.

19.
    Lors d'une entrevue avec des fonctionnaires de la Commission le 8 novembre 1996, les représentants de la requérante ont remis à ces derniers des copies de déclarations des fournisseurs.

20.
    Par lettre du 12 novembre 1996, les services de la Commission ont pris position sur les allégations de la requérante concernant la lettre de divulgation. Bien qu'estimant avoir déjà demandé des informations spécifiques concernant l'origine des parties de bicyclettes concernées, ils se sont déclarés prêts à permettre à la requérante de prouver l'origine des parties en question lors d'une nouvelle vérification sur place. Ils ont donc demandé de fournir, pour le 25 novembre 1996, à 17 heures, lors de cette deuxième vérification, d'une part, les certificats d'origine des pièces importées et, d'autre part, des preuves documentaires complètesconcernant leur transport du pays d'origine vers la république populaire de Chine, de manière à permettre d'établir un lien entre les achats de ces pièces et leur expédition vers la Communauté. Par ailleurs, les services de la Commission ont également contesté la valeur probante des déclarations des fournisseurs remises lors de l'entrevue du 8 novembre 1996.

21.
    Par courrier du 13 novembre 1996, la requérante a rejeté les affirmations contenues dans la lettre de la Commission du 12 novembre 1996 selon lesquelles il était impossible de faire le lien entre les déclarations des fournisseurs et les pièces importées. Elle a également affirmé qu'elle s'était déclarée prête à expliquer, lors de la vérification sur place, comment ce lien pouvait être établi à l'aide de la liste des pièces («Bills of materials») de CBC, mais que les fonctionnaires de la Commission avaient expressément refusé de prendre ces documents en considération.

22.
    Par lettre du 15 novembre 1996, la Commission a confirmé les informations fournies en ce qui concerne la deuxième vérification sur place contenues dans sa lettre du 12 novembre 1996.

23.
    Par lettre du 20 novembre 1996, la requérante a interrogé la Commission sur l'objet de cette deuxième vérification et a souligné que certains des documents visés par celle-ci n'étaient disponibles qu'au siège de CBC à Hong-kong.

24.
    Par lettre du 21 novembre 1996, la Commission a précisé que la deuxième vérification avait pour objet d'examiner la documentation demandée par son courrier du 12 novembre 1996. Elle a indiqué que, si cette documentation n'était pas mise à sa disposition au siège de la requérante, celle-ci serait considérée comme faisant obstacle de façon significative à l'enquête, au sens de l'article 18, paragraphe 1, du règlement de base.

25.
    Pour satisfaire à la demande formulée par la Commission dans sa lettre du 12 novembre 1996, la requérante a déposé, le 25 novembre 1996, à 16 heures 45, au siège de l'institution trois caisses de documents d'un volume total d'environ un mètre cube. Par lettre de ce même jour, la requérante a expliqué aux services de la Commission les raisons pour lesquelles elle n'était pas en mesure de présenter des certificats d'origine et a pris position sur la légalité de l'exigence de tels certificats en l'espèce.

26.
    La deuxième vérification, au siège de la requérante, s'est déroulée du 26 novembre 1996 au matin au 27 novembre 1996 à midi.

27.
    Le 2 décembre 1996, la requérante a envoyé à la Commission certains documents requis lors de cette vérification, mais qui n'étaient pas disponibles au siège de l'entreprise à ce moment-là.

28.
    Par lettre du 19 décembre 1996, la Commission a informé la requérante des conclusions qu'elle tirait de la deuxième vérification sur place et de sa décision de maintenir la conclusion déjà exprimée dans la lettre de divulgation du 30 octobre 1996.

29.
    Le 10 janvier 1997, le Conseil a adopté le règlement (CE) n° 71/97 portant extension du droit antidumping définitif institué par le règlement initial sur les bicyclettes originaires de la république populaire de Chine aux importations de certaines parties de bicyclettes en provenance de la république populaire de Chine et portant prélèvement du droit étendu sur ces importations enregistrées conformément au règlement d'ouverture d'enquête (JO L 16, p. 55, rectificatif au JO L 95, p. 30, ci-après le «règlement d'extension»). Ce règlement est entré en vigueur le 19 janvier 1997.

30.
    En application de l'article 2, paragraphes 1 et 3, de ce règlement, le droit antidumping définitif, applicable aux importations de bicyclettes originaires de la république populaire de Chine, est étendu aux importations de certaines parties essentielles de bicyclettes, définies à l'article 1er dudit règlement, originaires de cet État, et perçu sur ces importations enregistrées conformément à l'article 2 du règlement d'ouverture d'enquête et à l'article 14, paragraphe 5, du règlement de base.

31.
    En vertu de l'article 2, paragraphe 2, du règlement d'extension, les «parties essentielles de bicyclettes qui sont expédiées de la république populaire de Chine sont considérées comme originaires de ce pays sauf s'il peut être prouvé par un certificat d'origine délivré conformément aux dispositions en matière d'origine en vigueur dans la Communauté que les parties en question sont originaires d'un autre pays».

32.
    Conformément au paragraphe 4 de ce même article, «[s]auf dispositions contraires, les dispositions en matière de droits de douane sont applicables».

33.
    L'article 3, paragraphe 1, du règlement d'extension prévoit que la Commission adopte, dans un règlement, «les mesures nécessaires pour que les importations de parties essentielles de bicyclettes ne constituant pas un contournement du droit antidumping institué par le [règlement initial] soient exemptées du droit étendu visé à l'article 2».

34.
    Selon l'article 3, paragraphe 2, du règlement d'extension, le règlement de la Commission devra prévoir, notamment, «l'autorisation d'exemption et le contrôle des importations de parties essentielles de bicyclettes utilisées par les sociétés dont les opérations d'assemblage ne constituent pas un contournement» ainsi que «les règles de fonctionnement de ces exemptions conformément aux dispositions douanières pertinentes». De même, en vertu du paragraphe 3 de cet article, le règlement de la Commission devra prévoir également, entre autres dispositions, «l'examen des conditions du non-contournement, notamment en cas de demandesprésentées [...] par des parties dont les opérations d'assemblage se sont avérées avoir fait l'objet de pratiques de contournement pendant l'enquête» ainsi que «les dispositions de procédure nécessaires à un tel examen».

35.
    L'article 3, paragraphe 4, du règlement d'extension prévoit que, «[à] la suite de l'examen visé au paragraphe 3, la Commission peut, si nécessaire, décider [...] d'exempter l'opération concernée de l'extension des mesures prévues à l'article 2».

36.
    L'article 3, paragraphe 5, du règlement d'extension dispose:

«L'autorisation d'exemption accordée en vertu du règlement de la Commission a un effet rétroactif jusqu'à la date d'ouverture de la présente enquête de contournement, à condition que la partie concernée se soit fait connaître pendant cette enquête. Elle a un effet rétroactif jusqu'à la date de la demande d'autorisation dans les autres cas.»

37.
    Au considérant 5 du règlement d'extension, la requérante ainsi qu'un concurrent, la société Moore Large & Co. (ci-après «Moore Large»), sont nommément cités comme des sociétés s'étant fait connaître dans le délai prévu au règlement d'ouverture d'enquête et ayant renvoyé un questionnaire complété à la Commission. Toutefois, ainsi qu'il résulte du considérant 8 du règlement d'extension, ces deux sociétés n'ont pas introduit de demandes de certificats de non-contournement.

38.
    En outre, il est précisé au considérant 10 du règlement d'extension qu'il a été constaté que, pendant la période d'enquête, certains des assembleurs mentionnés au considérant 5 avaient commandé des bicyclettes presque complètes, mais non montées, auprès de producteurs établis en république populaire de Chine. Les fournisseurs de ces assembleurs auraient veillé à ce que les parties de bicyclettes destinées au même assembleur soient éparpillées dans différents conteneurs, envoyées à des dates différentes et parfois déchargées dans des ports différents. Cette pratique aurait permis d'éviter que les importations concernées ne soient passibles du droit antidumping institué par le règlement initial.

39.
    Il ressort du même considérant qu'une société, identifiée au cours de la procédure devant le Tribunal comme étant Moore Large, aurait eu recours à cette pratique pour environ 75 % de son assemblage total de bicyclettes, pendant la période d'enquête. Cependant, cette société aurait changé de mode d'approvisionnement et aurait commencé, en fin de période, à assembler ses bicyclettes en utilisant, pour plus de 40 % de la valeur totale des pièces du produit assemblé, des pièces non originaires de la république populaire de Chine qu'elle achetait soit directement auprès des fabricants situés dans les pays d'origine, soit auprès des filiales de ces fabricants établies dans la Communauté.

40.
    Les considérants 14 et 15 du règlement d'extension précisent qu'il aurait été établi pendant l'enquête que, pour certains assembleurs ayant commandé des ensembles de parties de bicyclettes presque complets, toutes ces parties avaient été expédiées de la république populaire de Chine. Deux de ces assembleurs, identifiés au cours de la procédure devant le Tribunal comme étant la requérante et Moore Large, auraient fait valoir que plus de 40 % des parties de ces ensembles utilisées dans l'assemblage étaient originaires d'autres pays. Toutefois, en dépit d'une prolongation du délai qui leur a été accordé pour présenter des documents authentiques - tels que des certificats d'origine, des factures de producteurs et des titres de transport -, ces deux assembleurs n'auraient pas pu fournir à la Commission des éléments de preuve suffisants afin d'établir que les pièces concernées étaient originaires d'un pays autre que la république populaire de Chine. La Commission aurait donc conclu que, en l'absence de preuve contraire, «toutes les parties qui [avaient] été expédiées de [la république populaire de Chine] étaient d'origine chinoise et que, dans ces circonstances, 60 % ou plus de la valeur totale des parties utilisées dans l'assemblage de bicyclettes au moyen de ces parties étaient d'origine chinoise».

41.
    Enfin, en ce qui concerne le régime d'exemption du droit étendu, il ressort du considérant 32 du règlement d'extension qu'«il a été jugé approprié» de ne pas étendre le droit antidumping aux importations effectuées par Moore Large pour les raisons indiquées ci-dessus au point 39.

42.
    Le 20 janvier 1997, la Commission a adopté le règlement (CE) n° 88/97 relatif à l'autorisation de l'exemption des importations de certaines parties de bicyclettes en provenance de république populaire de Chine en ce qui concerne l'extension par le règlement d'extension du droit antidumping institué par le règlement initial (JO L 17, p. 17, ci-après le «règlement d'exemption»).

43.
    Sur la base du règlement d'extension et notamment de son article 3, le règlement d'exemption prévoit les modalités d'application du régime d'exemption du droit étendu. En outre, l'article 12 du règlement d'exemption exempte certaines sociétés, énumérées à l'annexe II de ce règlement, du droit étendu avec effet rétroactif jusqu'à la date d'ouverture de l'enquête, à savoir le 20 avril 1996. Parmi ces sociétés figure Moore Large mais pas la requérante.

44.
    Le 18 avril 1997, la requérante a introduit une demande d'exemption du droit étendu sur la base du règlement d'exemption.

45.
    Le 28 janvier 1998, la Commission a pris la décision 98/115/CE portant exemption des importations de certaines parties de bicyclettes originaires de la république populaire de Chine de l'extension par le règlement d'extension du droit antidumping institué par le règlement initial (JO L 31, p. 25, ci-après la «décision d'exemption du 28 janvier 1998»). Cette exemption a bénéficié à un certain nombre d'assembleurs, dont la requérante, et a pris effet à l'égard de cette dernière le 18 avril 1997. Selon le considérant 3 de cette décision, «[l]es faits finalement établispar la Commission montrent que les opérations d'assemblage des requérants concernés ne relèvent pas de l'article 13, paragraphe 2, du [règlement de base]», étant donné que les conditions prévues par cette disposition, sous b), n'étaient plus remplies.

Procédure et conclusions des parties

46.
    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 28 mars 1997, la requérante a introduit le présent recours.

47.
    Par ordonnance du 17 septembre 1997, le président de la cinquième chambre élargie a admis la Commission à intervenir au soutien des conclusions du Conseil.

48.
    Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (troisième chambre élargie) a décidé d'ouvrir la procédure orale. Dans le cadre des mesures d'organisation de la procédure, il a posé quelques questions écrites aux parties, auxquelles celles-ci ont répondu dans le délai imparti.

49.
    Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l'audience du 12 octobre 1999.

50.
    Dans sa requête, la requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    annuler l'article 2 du règlement d'extension dans la mesure où il lui est applicable;

-    condamner le Conseil aux dépens.

51.
    À l'audience, la requérante a précisé la portée de son recours en ce sens qu'elle se limite à contester la légalité de l'article 2 du règlement d'extension dans la mesure où il s'applique aux importations effectuées par elle entre le 20 avril 1996, date de l'entrée en vigueur du règlement d'ouverture d'enquête, et le 18 avril 1997, date à laquelle la décision d'exemption du 28 janvier 1998 a, en ce qui la concerne, pris effet.

52.
    Le Conseil conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    rejeter le recours comme irrecevable et non fondé;

-    condamner la requérante aux dépens.

Sur la recevabilité

Arguments des parties

53.
    Sans soulever formellement une exception d'irrecevabilité, le Conseil, soutenu par la Commission, conteste la recevabilité du recours en faisant valoir que la requérante n'est pas individuellement concernée par le règlement d'extension.

54.
    En effet, selon le Conseil et la Commission, le règlement d'extension n'a pour effet que d'élargir le droit antidumping initial aux importations de pièces de bicyclettes effectuées par tous les opérateurs, à l'exception de ceux qui ont fait l'objet d'une exemption. Il ne déterminerait pas les marges ou les degrés de contournement différents et individuels pour chacune des entreprises ayant participé à l'enquête. Ainsi, ce règlement constituerait un acte de portée générale affectant tous les importateurs actuels et potentiels des produits concernés qui n'ont pas été exemptés à la suite d'une demande de délivrance d'un certificat de non-contournement.

55.
    En outre, la requérante ne serait individualisée par cet acte ni en raison de sa participation à l'enquête, ni en raison du fait qu'elle est expressément mentionnée dans le règlement d'extension en tant que société ayant participé à celle-ci. En effet, le règlement d'extension aurait été adopté sur la base de considérations générales et non pas en raison de la situation spécifique de la requérante ou d'autres opérateurs de sorte que les considérants du règlement analysant la situation particulière de la requérante pourraient être supprimés sans qu'il soit pour autant nécessaire de modifier le dispositif. La requérante n'aurait pas non plus avancé des arguments permettant de conclure qu'elle se trouvait dans une situation comparable à celle de la requérante dans l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt de la Cour du 16 mai 1991, Extramet Industrie/Conseil (C-358/89, Rec. p. I-2501).

56.
    Au surplus, selon le Conseil et la Commission, le règlement d'extension ne détermine pas définitivement le cas de la requérante. En effet, outre l'extension du droit antidumping, le règlement d'extension prévoirait également la possibilité d'obtenir une exemption avec effet rétroactif au 20 avril 1996, date de l'entrée en vigueur du règlement d'ouverture d'enquête, à condition toutefois pour le demandeur de se faire connaître pendant l'enquête et de prouver que ses opérations d'assemblage ne constituaient pas, à partir de cette date, un contournement des droits antidumping. Or, en vertu de l'article 3 du règlement d'extension, ce pouvoir d'exemption aurait été délégué à la Commission qui, pour administrer ces demandes, aurait adopté le règlement d'exemption. C'est par ce dernier règlement, et non pas, comme le soutient la requérante, en vertu du règlement d'extension, que Moore Large aurait pu être exemptée par la Commission avec effet rétroactif au 20 avril 1996.

57.
    Dès lors, la requérante ne serait individuellement concernée que par le règlement d'exemption ou bien par toute décision que la Commission prendrait, à son égard, à la suite d'une demande de certificat de non-contournement introduite en vertu de l'article 13, paragraphe 4, du règlement de base ou d'une demande d'exemption du droit étendu présentée en vertu de l'article 3 du règlement d'exemption. En effet, seuls ces actes détermineraient définitivement si la requérante est soumise audroit étendu institué par le règlement d'extension ou si, comme Moore Large, elle se trouve exemptée de ce droit. La requérante n'ayant introduit une demande d'exemption du droit étendu que le 18 avril 1997, soit près de trois mois après l'adoption du règlement d'extension, celui-ci ne saurait en aucun cas être considéré comme une décision quant à cette demande.

58.
    La requérante conteste cette argumentation. Elle relève qu'elle a participé à l'enquête et que sa situation individuelle est expressément visée par le règlement d'extension. Elle fait observer, par ailleurs, que le règlement d'extension contient une décision modifiant sa situation et que cette décision a un caractère définitif, puisque le règlement d'exemption ne permet pas à la Commission d'adopter des décisions d'exemption avec effet rétroactif à compter d'une date antérieure à celle de l'introduction de la demande. Or, en pratique, elle n'aurait pas pu déposer une telle demande avant l'adoption du règlement d'exemption. En outre, le Conseil n'aurait pas considéré le dépôt d'une demande de certificat de non-contournement comme un préalable à une décision d'exemption pour les entreprises n'effectuant pas de contournement puisqu'il a exempté Moore Large du droit étendu alors que cette société n'avait pas demandé un tel certificat. De ce fait, le règlement d'extension, entré en vigueur trois jours avant l'adoption du règlement d'exemption, produirait des effets définitifs à son égard et la concernerait directement et individuellement.

Appréciation du Tribunal

59.
    Il y a lieu de constater que, aux termes de l'article 14, paragraphe 1, du règlement de base, «les droits antidumping, provisoires ou définitifs, sont imposés par voie de règlement». Il en va de même lorsque des droits antidumping, institués en vertu de cette disposition, sont étendus, conformément à l'article 13, paragraphes 1 et 3, du règlement de base, aux importations en provenance de pays tiers de produits similaires ou de parties de ces produits. S'il est vrai que, au regard des critères de l'article 173, quatrième alinéa, du traité CE (devenu, après modification, article 230, quatrième alinéa, CE), ces règlements ont effectivement, en raison de leur nature et de leur portée, un caractère général, en ce qu'ils s'appliquent à la généralité des opérateurs économiques intéressés, il n'est pas exclu pour autant que leurs dispositions puissent concerner directement et individuellement certains opérateurs économiques (arrêt de la Cour du 21 février 1984, Allied Corporation e.a./Commission, 239/82 et 275/82, Rec. p. 1005, point 11; arrêt du Tribunal du 25 septembre 1997, Shanghai Bicycle/Conseil, T-170/94, Rec. p. II-1383, point 35).

60.
    Bien que le Conseil, soutenu par la Commission, ne soulève expressément une contestation qu'en ce qui concerne la question de savoir si la requérante est individuellement concernée par le règlement d'extension, il avance également des arguments tendant à démontrer qu'elle n'est pas non plus directement concernée par ledit règlement dans la mesure où la situation juridique de celle-ci ne serait pas directement affectée par ce dernier.

Quant à la condition d'être directement concerné

61.
    Il est de jurisprudence constante que l'affectation directe requiert que la mesure communautaire incriminée produise directement des effets sur la situation juridique du particulier et qu'elle ne laisse aucun pouvoir d'appréciation aux destinataires chargés de sa mise en oeuvre, celle-ci ayant un caractère purement automatique et découlant de la seule réglementation communautaire sans application d'autres règles intermédiaires (voir, par exemple, arrêt de la Cour du 5 mai 1998, Glencore Grain/Commission, C-404/96 P, Rec. p. I-2435, point 41).

62.
    En l'espèce, il résulte de l'article 2, paragraphe 1, du règlement d'extension, que le droit antidumping institué par le règlement initial est étendu aux importations de parties de bicyclettes originaires de la république populaire de Chine, énumérées à l'article 1er du règlement d'extension. En vertu de l'article 13, paragraphe 3, du règlement de base et de l'article 2, paragraphe 3, du règlement d'extension, le droit étendu est perçu par les autorités douanières des États membres sur l'importation de ces produits à partir de l'entrée en vigueur du règlement d'ouverture d'enquête le 20 avril 1996, sans que ces autorités bénéficient d'une quelconque marge d'appréciation à cet égard.

63.
    En l'espèce, il est constant que les importations de parties de bicyclettes visées par le règlement d'extension qui ont été effectuées par la requérante entre le 20 avril 1996, date de l'entrée en vigueur du règlement d'ouverture d'enquête, et le 18 avril 1997, date à laquelle la décision d'exemption du 28 janvier 1998 a pris effet, ont été grevées du droit étendu.

64.
    De plus, en ce qui concerne les importations effectuées par la requérante après le 18 avril 1997, il résulte des réponses données par le Conseil aux questions écrites du Tribunal que la requérante n'a obtenu une autorisation d'exemption de la Commission qu'à la suite d'une modification de son mode d'approvisionnement en pièces de bicyclettes. En effet, au lieu d'importer les produits concernés par l'intermédiaire d'une société liée à CBC, établie à Hong-kong, et de les faire transiter par le territoire de la république populaire de Chine comme elle le faisait jusqu'alors, la requérante a, à la suite de l'entrée en vigueur du règlement d'extension, commandé, importé et payé les pièces de bicyclettes directement auprès de ses fournisseurs, lesquels étaient établis dans d'autres pays asiatiques. La requérante n'a, dès lors, été exemptée du droit étendu qu'après avoir modifié de façon caractérisée son mode d'approvisionnement.

65.
    Il s'ensuit que le règlement d'extension a affecté directement la situation juridique de la requérante.

66.
    Contrairement à ce que soutiennent le Conseil et la Commission, cette conclusion n'est pas infirmée par le fait que, sur la base de l'article 13, paragraphe 4, du règlement de base, le règlement d'extension prévoit que les importations neconstituant pas un contournement du droit initial peuvent être exemptées du droit étendu par un acte de la Commission.

67.
    Il résulte, certes, de l'article 3, paragraphe 5, du règlement d'extension que la requérante, qui s'est fait connaître pendant l'enquête de la Commission, pouvait, en principe, être exemptée du droit étendu sans avoir, au préalable, introduit une demande de délivrance d'un certificat de non-contournement auprès des autorités douanières nationales. Il ressort également de cette disposition que la Commission pouvait, en principe, octroyer une telle exemption avec effet rétroactif à la date de l'entrée en vigueur du règlement d'ouverture d'enquête, de sorte que même les importations effectuées par la requérante avant l'entrée en vigueur de la décision d'exemption de la Commission n'auraient pas été grevées par le droit étendu.

68.
    Toutefois, ainsi qu'il ressort déjà du considérant 15 du règlement d'extension (voir ci-dessus au point 40), dont le contenu doit être pris en compte pour déterminer le sens exact de ce qui a été arrêté dans le dispositif de ce règlement (voir, par exemple, arrêt du Tribunal du 22 octobre 1997, SCK et FNK/Commission, T-213/95 et T-18/96, Rec. p. II-1739, point 104), le Conseil a entériné l'avis des services de la Commission quant à l'impossibilité d'octroyer une exemption à la requérante. En effet, les services de la Commission avaient, à la suite de l'enquête menée par eux, estimé que la requérante n'était pas parvenue à démontrer que ses importations ne constituaient pas un contournement du droit initial, étant donné que les éléments qu'elle avait présentés afin de prouver l'origine des produits en cause n'étaient pas suffisants. Dans le cas présent, la possibilité pour la Commission d'octroyer à la requérante une telle exemption était donc purement théorique dans la mesure où sa volonté de ne pas le faire ne faisait, au vu du règlement d'extension, aucun doute (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 17 janvier 1985, Piraiki-Patraiki e.a./Commission, 11/82, Rec. p. 207, points 6 à 9, et Glencore Grain/Commission, cité au point 61 ci-dessus, point 42).

69.
    Il ressort de ce qui précède que les arguments du Conseil et de la Commission, tirés de ce que le règlement d'extension ne concernerait pas directement la requérante dans la mesure où, eu égard à la possibilité d'une exemption du droit étendu, il ne produirait pas, à lui seul, des effets sur la situation juridique de celle-ci, doivent être rejetés.

Quant à la condition d'être individuellement concerné

70.
    La requérante est également individuellement concernée par le règlement d'extension. Premièrement, les parties de bicyclettes qu'elle importe sont frappées du droit étendu institué par le règlement d'extension qui produit les mêmes effets juridiques à l'égard des entreprises soumises à ce droit qu'un règlement instituant un droit antidumping définitif à l'égard des entreprises soumises à un tel droit définitif. Deuxièmement, elle a participé à la procédure administrative, conformément à l'article 3 du règlement d'ouverture d'enquête, et autant qu'il luiétait possible (réponse au questionnaire de la Commission, vérifications sur place, remise de documents, échange intensif de correspondances, notamment sur la lettre de divulgation, ainsi que des entrevues avec des fonctionnaires de la Commission). Sa participation est d'ailleurs expressément visée par le règlement d'extension, notamment aux considérants 10 à 24 qui comportent un résumé des résultats de l'enquête menée par la Commission, de telle sorte que ce règlement «identifie» ainsi la requérante (arrêt Shanghai Bicycle/Conseil, cité au point 59 ci-dessus, point 39).

71.
    Il résulte de ce qui précède que le présent recours est recevable.

Sur le fond

72.
    La requérante invoque deux moyens à l'appui de son recours, tirés de la violation, d'une part, de l'article 13, paragraphe 2, du règlement de base et, d'autre part, de l'obligation de motivation. Il convient d'examiner d'abord le premier moyen.

Présentation générale du moyen

73.
    Selon la requérante, le Conseil a violé l'article 13, paragraphe 2, du règlement de base dans la mesure où, en vertu de l'article 2, paragraphe 1, du règlement d'extension, il a étendu le droit antidumping, institué par le règlement initial sur les importations de bicyclettes originaires de la république populaire de Chine, aux importations de parties essentielles de bicyclettes en provenance de ce pays, effectuées par la requérante, alors que les conditions prévues par ladite disposition du règlement de base n'étaient pas réunies. En effet, selon la requérante, c'est à tort que le Conseil a considéré, ainsi qu'il ressort de l'article 2, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement d'extension (ci-après la «disposition litigieuse»), qu'elle n'avait pas apporté la preuve de ce que les parties de bicyclettes, importées durant la période d'enquête en provenance de la république populaire de Chine, étaient originaires d'un autre pays.

Quant à l'interprétation de l'article 13, paragraphe 2, du règlement de base en ce qui concerne l'objet et la charge de la preuve

Arguments des parties

74.
    La requérante soutient, dans sa requête, que la condition, énoncée à l'article 13, paragraphe 2, sous a) et b), du règlement de base, pour qu'une opération d'assemblage soit considérée comme un contournement des mesures en vigueur est uniquement satisfaite lorsque les pièces constituant 60 % ou plus de la valeur totale des pièces du produit assemblé sont originaires du pays concerné. Dans la réplique, elle explique, en revanche, que cette condition n'est pas satisfaite lorsqu'il est établi que ces pièces sont originaires d'un autre pays. Or, elle fait valoir que les institutions communautaires n'ont, à aucun moment, apporté la preuve que la valeur des pièces originaires de la république populaire de Chine utilisées par elledans ses opérations d'assemblage représentait 60 % ou plus de la valeur totale des pièces du produit assemblé.

75.
    Le Conseil, soutenu par la Commission, fait remarquer qu'il ressort du libellé de l'article 13, paragraphe 2, du règlement de base qu'une opération d'assemblage est considérée comme contournant les mesures en vigueur lorsque les pièces constituant 60 % ou plus de la valeur totale des pièces du produit assemblé proviennent du pays soumis aux mesures. Dès lors, les institutions communautaires ne seraient pas, en principe, dans l'obligation d'examiner et encore moins de prouver que les pièces qui proviennent du pays soumis aux mesures sont également originaires de ce pays.

76.
    Selon le Conseil, la requérante ne peut valablement contester la légalité de la disposition litigieuse dans la mesure où il est constant que ses importations de parties de bicyclettes constituant 60 % ou plus de la valeur totale des pièces du produit assemblé provenaient de la république populaire de Chine.

77.
    Toutefois, le Conseil et la Commission reconnaissent, à cet égard, qu'il convient d'interpréter l'article 13, paragraphe 2, du règlement de base en ce sens qu'il est permis aux institutions communautaires de considérer qu'une opération d'assemblage ne constitue pas un contournement lorsqu'il est prouvé que les pièces concernées ont simplement transité par le pays soumis aux mesures sans y subir la moindre transformation. En effet, une telle interprétation serait conforme au principe qui découle de l'article 1er, paragraphe 3, du règlement de base, suivant lequel les importations provenant d'un pays soumis à des mesures antidumping ne peuvent faire l'objet de ces mesures lorsque les produits concernés ne font que transiter par ce pays. Le Conseil et la Commission relèvent toutefois que, en l'espèce, les parties de bicyclettes concernées n'auraient pas simplement transité par la république populaire de Chine, mais y auraient été triées et réassorties pour être ensuite expédiées vers la France.

Appréciation du Tribunal

78.
    Conformément à l'article 13, paragraphe 1, du règlement de base, les droits antidumping institués en vertu de ce règlement peuvent être étendus aux importations en provenance de pays tiers de produits similaires ou de parties de ces produits lorsque les mesures en vigueur sont contournées. Selon le paragraphe 2 de cette même disposition, une opération d'assemblage, telle que celle effectuée par la requérante en l'espèce, est considérée comme contournant les mesures en vigueur lorsque les conditions énumérées sous a) à c) sont satisfaites (voir ci-dessus au point 1).

79.
    Plus particulièrement, il résulte de l'article 13, paragraphe 2, sous a) et b), du règlement de base qu'une opération d'assemblage est réputée constituer uncontournement lorsque des pièces d'une valeur de 60 % ou plus de la valeur totale des pièces du produit assemblé «proviennent du pays soumis aux mesures».

80.
    L'examen des différentes versions linguistiques de cette disposition montre que les versions allemande et italienne prévoient qu'une opération d'assemblage est considérée comme contournant les mesures en vigueur lorsque les pièces concernées sont originaires du pays soumis aux mesures («die verwendeten Teile ihren Ursprung in dem Land haben, für das Maßnahmen gelten»; «pezzi utilizzati sono originari del paese soggetto alla misura»). En revanche, selon les versions espagnole («procedan del pais»), danoise («fra del land»), grecque («ðñïÝñ÷ïíôáé áðü ôç ÷þñá»), anglaise («are from the country»), française («proviennent du pays»), néerlandaise («afkomstig ... uit het land»), portugaise («provenientes do países»), finnoise («tulevat maasta») et suédoise («från det land»), il suffit que lesdites pièces proviennent de ce pays.

81.
    Il résulte de la jurisprudence de la Cour que la nécessité d'une interprétation uniforme des règlements communautaires exclut de considérer un texte déterminé isolément, mais exige, en cas de doute, qu'il soit interprété et appliqué à la lumière des versions établies dans les autres langues. Par ailleurs, en cas de divergence entre ces versions, la disposition en cause doit être interprétée en fonction de l'économie générale et de la finalité de la réglementation dont elle constitue un élément (arrêt de la Cour du 27 mars 1990, Cricket St Thomas, C-372/88, Rec. p. I-1345, point 19).

82.
    À cet égard, il convient de relever qu'il n'y a aucune divergence linguistique en ce qui concerne l'article 13, paragraphe 1, du règlement de base qui permet l'extension de mesures en vigueur aux importations «en provenance» de pays tiers de produits similaires ou de parties de ces produits. Or, l'article 13, paragraphe 2, du règlement de base constitue une disposition spécifique par rapport au paragraphe 1 de cet article. Aucune disposition dans le règlement de base ne permet de présumer que le législateur communautaire aurait voulu restreindre, en ce qui concerne les opérations d'assemblage, l'application de l'article 13 aux pièces originaires du pays soumis aux mesures alors qu'il a clairement prévu un champ d'application plus large pour les autres modes de contournement possibles. Au contraire, il ressort du considérant 20 du règlement de base que, par l'introduction de l'article 13, le législateur a entendu «contrecarrer des pratiques, notamment le simple assemblage dans la Communauté ou dans un pays tiers, dont l'objectif essentiel est de permettre le contournement des mesures antidumping».

83.
    Par ailleurs, il convient de constater que l'article 13, paragraphe 2, du règlement de base, interprété d'une manière uniforme, diffère de la disposition correspondante de la réglementation applicable en matière antidumping avant son entrée en vigueur, à savoir le règlement (CEE) n° 2423/88 du Conseil, du 11 juillet 1988, relatif à la défense contre les importations qui font l'objet d'un dumping ou de subventions de la part de pays non membres de la Communauté économique européenne (JO L 209, p. 1). Sans divergence entre les différentes versionslinguistiques, ce règlement disposait, en substance, à l'article 13, paragraphe 10, sous a), troisième tiret, que l'extension d'un droit antidumping en vigueur était subordonnée à la condition que la valeur des pièces utilisées dans les opérations d'assemblage «originaires du pays d'exportation du produit soumis au droit antidumping» dépasse d'au moins 50 % la valeur totale de toutes les autres pièces utilisées. Il y a lieu de supposer que le législateur, en choisissant des mots différents de ceux employés dans son propre règlement antérieur, s'est délibérément écarté de ce libellé dans le but de modifier la portée de la règle.

84.
    Il s'ensuit que, en application de l'article 13, paragraphe 2, du règlement de base, les institutions communautaires doivent démontrer - outre la réalisation des autres conditions y énumérées - que les pièces constituant 60 % ou plus de la valeur totale des pièces du produit assemblé proviennent du pays soumis aux mesures. Elles ne sont, en revanche, pas tenues d'apporter la preuve que ces pièces sont également originaires de ce pays.

85.
    Cela étant, il résulte du règlement de base, et notamment de son article 13 et du considérant 20, qu'un règlement portant extension d'un droit antidumping a pour objet d'assurer l'efficacité de cette mesure et d'éviter qu'elle soit contournée, notamment, par des opérations d'assemblage dans la Communauté ou dans un pays tiers. Ainsi, une mesure portant extension d'un droit antidumping n'a qu'un caractère accessoire par rapport à l'acte initial instituant ce droit. Il serait, par conséquent, contraire à la finalité et à l'économie générale de l'article 13, précité, de frapper d'un droit antidumping, institué initialement sur l'importation d'un produit originaire d'un certain pays, des importations de pièces de ce produit en provenance du pays soumis aux mesures lorsque les opérateurs concernés qui effectuent les opérations d'assemblage faisant l'objet de l'enquête de la Commission apportent la preuve que ces pièces constituant 60 % ou plus de la valeur totale des parties du produit assemblé sont originaires d'un autre pays. En effet, dans une telle situation, les opérations d'assemblage ne peuvent pas être considérées comme contournant le droit antidumping initialement institué, au sens de l'article 13 du règlement de base.

86.
    Cette conclusion est corroborée par le fait que le législateur communautaire a prévu, à l'article 13, paragraphe 4, du règlement de base, la possibilité d'exempter des importations du droit étendu lorsque la preuve est apportée qu'elles ne constituent pas un contournement.

87.
    En revanche, contrairement à ce que soutiennent le Conseil et la Commission, rien ne permet de conclure que, en tout état de cause, cette preuve n'est possible que lorsque les pièces importées ont simplement transité par le pays soumis aux mesures. L'argument présenté par le Conseil et la Commission quant à l'interprétation de l'article 13, paragraphe 2, du règlement de base par analogie avec l'article 1er, paragraphe 3, du même règlement ne saurait être suivi. En effet, d'une part, cette dernière disposition porte définition de la notion de «paysexportateur», notion à laquelle l'article 13, paragraphe 2, ne se réfère même pas implicitement. D'autre part, même si, en général, dans le cas d'un simple transit par le pays soumis aux mesures, les pièces concernées sont originaires d'un autre pays, rien ne permet d'exclure en principe que la preuve d'une telle origine puisse être apportée dans un autre cas de figure.

88.
    Par conséquent, il convient d'interpréter l'article 13, paragraphe 2, du règlement de base en ce sens qu'une opération d'assemblage dans la Communauté ou dans un pays tiers est considérée comme contournant les mesures en vigueur lorsque, outre la réalisation des autres conditions mentionnées à cette disposition, les pièces constituant 60 % ou plus de la valeur totale des pièces du produit assemblé proviennent du pays soumis aux mesures, sauf si l'opérateur concerné apporte la preuve aux institutions communautaires que ces pièces sont originaires d'un autre pays.

Quant à l'examen des éléments de preuve effectué par les institutions communautaires

Arguments des parties

89.
    La requérante soutient que c'est à tort que les institutions communautaires ont considéré qu'elle n'a pas apporté la preuve de ce qu'elle utilisait, dans ses opérations d'assemblage, des parties de bicyclettes originaires de la république populaire de Chine à concurrence de moins de 60 % de la valeur totale des parties de bicyclettes assemblées.

90.
    D'une part, la requérante reproche aux institutions communautaires d'avoir exigé la production de certificats d'origine pour les importations effectuées durant la période d'enquête dont le terme est antérieur non seulement à l'adoption du règlement d'extension, mais aussi à celle du règlement d'ouverture d'enquête.

91.
    D'autre part, la requérante estime que, contrairement à ce qui ressort du considérant 15 du règlement d'extension, elle a apporté, par la production d'autres documents, la preuve de ce que les parties de bicyclettes concernées n'étaient pas originaires de la république populaire de Chine.

92.
    Premièrement, la requérante se réfère à ses déclarations en douane qui n'ont pas été contestées par les autorités douanières et sur lesquelles elle s'était basée pour répondre au questionnaire de la Commission. Ces déclarations démontreraient que moins de 60 %, à savoir 46,9 %, de la valeur totale des pièces du produit assemblé étaient originaires de la république populaire de Chine.

93.
    Elle réfute toute allégation du Conseil et de la Commission mettant en doute la valeur probante de ses déclarations en l'espèce. En effet, rien ne permet, selon elle, de présumer qu'elle a fait une fausse déclaration lorsqu'elle a déclaré que des pièces n'étaient pas d'origine chinoise. Tout d'abord, elle souligne que ces déclarations en douane ont été faites in tempore non suspecto, à savoir bien avantl'ouverture de l'enquête. Contrairement à ce que soutiennent les institutions communautaires, rien ne permettait, selon la requérante, de prévoir l'ouverture ultérieure d'une procédure sur le contournement des mesures antidumping. Ainsi elle n'aurait eu aucun intérêt financier à faire des fausses déclarations en douane. Ensuite, elle fait valoir que la thèse des institutions communautaires n'explique pas pourquoi elle aurait déclaré comme étant d'origine non chinoise un pourcentage de pièces de 53,1 % de la valeur totale des pièces du produit assemblé, largement supérieur au minimum requis, selon l'article 13, paragraphe 2, sous b), du règlement de base, pour échapper à toute mesure contre les pratiques de contournement, à savoir 40,1 %. Par ailleurs, il n'est, selon la requérante, en aucun cas plausible qu'elle ait volontairement fait de fausses déclarations en douane dans le seul but d'induire les institutions communautaires en erreur. En effet, ces déclarations auraient entraîné la perte de son statut d'importatrice préférentielle, car, à la différence de la république populaire de Chine, les pays indiqués dans les déclarations sur l'origine des pièces n'étaient pas soumis à un régime tarifaire préférentiel. La requérante aurait donc perdu des avantages financiers substantiels et immédiats. Enfin, la requérante fait valoir que la Commission n'a jamais invoqué, au cours de l'enquête, le moindre élément concret permettant de mettre en doute l'exactitude de l'origine déclarée à l'importation.

94.
    Deuxièmement, la requérante met en avant les déclarations de ses fournisseurs dans d'autres pays asiatiques que la république populaire de Chine confirmant ses propres déclarations en douane. La requérante ne conteste pas que les déclarations de ses fournisseurs ont été établies spécialement pour les besoins de l'enquête. Toutefois, bien qu'il soit raisonnable, selon la requérante, d'assimiler les déclarations faites par ses producteurs ou ses fournisseurs à ses propres déclarations en raison des liens que ces derniers ont avec elle, il n'y a pas de raison de rejeter catégoriquement ces déclarations comme non probantes.

95.
    Troisièmement, la requérante considère qu'il est possible de vérifier l'exactitude de ses déclarations en douane à l'aide de la documentation qu'elle a remise à la Commission le 25 novembre 1996, sur la demande expresse de celle-ci. Cette documentation serait constituée des listes des pièces («Bills of materials») détaillant les pièces commandées auprès des fournisseurs de CBC pour chaque modèle assemblé par la requérante, des factures des fournisseurs desdites pièces adressées à CBC et des listes de colisage («packing lists») et connaissements. Ainsi qu'elle l'aurait démontré aux services de la Commission à l'occasion de la deuxième vérification sur place, ces documents permettent, selon la requérante, d'établir un lien incontestable entre l'expédition des parties de bicyclettes concernées de leur pays d'origine à CBC et leur réexpédition par CBC en France. Le fait, relevé par la Commission à l'occasion de l'enquête, que les fournisseurs de CBC aient numéroté les factures différemment de CBC ne serait aucunement insolite, car chaque entreprise utiliserait son propre système de numérotation. L'autre irrégularité constatée par la Commission, à savoir que, dans certains cas, le pays d'origine déclaré par un fournisseur de CBC n'était pas celui qui figurait sur lesfactures de CBC, serait dû au transfert du site de production de ce fournisseur dans un pays autre que celui mentionné sur ses factures. Par ailleurs, cette irrégularité n'aurait eu aucune incidence sur le calcul de la valeur des pièces d'origine non chinoise.

96.
    Le Conseil, soutenu par la Commission, fait valoir que la requérante n'a pas apporté la preuve de ce que les parties de bicyclettes concernées n'étaient pas originaires de la république populaire de Chine.

97.
    Selon le Conseil et la Commission, contrairement à ce que soutient la requérante, les services de la Commission étaient, dans le cas présent, en droit d'exiger la production de certificats d'origine. En effet, à la suite des questions écrites du Tribunal, le Conseil et la Commission ont affirmé à l'audience que, dans la mesure où les services de la Commission ont constaté au cours de l'enquête que les parties de bicyclettes concernées n'avaient pas simplement transité par la république populaire de Chine mais y avaient été triées et réassorties pour être ensuite réexpédiées vers la France, le certificat d'origine était le seul élément de preuve fiable.

98.
    Le Conseil et la Commission ne contestent les affirmations de la requérante ni quant à l'absence d'une disposition spécifique imposant la production d'un certificat d'origine ni quant à l'impossibilité de se procurer de tels certificats rétroactivement. Toutefois, ils estiment qu'un opérateur avisé se trouvant dans la situation de la requérante aurait dû savoir, dès l'institution du droit antidumping initial ou, à tout le moins, dès l'entrée en vigueur du règlement de base prévoyant des dispositions contre le risque de contournement, qu'il pourrait devoir prouver l'origine de ses importations. Dès lors, étant donné que la requérante importait des parties de bicyclettes par l'intermédiaire d'une entreprise liée à CBC ayant des sites de production dans le pays soumis au droit antidumping initial, elle aurait dû se doter de ce seul élément de preuve fiable.

99.
    Cela étant, le Conseil et la Commission estiment que, en tout état de cause, les documents présentés par la requérante au cours de l'enquête ne permettaient pas d'établir que les parties de bicyclettes concernées provenant de la république populaire de Chine étaient originaires d'un autre pays.

100.
    Tout d'abord, le Conseil et la Commission considèrent que, dans le cadre d'une enquête sur des pratiques de contournement, l'origine des produits ne peut pas être établie par les déclarations en douane de l'importateur, surtout lorsque celui-ci est lié avec l'exportateur dans le pays concerné. En se référant aux articles 68 et 78 du code des douanes communautaire, ils font valoir que les services de la Commission étaient en droit de vérifier l'exactitude de ces déclarations et d'exiger du déclarant, à cette fin, la présentation d'autres documents. Le Conseil et la Commission contestent également que les déclarations douanières aient été faites in tempore non suspecto, l'enquête antidumping initiale ayant été ouverte en 1991, soit avant la reprise de la requérante par le groupe CBC, en 1992. Par ailleurs, il ressortiraitdes réponses de la requérante au questionnaire que ses activités d'assemblage de bicyclettes ont augmenté entre 1992 et 1993. Dès lors, d'une part, il y aurait eu lieu de soupçonner que les importations de la requérante constituaient un contournement des mesures en vigueur. D'autre part, la requérante aurait dû raisonnablement supposer qu'elle pouvait être appelée à fournir une preuve fiable de l'origine des parties du produit faisant l'objet d'une enquête et, par la suite, d'un droit antidumping.

101.
    Ensuite, le Conseil et la Commission estiment que les déclarations des fournisseurs sont peu probantes, car elles ont été faites pour les besoins de l'enquête, par des personnes ayant un intérêt à ce que les parties de bicyclettes en cause soient déclarées comme n'étant pas d'origine chinoise.

102.
    Enfin, quant à la documentation qui a été soumise aux services de la Commission le 25 novembre 1996, le Conseil et la Commission avancent une série d'arguments selon lesquels les éléments de preuve proposés par la requérante n'étaient, en soi, pas fiables. En effet, au lieu de produire des certificats d'origine pour chaque partie de bicyclette importée en provenance de la république populaire de Chine, la requérante aurait communiqué un ensemble de documents, à savoir les commandes effectuées par elle auprès de ses fournisseurs à Hong-kong (CBC), les factures établies par ces derniers à son attention ainsi que celles des fournisseurs de CBC à destination de ce groupe, les documents de transport relatifs à ces factures ainsi que des documents établis par ses soins aux fins du présent litige afin de pouvoir retracer l'itinéraire suivi par les produits. Le Conseil et la Commission soulignent que, en application de ce mode de preuve, il a fallu à la requérante, dans sa réplique, six pages d'explications et des annexes de 82 pages afin de démontrer l'origine d'une seule pièce détachée. L'ensemble des documents remis à la Commission aurait représenté un volume d'un mètre cube. Or, de tels éléments de preuve n'auraient pas permis une vérification fiable dans un temps raisonnable. Le Conseil et la Commission soutiennent que, à supposer même que, sur la base des vérifications effectuées sur un modèle de bicyclette, il ait pu être établi que les documents du fournisseur de CBC se rapportaient aux mêmes pièces que ceux remis par CBC à la requérante, rien ne permettait de conclure qu'un tel lien existait s'agissant des autres modèles assemblés par cette dernière. En effet, selon un principe applicable en matière antidumping, les entreprises concernées par une enquête seraient tenues de présenter les données demandées de façon à permettre une vérification fiable dans un temps raisonnable. En outre, l'établissement d'un lien entre les factures et les documents de transport ne serait possible qu'à l'aide des listes des pièces qui constituent des documents purement internes à CBC et qui sont donc moins fiables qu'un certificat d'origine émis par une autorité du pays d'origine.

103.
    Enfin, les institutions communautaires rappellent que les services de la Commission ont relevé, au cours de l'enquête, certaines irrégularités. En effet, selon les institutions, les numéros des pièces utilisées par les fournisseurs de CBC necorrespondaient pas à ceux des pièces livrées par ce groupe à la requérante. En outre, dans certains cas, le pays d'origine déclaré par les fournisseurs de CBC n'aurait pas été celui qui figurait sur les factures de ce dernier. Dans ces circonstances, même si ces irrégularités pouvaient être expliquées par des problèmes d'organisation des entreprises impliquées, les services de la Commission auraient été en droit de considérer que ces documents ne permettaient pas d'établir que les parties de bicyclettes exportées vers la Communauté de la république populaire de Chine avaient été importées dans cet État par CBC en provenance d'un pays tiers.

Appréciation du Tribunal

104.
    Il ressort du dossier que, en conformité avec l'article 13, paragraphe 2, du règlement de base tel qu'interprété ci-dessus au point 88, les services de la Commission ont invité la requérante à apporter, au cours de l'enquête, la preuve de l'exactitude des énonciations comprises dans le questionnaire et fondées sur ses déclarations en douane selon lesquelles les parties de bicyclettes concernées, en provenance de la république populaire de Chine, n'étaient pas originaires de ce pays.

105.
    Ainsi qu'il ressort des lettres des 12 et 21 novembre 1996 (voir ci-dessus aux points 20 et 24), les services de la Commission ont, à cette fin, demandé à la requérante de leur soumettre, en vue d'une deuxième vérification sur place et jusqu'au 25 novembre 1996, pour chaque partie de bicyclette concernée, des certificats d'origine et des preuves documentaires complètes concernant son transport du pays d'origine vers la république populaire de Chine. À la suite de cette demande, la requérante a déposé, dans le délai imparti, pour chaque partie de bicyclette concernée la documentation mentionnée ci-dessus au point 102. Elle n'a, en revanche, pas donné suite à la demande de production de certificats d'origine. À cet égard, elle a informé les services de la Commission qu'elle ne disposait pas de tels certificats. En outre, elle a affirmé que, en vertu de la législation applicable au moment des importations litigieuses, elle n'était pas obligée d'en présenter. Par ailleurs, elle a fait valoir que la demande des services de la Commission était inéquitable étant donné qu'elle devait, pour la satisfaire, se procurer rétroactivement et à très bref délai des certificats d'origine pour des milliers de pièces de bicyclettes achetées à un grand nombre de fournisseurs avant le début de l'enquête en cause.

106.
    À la suite de la vérification sur place les 26 et 27 novembre 1996, les services de la Commission ont conclu que la requérante n'avait pas apporté la preuve demandée étant donné que, d'une part, aucun certificat d'origine n'avait été produit et, d'autre part, ils avaient détecté certaines irrégularités dans la documentation remise par la requérante ne permettant pas de conclure à l'exactitude de ses déclarations en douane. C'est notamment sur la base de ces faits que le Conseil a adopté le règlement d'extension, ainsi qu'il ressort du considérant 15 de ce règlement.

107.
    Au vu de ce qui précède, il convient de relever tout d'abord que, en ce qui concerne les importations de parties de bicyclettes effectuées au cours de la période d'enquête, il n'existait dans l'ordre juridique communautaire aucune obligation légale pour la requérante de se procurer des certificats d'origine pour prouver l'origine non préférentielle de ces marchandises, c'est-à-dire qu'elles étaient originaires d'un pays ne bénéficiant pas de mesures tarifaires préférentielles avec la Communauté.

108.
    Certes, il résulte des articles 13, paragraphe 5, et 14, paragraphe 3, du règlement de base ainsi que de l'article 26, paragraphe 1, du code des douanes communautaire que les institutions communautaires peuvent instituer une réglementation spécifique quant aux documents que les importateurs doivent être en mesure de produire pour justifier de l'origine non préférentielle des marchandises concernées. Toutefois, il est constant entre les parties que, avant l'entrée en vigueur du règlement d'extension, une telle réglementation spécifique n'avait pas été adoptée.

109.
    Par ailleurs, la requérante a soutenu, sans être contredite à cet égard par le Conseil et la Commission, que, en l'absence d'une obligation légale en vigueur dans le pays d'importation des marchandises concernées, l'établissement de certificats d'origine pour prouver leur origine non préférentielle n'est pas une pratique usuelle dans le commerce international.

110.
    Enfin, c'est à tort que le Conseil et la Commission soutiennent qu'un opérateur avisé aurait dû, déjà avant l'ouverture de l'enquête, se procurer des certificats d'origine afin de pouvoir apporter, le cas échéant, la preuve de l'origine non préférentielle des marchandises concernées. D'une part, une telle obligation de diligence ne peut pas être déduite du règlement initial. En effet, ce règlement se limite à instituer un droit antidumping sur l'importation de bicyclettes originaires de la république populaire de Chine et ne comporte aucune mention des règles à respecter lors de l'importation de parties de ce produit dans la Communauté ni même une indication que les institutions communautaires veilleront plus particulièrement à ce que ce règlement ne soit pas contourné par l'importation de parties de ce produit. D'autre part, cette obligation ne peut pas non plus être inférée de l'adoption du règlement de base en ce qu'il comporte des dispositions générales concernant l'extension des droits antidumping en cas de contournement d'une mesure en vigueur. En effet, le règlement de base non seulement se limite à instituer un régime général relatif à la défense contre les importations qui font l'objet d'un dumping, mais, de plus, ne comporte aucune règle spécifique concernant le mode de preuve à respecter lors de l'importation de marchandises. Il convient, en outre, de constater que, à cet égard, le règlement de base ne diffère pas du règlement n° 2423/88 antérieurement en vigueur.

111.
    Cela étant, même en l'absence d'une obligation légale de présenter des certificats d'origine, rien n'interdit, en principe, aux institutions communautaires de demanderaux importateurs, pour des raisons d'efficacité administrative, la production de tels documents pour prouver l'exactitude des énonciations comprises dans leurs déclarations en douane, afin d'assurer que l'objectif de l'article 13 du règlement de base, à savoir contrecarrer des pratiques de contournement, soit atteint.

112.
    Toutefois, les institutions communautaires ne peuvent pas, sans violer l'article 13, paragraphe 2, du règlement de base tel qu'interprété ci-dessus au point 88, exiger des certificats d'origine à l'exclusion de tout autre moyen de preuve lorsqu'elles savent ou doivent savoir que certains opérateurs concernés sont dans l'impossibilité de produire de tels certificats, sans que cette impossibilité leur soit imputable. En effet, dans ces circonstances spécifiques, une telle exigence serait contraire aux principes de sécurité juridique et du respect des droits de la défense, pour autant qu'elle rend impossible, dans un contentieux susceptible d'entraîner l'imposition d'une charge pécuniaire, la preuve de l'inapplicabilité d'une telle charge. Dans de telles circonstances spécifiques, le refus d'autres éléments de preuve équivaut, en effet, à dénier au défendeur le droit de produire des documents à décharge (ultra posse nemo tenetur).

113.
    De plus, il y a lieu de relever que, dans ces circonstances, l'exigence d'un tel élément de preuve est inappropriée par rapport à l'objectif poursuivi, à savoir contrecarrer les pratiques de contournement du droit initialement institué. En effet, l'exigence d'une preuve impossible peut avoir comme conséquence que l'application du droit étendu ne soit pas limitée aux seules importations de pièces constituant un contournement de ce droit au sens de l'article 13 du règlement de base. Cette exigence serait, dès lors, également contraire au principe de proportionnalité.

114.
    Or, en l'espèce, il ressort des faits résumés ci-dessus aux points 104 à 106 que la requérante a informé les institutions communautaires qu'elle ne disposait pas de certificats d'origine pour les parties de bicyclettes concernées et qu'il lui était matériellement impossible de se procurer rétroactivement et dans le délai imparti par les services de la Commission de tels certificats pour les importations effectuées pendant la période d'enquête. À titre surabondant, il y a lieu de remarquer, par ailleurs, qu'il est apparu au cours de la procédure devant le Tribunal que la requérante a même été dans l'impossibilité absolue de présenter les certificats d'origine qui lui avaient été demandés. En effet, en annexe à sa réplique, la requérante a produit des attestations de chambres de commerce de deux pays asiatiques, dont les parties de bicyclettes concernées seraient originaires, desquelles il ressort que des certificats d'origine ne sont pas délivrés plus de trois mois après l'expédition des produits concernés. Cet élément n'a pas été contesté par le Conseil ou par la Commission.

115.
    Dans les circonstances exceptionnelles du cas d'espèce, les services de la Commission ne pouvaient valablement exiger la production de certificats d'origine, mais étaient tenus d'examiner, non de façon sommaire, mais avec soin et impartialité, les documents que la requérante leur avait remis dans le cadre de l'enquête afin de prouver l'exactitude de ses énonciations dans les déclarations endouane selon lesquelles les parties de bicyclettes importées par ses soins dans la Communauté étaient originaires de pays autres que la république populaire de Chine.

116.
    Il convient dès lors d'examiner si c'est à la suite d'un examen effectué avec soin et impartialité que les institutions communautaires ont rejeté, comme des preuves insuffisantes, les documents communiqués par la requérante.

117.
    À cet égard, les institutions communautaires ont avancé tout d'abord des arguments selon lesquels, en substance, vu le volume et la complexité de la documentation transmise, ces éléments de preuve n'étaient pas, en tant que tels, acceptables, car ils ne permettaient pas de réaliser une vérification fiable dans un délai raisonnable. Or, s'il est vrai que les procédures en matière antidumping sont caractérisées par des délais courts et, en conséquence, par une nécessité accrue d'efficacité administrative, il y a lieu de rappeler que, en l'espèce, la requérante était dans l'impossibilité de fournir des éléments de preuve alternatifs plus facilement vérifiables. Par ailleurs, ainsi qu'il ressort des lettres des services de la Commission des 12 et 21 novembre 1996 (voir ci-dessus aux points 20 et 24), il y a lieu de relever que c'est sur la demande expresse des services de la Commission que la requérante leur a remis cette documentation volumineuse afin de prouver l'exactitude de ses déclarations en douane. Dès lors, c'est à tort que les institutions communautaires ont, dans les circonstances exceptionnelles du cas d'espèce, rejeté ces éléments de preuve en raison de leur volume et de leur complexité.

118.
    Par ailleurs, il est vrai que, dans la lettre du 19 décembre 1996 résumant les résultats de la seconde vérification sur place, les services de la Commission ont relevé deux irrégularités quant à ces documents. Suivant cette lettre, d'une part, les numéros des pièces livrées par les fournisseurs de CBC ne correspondaient pas aux numéros des pièces utilisées par celle-ci pour ses fournitures à la requérante et, d'autre part, dans certains cas, le pays d'origine déclaré par ces fournisseurs n'était pas celui qui figurait sur les factures de CBC. Toutefois, il ressort du dossier que la requérante a fourni, au cours de la seconde vérification sur place, des explications pour chacune de ces irrégularités. Interrogé par le Tribunal au sujet de ces irrégularités ainsi que sur les documents que, selon les institutions communautaires, la requérante aurait dû produire, le Conseil a répondu qu'il estimait que l'administration de la preuve de l'origine des parties de bicyclettes concernées sans certificats d'origine était «extrêmement difficile». Au cours de l'audience, le Conseil a ajouté que, dans les circonstances de l'espèce, à savoir dès lors que les parties de bicyclettes n'avaient pas simplement transité par la république populaire de Chine, la production de certificats d'origine aurait constitué le seul mode de preuve fiable et les documents présentés par la requérante n'auraient pu être acceptés comme des preuves suffisantes, même si les services de la Commission n'avaient pas détecté lesdites irrégularités.

119.
    Au vu de ce qui précède, il est établi à suffisance de droit que les institutions communautaires se sont abstenues d'examiner avec soin et impartialité les documents qui leur avaient été transmis. Dans une situation exceptionnelle comme celle du cas d'espèce, les institutions communautaires ne pouvaient valablement rejeter ces documents comme étant, a priori, non probants et exiger la production d'un élément de preuve que la requérante était dans l'impossibilité de fournir.

120.
    Il s'ensuit que c'est à tort que le Conseil a considéré que la requérante n'avait pas apporté la preuve que les parties de bicyclettes importées par elle en provenance de la république populaire de Chine, constituant 60 % ou plus de la valeur totale des parties des bicyclettes assemblées, étaient originaires d'un pays autre que cet État. Par conséquent, le Conseil a violé l'article 13, paragraphe 2, du règlement de base en étendant le droit antidumping institué par le règlement initial aux importations de parties de bicyclettes effectuées par la requérante.

Conclusion

121.
    Sans qu'il soit nécessaire d'examiner le bien-fondé du second moyen du recours, l'article 2 du règlement d'extension doit, dès lors, être annulé en ce qui concerne la requérante.

122.
    En vertu de l'article 2, paragraphe 3, du règlement d'extension, le droit étendu doit être perçu sur les importations des parties de bicyclettes concernées qui, conformément à l'article 2 du règlement d'ouverture d'enquête, ont été enregistrées par les autorités douanières dès l'entrée en vigueur de ce dernier règlement le 20 avril 1996. Par conséquent et au vu des conclusions de la requérante (voir ci-dessus au point 51), l'article 2 du règlement d'extension doit être annulé en ce qui concerne les importations de parties essentielles de bicyclettes effectuées par celle-ci entre le 20 avril 1996 et le 18 avril 1997, date à laquelle la décision d'exemption du 28 janvier 1998 a pris effet.

Sur les dépens

123.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Le Conseil ayant succombé, il y a lieu de le condamner à supporter, outre ses dépens, ceux de la requérante, conformément aux conclusions de celle-ci.

124.
    Conformément à l'article 87, paragraphe 4, du règlement de procédure, la Commission supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre élargie)

déclare et arrête:

1)    L'article 2 du règlement (CE) n° 71/97 du Conseil, du 10 janvier 1997, portant extension du droit antidumping définitif institué par le règlement (CEE) n° 2474/93 sur les bicyclettes originaires de la république populaire de Chine aux importations de certaines parties de bicyclettes en provenance de la république populaire de Chine et portant prélèvement du droit étendu sur ces importations enregistrées conformément au règlement (CE) n° 703/96, est annulé en ce qui concerne les importations de parties essentielles de bicyclettes effectuées par la requérante entre le 20 avril 1996 et le 18 avril 1997.

2)    Le Conseil est condamné à supporter ses dépens et ceux de la requérante.

3)    La Commission supportera ses propres dépens.

Lenaerts

Tiili
Azizi

Jaeger Mengozzi

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 26 septembre 2000.

Le greffier

Le président

H. Jung

K. Lenaerts


1: Langue de procédure: le français.