Language of document : ECLI:EU:T:2021:121

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

10 mars 2021 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale PUMA-System – Marques de l’Union européenne figuratives antérieures PUMA – Motif relatif de refus – Atteinte à la renommée – Article 8, paragraphe 5, du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 5, du règlement (UE) 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑71/20,

Puma SE, établie à Herzogenaurach (Allemagne), représentée par Me P. González-Bueno Catalán de Ocón, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. D. Gája et V. Ruzek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

CAMäleon Produktionsautomatisierung GmbH, établie à Dettenhausen (Allemagne),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’EUIPO du 27 novembre 2019 (affaire R 404/2019-1), relative à une procédure d’opposition entre Puma et CAMäleon Produktionsautomatisierung,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de Mme A. Marcoulli (rapporteure), présidente, MM. J. Schwarcz et C. Iliopoulos, juges,

greffier : Mme J. Pichon, administratrice,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 6 février 2020,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 22 avril 2020,

à la suite de l’audience du 21 octobre 2020,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 1er juin 2017, CAMäleon Produktionsautomatisierung GmbH a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal PUMA-System.

3        Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 7, 9, 16 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 7 : « Machines-outils pour le travail et la découpe de profilés ; coupeuses [machines] et scies circulaires pour le bois et les alliages légers ; moteurs (à l’exception des moteurs pour véhicules terrestres) ; accouplements et organes de transmission (à l’exception de ceux pour véhicules terrestres) ; machines à emballer ; magasins automatiques ; robots ; machines pour le traitement du PVC ; tournevis électrique ; machines pour la peinture ; machines pour la production de portes ; machines pour l’assemblage de composants de menuiseries ; machines de traitement de profilés en alu, en plastique et en acier, en particulier pour l’industrie des fenêtres, des portes et des façades ; scies de table et à onglet ; scies à double onglet ; scies automatiques ; scies de découpe de rainures et d’encoches ; fraiseuses ; fraiseuses-finisseuses ; fraiseuses à encocher et encocheuses automatiques ; fraiseuses de fentes d’eau ; presses de joints d’angle ; centres d’usinage de barres ; machines à souder ; machines à crépir ; lignes de soudure et d’enduisage ; cintreuses y compris les fours et installations de cintrage ; installations de vissage pour les armatures de profilés ; machines à forer, installations de forage ; estampage ; butées pour les machines de traitement de profilés en alu, en plastique et en acier ; bocs de montage et tables de montage ; tables rotatives ; guides de scie pour scies circulaires à table ; machines-outils à travailler les métaux » ;

–        classe 9 : « Matériel informatique ; logiciels ; matériel et logiciels de gestion de cycles et d’installations de production de portes ; supports magnétiques et optiques de données ; programmes d’ordinateurs enregistrés ; ordinateurs ; périphériques informatiques ; matériel et logiciels d’automatisation ; matériel et logiciels pour la gestion de machines-outils ; systèmes de gestion d’entrepôts ; systèmes de gestion d’installations pour la production de portes ; systèmes de communication de données relatives à la production, à l’assemblage, au stockage, à l’expédition de portes ; systèmes automatiques de déplacement pour installations pour la production de portes ; téléphones portables ; ordinateurs portables ; imprimantes d’ordinateurs ; programmes pour ordinateurs personnels, pour téléphones portables et pour ordinateurs portables ; détecteurs de chaleur ; indicateurs de niveau ; casques d’écoute ; écouteurs ; câbles pour ordinateurs, pour téléphones cellulaires et pour ordinateurs de poche ; lecteurs de codes-barres ; instruments de mesure ; programmes pour ordinateurs ; logiciel de conception assistée par ordinateur (CAO) ; logiciels pour la prévision, la vente, la conception et la production de menuiseries et de façades continues ; logiciels pour la programmation et la gestion de machines-outils ; logiciels pour le contrôle de la production et l’automatisation industrielle ; programmes pour ordinateurs pour la prévision, la vente, la conception et la production de menuiseries et de façades continues ; programmes pour ordinateurs pour la programmation et la gestion de machines-outils ; programmes pour ordinateurs pour le contrôle de la production et l’automatisation industrielle ; logiciels de gestion de cycles et d’installations de production de portes ; programmes pour ordinateurs pour la gestion de cycles et d’installations de production de menuiseries ; ordinateurs ; périphériques adaptés pour utilisation avec des ordinateurs ; supports magnétiques et optiques de données ; équipement pour le traitement des données et ordinateurs » ;

–        classe 16 : « Catalogues relatifs aux logiciels ; modes d’emploi de logiciels ; manuels d’instruction ; manuels d’instruction pour ordinateurs, pour téléphones cellulaires et pour ordinateurs de poche ; manuels d’instruction pour la certification de portes ; formulaires imprimés ; produits de l’imprimerie pour la promotion et la vente de logiciels pour la conception, la production et/ou la vente de portes, de fenêtres et de cloisons ; produits de l’imprimerie pour la promotion et la vente de logiciels pour la gestion de machines-outils, le contrôle de la production et l’automatisation industrielle ; livres ; manuels d’utilisation (guides) pour programmes pour ordinateurs pour la conception, la production et/ou la vente de portes, de fenêtres et de cloisons ; manuels d’utilisation (guides) pour programmes pour ordinateurs pour la gestion de machines-outils, le contrôle de la production et l’automatisation industrielle » ;

–        classe 42 : « Mise à jour et entretien de logiciels et de programmes informatiques ; configuration de matériel informatique par le biais de logiciels ; configuration de réseaux informatiques par le biais de logiciels ; configuration de logiciels ; conseils en matériel et logiciels informatiques ; création, entretien, manutention et adaptation de logiciels ; installation, maintenance, mise à jour et mise à niveau de logiciels ; services d’intégration de systèmes informatiques ; location de matériel informatique et de logiciels ; conception, développement et mise en service de logiciels ; recherche en matière de logiciels ; services d’assistance technique en matière de logiciels ; études de projets techniques dans le domaine du matériel informatique et des logiciels ; développement de programmes informatiques enregistrés sur des supports de données (logiciels) destinés à la construction et à la fabrication automatisée (CAO/FAO) ; développement de logiciels informatiques pour la conception assistée par ordinateur/la fabrication assistée par ordinateur (CAO/FAO) ; mise à niveau de logiciels ; développement et test de méthodes, d’algorithmes et de logiciels informatiques ; programmation informatique ; tests, analyses et évaluations de produits et services de tiers à des fins de certification ; programmation pour ordinateurs concernant des applications pour la conception, la production et/ou la vente de portes, de fenêtres et de cloisons ; programmation pour ordinateurs concernant des applications pour la gestion de machines-outils, le contrôle de la production et l’automatisation industrielle ; création de programmes pour le traitement de données. »

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 2017/138, du 24 juillet 2017.

5        Le 24 octobre 2017, la requérante, Puma SE, a formé opposition, au titre de l’article 46 du règlement 2017/1001, à l’enregistrement de la marque demandée pour tous les produits et services visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était notamment fondée sur les droits antérieurs suivants :

–        la marque de l’Union européenne figurative reproduite ci-après, enregistrée le 30 juin 2014 sous le numéro 12579728 pour des produits compris dans les classes 18, 25 et 28 et correspondant, pour chacune de ces classes, notamment à la description suivante :

–        classe 18 : « Cuir et imitations du cuir, y compris articles en cuir et en imitations du cuir, à savoir […] sacs, […] sacs de sport multifonctionnels, […] sacs de sport, […] sacs de gym, […] » ;

–        classe 25 : « Vêtements, chaussures, chapellerie » ;

–        classe 28 : « Jeux, jouets, appareils de gymnastique et de sport, articles de gymnastique et de sport (compris dans la classe 28) ; appareils de ski et de tennis ; […] » ;

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–        la marque de l’Union européenne figurative reproduite ci-après, enregistrée le 30 juin 2014 sous le numéro 12579694 pour des produits compris dans les classes 18, 25 et 28 et correspondant, pour chacune de ces classes, notamment à la description suivante :

–        classe 18 : « Cuir et imitations du cuir, ainsi que produits en cuir et en imitation du cuir, à savoir […] sacs, […] sacs de sport tous usages, […] sacs de sport, […] sacs de gymnastique, […] » ;

–        classe 25 : « Vêtements, chaussures, chapellerie » ;

–        classe 28 : « Jeux, jouets, appareils de gymnastique et de sport, articles de gymnastique et de sport (compris dans la classe 28) ; appareils de ski et de tennis ; […] » ;

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7        Au soutien de l’opposition, la requérante s’est prévalue de la renommée dans l’Union européenne des deux marques de l’Union européenne antérieures mentionnées au point 6 ci-dessus (ci-après, respectivement, la « première marque antérieure », la « seconde marque antérieure » et, ensemble, les « marques antérieures ») pour tous les produits désignés par ces marques.

8        Le 17 décembre 2018, la division d’opposition a rejeté l’opposition dans son intégralité, au motif, en substance, qu’il était improbable que le public établisse un lien entre les signes en conflit.

9        Le 15 février 2019, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 27 novembre 2019 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’EUIPO a annulé la décision de la division d’opposition dans la mesure où elle avait rejeté l’opposition en tant que la marque demandée désignait les « casques d’écoute », les « écouteurs », les « logiciels », les « programmes d’ordinateurs enregistrés », les « téléphones portables », les « ordinateurs portables », les « programmes pour ordinateurs personnels, pour téléphones portables et pour ordinateurs portables », les « câbles pour ordinateurs, pour téléphones cellulaires et pour ordinateurs de poche » et les « programmes pour ordinateurs », relevant de la classe 9. La chambre de recours a rejeté le recours pour le surplus.

11      En substance, fondant son analyse sur les marques antérieures, tout d’abord, la chambre de recours a considéré qu’elles jouissaient d’une très forte renommée concernant les produits couverts relevant de la classe 25 ainsi que certains produits couverts relevant des classes 18 et 28. Ensuite, elle a considéré que les marques antérieures étaient intrinsèquement distinctives et que ce caractère distinctif était d’autant plus fort que ces marques étaient uniques. Elle a également relevé que, à l’exception de la similitude visuelle, qualifiée de moyenne, entre la marque demandée et la seconde marque antérieure, le degré de similitude des signes en conflit sur les plans visuel, phonétique et conceptuel était à tout le moins moyen. Elle a en outre considéré, au vu des éléments de preuve produits par la requérante dans le cadre du recours, que, s’il n’existait aucun lien évident entre les produits et les services désignés par les marques en conflit, une proximité devait néanmoins être constatée entre les produits désignés par les marques antérieures et les produits visés par la marque demandée mentionnés au point 10 ci-dessus, relevant de la classe 9. La chambre de recours en a déduit qu’un lien pouvait exister entre les marques en conflit en tant que la marque demandée désignait ces produits. Dans cette mesure, tenant compte en particulier de la grande renommée des marques antérieures, elle a estimé que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait un profit indu du caractère distinctif et de la renommée des marques antérieures. En revanche, en tant que la marque demandée visait les autres produits et services, elle a considéré que la requérante n’avait pas expliqué la raison pour laquelle le public pertinent auquel s’adressaient respectivement les marques en conflit, qui appartenait à deux groupes cibles totalement différents, établirait un lien entre ces marques, lesquelles n’étaient pas identiques et visaient des produits ne présentant pas le moindre lien. Selon la chambre de recours, la renommée des marques antérieures et la similitude des signes en conflit ne suffisaient pas, à elles seules, à établir l’existence de l’une des atteintes visées à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009.

 Conclusions des parties

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

13      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        accueillir le recours en tant que la chambre de recours a rejeté l’opposition en tant que la marque demandée désigne le « matériel informatique », les « ordinateurs » et les « équipements pour le traitement des données et ordinateurs » compris dans la classe 9 ;

–        rejeter le recours pour le surplus ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

14      Compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 1er juillet 2017, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009 (voir, en ce sens, arrêts du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C‑591/12 P, EU:C:2014:305, point 12, et du 18 juin 2020, Primart/EUIPO, C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 2 et jurisprudence citée). Par ailleurs, dans la mesure où, selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à la date à laquelle elles entrent en vigueur (voir arrêt du 11 décembre 2012, Commission/Espagne, C‑610/10, EU:C:2012:781, point 45 et jurisprudence citée), le litige est régi par les dispositions procédurales du règlement 2017/1001.

15      Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites par la requérante et par l’EUIPO dans leur argumentation à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et à l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 comme visant l’article 8, paragraphe 1, sous b), et l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, tel que modifié, d’une teneur identique.

16      Le Tribunal rappelle également que, dans une procédure de recours en matière de marque de l’Union européenne dirigé contre la décision d’une chambre de recours, rien ne s’oppose à ce que l’EUIPO se rallie aux conclusions de la requérante tout en présentant tous les arguments qu’il estime appropriés du fait de sa mission relative à l’administration du droit de la marque de l’Union européenne et de l’indépendance fonctionnelle reconnue aux chambres de recours dans l’exercice de leurs tâches [voir arrêt du 6 juin 2018, Glaxo Group/EUIPO – Celon Pharma (SALMEX), T‑803/16, non publié, EU:T:2018:330, point 20 et jurisprudence citée].

17      En l’espèce, il y a donc lieu de considérer que, par son premier chef de conclusions, l’EUIPO se rallie aux conclusions de la requérante en ce qui concerne certains produits visés par la marque demandée.

18      À l’appui du recours, qui, ainsi que cela a été confirmé à l’audience, tend à l’annulation partielle de la décision attaquée en tant qu’elle confirme la décision de la division d’opposition, la requérante soulève, en substance, un moyen unique tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 en lien avec une violation du principe de bonne administration, une insuffisance de motivation de la décision attaquée, une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 ainsi qu’une violation des articles 94, paragraphe 1, et 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001.

19      En substance, le moyen unique s’articule en trois branches, tirées des irrégularités dont serait entachée la décision attaquée en ce qui concerne, premièrement, la comparaison des produits et des services en cause, deuxièmement, la comparaison des signes en conflit et, troisièmement, l’existence d’un profit indu tiré du caractère distinctif ou de la renommée des marques antérieures ou d’un préjudice porté à ceux-ci.

20      À titre liminaire, il y a lieu de relever que, aux termes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, dans sa version modifiée par le règlement (UE) 2015/2424 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015 (JO 2015, L 341, p. 21), sur opposition du titulaire d’une marque antérieure enregistrée au sens du paragraphe 2 de cet article, la marque demandée est refusée à l’enregistrement si elle est identique ou similaire à une marque antérieure, indépendamment du fait que les produits ou services pour lesquels elle est demandée sont identiques, similaires ou non similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque cette marque antérieure est une marque de l’Union européenne qui jouit d’une renommée dans l’Union ou une marque nationale qui jouit d’une renommée dans l’État membre concerné, et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de cette marque antérieure ou leur porterait préjudice.

21      S’agissant du risque visé par l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, il convient de relever que, si, certes, la fonction première d’une marque consiste en sa fonction d’origine, il n’en demeure pas moins qu’une marque agit également comme moyen de transmission d’autres messages concernant, notamment, les qualités ou caractéristiques particulières des produits ou des services qu’elle désigne, ou les images et sensations qu’elle projette. En ce sens, toute marque possède une valeur économique intrinsèque autonome et distincte par rapport à celle des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée. Les messages véhiculés notamment par une marque renommée ou qui lui sont associés confèrent à celle-ci une valeur importante et digne de protection, et ce d’autant plus que, dans la plupart des cas, la renommée d’une marque est le résultat d’efforts et d’investissements considérables de son titulaire. Ainsi, l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 assure la protection d’une marque renommée à l’égard de toute demande de marque identique ou similaire qui pourrait porter atteinte à son image, même si les produits visés par la marque demandée ne sont pas analogues à ceux pour lesquels la marque antérieure a été enregistrée [arrêt du 22 mars 2007, Sigla/OHMI – Elleni Holding (VIPS), T‑215/03, EU:T:2007:93, point 35].

22      Il ressort du libellé de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 que l’application de cette disposition est soumise aux conditions cumulatives tenant, premièrement, à l’identité ou à la similitude des marques en conflit, deuxièmement, à l’existence d’une renommée de la marque antérieure invoquée à l’appui de l’opposition et, troisièmement, à l’existence d’un risque de voir l’usage sans juste motif de la marque demandée tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou leur porter préjudice (voir arrêt du 28 juin 2018, EUIPO/Puma, C‑564/16 P, EU:C:2018:509, point 54 et jurisprudence citée).

23      C’est à la lumière de ces considérations liminaires qu’il convient d’examiner les trois branches du moyen unique tiré de la violation de l’article 8 paragraphe 5, du règlement no 207/2009, en commençant par la deuxième branche.

 Sur la deuxième branche relative à la comparaison des signes en conflit

24      La requérante fait valoir que c’est à tort que la chambre de recours a conclu à la similitude moyenne ou à tout le moins moyenne des signes en conflit. Elle soutient, premièrement, que l’expression « à tout le moins similaire à un degré moyen » ne constitue pas un concept précis, exact et univoque et que l’absence de détermination claire du degré de similitude entre les signes en conflit constitue une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 et des directives de l’EUIPO. Deuxièmement, en substance, la requérante fait valoir l’incohérence entre les constats opérés par la chambre de recours et sa conclusion quant au degré de similitude entre les signes en conflit, en particulier s’agissant de l’appréciation de la similitude conceptuelle de ces signes, ainsi que l’absence d’indication quant aux raisons pour lesquelles la chambre de recours s’est écartée des conclusions de la division d’opposition, cette absence de justification constituant une atteinte aux principes de bonne administration et d’égalité de traitement ainsi qu’une insuffisance de motivation. Troisièmement, l’appréciation du degré de similitude des signes en conflit serait erronée sur le fond et la décision attaquée méconnaîtrait l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 dès lors que la chambre de recours a mis en cause le degré de similitude des signes retenu par la division d’opposition alors qu’il n’était pas contesté par la requérante.

25      L’EUIPO fait valoir que le grief tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 est inopérant. Il soutient également que la conclusion de la chambre de recours quant au degré de similitude des signes en conflit est correcte et souligne que, si l’expression « à tout le moins à un degré moyen » n’est pas totalement précise, d’une part, elle n’exclut pas un niveau de similitude élevé entre les signes et, d’autre part, une conclusion plus précise n’était pas requise dès lors que le rejet partiel de l’opposition n’était pas fondé sur l’appréciation opérée à cet égard. Il estime, pour la même raison, que le grief tiré de la violation de l’article 95 du règlement 2017/1001 n’est pas fondé et relève en outre, à cet égard, que la chambre de recours devait réexaminer l’appréciation de la division d’opposition quant au degré de similitude des signes en conflit alors même que celle-ci n’était pas contestée par la requérante.

26      À titre liminaire, il y a lieu de relever que l’existence d’une similitude entre la marque antérieure et la marque demandée constitue une condition d’application commune aux paragraphes 1, sous b), et 5 de l’article 8 du règlement no 207/2009 (arrêt du 24 mars 2011, Ferrero/OHMI, C‑552/09 P, EU:C:2011:177, point 51) et il ne ressort ni du libellé des paragraphes 1, sous b), et 5 de l’article 8 du règlement no 207/2009 ni de la jurisprudence que la notion de similitude revêt un sens différent dans chacun de ces paragraphes (arrêt du 10 décembre 2015, El Corte Inglés/OHMI, C‑603/14 P, EU:C:2015:807, point 39). Certes, le degré de similitude requis dans le cadre de l’une et de l’autre desdites dispositions est différent. En effet, tandis que la mise en œuvre de la protection instaurée par l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 est subordonnée à la constatation d’un degré de similitude entre les marques en conflit tel qu’il existe, dans l’esprit du public concerné, un risque de confusion entre celles-ci, l’existence d’un tel risque n’est pas requise pour la protection conférée par le paragraphe 5 du même article. Ainsi, les atteintes visées à ce paragraphe 5 peuvent être la conséquence d’un degré moindre de similitude entre les marques antérieure et postérieure, pour autant que celui-ci est suffisant pour que le public concerné effectue un rapprochement entre lesdites marques, c’est-à-dire établit un lien entre celles-ci (voir arrêt du 24 mars 2011, Ferrero/OHMI, C‑552/09 P, EU:C:2011:177, point 53 et jurisprudence citée).

27      Par ailleurs, l’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (voir arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43 et jurisprudence citée). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

28      En l’espèce, dans la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que la première marque antérieure était composée du seul élément verbal « puma », considéré comme distinctif et dominant dès lors que sa légère stylisation serait, tout au plus, considérée comme décorative. S’agissant de la seconde marque antérieure, la chambre de recours a constaté qu’elle était composée de l’élément verbal « puma », considéré comme distinctif, et d’un élément figuratif représentant un félin bondissant, qu’elle n’a pas considéré comme dominant. Quant à la marque demandée, la chambre de recours a estimé que le premier élément verbal, « puma », était dominant compte tenu de sa position dans le signe et de son caractère distinctif, alors que le second élément verbal, « system », possédait un caractère distinctif faible. Elle en a déduit que le public concentrerait principalement, si ce n’est exclusivement, son attention sur le terme « puma ».

29      La chambre de recours a ensuite constaté que, sur le plan visuel, les signes en conflit concordaient en leur élément dominant. Elle en a déduit que la marque demandée et la première marque antérieure étaient visuellement similaires à tout le moins à un degré moyen, cette similitude étant simplement d’un degré moyen quant à la seconde marque antérieure, compte tenu de la présence dans cette dernière du félin bondissant. Sur le plan phonétique, la chambre de recours a relevé, outre la concordance des signes par l’élément verbal « puma », que l’élément verbal « system » de la marque demandée pourrait ne pas être prononcé. Elle en a déduit l’existence d’une similitude à tout le moins à un degré moyen. Un degré de similitude identique a été retenu sur le plan conceptuel, après que la chambre de recours eut relevé que les signes en conflit partageaient le concept distinctif du puma.

30      Premièrement, la requérante fait valoir la violation de l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, aux termes duquel, « [a]u cours de la procédure, l’[EUIPO] procède à l’examen d’office des faits ; toutefois, dans une procédure concernant des motifs relatifs de refus d’enregistrement, l’examen est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties ».

31      À cet égard, il convient de relever que, par l’effet du recours dont elle est saisie, la chambre de recours est appelée à procéder à un nouvel examen complet du fond de l’opposition, tant en droit qu’en fait (voir arrêt du 4 mars 2020, Tulliallan Burlington/EUIPO, C‑155/18 P à C‑158/18 P, EU:C:2020:151, point 97 et jurisprudence citée). En l’espèce, la chambre de recours a procédé à un nouvel examen du fond de l’opposition, tant en droit qu’en fait, sans que l’étendue de son examen ait été limitée par les arguments invoqués à l’appui du recours. À cette fin, elle a analysé les différents critères prévus à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 afin de déterminer s’il était satisfait à ceux-ci. Le degré de similitude des signes en conflit étant l’un de ces critères, la chambre de recours a procédé à bon droit à sa propre analyse en ce qui concerne celui-ci.

32      Par ailleurs, la requérante peut être regardée comme soutenant que, avant d’adopter, dans la décision attaquée, une position différente de celle de la division d’opposition, laquelle avait considéré que les signes en conflit étaient fortement similaires sur les plans visuel et phonétique et, à tout le moins fortement similaires sur le plan conceptuel, la chambre de recours aurait dû lui donner la possibilité de présenter ses observations. Or, il y a lieu de relever que, selon la requérante elle-même, l’expression « similaires […] à tout le moins à un degré moyen » inclut notamment les forte et très forte similitudes. Partant, si la chambre de recours a retenu une formulation moins précise que celle de la division d’opposition, elle n’a pas, en substance, remis en cause les conclusions de cette dernière.

33      En tout état de cause, il y a lieu de relever que l’article 94, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement 2017/1001 dispose que les décisions de l’EUIPO ne peuvent être fondées que sur des motifs ou des preuves au sujet desquels les parties ont pu prendre position. Cette disposition énonce le droit d’être entendu dans la procédure devant l’EUIPO.

34      Ce droit s’étend à tous les éléments de fait ou de droit qui constituent le fondement de l’acte décisionnel, mais non pas à la position finale que l’administration entend adopter. Il ne commande pas non plus que, avant d’adopter sa position finale sur l’appréciation des éléments présentés par une partie, la chambre de recours de l’EUIPO soit tenue d’offrir à cette partie une nouvelle possibilité de s’exprimer au sujet desdits éléments (voir arrêt du 4 mars 2020, Tulliallan Burlington/EUIPO, C‑155/18 P à C‑158/18 P, EU:C:2020:151, point 94 et jurisprudence citée).

35      En l’espèce, la requérante a invoqué l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 au soutien de son opposition et elle ne conteste pas qu’elle a pu présenter, à cet égard, l’ensemble des arguments et des éléments de preuve qu’elle estimait pertinents. Par conséquent, la chambre de recours n’était pas tenue de l’entendre une nouvelle fois sur le degré de similitude des marques en conflit avant de livrer sa propre appréciation à cet égard dans la décision attaquée [voir, en ce sens, arrêt du 8 mai 2018, Luxottica Group/EUIPO – Chen (BeyBeni), T‑721/16, non publié, EU:T:2018:264, points 23 à 25]. Partant, la décision attaquée n’a pas porté atteinte au droit de la requérante d’être entendue ni à ses droits de la défense.

36      Deuxièmement, dans la mesure où, ainsi que cela a été constaté au point 32 ci-dessus, la chambre de recours n’a pas remis en cause, en substance, les conclusions de la division d’opposition, la requérante n’est pas fondée à faire valoir un défaut de motivation de la décision attaquée quant aux raisons d’une divergence d’appréciation.

37      Troisièmement, la requérante conteste l’absence de conclusion claire de la chambre de recours quant au degré de similitude entre les signes en conflit. Elle soutient que le concept de similitude « à tout le moins à un degré moyen » est équivoque dès lors qu’il pourrait englober toute similitude allant de supérieure à la moyenne à extraordinairement élevée, voire même l’identité des signes.

38      En tant que la requérante soutient qu’une telle imprécision caractériserait une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, il y a lieu d’écarter cet argument comme inopérant, ainsi que le fait valoir l’EUIPO, dès lors que l’opposition, fondée sur le seul article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, a été examinée par la chambre de recours exclusivement au regard de cette disposition. La requérante fait également valoir que cette imprécision constitue un manquement aux directives de l’EUIPO selon lesquelles ce dernier doit recourir à une formulation aussi claire que possible en évitant les expressions susceptibles de recouvrir deux degrés de similitude. À cet égard, d’une part, à supposer que cette instruction, relative au risque de confusion, soit applicable dans le cadre d’une opposition fondée sur l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, il y a lieu de relever que ces directives ne constituent pas des actes juridiques contraignants pour l’interprétation des dispositions du droit de l’Union (arrêt du 19 décembre 2012, Leno Merken, C‑149/11, EU:C:2012:816, point 48). D’autre part, il ressort de la décision attaquée, notamment de son point 102, que, pour rejeter partiellement l’opposition, la chambre de recours s’est fondée sur l’absence d’identité des signes en conflit. L’EUIPO est donc fondé à soutenir que, dans ce contexte, une conclusion plus précise s’agissant de la similitude des signes, notamment la reconnaissance explicite d’un degré de similitude plus élevé, n’aurait pas eu d’incidence sur la solution retenue dans la décision attaquée.

39      Quatrièmement, en tant que la requérante conteste le bien-fondé de la conclusion de la chambre de recours concernant le degré de similitude des signes en conflit, il y a lieu de relever qu’elle remet en cause non les constats opérés par la chambre de recours, mais la conclusion de celle-ci quant au degré de similitude retenu, laquelle serait contradictoire et manifestement erronée au regard de l’« extrême similitude » qui, selon la requérante, existe entre les signes en conflit.

40      À cet égard, tenant compte du caractère faiblement distinctif de l’élément verbal « System » de la marque demandée et du caractère non dominant de l’élément figuratif de la seconde marque antérieure représentant un félin, constatés à juste titre par la chambre de recours, la présence, dans les signes en conflit, du terme commun « puma », écrit de façon légèrement stylisée dans les marques antérieures, justifie de constater que la marque demandée présente un degré élevé de similitude visuelle avec la première marque antérieure et un degré moyen de similitude avec la seconde marque antérieure. Quant à la comparaison sur le plan phonétique, dans la mesure où il n’est pas exclu que l’élément verbal « system » de la marque demandée ne soit pas prononcé, il y a lieu de considérer que les signes en cause présentent sur ce plan un degré de similitude élevé. Enfin, il convient de constater que, du fait de leur terme commun « puma », les signes sont, d’un point de vue conceptuel, très fortement similaires, voire identiques.

41      Partant, il y a lieu de tenir compte des degrés de similitude décrits au point 40 ci-dessus dans le cadre de l’analyse du grief relatif à l’examen des atteintes visées à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009.

 Sur la première branche, tirée de la comparaison des produits et des services désignés par les marques en conflit

42      La requérante soutient que les appréciations opérées par la chambre de recours dans le cadre de la comparaison des produits et des services désignés par les marques en conflit sont erronées. Cette branche du moyen se subdivise en deux griefs. Le premier grief est tiré d’une violation du principe de bonne administration, en raison de l’incohérence de l’examen mené par la chambre de recours dès lors qu’elle a rejeté l’opposition pour des produits et des services visés par la marque demandée qui auraient pourtant été identiques, similaires ou étroitement liés aux produits pour lesquels l’opposition a été accueillie. Ainsi, premièrement, la requérante fait valoir, s’agissant des produits visés par la marque demandée compris dans la classe 9, que l’opposition a été accueillie en tant qu’elle visait certains produits et, en même temps, rejetée en tant qu’elle visait des catégories de produits incluant lesdits produits. Or, selon la jurisprudence, tout produit visé par la marque demandée inclus dans une catégorie plus générale également visée par ladite marque devrait faire l’objet d’un traitement identique à celui de cette catégorie, sous peine de priver d’effet le rejet de la demande d’enregistrement de marque. L’incohérence résulterait également du fait que l’opposition a été rejetée en tant que la marque demandée visait certains produits pourtant inclus dans des catégories plus générales de produits visées par cette marque et pour lesquelles l’opposition a été accueillie. Deuxièmement, s’agissant des produits et des services visés par la marque demandée compris dans les classes 16 et 42, la requérante fait valoir que l’opposition a été rejetée pour des produits et des services qui présentaient un lien manifeste et direct avec les produits pour lesquels l’opposition a été accueillie.

43      Le second grief est tiré d’une insuffisance de motivation de la décision attaquée en tant qu’elle ne comporte aucune justification, ou à tout le moins aucun raisonnement clair et exhaustif, concernant le rejet de l’opposition en tant que la marque demandée désigne certains produits compris dans la classe 9, les produits compris dans la classe 16 et les services compris dans la classe 42.

44      L’EUIPO estime que la chambre de recours a commis une erreur en accueillant l’opposition pour certains produits tout en la rejetant pour d’autres produits correspondant à une catégorie plus générale à laquelle appartiennent les premiers. En revanche, il considère que l’accueil de l’opposition en tant que la marque demandée vise une catégorie générale de produits n’implique pas d’accueillir l’opposition en tant que cette marque vise l’ensemble des produits et des services compris dans cette catégorie ou l’ensemble des produits et des services qui présentent un certain degré de similitude avec les produits pour lesquels l’opposition a été accueillie. L’EUIPO soutient également que la décision attaquée est suffisamment motivée s’agissant des raisons pour lesquelles l’opposition a été partiellement rejetée.

45      Selon une jurisprudence constante, les atteintes visées à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, lorsqu’elles se produisent, découlent d’un certain degré de similitude entre la marque antérieure et la marque postérieure, en raison duquel le public concerné effectue un rapprochement entre ces deux marques. En d’autres termes, le public concerné établit un lien entre celles-ci, alors même qu’il ne les confond pas (voir arrêt du 26 juillet 2017, Staatliche Porzellan-Manufaktur Meissen/EUIPO, C‑471/16 P, non publié, EU:C:2017:602, point 50 et jurisprudence citée).

46      Il est également de jurisprudence constante que l’existence d’un tel lien doit être appréciée globalement, en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce, tels que le degré de similitude entre les marques en conflit, la nature des produits ou des services désignés par les marques en conflit, y compris le degré de proximité ou de dissemblance de ces produits ou de ces services ainsi que le public concerné, l’intensité de la renommée de la marque antérieure, le degré de caractère distinctif, intrinsèque ou acquis par l’usage, de la marque antérieure et l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public (voir arrêt du 26 juillet 2017, Staatliche Porzellan-Manufaktur Meissen/EUIPO, C‑471/16 P, non publié, EU:C:2017:602, point 52 et jurisprudence citée). En particulier, si l’existence d’une similitude entre les produits et les services désignés par les marques en conflit ne constitue pas une condition d’application du motif relatif de refus prévu à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, la nature et le degré de proximité des produits ou des services concernés constituent des facteurs pertinents afin d’apprécier l’existence d’un lien entre ces marques [voir, en ce sens, arrêt du 28 février 2019, Lotte/EUIPO – Générale Biscuit-Glico France (PEPERO original), T‑459/18, non publié, EU:T:2019:119, point 182].

47      En l’espèce, dans le cadre de son analyse du lien entre les marques en conflit, aux points 83 à 90 de la décision attaquée, la chambre de recours a examiné la proximité entre les produits et les services respectivement désignés par ces marques. Tout d’abord, elle a relevé qu’il n’existait aucun lien évident entre les produits et les services visés par la marque demandée et les produits pour lesquels la renommée des marques antérieures avait été prouvée. Ensuite, elle a constaté que la requérante avait produit devant elle des éléments de preuve établissant qu’elle avait utilisé les marques antérieures tant pour des casques d’écoute et des écouteurs que pour des programmes pour ordinateurs personnels, pour téléphones mobiles et pour ordinateurs portables. Par ailleurs, elle a considéré que les casques d’écoute et équipements de divertissement similaires, en tant qu’ils permettaient d’écouter de la musique ou des programmes de divertissement durant un entraînement sportif et, partant, d’optimiser les résultats sportifs et de rendre la pratique d’un sport plus agréable, étaient étroitement liés aux chaussures et aux vêtements de sport en raison de leur forte complémentarité avec ces derniers produits. En outre, elle a considéré qu’un tel lien existait également s’agissant des applications pour téléphones mobiles et ordinateurs, dans la mesure où ils pouvaient notamment permettre d’élaborer un programme d’entraînement sportif personnalisé. Enfin, elle a considéré, en substance, que tant les casques d’écoute que les applications précitées pouvaient être considérés comme une extension de gamme typique d’une entreprise de vêtements de sport. De l’ensemble de ces éléments, la chambre de recours a déduit qu’il existait une proximité étroite entre les produits désignés par les marques antérieures et certains produits visés par la marque demandée et compris dans la classe 9.

48      Tenant compte notamment de cette proximité étroite entre les produits précités, de la similitude des signes en conflit et de la solide renommée des marques antérieures, la chambre de recours a considéré qu’une association entre les marques antérieures et la marque demandée était possible en tant que cette dernière visait les « casques d’écoute » et les « écouteurs » ainsi que des produits étroitement liés aux applications logicielles pour téléphones mobiles et ordinateurs, à savoir les « logiciels », les « programmes d’ordinateurs enregistrés », les « téléphones portables », les « ordinateurs portables », les « programmes pour ordinateurs personnels, pour téléphones portables et pour ordinateurs portables », les « câbles pour ordinateurs, pour téléphones cellulaires et pour ordinateurs de poche » et les « programmes pour ordinateurs ».

 Sur le premier grief, tiré d’une violation du principe de bonne administration

49      Premièrement, s’agissant des produits visés par la marque demandée compris dans la classe 9, la requérante invoque la violation du principe de bonne administration, en raison de l’incohérence de la décision attaquée, en ce que, tout en accueillant l’opposition en tant que la marque demandée désigne les produits visés au point 48 ci-dessus, ladite décision la rejette en tant que cette marque vise des catégories de produits incluant lesdits produits.

50      À cet égard, et ainsi que l’admet l’EUIPO au point 21 du mémoire en réponse, la chambre de recours a effectivement manqué de cohérence en accueillant l’opposition en tant que la marque demandée désigne les produits visés au point 48 ci-dessus (en particulier les « ordinateurs portables » et les « logiciels ») et en rejetant l’opposition pour le « matériel informatique », les « ordinateurs » et l’« équipement pour le traitement des données et [les] ordinateurs », dès lors que ces derniers produits englobent ceux pour lesquels l’opposition a été accueillie. En effet, ainsi que les parties s’accordent à le considérer, l’accueil de l’opposition en tant que la marque demandée vise certains produits serait privée d’effet si cette marque bénéficiait d’une protection pour une catégorie plus générale intégrant lesdits produits.

51      En outre, ainsi que l’EUIPO l’a admis lors de l’audience, la requérante est fondée à soutenir qu’un raisonnement identique doit être appliqué à l’égard des « périphériques informatiques » et des « périphériques adaptés pour l’utilisation avec des ordinateurs ». En effet, ces produits incluent les casques d’écoute et les écouteurs, pour lesquels l’opposition a été accueillie.

52      En revanche, la circonstance que l’opposition a été accueillie pour des produits tels que des « logiciels » et des « programmes pour ordinateurs » et que, ainsi que cela a été constaté au point 50 ci-dessus, l’opposition est également fondée en tant que la marque demandée désigne du « matériel informatique » n’implique pas que l’opposition soit également fondée pour les « imprimantes d’ordinateur », le « matériel et les logiciels d’automatisation » et les « logiciels de conception assistée par ordinateur ». En effet, c’est en raison de la complémentarité, évoquée au point 47 ci-dessus, entre les vêtements et les chaussures de sport, d’une part, et les casques d’écoutes, les écouteurs et les applications logicielles, d’autre part, lesquels sont fréquemment utilisés lors de la pratique d’un sport, que la chambre de recours a admis l’existence d’un lien entre ces produits. Or, un raisonnement similaire ne saurait être tenu à l’égard des « imprimantes d’ordinateur », du « matériel et des logiciels d’automatisation » et des « logiciels de conception assistée par ordinateur », en l’absence de toute complémentarité établie entre ces produits visés par la marque demandée et les articles de sport.

53      Cette conclusion ne saurait être remise en cause ni par la circonstance que lesdits produits visés par la marque demandée sont inclus dans la catégorie plus vaste du « matériel informatique » ou, pour certains, des « logiciels », ni par le fait que les « logiciels de conception assistée par ordinateur » sont utilisés pour concevoir tout type de produits, y compris des articles de sport. À cet égard, il convient également de préciser que, contrairement à la situation exposée au point 50 ci-dessus, l’enregistrement de la marque demandée pour les sous-catégories « imprimantes d’ordinateur », « matériel et logiciels d’automatisation » et « logiciel de conception assistée par ordinateur » ne priverait pas d’effet l’accueil de l’opposition pour les catégories de produits plus vastes que constituent le « matériel informatique » ou les « logiciels ». En effet, ainsi que l’expose l’EUIPO au point 23 du mémoire en réponse, l’enregistrement d’une marque peut être refusé en tant qu’elle désigne des catégories générales de produits mais autorisé en tant qu’elle vise des produits spécifiques relevant de cette catégorie.

54      Deuxièmement, la requérante fait valoir l’incohérence de la décision attaquée au motif que certains produits compris dans la classe 16 et l’ensemble des services compris dans la classe 42 visés par la marque demandée présenteraient un lien direct et manifeste avec les produits pour lesquels l’opposition a été accueillie.

55      À cet égard, il suffit de rappeler que l’opposition a été accueillie pour les produits mentionnés au point 10 ci-dessus en raison de leur complémentarité avec les vêtements et les chaussures de sport. Or, la requérante n’explique pas en quoi les « catalogues relatifs aux logiciels », les « modes d’emploi de logiciels », les « manuels d’instruction », les « manuels d’instruction pour ordinateurs, pour téléphones cellulaires et pour ordinateurs de poche » relevant de la classe 16 et visés par la marque demandée, mentionnés au point 30 de la requête, d’une part, et les services de la classe 42 visés par cette marque, d’autre part, seraient complémentaires aux vêtements et aux chaussures de sport. Partant, la requérante n’est pas fondée à soutenir que la décision attaquée serait incohérente à cet égard.

56      Il s’ensuit qu’il y a lieu d’annuler la décision attaquée dans la mesure où la chambre de recours a rejeté l’opposition en tant que la marque demandée désigne le « matériel informatique », les « ordinateurs », l’« équipement pour le traitement des données et ordinateurs », les « périphériques informatiques » et les « périphériques adaptés pour l’utilisation avec des ordinateurs ».

 Sur le second grief, tiré de l’insuffisance de motivation de la décision attaquée

57      Il y a lieu de rappeler que, conformément à l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, les décisions de l’EUIPO doivent être motivées. Cette obligation de motivation, découlant aussi de l’article 296 TFUE, a fait l’objet d’une jurisprudence constante selon laquelle la motivation doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’auteur de l’acte, de manière à permettre, d’une part, aux intéressés un exercice effectif de leur droit à demander un contrôle juridictionnel de la décision qui est attaquée et, d’autre part, au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision. Toutefois, les chambres de recours ne sont pas obligées, dans la motivation des décisions qu’elles sont amenées à adopter, de prendre position sur tous les arguments que les intéressés invoquent devant elles. Il suffit qu’elles exposent les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision [voir arrêt du 21 février 2018, Laboratoire Nuxe/EUIPO – Camille et Tariot (NYouX), T‑179/17, non publié, EU:T:2018:89, point 20 et jurisprudence citée].

58      À titre liminaire, il convient de constater qu’il n’est pas requis d’examiner le présent grief en tant qu’il concerne les produits visés par la marque demandée mentionnés au point 56 ci-dessus, dès lors qu’il résulte de ce point que la décision attaquée doit être annulée en tant que l’opposition a été rejetée pour ces produits.

59      Quant aux produits et aux services autres que ceux visés au point 56 ci-dessus, il ressort des points 84 à 94 de la décision attaquée que la chambre de recours a clairement exposé les raisons pour lesquelles elle avait considéré que, bien qu’aucun lien évident ne puisse être établi entre les produits et les services désignés par les marques en conflit, une proximité pouvait néanmoins être constatée, au vu des éléments de preuve produits devant la chambre de recours, entre les vêtements et les chaussures de sport désignés par les marques antérieures et certains produits visés par la marque demandée, en raison de leur complémentarité. Cette motivation fait apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de la chambre de recours qui l’a conduite à rejeter l’opposition pour l’ensemble des produits et des services visés par la marque demandée pour lesquels, de l’avis de celle-ci, aucune complémentarité avec les vêtements et les chaussures de sport ne pouvait être établie.

60      Il s’ensuit que le second grief présenté par la requérante concernant la comparaison des produits et des services, telle que limité conformément au point 58 ci-dessus, n’est pas fondé.

 Sur la troisième branche, tirée de l’existence d’un profit indu tiré du caractère distinctif ou de la renommée des marques antérieures ou d’un préjudice porté à ceux-ci

61      La troisième branche du moyen s’articule en deux griefs, tirés, en substance, des irrégularités dont serait entachée la décision attaquée concernant, s’agissant du premier grief, l’appréciation de l’existence d’un lien entre les marques en conflit et, s’agissant du second grief, l’appréciation des atteintes visées à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009.

62      Par le premier grief, la requérante fait valoir que la combinaison, premièrement, de la renommée extraordinaire des marques antérieures, deuxièmement, du degré élevé de caractère distinctif intrinsèque renforcé par l’usage des marques antérieures et, troisièmement, de l’identité conceptuelle des signes en conflit et de leur degré élevé de similitude sur les plans visuel et phonétique qui, à tort, n’auraient pas été pris en compte par la chambre de recours, suffit à démontrer l’existence d’un lien entre les marques en conflit dans l’esprit du public pertinent. Selon la requérante, la similitude des signes et la renommée extraordinaire des marques antérieures rendraient facultative l’existence d’un lien entre les produits et les services en cause. Ainsi, le fait que les produits et les services désignés respectivement par les marques en conflit sont différents et qu’aucun lien direct ne peut être établi entre eux n’empêcherait pas l’existence d’une association entre les marques en conflit, ce que la division d’opposition de l’EUIPO aurait d’ailleurs admis dans ses décisions du 20 février 2018 (affaire B 2811340, Puma/Timba Habor, ci-après la « décision Puma/Timba Habor ») et du 30 avril 2019 (affaire B 2991274, Puma/PW International Business Alliance). À cet égard, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir méconnu le principe de bonne administration en s’écartant sans aucune justification de la position retenue par la division d’opposition dans sa décision Puma/Timba Habor. La requérante fait également valoir plusieurs exemples d’entreprises jouissant d’une renommée extraordinaire dans un secteur spécifique qui ont investi des secteurs très différents pour étendre l’usage de leur marque, notamment en recourant à des accords de licence avec des sociétés opérant en dehors de leurs secteurs traditionnels. La requérante aurait d’ailleurs conclu de tels contrats. Elle en déduit qu’il ne peut être exclu que, en dépit des différences entre les produits et les services désignés par les marques en conflit, la marque demandée puisse évoquer les marques antérieures pour l’ensemble des produits et des services qu’elle vise, notamment en raison du chevauchement partiel des publics pertinents auxquels s’adressent les marques en conflit.

63      Par le second grief, tout d’abord, la requérante soutient que l’enregistrement de la marque demandée aurait pour effet inévitable de réduire le caractère distinctif des marques antérieures, lesquelles disposeraient d’un caractère exclusif, dès lors que le public cesserait de les associer à une gamme donnée de produits provenant d’une source unique. Ensuite, elle fait valoir que la marque demandée tirerait un profit indu de la renommée des marques antérieures compte tenu de l’image d’excellence, de fiabilité et de qualité qui leur est associée et qui serait facilement transférable aux produits et aux services de la marque demandée, laquelle bénéficierait également d’une reconnaissance et d’une mémorisation par le public facilitées en raison de la présence de l’élément identique « puma ». Enfin, la requérante fait valoir que l’usage de la marque demandée ne repose pas sur un juste motif.

64      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante. Il fait valoir que l’exceptionnelle renommée d’une marque ne dispense pas son titulaire de l’obligation de prouver l’existence d’un lien entre les marques en conflit et que l’intensité de la renommée d’une marque antérieure n’est qu’un facteur à prendre en compte pour l’établissement d’un tel lien, à l’instar du degré de proximité ou de dissemblance des produits et des services en cause. Selon l’EUIPO, si la jurisprudence admet, dans certains cas, que la probabilité d’un risque d’atteinte portée à une marque disposant d’une renommée exceptionnelle peut être évidente, chaque situation doit être appréciée au cas par cas. En l’espèce, l’absence de lien entre les marques en conflit proviendrait du caractère très différent des produits et des services en cause et du fait que, dans un domaine très éloigné de celui des articles de sport, le mot « puma » susciterait d’abord une association avec la notion de félin. Enfin, l’EUIPO fait valoir que l’appréciation retenue par le Tribunal dans l’arrêt du 26 septembre 2018, Puma/EUIPO – Doosan Machine Tools (PUMA) (T‑62/16, EU:T:2018:604), où les marques en conflit étaient hautement similaires, n’est pas transposable à l’espèce.

65      Il est rappelé (voir point 45 ci-dessus) que les atteintes visées à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, lorsqu’elles se produisent, découlent d’un certain degré de similitude entre la marque antérieure et la marque postérieure, en raison duquel le public concerné effectue un rapprochement entre ces deux marques. L’existence d’un tel lien dans l’esprit du public constitue une condition nécessaire, mais, à elle seule, non suffisante pour qu’il soit conclu à l’existence de l’une des atteintes contre lesquelles l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 assure la protection des marques renommées.

66      Il est également rappelé (voir point 46 ci-dessus) que l’existence d’un tel rapprochement doit être appréciée globalement, en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce, tels que le degré de similitude entre les marques en conflit, la nature des produits ou des services que les marques en conflit désignent, y compris le degré de proximité ou de dissemblance de ces produits ou de ces services, ainsi que le public concerné, l’intensité de la renommée de la marque antérieure, le degré de caractère distinctif, intrinsèque ou acquis par l’usage, de la marque antérieure et l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public.

67      Le fait que la marque postérieure évoque la marque antérieure dans l’esprit du consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, équivaut à l’existence d’un lien entre ces marques [voir arrêt du 5 juin 2018, Prada/EUIPO  – The Rich Prada International (THE RICH PRADA), T‑111/16, non publié, EU:T:2018:328, point 34 et jurisprudence citée].

68      Par ailleurs, afin de bénéficier de la protection instaurée par l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, le titulaire de la marque antérieure doit rapporter la preuve que l’usage de la marque dont l’enregistrement est demandé tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’il leur porterait préjudice. À cette fin, le titulaire de la marque antérieure n’est pas tenu de démontrer l’existence d’une atteinte effective et actuelle à sa marque au sens dudit article 8, paragraphe 5. En effet, lorsqu’il est prévisible qu’une telle atteinte découlera de l’usage que le titulaire de la marque postérieure peut être amené à faire de sa marque, le titulaire de la marque antérieure ne saurait être obligé d’attendre la réalisation effective de celle-ci pour pouvoir faire interdire ledit usage. Le titulaire de la marque antérieure doit toutefois établir l’existence d’éléments permettant de conclure à un risque sérieux qu’une telle atteinte se produise dans le futur (voir arrêt du 10 mai 2012, Rubinstein et L’Oréal/OHMI, C‑100/11 P, EU:C:2012:285, point 93 et jurisprudence citée).

69      C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner, tout d’abord, le premier grief, tiré de l’erreur dont la décision attaquée serait entachée dans l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 en ce qui concerne l’existence d’un lien entre les marques en conflit.

70      En premier lieu, il importe de rappeler que, selon la jurisprudence citée au point 46 ci-dessus, l’existence d’un lien entre les marques en conflit doit être appréciée globalement, en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Ainsi, il a été jugé que, même si les publics concernés par les produits ou les services respectivement désignés par les marques en conflit sont les mêmes ou se chevauchent dans une certaine mesure, lesdits produits ou services peuvent être si dissemblables que la marque postérieure sera insusceptible d’évoquer la marque antérieure dans l’esprit du public pertinent, de sorte que la nature des produits ou des services désignés par les marques en conflit doit être prise en considération aux fins d’apprécier l’existence d’un lien entre ces marques (voir arrêt du 26 juillet 2017, Staatliche Porzellan-Manufaktur Meissen/EUIPO, C‑471/16 P, non publié, EU:C:2017:602, point 53 et jurisprudence citée). Parallèlement, même en l’absence de tout lien entre les produits et les services couverts par les marques en conflit, l’intensité de la renommée d’une marque antérieure, laquelle peut aller au-delà du public concerné par les produits ou les services qu’elle désigne, peut justifier de reconnaître l’existence d’un lien entre les marques en conflit alors même que leurs publics pertinents respectifs seraient tout à fait distincts (voir, en ce sens, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, points 51 à 53).

71      Il s’ensuit que, contrairement à ce que prétend la requérante, la circonstance qu’une marque demandée et une marque antérieure soient similaires et que cette dernière jouisse d’une renommée exceptionnelle ne saurait automatiquement suffire à ce que soit reconnue l’existence d’un lien entre ces marques. En effet, s’il n’est pas exclu, dans certains cas, que l’existence d’un lien entre les marques en conflit puisse être admise alors même que celles-ci désignent des produits ou des services dépourvus de tout lien entre eux, un tel lien doit être apprécié au vu de l’articulation des différents facteurs pertinents dans chaque espèce. À cet égard, aucun enseignement autre que l’importance du facteur relatif à l’intensité de la renommée de la marque antérieure dans l’appréciation globale du lien entre les marques en conflit ne saurait être tiré des points 110 à 112 de l’arrêt du 29 novembre 2018, Louis Vuitton Malletier/EUIPO – Bee-Fee Group (LV POWER ENERGY DRINK) (T‑372/17, non publié, EU:T:2018:851), dont se prévaut la requérante.

72      En deuxième lieu, en l’espèce, dans le cadre de l’examen global d’un lien entre les marques en conflit, s’agissant, premièrement, de l’intensité de la renommée des marques antérieures, il convient de relever que la requérante a invoqué la renommée exceptionnelle des marques antérieures lors de la procédure administrative. À cet égard, la chambre de recours a considéré au point 54 de la décision attaquée que leur renommée était « très forte » en ce qui concerne les « vêtements », les articles de « chapellerie » et les « chaussures de sport » relevant de la classe 25 ainsi que, notamment, les « appareils de gymnastique et de sport, articles de gymnastique et de sport » compris dans la classe 28 et les « sacs de sport » compris dans la classe 18. Par ailleurs, au point 91 de la décision attaquée, elle a qualifié les marques antérieures d’« emblématiques » tant en Allemagne que dans le reste de l’Union et constaté que la marque PUMA, identifiée par 97 % des consommateurs français interrogés dans le cadre de l’une des études produites par la requérante, était devenue un nom familier pour désigner des chaussures et des vêtements de sport, à tout le moins en Allemagne. En outre, au point 100 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué que les marques antérieures « bénéfici[ai]ent d’une reconnaissance presque inégalée dans l’Union ». Ce faisant, elle doit être regardée comme ayant reconnu aux marques antérieures une renommée qui va au-delà du public concerné par les produits pour lesquels ces marques ont été enregistrées.

73      Deuxièmement, il ressort des constats opérés au point 40 ci-dessus que les signes en conflit présentent, à tout le moins en ce qui concerne la première marque antérieure, un degré élevé de similitude. Or, plus les marques en conflit sont similaires, plus il est vraisemblable que la marque postérieure évoquera, dans l’esprit du public pertinent, la marque antérieure renommée [voir arrêt du 19 mai 2015, Swatch/OHMI – Panavision Europe (SWATCHBALL), T‑71/14, non publié, EU:T:2015:293, point 19 et jurisprudence citée].

74      Troisièmement, au point 57 de la décision attaquée, la chambre de recours a reconnu le caractère intrinsèquement distinctif des marques antérieures, dans la mesure où le terme « puma » désigne un félin qui n’a aucun lien avec les produits désignés par ces marques. Elle a considéré, au point 59 de ladite décision, que ce caractère distinctif était d’autant plus fort que, à sa connaissance, la marque PUMA n’était employée par personne, hormis son titulaire, et qu’elle était donc unique. Or, selon la jurisprudence, plus la marque antérieure présente un caractère distinctif fort, qu’il soit intrinsèque ou acquis par l’usage qui a été fait de cette marque, plus il est vraisemblable que, confronté à une marque postérieure identique ou similaire, le public pertinent fasse un lien avec ladite marque antérieure (voir arrêt du 5 juin 2018, THE RICH PRADA, T‑111/16, non publié, EU:T:2018:328, point 31 et jurisprudence citée).

75      Quatrièmement, s’agissant de la nature des produits et des services désignés par les marques en conflit, sous réserve des produits mentionnés aux points 10 et 56 ci-dessus, c’est à juste titre que la chambre de recours a constaté l’absence de tout lien entre eux. Quant au public pertinent, ainsi que la chambre de recours l’a relevé respectivement aux points 102 et 19 de la décision attaquée, les produits désignés par les marques antérieures sont destinés au grand public et les produits et services visés par la marque demandée sont destinés, pour certains, à un public professionnel du secteur de l’industrie et, pour d’autres, à la fois à un public professionnel et au grand public. Il s’ensuit que, pour une partie des produits et des services en cause, les publics pertinents se chevauchent partiellement.

76      En troisième lieu, il ressort de la décision attaquée que la chambre de recours a procédé à la comparaison des produits et des services désignés par les marques en conflit. Tout d’abord, elle a relevé, au point 83 de ladite décision, qu’il n’existait aucun lien évident entre eux, en illustrant son constat de différents exemples tirés des produits visés par la marque demandée destinés aux professionnels de l’industrie et compris dans les classes 7, 9 et 16. Ensuite, elle a précisé au point 94 de cette décision que, à l’exclusion des produits visés par la marque demandée et mentionnés au point 10 ci-dessus, il n’existait aucun lien au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009. Enfin, aux points 102 et 103 de la décision attaquée, dans le cadre de l’examen relatif aux atteintes mentionnées dans cette disposition, la chambre de recours a relevé que la majorité des produits visés par la marque demandée, d’une part, et les produits désignés par les marques antérieures pour lesquels celles-ci jouissaient d’une renommée, d’autre part, n’appartenaient pas au même marché ni à un marché connexe, que la marque demandée désignait des machines spécialisées pour le travail et le traitement du bois et du métal destinées à des spécialistes de l’industrie ainsi que des logiciels s’y rapportant, alors que lesdits produits couverts par les marques antérieures s’adressaient au consommateur final relevant du grand public, et que la requérante n’avait pas expliqué la raison pour laquelle ces deux groupes cibles totalement différents établiraient un lien entre les marques en conflit alors que les produits qu’elles désignaient ne présentaient aucun lien et que les signes en conflit n’étaient pas identiques.

77      Il ressort de ces énonciations de la décision attaquée que, dans le cadre de son appréciation de l’existence d’un lien entre les marques en conflit, la chambre de recours a procédé à un examen incomplet des produits et des services visés par la marque demandée. En effet, elle a focalisé son analyse sur les produits hautement spécialisés destinés aux professionnels de l’industrie visés par la marque demandée, en omettant le fait, pourtant relevé au point 19 de la décision attaquée, que celle-ci visait également plusieurs produits et services compris dans les classes 9, 16 et 42 qui n’étaient pas exclusivement destinés à un tel public, mais concernaient également le grand public. Tel est le cas, premièrement, des « supports magnétiques et optiques de données », des « imprimantes d’ordinateurs », des « détecteurs de chaleur » et des « instruments de mesure » compris dans la classe 9, deuxièmement, des « catalogues relatifs aux logiciels », des « modes d’emploi de logiciels », des « manuels d’instruction », des « manuels d’instruction pour ordinateurs, pour téléphones cellulaires et pour ordinateurs de poche » et des « livres » compris dans la classe 16 et, troisièmement, de la « mise à jour et entretien de logiciels et de programmes informatiques », de la « configuration de matériel informatique par le biais de logiciels », de la « configuration de réseaux informatiques par le biais de logiciels », de la « configuration de logiciels », des « conseils en matériel et logiciels informatiques » et des « services d’assistance technique en matière de logiciels » relevant de la classe 42. Il en va également ainsi des « tournevis électriques » relevant de la classe 7, ce qui a été admis par l’EUIPO lors de l’audience.

78      Force est de constater que, en tant que la marque demandée vise des produits et des services destinés notamment au grand public, la chambre de recours a, en définitive, exclu l’existence d’un lien entre les marques en conflit au seul motif de l’absence de lien entre les produits et services désignés par les marques en conflit, la chambre de recours relevant, au point 102 de la décision attaquée, que les produits et services visés par la marque demandée, d’une part, et les chaussures et les vêtements de sport, d’autre part, n’appartenaient pas au même marché ni à un marché connexe.

79      À cet égard, il convient de relever que la division d’opposition avait pris en compte le fait que, si certains produits et services visés par la marque demandée étaient également destinés au grand public, ils étaient vendus dans des magasins spécialisés en informatique. À supposer même que la chambre de recours ait entendu implicitement adopter le raisonnement de la division d’opposition sur ce point, la pertinence d’une telle motivation devrait être écartée au vu des éléments de preuve apportés par la requérante établissant qu’elle a utilisé les marques antérieures pour des casques d’écoute, des écouteurs et des programmes pour ordinateurs personnels, pour téléphones portables et pour ordinateurs portables, l’ensemble de ces produits pouvant être vendus dans des magasins spécialisés en informatique.

80      Au vu de ces constats, il y a lieu de considérer que la chambre de recours a entaché son examen relatif à l’existence d’un lien entre les marques en conflit d’erreurs d’appréciation en focalisant son raisonnement, s’agissant des produits et des services visés par la marque demandée, sur les produits et les services spécialisés destinés à des professionnels de l’industrie, sans tenir compte du fait que la marque demandée visait également des produits et des services destinés notamment au grand public et que, partant, le public pertinent pour ces derniers produits et services et le public pertinent pour les produits désignés par les marques antérieures se chevauchaient partiellement. Elle a exclu, dans ce contexte, l’existence d’un lien entre les marques en conflit sans faire précéder sa conclusion d’un examen global tenant compte des autres facteurs pertinents.

81      Certes, ainsi que l’EUIPO le fait valoir dans le mémoire en réponse, la circonstance, relevée par la division d’opposition, que la marque PUMA est composée d’un nom commun qui désigne avant tout un animal peut également s’avérer pertinente dans le cadre de l’examen global relatif à l’existence d’un lien entre les marques en conflit. Toutefois, ainsi que cela a été constaté au point 80 ci-dessus, un tel examen a été omis en l’espèce.

82      Par ailleurs, il ressort des points 102 et 103 de la décision attaquée que l’argumentation de la requérante visant à établir l’existence d’un risque de profit indu ou de préjudice visés à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 en tant que la marque demandée visait des produits et des services autres que ceux mentionnés au point 10 ci-dessus a été écartée, en substance, au motif que la requérante n’avait pas expliqué la raison pour laquelle, au vu des produits spécifiques visés par la marque demandée, le public pertinent établirait un lien entre les marques en conflit. À cet égard, il est pertinent de relever que la chambre de recours n’a pas examiné l’argumentation de la requérante, indépendante des produits et des services visés par la marque demandée, tirée de ce que, compte tenu du caractère exclusif des marques antérieures, l’usage de la marque demandée atténuerait la capacité des marques antérieures à identifier une unique entreprise et les priverait de leur attractivité.

83      Il s’ensuit que, eu égard aux erreurs commises par la chambre de recours dans le cadre de l’appréciation de l’existence d’un lien entre les marques en conflit et en l’absence d’examen spécifique de l’existence des atteintes visées à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 opéré par la chambre de recours, il y a lieu d’annuler la décision attaquée dans la mesure où elle rejette l’opposition pour les produits et les services visés au point 77 ci-dessus. Il appartiendra ainsi à la chambre de recours de se prononcer sur l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 en ce qui concerne lesdits produits et services lorsqu’elle prendra les mesures que comporte l’exécution du présent arrêt.

84      En revanche, il convient de rappeler que, pour exclure l’existence d’un lien entre les marques antérieures et la marque demandée en tant que cette dernière visait des produits destinés à un public spécialisé, la chambre de recours a relevé que, alors que les marques antérieures s’adressaient au grand public, la marque demandée visait des produits très spécifiques, destinés à des spécialistes de l’industrie. Elle a également relevé que la requérante n’avait produit aucun élément établissant en quoi ces deux publics cibles totalement différents établiraient un lien entre les marques en conflit alors que les produits concernés ne présentaient pas le moindre lien entre eux et que les signes en conflit n’étaient pas identiques. La chambre de recours a ainsi considéré en substance que, au vu de la spécificité tant desdits produits visés par la marque demandée que du public concerné par ceux-ci, et en dépit de l’intensité de la renommée des marques antérieures et de la similitude desdits signes, la requérante n’avait pas établi qu’un lien entre les marques en conflit pourrait être établi.

85      À cet égard, certes, au vu de l’intensité de la renommée des marques antérieures, il peut être admis que le public auquel sont destinés les produits et les services visés par la marque demandée, y compris les professionnels de l’industrie, connaîtra également les marques antérieures. Toutefois, cela ne saurait suffire à démontrer que ce public pertinent établira un lien entre les marques en conflit (voir, en ce sens, arrêt du 26 septembre 2018, PUMA, T‑62/16, EU:T:2018:604, point 46 et jurisprudence citée).

86      En effet, la marque demandée vise des produits et des services hautement spécialisés, à savoir des machines destinées au travail et au traitement du bois et du métal et les logiciels et services s’y rapportant. Au vu de la spécificité de ces produits et de ces services, et de la spécificité du public auquel ils sont destinés, de l’absence d’argumentation de la requérante concernant ces produits et services spécifiques et alors que les signes en conflit ne sont pas identiques, la chambre de recours a pu considérer sans commettre d’erreur qu’un rapprochement entre les marques en conflit par le public concerné était exclu, en dépit de l’intensité de la renommée des marques antérieures et du degré de similitude des signes en conflit.

87      Aucun des autres éléments avancés par la requérante n’est de nature à remettre en cause cette conclusion.

88      Ainsi, d’une part, l’argument, développé aux points 66 à 69 de la requête, tiré, en substance, de ce que le public serait habitué à ce que des marques renommées investissent des secteurs très différents de leur secteur traditionnel, ainsi que l’attesteraient plusieurs exemples, est sans incidence sur le fait que, mis en présence de produits et de services destinés aux professionnels de l’industrie revêtus de la marque demandée, le public pertinent n’effectuera pas de rapprochement avec les marques antérieures. Il y a lieu de relever, à cet égard, qu’aucun des exemples donnés par la requérante concernant l’extension de l’usage d’une marque renommée et la conclusion d’accords de licence avec des entreprises œuvrant dans des secteurs radicalement différents du secteur d’origine d’une telle marque ne concerne le cas d’espèce, à savoir une marque visant des produits ou des services destinés au grand public qui aurait élargi son activité à des produits ou à des services destinés à un public de professionnels de l’industrie. Il s’ensuit que l’argument doit être écarté comme non fondé, sans qu’il soit besoin de statuer sur sa recevabilité.

89      D’autre part, la requérante n’est pas fondée à soutenir que les solutions retenues par la division d’opposition de l’EUIPO dans la décision Puma/Timba Habor et dans la décision du 30 avril 2019 (affaire B 2991274, Puma/PW International Business Alliance) auraient dû être appliquées en l’espèce. En effet, dans ces décisions, les produits désignés respectivement par chacune des marques en conflit s’adressaient au grand public et empruntaient les mêmes canaux de distribution, ce qui constitue une différence majeure avec le cas d’espèce.

90      Il s’ensuit que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que, en tant que la marque demandée désignait des produits et des services destinés aux professionnels de l’industrie, l’une des conditions d’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, à savoir l’existence d’un lien entre les marques en conflit, faisait défaut. Dans la mesure où, ainsi qu’il ressort du point 65 ci-dessus, l’existence d’un tel lien est une condition nécessaire pour que la troisième condition prévue à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 et visée au point 22 ci-dessus soit remplie, il n’y a pas lieu de statuer, concernant les produits et les services précités, sur le second grief de la présente branche, relatif à l’existence des atteintes visées à ladite disposition.

91      En quatrième lieu, en tant que la requérante invoque une violation du principe de bonne administration au motif que la chambre de recours n’aurait fourni aucun élément quant aux raisons pour lesquelles elle s’écartait des constats opérés par la division d’opposition de l’EUIPO dans sa décision Puma/Timba Habor, il y a lieu de rappeler que l’EUIPO doit, eu égard aux principes d’égalité de traitement et de bonne administration, prendre en considération les décisions antérieures qu’il a déjà adoptées sur des demandes similaires. Il doit s’interroger avec une attention particulière sur le point de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens, l’application de ces principes devant être conciliée avec le respect du principe de légalité, ce qui implique que l’examen de toute demande d’enregistrement doit être strict et complet et avoir lieu dans chaque cas concret (voir arrêt du 28 juin 2018, EUIPO/Puma, C‑564/16 P, EU:C:2018:509, points 60 et 61 et jurisprudence citée). En effet, l’enregistrement d’un signe en tant que marque dépend de critères spécifiques, applicables dans le cadre des circonstances factuelles de chaque cas d’espèce [voir arrêts du 16 janvier 2019, Pologne/Stock Polska sp. z o.o. et EUIPO, C‑162/17 P, non publié, EU:C:2019:27, point 60 et jurisprudence citée, et du 6 décembre 2018, Vans/EUIPO – Deichmann (V), T‑817/16, non publié, EU:T:2018:880, point 132 et jurisprudence citée].

92      Il découle de ces principes qu’il appartient aux chambres de recours, lorsqu’elles décident de retenir une appréciation différente de celle adoptée dans des décisions antérieures relatives à des demandes similaires invoquées devant elles, de motiver explicitement cette divergence par rapport auxdites décisions (voir, en ce sens, arrêt du 28 juin 2018, EUIPO/Puma, C‑564/16 P, EU:C:2018:509, point 66). Toutefois, il convient de distinguer, d’une part, l’invocation de telles décisions antérieures en tant qu’éléments de preuve d’une situation factuelle qui ne sont pas strictement relatifs à la marque dont l’enregistrement est demandé, tels que ceux relatifs à la renommée de la marque antérieure sur laquelle est fondée l’opposition à l’enregistrement d’une marque, comme c’était le cas dans l’arrêt du 28 juin 2018, EUIPO/Puma (C‑564/16 P, EU:C:2018:509), et, d’autre part, l’invocation d’une pratique décisionnelle de l’EUIPO, qui implique la même application de dispositions juridiques à des situations de fait comparables [arrêt du 29 janvier 2020, Volkswagen/EUIPO (CROSS), T‑42/19, non publié, EU:T:2020:15, point 69].

93      En l’espèce, la décision Puma/Timba Habor a été invoquée par la requérante tant devant la division d’opposition que devant la chambre de recours. Cette dernière s’est référée à ladite décision au stade de l’examen de la renommée des marques antérieures et de leur caractère distinctif, mais n’a pas expressément expliqué pour quelle raison elle considérait que la conclusion adoptée dans ladite décision s’agissant de l’existence d’un lien entre les marques en conflit dans cette affaire n’était pas transposable en l’espèce.

94      Toutefois, nonobstant cette abstention regrettable d’un point de vue formel, ainsi que cela a été indiqué au point 57 ci-dessus, la chambre de recours n’était pas tenue de répondre expressément et de manière exhaustive à l’ensemble des arguments avancés par la requérante à condition qu’elle exposât les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision attaquée. Or, tel a été le cas en l’espèce, dès lors que la chambre de recours a exposé les éléments essentiels de sa conclusion concernant l’absence de lien entre les marques antérieures et la marque demandée en tant qu’elle vise des produits destinés à des spécialistes de l’industrie. Au demeurant, il convient de constater que, dans la décision de la division d’opposition du 17 décembre 2018 ayant fait l’objet du recours dont était saisie la chambre de recours, qui fait partie du contexte dans lequel la décision attaquée a été adoptée, la division d’opposition avait indiqué, en substance, que les décisions antérieures citées par la requérante, dans lesquelles l’existence d’un lien entre les marques en cause avait été admise, n’étaient pas pertinentes en l’espèce dès lors qu’elles concernaient des marques relevant d’autres secteurs commerciaux.

95      Partant, l’argument de la requérante concernant l’existence d’une atteinte au principe de bonne administration et à l’obligation de motivation doit être écarté.

96      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il y a lieu d’annuler la décision attaquée dans la mesure où elle a rejeté l’opposition en tant que la marque demandée vise les produits et les services suivants :

–        les « tournevis électriques » relevant de la classe 7 ;

–        le « matériel informatique », les « ordinateurs », l’« équipement pour le traitement des données et [les] ordinateurs », les « périphériques informatiques », les « périphériques adaptés pour l’utilisation avec des ordinateurs », les « supports magnétiques et optiques de données », les « imprimantes d’ordinateurs », les « détecteurs de chaleur » et les « instruments de mesure » relevant de la classe 9 ;

–        les « catalogues relatifs aux logiciels », les « modes d’emploi de logiciels », les « manuels d’instruction », les « manuels d’instruction pour ordinateurs, pour téléphones cellulaires et pour ordinateurs de poche » et les « livres » relevant de la classe 16 ;

–        la« mise à jour et entretien de logiciels et de programmes informatiques », la « configuration de matériel informatique par le biais de logiciels », la « configuration de réseaux informatiques par le biais de logiciels », la « configuration de logiciels », les « conseils en matériel et logiciels informatiques » et les « services d’assistance technique en matière de logiciels » relevant de la classe 42.

 Sur les dépens

97      Aux termes de l’article 134, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, si plusieurs parties succombent, le Tribunal décide du partage des dépens. En l’espèce, la requérante et l’EUIPO ayant succombé partiellement, il y a lieu de les condamner à supporter chacun leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 27 novembre 2019 (affaire R 404/2019-1) est annulée dans la mesure où la chambre de recours a rejeté le recours formé par Puma SE en tant que la demande d’enregistrement du signe verbal PUMA-System en tant que marque de l’Union européenne désigne les produits et les services relevant des classes 7, 9, 16 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 7 : « tournevis électrique » ;

–        classe 9 : « matériel informatique », « ordinateurs », « équipement pour le traitement des données et ordinateurs », « périphériques informatiques », « périphériques adaptés pour l’utilisation avec des ordinateurs », « supports magnétiques et optiques de données », « imprimantes d’ordinateurs », « détecteurs de chaleur » et « instruments de mesure » ;

–        classe 16 : « catalogues relatifs aux logiciels », « modes d’emploi de logiciels », « manuels d’instruction », « manuels d’instruction pour ordinateurs, pour téléphones cellulaires et pour ordinateurs de poche » et « livres » ;

–        classe 42 : « mise à jour et entretien de logiciels et de programmes informatiques », « configuration de matériel informatique par le biais de logiciels », « configuration de réseaux informatiques par le biais de logiciels », « configuration de logiciels », « conseils en matériel et logiciels informatiques » et « services d’assistance technique en matière de logiciels ».

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      Puma et l’EUIPO sont condamnés à supporter chacun leurs dépens.

Marcoulli

Schwarcz

Iliopoulos

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 10 mars 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.