Language of document : ECLI:EU:T:2023:267

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

17 mai 2023 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Sécurité sociale – Réglementation commune relative à la couverture des risques de maladie des fonctionnaires – Article 72 du statut – Maladie grave – Avis du conseil médical – Obligation de motivation »

Dans l’affaire T‑685/21,

IR, représenté par Mes S. Pappas et A. Pappas, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. L. Hohenecker et L. Vernier, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de M. L. Truchot, président, Mme R. Frendo et M. M. Sampol Pucurull (rapporteur), juges,

greffier : Mme H. Eriksson, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 1er décembre 2022,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 270 TFUE, le requérant, IR, demande l’annulation de la décision du 11 décembre 2020 par laquelle la Commission européenne a rejeté la demande de renouvellement du régime de maladie grave pour la pathologie de son fils (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le requérant est fonctionnaire à la Commission depuis avril 2003. [confidentiel] (1) depuis août 2012, il élève seul son fils, [confidentiel], né [confidentiel] et atteint [confidentiel], également dénommé « [confidentiel] » (ci-après la « maladie en cause »). Cette pathologie a été reconnue comme maladie grave par le régime d’assurance maladie commun aux institutions des Communautés européennes (ci-après le « RCAM ») par deux décisions du 3 juin 2013 et du 15 décembre 2015 pour la période allant du 14 février 2013 au 27 février 2021.

3        Par une décision du 22 août 2014, l’autorité nationale [confidentiel] compétente pour les handicaps a attesté que le fils du requérant souffrait de la maladie en cause qui le rendait handicapé à vie au taux de [confidentiel]. Cette pathologie lui cause des difficultés [confidentiel].

4        Le 6 février 2020, le conseil médical du RCAM a émis un avis sur la reconnaissance du statut de maladie grave pour la maladie en cause. Par ledit avis, reposant sur la nouvelle classification en trois niveaux des formes de la maladie en cause, définie dans le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (ci-après le « DSM-5 »), il recommandait que la reconnaissance du statut de maladie grave soit réservée à la forme de niveau 3 de la maladie en cause, laquelle correspondait à la forme la plus grave.

5        Le 5 novembre 2020, le requérant a demandé le renouvellement du régime de maladie grave pour la pathologie de son fils. En réponse à la demande écrite du médecin-conseil en date du 12 novembre 2020, le requérant a soumis un rapport médical daté du 29 octobre 2020 précisant que l’enfant était atteint par la forme de niveau 2 de la maladie en cause, selon la classification définie par le DSM-5.

6        Le 11 décembre 2020, le bureau liquidateur de la Commission à Bruxelles (Belgique) (ci-après le « bureau liquidateur »), dont dépend le requérant, a adopté la décision attaquée, laquelle rejetait la demande formée par celui-ci sur la base de l’avis initial du médecin-conseil (ci-après l’« avis initial ») au motif que, étant donné la stabilité de l’évolution de la maladie en cause et les nouvelles recommandations du conseil médical du RCAM issues de son avis du 6 février 2020, le statut de maladie grave ne pouvait plus être accordé pour la pathologie de son fils.

7        Le 10 mars 2021, le requérant a introduit une réclamation, conformément à l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») contre la décision attaquée.

8        À la suite du dépôt de cette réclamation, un second avis médical a été rendu par les médecins-conseils du RCAM, le 12 mai 2021 (ci-après l’« avis circonstancié ») selon lequel, étant donné que le fils du requérant était atteint par la forme de niveau 2 de la maladie en cause, selon la classification issue du DSM-5, que sa situation avait évolué favorablement depuis 2013 et que le faible nombre de traitements reçus entre 2016 et 2021 démontrait l’absence de nécessité de mesures diagnostiques ou thérapeutiques lourdes, il ne remplissait pas les critères exigés pour la reconnaissance du statut de maladie grave.

9        Le 28 juin 2021, le comité de gestion du RCAM a adopté l’avis no 025/2021 selon lequel il y avait lieu de confirmer la décision attaquée et, par conséquent, de rejeter la réclamation au motif que le critère du pronostic vital n’était pas rempli et que des mesures diagnostiques ou thérapeutiques lourdes n’étaient pas nécessaires. En outre, l’avis souligne que le fils du requérant est atteint d’une forme de niveau 2 de la maladie en cause, alors que l’avis du conseil médical du 6 février 2020 exige de réserver la reconnaissance du régime de maladie grave à sa forme de niveau 3.

10      Par une décision du 7 juillet 2021, notifiée le 8 juillet suivant au requérant (ci-après la « décision de rejet de la réclamation »), sur la base de l’avis circonstancié, l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») de la Commission a rejeté la réclamation.

 Conclusions des parties

11      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        annuler la décision de rejet de la réclamation ;

–        condamner la Commission aux dépens.

12      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

 Sur la nouvelle offre de preuve du requérant

13      Par lettre du 25 novembre 2022, le requérant a présenté une nouvelle offre de preuve, au titre de l’article 85, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal.

14      Cette offre de preuve concerne une attestation médicale, datée du 11 novembre 2022, relative à l’état de santé du fils du requérant et une note informative du 31 octobre 2022 de l’hôpital [confidentiel] portant également sur son état de santé.

15      Selon une jurisprudence constante, la légalité d’un acte de l’Union européenne s’apprécie en fonction des éléments de fait et de droit existant à la date à laquelle l’acte a été pris (voir, en ce sens, arrêts du 7 février 1979, France/Commission, 15/76 et 16/76, EU:C:1979:29, points 7 et 8, et du 12 décembre 1996, Altmann e.a./Commission, T‑177/94 et T‑377/94, EU:T:1996:193, point 119). Il s’ensuit qu’est exclue la prise en compte, lors de l’appréciation de la légalité de cet acte, d’éléments postérieurs à la date à laquelle l’acte de l’Union a été adopté (voir, en ce sens, arrêts du 27 septembre 2006, Roquette Frères/Commission, T‑322/01, EU:T:2006:267, point 325).

16      À cet égard, il suffit de constater que les documents déposés le 25 novembre 2022 décrivent l’état de santé du fils du requérant en 2022. Ils portent donc sur des éléments de faits postérieurs à la décision attaquée. Leur prise en compte est donc exclue en vue de l’appréciation de la légalité de cet acte. Ainsi, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la recevabilité de l’offre de preuve, il convient de constater que, dès lors que ces documents sont sans influence sur l’examen de la légalité de la décision attaquée, cette offre de preuve n’est pas pertinente dans le cadre du présent litige.

 Sur l’objet du recours

17      Par son deuxième chef de conclusions, le requérant demande l’annulation de la décision de rejet de la réclamation.

18      Il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, des conclusions en annulation formellement dirigées contre la décision de rejet d’une réclamation ont pour effet de saisir le Tribunal de l’acte contre lequel la réclamation a été présentée lorsqu’elles sont, en tant que telles, dépourvues de contenu autonome (voir arrêt du 13 juillet 2018, Curto/Parlement, T‑275/17, EU:T:2018:479, point 63 et jurisprudence citée). En effet, la décision qui rejette une réclamation, qu’elle soit implicite ou explicite, ne fait, si elle est pure et simple, que confirmer l’acte ou l’abstention dont le réclamant se plaint et ne constitue pas, prise isolément, un acte attaquable (voir arrêt du 12 septembre 2019, XI/Commission, T‑528/18, non publié, EU:T:2019:594, point 20 et jurisprudence citée).

19      En revanche, compte tenu du caractère évolutif de la procédure précontentieuse, la motivation incluse dans la décision de rejet de la réclamation devra être prise en considération pour l’examen de la légalité de la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêts du 9 décembre 2009, Commission/Birkhoff, T‑377/08 P, EU:T:2009:485, points 55 et 56).

20      En l’espèce, étant donné que la décision de rejet de la réclamation ne fait que confirmer la décision attaquée, par laquelle la demande de renouvellement du statut de maladie grave pour la pathologie du fils du requérant a été rejetée, les conclusions en annulation dirigées contre la décision de rejet de la réclamation sont dépourvues de contenu autonome. Par conséquent, le recours en annulation du requérant doit être considéré comme étant dirigé contre la décision attaquée, dont la légalité doit être examinée en prenant en considération la motivation figurant dans la décision de rejet de la réclamation.

 Sur le fond

 Sur les conclusions à fin d’annulation

21      Au soutien de son recours, le requérant invoque six moyens. Le premier moyen est tiré d’une irrégularité procédurale affectant la légalité de la décision attaquée en ce qu’elle se fonde sur l’avis circonstancié adopté au cours de la procédure de réclamation prévue à l’article 90, paragraphe 2, du statut. Le deuxième moyen a trait à la violation de l’obligation de motivation. Le troisième moyen est tiré d’erreurs manifestes d’appréciation et d’une dénaturation des faits quant à l’évolution de la situation de son fils et au besoin de mesures diagnostiques ou thérapeutiques lourdes. Le quatrième moyen a trait à une violation du droit à une bonne administration et, plus particulièrement, du droit d’être entendu. Le cinquième moyen porte sur l’illégalité de l’avis du conseil médical du RCAM du 6 février 2020 sur lequel est fondée la décision attaquée. Le sixième moyen a trait à la violation de la procédure de réclamation prévue à l’article 90, paragraphe 2, du statut.

22      Les arguments soulevés dans le cadre des premier et cinquième moyens ayant trait au cadre juridique et factuel du litige, il convient de les examiner en premier lieu. Le bien-fondé des autres moyens invoqués sera examiné en second lieu, en commençant par le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation.

 Sur le premier moyen, tiré de l’irrégularité procédurale constituée par la prise en compte de l’avis circonstancié

23      Le requérant fait valoir que la Commission a commis une irrégularité de procédure affectant la légalité de la décision attaquée en fondant la décision de rejet de la réclamation sur l’avis circonstancié. Selon lui, les appréciations de la Commission fondées sur l’avis circonstancié doivent être écartées aux fins d’examiner la légalité de la décision attaquée. En effet, l’avis émis par le médecin-conseil étant un acte préparatoire s’intégrant à la procédure de renouvellement du statut de maladie grave, celui-ci devrait nécessairement intervenir avant la décision dont il constitue le fondement. De plus, les appréciations médicales devraient être tenues pour définitives lorsqu’elles sont intervenues dans des conditions régulières.

24      La Commission conteste les arguments du requérant.

25      Il convient de rappeler que l’objectif de la procédure de réclamation est de permettre le réexamen par l’AIPN de l’acte attaqué au regard des griefs avancés par le réclamant, le cas échéant en modifiant les motifs servant de support à son dispositif (voir, en ce sens, arrêt du 21 mai 2014, Mocová/Commission, T‑347/12 P, EU:T:2014:268, points 32 et 33).

26      En outre, la phase précontentieuse présente un caractère évolutif, selon lequel la réclamation administrative et son rejet, explicite ou implicite, font partie intégrante d’une procédure complexe, l’élaboration de l’acte fixant la position définitive de l’institution ne trouvant son terme qu’à l’occasion de l’adoption de la réponse faite par l’AIPN à la réclamation introduite par le fonctionnaire concerné (voir, en ce sens, arrêt du 17 janvier 2017, LP/Europol, T‑719/15 P, non publié, EU:T:2017:7, point 18).

27      Par ailleurs, cette conception est également soutenue par la considération selon laquelle le complément de motivation, au stade de la décision de rejet de la réclamation, est conforme à la finalité de l’article 90, paragraphe 2, du statut, aux termes duquel la décision sur la réclamation est elle-même motivée. En effet, cette disposition implique nécessairement que l’autorité amenée à statuer sur la réclamation ne soit pas liée par la seule motivation, le cas échéant insuffisante, voire inexistante dans le cas d’une décision implicite de rejet, de la décision faisant l’objet de la réclamation (voir arrêt du 15 septembre 2017, Skareby/SEAE, T‑585/16, EU:T:2017:613, point 19 et jurisprudence citée).

28      Ainsi, un complément de motivation apporté au stade de la réponse à une réclamation ne constitue pas un élément nouveau, mais une simple évolution de la procédure précontentieuse (ordonnance du 25 juin 2021, OM/Commission, T‑728/20, non publiée, EU:T:2021:409, point 35) .

29      Il est vrai, ainsi que le souligne le requérant, que l’avis circonstancié est intervenu postérieurement à la décision attaquée.

30      Toutefois, la décision attaquée n’était pas définitive, étant donné que le requérant l’avait contestée par sa réclamation. C’est donc dans le cadre de l’examen de celle-ci que l’AIPN était tenue de prendre en compte tous les éléments de fait et de droit pertinents, indépendamment de la question de savoir s’ils étaient antérieurs ou postérieurs à ladite décision (voir, en ce sens, ordonnance du 25 juin 2021, OM/Commission, T‑728/20, non publiée, EU:T:2021:409, point 35).

31      À cet égard, l’avis circonstancié a été pris en compte dans la décision de rejet de la réclamation et est donc antérieur à celle-ci, de sorte qu’il a été examiné par l’administration lorsque celle-ci a définitivement arrêté sa position à l’issue de la procédure précontentieuse.

32      La prise en compte de l’avis circonstancié par la décision attaquée ne constitue donc pas une irrégularité procédurale susceptible d’affecter la légalité de la décision attaquée. Il s’ensuit que le premier moyen doit être écarté.

 Sur le cinquième moyen, tiré de la violation de l’article 72 du statut, de la réglementation commune et des DGE résultant de la prise en compte de l’avis du conseil médical du RCAM du 6 février 2020

33      Le requérant soutient que la légalité de la décision attaquée est affectée par la méconnaissance, en raison de la prise en compte de l’avis du conseil médical du RCAM du 6 février 2020, de l’article 72 du statut, des dispositions pertinentes de la réglementation commune relative à la couverture des risques de maladie des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après la « réglementation commune ») et de la décision C(2007) 3195 final de la Commission, du 2 juillet 2007, portant fixation des dispositions générales d’exécution relatives au remboursement des frais médicaux, telle que modifiée par la décision C(2020) 3002 final de la Commission, du 12 mai 2020 (ci-après les « DGE »), dans la mesure où ledit avis exige et réserve la reconnaissance du régime de maladie grave aux personnes atteintes par la forme de niveau 3 de la maladie en cause. Cet avis prévoirait l’octroi ou le refus d’un tel régime de manière automatique sur la base de critères abstraits en violation de l’article 72 du statut qui prévoirait qu’une telle reconnaissance requiert un examen individualisé et circonstancié de l’état de santé de la personne concernée sur la base des quatre critères fixés au point 1 du chapitre 5 du titre III des DGE.

34      La Commission conteste les arguments du requérant.

35      D’une part, le cadre juridique applicable à la reconnaissance du statut de maladie grave est constitué de l’article 72 du statut qui dispose que, « [d]ans la limite de 80 % des frais exposés, […] le fonctionnaire, son conjoint, […] ses enfants et les autres personnes à sa charge […] sont couverts contre les risques de maladie [et ce taux] est porté à 100 % en cas de tuberculose, poliomyélite, cancer, maladie mentale et autres maladies reconnues de gravité comparable par l’autorité investie du pouvoir de nomination ».

36      D’autre part, l’article 20, paragraphe 6, de la réglementation commune dispose ce qui suit :

« Conformément à l’article 72, paragraphe 1, du [s]tatut, les frais sont remboursés à 100 % en cas de tuberculose, poliomyélite, cancer, maladies mentales et autres maladies reconnues de gravité comparable par l’autorité investie du pouvoir de nomination après avis du médecin conseil du Bureau liquidateur.

Cet avis est émis sur la base des critères généraux fixés dans les dispositions générales d’exécution après consultation du Conseil médical.

[…] »

37      Le cadre juridique est, par ailleurs, complété par le chapitre 5, intitulé « Reconnaissance du statut de maladie grave », du titre III, intitulé « Procédures », des DGE, qui prévoit ce qui suit :

« 1. Définition

Sont reconnus notamment comme maladies graves, les cas de tuberculose, de poliomyélite, de cancer, de maladie mentale et d’autres maladies reconnues de gravité comparable par l’AIPN. Ces dernières concernent des affections associant, à des degrés variables, les quatre critères suivants :

–        évolution chronique ;

–        nécessité de mesures diagnostiques et/ou thérapeutiques lourdes ;

–        présence ou risque de handicap grave ;

–        pronostic vital  défavorable.

Ces critères cumulatifs doivent faire l’objet d’une appréciation globale sur la gravité des conséquences de la maladie en cause. L’appréciation portée sur l’un des critères est, compte tenu du lien d’interdépendance, de nature à moduler l’appréciation portée sur les autres critères, en particulier en ce qui concerne les situations de handicap grave. L’examen d’un critère à la lumière de l’appréciation portée sur les autres critères peut aboutir à la conclusion que ledit critère, notamment celui relatif au pronostic vital défavorable, est rempli […] »

38      En outre, l’article 41 de la réglementation commune prévoit que le conseil médical peut être consulté par le comité de gestion du RCAM ou le bureau central sur toute question de nature médicale qui se poserait dans le cadre de ladite réglementation.

39      Il ressort d’une lecture combinée de l’article 72 du statut et de l’article 20, paragraphe 6, de la réglementation commune que les maladies entrant dans la catégorie des « maladies graves » sont celles dont l’administration reconnaît qu’elles sont d’une gravité comparable aux maladies expressément mentionnées à l’article 72 du statut (tuberculose, poliomyélite, cancer, maladie mentale) sur la base de critères généraux fixés dans les DGE après consultation du conseil médical.

40      Il ressort également de l’analyse du cadre juridique que l’obligation d’examen concret et circonstancié de l’état de santé de la personne concernée ne découle ni de l’article 72 du statut ni de la réglementation commune.

41      Toutefois, selon le point 1 du chapitre 5 du titre III des DGE, les quatre critères cumulatifs doivent faire l’objet d’une appréciation globale sur la gravité des conséquences de la maladie en cause.

42      Ainsi, la reconnaissance de ces autres maladies graves dépend d’un examen concret et circonstancié de l’état de santé de la personne concernée et des conditions de traitement de la pathologie en cause, effectué sur la base d’un rapport du médecin traitant de celle-ci, au vu des critères fixés après avis du conseil médical, lesquels impliquent tous l’analyse précise de la situation de l’intéressé (voir, en ce sens, arrêts du 23 novembre 2010, Marcuccio/Commission, F‑65/09, EU:F:2010:149, points 55 et 56, et du 28 septembre 2011, Allen/Commission, F‑23/10, EU:F:2011:162, point 76).

43      En l’espèce, ainsi qu’il ressort de l’article 41 de la réglementation commune, l’avis du conseil médical du 6 février 2020 présente une valeur consultative. Il tend à permettre à l’AIPN de prendre en compte la classification opérée par le DSM‑5, publié en 2013 et considéré, selon celui-ci, comme le manuel de référence pour le diagnostic des troubles mentaux. Ainsi, cet avis, à valeur consultative, examine les avancées scientifiques ayant eu lieu en matière de diagnostic de cette pathologie, comme le prévoit la définition générale de l’avis du conseil médical figurant dans les DGE.

44      D’une part, l’avis du conseil médical du 6 février 2020 donne une interprétation de la relation existant entre le niveau de la forme de la maladie en cause selon cette classification et le besoin de soutien de la personne qui en est atteinte. En effet, selon celui-ci, le DSM-5 comprend de nouvelles directives pour catégoriser la maladie en cause par niveau, qui sont au nombre de trois, chacun reflétant un besoin de soutien différent. Ainsi, « [p]lus le niveau est bas, moins quelqu’un peut avoir besoin de soutien ». À titre d’exemple, il relève que « [l]es personnes atteintes [confidentiel] de niveau 2 ou 3 présentent des symptômes modérés à sévères et nécessitent un soutien plus important ». S’agissant des différences entre les niveaux de la maladie en cause, l’avis du conseil médical du 6 février 2020 mentionne que « [l]e DSM-5 note que ceux qui sont atteints [confidentiel] de niveau 2 nécessitent un soutien substantiel » et que « les patients qui sont [atteints [confidentiel] de] niveau [3] nécessitent un soutien très important ».

45      D’autre part, l’avis du conseil médical du 6 février 2020 émet certaines recommandations dans le traitement des demandes de reconnaissance du statut de maladie grave en ce qui concerne la maladie en cause. Ainsi, il conclut que, « [a]fin de pouvoir déterminer le niveau, le diagnostic de la maladie en cause doit reposer sur des éléments objectifs (échelles d’évaluation) ». Il précise qu’« [i]l convient également de se référer au niveau de soins requis, pour accepter ou non la reconnaissance de maladie grave et les traitements à rembourser » et « estime que la reconnaissance du statut de maladie grave devrait concerner les enfants de niveau 3, avec une vision de la globalité de la situation en cas de demande de prolongation ». 

46      Ainsi, le conseil médical réserve la reconnaissance du statut de maladie grave à une forme particulière de la maladie en cause. Toutefois, il ressort dudit avis que le niveau de soin requis joue un rôle essentiel dans la décision d’accepter ou de refuser la reconnaissance du statut de maladie grave, ce qui nécessite un examen concret et circonstancié de l’état de santé de la personne concernée.

47      En tout état de cause, compte tenu de la valeur consultative de son avis, le conseil médical du RCAM se limite à faire état de sa position sur la base de la classification issue du DSM-5, en ce qui concerne le niveau de la forme de la maladie en cause pour lequel la reconnaissance du statut de maladie grave devrait être réservé. En effet, l’emploi du verbe « devoir » au conditionnel dans l’avis du conseil médical démontre que l’expression de cette position ne constitue pas une injonction à destination des médecins-conseils ni même une invitation à une modification des quatre critères présents dans les DGE, mais simplement la formulation d’une recommandation. De la même manière, la référence à l’approche globale de la situation en cas de demande de prolongation souligne le maintien d’une approche fondée sur un examen concret et circonstancié de chaque cas.

48      Par conséquent, la prise en compte, par la décision attaquée, de l’avis du conseil médical du 6 février 2020 ne porte pas atteinte au principe d’un examen circonstancié de la situation de la personne concernée prévu au point 1 du chapitre 5 du titre III des DGE.

49      Il s’ensuit que le cinquième moyen doit être écarté.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation

50      Le requérant fait valoir que la Commission a manqué à son obligation de motivation, prévue à l’article 296 TFUE, en ne faisant pas apparaître de façon claire et compréhensible l’appréciation et l’analyse des quatre critères du point 1 du chapitre 5 du titre III des DGE et leur interdépendance.

51      D’une part, la motivation de la décision attaquée serait insuffisante dès lors que le médecin-conseil n’a nullement expliqué les raisons pour lesquelles les quatre critères nécessaires à la reconnaissance du statut de maladie grave, mentionnés au point 1 du chapitre 5 du titre III des DGE, qui, selon le RCAM, étaient remplis pendant la période 2013-2021, ne l’étaient plus à partir du 28 février 2021. Plus précisément, il considère que la décision attaquée ne permet pas de s’assurer que les médecins-conseils se sont livrés à une appréciation globale de ces critères, sur la base d’un examen concret et circonstancié, tenant compte de leur lien d’interdépendance. D’autre part, selon lui, cette motivation est également contradictoire dans la mesure où le médecin-conseil, après avoir souligné la stabilité de l’évolution de la pathologie a conclu, sans autre explication, que « le régime de “maladie grave” (basé sur les quatre critères spécifiques) ne [pouvait] plus être accordé à présent ».

52      La Commission conteste les arguments du requérant. Elle estime qu’il ressort d’une lecture combinée de la décision attaquée et de la décision de rejet de la réclamation que le statut de maladie grave n’a pas été renouvelé, car les quatre critères cumulatifs, définis au point 1 du chapitre 5 du titre III des DGE, n’étaient pas réunis. Selon elle, l’appréciation globale des quatre critères et de leur lien d’interdépendance exigerait une évaluation d’ensemble sans pour autant requérir une motivation faisant état de l’analyse systématique de chacun d’entre eux. Or, en l’espèce, la motivation ferait bien apparaître une telle évaluation globale par la mention des quatre critères dans l’avis initial et dans l’avis circonstancié. Elle considère que la motivation était appropriée en ce qu’elle s’est focalisée sur la justification du changement d’appréciation, à savoir le critère des mesures diagnostiques ou thérapeutiques lourdes, tout en faisant l’économie d’une présentation des critères pour lesquels l’appréciation du médecin-conseil n’avait pas évolué de manière assez significative. Ainsi, le fait de se concentrer sur un critère ne signifierait aucunement que les trois autres n’auraient pas été pris en compte.

53      La Commission conclut également au rejet de l’argument du requérant tiré de l’existence d’une contradiction entre le constat de stabilité de l’évolution de la pathologie et le non-renouvellement du statut de maladie grave. Ce constat établirait l’absence d’aggravation de la pathologie du fils du requérant et, de ce fait, l’absence de nécessité de mesures thérapeutiques lourdes.

54      Dans la réplique, le requérant soutient que les arguments invoqués par la Commission au point 37 du mémoire en défense visent à compléter la motivation de la décision attaquée, postérieurement à son adoption, en violation du principe jurisprudentiel en vertu duquel l’absence de motivation d’une décision ne saurait être régularisée à ce stade.

55      En substance, par les arguments litigieux, la Commission fait valoir qu’il ressort de l’avis initial et de l’avis circonstancié que les médecins-conseils du RCAM ont analysé l’état de santé du fils du requérant au regard des quatre critères prévus par le point 1 du chapitre 5 du titre III des DGE.

56      Contrairement à ce qu’affirme le requérant, par ces arguments, la Commission ne complète pas la motivation de la décision attaquée, mais se contente d’interpréter la motivation qui ressort de la lecture conjointe de la décision attaquée, de la décision de rejet de la réclamation, de l’avis initial et de l’avis circonstancié.

57      En premier lieu, le requérant allègue que la décision attaquée ne permet pas de s’assurer que les médecins-conseils se sont livrés à une appréciation globale des quatre critères, sur la base d’un examen concret et circonstancié, tenant compte de leur lien d’interdépendance. En effet, selon lui, la simple référence à l’absence de nécessité de mesures diagnostiques ou thérapeutiques lourdes ne serait pas suffisante.

58      La Commission fait valoir que la motivation était appropriée en ce qu’elle s’est concentrée sur la justification du changement d’appréciation tout en faisant l’économie d’une présentation des critères pour lesquels l’appréciation du médecin-conseil n’avait pas évolué de manière assez significative pour expliquer que son avis soit devenu défavorable.

59      Il convient de constater que l’obligation de motivation, visée à l’article 296 TFUE et à l’article 41, paragraphe 2, sous c), de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, et rappelée à l’article 25 du statut, est un principe essentiel du droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 14 avril 2021, RQ/Commission, T‑29/17 RENV, non publié, EU:T:2021:188, point 86 et jurisprudence citée), qui a pour objectif, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour apprécier le bien-fondé de l’acte lui faisant grief et l’opportunité d’introduire un recours juridictionnel tendant à en contester la légalité et, d’autre part, de permettre au juge de l’Union d’exercer son contrôle (voir arrêt du 23 septembre 2004, Hectors/Parlement, C‑150/03 P, EU:C:2004:555, point 39 et jurisprudence citée).

60      La motivation doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteure de l’acte (arrêt du 19 décembre 2019, Puppinck e.a./Commission, C‑418/18 P, EU:C:2019:1113, point 94 ; voir, également, arrêt du 6 avril 2022, KU/SEAE, T‑425/20, non publié, EU:T:2022:224, point 39 et jurisprudence citée).

61      S’agissant, en particulier, d’une demande de reconnaissance ou de renouvellement du statut de maladie grave, il ressort du point 1 du chapitre 5 du titre III des DGE, rappelé au point 37 ci-dessus, que le médecin-conseil doit porter une appréciation globale sur la gravité des conséquences de la maladie en cause, à l’aune des quatre critères mentionnés dans ladite disposition.

62      Bien que les quatre critères présentent un caractère cumulatif, dans l’examen auquel se livre le médecin-conseil, l’appréciation portée sur l’un des critères est – compte tenu du lien d’interdépendance que le texte prévoit entre ces quatre critères – de nature à moduler l’appréciation qui est portée sur les autres critères. Partant, si l’un des critères peut sembler ne pas être rempli lorsqu’il est examiné de manière isolée, son examen à la lumière de l’appréciation portée sur les autres critères peut aboutir à la conclusion inverse, à savoir que ledit critère est rempli, ce qui interdit au médecin-conseil de se contenter de l’examen d’un seul critère (arrêt du 28 septembre 2011, Allen/Commission, F‑23/10, EU:F:2011:162, point 79).

63      Dès lors, le médecin-conseil ne saurait procéder à l’examen d’une demande de reconnaissance de l’existence d’une maladie grave ou de renouvellement en se bornant à examiner de façon isolée certaines des conditions prévues au point 1 du chapitre 5 du titre III des DGE, voire en limitant ses appréciations aux seules conditions qui ne lui semblent pas être remplies (voir, en ce sens, arrêt du 28 septembre 2011, Allen/Commission, F‑23/10, EU:F:2011:162, point 78).

64      Il s’ensuit que, dans le cadre d’une demande de reconnaissance ou de renouvellement du statut de maladie grave, la motivation de la décision attaquée doit faire apparaître de manière claire et non équivoque l’appréciation globale portée sur la gravité des conséquences de la maladie en cause prenant en compte les quatre critères cumulatifs, mentionnés au point 1 du chapitre 5 du titre III des DGE, dont le lien d’interdépendance implique la modulation de leur appréciation au regard des caractéristiques propres à chaque type d’affection.

65      En outre, dans le cadre d’une demande de renouvellement du statut de maladie grave, le point 3 du chapitre 5 du titre III des DGE prévoit ce qui suit :

« Procédures

[…]

Le bureau liquidateur rappelle en temps utile à l’affilié l’échéance de la couverture afin de lui permettre de présenter une demande de prolongation accompagnée d’un rapport médical précisant :

–        l’évolution de la maladie ;

–        le traitement et/ou la surveillance encore nécessaire.

La décision de couverture à 100 % est examinée périodiquement sur base des informations actualisées sur l’état de santé de la personne et des avancées scientifiques afin de réévaluer si nécessaire le périmètre de la couverture. »

66      En l’espèce, ainsi qu’il ressort du point 6 ci-dessus, la motivation figurant dans la décision attaquée est succincte. En effet, cette dernière fonde le rejet de la demande de renouvellement du régime de maladie grave en s’appuyant uniquement sur la stabilité de l’évolution de la maladie en cause et sur les nouvelles recommandations issues de l’avis du conseil médical du 6 février 2020.

67      Certes, la jurisprudence admet qu’une motivation succincte, qui fait apparaître de façon claire et non équivoque les raisons fondant une décision de l’administration, doit être considérée comme suffisante (voir, en ce sens, arrêt du 22 décembre 2008, Régie Networks, C‑333/07, EU:C:2008:764, point 70). Toutefois, en l’espèce, la motivation de la décision attaquée ne fait pas apparaître de telles raisons de façon claire et non équivoque dans la mesure où l’appréciation globale portée sur la gravité des conséquences de la maladie en cause n’en ressort pas.

68      Cependant, ainsi qu’il ressort du point 26 ci-dessus, la procédure précontentieuse présente un caractère évolutif. Dès lors, selon la jurisprudence rappelée au point 19 ci-dessus, la motivation incluse dans la décision de rejet de la réclamation doit être prise en considération pour l’examen de la légalité de la décision attaquée.

69      En l’espèce, par la décision de rejet de la réclamation, l’AIPN confirme la décision attaquée au motif qu’il ressortirait de l’avis circonstancié que l’état de santé du fils du requérant avait évolué de manière favorable depuis 2013, que le critère se rattachant au besoin de mesures diagnostiques ou thérapeutiques lourdes n’était pas rempli et que le niveau de la forme de la maladie en cause n’atteignait pas le niveau 3 requis au titre de l’avis du conseil médical du 6 février 2020.

70      Force est de constater que la motivation de la décision attaquée, complétée par la décision de rejet de la réclamation, ne formule aucune appréciation sur le critère du pronostic vital défavorable. En outre, aucune appréciation globale n’est portée sur la gravité des conséquences de la maladie en cause à la lumière des quatre critères cumulatifs et de leur lien d’interdépendance, mentionnés au point 1 du chapitre 5 du titre III des DGE, compte tenu des spécificités de cette pathologie. Dès lors, la motivation n’apparaît pas suffisante au sens de la jurisprudence citée au point 60 ci-dessus.

71      Néanmoins, selon la jurisprudence, une motivation par référence, bien que succincte, à un rapport ou à un avis lui-même motivé, peut être admise (voir, en ce sens, arrêts du 19 novembre 1998, Parlement/Gaspari, C‑316/97 P, EU:C:1998:558, points 26 à 29 ; du 11 mai 2000, Pipeaux/Parlement, T‑34/99, EU:T:2000:125, point 18, et du 14 juillet 2021, AI/ECDC, T‑65/19, EU:T:2021:454, point 139), à plus forte raison lorsque, comme en l’espèce, la décision que conteste le fonctionnaire intervient dans un contexte réglementaire dont il a déjà connaissance, notamment en raison de l’introduction de précédentes démarches analogues (voir arrêt du 23 novembre 2010, Marcuccio/Commission, F‑65/09, EU:F:2010:149, point 61 et jurisprudence citée).

72      Dès lors, afin d’apprécier le respect de l’obligation de motivation par la décision attaquée, complétée par la décision de rejet de la réclamation, il convient de prendre en considération non seulement les éléments figurant dans lesdites décisions, mais également l’ensemble des documents qu’elles mentionnent et qui sont connus du requérant, ce qui comprend, outre l’avis initial, l’avis du conseil médical du 6 février 2020 et l’avis circonstancié (ci-après, pris ensemble, les « documents pertinents »).

73      En l’espèce, ainsi qu’il ressort des points 6 à 10 ci-dessus, les critères relatifs à l’évolution chronique de la maladie, à la nécessité de mesures diagnostiques et/ou thérapeutiques lourdes et à la présence d’un handicap grave, qui sont pertinents dans le cadre de la qualification d’une maladie grave, ont été évoqués dans les documents pertinents lus de manière conjointe.

74      Cependant, d’une part, dans le cadre d’une demande de prolongation du statut de maladie grave, ainsi que cela ressort du point 3 du chapitre 5 du titre III des DGE mentionné au point 65 ci-dessus, l’analyse du critère relatif à la nécessité de mesures diagnostiques ou thérapeutiques lourdes doit prendre en compte le traitement ou la surveillance encore nécessaire. Or, en l’espèce, les documents pertinents ne font apparaître aucune motivation, même implicite, ayant trait à l’influence des conditions sanitaires et sociales liées à la pandémie de COVID-19 et du stade de développement particulièrement sensible dans lequel se trouvait le fils du requérant, à savoir l’adolescence, sur l’évolution prévisible de ses besoins futurs, pendant la période de prolongation du statut de maladie grave, et signalés dans le rapport médical daté du 29 octobre 2020.

75      D’autre part, le critère relatif à la présence ou au risque de handicap grave n’a été apprécié qu’en faisant référence au niveau de la forme de la maladie en cause, selon la classification opérée par le DSM-5, comme cela est indiqué dans l’avis du conseil médical du 6 février 2020, sans motivation claire et compréhensible relative au besoin de soutien du fils du requérant et découlant de l’appréciation de la globalité de son état de santé telle qu’exigée au point 1 du chapitre 5 du titre III des DGE lu à la lumière dudit avis.

76      De plus, au regard des rapports médicaux de 2013 et de 2020, le diagnostic porté par le pédopsychiatre sur la maladie en cause faisait référence à plusieurs troubles [confidentiel]. Néanmoins, il ressort de l’avis circonstancié que seul le trouble [confidentiel] aurait évolué de manière favorable. Or, aucun élément figurant dans les documents pertinents ne permet de comprendre la relation entre l’amélioration constatée du trouble [confidentiel] par les médecins-conseils et la gravité globale de la maladie en cause.

77      En outre, tous les éléments figurant dans les documents pertinents n’exposent pas l’appréciation globale, à l’aune de leur lien d’interdépendance, des quatre critères fixés au point 1 du chapitre 5 du titre III des DGE. Dès lors, la motivation de la décision attaquée n’apparait pas suffisante.

78      En second lieu, le requérant considère que la motivation est contradictoire dans la mesure où le médecin-conseil, après avoir souligné la stabilité de l’évolution de la pathologie a conclu, sans autre explication, que « le régime de “maladie grave” (basé sur les quatre critères spécifiques) ne [pouvait] plus être accordé à présent ». Il estime également que la motivation de la décision attaquée est insuffisante dès lors que le médecin-conseil n’a nullement expliqué pourquoi les quatre critères, mentionnés au point 1 du chapitre 5 du titre III des DGE, qui étaient remplis pendant la période 2013-2017, ne l’étaient plus à partir du 28 février 2021.

79      La Commission soutient que l’appréciation globale des quatre critères et de leur lien d’interdépendance exige une évaluation d’ensemble, sans pour autant requérir une motivation faisant état de l’analyse systématique de chacun d’eux. Selon elle, le constat de stabilité de l’évolution de la pathologie du fils du requérant établit l’absence d’aggravation de sa pathologie et, de ce fait, explique l’absence de nécessité de mesures thérapeutiques lourdes.

80      Selon la jurisprudence, la motivation d’une décision s’apprécie au regard non seulement de son libellé, mais également de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. Ainsi, une décision est suffisamment motivée dès lors qu’elle est intervenue dans un contexte connu de l’intéressé qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (voir arrêt du 1er avril 2004, N/Commission, T‑198/02, EU:T:2004:101, point 70 et jurisprudence citée). En outre, l’étendue de l’obligation de motiver doit, dans chaque cas, être appréciée non seulement en considération de la décision qui est attaquée, mais aussi en fonction des circonstances concrètes entourant ladite décision (voir arrêts du 25 octobre 2007, Lo Giudice/Commission, T‑154/05, EU:T:2007:322, point 161 et jurisprudence citée, et du 14 juillet 2021, AI/ECDC, T‑65/19, EU:T:2021:454, point 138 et jurisprudence citée).

81      Compte tenu de cette jurisprudence, la motivation de la décision attaquée doit être appréciée eu égard non seulement aux éléments figurant dans les documents pertinents, mais aussi au contexte dans lequel elle est intervenue.

82      À cet égard, il convient de constater que, par la décision du 3 juin 2013, le bureau liquidateur a reconnu comme maladie grave la pathologie dont était atteint le fils du requérant et lui a accordé le remboursement à 100 % de ses frais médicaux entre le 14 février 2013 et le 21 février 2016. Il est également avéré que, par la décision du 15 décembre 2015, celui-ci a accordé une première prolongation du statut de maladie grave pour le fils du requérant pour la période comprise entre le 22 février 2016 et le 27 février 2021.

83      Ainsi, avant de refuser, par la décision attaquée, d’accorder le statut de maladie grave pour la pathologie du fils du requérant, le bureau liquidateur a fait droit à une telle demande à deux reprises.

84      Partant, selon le bureau liquidateur, pendant la période allant du 14 février 2013 au 27 février 2021, la situation médicale du fils du requérant répondait aux quatre critères posés par le point 1 du chapitre 5 du titre III des DGE pour la reconnaissance du statut de maladie grave.

85      Dans ce contexte, afin de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour apprécier le bien-fondé de l’acte lui faisant grief et l’opportunité d’introduire un recours juridictionnel tendant à en contester la légalité et de permettre au juge de l’Union d’exercer son contrôle, en l’occurrence de s’assurer de l’examen concret et circonstancié de l’état de santé de la personne concernée (voir point 59 ci-dessus), la motivation de la décision attaquée devait faire apparaître clairement les raisons qui avaient conduit au changement d’appréciation sur le caractère grave de la maladie en cause pour le cas du fils du requérant (voir, en ce sens, arrêt du 28 avril 2016, FY/Conseil, F‑76/15, EU:F:2016:83, points 35 et 38).

86      Ainsi, le revirement dans l’appréciation de la nature grave de la pathologie du fils du requérant, après deux décisions favorables, imposait à la Commission de préciser de manière claire et compréhensible les motifs pour lesquels elle s’était écartée de ses décisions précédentes reconnaissant le statut de maladie grave à la maladie en cause.

87      Or, en l’espèce, ce n’est que par des termes vagues et imprécis, faisant référence au niveau de la forme de la maladie en cause, à l’évolution favorable de la situation et au peu de mesures de soutien encore nécessaires, que l’avis circonstancié a expliqué pourquoi il ne retenait plus le statut de maladie grave. À cet égard, il importe de souligner qu’il ne saurait être suffisant d’indiquer uniquement, comme l’a fait l’avis circonstancié, qu’il y avait eu une évolution favorable depuis 2013 sans la caractériser précisément à l’aune des critères retenus dans le point 1 du chapitre 5 du titre III des DGE.

88      En effet, les médecins-conseils n’ont nullement expliqué de manière claire et non équivoque pourquoi, compte tenu de leur lien d’interdépendance, les quatre critères nécessaires à la reconnaissance du statut de maladie grave, qui étaient remplis pendant la période 2013-2021, ne l’étaient plus à partir du 28 février 2021. Ainsi, dans ce contexte particulier, les documents pertinents ne permettent pas de comprendre les faits et considérations revêtant une importance essentielle dans le changement de position sur la reconnaissance du statut de maladie grave pour la maladie en cause.

89      Par conséquent, il découle de ce qui précède que la décision attaquée ne satisfait pas aux exigences de l’obligation de motivation.

90      Partant, il y a lieu d’annuler la décision attaquée sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens invoqués par le requérant, lesquels ne pourraient conduire à une annulation plus étendue de ladite décision.

 Sur les dépens

91      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions du requérant.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision du 11 décembre 2020 par laquelle la Commission européenne a rejeté la demande de renouvellement du régime de maladie grave pour la pathologie du fils de IR est annulée.

2)      La Commission est condamnée aux dépens.

Truchot

Frendo

Sampol Pucurull

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 17 mai 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : le français.


1 Données confidentielles occultées.