Language of document : ECLI:EU:C:2023:832

ORDONNANCE DE LA COUR (chambre d’admission des pourvois)

7 novembre 2023 (*)

« Pourvoi – Marque de l’Union européenne – Admission des pourvois – Article 170 ter du règlement de procédure de la Cour – Demande ne démontrant pas l’importance d’une question pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union – Non-admission du pourvoi »

Dans l’affaire C‑473/23 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 24 juillet 2023,

Bimbo, SA, établie à Madrid (Espagne), représentée par Me J. Carbonell Callicó, abogado,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO),

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (chambre d’admission des pourvois)

composée de M. L. Bay Larsen, vice‑président de la Cour, MM. P. G. Xuereb et A. Kumin (rapporteur), juges,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la proposition du juge rapporteur et l’avocate générale, Mme T. Ćapeta, entendue,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, Bimbo, SA, demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 24 mai 2023, Bimbo/EUIPO – Bottari Europe (BimboBIKE), T‑509/22, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2023:281), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), du 16 juin 2022 (affaire R 2110/2021-1), relative à un procédure d’opposition entre Bimbo et Bottari Europe Srl.

 Sur la demande d’admission du pourvoi

2        En vertu de l’article 58 bis, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, l’examen des pourvois formés contre les décisions du Tribunal portant sur une décision d’une chambre de recours indépendante de l’EUIPO est subordonné à leur admission préalable par la Cour.

3        Conformément à l’article 58 bis, troisième alinéa, de ce statut, le pourvoi est admis, en tout ou en partie, selon les modalités précisées dans le règlement de procédure de la Cour, lorsqu’il soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

4        Aux termes de l’article 170 bis, paragraphe 1, du règlement de procédure, dans les situations visées à l’article 58 bis, premier alinéa, dudit statut, la partie requérante annexe à sa requête une demande d’admission du pourvoi dans laquelle elle expose la question importante que soulève le pourvoi pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et qui contient tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur cette demande.

5        Conformément à l’article 170 ter, paragraphes 1 et 3, du règlement de procédure, la Cour statue sur la demande d’admission du pourvoi dans les meilleurs délais par voie d’ordonnance motivée.

 Argumentation de la partie requérante

6        À l’appui de sa demande d’admission du pourvoi, la requérante présente trois moyens par lesquels elle fait valoir que le Tribunal a violé l’article 8, paragraphe 5, du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

7        En premier lieu, la requérante reproche au Tribunal d’avoir, aux points 32 à 34 de l’arrêt attaqué, commis une erreur en n’admettant pas la renommée et le caractère distinctif exceptionnel de la marque BIMBO. Cette erreur aurait eu une incidence immédiate sur l’application et sur l’interprétation correctes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 ainsi que, partant, sur le niveau de protection accordé à cette marque. Selon la requérante, en ne tenant pas compte de l’étendue considérable de la renommée de la marque, le Tribunal a mis en péril la protection renforcée dont les marques exceptionnellement notoires bénéficient en vertu de cet article 8, paragraphe 5.

8        En deuxième lieu, la requérante soutient que le Tribunal a, aux points 35 à 38 et 41 à 43 de l’arrêt attaqué, omis d’établir un lien entre les marques en conflit, violant ainsi ledit article 8, paragraphe 5. En outre, l’interprétation du Tribunal risquerait de dénaturer l’intention du législateur de l’Union et la signification de cette disposition, en traitant les marques renommées de la même façon que celles qui ne le sont pas. Cela pourrait avoir des effets lourds de conséquences pour la protection des marques au sein de l’Union.

9        En troisième et dernier lieu, la requérante fait valoir que, aux points 44 à 56 de l’arrêt attaqué, le Tribunal n’a pas appliqué la jurisprudence pertinente concernant le préjudice porté aux marques, en particulier en ce qui concerne l’exploitation déloyale et la dilution du caractère distinctif. En particulier, en s’abstenant d’admettre l’atteinte potentielle à la renommée et au caractère distinctif de la marque BIMBO, le Tribunal, d’une part, n’aurait pas respecté les principes fondamentaux de la protection des marques et, d’autre part, aurait assimilé une marque notoire à une marque ordinaire, compromettant ainsi l’interprétation cohérente de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001.

10      À cet égard, selon la requérante, il est impératif de sauvegarder la renommée et le caractère distinctif de la marque BIMBO et de faire respecter les principes fondamentaux de la protection des marques notoires au sein de l’Union.

 Appréciation de la Cour

11      À titre liminaire, il convient de relever que c’est au requérant qu’il incombe de démontrer que les questions soulevées par son pourvoi sont importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnances du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C‑382/21 P, EU:C:2021:1050, point 20, et du 11 juillet 2023, EUIPO/Neoperl, C‑93/23 P, EU:C:2023:601, point 18).

12      En outre, ainsi qu’il ressort de l’article 58 bis, troisième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, lu en combinaison avec l’article 170 bis, paragraphe 1, et l’article 170 ter, paragraphe 4, du règlement de procédure, la demande d’admission du pourvoi doit contenir tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur l’admission du pourvoi et de déterminer, en cas d’admission partielle de ce dernier, les moyens ou les branches du pourvoi sur lesquels le mémoire en réponse doit porter. En effet, étant donné que le mécanisme d’admission préalable des pourvois visé à l’article 58 bis de ce statut tend à limiter le contrôle de la Cour aux questions revêtant une importance pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, seuls les moyens soulevant de telles questions et établis par le requérant doivent être examinés par la Cour dans le cadre du pourvoi (ordonnances du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C‑382/21 P, EU:C:2021:1050, point 21, et du 11 juillet 2023, EUIPO/Neoperl, C‑93/23 P, EU:C:2023:601, point 19).

13      Ainsi, une demande d’admission du pourvoi doit, en tout état de cause, énoncer de façon claire et précise les moyens sur lesquels le pourvoi est fondé, identifier avec la même précision et la même clarté la question de droit soulevée par chaque moyen, préciser si cette question est importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et exposer de manière spécifique les raisons pour lesquelles ladite question est importante au regard du critère invoqué. En ce qui concerne, en particulier, les moyens du pourvoi, la demande d’admission du pourvoi doit préciser la disposition du droit de l’Union ou la jurisprudence qui aurait été méconnue par l’arrêt ou l’ordonnance sous pourvoi, exposer de manière succincte en quoi consiste l’erreur de droit prétendument commise par le Tribunal et indiquer dans quelle mesure cette erreur a exercé une influence sur le résultat de l’arrêt ou l’ordonnance sous pourvoi. Lorsque l’erreur de droit invoquée résulte de la méconnaissance de la jurisprudence, la demande d’admission du pourvoi doit exposer, de façon succincte mais claire et précise, premièrement, où se situe la contradiction alléguée, en identifiant tant les points de l’arrêt ou de l’ordonnance sous pourvoi que le requérant met en cause que ceux de la décision de la Cour ou du Tribunal qui auraient été méconnus, et, deuxièmement, les raisons concrètes pour lesquelles une telle contradiction soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnances du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C‑382/21 P, EU:C:2021:1050, point 22, et du 11 juillet 2023, EUIPO/Neoperl, C‑93/23 P, EU:C:2023:601, point 20).

14      En effet, une demande d’admission du pourvoi ne contenant pas les éléments énoncés au point précédent de la présente ordonnance ne saurait, d’emblée, être susceptible de démontrer que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union justifiant son admission (ordonnances du 24 octobre 2019, Porsche/EUIPO, C‑613/19 P, EU:C:2019:905, point 16, et du 26 septembre 2023, Mordalski/EUIPO, C-321/23P, EU:C:2023:705, point 13).

15      En l’occurrence, s’agissant, en premier lieu, de l’argumentation résumée au point 7 de la présente ordonnance, force est de constater que, par cette argumentation, la requérante cherche à remettre en cause l’appréciation des faits et des éléments de preuve effectuée par le Tribunal quant à la renommée de la marque BIMBO. Or, une telle argumentation ne saurait démontrer que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (voir, en ce sens, ordonnance du 22 juin 2022, Legero Schuhfabrik/EUIPO, C‑152/22 P, non publiée, EU:C:2022:500, point 21 et jurisprudence citée).

16      En ce qui concerne, en second lieu, l’argumentation résumée aux points 8 à 10 de la présente ordonnance, il importe de relever que, bien que la requérante identifie l’erreur de droit prétendument commise par le Tribunal, elle n’explique pas, à suffisance de droit, ni, a fortiori, ne démontre, d’une manière respectant l’ensemble des exigences énoncées au point 13 de la présente ordonnance, en quoi son pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, qui justifierait l’admission du pourvoi.

17      En effet, la partie requérante doit démontrer que, indépendamment des questions de droit qu’elle invoque dans son pourvoi, ce dernier soulève une ou plusieurs questions importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, la portée de ce critère dépassant le cadre de l’arrêt ou l’ordonnance sous pourvoi et, en définitive, celui de son pourvoi. Cette démonstration implique elle-même d’établir tant l’existence que l’importance de telles questions, au moyen d’éléments concrets et propres au cas d’espèce, et non pas simplement d’arguments d’ordre général (ordonnance du 17 juillet 2023, Puma/EUIPO, C‑145/23 P, EU:C:2023:597, point 21).

18      Or, en l’espèce, les simples allégations de la requérante selon lesquelles, en raison de prétendues erreurs commises par le Tribunal, premièrement, l’intention du législateur de l’Union ainsi que la signification de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 risqueraient d’être dénaturées, ce qui pourrait avoir des effets lourds de conséquences pour la protection des marques au sein de l’Union, deuxièmement, les principes fondamentaux de la protection des marques notoires seraient violés, et, troisièmement, l’interprétation cohérente de cette disposition serait compromise, sont manifestement trop générales pour constituer une telle démonstration.

19      Dans ces conditions, il convient de constater que la demande présentée par la requérante n’est pas de nature à établir que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

20      Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de ne pas admettre le pourvoi.

 Sur les dépens

21      Aux termes de l’article 137 du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance.

22      La présente ordonnance étant adoptée avant que le pourvoi n’ait été signifié à l’autre partie à la procédure et, par conséquent, avant que celle-ci n’ait pu exposer des dépens, il convient de décider que la requérante supportera ses propres dépens.

Par ces motifs, la Cour (chambre d’admission des pourvois) ordonne :

1)      Le pourvoi n’est pas admis.

2)      Bimbo, SA, supporte ses propres dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.