Language of document : ECLI:EU:C:2024:285

ORDONNANCE DE LA COUR (chambre d’admission des pourvois)

8 avril 2024 (*)

« Pourvoi – Marque de l’Union européenne – Admission des pourvois – Article 170 ter du règlement de procédure de la Cour – Demande ne démontrant pas l’importance d’une question pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union – Non-admission du pourvoi »

Dans l’affaire C‑12/24 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 9 janvier 2024,

Sattvica SA, établie à Buenos Aires (République d’Argentine), représentée par Me S. Sánchez Quiles, abogado,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO),

partie défenderesse en première instance,

Dalma Nerea Maradona Villafañe, demeurant à Buenos Aires,

Dinorah Gianinna Maradona Villafañe, demeurant à Buenos Aires,

Diego Fernando Maradona Ojeda, demeurant à Buenos Aires,

Jana Maradona Sabalain, demeurant à Buenos Aires,

Diego Armando Maradona Sinagra, demeurant à Giugliano in Campania (Italie),

parties intervenantes en première instance,

LA COUR (chambre d’admission des pourvois)

composée de M. L. Bay Larsen, vice‑président de la Cour, MM. T. von Danwitz et P.G. Xuereb (rapporteur), juges,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la proposition du juge rapporteur et l’avocat général, M. P. Pikamäe, entendu,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, Sattvica SA demande l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de l’Union européenne du 7 novembre 2023, Sattvica/EUIPO – Maradona Villafañe e.a. (DIEGO MARADONA), (T‑299/22, EU:T:2023:710, ci-après l’« ordonnance attaquée »), par laquelle celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), du 21 mars 2022 (affaire R 755/2021-1), relative au rejet de sa demande d’enregistrement de transfert de la marque en cause.

 Sur la demande d’admission du pourvoi

2        En vertu de l’article 58 bis, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, l’examen des pourvois formés contre les décisions du Tribunal portant sur une décision d’une chambre de recours indépendante de l’EUIPO est subordonné à leur admission préalable par la Cour.

3        Conformément à l’article 58 bis, troisième alinéa, de ce statut, le pourvoi est admis, en tout ou en partie, selon les modalités précisées dans le règlement de procédure de la Cour, lorsqu’il soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

4        Aux termes de l’article 170 bis, paragraphe 1, du règlement de procédure, dans les situations visées à l’article 58 bis, premier alinéa, dudit statut, la partie requérante annexe à sa requête une demande d’admission du pourvoi dans laquelle elle expose la question importante que soulève le pourvoi pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et qui contient tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur cette demande.

5        Conformément à l’article 170 ter, paragraphes 1 et 3, du règlement de procédure, la Cour statue sur la demande d’admission du pourvoi dans les meilleurs délais par voie d’ordonnance motivée.

6        À l’appui de sa demande d’admission du pourvoi, la requérante fait valoir que le moyen unique de son pourvoi, tiré de la violation de l’article 20, paragraphes 3 et 5, du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017 sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p.1), et de l’article 13, paragraphe 1, du règlement d’exécution (UE) 2018/626 de la Commission, du 5 mars 2018, établissant les modalités d’application de certaines dispositions du règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement d’exécution (UE) 2017/1431 (JO 2018, L 104 p. 37), soulève une question importante pour l’unité, la cohérence et le développement du droit de l’Union.

7        Premièrement, la requérante allègue que le Tribunal a écarté, aux points 39 à 47 de l’ordonnance attaquée, une interprétation de l’article 20, paragraphes 3 et 5, du règlement 2017/1001 ainsi que de l’article 13, paragraphe 1, du règlement d’exécution 2018/626, qui permettrait d’envisager des hypothèses factuelles parfaitement plausibles autres que la simple prise en compte d’un écrit signé tant par le cédant que par le cessionnaire de la marque en cause, afin de prouver le transfert de cette marque. Par conséquent, l’interprétation restrictive retenue par le Tribunal serait contraire à la philosophie établie dans le traité sur le droit des marques, adopté à Genève le 27 octobre 1994 et aux directives de l’Union européenne qui s’en inspirent.

8        Secondement, la requérante affirme que le règlement 2017/1001 comporte une double discrimination. D’une part, il y aurait une discrimination entre les personnes physiques et les personnes morales, ces dernières bénéficiant, en vertu de l’article 20, paragraphe 2, première phrase, du règlement 2017/1001, d’une présomption s’agissant du changement de propriété de la marque en cas de transfert de l’entreprise qui ne s’applique pas aux personnes physiques. D’autre part, il existerait, en substance, une discrimination en ce qui concerne les exigences prévues pour prouver le transfert d’une marque, tenant à l’interprétation restrictive mentionnée au point 7 de la présente ordonnance.

9        À titre liminaire, il convient de relever que c’est au requérant qu’il incombe de démontrer que les questions soulevées par son pourvoi sont importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnances du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C‑382/21 P, EU:C:2021:1050, point 20, et du 11 juillet 2023, EUIPO/Neoperl, C-93/23 P, EU:C:2023:601, point 18).

10      En outre, ainsi qu’il ressort de l’article 58 bis, troisième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, lu en combinaison avec l’article 170 bis, paragraphe 1, et l’article 170 ter, paragraphe 4, du règlement de procédure, la demande d’admission du pourvoi doit contenir tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur l’admission du pourvoi et de déterminer, en cas d’admission partielle de ce dernier, les moyens ou les branches du pourvoi sur lesquels le mémoire en réponse doit porter. En effet, étant donné que le mécanisme d’admission préalable des pourvois visé à l’article 58 bis de ce statut tend à limiter le contrôle de la Cour aux questions revêtant une importance pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, seuls les moyens soulevant de telles questions et établis par le requérant doivent être examinés par la Cour dans le cadre du pourvoi (ordonnances du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C-382/21 P, EU:C:2021:1050, point 21, et du 11 juillet 2023, EUIPO/Neoperl, C-93/23 P, EU:C:2023:601, point 19).

11      Ainsi, une demande d’admission du pourvoi doit, en tout état de cause, énoncer de façon claire et précise les moyens sur lesquels le pourvoi est fondé, identifier avec la même précision et la même clarté la question de droit soulevée par chaque moyen, préciser si cette question est importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et exposer de manière spécifique les raisons pour lesquelles ladite question est importante au regard du critère invoqué. En ce qui concerne, en particulier, les moyens du pourvoi, la demande d’admission du pourvoi doit préciser la disposition du droit de l’Union ou la jurisprudence qui aurait été méconnue par l’arrêt ou l’ordonnance sous pourvoi, exposer de manière succincte en quoi consiste l’erreur de droit prétendument commise par le Tribunal et indiquer dans quelle mesure cette erreur a exercé une influence sur le résultat de l’arrêt ou de l’ordonnance sous pourvoi. Lorsque l’erreur de droit invoquée résulte de la méconnaissance de la jurisprudence, la demande d’admission du pourvoi doit exposer, de façon succincte mais claire et précise, premièrement, où se situe la contradiction alléguée, en identifiant tant les points de l’arrêt ou de l’ordonnance sous pourvoi que le requérant met en cause que ceux de la décision de la Cour ou du Tribunal qui auraient été méconnus, et, deuxièmement, les raisons concrètes pour lesquelles une telle contradiction soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnances du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C-382/21 P, EU:C:2021:1050, point 22, et du 11 juillet 2023, EUIPO/Neoperl, C-93/23 P, EU:C:2023:601, point 20).

12      En effet, une demande d’admission du pourvoi ne contenant pas les éléments énoncés au point précédent de la présente ordonnance ne saurait être, d’emblée, susceptible de démontrer que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union justifiant son admission (ordonnances du 24 octobre 2019, Porsche/EUIPO, C-613/19 P, EU:C:2019:905, point 16, et du 9 janvier 2024, Yayla Türk/EUIPO, C-611/23 P, EU:C:2024:3, point 13).

13      En l’occurrence, s’agissant des arguments exposés aux points 7 et 8 de la présente ordonnance, portant, premièrement, sur l’interprétation prétendument trop restrictive des formalités imposées par l’article 20, paragraphes 3 et 5, du règlement 2017/1001 ainsi que par l’article 13, paragraphe 1, du règlement d’exécution 2018/626 pour établir le transfert d’une marque, et, secondement, sur la prétendue double discrimination, d’une part, entre les personnes physiques et morales en matière de transfert de marques, et, d’autre part, en ce qui concerne les exigences prévues pour prouver le transfert d’une marque, il importe de relever que, si la requérante invoque, bien que de manière quelque peu obscure, des erreurs de droit prétendument commises par le Tribunal, il n’en demeure pas moins qu’elle se limite à présenter des arguments d’ordre général voire, parfois, incohérents, sans même exposer les raisons concrètes pour lesquelles de telles erreurs, à les supposer établies, soulèveraient des questions importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union qui justifieraient l’admission du pourvoi.

14      En effet, la requérante se borne, à cet égard, d’une part, à affirmer que ladite interprétation est contraire à la philosophie établie par le traité sur le droit des marques de 1994 et aux directives de l’Union européenne qui s’en inspirent, et, d’autre part, à invoquer la prétendue double discrimination mentionnée au point précédent de la présente ordonnance, sans fournir plus de précisions à l’appui de ses allégations.

15      Dès lors, force est de constater que la requérante n’a pas respecté les exigences énoncées au point 11 de la présente ordonnance.

16      Dans ces conditions, il convient de constater que la demande présentée par la requérante n’est pas de nature à établir que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

17      Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de ne pas admettre le pourvoi.

 Sur les dépens

18      Aux termes de l’article 137 du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance.

19      La présente ordonnance étant adoptée avant que le pourvoi n’ait été signifié aux autres parties à la procédure et, par conséquent, avant que celles-ci n’aient pu exposer des dépens, il convient de décider que la requérante supportera ses propres dépens.

Par ces motifs, la Cour (chambre d’admission des pourvois) ordonne :

1)      Le pourvoi n’est pas admis.

2)      Sattvica SA supporte ses propres dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : l’espagnol.